TÔLES D'ACIER AU CARBONE ET TÔLES D'ACIER ALLIÉ RÉSISTANT À FAIBLE TENEUR, LAMINÉES À CHAUD

Enquêtes (article 42)


CERTAINES TÔLES D'ACIER AU CARBONE ET CERTAINES TÔLES D'ACIER ALLIÉ RÉSISTANT À FAIBLE TENEUR, LAMINÉES À CHAUD, ORIGINAIRES OU EXPORTÉES DE LA RÉPUBLIQUE DE BULGARIE, DE LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE ET DE LA ROUMANIE
Enquête no NQ-2003-002


TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 9 janvier 2004

Enquête no NQ-2003-002

EU ÉGARD À une enquête, aux termes de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, concernant :

CERTAINES TÔLES D'ACIER AU CARBONE ET CERTAINES TÔLES D'ACIER ALLIÉ RÉSISTANT À FAIBLE TENEUR, LAMINÉES À CHAUD, ORIGINAIRES OU EXPORTÉES DE LA RÉPUBLIQUE DE BULGARIE, DE LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE ET DE LA ROUMANIE

CONCLUSIONS

Le Tribunal canadien du commerce extérieur a procédé à une enquête, aux termes des dispositions de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, afin de déterminer si le dumping au Canada des tôles d'acier au carbone et des tôles d'acier allié résistant à faible teneur, laminées à chaud, n'ayant subi aucun autre complément d'ouvraison que le laminage à chaud, traitées thermiquement ou non, coupées à longueur, d'une largeur variant de 24 pouces (+/-610 mm) à 152 pouces (+/-3 860 mm) inclusivement, et d'une épaisseur variant de 0,187 pouce (+/-4,75 mm) à 5,25 pouces (+/-133 mm) inclusivement, originaires ou exportées de la République de Bulgarie, de la République tchèque et de la Roumanie, à l'exclusion des tôles fabriquées selon les spécifications A515 et A516M/A516 de l'American Society for Testing and Materials (ASTM), nuance 70, d'une épaisseur supérieure à 3,125 pouces (+/-79,3 mm), des larges-plats, des tôles devant servir à la fabrication de tuyaux et des tôles dont la surface présente par intervalle un motif laminé en relief (aussi appelées « tôles de plancher »), a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage à la branche de production nationale.

La présente enquête fait suite à la publication d'une décision provisoire datée du 11 septembre 2003 et d'une décision définitive datée du 9 décembre 2003, rendues par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, selon lesquelles les marchandises susmentionnées ont fait l'objet de dumping et les marges de dumping des marchandises ne sont pas minimales.

Conformément au paragraphe 43(1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut, par les présentes, que le dumping au Canada des marchandises susmentionnées a causé un dommage sensible à la branche de production nationale. Les marchandises qui suivent sont exclues : les tôles d'acier au carbone et les tôles d'acier allié résistant à faible teneur, laminées à chaud, d'une épaisseur supérieure à 4,0 pouces.

Richard Lafontaine
Richard Lafontaine
Membre présidant

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre

James A. Ogilvy
James A. Ogilvy
Membre

Michel P. Granger
Michel P. Granger
Secrétaire

L'exposé des motifs sera publié d'ici 15 jours.

Ottawa, le vendredi 23 janvier 2004

Enquête no NQ-2003-002

CERTAINES TÔLES D'ACIER AU CARBONE ET CERTAINES TÔLES D'ACIER ALLIÉ RÉSISTANT À FAIBLE TENEUR, LAMINÉES À CHAUD, ORIGINAIRES OU EXPORTÉES DE LA RÉPUBLIQUE DE BULGARIE, DE LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE ET DE LA ROUMANIE

DÉCISION

Le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut, par les présentes, que le dumping au Canada des marchandises susmentionnées a causé un dommage sensible à la branche de production nationale. Les marchandises qui suivent sont exclues : les tôles d'acier au carbone et les tôles d'acier allié résistant à faible teneur, laminées à chaud, d'une épaisseur supérieure à 4,0 pouces.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Dates de l'audience :

Du 8 au 10 décembre 2003

Date des conclusions :

Le 9 janvier 2004

Date des motifs :

Le 23 janvier 2004

   

Membres du Tribunal :

Richard Lafontaine, membre présidant

 

Zdenek Kvarda, membre

 

James A. Ogilvy, membre

   

Directeurs de la recherche :

Peter Welsh

 

Réal Roy

   

Recherchiste principal :

Douglas Kemp

   

Économiste :

Eric Futin

   

Préposés aux statistiques :

Lise Lacombe

 

Rhonda Heintzman

   

Conseiller pour le Tribunal :

Roger Nassrallah

   

Greffier adjoint :

Gillian E. Burnett

   

Agent du greffe :

Ingrid Navas

Participants :

 

Ronald C. Cheng

   

Paul D. Conlin

 

pour

Algoma Steel Inc.

     
   

Dalton Albrecht

 

pour

IPSCO Inc.

     
   

Lawrence L. Herman

   

Craig S. Logie

 

pour

Stelco Inc.

     
   

(producteurs nationaux)

     
   

Donald J. Goodwin

   

Evgeny Pavlenko

 

pour

Vitkovice Steel, a.s.

   

Accucut Profile & Grinding Ltd.

   

Acier Wirth, Société générale

   

Les Aciers Transbec (1997) Ltée

   

Russel Metals Inc.

   

Anchor Lamina Inc.

   

Acier Leroux Inc.

   

Border Steel Ltd.

   

Carbon Steel Profiles Limited

     
   

Lubka Voucheva

   

Ambassade de la République de Bulgarie

     
   

(importateurs/exportateur/autres)

Témoins :

Paul LeGendre
Directeur
Centres de service
Algoma Steel Inc.

Mark Mittleman
Directeur
Produits de tôles
Algoma Steel Inc.

   

Derek de Korte
Directeur de produits
Commercialisation et développement de produits
Algoma Steel Inc.

Robert A. Clark
Directeur
Commerce et vérification
Algoma Steel Inc.

   

David J. Halcrow
Vice-président, achats
Russel Metals Inc.

Donald Belch
Directeur - Relations gouvernementales
Stelco Inc.

   

Alan Bromley
Président
Division de la ventes des tôles
Samuel Plate Sales

Jeffery J. Moskaluk
Directeur général - Produits d'acier
IPSCO Ontario Inc.

   

Glenn A. Gilmore
Superviseur des affaires commerciales
IPSCO Inc.

Michal Ba_tinský
Directeur de la commercialisation
Vitkovice Steel, a.s.

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a procédé à une enquête, aux termes des dispositions de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation 1 , afin de déterminer si le dumping au Canada des tôles d'acier au carbone et des tôles d'acier allié résistant à faible teneur, laminées à chaud, n'ayant subi aucun autre complément d'ouvraison que le laminage à chaud, traitées thermiquement ou non, coupées à longueur, d'une largeur variant de 24 pouces (+/-610 mm) à 152 pouces (+/-3 860 mm) inclusivement, et d'une épaisseur variant de 0,187 pouce (+/-4,75 mm) à 5,25 pouces (+/-133 mm) inclusivement, originaires ou exportées de la République de Bulgarie (Bulgarie), de la République tchèque et de la Roumanie, à l'exclusion des tôles fabriquées selon les spécifications A515 et A516M/A516 de l'American Society for Testing & Materials (ASTM), nuance 70, d'une épaisseur supérieure à 3,125 pouces (+/-79,3 mm), des larges-plats, des tôles devant servir à la fabrication de tuyaux et des tôles dont la surface présente par intervalle un motif laminé en relief (aussi appelées « tôles de plancher ») (les marchandises en question), a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage à la branche de production nationale.

Le 13 juin 2003, le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (le commissaire), à la suite d'une plainte déposée par Algoma Steel Inc. (Algoma), a fait ouvrir une enquête afin de déterminer si les importations des marchandises en question faisaient l'objet de dumping. Le 16 juin 2003, aux termes du paragraphe 34(2) de la LMSI, le Tribunal a donné avis aux parties intéressées qu'il avait ouvert une enquête préliminaire de dommage afin de déterminer si les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping des marchandises en question avait causé un dommage sensible ou un retard ou menaçait de causer un dommage sensible à la branche de production nationale. Le 12 août 2003, aux termes du paragraphe 37.1(1), le Tribunal a déterminé que les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping des marchandises en question avait causé un dommage à la branche de production nationale.

Le 11 septembre 2003, le commissaire a rendu une décision provisoire de dumping à l'égard des marchandises en question. Il était convaincu, à la suite de son enquête préliminaire, que les marchandises en question avaient fait l'objet de dumping, que les marges de dumping n'étaient pas minimales et que le volume des marchandises sous-évaluées n'était pas négligeable2 .

Le 12 septembre 2003, le Tribunal a publié un avis d'ouverture d'enquête3 . Dans le cadre de l'enquête, le Tribunal a fait parvenir des questionnaires aux producteurs nationaux, importateurs, acheteurs et producteurs étrangers. En se fondant sur les réponses aux questionnaires et d'autres sources, le personnel de la recherche du Tribunal a préparé des rapports public et protégé préalables à l'audience.

Le 9 décembre 2003, le commissaire a rendu une décision définitive selon laquelle les marchandises en question avaient fait l'objet de dumping et les marges de dumping n'étaient pas minimales4 .

Une audience avec témoignages publics et à huis clos a été tenue à Ottawa (Ontario) du 8 au 10 décembre 2003. Les producteurs nationaux, Algoma, Stelco Inc. (Stelco) et IPSCO Inc. (IPSCO), ont présenté des exposés et ont été représentés par des conseillers à l'audience. Un exportateur, Vitkovice Steel, a.s. (Vitkovice), et les importateurs et utilisateurs suivants, Acier Wirth, Société générale (Wirth), Accucut Profile & Grinding Ltd. (Accucut), Les Aciers Transbec (1997) Ltée (Transbec), Russel Metals Inc. (Russel), Anchor Lamina Inc. (Anchor Lamina), Acier Leroux Inc. (Leroux), Border Steel Ltd. (Border) et Carbon Steel Profiles Limited (Carbon Steel Profiles), ont aussi présenté des exposés, y compris des demandes d'exclusion de produit, et ont été représentés par des conseillers à l'audience.

Le dossier de la présente enquête comprend toutes les pièces du Tribunal, y compris les réponses publiques et protégées aux questionnaires, les demandes de renseignements et les réponses afférentes, les déclarations des témoins et toutes les pièces déposées par les parties au cours de l'enquête, la transcription de l'audience et le dossier complet de l'enquête préliminaire de dommage. Toutes les pièces publiques ont été mises à la disposition des parties. Seuls les conseillers qui avaient déposé auprès du Tribunal un acte de déclaration et d'engagement en matière de confidentialité ont eu accès aux pièces protégées.

