PLANCHERS LAMINÉS

Enquêtes (article 42)


PLANCHERS LAMINÉS
Enquête no NQ-2004-006

Conclusions rendues
le jeudi 16 juin 2005

Motifs rendus
le jeudi 30 juin 2005


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une enquête aux termes de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation concernant :

LE DUMPING DE PLANCHERS LAMINÉS ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE L'AUTRICHE, DE LA BELGIQUE, DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE, DE LA FRANCE, DE LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D'ALLEMAGNE ET DE LA RÉPUBLIQUE DE POLOGNE ET LE SUBVENTIONNEMENT DE TELS PRODUITS ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE

CONCLUSIONS

Le Tribunal canadien du commerce extérieur a procédé à une enquête, aux termes des dispositions de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, afin de déterminer si le dumping au Canada de planchers laminés d'une épaisseur allant de 5,5 mm à 13 mm (autres que les planchers laminés en bois dur lorsque l'épaisseur du bois dur dépasse 2 mm) originaires ou exportés de l'Autriche, de la Belgique, de la République populaire de Chine, de la France, de la République fédérale d'Allemagne et de la République de Pologne et le subventionnement de tels produits originaires ou exportés de la République populaire de Chine ont causé un dommage ou un retard ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale.

La présente enquête fait suite à la publication d'une décision provisoire datée du 16 février 2005 rendue par le président de l'Agence des services frontaliers du Canada, selon laquelle les produits susmentionnés originaires ou exportés de l'Autriche, de la Belgique, de la République populaire de Chine, de la France, de la République fédérale d'Allemagne et de la République de Pologne ont fait l'objet de dumping et, dans le cas de la République populaire de Chine, les produits susmentionnés ont aussi fait l'objet de subventionnement, et les marges de dumping et le montant de subventionnement pour les produits en provenance des pays en question ne sont pas minimaux. Le 17 mai 2005, le président de l'Agence des services frontaliers du Canada a rendu une décision définitive, selon laquelle les produits susmentionnés originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de la France ont fait l'objet de dumping et, dans le cas de la République populaire de Chine, les produits susmentionnés ont aussi fait l'objet de subventionnement, et les marges de dumping et le montant de subventionnement pour les produits en provenance des pays en question ne sont pas minimaux. De plus, le président de l'Agence des services frontaliers du Canada a clos l'enquête sur le dumping des produits susmentionnés originaires ou exportés de l'Autriche, de la Belgique, de la République fédérale d'Allemagne et de la République de Pologne.

Conformément au paragraphe 43(1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut par les présentes que le dumping au Canada des produits susmentionnés originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de la France et le subventionnement de tels produits originaires ou exportés de la République populaire de Chine ont causé un dommage à la branche de production nationale.

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre présidant

James A. Ogilvy
James A. Ogilvy
Membre

Meriel V. M. Bradford
Meriel V. M. Bradford
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

L'exposé des motifs sera publié d'ici 15 jours.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Dates de l'audience :

Du 18 au 25 mai 2005

   

Membres du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

 

James A. Ogilvy, membre

 

Meriel V. M. Bradford, membre

   

Directeur de la recherche :

Rose Ritcey

   

Agent principal de la recherche :

Roman Cooper

   

Recherchiste :

Rhonda Heintzmann

   

Économiste :

Ihn Ho Uhm

   

Préposé principal aux statistiques :

Lise Lacombe

   

Préposés aux statistiques :

Shawn Jeffrey

 

George Dimitrov

 

Jeremy Leung

 

Rini Roy

   

Conseiller pour le Tribunal :

Roger Nassrallah

   

Greffier adjoint :

Gillian E. Burnett

PARTICIPANTS :

Producteur national

Conseillers/représentants

   

Uniboard Surfaces Inc.

Peter E. Kirby
Vincent Routhier
Catherine Piché

   

Importateurs/Exportateurs/Autres

Conseillers/représentants

   

Matériaux à Bas Prix

Simon V. Potter
Marie-Christine Demers

   

Unilin
Torlys Inc.
Weyerhaeuser Company Limited

Simon V. Potter
Brenda C. Swick
Vanessa T. Gruben

   

Quality Craft Ltd.

John W. Boscariol
Orlando E. Silva
Brad Demone

   

Kronopol Ltd.
Lamwood Products (1990) Limited

Clifford Sosnow
Kenneth S. Purchase
Meghan Gardner
Greg Kanargelidis

   

Vöhringer Wood Products (Shanghai) Co., Ltd.
Asia Dekor Industries (Shenzhen) Co., Ltd.

Paul Lalonde
Rajeev Sharma
Cyndee Todgham Cherniak
Corey MacKinnon
Michelle Wong
Eric J. Jiang

   

Quickstyle Industries Inc.
Kaindl Flooring GmbH
Kronospan Luxembourg

Peter Clark
Chris Hines
Patrick Cuenco
Wallis Stagg

   

Kronotex Fussboden GmbH & Co. KG

Denis Gascon
Richard A. Wagner
Benjamin P. Bedard
Paul D. Conlin
Jason P. T. McKenzie

   

Stevens-Dufour Inc.

Denis Gascon

   

Berry Floor NV

Paul D. Burns
Allan H. Turnbull

   

Alsapan SAS
Espace Production International S.A.

Christopher J. Kent
Martin Goyette

   

Tarkett Inc.

C.J. Michael Flavell
Geoffrey C. Kubrick
Martin G. Masse
Bonnie R. Penfold

   

Balterio SA

Dario Pietrantonio

   

Groupe Novasia Inc.

Pascal Chouinard

   

Isoroy SAS

Jean-Baptiste Laigle

TÉMOINS :

Jules Vallières
Vice-président, projets spéciaux
Uniboard Surfaces Inc.

Jacques Morin
Vice-président et directeur général
Uniboard Surfaces Inc.

   

Guylaine Tremblay
Contrôleur financier

Groupe plancher
Uniboard Surfaces Inc.

Ginette Desjardins
Vice-président, Ventes et marketing

Groupe plancher
Uniboard Surfaces Inc.

   

Blandine Lanoux
Chargée de mission - Amérique du Nord
Espace Production International (EPI) S.A.

Vincent Jehl
Directeur commercial
Alsapan SAS et Espace Production International (EPI) S.A.

   

Peter Phillips
Directeur de produit
Home Hardware Stores Limited

Rob Deline
Vice-président
Quality Craft Ltd.

   

Roger Lemieux
Directeur
Lower Mainland & île de Vancouver
Guardian Building Products Distribution

 

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : (613) 993-3595
Télécopieur : (613) 990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a procédé à une enquête, aux termes de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation 1 , afin de déterminer si le dumping au Canada de planchers laminés d'une épaisseur allant de 5,5 mm à 13 mm (autres que les planchers laminés en bois dur lorsque l'épaisseur du bois dur dépasse 2 mm) originaires ou exportés de l'Autriche, de la Belgique, de la République populaire de Chine (Chine), de la France, de la République fédérale d'Allemagne (Allemagne) et de la République de Pologne (Pologne) et le subventionnement de planchers laminés originaires ou exportés de la Chine ont causé un dommage ou un retard ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale.

2. Le 4 octobre 2004, le président de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), à la suite d'une plainte déposée par Uniboard Surfaces Inc. (Uniboard), de Laval (Québec), a fait ouvrir une enquête afin de déterminer si les importations de planchers laminés originaires ou exportés de l'Autriche, de la Belgique, de la Chine, de la France, de l'Allemagne, du Luxembourg et de la Pologne faisaient l'objet de dumping ou de subventionnement. L'ASFC n'a pas fait ouvrir d'enquête sur le dumping des planchers laminés provenant de l'Espagne, car la quantité vraisemblable de marchandises sous-évaluées provenant de ce pays était considérée comme négligeable. Le 5 octobre 2004, aux termes du paragraphe 34(2) de la LMSI, le Tribunal a donné avis aux parties intéressées qu'il avait ouvert une enquête préliminaire de dommage afin de déterminer si les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement de planchers laminés avaient causé un dommage ou un retard ou menaçaient de causer un dommage à la branche de production nationale.

3. Le 3 décembre 2004, le Tribunal a rendu une décision provisoire de dommage concernant le dumping et le subventionnement des planchers laminés. Dans ses motifs, il a indiqué que la question de savoir s'il devrait y avoir plus d'une catégorie de marchandises méritait d'être examinée davantage.

4. Le 16 février 2005, l'ASFC a rendu une décision provisoire de dumping concernant les planchers laminés en provenance de l'Autriche, de la Belgique, de la Chine, de la France, de l'Allemagne et de la Pologne, ainsi qu'une décision provisoire de subventionnement concernant les planchers laminés en provenance de la Chine. L'ASFC était convaincue, à la suite de cette enquête préliminaire, que les marchandises en question avaient fait l'objet de dumping et de subventionnement, que les marges de dumping et le montant de subvention n'étaient pas minimaux et que le volume des marchandises sous-évaluées et subventionnées n'était pas négligeable. Elle a clos l'enquête sur le dumping eu égard au Luxembourg car le volume des importations sous-évaluées de ce pays était négligeable.

5. Le 17 février 2005, le Tribunal a publié un avis d'ouverture d'enquête2 . La période visée par l'enquête s'étendait sur une période de trois ans, soit du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004. Dans le cadre de l'enquête, le Tribunal a fait parvenir des questionnaires au producteur national, aux importateurs, aux acheteurs et aux producteurs étrangers de planchers laminés. En se fondant sur les réponses aux questionnaires et les renseignements reçus d'autres sources, le personnel de la recherche du Tribunal a préparé des rapports public et protégé préalables à l'audience.

6. Dans son avis d'ouverture d'enquête, le Tribunal a avisé les parties que, afin d'en faciliter la tenue, il rendrait une décision concernant les catégories de marchandises avant l'audience et les a invitées à présenter des observations sur la question. Le 11 avril 2005, il a avisé les parties qu'il procéderait à son analyse de dommage en se fondant sur une seule catégorie de marchandises.

7. Le 17 mai 2005, l'ASFC a rendu une décision définitive selon laquelle les planchers laminés originaires ou exportés de la Chine et de la France avaient fait l'objet de dumping et que les marges de dumping et le montant de subvention n'étaient pas minimaux, ainsi qu'une décision définitive de subventionnement à l'égard des planchers laminés originaires ou exportés de la Chine. Le même jour, conformément à l'alinéa 41(1)b) de la LMSI, l'ASFC a clos l'enquête sur le dumping de planchers laminés originaires ou exportés de l'Autriche, de la Belgique, de l'Allemagne et de la Pologne car les marges de dumping étaient minimales.

8. Une audience avec témoignages publics et à huis clos a été tenue à Ottawa (Ontario) du 18 au 25 mai 2005. Uniboard était représentée par des conseillers à l'audience, a témoigné et a présenté des observations. Alsapan SAS (Alsapan) et Espace Production International S.A., des exportateurs et producteurs étrangers de planchers laminés, et Quality Craft Ltd. (Quality Craft), un importateur de planchers laminés, étaient représentées par des conseillers à l'audience, ont témoigné et ont présenté des observations s'opposant à des conclusions de dommage. Asia Dekor Industries (Shenzhen) Co., Ltd. (Asia Dekor) et Vöhringer Wood Products (Shanghai) Co., Ltd., des producteurs étrangers de planchers laminés, étaient représentées par des conseillers à l'audience et se sont opposées à des conclusions de dommage. Le Tribunal a aussi entendu des dépositions de témoins de Home Hardware Stores Limited (Home Hardware) et de Guardian Building Products Distribution (Guardian), le Tribunal ayant assigné cette dernière à comparaître.

9. Le dossier de la présente enquête comprend toutes les pièces du Tribunal, y compris les parties publiques et protégées du dossier de l'enquête préliminaire de dommage concernant les planchers laminés (PI-2004-003), les réponses publiques et protégées aux questionnaires, les demandes de renseignements et les réponses afférentes, les témoignages et toutes les pièces déposées par les parties au cours de l'enquête et la transcription de l'audience. Toutes les pièces publiques ont été mises à la disposition des parties. Seuls les conseillers qui avaient déposé auprès du Tribunal un acte de déclaration et d'engagement en matière de confidentialité ont eu accès aux pièces protégées.

10. Le Tribunal a rendu ses conclusions le 16 juin 2005.

RÉSULTATS DE L'ENQUÊTE DE L'ASFC

11. L'enquête de l'ASFC portait sur les marchandises en question importées du 1er juillet 2003 au 30 juin 2004.

12. L'ASFC a déterminé que les marges de dumping moyennes pondérées de la Chine et de la France étaient, respectivement, de 7,8 p. 100 et de 7,0 p. 100. L'ASFC n'a pas précisé dans les motifs de sa décision définitive quelle proportion du volume de marchandises provenant de la Chine et de la France avait fait l'objet de dumping. Elle a déterminé que 99,8 p. 100 des planchers laminés provenant de la Chine faisaient l'objet d'une subvention, à un taux moyen de subvention de 3,0 p. 100, soit 1,16 renminbi le mètre carré.

PRODUIT

Définition du produit et renseignements techniques

13. Aux fins de la présente enquête, les marchandises en question sont définies comme étant les planchers laminés d'une épaisseur allant de 5,5 mm à 13 mm (autres que les planchers laminés en bois dur lorsque l'épaisseur du bois dur dépasse 2 mm) originaires ou exportés de la Chine et de la France.

14. Les planchers laminés sont un revêtement de sol rigide composé de plusieurs couches : une couche d'usure ou de recouvrement, une couche décorative, une couche de base - habituellement un panneau de fibres de haute densité (FHD) - et une couche d'équilibrage. Les planchers laminés avec papier comprennent une couche d'usure, une couche décorative et une couche d'équilibrage de papier. Le motif et la couleur qui paraîtront sur le plancher, généralement un dessin de fil de bois ou de carreau céramique, sont imprimés sur la couche décorative. La couche décorative et la couche d'équilibrage dans le cas des planchers laminés avec bois sont une mince couche (p. ex. 0,5 mm) faite de placage en bois véritable, tandis que la couche d'usure est faite de multiples sous-couches de polyuréthanne.

Procédé de production

15. Les machines et le matériel servant à la production des planchers laminés sont généralement fabriqués en Allemagne. Le matériel de production est hautement automatisé et son fonctionnement nécessite un minimum d'employés qualifiés.

16. Même si les étapes peuvent varier d'un producteur à l'autre, la production de planchers laminés avec papier comporte en général les quatre grandes étapes suivantes : le pressage, le refroidissement, la taille et l'usinage. Les panneaux composés des quatre couches de matières premières sont superposés et mis sous presse où ils sont liés par chaleur et par pression. La plaque supérieure de la presse peut avoir une surface texturée qui, par gaufrage, imprime, sur le dessus du plancher, un dessin de fil de bois ou toute autre caractéristique décorative voulue. Une fois les panneaux formés, ils sont refroidis et taillés en planches. Enfin, les quatre arêtes de chaque planche sont usinées pour produire un système de verrouillage par languette et rainure.

