MILIEUX DE CULTURE BACTÉRIOLOGIQUE

Enquêtes


MILIEUX DE CULTURE BACTÉRIOLOGIQUE ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DES ÉTATS-UNIS D’AMÉRIQUE ET PRODUITS PAR OU POUR LE COMPTE DE BECTON DICKINSON AND COMPANY OU PRODUITS PAR OU POUR LE COMPTE DE DIFCO LABORATORIES, LEURS SUCCESSEURS ET AYANT DROITS RESPECTIFS, ET DE MILIEUX DE CULTURE BACTÉRIOLOGIQUE ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DU ROYAUME-UNI ET PRODUITS PAR OU POUR LE COMPTE DE UNIPATH LIMITED, SES SUCCESSEURS ET AYANT DROITS
Renvoi no : RE-95-003

TABLE DES MATIERES


Ottawa, le lundi 27 novembre 1995

EU ÉGARD À un renvoi fait, aux termes de l’alinéa 34(1)b) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, par les sociétés Becton Dickinson and Company, un exportateur, et Becton Dickinson Canada Inc., un importateur, au Tribunal canadien du commerce extérieur;

ET EU ÉGARD À un avis donné par le Tribunal canadien du commerce extérieur aux termes de l’article 37 de la Loi sur les mesures spéciales d’importation;

AU SUJET DU dumping au Canada de milieux de culture bactériologique originaires ou exportés des États-Unis d’Amérique et produits par ou pour le compte de Becton Dickinson and Company ou produits par ou pour le compte de Difco Laboratories, leurs successeurs et ayant droits respectifs, et de milieux de culture bactériologique originaires ou exportés du Royaume-Uni et produits par ou pour le compte de Unipath Limited, ses successeurs et ayant droits.

A V I S

Le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut par la présente que les éléments de preuve déposés auprès du sous-ministre du Revenu national indiquent, de façon raisonnable, que le dumping de milieux de culture bactériologique originaires ou exportés des États-Unis d’Amérique et produits par ou pour le compte de Becton Dickinson and Company ou produits par ou pour le compte de Difco Laboratories, leurs successeurs et ayant droits respectifs, et de milieux de culture bactériologique originaires ou exportés du Royaume-Uni et produits par ou pour le compte de Unipath Limited, ses successeurs et ayant droits, a causé un dommage sensible ou menace de causer un dommage sensible à la branche de production nationale.

Lyle M. Russell
_________________________ Lyle M. Russell
Membre présidant


Arthur B. Trudeau
_________________________ Arthur B. Trudeau
Membre


Robert C. Coates, c.r.
_________________________ Robert C. Coates, c.r.
Membre


Michel P. Granger
_________________________ Michel P. Granger
Secrétaire

Renvoi no : RE-95-003

Date de l’avis : Le 27 novembre 1995

Membres du Tribunal : Lyle M. Russell, membre présidant
Arthur B. Trudeau, membre
Robert C. Coates, c.r., membre

Directeur de la recherche : Sandy Greig
Gestionnaire de la recherche : Douglas Cuffley

Avocat pour le Tribunal : Joël J. Robichaud

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le 29 septembre 1995, le sous-ministre du Revenu national (le Sous-ministre), saisi d’un dossier complet soumis par Les Laboratoires Quélab Inc. (Quélab), a ouvert une enquête sur le présumé dumping dommageable au Canada de milieux de culture bactériologique originaires ou exportés des États-Unis d’Amérique et produits par ou pour le compte de Becton Dickinson and Company ou produits par ou pour le compte de Difco Laboratories, leurs successeurs et ayant droits respectifs, et de milieux de culture bactériologique originaires ou exportés du Royaume-Uni et produits par ou pour le compte de Unipath Limited, ses successeurs et ayant droits (les marchandises en question). Le Sous-ministre était d’avis que les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le présumé «dumping a causé et menace de causer un dommage à la production de marchandises similaires au Canada [1] ».

Le 27 octobre 1995, l’avocat de Becton Dickinson and Company et de Becton Dickinson Canada Inc. a saisi le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes de l’alinéa 34(1)b) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation [2] (la LMSI), de la question de savoir si les éléments de preuve déposés auprès du Sous-ministre indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping des marchandises en question avait causé un dommage ou un retard ou menaçait de causer un dommage.