Le Tribunal a rendu ses conclusions le 9 janvier 2004.

RÉSULTATS DE L'ENQUÊTE DU COMMISSAIRE

L'enquête du commissaire portait sur les importations des marchandises en question du 1er avril 2002 au 31 mars 2003. Le commissaire était convaincu que les marchandises en question avaient fait l'objet de dumping et que les marges de dumping n'étaient pas minimales.

L'enquête de dumping a révélé que toutes les marchandises en question dédouanées au Canada durant la période visée par l'enquête du commissaire avaient fait l'objet de dumping selon une marge moyenne pondérée de dumping, exprimée en pourcentage du prix à l'exportation, allant de 52,6 p. 100 à 74,6 p. 100.

PRODUIT

Aux fins de la présente enquête, les marchandises en question sont définies comme suit : tôles d'acier au carbone et tôles d'acier allié résistant à faible teneur, laminées à chaud, n'ayant subi aucun autre complément d'ouvraison que le laminage à chaud, traitées thermiquement ou non, coupées à longueur, d'une largeur variant de 24 pouces (+/-610 mm) à 152 pouces (+/-3 860 mm) inclusivement, et d'une épaisseur variant de 0,187 pouce (+/-4,75 mm) à 5,25 pouces (+/-133 mm) inclusivement, originaires ou exportées de la Bulgarie, de la République tchèque et de la Roumanie, à l'exclusion des tôles fabriquées selon les spécifications A515 et A516M/A516 de l'American Society for Testing & Materials (ASTM), nuance 70, d'une épaisseur supérieure à 3,125 pouces (+/-79,3 mm), des larges-plats, des tôles devant servir à la fabrication de tuyaux et des tôles dont la surface présente par intervalle un motif laminé en relief (aussi appelées « tôles de plancher »).

Procédé de production

Algoma et Stelco produisent de l'acier liquide dans des hauts fourneaux et des convertisseurs basiques à oxygène. IPSCO produit de l'acier liquide par fusion de ferraille dans des fours à arc électriques. Même si certains détails peuvent varier d'une aciérie à une autre, le procédé de production des tôles d'acier au carbone et des tôles d'acier allié résistant à faible teneur, laminées à chaud, (les tôles) à partir d'acier liquide au Canada est essentiellement le même pour tous les producteurs et comprend la production d'une brame, le chauffage de la brame, le décalaminage, le laminage, le dressage, la coupe à dimension, le contrôle et les essais. Les tôles peuvent être traitées thermiquement, ce qui peut comprendre le recuit, la normalisation, la stabilisation, le refroidissement, la trempe ou certaines combinaisons de ces opérations.

Les tôles produites directement sous forme rectangulaire sont désignées par l'expression « tôles fortes ». Les tôles peuvent aussi être produites à partir de tôles enroulées (en bobines) qui sont débobinées et planées puis coupées à longueur.

Applications du produit

Les tôles peuvent être utilisées dans un certain nombre d'applications, mais elles servent principalement à la production de wagons, de réservoirs pour le stockage du pétrole et du gaz, de machines de construction lourde, de matériel agricole, de ponts, de bâtiments industriels, de tours à bureaux et de pièces d'automobiles et de camions, ainsi qu'à la construction et à la réparation des navires.

PRODUCTEURS NATIONAUX

Algoma

Algoma, située à Sault Ste. Marie (Ontario), a été constituée en société le 1er juin 1992 aux termes de la Loi sur les sociétés par actions 5 de l'Ontario, se portant acquéreur de l'actif et d'une partie du passif de la société The Algoma Steel Corporation Limited. Le 29 janvier 2002, elle a fait l'objet d'une réorganisation aux termes de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies 6 et de la Loi sur les sociétés par actions de l'Ontario.

Algoma exploite une importante aciérie à Sault Ste. Marie. Elle est un producteur de fer et d'acier primaire intégré dont la capacité de production annuelle actuelle est d'environ 2,1 millions de tonnes de produits d'acier finis. Elle produit notamment des tôles, des tôles laminées à chaud et à froid, des profilés à larges ailes soudées et des pièces non finies.

IPSCO

IPSCO a été constituée en société en 1956 sous le nom de Prairie Pipe Manufacturing Co. Ltd. et est entrée en exploitation en 1957 après avoir terminé la construction de ses installations de fabrication de tuyaux soudés par résistance électrique à Regina (Saskatchewan). En 1959, elle a acquis l'actif d'Interprovincial Steel Corp. Ltd. et, en 1960, elle a commencé à produire de l'acier laminé, y compris des marchandises similaires.

Depuis lors, IPSCO a accru sa capacité de production au moyen d'acquisitions et de construction d'usines. Elle produit des tôles fortes à son aciérie de Regina. Elle produit des tôles coupées à longueur à Regina, à Surrey (Colombie-Britannique) et à Toronto (Ontario). Ses installations de Toronto sont dotées de la première ligne quarto d'acier recuit nivelé coupé à longueur au Canada. Cette ligne a été conçue pour améliorer la planéité et les propriétés physiques de l'acier et peut produire des tôles à partir de bobines d'une largeur maximale de 96 pouces et d'une épaisseur allant de 0,187 pouce à 0,75 pouce. IPSCO produit aussi d'autres produits d'acier, notamment des fournitures tubulaires pour puits de pétrole, des tuyaux pour canalisation, des tuyaux ordinaires, des éléments de charpente creux, ainsi que des tôles et des feuilles d'acier allié.

Stelco

Stelco a été constituée en société en 1910 sous la raison sociale de Steel Company of Canada Ltd. Elle est une aciérie intégrée qui produit de l'acier laminé, des barres et des tiges, des produits tréfilés et des tuyaux et des tubes. Elle a commencé à produire des tôles en 1941 sur un laminoir à tôles de 110 pouces à Hamilton (Ontario). Ce laminoir a été remplacé en 1965 par un laminoir à tôles de 148 pouces. En avril 2003, Hamilton a cessé l'exploitation de son laminoir à tôles de Hamilton.

IMPORTATEURS ET EXPORTATEURS

À la première étape de l'enquête du commissaire, l'Agence des douanes et du revenu du Canada (l'ADRC) a confirmé que huit entreprises importaient des tôles des pays visés.

Au cours de la période visée par l'enquête du Tribunal (c.-à-d. du 1er janvier 2000 au 30 juin 2003), on peut attribuer à Wirth, Arcelor International Canada, Novosteel Canada, Salzgitter Trade et Ferrostaal Metals une grande partie de l'acier importé des pays visés. De plus, les importations d'IPSCO, de Samuel, de Russel et de CPP Custom Plate & Profiles représentaient une proportion importante des volumes de tôles importées au Canada de pays non visés.

COMMERCIALISATION ET DISTRIBUTION

Les tôles peuvent être vendues directement à des utilisateurs finals ou à des centres de service. Ces centres peuvent les revendre dans les dimensions et nuances standard, ou peuvent offrir des services de découpage sur mesure. La plus grande partie des expéditions de tôles des aciéries canadiennes est vendue à des utilisateurs finals par l'intermédiaire de centres de service. Le reste des expéditions des aciéries canadiennes est vendu directement à des utilisateurs finals.

POSITIONS DES PARTIES

Producteurs nationaux

Les producteurs nationaux ont fait valoir que la production collective de tôles d'Algoma, d'IPSCO et de Stelco représente les marchandises similaires produites au Canada et que, par conséquent, ces trois sociétés constituent la branche de production nationale aux fins de la LMSI. Relativement à la définition du produit, les producteurs nationaux ont renvoyé à certaines enquêtes précédentes du Tribunal portant sur les tôles, à l'appui de leur position selon laquelle les marchandises similaires ont compris, et devraient comprendre en l'espèce, les tôles d'une épaisseur allant jusqu'à 5,25 pouces.

Relativement à la question du cumul, les producteurs nationaux ont prétendu que le Tribunal devrait cumuler l'effet dommageable des tôles sous-évaluées provenant de tous les trois pays visés. Ils ont soutenu que les marchandises en question se livraient concurrence entre elles et qu'Algoma et IPSCO avaient déposé des éléments de preuve clairs qu'elles livraient concurrence aux marchandises similaires et que, de ce fait, l'appréciation de l'effet cumulatif est indiquée en l'espèce. Plus précisément, relativement à la République tchèque, les producteurs nationaux ont prétendu que Vitkovice n'a pas produit d'élément de preuve indiquant que le produit tchèque ne livrait pas concurrence aux autres marchandises en question ou aux marchandises de production nationale.

D'après les producteurs nationaux, le marché canadien continue de subir les effets des importations sous-évaluées à bas prix, qui entraînent un effritement des prix, une compression des prix et la perte de volumes et, par voie de conséquence, une baisse des marges brutes.

Les producteurs nationaux ont soutenu que le Tribunal devrait examiner la période de 1998 à 2003 qui, selon eux, fait ressortir les tendances sur le marché canadien découlant de la prise et de l'annulation de diverses ordonnances antidumping concernant des pays qui ont déjà été ou sont présentement sources de marchandises sous-évaluées, et qui offre donc le contexte indiqué pour la présente enquête.

Les producteurs nationaux ont soutenu que la taille du marché canadien affiche une diminution marquée et que le marché de 2003 sera le plus petit de toute la période de six ans. Ils ont aussi fait valoir que leur part de marché sur cette période a aussi constamment diminué, mais qu'ils ont pu contrer une partie de cette diminution en offrant des rabais. Plus précisément, ils ont soutenu que leur part de marché avait diminué quelque peu en 2001, puis avait affiché une baisse marquée en 2002, tandis que celle des pays visés avait augmenté, passant de 1 p. 100 en 2001 à 8 p. 100 en 2002. Ils ont cependant reconnu que la part de marché des pays visés avait aussi diminué, en 2001, à cause des importations provenant de la République sud-africaine (Afrique du Sud) qui, même si elles étaient frappées par une ordonnance antidumping du Canada, ont bénéficié d'un important congé d'application de la valeur normale en raison des fluctuations de taux de change favorables en 2000 et en 2001.

Les producteurs nationaux ont prétendu que les pays visés ont remplacé les pays précédemment désignés dans le cadre de causes précédentes comme cause principale du dommage sensible porté à la branche de production nationale de 2000 à 2003. En outre, ils ont soutenu que les pays visés et les pays précédemment désignés avaient utilisé des prix de dumping dommageables pour faire des gains de part de marché. Ils ont souligné que, dans Certaines tôles d'acier au carbone 7 , le Tribunal avait indiqué que la valeur en douane des importations en provenance de fournisseurs d'outre-mer autres que les pays désignés, et particulièrement la Bulgarie et la Roumanie, avait été inférieure au prix moyen des producteurs nationaux dans une proportion de 40 p. 100. Ils ont aussi prétendu que les prix des pays visés étaient comparables ou inférieurs aux prix établis par les pays précédemment désignés à la fin de 1999 et au début de 2000, juste après que ces derniers aient quitté le marché par suite des conclusions de dommage du Tribunal.