17. Une des méthodes de production de planchers laminés avec bois consiste à presser une feuille de placage sur un panneau de FHD avec des colles spéciales. Une deuxième feuille de placage en bois est ensuite posée par pression sous le panneau de FHD. La finition du produit en feuille de placage en bois pressé consiste à appliquer plusieurs couches de polyuréthanne puis de tailler aux dimensions d'un panneau de plancher. Les arêtes des panneaux sont usinées et parfois biseautées.

PRODUCTEUR NATIONAL

18. Uniboard, le seul producteur canadien de planchers laminés, produit uniquement des planchers laminés avec papier à ses installations de Laval (Québec), où elle exploite deux lignes de pressage et une ligne de taille et d'usinage.

19. Uniboard est une filiale à part entière d'Uniboard Canada Inc. (Uniboard Canada), qui est elle-même une filiale à part entière de Kunz Holding Gmbh & Co., d'Allemagne. Uniboard Canada est entrée en exploitation en 1981 et fabrique présentement une gamme de divers produits à partir de ses neuf usines au Canada, trois de ces usines fournissant des intrants ou des services à Uniboard pour la production de planchers laminés : Mont-Laurier (Québec), produit des FHD; Lac-des-Îles (Québec), met les quatre couches de matériaux sous presse pour fabriquer des panneaux non finis, qui sont soit vendus en l'état soit taillés à dimension et usinés en vue de leur vente comme planchers laminés; Drummondville (Québec), imprègne de résine les papiers.

20. En 1995, Uniboard a commencé à produire des planchers laminés à ses installations de Ville Saint-Laurent (Québec). En 2001, elle a déménagé dans ses nouvelles installations de production de Laval, dotées d'un matériel de pointe.

21. Uniboard exporte vers les États-Unis des planchers laminés ainsi que des panneaux non finis de 4 pi x 8 pi et de 5 pi x 8 pi. Depuis 2000, elle importe aussi des planchers laminés de France et d'Allemagne.

IMPORTATEURS ET PRODUCTEURS ÉTRANGERS

22. Le Tribunal a reçu 24 réponses aux questionnaires envoyés à 36 importateurs de planchers laminés. Parmi les 24 répondants, 19 ont dit être des négociants/grossistes/distributeurs et 5, des détaillants/marchands de masse. Tous les importateurs de planchers laminés ont déclaré avoir importé des planchers laminés avec papier, et trois ont également déclaré avoir importé des planchers laminés avec bois.

23. Sauf dans le cas de l'Allemagne, les importations provenant de chacun des pays visés et des pays non visés sont hautement concentrées, le principal, les deux principaux ou les trois principaux importateurs représentant pratiquement la totalité des importations au Canada en provenance de chaque pays.

24. Le Tribunal a reçu 10 réponses aux questionnaires envoyés à 15 producteurs étrangers de planchers laminés. De plus, il a reçu des réponses de 9 producteurs étrangers qui ne figuraient pas sur la liste d'envoi. Au nombre des 19 réponses reçues des producteurs étrangers, 15 ont précisé qu'ils produisent uniquement des planchers laminés avec papier, 1 qu'il produit seulement des planchers laminés avec bois, et 3 qu'ils produisent des planchers laminés avec papier et avec bois .

25. Pour chacun des pays suivants, un seul producteur établi dans le pays pertinent représente la majorité des exportations vers le Canada de planchers laminés : l'Autriche, la Belgique, la France et la Pologne.

DISTRIBUTION DU PRODUIT

26. Les planchers laminés sont vendus sur le marché national par l'entremise de deux principaux circuits de distribution, d'une part les distributeurs nationaux ou régionaux de revêtements de sol et d'autre part les détaillants de revêtements de sol, qui comprennent les centres du bâtiment et de la rénovation (p. ex. Home Depot, Rona), les marchands de masse non spécialisés en rénovation (p. ex. Costco Wholesale Canada Ltd., la Société Canadian Tire Limitée) et les quincailleries et magasins de petite ou moyenne taille spécialisés en décoration.

27. Les distributeurs de revêtements de sol nationaux ou régionaux sont des grossistes qui achètent habituellement en grandes quantités et vendent toute une gamme de produits de revêtement de sol aux détaillants de tels produits. Ils offrent habituellement des accessoires, des ententes de livraison et des lignes de crédit à leurs clients. Normalement, ils vendent les revêtements de sol directement aux détaillants de tels produits, mais en vendent aussi parfois à des distributeurs.

28. Les détaillants comprennent les magasins à grande surface et les plus petits magasins spécialisés. Même si la quantité de leurs achats respectifs peut varier, ces deux types de magasins vendent directement aux utilisateurs finals.

29. Uniboard vend des planchers laminés aux distributeurs de revêtements de sol, aux centres du bâtiment et de la rénovation et aux marchands de masse. Les producteurs étrangers, pour la plupart, vendent leurs planchers laminés au Canada par l'entremise de grossistes-distributeurs. Il arrive parfois que les détaillants, comme des centres de la rénovation et du bâtiment ou des quincailleries ou magasins spécialisés en décoration, s'approvisionnement directement auprès de producteurs étrangers.

POSITION DES PARTIES 3

Partie appuyant des conclusions de dommage

30. Uniboard a soutenu que le dossier du Tribunal renferme une quantité abondante d'éléments de preuve du dommage sensible qui lui a été porté. Elle a soutenu qu'un dommage a été porté à sa production, à ses ventes, à sa part de marché, à ses profits et à l'utilisation de sa capacité.

31. Uniboard a dit que, entre 2001 et 2004, sur un marché canadien en pleine expansion, elle avait été expulsée du marché à cause des marchandises en question. Elle a précisé que le fait d'avoir réussi à dénicher des ventes rentables aux États-Unis était un événement fortuit et qu'elle n'avait pas abandonné le marché canadien, mais s'était plutôt tournée vers celui des États-Unis parce qu'elle subissait d'énormes pertes de part de marché et de marges sur le marché canadien. À cet égard, elle a dit croire que sa part du marché canadien avait atteint 30 p. 100 en 2001, mais avait affiché un repli spectaculaire en 2002 et avait poursuivi sa chute en 2003 et 2004.

32. Uniboard a soutenu que, l'ASFC ayant modifié sa politique sur la « réduction à zéro »4 , le Tribunal devait faire preuve de circonspection avant de tirer des conclusions fondées sur l'enquête de l'ASFC.

33. Uniboard a aussi soutenu qu'il n'existe qu'une seule catégorie de marchandises, comprenant à la fois le produit fait avec du placage de bois et le produit fait avec papier, puisque les marchandises sont fabriquées de la même manière avec des matières premières identiques, que leurs caractéristiques physiques sont similaires et qu'elles répondent aux mêmes besoins, la vaste gamme de caractéristiques expliquant les différences de prix, le cas échéant.

34. En ce qui a trait aux effets cumulatifs, Uniboard a soutenu qu'il y aurait lieu de cumuler l'effet des marchandises en question puisque les conditions de concurrence entre les marchandises en question elles-mêmes et entre ces marchandises et celles des producteurs canadiens sur le marché canadien ne sont pas sensiblement différentes.

35. Au sujet des facteurs liés au dommage, Uniboard a soutenu que le volume des importations provenant des pays visés était « renversant » et qu'il ne faisait aucun doute que le volume des importations en question avait augmenté considérablement, à la fois en chiffres absolus et par rapport à la production ou la consommation des marchandises de production nationale.

36. Uniboard a demandé au Tribunal de tenir compte de la déposition de ses témoins sur l'établissement des prix des marchandises en question et leur incidence sur sa rentabilité. Elle a ajouté que ces témoignages avaient corroboré ses allégations de perte de ventes. Uniboard a soutenu qu'elle avait d'abord tenté de baisser ses prix pour réagir à la pression exercée au niveau des prix sur le marché, mais qu'elle avait quand même perdu un certain volume de ventes à cause de l'offre apparemment inépuisable de marchandises en question.

37. Dans le cadre de la prise en considération de l'incidence des marchandises en question sur la situation de la branche de production nationale, Uniboard a soutenu que le fait qu'elle exploitait ses installations à leur pleine capacité ne signifiait pas que sa situation était saine parce qu'elle était assujettie à un impératif de production l'empêchant de les exploiter à un seuil inférieur à celui de la pleine capacité. Au sujet des autres indicateurs de dommage, et plus précisément du point de vue des ventes, de la part de marché, du taux de rendement de l'investissement, des prix et des profits, Uniboard a soutenu que le Tribunal devrait tirer une comparaison entre les valeurs des indicateurs au Canada et aux États-Unis et que les écarts étaient attribuables à la présence de volumes énormes de marchandises en question sur le marché canadien.

38. Uniboard a soutenu qu'il existe un lien de causalité très net entre les marchandises en question et le dommage qu'elle a subi. Elle a ajouté que l'investissement dans sa deuxième ligne de taille et d'usinage à ses installations de Laval avait été interrompu car la conjoncture du marché ne pouvait le justifier, en raison de la pression exercée au niveau des prix par les marchandises en question.

39. En ce qui a trait aux « autres facteurs » qui pourraient être à l'origine du dommage subi par la branche de production nationale, Uniboard a soutenu que, même si elle avait déposé des allégations de perte de ventes visant des pays qui, d'après la détermination subséquente de l'ASFC, ne pratiquent pas le dumping, le volume et les prix des importations non sous-évaluées n'étaient pas la source du dommage qui lui a été porté, et que, plutôt, les « fauteurs de trouble » sur le marché étaient les produits chinois et les produits français. Elle a soutenu que les autres facteurs prescrits, et plus précisément la contraction de la demande pour les marchandises similaires nationales, les progrès technologiques, la qualité du produit, l'offre du produit et sa présence sur le marché national, n'étaient pas pertinents en l'espèce. Au sujet de son rendement à l'exportation, Uniboard a soutenu que le Tribunal ne devait prendre en considération que la question de savoir si son rendement sur le marché des États-Unis était la cause du dommage qu'elle a subi et qu'il ne devait pas mesurer ses profits aux États-Unis par rapport à ses profits au Canada. Au sujet des ventes de produits de qualité inférieure5 , Uniboard a fait valoir que ces produits représentent une proportion très faible de son chiffre d'affaires global. Toutefois, ses ventes de produits de qualité inférieure représentent une proportion plus grande de ses ventes canadiennes. Uniboard a soutenu qu'on ne peut reconnaître que de telles ventes sont d'un produit Uniboard et qu'elles sont faites à des entreprises qui se spécialisent en produits de qualité inférieure et qu'elles n'ont donc pas d'incidence sur les niveaux des prix du marché des planchers laminés ordinaires. Elle a également fait valoir que l'augmentation de la proportion de son volume de ventes au Canada constituée de produits de qualité inférieure reflète un marché décimé par les importations à bas prix, ce qui ne lui a pas laissé d'autre choix, puisqu'elle avait décidé de ne pas baisser ses prix jusqu'à des seuils insoutenables, que celui de vendre des produits de qualité inférieure aussi près que possible de leur lieu de production.

40. En ce qui a trait à la menace de dommage, Uniboard a soutenu que la situation dommageable qu'elle a vécue par le passé se poursuivrait manifestement à l'avenir. Elle a soutenu que le Tribunal devrait tenir compte de la nature de son activité commerciale, de la fragilité de l'entreprise et de l'augmentation spectaculaire du volume des marchandises en question.

41. Au sujet de l'importation massive, Uniboard a soutenu que les conditions sous-tendant de telles conclusions concernant la Chine étaient satisfaites en l'espèce. D'après elle, il ressort des éléments de preuve qu'il y a eu une augmentation considérable du volume des importations provenant de la Chine et que l'exportateur était au courant de la détermination vraisemblable de dumping et s'était efforcé de « remplir » des conteneurs et de les expédier au Canada aussi rapidement que possible.

42. Enfin, Uniboard a soutenu que le dossier ne renferme pas suffisamment d'éléments de preuve justifiant d'accueillir les demandes d'exclusion de produits et a fait valoir que le Tribunal n'accorde habituellement des exclusions que dans des circonstances extraordinaires.

Parties s'opposant à des conclusions de dommage

Vöhringer et Asia Dekor 6

43. Vöhringer a soutenu que les importations provenant de la Chine n'avaient pas causé un dommage sensible ni un retard au producteur national, et ne menaçaient pas non plus de causer un dommage sensible ou un retard au producteur national. De plus, elle a soutenu que la branche de production nationale n'avait pas établi le lien crucial de causalité entre les marchandises sous-évaluées ou subventionnées et tout dommage qu'elle aurait subi et que, de toute façon, tout dommage dont l'existence pourrait ainsi être démontrée ne présenterait pas un caractère sensible.

44. Vöhringer a aussi soutenu que, dans l'examen de la question du dommage, le Tribunal ne devait pas prendre uniquement en considération la production nationale d'Uniboard destinée aux ventes nationales, mais, plutôt, la totalité de sa production et de ses ventes, qu'elles soient destinées à l'exportation ou aux ventes nationales.

45. Vöhringer a rejeté les affirmations d'Uniboard sur l'impératif de production et a soutenu que, à l'encontre de ce qui se passe dans le cas d'une aciérie, redémarrer une ligne de taille ne prend que quelques heures, comme des témoins d'Uniboard l'ont déclaré.

46. Vöhringer a soutenu que l'étude des indicateurs du rendement financier, et plus précisément les marges brutes et la rentabilité, les ventes nettes et le coût des marchandises vendues, n'indique pas l'existence d'un lien de causalité entre la présence des importations provenant de la Chine et le dommage sensible subi par la branche de production nationale. Elle a ajouté que le fait serait également vrai si le Tribunal devait prendre en considération certains des autres facteurs prescrits, comme l'emploi, la productivité, le niveau des stocks et l'utilisation de la capacité. Elle a exhorté le Tribunal, dans son examen de la question du dommage, de ne pas oublier le témoignage des témoins d'Uniboard sur la manière dont cette société entend financer l'expansion de ses immobilisations. Elle a ajouté que les éléments de preuve sur l'établissement des prix ne fondent aucunement des conclusions de dommage ou de menace de dommage. Elle a fait valoir qu'il est important de tenir compte des ventes de produits de qualité inférieure d'Uniboard, ajoutant que cette dernière vend ses produits de qualité inférieure à peu près la moitié du prix de ses planchers laminés ordinaires et qu'elle les vend presque exclusivement au Canada.