Aux termes de l’alinéa 37b) de la LMSI, le Tribunal doit donner son avis sur la question, sans audience, en se fondant sur les renseignements dont disposait le Sous-ministre pour en arriver à une décision ou conclusion, et dès qu’il en est saisi mais, au plus tard, dans les 30 jours suivant la date où il en est saisi.

Les milieux de culture bactériologique sont des préparations composées de produits chimiques et organiques qui servent à la croissance, à la détection et à l’identification de bactéries. Ils sont principalement utilisés dans les hôpitaux, les laboratoires de microbiologie, les centres de recherche, les cliniques privées et dans les laboratoires de contrôle de la qualité que l’on retrouve dans les industries agro-alimentaire, pharmaceutique et environnementale.

Il existe plus de 800 différents milieux de culture bactériologique. Chaque milieu de culture bactériologique a une composition unique qui varie selon l’usage recherché. La nature et le dosage des ingrédients servant à la préparation de tout milieu de culture bactériologique sont de notoriété publique. Lorsque mélangés, les ingrédients forment un mélange poudreux (forme déshydratée) auquel on ajoute, pour fins d’utilisation, de l’eau ou, dans certains cas, un supplément comme du sang, du sérum ou des antibiotiques (forme préparée), afin d’enrichir ce mélange. Les milieux de culture bactériologique sont vendus soit sous forme «préparée» soit sous forme «déshydratée».

Les milieux de culture bactériologique sous forme déshydratée sont généralement vendus en quantités de 100 g, 125 g, 500 g, 2,5 kg ou 10,0 kg. Les milieux de culture bactériologique sous forme préparée sont généralement vendus dans des petits conteneurs appelés «boîtes de Pétri» qui sont disponibles dans des dimensions de 100 mm ou de 150 mm. Les milieux de culture bactériologique sous forme préparée peuvent également être vendus dans des tubes, des fioles ou des flacons.

Les éléments de preuve dont disposait le Sous-ministre lorsqu’il a décidé d’ouvrir une enquête comprenaient une plainte confidentielle déposée par Quélab, une analyse de cas préparée par les fonctionnaires du ministère du Revenu national (Revenu Canada), une lettre de PML Microbiologicals (PML) de Mississauga (Ontario) à l’appui de la plainte, ainsi que d’autre correspondance entre Revenu Canada et des producteurs canadiens.

Le Tribunal fait remarquer que trois autres sociétés viennent s’ajouter à Quélab et PML à titre de producteurs canadiens : soit Biomedia Unlimited Ltd. (Biomedia) de Toronto (Ontario); Dalynn Laboratory Products (Dalynn) de Calgary (Alberta); et Kelran Microbiologicals (Kelran) de Prince Albert (Saskatchewan), qui a amorcé la production en 1995. Quélab et PML interviennent pour plus de 80 p. 100 de la production canadienne de milieux de culture bactériologique, tandis que le reste de la production va à Biomedia, Dalynn et Kelran.

Le Tribunal constate que le Sous-ministre a évalué, sur la foi des renseignements fournis par Quélab, que les marchandises en question exportées par les trois exportateurs visés faisaient l’objet de marges de dumping importantes, variant entre 39 p. 100 et 81 p. 100.

En se fondant sur d’autres renseignements reçus par Revenu Canada, le Tribunal fait remarquer, en outre, qu’en 1994, le marché canadien estimatif des milieux de culture bactériologique se situait à environ 22 millions de dollars. Les importations des trois exportateurs visés représentaient plus de 50 p. 100 du marché, tandis que les producteurs canadiens détenaient moins de 40 p. 100 du marché. Le reste du marché était détenu par d’autres exportateurs, principalement en provenance des États-Unis. Des prévisions au sujet du marché ou des parts du marché n’étaient pas disponibles pour les autres périodes.