Les producteurs nationaux ont soutenu que les éléments de preuve corroboraient les témoignages de leurs témoins selon lesquelles ils n'avaient pas pu bénéficier des bienfaits prévus des plus récentes conclusions du Tribunal8 parce que les importateurs s'étaient déjà tournés vers les pays visés et que, par conséquent, ils n'avaient pas pu augmenter leurs prix réduits précédemment à cause de la pression persistante des importations à bas prix. Cependant, en 2002, dans l'espoir que le gouvernement canadien appliquerait des mesures de sauvegarde semblables à celles adoptées aux États-Unis, Algoma, soutient-on, a décidé que l'effritement et la compression des prix des tôles duraient depuis trop longtemps et ne pouvaient être maintenus, et a donc décidé de hausser ses prix. Les producteurs nationaux ont soutenu que cette hausse de prix n'avait été que partiellement appliquée, le volume des importations sous-évaluées provenant des pays visés ayant augmenté subitement, accaparant ainsi une part de marché de 8 p. 100 en 2002.

Relativement à l'établissement des prix des importations, d'après les producteurs nationaux, il ressort des éléments de preuve que, pendant la période pour laquelle le commissaire a conclu que les pays visés avaient fait du dumping et que les marges n'étaient pas minimales, chacun des pays visés, à des moments différents, avait affiché des prix plus bas que ceux des producteurs nationaux et, en fait, avait causé l'effritement et les rabais des prix des producteurs nationaux qui s'étaient ensuivis. Il a aussi été soutenu qu'Algoma et IPSCO n'ont pas pu mettre totalement fin à leur pratique d'offrir des rabais, malgré le retrait de Stelco du marché et la décision provisoire du commissaire, parce que les marchandises sous-évaluées provenant des pays visés, importées au Canada juste avant l'imposition des droits provisoires, demeurent toujours disponibles sur le marché canadien.

Relativement à la question de causalité, les producteurs nationaux ont prétendu que participer à la baisse des prix en utilisant des marchandises importées à des prix de dumping, même sans être le chef de file qui entraîne les prix à la baisse, signifie tout de même causer un dommage à la production nationale9 . Ils ont ajouté qu'il n'est pas nécessaire que le dumping soit la seule cause du dommage pour pouvoir conclure que les pays visés ont causé un dommage sensible à la branche de production nationale. D'après les producteurs nationaux, il est clair dans un tel contexte que les exportations roumaines ont été la cause la plus importante du dommage, mais que les exportations tchèques et bulgares étaient aussi présentes sur le marché et ont également contribué à l'effritement et à la compression des prix subis par les producteurs nationaux. À cet égard, IPSCO a soutenu que le témoignage de ses témoins établissait un lien entre l'offre d'importations sous-évaluées et les prix effrités et comprimés des producteurs nationaux.

Les producteurs nationaux ont aussi prétendu qu'il y a lieu de prendre note que le dommage n'est imputable ni à une récession économique ni à des interruptions de travail, ni à des difficultés à l'usine ni à la fluctuation de la valeur du dollar canadien. Plutôt, le dommage est directement attribuable au volume des importations provenant des pays visés à des marges de dumping élevées, ce qui a causé un effritement important des niveaux des prix nationaux, une compression persistante des prix et des baisses des volumes des ventes, particulièrement à la fin de 2002 et au début de 2003. Dans un tel contexte, les producteurs nationaux ont prétendu que la preuve établit amplement l'existence d'une corrélation directe et immédiate entre le volume accru des importations sous-évaluées et l'effritement des prix, établissant ainsi entre les deux un lien de causalité.

Relativement aux importations en provenance des États-Unis, les producteurs nationaux ont fait observer que, d'après les conclusions du commissaire, ces importations n'ont pas fait l'objet de dumping et que, de toute façon, elles n'ont pas déclenché les baisses, les rabais et l'effritement des prix. Selon eux, les prix des marchandises en provenance des États-Unis n'étaient donc pas la cause du dommage sensible. En outre, les producteurs nationaux ont soutenu que les éléments de preuve au dossier montrent que les marchés des États-Unis et du Canada sont, pour l'essentiel, un même marché. Quant à ses importations en provenance des États-Unis, IPSCO a soutenu que son bureau canadien des ventes vend aux prix qui prévalent sur le marché canadien, en dollars canadiens, et qu'elle choisit ensuite quelle aciérie IPSCO produira les tôles nécessaires. À la lumière de ce qui précède, les producteurs nationaux ont prétendu que les importations en provenance des États-Unis n'ont pas eu d'effet perturbateur.

En ce qui a trait aux importations en provenance de la République tchèque, les producteurs nationaux ont soutenu qu'il ressort des éléments de preuve que près de 50 p. 100 de ces importations étaient composées soit de tôles de mince épaisseur (c.-à-d. moins de 3/8 pouce) ou de tôles épaisses, définies par IPSCO, en l'espèce, comme des tôles d'une épaisseur supérieure à 2 pouces, qui devraient commander un prix majoré selon les éléments de preuve déposés par les témoins. En outre, ils ont soutenu que le prix moyen plus élevé des importations en provenance de la République tchèque était attribuable à la majoration susmentionnée, mais que cette dernière ne reflétait pas pleinement la majoration normalement associée à cette épaisseur de tôle. Dans un tel contexte, Stelco a affirmé que, même si Wirth était une négociante plus astucieuse que ses concurrentes, en ce qui avait trait à l'obtention de bons prix pour ses tôles, elle avait tout de même mis un prix trop bas par rapport aux prix des producteurs nationaux et, de ce fait, causé un dommage.

Relativement à la menace de dommage, les producteurs nationaux ont soutenu que toute menace de dommage doit être appréciée dans le contexte d'un marché canadien très affaibli, le meilleur exemple étant à cet égard l'interruption de l'exploitation du laminoir à tôles de Stelco. Dans ce contexte, elles ont soutenu ce qui suit : 1) le taux de croissance du volume de marchandises sous-évaluées au Canada a été important; 2) les pays visés ont une capacité disponible de production des marchandises en question suffisante, pourraient remplacer un produit par un autre et sont axés sur les exportations; 3) les marchandises en question entrent sur le marché national à des prix susceptibles d'avoir un effet marqué dans le sens d'une baisse ou d'une compression du prix des marchandises similaires; 4) les pays visés tiennent d'importants stocks; 5) l'ampleur de la marge de dumping est suffisamment élevée. Compte tenu de ces facteurs, les producteurs nationaux ont soutenu que les pays visés sont sources d'une menace de dommage imminente.

En ce qui a trait aux demandes d'exclusion de produit, les producteurs nationaux ont soutenu que les conditions qui doivent être satisfaites pour justifier une exclusion de produits ne le sont pas. Le Tribunal dispose d'éléments de preuve substantiels indiquant que les producteurs nationaux ont la capacité de produire des tôles plus épaisses et qu'elles en ont produit et vendu par le passé. Dans un tel contexte, les producteurs nationaux ont renvoyé à la décision rendue par le Tribunal dans Barres d'armature 10 , dans laquelle le Tribunal avait déclaré qu'il n'y a aucune exigence dans la LMSI voulant que la branche de production nationale approvisionne le marché au complet. Ils ont aussi souligné que les tôles plus épaisses sont également disponibles auprès de pays non visés.

Vitkovice

Vitkovice s'est opposée à des conclusions de dommage. Elle a soutenu que l'effet des importations en provenance de la République tchèque ne devrait pas faire l'objet d'un cumul avec celui des importations en provenance de la Bulgarie et de la Roumanie, puisque les importations en provenance de la République tchèque ne livraient pas concurrence à ces dernières au niveau du prix. Dans un tel contexte, elle a soutenu que, pendant presque toute la période visée par l'enquête, le prix des importations provenant de la République tchèque a été établi sur le marché canadien à un niveau supérieur à celui des importations provenant de Bulgarie et de Roumanie et à celui des marchandises domestiques similaires et que les importations provenant de la République tchèque n'ont donc pas causé ou menacé de causer un dommage à la production nationale.

Vitkovice a soutenu que, si le Tribunal cumule l'effet des importations provenant de la République tchèque, il devrait clore cette partie de son enquête au motif que les volumes des importations en provenance de la République tchèque sont négligeables puisque certains volumes ont été réexportés aux États-Unis et n'ont donc pas été introduits sur le marché canadien.

Vitkovice a soutenu qu'il n'y a pas de lien de causalité à une quelconque concurrence de prix entre les producteurs canadiens et les importations en provenance de la République tchèque parce qu'il n'y a pas d'éléments de preuve que les producteurs canadiens ont été contraints de baisser leurs prix pour livrer concurrence aux importations provenant de la République tchèque. En outre, elle a prétendu que, en l'absence d'un tel lien de causalité, on ne peut prétendre que ces importations ont directement ou indirectement comprimé les prix.

Vitkovice a prétendu que le dommage lié au prix était absent à trois niveaux : micro (c.-à-d. le niveau spécifique visé dans les allégations de dommage), intermédiaire (c.-à-d. les tôles de construction A36/W44) et macro (c.-à-d. les prix tchèques par rapport au prix des autres tôles sur le marché). Elle a souligné l'absence totale d'allégations à son sujet par rapport à l'établissement des prix, les offres de produit, la pénétration des importations ou les ventes à quai. Elle a aussi souligné qu'Algoma était le seul producteur national à présenter des allégations visant expressément les importations en provenance de la République tchèque. Elle a prétendu que toute baisse des prix en 2003 était attribuable à la concurrence entre Algoma et IPSCO qui veulent s'attirer les clients qui achetaient traditionnellement de Stelco, avant que cette dernière n'ait été contrainte d'interrompre l'exploitation de son laminoir; toute baisse n'était donc pas causée par les prix des importations provenant de la République tchèque.

Relativement à la menace de dommage, Vitkovice a soutenu que le produit tchèque n'est pas facilement disponible pour exportation au Canada. D'ailleurs, son prix est élevé et ne représente donc pas une menace dans un avenir prévisible.

Parties qui demandent des exclusions

Vitkovice, Wirth, Accucut, Transbec, Russel, Anchor Lamina, Leroux, Border et Carbon Steel Profiles ont demandé des exclusions de produit pour les tôles d'une épaisseur supérieure à 3 pouces au motif de l'absence de production de produits similaires par les producteurs nationaux. Vitkovice a aussi fait valoir qu'il n'y avait pas de preuve de dommage imputable aux ventes de tôles épaisses.