47. En ce qui a trait aux facteurs autres que le dumping, Vöhringer a soutenu que le taux de change revêt une énorme importance en l'espèce. D'après elle, lorsque la valeur du dollar canadien était basse, Uniboard réalisait des gains spectaculaires sur le marché des États-Unis, mais l'amorce de l'appréciation du dollar canadien a eu une incidence négative majeure sur Uniboard.

48. Au sujet des effets cumulatifs, Vöhringer a soutenu que, s'il devait conclure qu'un dommage avait été subi avant 2003, le Tribunal aurait le pouvoir discrétionnaire de ne pas cumuler les effets des importations provenant de la Chine et ceux des importations provenant de la France, puisque les importations provenant de la Chine étaient pratiquement absentes du marché canadien avant 2003.

49. Quant à la menace de dommage, Vöhringer a soutenu que toute analyse de menace de dommage doit être effectuée à la lumière de la croissance incroyable de la demande survenue sur le marché. Elle a ajouté qu'Uniboard n'a pas établi sa défense en termes des facteurs pris en considération par le Tribunal relativement à la menace de dommage.

50. Enfin, Vöhringer a soutenu qu'il n'entre pas dans les attributions du Tribunal de substituer son propre jugement à celui de l'ASFC en ce qui concerne les résultats de l'enquête de cette dernière.

Quality Craft

51. Quality Craft a soutenu que tout dommage subi par Uniboard n'est pas sensible. Elle a ajouté que le dommage devrait être apprécié en tenant compte de la totalité de la production au Canada et que le Tribunal doit inclure les panneaux non finis dans les marchandises similaires.

52. D'après Quality Craft, les importations à bas prix en provenance de pays non visés sont le facteur autre que le dumping le plus important. À cet égard, elle a soutenu qu'Uniboard a subi son dommage le plus marqué avant l'entrée du produit chinois sur le marché canadien et a fait observer le brusque recul de la part de marché d'Uniboard entre 2001 et 2002. Quality Craft a aussi invoqué les facteurs autres que le dumping suivants : le défaut d'innover d'Uniboard; le fait que cette dernière a ciblé le marché des États-Unis au dépens du marché canadien; l'appréciation importante du dollar canadien par rapport au dollar américain; l'omission d'Unibord de desservir correctement le marché canadien; sa plus petite gamme d'unités de gestion de stock (UGS); ses propres importations à bas prix; ses ventes de produits de qualité inférieure à bas prix; ses contraintes de capacité. À titre d'argument subsidiaire, Quality Craft a soutenu que, si le Tribunal était d'avis que les prix des produits chinois représentaient une sous-cotation et qu'ils enlevaient des ventes à Uniboard, il devrait alors prendre en considération le bas prix des revêtements de sol laminés chinois comme un autre facteur. Dans ce contexte, elle a indiqué que les coûts-efficacité au niveau de la fabrication de ce produit en Chine lui confèrent un avantage qui n'a rien à voir avec le dumping ou le subventionnement.

53. Quant à la menace de dommage, Quality Craft a soutenu que le bas prix du produit chinois est uniquement le résultat d'une réaction devant l'établissement agressif des prix des produits allemands, autrichiens et polonais, ainsi que devant les prix d'autres pays non visés. Elle a ajouté que des conclusions de dommage en l'espèce ne seraient d'aucune utilité pour Uniboard à l'avenir puisque cette dernière demeurerait toujours non concurrentielle.

54. Quant à l'importation massive, Quality Craft a soutenu que le volume des importations provenant de la Chine n'a que peu augmenté entre les deux périodes correspondantes, sur une base annuelle. Elle a ajouté que, entre la date de l'ouverture de l'enquête de l'ASFC et la date prévue de la décision provisoire de cette dernière, les importateurs du produit chinois n'ont pratiquement pas pu commander de marchandises susceptibles d'arriver à temps pour éviter les droits de douane, si l'on tient compte du fait que le délai de livraison du produit provenant de la Chine est de 10 à 12 semaines. Elle a souligné que son produit est vendu à l'avance et commandé sur cette base et non pas à des fins d'établissement de stock.

55. Quality Craft a demandé des exclusions de produit pour les planchers laminés d'une épaisseur de 12 mm et pour les planches étroites biseautées. À l'appui de ses demandes, elle a fait valoir qu'Uniboard ne produit pas de telles marchandises et que tout plan de production en ce sens n'aboutira pas avant un certain temps.

56. Quality Craft a ajouté que le Tribunal ne devrait pas aller au-delà des calculs sur le dumping et le subventionnement effectués par l'ASFC.

EPI et Alsapan 7

57. EPI a soutenu qu'une décision rendue par l'Organe d'appel de l'Organisation mondiale du commerce8 est pertinente aux fins de l'analyse de dommage effectuée par le Tribunal en l'espèce en ce qui concerne l'évaluation du rendement à l'exportation d'Uniboard. À cet égard, elle a soutenu que la production d'Uniboard destinée à l'exportation devait être examinée de la même manière que sa production consommée sur le marché national.

58. EPI a soutenu qu'il n'y avait pas lieu de cumuler les importations provenant de la France et celles provenance de la Chine au motif qu'il existe des différences importantes du point de vue de presque toutes les conditions de concurrence pertinentes. Dans ce contexte, elle a soutenu que les arguments d'Uniboard au sujet de la France se rapportent à des événements qui ont eu lieu en 2001, à savoir avant la période visée par l'enquête du Tribunal.

59. Quant à la causalité, EPI a soutenu que le Tribunal devrait tenir compte de la mesure dans laquelle la branche de production nationale elle-même importe les marchandises en question, ce qu'elle fait pour combler les lacunes de sa gamme de produits.

60. En ce qui a trait à l'importation massive, EPI a soutenu que les règles juridiques ne prévoient pas de conclusions d'importation massive cumulée car l'article 3 de l'Accord relatif à la mise en oeuvre de l'article VI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 de l'Organisation mondiale du commerce9 , qui traite des effets cumulatifs, ne s'applique pas à l'article 10, qui traite de l'importation massive.

61. EPI a demandé des exclusions de produit visant les tuiles, les planches étroites, les planchers laminés antistatique, les planchers laminés d'une épaisseur de 12 mm et divers produits en instance de brevets.

62. En ce qui a trait à la décision de l'ASFC, EPI a soutenu que le Tribunal n'a pas compétence pour décider de l'existence du dumping.

ANALYSE

Marchandises similaires et catégories de marchandises

63. À l'étape de l'enquête préliminaire de dommage, le Tribunal a conclu que les marchandises de production nationale étaient « similaires » aux marchandises en question et que, pour déterminer s'il y avait une indication raisonnable de dommage, le Tribunal considérerait les marchandises en question comme étant composées d'une seule catégorie de marchandises. Toutefois, il a ajouté que les arguments présentés à l'appui de l'existence de plus d'une catégorie de marchandises méritaient d'être examinés davantage. À titre de question préliminaire dans le cadre de la présente enquête de dommage, le Tribunal a avisé les parties que, pour faciliter la tenue de l'enquête, il les invitait à déposer des exposés sur la question des catégories de marchandises10 . Après avoir examiné ces exposés, le Tribunal a fait connaître sa décision provisoire selon laquelle il procéderait à son analyse de dommage en se fondant sur une seule catégorie de marchandises11 .

64. Le Tribunal fait observer que la portée des marchandises similaires et le nombre de catégories de marchandises ne constituaient pas des questions très litigieuses à l'audience. Uniboard a soutenu qu'il existe une seule catégorie de marchandises similaires, au motif que leur procédé de fabrication est le même et qu'elles sont fabriquées à partir de matières premières semblables, que les marchandises présentent des caractéristiques similaires et que toute différence de prix est attribuable à la vaste gamme de caractéristiques des marchandises. Quality Craft a soutenu que la portée des marchandises similaires devrait s'étendre aux panneaux non finis, c.-à-d. un produit qui a fait l'objet d'un pressage, mais sans être taillé ni usiné.

65. Pour évaluer la portée des marchandises similaires et le nombre de catégories de marchandises, le Tribunal tient habituellement compte des facteurs suivants : les caractéristiques physiques des marchandises, leur méthode de fabrication, leurs caractéristiques de marché (comme leur substituabilité, l'établissement des prix et les circuits de distribution) et la question de savoir si elles répondent aux mêmes besoins des clients.

66. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut qu'il existe une seule catégorie de marchandises et qu'elle englobe les panneaux étroits et les panneaux larges, les planchers laminés avec papier et placage de bois, les planchers laminés d'aspect tuile et les planchers laminés de toutes les épaisseurs entrant dans la portée de la définition des marchandises en question, c.-à-d. de 5,5 mm à 13 mm.

67. Le Tribunal fait observer que, tout en englobant les variétés susmentionnées, tous les revêtements de sol se composent d'une couche de recouvrement, d'une couche décorative, d'une couche de base et d'une couche d'équilibrage. De plus, ces revêtements de sol sont commercialisés de la même manière et sont conçus aux fins des mêmes marchés et des mêmes utilisations finales. Même s'il existe des différences entre les planchers laminés avec papier et les planchers laminés avec placage de bois en ce qui concerne leurs méthodes de fabrication et certaines des matières utilisées, le Tribunal est d'avis que ces différences mineures ne suffisent pas pour justifier la division en deux catégories.

68. Le Tribunal fait également observer que les autres caractéristiques distinctives, comme une âme verte, un endos de mousse, une surface antistatistique, des arêtes imperméables ou biseautées, etc., ne sont que des variations du produit de base qui servent à le différencier sur le marché, mais toujours à l'intérieur du groupe des planchers laminés. Par conséquent, le Tribunal conclut que ces caractéristiques ne suffisent pas, elles non plus, pour justifier l'établissement de catégories distinctes de marchandises.

69. En ce qui a trait à l'argument de Quality Craft selon lequel la portée des marchandises similaires devrait inclure les panneaux non finis, le Tribunal fait observer que l'ASFC a défini les marchandises en question ainsi :

Planchers laminés d'une épaisseur allant de 5,5 mm à 13 mm (autres que les planchers laminés en bois dur lorsque l'épaisseur du bois dur dépasse 2 mm) originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de la France12 .

70. L'ASFC a aussi fourni les renseignements supplémentaires suivants sur les « planchers laminés » :

Les planchers laminés peuvent être définis comme un revêtement de sol rigide ayant une couche de surface composée d'une ou de plusieurs minces feuilles d'une matière fibreuse, sur laquelle sont imprimés les motifs et la couleur qui apparaîtront sur le plancher, généralement un dessin de fibre de bois ou de carreau céramique (habituellement sur du papier mais il peut aussi être imprimé sur le panneau brut), et imprégnés et de résine aminique (ordinairement de mélanine). Ces feuilles sont soit pressées comme du stratifié sous haute pression et du stratifié compact, soit liées à un support qui se compose habituellement d'un panneau de fibres de haute densité (FHD), ou, dans le cas des stratifiés sous pression directe, pressées directement sur un support, habituellement un FHD. Le produit est normalement fini au moyen d'un endos, servant surtout de matière d'équilibrage.

Sur le marché, les planchers laminés peuvent être décrits comme étant du « plancher en bois flottant » ou du « plancher stratifié ».

[. . .]

Procédé de production

[. . .]

Il y a quatre grandes étapes dans la production des planchers laminés : le pressage, le refroidissement, la taille et l'usinage13 .

71. À la lumière de sa conclusion sur ce qui précède, par exemple, l'inclusion de la taille et de l'usinage dans le procédé de production, le Tribunal est convaincu qu'il n'y a pas lieu d'inclure les panneaux non finis dans la portée des marchandises similaires. Le Tribunal est d'avis que la définition ci-dessus et les renseignements supplémentaires donnés par l'ASFC limitent la portée des marchandises similaires et, prises dans leur ensemble, les descriptions amènent le Tribunal à conclure que les marchandises similaires ne sont constituées que des planchers laminés complètement finis.

Branche de production nationale

72. L'expression « branche de production nationale » est définie au paragraphe 2(1) de la LMSI en partie ainsi :

« Branche de production nationale » [. . .] l'ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. Peut toutefois en être exclu le producteur national qui est lié à un exportateur ou à un importateur de marchandises sous-évaluées ou subventionnées, ou qui est lui-même un importateur de telles marchandises.

73. Comme il est indiqué ci-dessus, Uniboard est le seul fabricant canadien de planchers laminés et, à ce titre, le producteur de la totalité de la production nationale. De ce fait, le Tribunal détermine qu'Uniboard représente la branche de production nationale aux fins de la présente enquête.

Effets cumulatifs

74. EPI a soutenu que les effets des marchandises sous-évaluées provenant de la France ne devraient pas être cumulés avec ceux des marchandises provenant de la Chine en raison des différences importantes entre ces marchandises en ce qui a trait à presque toutes les conditions pertinentes de concurrence. Dans ce contexte, EPI a soutenu que les arguments d'Uniboard contre la France se rapportent à des événements qui ont eu lieu en 2001, à savoir, elle a fait remarquer, avant la période visée par l'enquête du Tribunal.

75. Pour sa part, Vöhringer a prétendu que, si le Tribunal devait conclure qu'un dommage avait été porté avant 2003, il avait le pouvoir discrétionnaire de ne pas cumuler la Chine et la France, au motif qu'il n'y avait pratiquement pas d'importations en provenance de la Chine avant 2003.

76. Aux termes du paragraphe 42(3) de la LMSI, le Tribunal doit, lorsqu'il fait enquête aux termes du paragraphe 42(1), évaluer les effets cumulatifs du dumping ou du subventionnement des marchandises importées au Canada en provenance de plus d'un pays, s'il est convaincu qu'il est satisfait aux conditions suivantes :

a) relativement aux importations de marchandises de chacun de ces pays, la marge de dumping [. . .] n'est pas minimal et [. . .] le volume des importations n'est pas négligeable;

b) l'évaluation des effets cumulatifs est indiquée compte tenu des conditions de concurrence entre les marchandises, visées par la décision provisoire, importées au Canada en provenance d'un ou de plusieurs de ces pays et :

(i) soit les marchandises, visées par la décision provisoire, importées au Canada en provenance d'un ou de plusieurs autres de ces pays

(ii) soit les marchandises similaires des producteurs nationaux.

77. Si le Tribunal détermine qu'il est satisfait aux conditions prescrites pour une évaluation des effets cumulatifs, il procédera à une seule analyse de dommage pour les marchandises provenant de la Chine et de la France.

78. La décision définitive de l'ASFC indique que les marges de dumping et les montants de subvention relatifs aux marchandises en question provenant de la Chine ne sont pas minimaux14 . Elle indique également que les marges de dumping relatives aux marchandises provenant de la France ne sont pas minimales15 . Par conséquent, il est satisfait au premier critère prévu à l'alinéa 42(3)a) de la LMSI.