Quélab, dont la production représente plus de 25 p. 100 de l’ensemble de la production canadienne, a présenté des données au sujet du dommage. La production de Quélab de milieux de culture bactériologique sous forme préparée a diminué de plus de 30 p. 100 depuis 1992, tandis que sa production de milieux de culture bactériologique sous forme déshydratée a chuté de plus de 50 p. 100. Quélab soutient que la chute de sa production de milieux de culture bactériologique sous formes préparée et déshydratée et la perte de part du marché ont été causées par les prix sous-évalués des trois exportateurs visés. Quélab utilise présentement moins de 25 p. 100 de sa capacité de production.

Les données sur les ventes de Quélab indiquent, en moyenne, une baisse de 15 p. 100 des ventes de milieux de culture bactériologique, en termes de dollars, pour chacun des quatre derniers exercices. Quélab a soumis des éléments de preuve confidentiels, sous forme de tableaux comparatifs des offres faites par Quélab et par les exportateurs en réponse à des appels d’offres de la part des hôpitaux, des laboratoires et des groupes d’achats, pour démontrer que plusieurs ventes ont été perdues aux importations prétendument sous-évaluées en raison des prix.

En outre, Quélab a été obligée de diminuer ses prix afin de concurrencer les prix prétendument sous-évalués. Les tableaux des offres ainsi que les tableaux des coûts incorporables et des bénéfices montrent l’existence d’une compression et d’une érosion des prix. Dans plusieurs cas, les prix offerts par Quélab et ses prix de vente en 1994 étaient inférieurs à ses coûts de production. Pour certains produits, Quélab a pu augmenter ses prix par suite des augmentations des prix du marché par Becton, mais ces augmentations n’étaient toujours pas suffisantes pour assurer un bénéfice. À cause de la compression et de l’érosion des prix, le rendement financier de Quélab était faible. En 1993 et 1994, le rendement financier de la production de milieux de culture bactériologique était de beaucoup inférieur à celui de ses autres activités. Bien que Quélab n’ait pas présenté un état des résultats distinct pour les milieux de culture bactériologique pour l’exercice 1995, qui s’est terminé le 30 juin 1995, l’état des résultats pour l’ensemble des activités de l’entreprise, dont les milieux de culture bactériologique représentent plus de 50 p. 100, ont montré un fléchissement soutenu et de plus en plus important des bénéfices.

En ce qui a trait à la question de menace de dommage, le Tribunal fait remarquer que les importations des marchandises en question par les trois exportateurs visés ont brusquement augmenté depuis 1992, et se sont accrues de façon plus marquée au cours des premiers six mois de 1995. Ces éléments de preuve concernant les importations croissantes, les faibles prix des marchandises en question sous-évaluées sur le marché et le fléchissement soutenu des bénéfices de Quélab au cours de son dernier exercice indiquent, de façon raisonnable, que le dumping des marchandises en question menace de causer un dommage.

Aux termes de l’article 34 de la LMSI, le Tribunal doit être convaincu qu’il existe une indication raisonnable d’un lien de causalité entre les importations sous-évaluées et le dommage sensible subi par la branche de production nationale. Après avoir examiné les éléments de preuve déposés auprès du Sous-ministre en l’espèce, le Tribunal note une corrélation apparente entre plusieurs des indicateurs de dommage et le dumping des marchandises en question. Il estime que cette corrélation indique, de façon raisonnable, que le dumping a causé et menace de causer un dommage sensible à la branche de production nationale. Ce n’est toutefois qu’en menant une enquête que le Tribunal pourra examiner à fond la relation de causalité, y compris d’autres facteurs, à part le dumping, qui peuvent causer un dommage.

Par conséquent, le Tribunal conclut, conformément à l’article 37 de la LMSI, que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping de milieux de culture bactériologique originaires ou exportés des États-Unis d’Amérique et produits par ou pour le compte de Becton Dickinson and Company ou produits par ou pour le compte de Difco Laboratories, leurs successeurs et ayant droits respectifs, et de milieux de culture bactériologique originaires ou exportés du Royaume-Uni et produits par ou pour le compte de Unipath Limited, ses successeurs et ayant droits, a causé un dommage sensible ou menace de causer un dommage sensible à la branche de production nationale.


1. Ministère du Revenu national, Énoncé des motifs , le 29 septembre 1995 à la p. 8.

2. L.R.C. (1985), ch. S-15, modifiée par L.C. 1994, ch. 47, art. 164.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 20 septembre 1996