ANALYSE

Aux termes de l'article 42 de la LMSI, le Tribunal est tenu de faire enquête, à l'égard des marchandises faisant l'objet d'une décision provisoire, afin de déterminer si le dumping ou le subventionnement des marchandises en question a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage. Le terme « dommage » est défini au paragraphe 2(1) comme le « dommage sensible causé à une branche de production nationale ». Le dommage et la menace de dommage sont des conclusions distinctes, et le Tribunal n'a pas à rendre de conclusions sur la menace de dommage aux termes du paragraphe 43(1) sauf s'il conclut d'abord qu'il n'y a pas eu de dommage.

Marchandises similaires et catégories de marchandises

Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires », par rapport à toutes les autres marchandises, de la façon suivante :

a) marchandises identiques aux marchandises en cause;

b) à défaut, marchandises dont l'utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

Dans l'examen de la question des marchandises similaires, le Tribunal examine habituellement divers facteurs, y compris les caractéristiques physiques des marchandises (comme leur apparence), leur méthode de fabrication, les caractéristiques du marché (comme le caractère substituable, l'établissement des prix et les circuits de distribution) et la question de savoir si les marchandises de production nationale répondent aux mêmes besoins des clients que les marchandises importées. Aux fins de la présente enquête, le Tribunal est d'avis que la branche de production nationale produit, pour l'essentiel, les mêmes marchandises que les marchandises en question et qu'elle les produit de la même manière. Les tôles de production nationale, pour la majeure partie, livrent concurrence aux marchandises en question, ont les mêmes utilisations finales et peuvent leur être substituées. Le Tribunal conclut donc que les marchandises similaires nationales ont des utilisations et d'autres caractéristiques qui ressemblent de près à celles des marchandises en question et, de ce fait, qu'elles sont des marchandises similaires aux marchandises en question.

Dans le cadre de l'examen de la question de savoir s'il existe une seule catégorie de marchandises ou plusieurs, le Tribunal prend habituellement en considération les mêmes facteurs que les facteurs susmentionnés et les applique aux marchandises similaires. Aux fins de la présente enquête, le Tribunal détermine qu'il n'y a qu'une catégorie de marchandises similaires, au motif que les caractéristiques physiques, les circuits de distribution et les méthodes de fabrication des marchandises se ressemblent beaucoup, même si leurs caractéristiques peuvent varier légèrement à certains égards, comme les dimensions, prix, utilisations finales et applications.

Branche de production nationale

L'expression « branche de production nationale » est définie au paragraphe 2(1) de la LMSI en partie ainsi :

« branche de production nationale » Sauf pour l'application de l'article 31 et sous réserve du paragraphe (1.1), l'ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires.

Algoma, Stelco et IPSCO représentent la majorité de la production nationale de marchandises similaires11 . Le Tribunal est donc d'avis qu'elles constituent clairement une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. Par conséquent, aux fins de la présente enquête, le Tribunal examinera l'effet des importations sous-évaluées sur Algoma, Stelco et IPSCO.

Cumul

Aux termes du paragraphe 42(3) de la LMSI, le Tribunal doit, dans le cadre d'une enquête tenue en vertu du paragraphe 42(1), évaluer les effets cumulatifs du dumping ou du subventionnement des marchandises importées au Canada en provenance de plus d'un pays si les conditions suivantes sont remplies :

a) relativement aux importations de marchandises de chacun de ces pays, la marge de dumping ou le montant de subvention n'est pas minimal et [...] le volume des importations n'est pas négligeable;

b) l'évaluation des effets cumulatifs est indiquée compte tenu des conditions de concurrence entre les marchandises, visées par la décision provisoire, importées au Canada en provenance d'un ou de plusieurs de ces pays et :

(i) soit les marchandises, visées par la décision provisoire, importées au Canada en provenance d'un ou de plusieurs autres de ces pays,

(ii) soit les marchandises similaires des producteurs nationaux.

Compte tenu des dispositions pertinentes de la LMSI et à la lumière de la décision définitive de dumping du commissaire, le Tribunal conclut que les marges de dumping relatives aux importations de marchandises de chacun des pays visés ne sont pas minimales12 . La première condition, prévue à l'alinéa 42(3)a), est donc remplie.

L'alinéa 42(3)a) de la LMSI prévoit une autre condition, c.-à-d. que le volume des importations provenant de chacun de ces pays n'est pas négligeable. Le paragraphe 2(1) définit « négligeable » en partie ainsi :

« négligeable » Qualificatif applicable au volume des marchandises sous-évaluées, provenant d'un pays donné, qui est inférieur à un volume représentant trois pour cent de la totalité des marchandises de même description dédouanées au Canada [...] [Italiques ajoutées]

Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit le terme « dédouanement » ainsi :

Autorisation d'enlever des marchandises d'un bureau de douane, d'un entrepôt d'attente, d'un entrepôt de stockage ou d'une boutique hors taxes en vue de leur usage au Canada.

Vitkovice a soutenu que le Tribunal devrait clore son enquête, aux termes du paragraphe 42(4.1) de la LMSI, sur les importations en provenance de la République tchèque, au motif que leur volume était négligeable. Elle a soutenu que, étant donné qu'une partie des importations provenant de la République tchèque a été réexportée aux États-Unis, le volume restant au Canada était inférieur au seuil de la négligibilité de 3 p. 100. Vitkovice a soutenu que l'objet de l'examen dans une enquête de dommage devait être les ventes sur le marché et non les importations réexportées13 . Elle a ajouté que les marchandises réexportées ne livrent pas concurrence aux producteurs canadiens en vue d'une part de marché au Canada14 . À l'appui de son argument, elle a renvoyé aux règles régissant le drawback sur les droits au Canada et a soutenu qu'il faut interpréter le fait que les droits antidumping sont remboursables lorsque les importations sous-évaluées sont exportées du Canada comme signifiant que ces importations ne causent pas un dommage à la production nationale. Elle a de plus fait valoir que la décision du Tribunal concernant les importations provenant de l'Arabie saoudite dans Feuillards et tôles laminés à chaud 15 appuie l'argument de Vitkovice selon lequel les importations doivent livrer concurrence à la production canadienne pour causer un dommage.

Le Tribunal n'est pas convaincu par l'argument de Vitkovice sur ce point. Premièrement, on peut établir une distinction claire entre les importations provenant de l'Arabie saoudite visées dans Feuillards et tôle laminés à chaud et les importations courantes provenant de la République tchèque. Les importations provenant de la République tchèque ont, en fait, été dédouanées au Canada, tandis que les importations provenant de l'Arabie saoudite ne l'avaient pas été16 . Dans ce contexte, le Tribunal a déclaré ce qui suit dans Feuillards et tôles laminés à chaud :

Le Tribunal fait observer que le volume des marchandises sous-évaluées en provenance de l'Arabie saoudite recensé par le commissaire se rapporte à des marchandises en question, au sujet desquelles le commissaire a déterminé qu'elles avaient été vendues à un importateur canadien durant la période visée par l'enquête du commissaire, mais non dédouanées au Canada durant ladite période 17 . [Italiques ajoutées]

De plus, la présente enquête fait ressortir des éléments de preuve clairs que les importations provenant de la République tchèque ont livré concurrence aux marchandises similaires nationales, tandis que, dans Feuillards et tôles laminés à chaud, le Tribunal a conclu ce qui suit :

aucun élément de preuve n'indique que les marchandises en question en provenance de l'Arabie saoudite ont jamais vraiment livré concurrence au Canada aux marchandises en question en provenance des autres pays en question ou avec les marchandises similaires des producteurs nationaux. Par le passé, l'Arabie saoudite n'a pas été présente sur le marché canadien des marchandises en question.18

Le Tribunal conclut que le dédouanement des importations provenant de la République tchèque constituait leur entrée sur le marché, de sorte qu'elles se sont retrouvées en position de livrer concurrence aux marchandises de production nationale et, par conséquent, que le volume des importations réexportées devrait être pris en compte dans la détermination du caractère négligeable des importations.

Dans le calcul du pourcentage pertinent à la question de la négligeabilité, le Tribunal s'appuie habituellement sur les données liées à l'importation qui sont spécifiques à chaque pays et qui proviennent du commissaire, pour le numérateur, et sur des données recueillies dans le cadre de son enquête pour ce qui a trait au volume total des importations au Canada provenant des pays visés et des pays non visés, pour le dénominateur. Pour les raisons dont il a déjà été traité, le Tribunal ne voit pas pourquoi il s'écarterait de sa pratique habituelle et conclut que le volume des marchandises sous-évaluées provenant de chacun des trois pays visés n'est pas négligeable, et que le deuxième critère prévu à l'alinéa 42(3)a) de la LMSI est donc satisfait.

Pour déterminer s'il était indiqué d'évaluer les effets cumulatifs des marchandises en question sur la branche de production nationale, le Tribunal a examiné les conditions de concurrence sur le marché canadien entre les marchandises provenant de chacun des trois pays, et entre ces marchandises et les marchandises similaires.

Dans le cadre de l'examen des conditions de concurrence entre ces marchandises, le Tribunal tient habituellement compte des facteurs suivants : la mesure dans laquelle les marchandises en question provenant de chacun des pays visés sont interchangeables avec les marchandises provenant des autres pays visés; la présence ou l'absence de ventes ou d'offres de vente sur les mêmes marchés géographiques des importations des différents pays visés et des marchandises similaires nationales; l'existence de circuits de distribution communs ou semblables; les différences dans le moment de l'arrivée des importations provenant d'un pays visé et les importations provenant des autres pays visés, et la disponibilité des marchandises similaires offertes par la branche de production nationale19 . Comme le Tribunal l'a précédemment déclaré, il pourrait prendre d'autres facteurs en compte pour décider de la question de savoir si les exportations d'un pays donné devraient, ou non, entrer dans le cumul, et aucun facteur n'a à lui seul un poids déterminant dans sa décision20 .

La branche de production nationale a soutenu que le Tribunal devrait évaluer les effets cumulatifs dommageables des tôles sous-évaluées importées de tous les trois pays visés. Renvoyant à la décision que le Tribunal a récemment rendue dans Tôles d'acier au carbone, elle a défini quatre conditions de concurrence qui, à son avis, s'appliquent dans le cas présent : les circuits de distribution; les clients à qui le produit est vendu; le prix auquel il est vendu; le moyen de transport, qui peut avoir une incidence sur la taille des expéditions et les délais de livraison. La branche de production nationale a ajouté que les marchandises en question se livrent manifestement concurrence entre elles et qu'Algoma et IPSCO ont aussi produit des éléments de preuve clairs que ces marchandises livrent concurrence aux marchandises similaires. Pour ces motifs, la branche de production nationale est d'avis que l'évaluation des effets cumulatifs est indiquée en l'espèce.