79. En se fondant sur les données sur le volume versées au dossier, le Tribunal conclut que le volume des marchandises sous-évaluées provenant de chacun des deux pays visés n'est pas négligeable16 . Sur le même fondement, il conclut également que le volume des marchandises subventionnées provenant de la Chine n'est pas négligeable17 . Par conséquent, il est satisfait au deuxième critère prévu à l'alinéa 42(3)a) de la LMSI.

80. À l'étude des conditions de concurrence entre les marchandises, le Tribunal tient habituellement compte des facteurs suivants : la mesure dans laquelle les marchandises en question provenant de chacun des pays visés sont interchangeables avec les marchandises provenant d'autres pays visés ou avec les marchandises de production nationale; la présence ou l'absence de ventes ou d'offres de vente, sur les mêmes marchés géographiques, des importations des différents pays visés et des marchandises similaires nationales; l'existence de circuits de distribution communs ou semblables; les différences dans le moment de l'arrivée des importations provenant d'un pays visé et des importations provenant d'autres pays visés; la disponibilité des marchandises similaires offertes par la branche de production nationale. Comme il l'a déjà déclaré, le Tribunal reconnaît qu'il peut y avoir d'autres facteurs dont il peut tenir compte pour décider si les exportations d'un pays donné devraient entrer dans le cumul et qu'aucun facteur n'a à lui seul un poids déterminant.

81. Il ressort des éléments de preuve qu'il y a concurrence sur les mêmes marchés géographiques entre les marchandises similaires et les marchandises en question, et entre les marchandises en question elles-mêmes18 . Il en ressort aussi que les marchandises similaires et les marchandises en question sont généralement interchangeables19 . Comme il est indiqué ci-dessus, Uniboard vend des planchers laminés aux distributeurs de revêtements de sol ainsi qu'aux centres du bâtiment et de la rénovation et aux marchands de masse. Les importations en question sont, pour la plupart, elles aussi commercialisées au Canada par l'entremise de distributeurs grossistes. Pour ces motifs, le Tribunal conclut que les marchandises en question sont vendues par l'intermédiaire de circuits de distribution semblables entre eux et semblables aux circuits de distribution des marchandises similaires.

82. En ce qui a trait à la différence dans le moment de l'arrivée des importations, tant Vöhringer qu'EPI ont soutenu que les effets des importations provenant de la Chine ne devraient pas être cumulés avec ceux des importations provenant de la France, au motif que les importations provenant de la Chine sont arrivées sur le marché canadien pendant une autre période que celles provenant de la France. Les arguments des parties ne convainquent pas le Tribunal à cet égard. Même si les importations provenant de la Chine ont commencé à entrer au Canada à la fin de 200220 , les éléments de preuve montrent que les importations provenant des pays visés se sont livrés concurrence entre elles21 et ont aussi livré concurrence aux marchandises similaires sur le marché canadien au même moment et pour la majeure partie de la période visée par l'enquête. En 2003-2004, tant les Chinois que les Français étaient très actifs sur le marché et luttaient pour obtenir une part du marché au dépens de la branche de production nationale. Le Tribunal détermine donc que, après avoir examiné les conditions de concurrence, il y a lieu de cumuler les effets des marchandises en question.

83. Le Tribunal procédera à un cumul croisé des effets du dumping et du subventionnement, comme il le fait habituellement dans une analyse du dommage22 .

DOMMAGE

84. Aux termes du paragraphe 37.1(1) du Règlement sur les mesures spéciales d'importation 23 , le Tribunal tient compte de certains facteurs pour décider si le dumping ou le subventionnement de marchandises a causé un dommage sensible ou un retard à la branche de production nationale. Le paragraphe 37.1(3) prévoit aussi que le Tribunal doit tenir compte des facteurs autres que le dumping et le subventionnement pour veiller à ce qu'un dommage, un retard ou une menace de dommage imputable à ces autres facteurs ne soit pas attribué aux effets des importations sous-évaluées ou subventionnées.

85. À titre de question préliminaire, le Tribunal fait observer que les parties ont présenté des observations approfondies sur la manière dont il devrait traiter, dans son évaluation du dommage, le rendement à l'exportation d'Uniboard. Le Tribunal s'est inspiré à cet égard de la décision rendue par le groupe spécial binational dans Réfrigérateurs, lave-vaisselle et sécheuses :

La majorité a déterminé que le bon rendement à l'exportation de la branche de production nationale ne faisait pas disparaître le dommage à la branche de production nationale. Nous ne jugeons pas cette décision erronée. Rien dans la LMSI, dans son règlement d'application ou dans la jurisprudence ne suggère que le « dommage sensible » justifiant une ordonnance antidumping doivent refléter un dommage subi par chaque segment du marché sur lequel le produit similaire national est vendu, y compris les segments du marché à l'exportation. En outre, la majorité a indiqué qu'« en l'espèce » la réussite financière de la branche de production nationale sur le marché à l'exportation ne doit pas être utilisée pour compenser le dommage subi dans les segments du marché national. Il s'agit d'une décision rattachée à l'espèce, supposant une pondération de la preuve, ce qui est une prérogative du Tribunal, et le Groupe spécial fera donc preuve de retenue à son endroit.

Le Tribunal a pris en compte les facteurs que le Règlement MSI prescrit de prendre en compte dans la décision sur le dommage et a traité de façon particulière du rendement à l'exportation de Camco. Cependant, le paragraphe 37.1(3) du Règlement MSI ne dicte aucunement de quelle manière [souligné dans l'original] le Tribunal doit prendre en compte ou pondérer le rendement à l'exportation de la branche de production nationale. Manifestement, le Règlement MSI, qui traite des causes de dommage autres que le dumping, vise à faire en sorte que le Tribunal examine si une baisse du rendement à l'exportation, plutôt que les importations, pourrait être la cause du dommage à la branche de production nationale. Toutefois, rien dans le Règlement ne dicte ou même ne laisse entendre qu'un bon rendement à l'exportation est un facteur qui doit être utilisé pour compenser d'autres éléments de preuve de dommage. La pondération des éléments de preuve dans chaque affaire est une question de fait, que le Groupe spécial doit aborder selon une norme de contrôle justifiant la retenue.

[. . .]

En l'espèce, Camco est le seul producteur national. Donc, le dumping cause un préjudice à la branche de production nationale dans la mesure où il cause un dommage à Camco. Rien n'indique que le dommage doive être causé à « l'ensemble » de la production nationale plutôt qu'à « l'ensemble des producteurs nationaux ». Il est possible de causer un dommage à un producteur en n'atteignant qu'une partie de son entreprise. Le Tribunal a conclu que Camco subissait un dommage du fait du dumping sous la forme d'une perte de part de marché sur le marché canadien24 .

86. À cet égard, le Tribunal fait observer que l'alinéa 37.1(3)b) du Règlement, qui reflète la disposition de non-imputation prévue dans l'Accord antidumping 25 , précise certains facteurs autres que le dumping et le subventionnement qui pourraient causer un dommage et que le Tribunal devrait prendre en compte pour veiller à ne pas imputer les effets de ces autres facteurs au dumping et au subventionnement. Puisque le rendement à l'exportation de la branche de production nationale est cité au nombre de ces autres facteurs - aux termes du sous-alinéa 37.1(3)b)(vi) - il est clair que, lorsque la branche de production nationale subit l'effet d'un rendement à l'exportation négatif (p. ex. baisse des ventes à l'exportation), le Tribunal ne peut imputer un dommage causé par un tel rendement à l'exportation négatif au dumping et au subventionnement des marchandises en question. En l'espèce, comme il en sera traité plus à fond ci-après dans les présents motifs, tel n'est manifestement pas le cas d'Uniboard, qui a connu un bon rendement à l'exportation.

87. Le Tribunal fait également observer que, lorsque le rendement à l'exportation est positif, les parties présentent souvent des arguments demandant au Tribunal d'utiliser la réussite de la branche de production nationale sur d'autres marchés pour compenser son faible rendement au Canada. Comme il a été déclaré dans Réfrigérateurs, lave-vaisselle et sécheuses, le Tribunal doit examiner la question de savoir si le dumping et le subventionnement causent un dommage. Selon le Tribunal, il faut, à cette fin, examiner attentivement les faits de chaque affaire et non procéder à une simple addition algébrique, où les gains sur un marché servent à compenser les pertes sur un autre marché. En l'espèce, comme il en sera traité ci-après dans le présent exposé des motifs, le Tribunal a déterminé que le dommage causé à Uniboard sur le marché national, qui a été causé par le dumping et le subventionnement des marchandises en question, était un dommage sensible, même si elle connaissait une certaine réussite sur le marché à l'exportation.

Volume des marchandises sous-évaluées et subventionnées

88. Durant la période visée par l'enquête, le volume des importations provenant des pays visés s'est accru de 431 p. 100, cette croissance ayant été de 52 p. 100 en 2003 et d'une autre tranche de 249 p. 100 en 2004. Les importations en question sont arrivées au Canada d'abord en provenance de la France puis, à partir du deuxième semestre de 2002, en provenance de la France et de la Chine. Le volume des importations provenant de pays non visés a aussi augmenté durant la période visée par l'enquête, mais à un rythme beaucoup plus lent, cette croissance étant moins rapide que celle de l'ensemble du marché entre 2002 et 2004. Par conséquent, la part des importations provenant des pays visés, par rapport aux importations totales de planchers laminés, a un peu plus que triplé entre 2002 et 2004, tandis que la part des importations provenant de pays non visés s'est repliée de 20 p. 10026 .

89. Dans la foulée de l'augmentation des importations de planchers laminés provenant des pays visés durant la période visée par l'enquête, le volume des ventes de ces importations au Canada a également connu une importante hausse, soit de 144 p. 100 en 2003 et d'une autre tranche de 176 p. 100 en 2004, à savoir une augmentation totale de 574 p. 100 sur cette période de trois ans. Par contre, les ventes des importations provenant de pays non visés n'ont augmenté que de 31 p. 100 durant la période visée par l'enquête27 .

90. Le marché national apparent des planchers laminés a affiché un robuste taux de croissance durant la période visée par l'enquête, soit des hausses annuelles consécutives d'environ 25 p. 100. Malgré cette croissance impressionnante, les ventes nationales à partir de la production nationale d'Uniboard ont nettement fléchi durant cette même période, reculant d'abord de 9 p. 100 en 2003, puis chutant d'une autre tranche de 40 p. 100 en 2004, pour une baisse totale de 46 p. 100. Ce repli s'est soldé par une baisse des deux tiers de la part du marché national détenue par Uniboard durant la période visée par l'enquête. Le Tribunal fait observer que les ventes de planchers laminés provenant des pays visés ont largement dépassé la croissance du marché national, tout comme celle des ventes des importations provenant de pays non visés. Par conséquent, les importations en question ont augmenté leur part du marché au dépens des importations non en question et de la branche de production nationale, leur présence sur le marché augmentant de plus de 300 p. 100 entre 2002 et 200428 .

91. En résumé, le Tribunal est d'avis que la hausse importante des importations de planchers laminés sous-évaluées et subventionnés provenant des pays visés a fait perdre à Uniboard des ventes sur le marché national qui auraient été faites à partir de la production nationale. Malgré la croissance vigoureuse du marché canadien durant la période visée par l'enquête du Tribunal, les volumes des ventes d'Uniboard sur ce marché, en chiffres absolus, et sa part du marché canadien reculaient constamment, pendant que les volumes des ventes des importations sous-évaluées et subventionnées augmentaient.

92. Le Tribunal fait observer que la production totale de planchers laminés d'Uniboard a augmenté29 durant la période visée par l'enquête, même si ses ventes et sa part de marché reculaient sur le marché canadien devant la croissance ininterrompue des volumes des importations faisant l'objet de dumping et de subventionnement. Uniboard a pu réussir à exporter sa production accrue de planchers laminés aux États-Unis, et ses ventes sur ce marché ont considérablement augmenté durant la période visée par l'enquête30 . Le Tribunal est d'avis que le fait qu'Uniboard a obtenu des résultats aussi différents, eu égard à son volume de ventes, sur ces deux marchés témoigne en soi de l'importance du déplacement des marchandises similaires par les importations sous-évaluées et subventionnées sur le marché canadien.

Effets des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur les prix

93. Les coûts unitaires des planchers laminés importés des pays visés se sont repliés de 22 p. 100 en 2003, puis sont, pour l'essentiel, demeurés stables en 2004. Par contre, les coûts unitaires des planchers laminés importés de pays non visés ont augmenté de 5 p. 100 en 2003, puis se sont repliés d'environ le même pourcentage en 2004. Durant la période visée par l'enquête, les coûts unitaires des planchers laminés en question importés étaient inférieurs d'au moins 9 p. 100 par rapport à ceux des planchers laminés non en question, l'écart étant sensiblement plus grand en 2003 et en 2004 qu'il ne l'avait été en 200231 .

94. Durant la période visée par l'enquête, le prix de vente moyen des importations en question a constamment baissé, à savoir de 14 p. 100 entre 2002 et 2004. Le Tribunal fait observer que cette baisse a été plus rapide dans le cas des importations en question que dans celui des importations provenant de pays non visés, dont la baisse moyenne des prix de vente n'a été que de 11 p. 100 sur la période correspondante de trois ans. Le Tribunal prend toutefois note que, dans cette conjoncture de baisse générale des prix des importations provenant de pays non visés, le prix de vente des importations de certains pays a effectivement augmenté32 .

95. Par opposition aux tendances à la baisse susmentionnées, le Tribunal constate que le prix de vente moyen d'Uniboard des planchers laminés de production nationale, sur le marché canadien, a augmenté de 5 p. 100 durant la période visée par l'enquête, par suite d'une baisse de 6 p. 100 en 2003 suivie d'une hausse de 12 p. 100 en 200433 .

96. Le prix de vente moyen des importations en question a constamment été le plus bas sur le marché durant la période visée par l'enquête, l'écart de la sous-cotation qu'il représentait par rapport au prix moyen d'Uniboard se creusant entre 2002 et 2004. D'autre part, le prix de vente moyen des importations non en question a constamment dépassé le prix de vente moyen d'Uniboard. En même temps, le Tribunal fait observer que les prix de vente des importations provenant de certains pays non visés ont parfois été inférieurs au prix de vente moyen d'Uniboard et même au prix de vente moyen des importations en question34 .

97. Le Tribunal a aussi examiné, sur une base trimestrielle, les prix de vente d'une série de produits de référence pour la période allant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004. Selon le Tribunal, les résultats les plus pertinents sont ceux liés aux planchers laminés de 7 mm et de 8 mm, puisque ces épaisseurs représentent la majorité des produits vendus sur le marché canadien35 .

98. En ce qui a trait aux planchers laminés de 7 mm, le prix de vente moyen des importations en question constituait une sous-cotation du prix de vente moyen d'Uniboard à tous les trimestres. De plus, tandis que les prix d'Uniboard sont demeurés pour l'essentiel stables durant la période à l'étude, malgré certains mouvements trimestriels importants, le prix des importations en question a suivi une baisse presque constante. De ce fait, l'écart entre le prix de vente moyen des planchers laminés de 7 mm de production nationale et celui des planchers laminés de 7 mm provenant des pays visés s'est considérablement creusé. Le Tribunal fait observer que le prix de vente moyen des planchers laminés de 7 mm provenant de pays non visés a également connu une baisse, mais non pas aussi marquée que celle des planchers laminés de 7 mm provenant des pays visés. En majeure partie, le prix de vente moyen des planchers laminés de 7 mm d'Uniboard était le plus élevé, suivi de celui de tels planchers provenant de pays non visés, celui des marchandises provenant des pays visés étant généralement le plus bas36 .

99. En ce qui a trait aux planchers laminés de 8 mm, le prix de vente moyen des importations en question constituait aussi une sous-cotation du prix de vente moyen des revêtements de sol de production nationale à chaque trimestre des deux années à l'étude. Tandis que le prix de vente moyen des planchers laminés de 8 mm d'Uniboard a augmenté durant la période visée par l'enquête, celui des planchers laminés de 8 mm provenant des pays visés a d'abord baissé, puis a augmenté, à compter du deuxième trimestre de 2004, devenant semblable au quatrième trimestre de 2004 à celui du premier trimestre de 2003. D'autre part, le prix de vente moyen des planchers laminés de 8 mm provenant de pays non visés a constamment baissé, affichant un repli important durant la période à l'étude. Toutefois, ce prix était généralement supérieur à celui d'Uniboard, lequel était lui-même supérieur au prix de vente moyen des planchers laminés de 8 mm provenant des pays visés37 .

100. Dans l'évaluation des tendances indiquées ci-dessus relativement à l'établissement des prix des planchers laminés, le Tribunal reconnaît que l'utilisation des prix moyens pour ce type de produits pose un problème inhérent. Des facteurs comme un changement dans la combinaison de produits et les circonstances particulières du marché (p. ex. des liquidations de stocks ou des commandes très importantes) peuvent avoir une incidence sensible sur les tendances apparentes. Cela dit, le Tribunal observe un seul résultat constant à l'égard de pratiquement toutes les périodes qu'il a examinées, eu égard à l'ensemble des produits et aux produits de référence, à savoir que les prix des importations en question étaient inférieurs à ceux d'Uniboard. Selon le Tribunal, les importations en question ont clairement été les « dirigeants au niveau des prix » sur le marché.

101. Le fait que le prix des importations en question ait été un prix directeur ressort aussi de la différence marquée entre les prix auxquels Uniboard a pu vendre ses marchandises de production nationale sur le marché canadien et ceux auxquels elle a pu les vendre sur le marché des États-Unis38 . À cet égard, le Tribunal fait observer l'existence au dossier d'éléments de preuve selon lesquels les prix moyens sur le marché des États-Unis étaient supérieurs aux prix au Canada, compte tenu de l'incidence du taux de change39 . Le Tribunal ne tentera pas de deviner pourquoi les prix sur le marché des États-Unis sont demeurés supérieurs malgré le fait qu'il y a aussi concurrence aux États-Unis de la part de fournisseurs étrangers. La seule explication de ce phénomène donnée à l'audience est qu'il refléterait un meilleur respect des lois commerciales et des droits de brevet aux États-Unis40 , un pays où les poursuites se révèlent plus vigoureuses. Dans ce contexte, le Tribunal fait également observer les réponses au questionnaire à l'intention des producteurs étrangers des pays visés au sujet de leurs ventes respectives de planchers laminés, au Canada et aux États-Unis41 .

102. Le dossier renferme une abondance d'éléments de preuve sur l'importance du prix, tant pour les distributeurs que pour le consommateur final, dans la décision d'achat d'un type donné de planchers laminés42 . Par conséquent, le Tribunal ne doute aucunement que le repli marqué de ventes et de part de marché au Canada qu'a connu Uniboard durant la période visée par l'enquête reflète la sous-cotation constante des prix opérée par les importations en question.

103. Uniboard a fait valoir que, vers la fin de 2001, lorsqu'elle avait commencé à ressentir la pression exercée au niveau des prix par les importations sous-évaluées et subventionnées, elle avait tenté de s'aligner sur les bas prix offerts par les fournisseurs des pays visés en offrant des rabais et des prix promotionnels, mais que ses efforts en ce sens n'avaient guère été fructueux. Uniboard a soumis au Tribunal plusieurs exemples de clients où, devant la sous-cotation des prix opérée par les importations en question, il lui aurait fallu baisser ses prix sous le niveau de rentabilité pour réaliser des ventes. Dans d'autres cas, Uniboard avait effectivement baissé ses prix pour retenir certains clients, et ses témoins ont déclaré que ses ventes, même à ses plus grands clients, n'étaient plus rentables43 .

104. Au premier trimestre de 2002, devant la pression croissante exercée au niveau des prix, une pression telle que d'y répondre aurait entraîné une escalade des pertes, le comité de vérification du conseil d'administration d'Uniboard a servi un ultimatum à la direction selon lequel elle devait trouver des débouchés rentables pour les planchers laminés ou risquer la fermeture de l'usine44 .

105. La réaction d'Uniboard à cet ultimatum a pris diverses formes. Premièrement, elle a continué de tenter de mousser ses ventes canadiennes par l'entremise de promotions ciblées de produits choisis auprès de certains clients45 , tout en tentant de maintenir ses prix pour le reste de sa gamme de produits. Deuxièmement, Uniboard a continué sa recherche de nouveaux clients canadiens et, à la fin de 2002, est entrée en communication avec Home Hardware46 , dont elle est par la suite devenue un de ses deux fournisseurs de planchers laminés. Troisièmement, Uniboard a activement recherché des clients aux États-Unis pour y vendre ses planchers laminés à des prix rentables47 . Enfin, Uniboard a aussi tenté de livrer concurrence aux importations sous-évaluées et subventionnées en abandonnant ses prix reconnus inférieurs afin de cibler ceux dans la fourchette des prix moyens et élevés48 .

106. Selon le Tribunal, la stratégie du maintien des prix d'Uniboard n'était pas viable à long terme, puisque ni ses distributeurs ni ses clients au détail n'auraient pu continuer à livrer concurrence directement ou indirectement, sans perdre de ventes, aux acheteurs de marchandises sous-évaluées et subventionnées. Uniboard a cité le cas d'un client dont les achats auprès d'Uniboard ne cessent de diminuer parce que le prix des produits d'Uniboard est plus élevé que celui des produits provenant des pays visés49 .

107. Même si Uniboard a soutenu qu'en 2003 elle tentait généralement de ne plus aligner ses prix sur les bas prix des importations en question, elle a toutefois connu une baisse de 6 p. 100 de son prix de vente moyen cette année-là. Cependant, le Tribunal fait observer qu'Uniboard a liquidé au début de 2003 un important excédent de stocks qu'elle avait accumulé au deuxième semestre de 2002 et en a alors vendu une grande partie à rabais à ses clients actuels50 . D'après des témoins d'Uniboard, cet excédent de stocks avait été accumulé car elle avait continué à produire de volumes considérables pour maintenir l'utilisation de sa capacité (d'après un impératif de production) et n'avait pas pu vendre sa production à cause de la sous-cotation des prix opérée par les importations en question.

108. Pour ce qui est de l'augmentation de 12 p. 100 du prix de vente moyen d'Uniboard en 2004, elle a été assortie d'une baisse de 40 p. 100 du volume de ses ventes nationales. Selon le Tribunal, la sous-cotation persistante de la part des importations en question, dont le prix moyen a connu une baisse de 6 p. 100 la même année, était à l'origine de la baisse des ventes d'Uniboard.

109. Enfin, le Tribunal conclut que la baisse du prix de vente moyen des importations en question entre 2002 et 2004 et leur importante sous-cotation des prix nationaux ont débouché sur une situation où Uniboard a sacrifié d'importants volumes de ventes et une part du marché national, plutôt que de livrer concurrence en offrant des prix non rentables.

Incidence sur la branche de production nationale

110. Comme il a été indiqué ci-dessus, à partir de la fin 2001 et jusque durant la période visée par l'enquête, Uniboard a subi une très vive pression l'obligeant à baisser ses prix pour livrer concurrence sur le marché canadien aux importations sous-évaluées et subventionnées provenant des pays visés. Uniboard a affronté une sous-cotation des prix incessante et, en bout de ligne, elle a décidé de ne pas aligner ses prix sur ceux des marchandises sous-évaluées et subventionnées mais, plutôt, de tenter de les maintenir à des niveaux viables. Cette stratégie s'est soldée, comme il en a déjà été discuté, par une baisse marquée de sa part de marché.

111. L'ampleur de l'incidence, sur Uniboard, de la perte de part de marché a été considérable et doit être appréciée à la lumière de la robuste croissance du marché canadien durant ces trois années. À titre de mesure de l'incidence, le Tribunal estime que, si Uniboard avait pu maintenir la part du marché qu'elle détenait en 2002 durant toute la période visée par l'enquête, le volume de ses ventes en 2004 aurait été presque de trois fois supérieur. Par conséquent, ce plus fort volume de ventes aurait donné lieu à des bénéfices sensiblement plus élevés51 .

112. En plus de causer la perte d'un certain volume de ventes, la présence d'importations sous-évaluées et subventionnées a eu un effet de compression des prix qui a empêché Uniboard d'augmenter ses prix sur le marché national suffisamment pour obtenir un taux de rendement raisonnable. Les résultats d'Uniboard relativement à ses ventes au Canada à partir de la production nationale se sont améliorés, montrant un bénéfice plutôt qu'une perte52 durant la période visée par l'enquête, en partie à cause de la hausse de son prix moyen, car elle avait modifié sa combinaison de produits pour cibler la fourchette supérieure du marché, et en partie parce qu'elle avait pu réduire ses coûts de fabrication. De plus, ses ventes aux États-Unis ont permis à Uniboard d'augmenter sa production et de réaliser certaines économies d'échelle à l'usine grâce à une utilisation de plus en plus grande de sa capacité53 . Par conséquent, la productivité s'est améliorée. À cet égard, le Tribunal fait observer que, même si le nombre d'employés a diminué durant la période visée par l'enquête, le nombre d'heures travaillées a augmenté54 .

113. Cependant, même en 2004, la marge brute d'Uniboard sur ses ventes nationales n'a pas atteint l'objectif minimum qu'elle s'était fixé55 . Il est révélateur de constater que, sur le marché national, il a fallu trois ans à Uniboard pour obtenir des rendements positifs sur ses ventes nationales de planchers laminés, tandis que sur le marché des États-Unis, offrant une combinaison semblable de produits, elle a atteint la rentabilité dès le début de la période visée par l'enquête et obtenu des marges brutes et nettes que ses ventes au Canada n'ont pas encore atteintes56 . Si Uniboard avait pu atteindre le même niveau de rentabilité pour ses ventes nationales que celui qu'elle a atteint pour ses ventes à l'exportation, même en supposant l'absence d'une augmentation de son volume de ventes, le Tribunal estime que les pertes globales qu'elle a essuyées durant la période visée par l'enquête se seraient transformées en profit d'un montant encore plus important57 .

114. De plus, la branche de production nationale a subi un dommage sous forme d'expulsion, par les importations sous-évaluées et subventionnées, du marché national en ce sens que sa dépendance forcée à l'endroit des États-Unis pour une proportion croissante de ses ventes l'a rendue vulnérable aux variations du taux de change qui, étant donné la hausse du dollar canadien par rapport au dollar américain, ont donné lieu à des pertes pour Uniboard58 . Des témoins d'Uniboard ont déclaré qu'elle avait tenté principalement de réagir à l'accroissement du risque en réduisant ses coûts de production, mais n'avait pas pu compenser entièrement les effets négatifs des variations du taux de change59 .

115. Enfin, ce qui a été le plus marquant est la perte subie par Uniboard à la suite de son incapacité de donner suite à ses projets d'installation d'une deuxième ligne de taille et d'usinage de planchers laminés à son usine de Laval. Des témoins d'Uniboard ont déclaré que, vers la fin de 2001, les importations en question avaient tellement fait baisser les prix sur le marché national qu'il aurait été financièrement mal avisé de donner suite à l'investissement prévu, particulièrement étant donné que le matériel qui devait être déménagé de l'usine de Ville Saint-Laurent à l'usine de Laval ne pouvait fabriquer des marchandises de la qualité nécessaire. La direction d'Uniboard n'était pas disposée à approuver l'investissement considérablement supérieur qu'aurait exigé l'achat de matériel de taille et d'usinage neuf car les bas prix sur le marché à la fin de 2001 et au début de 2002 rendaient cette option peu rentable60 . À titre de mesure provisoire, Uniboard a été contrainte de trouver d'autres marchés pour y écouler les panneaux non finis sortis de ses installations devenues mal adaptées en raison de leur surplus de capacité de pressage61 .

116. Le fait de ne pas avoir pu installer la deuxième ligne de taille et d'usinage prévue a eu une incidence considérable sur Uniboard. En fait, le Tribunal estime que, si Uniboard avait pu vendre ses panneaux non finis sous forme de planchers laminés finis, elle aurait obtenu des profits d'un montant de plus du double du montant de ses pertes globales durant la période visée par l'enquête62 .

117. Aux termes du Règlement, le Tribunal doit, dans son évaluation du dommage, tenir compte, entre autres facteurs, de « l'importance de la marge de dumping des marchandises ou du montant de subvention octroyé pour celles-ci ». À cet égard, le Tribunal fait observer que, dans la décision définitive de l'ASFC rendue le 1er juin 2005, les marges pondérées de dumping de la France et de la Chine étaient respectivement de 7 p. 100 et de 7,8 p. 100 et que le montant de subvention de la Chine était de 3,0 p. 100 ou 1,16 renminbi le mètre carré. La branche de production nationale a exhorté le Tribunal à faire preuve de prudence en tirant des conclusions relatives au dommage qui seraient fondées sur ces résultats parce que l'ASFC avait modifié sa politique concernant la « réduction à zéro » et que, de ce fait, les marges ne reflétaient pas l'ampleur véritable du dumping. Les parties qui s'opposent à des conclusions de dommage ont soutenu que le Tribunal n'a pas compétence pour vérifier la décision de l'ASFC.

118. Manifestement, le Tribunal n'a pas compétence pour réexaminer la décision de dumping et de subventionnement de l'ASFC, et il n'a pas tenu compte des méthodologies appliquées par l'ASFC dans son évaluation de l'importance des marges de dumping et de subventionnement.