D'autre part, Vitkovice a soutenu que les effets des importations provenant de la République tchèque ne devraient pas être cumulés avec ceux des importations de l'un ou l'autre des autres pays visés. Dans le même esprit, elle a soutenu qu'il devrait être subséquemment conclu que les marchandises sous-évaluées provenant de la République tchèque ne sont pas dommageables. Elle a fait observer qu'il n'y a pas eu de vente par cargaisons complètes ou à quai des importations provenant de la République tchèque, alors qu'il y en a eu dans le cas des marchandises roumaines. Elle a affirmé que le principal facteur pris en compte dans l'évaluation cumulative des importations provenant des pays visés dans les causes précédentes était que les marchandises provenant de chacun de ces pays se livraient concurrence entre elles au niveau des prix pour capturer une part de marché. Poursuivant son raisonnement, elle a soutenu que ce facteur ne joue pas ici et que le Tribunal ne doit donc pas cumuler les effets des importations provenant de la République tchèque vendues au Canada avec les effets des importations provenant de la Roumanie et de la Bulgarie. Elle a ajouté que le Tribunal ne doit pas cumuler puisque les ventes d'importations provenant de la République tchèque sont négligeables aux termes de la LMSI 21 .

À la lumière des éléments de preuve au dossier, les arguments présentés par la branche de production nationale convainquent le Tribunal et ce dernier détermine que les conditions de concurrence pour les marchandises en question sont semblables à celles pour les marchandises similaires et également semblables entre elles. Dans ce contexte, le Tribunal conclut, eu égard aux circuits de distribution, que les importations des marchandises des pays visés sont principalement, sinon exclusivement, vendues par l'intermédiaire de courtiers ou négociants et que ces circuits de distribution sont donc les mêmes. Quant au mode de transport, le Tribunal conclut qu'il était le même pour toutes les importations en question, toutes les importations arrivant par bateau pour être ensuite réparties en plus petites quantités et vendues. En ce qui a trait à leur prix, le Tribunal conclut que les importations sont principalement constituées de nuances de base, même si leur épaisseur varie, habituellement vendues à un prix moindre que les prix du marché pour la même nuance ou la même épaisseur. Le Tribunal est aussi d'avis qu'il ressort des éléments de preuve, pour l'essentiel, que les marchandises sont interchangeables.

Plus précisément, en ce qui a trait à l'évaluation des conditions de concurrence entre les marchandises en question elles-mêmes, le Tribunal fait observer que, au niveau de la revente, les importations provenant de la République tchèque ne livrent généralement pas concurrence au niveau des prix aux importations provenant de la Roumanie et de la Bulgarie. Cependant, le Tribunal conclut que la valeur unitaire à l'importation des marchandises provenant de la République tchèque ne dépassait pas de façon notable celle des importations provenant des autres pays visés en 2000 et aux premiers semestres de 2002 et de 2003. Étant donné qu'à son avis, les autres conditions de concurrence entre les marchandises en question elles-mêmes sont également semblables, le Tribunal détermine que, compte tenu de l'évaluation des conditions de concurrence, il est indiqué d'évaluer les effets cumulatifs des marchandises en question.

Dommage

L'article 37.1 du Règlement sur les mesures spéciales d'importation 22 prévoit certains facteurs que le Tribunal peut prendre en compte pour décider si le dumping des marchandises a causé un dommage sensible à la branche de production nationale. Ces facteurs comprennent le volume des marchandises sous-évaluées, leur effet sur le prix des marchandises similaires sur le marché national et leur incidence sur la branche de production nationale, y compris toute baisse réelle ou potentielle dans les ventes nationales, la part de marché, les bénéfices et le rendement financier. Le paragraphe 37.1(3) stipule aussi que le Tribunal doit prendre en compte des facteurs autres que le dumping pour veiller à ce que tout dommage causé par ces autres facteurs ne soit pas imputé aux importations sous-évaluées.

Conjoncture du marché et de la branche de production nationale

Le Tribunal fait observer qu'entre 1992 et 2000, les tôles sous-évaluées ont fait l'objet de quatre enquêtes de dumping menées par l'ADRC et son prédécesseur et, par la suite, de quatre enquêtes de dommage menées par le Tribunal23 . Dans chaque cas, à la suite des conclusions de dommage du Tribunal et de l'imposition de droits antidumping, les principaux importateurs se sont tournés vers de nouvelles sources d'approvisionnement.

Dans le cas présent, les importateurs qui, déjà, importaient de pays désignés dans les enquêtes précédentes se sont tournés vers la République tchèque et la Roumanie, deux des pays visés par des conclusions de dommage en 1993, et la Bulgarie en vue de leur approvisionnement en tôles. Suite à l'enquête menée par l'ADRC, ces importations ont fait l'objet de conclusions de dumping au Canada, selon des marges variant de 52,6 p. 100 à 74,6 p. 10024 .

Le Tribunal a étudié l'évolution du marché des tôles au Canada de 2000 à juin 2003. Le tableau qui figure à la page 16 résume les indicateurs clés du marché. Au cours de la période visée par l'enquête du Tribunal, la production nationale de tôles a chuté d'environ 145 000 tonnes, ou presque 21 p. 100, et a continué son mouvement à la baisse au premier semestre de 2003 par rapport au premier semestre de 2002. Le marché national des tôles s'est replié de plus 100 000 tonnes, ou presque 13 p. 100, entre 2000 et 2002, et a poursuivi son mouvement de repli au premier semestre de 200325 . Même si les données recueillies par le Tribunal visaient une période allant jusqu'à juin 2003, le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels la demande de tôles sur le marché canadien en 2003 était à son niveau le plus bas depuis neuf ans26 . Selon les prévisions pour 2004, la faible demande devrait persister dans les secteurs qui utilisent les tôles, comme celui de la construction des navires, de l'industrie minière qui est axée sur les ressources, du secteur forestier et de la production de véhicules tout terrain27 . De plus, étant donné la récente hausse de la valeur du dollar canadien, il y aura recul de la demande des produits finis des fabriquants nationaux qui exportent de tels produits principalement aux États-Unis et, par conséquent, la consommation de tôles de ces fabriquants baissera probablement elle aussi28 .

Sur un marché en rétrécissement, les ventes de la branche de production nationale ont chuté plus rapidement que celles de l'ensemble du marché et, de ce fait, la part de marché de la branche de production nationale a diminué, passant de 73 p. 100 en 2000 à 62 p. 100 en 2002, puis à 59 p. 100 au premier semestre de 2003.

Relativement aux marchandises en question, le volume des importations sous-évaluées a augmenté, passant de moins de 25 000 tonnes en 2000 à plus de 51 000 tonnes en 200229 . Sur un marché en repli constant30 , ces importations sont rapidement devenues un facteur de concurrence important, quadruplant leur part du marché, de 2 p. 100 en 2000 à 8 p. 100 en 200231 . Au premier semestre de 2003, cependant, les importations provenant des pays visés se sont stabilisées, détenant une part de marché de 4 p. 100 comme au premier semestre de 2002, tandis que la part de marché de la branche de production nationale a baissé de 5 points de pourcentage.

Le prix moyen des producteurs nationaux relativement aux ventes à partir de la production nationale a baissé, passant de 617 $ la tonne en 2000 à 558 $ la tonne en 2001, puis est remonté à 613 $ la tonne en 2002. Au premier semestre de 2003, ce prix a augmenté, passant de 568 $ la tonne à 649 $ la tonne32 . Le prix de vente moyen des importations provenant des pays visés a baissé d'environ 10 p. 100 en 2001, passant de 537 $ la tonne à 478 $ la tonne, puis a augmenté à 512 $ la tonne en 2002. Au premier semestre de 2003, le prix moyen des importations en question a augmenté, passant à 538 $ la tonne par rapport à 527 $ la tonne au premier semestre de 2002. Sauf au premier semestre de 2003, les prix moyens des importations non en question dépassaient ceux des marchandises de production nationale et des importations en question. Au premier semestre de 2003, le prix moyen des importations non en question a chuté à 642 $ la tonne, un prix très légèrement inférieur au prix moyen des tôles de production nationale, mais tout de même bien supérieur au prix moyen des importations en question.

Le Tribunal a aussi examiné les changements relatifs dans les données trimestrielles sur les prix en ce qui a trait aux ventes de tôles de construction produites selon la spécification ASTM A36/44W, pendant la période allant du troisième trimestre de 2001 jusqu'au deuxième trimestre de 200333 . La spécification ASTM A36/44W est la spécification la plus répandue pour les tôles de qualité de construction vendues au Canada34 . D'après les éléments de preuve au dossier, l'établissement des prix des nuances de tôles commence, pour l'essentiel, à la nuance A36/44W, le prix des autres nuances représentant une majoration à partir de ce seuil. De plus, selon la branche de production nationale, lorsque les tôles de la nuance A36/44W sont offertes à bas prix, cette offre se répercute sur les prix de toutes les autres nuances et entraîne ces derniers à la baisse35 .

Au cours des huit trimestres recensés dans les données sur les prix, les prix moyens des tôles nationales et des tôles importées produites selon la spécification ASTM A36/44W ont évolué selon des tendances similaires, le prix global des tôles en question étant le plus bas et celui des tôles importées d'autres pays étant le plus élevé. En moyenne, les prix ont augmenté durant la période examinée. Les producteurs ont augmenté leur prix, de 560 $ la tonne au premier trimestre de 2001 à un sommet de 669 $ la tonne au troisième trimestre de 2002, ce prix baissant ensuite à 625 $ la tonne au deuxième trimestre de 2003. Le prix des importations provenant des pays visés a augmenté, passant de moins de 500 $ la tonne à presque 700 $ la tonne, et celui des importations provenant des autres pays a augmenté, passant de 560 $ la tonne à un sommet de 739 $ la tonne au premier trimestre de 2003, avant de se replier jusqu'à 627 $ la tonne au deuxième trimestre de 2003.

Le rendement financier de la branche de production nationale a été négatif durant toute la période visée par l'enquête du Tribunal. Sur un marché des tôles en constante décroissance, la branche de production nationale n'a jamais pu vendre ses tôles à un prix suffisant pour dégager une marge bénéficiaire brute positive. Même au premier semestre de 2003, lorsque les prix unitaires des ventes ont atteint leur sommet pour la période à l'étude, et que les coûts unitaires étaient inférieurs aux coûts unitaires affichés durant une grande partie de la période visée par l'enquête, la marge brute de la branche de production nationale est demeurée négative. En fait, dans une telle conjoncture de recul des prix et des ventes, Stelco a décidé, au premier trimestre de 2003, de suspendre sa production de tôles plutôt que de continuer à les produire et à les vendre à perte.

En résumé, il ressort clairement des éléments de preuve que la situation de la branche de production nationale s'est constamment dégradée, ce qui s'est traduit par la baisse de sa production et de sa part de marché, la compression et l'effritement de ses prix, l'inutilisation de sa capacité et son rendement financier négatif. Le Tribunal doit maintenant déterminer si le dumping est la cause de tout ou partie d'une telle dégradation et, le cas échéant, si les effets du dumping, d'eux-mêmes, constituent un dommage sensible.