119. D'après le Tribunal, des marges de dumping de 7,0 p. 100 à 7,8 p. 100, combinées avec une marge de subventionnement de 3,0 p. 100, dans un secteur aussi compétitif au niveau des prix que celui des planchers laminés, suffisent pour conférer aux importations en question un avantage au niveau des prix qui pourrait être utilisé pour s'accaparer des clients et, en bout de ligne, une part de marché63 .

120. Comme il a déjà été souligné, Uniboard s'est retrouvée avec une importante accumulation de stocks au quatrième trimestre de 2002, n'ayant pas été capable de vendre sa production sur le marché national à cause de la présence des importations sous-évaluées et subventionnées.

121. Le Tribunal est d'avis, à la lumière de ce qui précède, qu'Uniboard a subi un dommage sensible, principalement eu égard à la perte d'une part de marché, à la compression des prix et à l'impossibilité de procéder à l'installation d'une deuxième ligne de taille et d'usinage.

122. Comme il a été souligné ci-dessus relativement au rendement à l'exportation d'Uniboard, le Tribunal s'est inspiré de la décision rendue par le groupe spécial binational dans Réfrigérateurs, lave-vaisselle et sécheuses et il est d'avis, en l'espèce, que le rendement positif d'Uniboard aux États-Unis ne doit pas être utilisé pour compenser le dommage sensible qu'elle a subi sur le marché national. Aucun élément de preuve n'établit que les activités à l'exportation d'Uniboard ont donné lieu à une pénurie sur le marché national et une perte consécutive de clients ou de part du marché. De plus, son activité à l'exportation a aidé Uniboard à réaliser des économies qui ont été bénéfiques pour ses coûts de fabrication.

123. Les liens entre le dommage subi par Uniboard durant la période visée par l'enquête et les importations sous-évaluées et subventionnées sont clairs en l'espèce. Les dirigeants au niveau des prix sur le marché national étaient les pays visés, et la croissance spectaculaire de leurs ventes et de leur part du marché établit clairement que leur stratégie agressive a été fructueuse, au dépens de la branche de production nationale et des fournisseurs non visés.

124. En termes de micro-analyse, l'influence des importations en question ressort aussi clairement des nombreuses mentions faites au dossier, des tentatives généralement infructueuses d'Uniboard de livrer concurrence au niveau des prix sur le marché national. Même si les renseignements sur le marché dont disposait Uniboard étaient parfois inexacts en termes de volume, de prix et types de produits que ses clients actuels ou potentiels achetaient de fournisseurs concurrents des importations en question, le Tribunal trouve convaincants les éléments de preuve d'Uniboard à l'égard de ses allégations de pertes de ventes.

125. Plus particulièrement, le Tribunal fait observer la perte de plusieurs grands détaillants du Québec, comme Canac-Marquis Grenier (Canac) et Jacques Laferté Ltée (Laferté), membres de la Independent Lumber Dealers Co-operative (ILDC), un consortium d'achat de 24 magasins à succursales indépendants oeuvrant dans le secteur de la rénovation résidentielle. L'ILDC négocie les prix pour ses membres auprès de fournisseurs choisis, mais n'achète pas les marchandises en leur nom. En 2001, ses divers membres figuraient au nombre des clients importants d'Uniboard64 . Cependant, à la fin de 2001, Uniboard avait perdu beaucoup de ses ventes aux membres de l'ILDC à cause des importations en question65 . L'importance du prix pour au moins un des membres de l'ILDC, à savoir Canac, ressort bien de sa réponse au questionnaire du Tribunal sur les caractéristiques du marché où « le prix le plus bas » est qualifié de facteur très important dans le choix d'un fournisseur de planchers laminés, et où son principal fournisseur, EPI, se trouve avantagé par rapport à Uniboard du point de vue de l'offre du prix le plus bas et de rabais. En outre, le Tribunal fait observer que Canac a évalué de façon égale EPI et Uniboard eu égard à la qualité du produit et à la fiabilité d'approvisionnement et accorde même à Uniboard un avantage du point de vue de la gamme de produits et des délais et modalités de livraison66 . Cinq autres acheteurs ont soumis des réponses analogues, précisant que le produit national est meilleur ou comparable des points de vue de la qualité et des modalités de livraison, mais défavorisé par rapport aux marchandises en question eu égard au prix le plus bas67 . Deux acheteurs seulement ont indiqué qu'Uniboard offrait le prix le plus bas par rapport au prix des marchandises en question68 .

126. Le Tribunal constate également la perte plus récente par Uniboard, en juin et juillet 2004, d'une vente à Le Groupe B.M.R. (B.M.R.), un distributeur de fournitures de construction et d'articles de quincaillerie, en raison du bas prix exigé par l'acheteur. D'après les témoignages à l'audience, cette vente est finalement passée aux importations en question.

127. En résumé, le Tribunal conclut que les importations de planchers laminés sous-évalués et subventionnés provenant des pays visés ont causé un dommage sensible à la branche de production nationale.

Facteurs autres que le dumping et le subventionnement

128. Les parties qui s'opposent à des conclusions de dommage ont présenté des exposés traitant de plusieurs facteurs autres que le dumping et le subventionnement qui, d'après elles, étaient la cause de tout dommage porté à Uniboard. Le Tribunal a examiné attentivement ces facteurs, ainsi que les autres facteurs prescrits au paragraphe 37.1(3) de la LMSI.

Concurrence des importations non sous-évaluées

129. Durant la période visée par l'enquête, le marché canadien des planchers laminés comprenait des importations en provenance d'une multitude de sources non visées. En fait, le Tribunal fait observer que la part du marché canadien détenue par les importations provenant de pays non visés était importante, même si elle a évolué à la baisse, durant toute la période visée par l'enquête69 . Par conséquent, Uniboard a dû livrer concurrence sur le marché national à des distributeurs qui vendaient des planchers laminés originaires de pays non visés et de pays visés.

130. Le Tribunal fait observer que, en majeure partie, le prix de vente moyen des importations non en question a dépassé le prix de vente moyen d'Uniboard. Toutefois, à certains moments et pour certains produits, les revêtements de sol provenant de certains pays non visés ont effectivement été vendus à des prix inférieurs aux revêtements de sol d'Uniboard70 . Par conséquent, le Tribunal est d'avis que la présence sur le marché canadien d'un important volume d'importations originaires de sources non visées, dont certaines étaient offertes à des prix concurrentiels par rapport aux produits d'Uniboard, peut aussi avoir eu une incidence négative sur Uniboard à l'occasion. Par exemple, le Tribunal prend note d'un cas où, pour réaliser une vente, Uniboard a dû baisser son prix et adopter une fourchette inférieure à celle d'un produit belge également vendu par Home Hardware, un de ses clients71 .

131. Une situation particulière afférente aux importations non en question mettait en cause Domcor Tarkett (Domcor). Domcor était le distributeur national d'Uniboard entre 1996 et 2003, et faisait la promotion de son produit Multilook dans l'ensemble du Canada. Domcor a également joué un rôle crucial par rapport au développement du marché des planchers laminés dans tout le Canada lorsque ce produit en était encore à ses débuts72 . En 2001 et en 2002, les ventes d'Uniboard à Domcor étaient considérables, et Domcor était un client précieux d'Uniboard73 . À partir de 2002, Domcor a commencé à réduire ses achats auprès d'Uniboard et, au milieu de 2003, elle avait complètement cessé d'acheter des produits auprès d'Uniboard, achetant plutôt auprès de l'usine allemande dans laquelle sa nouvelle société mère avait un intérêt conjoint74 .

132. Le Tribunal fait observer que la perte de son principal distributeur national a porté un dur coup à Uniboard. Le Tribunal estime que, même si Uniboard a pu remplacer une partie du volume de ventes perdu75 , ses efforts auraient été plus fructueux n'eût été de la présence des importations sous-évaluées et subventionnées sur le marché national, une présence qui a miné la compétitivité d'Uniboard au niveau des prix.

Pertes liées au taux de change

133. Comme il a déjà été souligné, en avril 2002, à l'époque où Uniboard avait peine à réaliser des ventes rentables au Canada, sur un marché caractérisé par la présence d'importations à bas prix sous-évaluées et subventionnées, le comité de vérification de son conseil d'administration lui a servi un ultimatum selon lequel elle devait trouver des débouchés rentables à défaut de quoi elle risquait de devoir fermer son usine de Laval76 . Peu après, au milieu de 2002, Uniboard a décroché un contrat avec les magasins à succursales Sam's Club aux États-Unis. Ses affaires avec Sam's Club se sont révélées florissantes et, en 2003, Uniboard a été nommée « Fournisseur de l'année »77 . Uniboard a aussi pu trouver un acheteur aux États-Unis pour son excédent de panneaux non finis78 .

134. Toutefois, le Tribunal fait observer que, même lorsque Uniboard réalisait des ventes rentables aux États-Unis, elle s'exposait à de graves risques liés au taux de change en transigeant une partie de ses ventes en dollars américains79 . Le Tribunal a entendu les témoignages selon lesquels Uniboard ne disposait pas à l'époque de ressources financières suffisantes pour investir dans des instruments financiers (p. ex. « opérations de couverture ») et ainsi atténuer les risques afférents aux variations du taux de change80 . Le Tribunal fait aussi observer que, n'eût été de la présence des importations sous-évaluées et subventionnées sur le marché canadien, Uniboard n'aurait pas été contrainte de dépendre autant qu'elle l'a fait du marché des États-Unis et, par conséquent, aurait évité certaines des pertes liées au taux de change qu'elle a essuyées81 durant la période visée par l'enquête.

Qualité et gamme des produits, service et innovation

135. Les parties qui s'opposent à des conclusions de dommage ont signalé la qualité médiocre du produit et du service au nombre des facteurs qui expliqueraient la baisse des ventes et de part du marché d'Uniboard. Le Tribunal a examiné ces allégations et a conclu qu'il y a abondance d'éléments de preuve au dossier qui attestent du contraire. Plus précisément, le Tribunal a entendu des témoignages du plus grand client canadien d'Uniboard, Home Hardware, confirmant la réputation d'Uniboard des points de vue de la qualité élevée de ses produits et de son service, et louangeant son taux extrêmement faible de produits retournés82 . De plus, le fait d'avoir été nommée « Fournisseur de l'année » en 2003 par son plus grand client des États-Unis, Sam's Club83 , ainsi que par un important distributeur canadien membre de l'ILDC, Sodisco-Howden, en 200184 , témoigne éloquemment de l'excellence de la qualité des produits et du service d'Uniboard. En ce qui a trait aux allégations de qualité et de service médiocres énoncées dans une lettre envoyée au Tribunal par Stafford Agencies, le Tribunal n'a pas tenu compte de cet élément de preuve qu'il n'a pas jugé crédible, étant donné que Stafford Agencies a reconnu avoir acheté auprès d'Uniboard surtout des produits de qualité inférieure85 . Selon le Tribunal, il serait déraisonnable de s'attendre qu'un fournisseur donne des garanties et des services après vente relativement à de tels produits, dont on sait, dans ce secteur d'activité, qu'ils sont pour l'essentiel vendus à très fort rabais.

136. Les parties qui s'opposent à des conclusions de dommage ont aussi fait valoir qu'Uniboard avait été lente à réagir à la demande des consommateurs sur le marché canadien pour de nouveaux produits et l'ont qualifiée d'insuffisamment novatrice. À cet égard, le Tribunal prend note du rôle de chef de file au niveau des produits qu'a joué Uniboard en introduisant la technologie homologuée d'impression par gaufrage reconnue par l'un de ses concurrents directs qui a témoigné devant le Tribunal comme une technologie de pointe au moment de son introduction86 . Le Tribunal fait également observer qu'Uniboard offre des planchers laminés avec endos insonorisant préinstallé et a investi dans du matériel pour en accélérer la production. La question n'est pas tellement de savoir si ce produit particulier sera bien reçu du marché, mais celle qu'elle constitue un élément de preuve qu'Uniboard, comme d'autres fabricants, tente d'innover pour différencier sa gamme de produits de celle d'autres fabricants.

137. En outre, le Tribunal fait observer que la récente décision d'Uniboard d'investir dans une deuxième ligne de taille et d'usinage lui permettra d'offrir des produits comme des planchers laminés d'une épaisseur de 12 mm et des planchers laminés faits de planches étroites biseautées87 . Le Tribunal reconnaît qu'Uniboard se trouve présentement placée dans une situation désavantageuse, puisqu'elle ne peut pas offrir ces produits, mais il a aussi entendu des témoignages selon lesquels il s'agit de produits qui n'ont été introduits sur le marché canadien qu'à la fin de 200388 et le Tribunal ne peut donc s'expliquer l'énorme perte de part de marché subie par Uniboard au cours des premières années de la période visée par l'enquête.

138. Sa gamme limitée de produits serait un autre facteur qui, selon les parties qui s'opposent à des conclusions de dommage, aurait contribué à la baisse des ventes d'Uniboard. Le Tribunal constate que la gamme actuelle de produits d'Uniboard représente de 63 à 75 UGS par rapport à celle de Quality Craft, qui compte plus de 300 UGS. D'après le Tribunal, il est tout à fait raisonnable de s'attendre qu'un distributeur comme Quality Craft, qui achète des produits auprès de divers fournisseurs89 , offre une plus vaste gamme de produits qu'un fabricant comme Uniboard. De toute façon, le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels le noyau principal de l'offre de Quality Craft représente en fait environ 70 UGS90 . Enfin, le Tribunal fait observer que, en investissant dans une deuxième ligne de taille et d'usinage, Uniboard prévoit augmenter considérablement le nombre de produits qu'elle offre91 .

Produits de qualité inférieure

139. Les produits de qualité inférieure sont habituellement vendus sur un marché secondaire, à des négociants spécialisés92 , à environ la moitié du prix des produits de première qualité93 .

140. Après le lancement au printemps de 2001, il s'est écoulé un certain temps avant que les nouvelles installations de production d'Uniboard à Laval soient exploitées à pleine capacité et fabriquent les produits de première qualité au niveau attendu. En 2005, maintenant que l'usine de Laval est exploitée à sa pleine capacité ou presque, la production de produits de qualité inférieure d'Uniboard se situe au taux plus normal de 2 p. 100 de la production globale94 .

141. Puisque les produits de qualité inférieure sont vendus à bas prix sur le marché et que leur coût de fabrication est le même que celui des produits de première qualité, Uniboard a tendance à les vendre surtout au Canada pour éviter les coûts supplémentaires qu'exigerait leur exportation95 . Cependant, contrairement aux arguments de Quality Craft et de Vöhringer selon lesquels les ventes de produits de qualité inférieure d'Uniboard ont eu pour effet de comprimer les prix des produits de revêtement de sol de première qualité sur le marché canadien, le Tribunal est d'avis que les ventes de produits de qualité inférieure n'ont eu guère d'effet sur l'établissement des prix. Non seulement ces produits sont-ils vendus sur un marché secondaire, distinct, mais leur volume global est faible par rapport à la taille globale du marché national. De plus, Uniboard en est l'unique source, puisque aucun élément de preuve n'indique qu'il se vend des produits de qualité inférieure importés. De plus, même en intégrant les ventes de tels produits dans le calcul du prix moyen des produits d'Uniboard, le prix moyen des importations en question représente toujours une sous-cotation, et ce, avec une marge importante, par rapport au prix moyen d'Uniboard. Selon le Tribunal, les ventes de produits de qualité inférieure d'Uniboard durant la période visée par l'enquête ont effectivement eu une incidence négative sur ses résultats. Toutefois, sans la présence des importations sous-évaluées et subventionnées sur le marché canadien, Uniboard aurait pu vendre un volume beaucoup plus considérable de produits de revêtement de sol de première qualité et, par conséquent, l'incidence financière néfaste de ses ventes de produits de qualité inférieure s'en serait trouvée fortement réduite.

Stocks

142. Ainsi qu'il a été souligné, au quatrième trimestre de 2002, Uniboard s'est retrouvée avec un excédent de stocks96 , à savoir le résultat d'un impératif de production qui consistait à exploiter continuellement ses installations à presque 100 p. 100 de leur capacité97 , et de l'incapacité d'Uniboard de livrer concurrence aux importations sous-évaluées et subventionnées à bas prix ainsi que son refus de vendre à perte. Uniboard a dû liquider un volume considérable de ses stocks en 2003, en les vendant à prix réduit à ses clients actuels98 . Il se peut que ces ventes à prix réduit aient eu une incidence négative sur le rendement net d'Uniboard en 2003. Le Tribunal est toutefois d'avis que cette accumulation d'un excédent de stocks était dans une grande mesure attribuable au fait qu'Uniboard n'a pas pu maintenir le niveau de ses ventes sur le marché national en 2002 à cause de la sous-cotation des prix opérée par les importations sous-évaluées et subventionnées.

Rendement à l'exportation

143. Son rendement à l'exportation aux États-Unis n'était clairement pas un facteur qui aurait contribué au dommage subi par Uniboard. En fait, comme Uniboard l'a affirmé « le marché des États-Unis a été le canot de sauvetage dans lequel Uniboard est montée pour survivre à l'assaut des importations sous-évaluées et subventionnées à bas prix qui inondaient le marché canadien »99 [traduction]. À cet égard, le Tribunal renvoie à nouveau à la décision rendue par le groupe spécial binational dans Réfrigérateurs, lave-vaisselle et sécheuses. En outre, la réussite d'Uniboard sur le marché d'exportation lui a permis de réaliser des économies d'échelle, lesquelles ont contribué à ses efforts de réduction des coûts et ont rendu son prix unitaire plus concurrentiel.

Autres facteurs

144. Quant aux autres facteurs prescrits au paragraphe 37.1(3) du Règlement, le Tribunal fait observer que, loin d'être l'objet d'une contraction de la demande ou d'une modification de la configuration de la consommation, le marché national a connu une croissance considérable durant la période visée par l'enquête, les éléments de preuve portant généralement à croire à la poursuite de cette croissance à l'avenir. De plus, le Tribunal n'a été saisi d'aucun élément de preuve de dommage attribuable aux pratiques commerciales restrictives de producteurs étrangers.

Conclusion

145. Indépendamment de toute perte qui pourrait être imputée aux facteurs autres que le dumping susmentionnés, le Tribunal est d'avis que le dommage causé par le dumping et le subventionnement des marchandises en question est un dommage sensible. Cette conclusion se fonde sur l'effet global qu'a eu sur Uniboard la perte d'une part de marché, la compression des prix et le report de son investissement.

Importation massive

146. Uniboard a prétendu que, relativement à la Chine, il est en l'espèce satisfait aux conditions régissant l'imposition de conclusions d'importation massive des marchandises en question. Elle a soutenu que, selon les éléments de preuve, il y a eu une augmentation considérable du volume des importations et que l'exportateur était au courant de la décision probable de dumping et de subventionnement et s'était efforcé de « faire le plein » avant la décision provisoire de l'ASFC.

147. Quality Craft a prétendu que la valeur des importations en question provenant de la Chine n'a augmenté que légèrement entre les deux périodes comparables, calculée sur une année. Elle a aussi prétendu que, entre la date d'ouverture de l'enquête de l'ASFC et la date prévue de sa décision provisoire, les importateurs des marchandises en question provenant de la Chine n'ont pratiquement pas eu la possibilité de passer des commandes qui auraient été livrées à temps pour éviter les droits, étant donné que le délai de livraison depuis la Chine est de 10 à 12 semaines. Quality Craft a soutenu que ses produits sont commandés et vendus à l'avance et non pas à des fins de constitution de stocks. Vöhringer a appuyé les arguments de Quality Craft. EPI a fait observer que la branche de production nationale n'avait pas plaidé en faveur de conclusions d'importation massive de produits provenant de la France.

148. Les alinéas 42(1)b) et c) de la LMSI stipulent ce qui suit :

b) si, dans le cas des marchandises sous-évaluées objet de la décision provisoire :

(i) d'une part

(A) ou bien a eu lieu une importation considérable de marchandises similaires sous-évaluées dont le dumping a causé un dommage ou en aurait causé si des mesures antidumping n'avaient pas été prises,

(B) ou bien l'importateur des marchandises était ou aurait dû être au courant du dumping que pratiquait l'exportateur et du fait que ce dumping causerait un dommage.

(ii) d'autre part, un dommage a été causé du fait que les marchandises sous-évaluées :

(A) soit représentent une importation massive,

(B) soit appartiennent à une série d'importations, massives dans l'ensemble et échelonnées sur une période relativement courte,

et le Tribunal estime nécessaire que soient imposés des droits sur les marchandises importées afin de prévenir la réapparition du dommage;

c) si, dans le cas de marchandises subventionnées, pour lesquelles un montant a été spécifié en application de la division 41(1)a)(iv)(C), objet de la décision provisoire :

(i) d'une part, un dommage a été causé du fait que les marchandises subventionnées :

(A) soit représentent une importation massive,

(B) soit appartiennent à une série d'importations, massives dans l'ensemble et échelonnées sur une période relativement courte;

(ii) d'autre part, des droits compensateurs devraient être imposés sur les marchandises subventionnées afin de prévenir la réapparition du dommage.

149. Le Tribunal fait observer que les dispositions sur le dumping (alinéa 42(1)b) de la LMSI) et sur le subventionnement (alinéa 42(1)c) de la LMSI) se composent de trois éléments ou critères distincts qui doivent tous être satisfaits pour que puissent être rendues des conclusions aux termes de ces dispositions.

150. Le Tribunal traitera d'abord de la disposition sur le subventionnement et, plus particulièrement, des importations subventionnées provenant de la Chine. Le premier critère prévu dans la disposition sur le subventionnement est une exigence prescrite en conformité avec la division 41(1)a)(iv)(C) de la LMSI en ce qui concerne les marchandises provenant de la Chine. L'article 41 stipule ce qui suit :

41. (1) Dans les quatre-vingt-dix jours suivant sa décision rendue en vertu du paragraphe 38(1) au sujet de marchandises d'un ou de plusieurs pays, le commissaire, selon le cas :

a) si, au vu des éléments de preuve disponibles, il est convaincu, au sujet des marchandises visées par l'enquête, des faits suivants :

(i) les marchandises ont été sous-évaluées ou subventionnées;

(ii) la marge de dumping ou le montant de subvention octroyé, relativement aux marchandises d'un ou de plusieurs de ces pays, n'est pas minimal,

rend une décision définitive de dumping ou de subventionnement après avoir précisé, pour chacun des exportateurs - visés par l'enquête - des marchandises d'un ou de plusieurs de ces pays :

(iii) dans le cas de marchandises sous-évaluées, les marchandises objet de la décision et leur marge de dumping

(iv) dans le cas de marchandises subventionnées :

(A) les marchandises objet de la décision,

(B) le montant de subvention octroyée pour elles,

(C) sous réserve du paragraphe (2), le montant, s'il y a lieu, de la subvention prohibée octroyée pour elles;

b) fait clore l'enquête sur les marchandises au sujet desquelles, au vu des éléments de preuve disponibles, il n'y a pas d'exportateur à l'égard de qui il en arrive à la constatation prévue à l'alinéa a).

(2) Rien n'est précisé aux termes de la division (1)a)(iv)(C) si, eu égard au pays qui octroie la subvention à l'exportation, à la nature des marchandises et aux circonstances entourant l'octroi, le commissaire est d'avis que cet octroi n'est pas contraire aux obligations de ce pays aux termes de l'accord international dénommé Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994.

151. À cet égard, le Tribunal fait observer que l'ASFC a déclaré ce qui suit dans son énoncé des motifs de sa décision définitive :

Droits rétroactifs sur les importations massives

[146] Dans certaines circonstances, un droit antidumping et un droit compensateur peuvent être imposés rétroactivement sur les marchandises en cause importées au Canada. Lorsque le Tribunal mène une enquête sur le dommage sensible causé à la branche de production nationale, il peut se demander si les marchandises sous-évaluées et/ou subventionnées qui ont été importées vers la date d'ouverture de l'enquête ou après cette date constituent des importations massives sur une période de temps relativement courte et si elles ont causé un dommage à la branche de production nationale. Si le Tribunal rend une conclusion voulant qu'il y ait eu de récentes importations massives de marchandises sous-évaluées et/ou subventionnées qui ont causé un dommage, les importations de marchandises en cause dédouanées dans les 90 jours précédant la date de la décision provisoire pourraient être assujetties à un droit antidumping et/ou à un droit compensateur.

[147] Cependant, en ce qui concerne les importations de marchandises subventionnées qui ont causé un dommage, cette disposition s'applique seulement si le président a déterminé que tout ou partie de la subvention sur les marchandises est une subvention prohibée. Dans un tel cas, le montant du droit compensateur appliqué rétroactivement sera égal au montant de subvention sur les marchandises qui est une subvention prohibée. Puisque le président n'a pas déterminé qu'une partie quelconque de la subvention sur les marchandises est une subvention prohibée, un droit compensateur ne sera pas imposé rétroactivement sur les marchandises en cause importées au Canada100 .

152. À la lumière de l'énoncé de l'ASFC qui précède, le Tribunal conclut qu'il n'est pas satisfait au premier critère prévu dans la disposition sur le subventionnement.

153. En ce qui a trait à la disposition sur le dumping, sa première partie présente une alternative, et il suffit qu'il soit satisfait à un des deux critères pour que la deuxième partie s'applique. Plus précisément, le Tribunal doit faire enquête sur la question de savoir s'il y a eu « une importation considérable de marchandises similaires sous-évaluées dont le dumping a causé un dommage ou en aurait causé si des mesures antidumping n'avaient pas été prises ». Aux termes du critère formant l'autre membre de l'alternative, le Tribunal doit faire enquête sur la question de savoir si « l'importateur des marchandises était ou aurait dû être au courant du dumping que pratiquait l'exportateur et du fait que ce dumping causerait un dommage ».

154. Aux termes de la deuxième partie de la disposition sur le dumping, le Tribunal doit faire enquête sur la question de savoir si, d'une part, un dommage a été causé du fait que les marchandises subventionnées « représentent une importation massive » ou « appartiennent à une série d'importations, massives dans l'ensemble et échelonnées sur une période relativement courte ».

155. Aux termes de la troisième partie de la disposition sur le dumping, le Tribunal doit décider s'il est nécessaire que soient imposés des droits « afin de prévenir la réapparition du dommage ».

156. Dans l'analyse des critères susmentionnés prévus dans la disposition sur le dumping, le Tribunal a aussi pris en compte les facteurs prescrits par le Règlement et plus précisément les facteurs suivants :

37.11 Les facteurs pris en compte pour décider si les marchandises sous-évaluées ou subventionnées représentent une importation massive ou appartiennent à une série d'importations, massives dans l'ensemble et échelonnées sur une période relativement courte, qui a causé un dommage sont les suivants :

a) le fait qu'il y a eu ou non une augmentation d'au moins 15 % des importations de ces marchandises qui proviennent d'un pays exportateur en particulier et à l'égard desquelles une enquête menée aux termes de la Loi n'est pas terminée, au cours d'une période représentative comprise entre le quatre-vingt-dixième jour précédant le jour d'ouverture de l'enquête et le jour de la décision provisoire rendue par le commissaire en vertu du paragraphe 38(1) de la Loi, par rapport à une période représentative antérieure de durée comparable comprise dans la période d'enquête;

b) si le Tribunal a établi, par ordonnance ou dans ses conclusions, que le dumping des marchandises a causé un dommage ou un retard, ou menace de causer un dommage, le fait que l'importateur, le producteur ou l'exportateur des marchandises sous-évaluées en a ou non importé au Canada ou exporté vers le Canada dans le passé;

c) le fait que les autorités d'un pays autre que le Canada ont déterminé ou non que le dommage subi par la branche de production nationale de ce pays était attribuable au dumping de marchandises de même description ou semblables par un exportateur des marchandises qui font l'objet de l'enquête;

d) le fait que les stocks nationaux de marchandises sous-évaluées ou subventionnées ont ou non augmenté de façon importante au cours d'une période relativement courte;

e) tout autre facteur pertinent, compte tenu des circonstances101 .

157. Aux termes de l'alinéa 37.11a) du Règlement, le Tribunal doit comparer les volumes d'importation entre deux périodes « représentatives » que le Tribunal, en l'espèce, a définies comme allant, respectivement, d'octobre 2003 à janvier 2004 et d'octobre 2004 à janvier 2005, inclusivement dans les deux cas. En outre, en ce qui a trait à l'alinéa 37.11d) et à l'analyse de la taille des stocks, le Tribunal a défini, aux fins de l'espèce, une « période relativement courte » à savoir la période allant du 1er octobre 2004 au 31 janvier 2005.

158. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal a recueilli des renseignements102 auprès des exportateurs et des importateurs sur les volumes d'importations durant les périodes représentatives définies ci-dessus. De même, il a obtenu des données sur la taille des stocks au 1er octobre 2004 et au 31 janvier 2005.

159. Le volume des importations provenant de la Chine a augmenté de 232 p. 100 entre les deux périodes comparables, tandis que le volume des importations provenant de la France n'a augmenté que de 1 p. 100. En outre, entre les deux périodes comparables, la taille des stocks a augmenté de 60 p. 100 dans le cas de la Chine et de 55 p. 100 dans le cas de la France103 .