Indicateurs clés du marché et du rendement de la branche de production

 

2000

2001

2002

Janv.-juin
2002

Janv.-juin
2003

Production (tonnes)

696 886

670 755

552 334

321 679

272 818

Importations apparentes (tonnes)

         

Pays visés

24 784

22 252

51 556

21 198

15 649

Pays non visés

213 155

227 178

224 818

129 865

141 010

Marché apparent (tonnes)

832 565

817 781

726 095

406 939

360 947

Marché apparent (000 $)

516 362

471 158

454 728

245 440

231 802

Part de marché (volume en %)

         

Branche de production nationale

         

Ventes à partir de la production

73

72

62

64

59

Importations

         

Pays visés

2

1

8

4

4

Pays non visés

25

27

30

31

37

Prix moyens ($/unité) - (marché)

         

Branche de production nationale

         

Ventes à partir de la production

617

558

613

568

649

Importations

         

Pays visés

537

478

512

527

538

Pays non visés

638

628

685

687

642

Capacité pratique des usines (tonnes)

4 686 922

4 835 922

4 932 922

2 471 961

2 501 461

Utilisation de la capacité (%)

         

Certaines tôles

15

14

11

13

11

Autres produits1

60

61

66

66

63

Total

75

75

78

79

73

Données financières - branche de production nationale (% des ventes)

         

Marge brute

(4)

(21)

(9)

(7)

(3)

Bénéfice d'exploitation

(14)

(36)

(16)

(16)

(9)

1. Production au moyen du même équipement.
Source : Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 11A à la p. 117.

Effets du dumping

Dans un tel contexte, la branche de production nationale a soutenu que les volumes croissants des importations sous-évaluées provenant des pays visés lui ont causé un dommage sensible36 . La branche de production nationale soutient que les prix de vente des tôles sous-évaluées entraînent un effritement et une compression de ses prix et que, de ce fait, ses volumes de ventes et son rendement financier global diminuent37 . En outre, la branche de production nationale a soutenu ne pas pouvoir recouvrer ses coûts et faire un bénéfice à cause de l'effritement et de la compression des prix qui ont débuté en 2001 et se sont aggravés en 2002 et au début de 2003, à mesure que les tôles sous-évaluées consolidaient leur position sur le marché national38 . De même, la branche de production nationale a soutenu que ses clients, à cause des offres agressives de tôles importées, sont devenus réticents à constituer des stocks, et les augmentations de prix annoncées se sont heurtées à une résistance considérable39 .

Les producteurs nationaux ont ajouté qu'il existe un lien de causalité clair entre les importations sous-évaluées et leurs pertes de volumes de ventes, la diminution de leur part de marché, l'effritement des prix, la compression persistante des prix et les baisses de profits. Ils ont aussi signalé que le dumping avait nui à leur rendement sur capital investi, leur croissance, leur capacité d'obtenir des fonds, leurs liquidités et leurs salaires40 .

Vitkovice a soutenu que d'autres facteurs, comme la concurrence livrée au sein même de la branche de production et les importations à bas prix en provenance des États-Unis, ont entraîné la baisse de rendement de la branche de production nationale.

Le Tribunal constate que la part de marché détenue par les pays visés a diminué, passant de 2 p. 100 en 2000 à 1 p. 100, en 200141 ; cependant, selon les explications données dans les témoignages, il s'agissait d'une aberration ponctuelle unique imputable en grande partie à une augmentation marquée des importations provenant de l'Afrique du Sud. D'après les éléments de preuve, l'augmentation rapide des importations provenant de l'Afrique du Sud a été causée par les fluctuations particulièrement favorables des taux de change42 . En 2002, à la suite d'une nouvelle enquête de l'ADRC et de la détermination de valeurs normales considérablement plus élevées dans le cas de l'Afrique du Sud43 , les importations provenant de l'Afrique du Sud ont chuté44 , les importations totales provenant d'autres pays sont revenues à leur niveau de 200045 , et les pays visés ont considérablement augmenté leur part de marché46 .

Le Tribunal reconnaît que la demande de tôles est très sensible aux prix et que quelques milliers de tonnes de tôles sous-évaluées peuvent influer sur les prix des tôles à la grandeur du marché national47 . Les tôles sont un produit de base et, si elles ont les mêmes spécifications, les tôles produites dans les aciéries nationales ne peuvent être distinguées physiquement des tôles importées, toutes ces tôles étant entièrement interchangeables. Dans de telles circonstance, le Tribunal est conscient que le prix est le facteur prépondérant dans la décision d'achat48 .

Un témoin d'un grand centre de service a déclaré que les offres de tôles à des prix de dumping faites par les aciéries étrangères aux centres de service canadiens sont habituellement transmises aux clients de ces centres, ce qui a pour effet d'entraîner un effritement des prix sur le marché canadien et la dévaluation des stocks en place49 . Se reportant à une situation particulière survenue en 2002, alors que les importations sous-évaluées ont été offertes sur le marché à un prix inférieur au prix que son entreprise versait à un producteur national, le témoin a souligné que de telles offres ont contribué et continuent à contribuer à l'obtention par son entreprise de prix à rabais pour les tôles qu'elle achète au producteur national50 .

Un témoin des producteurs nationaux a corroboré la déclaration ci-dessus. Selon ce témoin, les offres de marchandises à des prix de dumping perturbent le marché51 . En 2001, son entreprise a mis en _uvre d'importantes réductions de prix pour ses tôles, s'alignant sur les prix des importations sous-évaluées, en baisse rapide52 . Dans la première partie de 2002, la branche de production nationale a d'abord réussi à augmenter ses prix, qui se sont stabilisés au troisième trimestre de 2002, atteignant leur point le plus élevé depuis 1998. Au quatrième trimestre de 2002, cependant, les prix ont recommencé à s'effriter, tant en réaction à l'arrivée de cargaisons complètes des tôles en question qu'à la constitution d'un surplus de stocks en prévision d'une croissance du marché53 .

De même, d'après un témoignage entendu par le Tribunal, un producteur a augmenté ses prix affichés entre septembre 2002 et juillet 2002, à des niveaux qui rendaient presque rentables ses ventes de tôles de construction standard selon la spécification A36/44W54 . Cependant, parce que les marchandises sous-évaluées en question étaient disponibles sur le marché au deuxième semestre de 2002, le client de cette entreprise a refusé d'acheter les tôles aux niveaux plus élevés des prix publiés, et il y a eu effritement de ses prix55 .

Même si la branche de production nationale a annoncé des augmentations de prix en 2003, il n'est pas encore certain que ces augmentations pourront être maintenues. Sur un marché où la demande est demeurée stagnante, l'incidence de forts volumes de marchandises sous-évaluées importées à de très bas prix en 2002 a contraint la branche de production nationale à maintenir ses bas prix pour empêcher les marchandises en question d'entrer au Canada56 .

De l'avis du Tribunal, il est clair que la branche de production nationale devait augmenter ses prix pour absorber ses coûts. Cependant, tous ses efforts en ce sens ont été entravés par la présence de tôles sous-évaluées sur le marché. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal est d'avis que, sans les prix de dumping sur le marché, Algoma, IPSCO et Stelco auraient touché des recettes passablement plus élevées, ce qui aurait considérablement réduit les pertes d'exploitation de la branche de production nationale.

Le Tribunal fait observer qu'en 2002, lorsque la part de marché détenue par les importations en question s'est accrue de façon marquée, pour atteindre 8 p. 100 du marché, les prix moyens ont également augmenté sur le marché. Toutefois, l'augmentation des prix n'a pas été répartie de manière uniforme. Tandis que la branche de production nationale augmentait ses prix d'environ 10 p. 100, et que les prix des importations provenant d'autres pays augmentaient de 9 p. 100, les prix des importations provenant des pays visés n'ont augmenté que de 7 p. 100, devenant ainsi relativement plus bas que les prix tant des tôles de production nationale que des tôles importées d'autres pays, et particulièrement des États-Unis57 . Le Tribunal est d'avis que l'augmentation rapide de la part de marché détenue par les marchandises en question a été réalisée au moyen de la vente des tôles sous-évaluées à des prix considérablement inférieurs aux prix obtenus soit par les producteurs nationaux soit par les importateurs de tôles provenant d'autres pays58 .

En outre, il ressort de l'examen qu'a fait le Tribunal des prix trimestriels des tôles de construction selon la spécification A36/44W que les prix ont, en moyenne, augmenté dans le cas des tôles de production nationale et des tôles importées des pays visés et d'autres pays59 . Cependant, les tôles importées des pays non visés ont constamment été vendues aux prix moyens les plus élevés, tandis que les marchandises en question l'ont été aux prix moyens les plus bas. Les tôles de la branche de production nationale se sont vendues à des prix qui étaient généralement inférieurs à ceux des tôles importées des pays non visés dans la présente enquête, mais considérablement supérieurs au prix des tôles importées des pays visés.

Le Tribunal fait également observer que, parallèlement aux volumes croissants de tôles importées des pays visés, un volume considérable et croissant de tôles provenant des États-Unis est entré sur le marché canadien. Deux des principaux importateurs de tôles provenant des États-Unis, IPSCO et Samuel Plate Sales (Samuel)60 , étaient présents à l'audience et ont produit des éléments de preuve relativement à l'augmentation des importations provenant des États-Unis. Le Tribunal a entendu un témoignage selon lequel IPSCO considère le marché nord-américain comme un marché intégré61 . D'après les éléments de preuve, IPSCO optimise sa production de tôles en Amérique du Nord en répondant à une commande canadienne de tôles à partir de l'une ou l'autre de ses installations aux États-Unis ou de ses quatre installations canadiennes62 . Indépendamment de la source de l'acier, l'acheteur paie le prix qui a cours au Canada pour le produit63 . De plus, le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels, même si les tôles fabriquées aux États-Unis sont présentes en volumes importants sur le marché canadien, elles n'ont pas pour effet de déstabiliser ou de perturber le marché en ce sens que les prix des produits des États-Unis sont, en moyenne, égaux ou supérieurs aux prix du marché canadien et ne contribuent pas à la compression des prix sur ce marché64 .

Relativement aux tôles importées par Samuel, il a été déposé devant le Tribunal que, jusqu'à récemment, Samuel importait certaines tôles des États-Unis, mais achetait à des sources nationales, soit IPSCO et Stelco, la plupart des tôles dont elle avait besoin. D'après les éléments de preuve, Stelco a été le fournisseur d'environ 50 p. 100 des achats globaux de Samuel65 . Lorsque Stelco a interrompu l'exploitation de son usine en 2003, Samuel a été contrainte de se tourner vers les États-Unis pour combler la pénurie qui s'est ensuivie66 . Les éléments de preuve établissent aussi que le prix du principal type de tôles importées par Samuel des États-Unis était généralement supérieur au prix canadien67 et nettement plus élevé que le prix des tôles provenant des pays visés68 .

Selon le Tribunal, la preuve produite dans la présente enquête relativement aux importations de tôles provenant des États-Unis porte fortement à conclure que ces importations se livrent concurrence sur le marché d'une manière très semblable à celle de la concurrence que se livrent les producteurs nationaux entre eux. En fait, les tôles importées par IPSCO au Canada en provenance d'IPSCO aux États-Unis livrent concurrence exactement sur la même base que les tôles que produit IPSCO au Canada.

À la lumière des éléments de preuve et des témoignages susmentionnés, le Tribunal est d'avis que les importants volumes et les très bas prix des tôles sous-évaluées provenant de la Bulgarie, de la République tchèque et de la Roumanie ont causé un dommage sensible aux producteurs nationaux sous forme d'effritement des prix, de compression des prix et de baisse de rentabilité. Il est d'avis que les très bas prix associés aux marchandises sous-évaluées en question ont entraîné les prix moyens des tôles à la baisse, jusqu'à des seuils qui ne permettaient pas aux producteurs nationaux d'absorber leurs coûts. Même si les producteurs nationaux ont pu augmenter leurs prix, les prix des marchandises sous-évaluées ont empêché que les prix augmentent davantage, et les producteurs n'ont pas pu, de ce fait, vendre leurs tôles à profit.

Le Tribunal a ensuite examiné les effets d'autres facteurs pour veiller à ne pas imputer aux importations sous-évaluées tout dommage causé par ces autres facteurs.

Autres facteurs

Dans le cadre de son examen d'autres facteurs qui auraient pu influer sur le rendement de la branche de production nationale, le Tribunal a examiné l'incidence des prix mondiaux, la conjoncture du marché national et les relations producteur-client.

Prix mondiaux

Le Tribunal est conscient que les tendances des prix mondiaux peuvent avoir une incidence sur les prix intérieurs dans d'autres pays, mais la corrélation n'est jamais parfaite69 . En fait, les éléments de preuve montrent que le prix au comptant de ventes individuelles peut parfois être jusqu'à 100 $ la tonne inférieur au prix au comptant national et, en d'autres occasions, lui être égal ou supérieur. À cet égard, le Tribunal est d'avis que les prix nationaux ne sont pas complètement à l'abri de l'influence des prix mondiaux et reconnaît qu'une partie de la baisse des prix constatée durant la période visée par l'enquête peut être attribuable à la fluctuation des prix mondiaux.

Conjoncture du marché national

Il est manifeste que la demande a chuté sur le marché national des tôles au cours des trois dernières années et que la taille de ce marché en 2003, exprimée en volume, était la plus faible depuis neuf ans70 . D'après les témoignages entendus par le Tribunal, le secteur des tôles stagne et, d'après les prévisions, il y aura fléchissement des principaux secteurs consommateurs de tôles en 2004. Selon le Tribunal, une partie du dommage porté à la branche de production nationale est vraisemblablement imputable à la conjoncture du marché national.

Relations producteur-client

Des témoins ont déclaré devant le Tribunal que la branche de production nationale a peut-être renoncé à une partie de son chiffre d'affaires par suite de l'interruption de production du laminoir à tôles de Stelco71 . Samuel, une grande utilisatrice de tôles, a constaté qu'elle devait se tourner vers les États-Unis pour remplacer les tôles qu'elle achetait antérieurement à Stelco72 parce que, à son avis, les niveaux de production d'Algoma et les relations entre cette dernière et ses clients l'empêchaient d'être un fournisseur viable73 . En outre, à cette époque, Stelco était le seul producteur national à fournir des tôles d'une épaisseur supérieure à 3 pouces et, en l'absence de telles tôles de Stelco, les acheteurs devaient se tourner vers les États-Unis ou d'autres sources outre-mer pour s'approvisionner. Cependant, même si la branche de production nationale peut avoir perdu certaines ventes par suite de l'interruption de production susmentionnée, le Tribunal est d'avis que cette interruption n'explique pas une partie importante du dommage porté avant le printemps de 2003 ou par la suite.

Conclusion

Après avoir examiné les effets des marchandises sous-évaluées et d'autres facteurs sur les producteurs nationaux, le Tribunal conclut que le dumping au Canada des marchandises en question a causé un dommage sensible à la branche de production nationale. Le Tribunal est d'avis que les importations sous-évaluées ont fait d'importants gains en termes de volume des ventes et de part de marché durant la période visée par son enquête, particulièrement en 2002 et au premier semestre de 2003, aux dépens de la branche de production nationale. En 2001, dans un effort visant à concurrencer les marchandises en question, les producteurs nationaux ont baissé leurs prix moyens qui étaient déjà sous le seuil de rentabilité, et ont de ce fait plus que quadruplé leurs pertes en termes de leur marge brute. En 2002 et en 2003, les producteurs nationaux ont pu augmenter leurs prix quelque peu, mais la pression à la baisse constamment exercée par les marchandises en question ne leur a pas permis d'augmenter leurs prix suffisamment pour recouvrer leurs coûts et ils ont continué d'essuyer des pertes financières, et leur part de marché a continué de reculer.

Selon le Tribunal, la diminution constante du volume des ventes de la branche de production nationale et de sa part de marché aux dépens des marchandises sous-évaluées, jointe à la dégradation de son rendement financier, constituent un dommage sensible.

DEMANDES D'EXCLUSION

Vitkovice, Wirth, Accucut, Leroux, Anchor Lamina, Border, Carbon Steel Profiles, Transbec et Russel (collectivement les demandeurs) ont présenté plusieurs demandes d'exclusion de produit au Tribunal. La plupart des demandes concernaient le produit suivant : tôles en acier, laminées à chaud, d'une épaisseur supérieure à 3 pouces, pleinement certifiées aux nuances CSA G40.21-44W, ASTM A36 et AISI C1045 (numéros tarifaires 7208.51.99.93, 7208.51.99.94 et 7208.51.99.95). Russel a aussi demandé une exclusion de produit relativement à la spécification A51474 .

La branche de production nationale a fait opposition d'une manière générale à toutes les demandes et a soutenu que le Tribunal ne devait pas les accorder car elle a la capacité de produire et de vendre soit un produit identique soit un produit semblable. Algoma et IPSCO ont toutes deux soutenu ne pas avoir traditionnellement vendu le produit dans des épaisseurs supérieures à 3 pouces parce que le marché avait précédemment été bien servi par Stelco. Elles ont soutenu que, en raison de l'interruption de la production au laminoir à tôles de Stelco, elles ont toutes deux accru leur gamme de produits et elles pourront approvisionner le marché. IPSCO a soutenu que, si le Tribunal accorde les demandes d'exclusion, un dommage sera porté à sa production actuelle de marchandises similaires et son expansion sera entravée. Pour sa part, Stelco a fait opposition à presque toutes les demandes, pour des raisons analogues aux raisons avancées par IPSCO et Algoma; toutefois, elle n'a pas fait opposition à la demande concernant la spécification A514 déposée par Russel, puisque cette spécification se rapporte à une nuance d'acier pour les tôles pour appareils à pression que Stelco ne produit pas dans les épaisseurs supérieures à 3 pouces75 .

Les demandeurs ont soutenu que la branche de production nationale ne fabrique pas de tôles d'une épaisseur supérieure à 3 pouces et que, par conséquent, une exclusion de produit devrait être accordée. Ils ont soutenu qu'IPSCO a peut-être la capacité de produire des tôles d'une épaisseur supérieure à 3 pouces, mais choisit de ne pas le faire. Ils ont aussi soutenu qu'aucun élément de preuve ne montre qu'Algoma ait déjà tenté de s'attirer des clients dans le domaine des tôles épaisses et ont dit s'interroger sur la volonté réelle de cette dernière de vendre de telles tôles. Relativement à Stelco, ils ont soutenu que celle-ci, manifestement, ne relancera pas sa production de tôles à moins que les prix sur le marché canadien n'affichent une importante augmentation. Enfin, ils ont fait valoir que les dépositions des témoins d'Algoma et d'IPSCO montrent qu'il n'y a pas de preuve de dommage causé par les ventes de tôles épaisses sur le marché. Ils n'ont pas présenté d'argument précis concernant la spécification A514, c.-à-d. la spécification se rapportant aux tôles pour appareils à pression visée dans la demande d'exclusion de Russel.

Le passage suivant, tiré de sa décision dans Produits plats de tôle laminés à chaud 76 reflète la pratique du Tribunal relativement aux exclusions de produit :

Le Tribunal a déjà accordé des exclusions de produits dans des circonstances extraordinaires, par exemple, lorsque la branche de production nationale ne fabriquait pas le produit spécifique. Le Tribunal examine aussi d'autres facteurs comme celui de savoir s'il existe une production nationale de marchandises qui peuvent remplacer le produit en question ou lui faire concurrence, si la branche de production nationale est un « fournisseur actif » du produit ou si elle le fabrique habituellement. [Notes de bas de page omises]

Par conséquent, une exclusion de produit peut être justifiée si le Tribunal est convaincu que la branche de production nationale ne fabrique pas le produit en cause, ne produit pas de marchandises substituables et n'est pas un « fournisseur actif » du produit en cause.

Relativement à Algoma, le Tribunal est d'avis que cette dernière produira, dans un proche avenir, des tôles d'une épaisseur allant jusqu'à 4 pouces inclusivement77 . Le Tribunal fait observer qu'Algoma produit présentement des tôles d'une épaisseur de 3 pouces et demi dans le cadre d'un essai et que les éléments de preuve et les témoignages indiquent qu'elle n'a pas l'intention de produire de tôles d'une épaisseur supérieure à 4 pouces.

Relativement à IPSCO, le Tribunal est d'avis qu'il ressort des éléments de preuve que cette dernière a déjà produit des tôles d'une épaisseur atteignant 4 pouces, mais qu'elle s'intéresse surtout aux tôles dans la fourchette d'épaisseurs de 3/16 pouce à 3 pouces, même si elle a produit des tôles non similaires d'acier allié à faible teneur, plus dispendieuses, dans des épaisseurs supérieures à 3 pouces. À cet égard, le Tribunal fait observer qu'IPSCO a présentement en main une commande visant la production de tôles d'acier allié d'une épaisseur de 4 ¼ pouces, mais fait observer qu'il s'agit de tôles non similaires, commandées dans le cadre d'un essai, et que les éléments de preuve n'indiquent pas qu'IPSCO a la capacité de produire ce produit en quantité commerciale.

En ce qui a trait à Stelco, le Tribunal est d'avis que cette dernière dispose de la capacité de production de tôles d'une épaisseur supérieure à 3 pouces, mais il fait observer que la conjoncture du marché tant des marchandises similaires que des marchandises non similaires ne devrait vraisemblablement pas changer suffisamment pour décider Stelco à relancer la production à son laminoir à tôles dans un proche avenir.

Le Tribunal constate que, d'après les éléments de preuve, le marché des marchandises non similaires, et particulièrement celui de l'acier en bandes (c.-à-d. des tôles non en question destinées à la production de tuyaux), produit avec le même équipement que celui qui sert à produire les marchandises similaires, n'est pas un marché prometteur aux dires de Stelco. Dans ce contexte, la déposition du témoin de Stelco montre que les projets de pipeline, comme celui du Delta du Mackenzie, ne se concrétisera pas avant un bon nombre d'années.

En ce qui a trait à la conjoncture générale du marché dans l'ensemble du secteur de l'acier, les éléments de preuve établissent l'existence d'une capacité de production excédentaire d'acier d'environ 200 millions de tonnes dans le monde, d'après l'Organisation de coopération et de développement économiques78 . En outre, le Tribunal fait observer que, d'après Algoma, le problème d'excédent de l'offre s'aggravera probablement, étant donné l'offre excédentaire qui prévaut en Amérique du Nord. Autrement dit, il ressort des éléments de preuve que l'offre pour tous les produits de l'acier (c.-à-d. les marchandises similaires et non similaires) dépassera la demande dans le proche avenir.

Le Tribunal fait également observer que, selon Algoma, la demande à l'endroit de produits de tôles en 2004 sera semblable à celle de 2003, cette demande ayant été, comme Algoma l'a rappelé, la plus faible depuis neuf ans. De plus, IPSCO a renvoyé à une prévision contenue dans la publication World Steel Dynamics 79 selon laquelle l'augmentation du prix moyen des tôles d'ici à l'année 2010 ne sera que de 13 $ US, soit de 324 $ US à 337 $ US. De plus, Algoma a indiqué qu'une telle exclusion ne lui causerait pas de dommage.

Le Tribunal fait également observer qu'IPSCO a laissé savoir que l'exclusion de produit, si elle est accordée, pourrait avoir un effet négatif sur la branche de production nationale, en ce que les marchandises exclues pourraient être vendues à un prix inférieur dans le but de maintenir le prix des valeurs normales pour les marchandises en question. Cependant, IPSCO a reconnu ne pas avoir de preuve au dossier pour corroborer son affirmation.

À l'appui de sa position, la branche de production nationale a renvoyé à l'affaire Barres d'armature, dans laquelle le Tribunal n'avait pas accordé les exclusions demandées au motif que la branche de production nationale pouvait fabriquer le produit en cause. La branche de production nationale a souligné que le Tribunal, dans le cadre de cette enquête, avait déclaré qu'il n'y a aucune exigence dans la LMSI que la branche de production nationale réponde à la totalité des besoins du marché. Dans ce contexte, le Tribunal souligne que Barres d'armature peut être distinguée du cas présent du fait que la demande d'exclusion dans Barres d'armature s'appuyait sur l'insuffisance du volume du produit en cause (c.-à-d. des barres d'armature 10M) produit par la branche de production nationale. Dans le cas présent, il ne se produit pas de tôles en question d'une épaisseur supérieure à 4 pouces.

Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal accorde l'exclusion de produit pour les tôles d'une épaisseur supérieure à 4 pouces.

En ce qui a trait à la demande d'exclusion de pays en ce qui concerne la République tchèque, le Tribunal détermine qu'aucune circonstance exceptionnelle ne justifie d'accorder une telle exclusion en l'espèce. Premièrement, comme il en a déjà été discuté, les volumes des importations provenant de la République tchèque dédouanées au Canada ne sont pas négligeables. Deuxièmement, les prix de ces importations sont semblables aux prix des importations provenant des autres pays visés et ces importations livrent concurrence aux marchandises similaires, à des prix de dumping. Troisièmement, Vitkovice n'est pas le seul producteur des tôles en question en République tchèque, et très peu de renseignements ont été déposés relativement au deuxième producteur tchèque, si ce n'est qu'il s'agissait apparemment d'un petit producteur de tôles qui n'exporterait que vers les marchés voisins. Le Tribunal fait de plus observer que l'importateur des tôles en question provenant de la République tchèque n'importe pas exclusivement de ce pays. Le Tribunal est donc convaincu qu'une exclusion de pays n'est pas justifiée pour ce qui est de la République tchèque.

CONCLUSION

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal est d'avis que le dumping au Canada des tôles originaires ou exportées de la Bulgarie, de la République tchèque et de la Roumanie a causé un dommage sensible à la branche de production nationale. Les marchandises qui suivent sont exclues : les tôles d'une épaisseur supérieure à 4 pouces.


1 . L.R.C. 1985, c. S-15 [LMSI].

2 . Agence des douanes et du revenu du Canada, Décision provisoire de dumping et Énoncé des motifs, 11 septembre 2003, pièce du Tribunal NQ-2003-002-01, dossier administratif, vol. 1 à la p. 11.

3 . Gaz. C. 2003.I.2866.

4 . Agence des douanes et du revenu du Canada, Décision définitive de dumping et Énoncé des motifs, 9 décembre 2003, pièce du Tribunal NQ-2003-002-04, dossier administratif, vol. 1 à la p. 70.1.

5 . L.R.O. 1990, c. B-16.

6 . L.R.C. 1985, c. C-36.

7 . Certaines tôles d'acier au carbone laminées à chaud (10 janvier 2003), RR-2001-006 (TCCE).

8 . Certaines tôles d'acier au carbone laminées à chaud (27 janvier 2000), NQ-99-004 (TCCE).

9 . Ibid.

10 . Certaines barres d'armature pour béton (12 janvier 2000), NQ-99-002 (TCCE).

11 . Pre-hearing Staff Report, pièce du Tribunal NQ-2003-002-07A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 20.

12 . Le paragraphe 2(1) de la LMSI défnit « minimale » en partie comme s'entendant « dans le cas de la marge de dumping, d'une marge inférieure à deux pour cent du prix à l'exportation des marchandises ».

13 . Transcription de l'argumentation publique, 10 décembre 2003 à la p. 127.

14 . Ibid.

15 . Certains feuillards et tôles plats en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (17 août 2001), NQ-2001-001 (TCCE).

16 . Les données à l'importation fournies par l'ADRC se rapportent uniquement aux volumes des importations dédouanées. Le paragraphe 22 de la décision définitive de dumping du commissaire se lit ainsi : « L'enquête sur le dumping portait sur toutes les marchandises en question dédouanées au Canada pendant la période visée par l'enquête, soit du 1er avril 2002 au 31 mars 2003. » [Italiques ajoutées]

17 . Certains feuillards et tôles plats en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (17 août 2001), NQ-2001-001, Exposé des motifs à la p. 17 (TCCE).

18 . Ibid. à la p. 21 (TCCE).

19 . Voir Feuillards et tôles laminés à chaud.

20 . Ibid., Exposé des motifs à la p. 18.

21 . Transcription de l'argumentation publique, 10 décembre 2003 à la p. 130.

22 . D.O.R.S./84-927.

23 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A aux pp. 23-24.

24 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-04, dossier administratif, vol. 1 à la p. 70.16.

25 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 34.

26 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 8 décembre 2003 à la p. 16.

27 . Ibid.

28 . Ibid.

29 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 29.

30 . Ibid. à la p. 34.

31 . Ibid. à la p. 35.

32 . Ibid. à la p. 41.

33 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-07A (protégée), dossier administratif, vol. 2.1A à la p. 65.

34 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 18.

35 . Pièce du fabricant A-04, para. 31, dossier administratif, vol. 11.

36 . Ibid., para. 20.

37 . Pièce du fabricant A-02, para. 3, dossier administratif, vol. 11.

38 . Pièce du fabricant B-01, para. 4, dossier administratif, vol. 11.

39 . Pièce du fabricant C-03, para. 10, dossier administratif, vol. 11.

40 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-10.01 (protégée), dossier administratif, vol. 4 à la p. 10; pièce du Tribunal NQ-2003-002-10.02 (protégée), dossier administratif, vol. 4 à la p. 127; pièce du Tribunal NQ-2003-002-10.03 (protégée), dossier administratif, vol. 4A à la p. 8.

41 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 35.

42 . Pièce du fabricant A-04, para. 18, dossier administratif, vol. 11; Transcription de l'audience publique, vol. 1, 8 décembre 2003 à la p. 87.

43 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-43, dossier administratif, vol. 1C à la p. 24.

44 . Ibid. à la p. 164.

45 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 35.

46 . Ibid.

47 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 8 décembre 2003 à la p. 143.

48 . Pièce du fabricant A-08, para. 5, dossier administratif, vol. 11; Transcription de l'audience publique, vol. 1, 8 décembre 2003 à la p. 11.

49 . Pièce du fabricant A-08, para. 6, dossier administratif, vol. 11.

50 . Ibid., para. 11.

51 . Pièce du fabricant C-03, para. 24, dossier administratif, vol. 11.

52 . Ibid., para. 11.

53 . Ibid.

54 . Pièce du fabricant A-05, para. 44, dossier administratif, vol. 11.

55 . Ibid., para. 45.

56 . Pièce du fabricant C-03, para. 13, dossier administratif, vol. 11.

57 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 41.

58 . Ibid. à la p. 117.

59 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-07A (protégée), dossier administratif, vol. 2.1A à la p. 65.

60 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-10.01 (protégée), dossier administratif, vol. 4 à la p. 13; pièce du Tribunal NQ-2003-002-16.05 (protégée), dossier administratif, vol. 6 à la p. 95.

61 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 9 décembre 2003 aux pp. 297-299.

62 . Ibid. à la p. 298.

63 . Ibid. à la p. 280.

64 . Ibid. aux pp. 298-299; pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 41.

65 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 9 décembre 2003 à la p. 243.

66 . Ibid. aux pp. 264-265.

67 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 65.

68 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 9 décembre 2003 à la p. 273.

69 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-38.04, dossier administratif, vol. 1 à la p. 301.

70 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-06A, dossier administratif, vol. 1.1A à la p. 34.

71 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 9 décembre 2003 à la p. 264.

72 . Ibid.

73 . Ibid. à la p. 265.

74 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-36.05, dossier administratif, vol. 1 à la p. 102.

75 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-39.03, dossier administratif, vol. 1 à la p. 256.

76 . Certains produits plats de tôle en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (2 juillet 1999), NQ-98-004, Exposé des motifs à la p. 36 (TCCE).

77 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 8 décembre 2003 à la p. 59.

78 . Ibid. à la p. 23.

79 . Pièce du Tribunal NQ-2003-002-38.04, dossier administratif, vol. 1 à la p. 291.