160. En ce qui a trait aux autres facteurs prescrits, le Tribunal fait observer que, en ce qui a trait aux planchers laminés, ni le Canada ni d'autres pays n'ont par le passé imposé à leur égard de mesures antidumping ou compensatoires104 .

161. Quant aux importations provenant de la France, le Tribunal fait observer que les données sur le volume des importations est manifestement tel qu'il n'est pas satisfait au seuil de 15 p. 100 prévu à l'alinéa 37.11a) du Règlement et conclut donc que les importations provenant de la France ne constituent pas une importation massive au Canada.

162. Quant aux importations provenant de la Chine, et compte tenu du volume d'importations et de stocks ainsi que des autres facteurs prescrits, le Tribunal conclut que les éléments de preuve établissent clairement qu'a « eu lieu une importation considérable de marchandises similaires sous-évaluées dont le dumping a causé un dommage ou en aurait causé si des mesures antidumping n'avaient pas été prises » et, de ce fait, qu'il est donc satisfait à la première partie de la disposition sur le dumping. Le Tribunal conclut aussi qu'un dommage a été causé du fait que les marchandises sous-évaluées et subventionnées « représentent une importation massive » au Canada et, de ce fait, qu'il est donc satisfait à la deuxième partie de la disposition sur le dumping.

163. En outre, relativement à la Chine, même s'il est satisfait aux deux premiers critères prévus dans la disposition sur dumping, le Tribunal conclut qu'il n'est pas satisfait au dernier critère, à savoir que des droits doivent être imposés afin de prévenir la réapparition du dommage. À cet égard, le Tribunal reprend le raisonnement énoncé dans Barres d'armature :

Les droits antidumping avec effet rétroactif doivent être imposés pour contrer la réapparition possible du dommage causé par les importations massives de marchandises sous-évaluées qui saperaient l'imposition des droits antidumping provisoires et définitifs. Cela peut être le cas lorsque des importations sous-évaluées sont entrées au Canada en quantité massive avant la décision provisoire, menant, par exemple, à une constitution rapide de stocks ou à une accumulation des stocks. De telles marchandises pourraient alors être vendues à des prix dommageables après l'imposition des droits antidumping provisoires et, donc, entraîner une réapparition du dommage, ce qui saperait l'effet correctif prévu des droits antidumping définitifs105 . [Note de bas de page omise]

164. Le Tribunal n'a pas reçu d'éléments de preuve selon lesquels il y aurait eu accumulation de stocks des marchandises en question provenant de la Chine d'une ampleur telle qu'elle aurait eu une incidence sur le marché canadien après la publication de la décision provisoire de l'ASFC. Il prend note de la déclaration du témoin de Quality Craft selon laquelle les producteurs chinois avec qui elle traite ne produisent de planchers laminés que sur commande106 . Selon le Tribunal, la disposition dont il est question a pour objet de décourager l'importation de grandes quantités de marchandises dont la présence se ferait sentir sur le marché après la décision provisoire. Le Tribunal conclut que, en l'espèce, le volume des importations de planchers laminés provenant de la Chine qui sont entrées au Canada entre la date de l'ouverture de l'enquête de l'ASFC et celle de sa décision provisoire était tel que toutes ces marchandises, ou presque, auraient été absorbées par le marché avant la publication de la décision provisoire. Pour tirer cette conclusion, le Tribunal s'est fondé sur une comparaison entre le volume des importations et la taille du marché canadien, le taux de croissance de la demande sur le marché et le délai de livraison des marchandises importées de la Chine.

EXCLUSIONS

165. Quality Craft a demandé des exclusions de produit eu égard aux planchers laminés d'une épaisseur de 12 mm et aux planches étroites biseautées. À l'appui de ses demandes d'exclusion de produit, elle a fait valoir qu'Uniboard ne produit pas de telles marchandises et ne prévoit pas en produire avant un certain temps. Vöhringer a appuyé les demandes de Quality Craft. EPI a demandé des exclusions de produit visant les carreaux, les planches étroites, les planchers laminés antistatiques, les planchers laminés d'une épaisseur de 12 mm et divers produits en attente de brevet.

166. Uniboard a prétendu que les éléments de preuve au dossier ne suffisaient pas pour justifier l'une ou l'autre des demandes d'exclusion et a fait observer que le Tribunal a pour pratique de n'accorder des exclusions de produit que dans des circonstances exceptionnelles.

167. Le Tribunal fait d'abord observer qu'il a déclaré dans des décisions précédentes que des exclusions ne sont accordées que dans des circonstances exceptionnelles. Dans Fils en acier 107 , il a résumé ainsi son point de vue sur la question des exclusions de produit :

Il est bien établi que le paragraphe 43(1) de la LMSI confère au Tribunal le pouvoir discrétionnaire d'accorder des exclusions de produit. Le principe fondamental est que le Tribunal n'accorde des exclusions de produit que lorsqu'il est d'avis qu'elles ne causeront pas un dommage à la branche de production nationale. Le Tribunal a accordé des exclusions visant des produits particuliers lorsque, par exemple, la branche de production nationale ne fabriquait pas ces produits. Le Tribunal tient également compte des facteurs comme la question de savoir s'il y a une production nationale de marchandises substituables ou concurrentes, si la branche de production nationale est un « fournisseur actif » du produit ou si elle le produit habituellement ou a la capacité de le produire108 . [Notes de bas de page omises]

168. En l'espèce, le Tribunal est d'avis que les demandes d'exclusion se rapportent à des marchandises qui, pour la plupart, sont interchangeables par rapport aux marchandises similaires. Autrement dit, les caractéristiques comme une âme verte, un endos de mousse, une surface antistatique, des arêtes imperméables ou biseautées, etc., sont simplement des caractéristiques du produit de base qui servent à le différencier à l'intérieur du groupe des planchers laminés. Il est donc vraisemblable que, si des exclusions étaient accordées, les importations de ces marchandises en provenance des pays visés causeraient un dommage aux marchandises similaires. Pour ce motif, le Tribunal rejette les demandes d'exclusion.

CONCLUSION

169. Le Tribunal conclut, aux termes du paragraphe 43(1) de la LMSI, que le dumping des planchers laminés originaires ou exportés de la Chine et de la France et le subventionnement de tels produits originaires ou exportés de la Chine ont causé un dommage à la branche de production nationale.


1 . L.R.C. 1985, c. S-15 [LMSI].

2 . Gaz. C. 2005.I.528.

3 . Cette partie du texte a pour objet de décrire diverses observations clés soumises par les parties. Elle ne constitue pas un compte rendu exhaustif.

4 . L'ASFC a récemment mis fin à sa pratique consistant à « réduire à zéro », c.-à-d. de déterminer la marge de dumping pour un modèle ou un type de produit visé par une enquête et de fixer à zéro les marges de dumping négatives.

5 . Les produits de qualité inférieure sont ceux qui ne satisfont pas pleinement aux normes de l'industrie.

6 . Ci-après collectivement appelées Vöhringer.

7 . Ci-après collectivement appelées EPI.

8 . États-Unis - Mesures antidumping appliquées à certains produits en acier laminés à chaud en provenance du Japon (24 juillet 2001), AB-2001-2.

9 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm> [Accord antidumping].

10 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-03, dossier administratif, vol. 1 à la p. 148.

11 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-28, dossier administratif, vol. 1 à la p. 215.

12 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-01A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 87.

13 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-33 (exemplaire unique), dossier administratif de l'enquête préliminaire de dommage no PI-2004-003, vol. 1B aux pp. 150-152.

14 . L'article 2 de la LMSI définit « minimale » de la façon suivante :

a) dans le cas de la marge de dumping, d'une marge inférieure à deux pour cent du prix à l'exportation des marchandises;

b) dans le cas du montant de subvention, d'un montant inférieur à un pour cent du prix à l'exportation des marchandises.

L'ASFC a indiqué que la marge de dumping pour la Chine était de 7,8 p. 100; par conséquent, le Tribunal conclut que la marge de dumping pour la Chine n'est pas « minimale » (pièce du Tribunal NQ-2004-006-04A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 182.110). Afin de déterminer si le montant de subvention pour les importations en provenance de la Chine est « minimal », le Tribunal a pris en considération les dispositions de l'article 27.12 de l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires de l'OMC, tel qu'il est indiqué au paragraphe 42(4) de la LMSI, lequel prévoit un seuil « minimal » de deux p. 100 pour la Chine à titre de pays en développement membre de l'OMC. L'ASFC a indiqué que le montant de subvention pour les importations en provenance de la Chine est de trois p. 100; par conséquent, le Tribunal conclut que le montant de subvention pour les importations en provenance de la Chine n'est pas « minimal ».

15 . L'ASFC a indiqué que la marge de dumping pour la France est de 7,0 p. 100; par conséquent, le Tribunal conclut que la marge de dumping pour la France n'est par « minimale » (pièce du Tribunal NQ-2004-006-04A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 182.110).

16 . Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit le terme « négligeable » en partie ainsi : « Qualificatif applicable au volume des marchandises sous-évaluées, provenant d'un pays donné, qui est inférieur à un volume représentant trois pour cent de la totalité des marchandises de même description dédouanées au Canada ». Afin de déterminer si le volume des importations sous-évaluées est négligeable, le Tribunal a d'abord calculé le volume des marchandises sous-évaluées en provenance de la Chine et de la France en se servant des renseignements figurant dans des pièces confidentielles jointes à la décision définitive de l'ASFC. Il a utilisé ce chiffre comme numérateur. Pour le dénominateur, le Tribunal s'est fié aux données qu'il a recueillies concernant les volumes d'importations totaux dans le cadre de son enquête. Par conséquent, le Tribunal a conclu que le volume des importations sous-évaluées en provenance de la Chine et de la France n'étaient pas négligeables dans ces conditions.

17 . La LMSI définit « négligeable » en ce qui concerne le volume de marchandises sous-évaluées seulement, et aucune définition n'est fournie pour le terme « négligeable » en ce qui concerne les marchandises subventionnées. Cependant, l'article 27.10 de l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires de l'OMC prévoit un seuil « négligeable » de 4 p. 100 pour les pays en développement, y compris la Chine. Selon le Tribunal, le seuil « négligeable » de 4 p. 100 pour les pays en développement s'applique à la Chine. Ceci est conforme à l'article 41.2 de la LMSI, lequel prévoit que l'ASFC doit, lors d'une enquête concernant le subventionnement de toute marchandise, prendre en considération les dispositions de l'article 27.10 de l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires. Par conséquent, puisque la LMSI prévoit que l'ASFC doit clore son enquête si le volume des importations subventionnées au Canada en provenance d'un pays en développement est de moins de 4 p. 100 du total des importations des marchandises similaires, le Tribunal est d'avis qu'il doit interpréter le paragraphe 42(4.1) de la LMSI à la lumière de l'article 41.2 de la LMSI et appliquer le même seuil. Afin de déterminer si le volume des importations subventionnées est négligeable, le Tribunal s'est fié aux mêmes renseignements que ceux utilisés eu égard aux importations sous-évaluées. Par conséquent, le Tribunal a conclu que le volume des importations subventionnées en provenance de la Chine n'était pas négligeable dans ces conditions.

18 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 aux pp. 219, 220.

19 . Rapport du personnel préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-06, dossier administratif, vol. 1.2 à la p. 76.

20 . Transcription de l'audience publique, vol. 4, 24 mai 2005, à la p. 345; Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 à la p. 204.

21 . Transcription de l'audience publique, vol. 4, 24 mai 2005, à la p. 327.

22 . Maïs-grain (7 mars 2001), NQ-2000-005 (TCCE).

23 . D.O.R.S./84-927 [Règlement].

24 . (16 janvier 2002), CDA-USA-2000-1904-04 (Ch. 19 groupe spécial).

25 . L'extrait pertinent de l'article 3.5 de l'Accord antidumping prévoit en partie :

Celles-ci examineront aussi tous les facteurs connus autres que les importations faisant l'objet d'un dumping qui, au même moment, causent un dommage à la branche de production nationale, et les dommages causés par ces autres facteurs ne devront pas être imputés aux importations faisant l'objet d'un dumping. Les facteurs qui pourront être pertinents à cet égard comprennent, entre autres, le volume t les prix des importations non venues à des prix de dumping, la contraction de la demande ou les modifications de la configuration de la consommation, les pratiques commerciales restrictives des producteurs étrangers et nationaux et la concurrence entre ces mêmes producteurs, l'évolution des techniques, ainsi que les résultats à l'exportation et la productivité de la branche de production nationale. [Soulignement ajouté]

26 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2, à la p. 204.

27 . Rapport du personnel préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-06.01E, dossier administratif, vol. 1.2 à la p. 214.

28 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 aux pp. 214-215.

29 . Rapport du personnel préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-06.01A, dossier administratif, vol. 1.2 à la p. 155.

30 . Ibid. à la p. 157.

31 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 à la p. 206.

32 . Ibid. à la p. 218.

33 . Rapport du personnel préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-06.01E, dossier administratif, vol. 1.2 à la p. 218.

34 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 à la p. 218.

35 . Ibid. aux pp. 242, 244, 246, 248, 250; pièce du fabricant A-05, para. 34, dossier administratif, vol. 11; Transcription de l'audience publique, vol. 3, 20 mai 2005, à la p. 255.

36 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 à la p. 225.

37 . Ibid. à la p. 226.

38 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07 (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 aux pp. 57, 59; Transcription de l'audience publique, 25 mai 2005, aux pp. 42, 50.

39 . Pièce du fabricant A-20 (protégée), tableau III-13, dossier administratif, vol. 12; pièce du Tribunal NQ-2004-006-13.13 (protégée), dossier administratif, vol. 6 à la p. 26; pièce du Tribunal NQ-2004-006-12.17, dossier administratif, vol. 5A à la p. 11.

40 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 124, 125.

41 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 aux pp. 137-144.

42 . Ibid. à la p. 75; Transcription de l'audience publique, vol. 4, 24 mai 2005, à la p. 337.

43 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 27-28, 32.

44 . Ibid. à la p. 28.

45 . Ibid. à la p. 27.

46 . Transcription de l'audience publique, vol. 3, 20 mai 2005, aux pp. 314-315.

47 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, à la p. 30.

48 . Ibid. aux pp. 138-139.

49 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 11-12; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 19 mai 2005, à la p. 253.

50 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 110-111.

51 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 aux pp. 214-215; Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01A (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 à la p. 57.

52 . Rapport du personnel préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-06.01E, dossier administratif, vol. 1.2 à la p. 234.

53 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01A (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 à la p. 165

54 . Rapport du personnel préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-6.01, dossier administratif, vol. 1.2 aux pp. 61-62.

55 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 à la p. 57; pièce du fabricant A-08 (protégée), para. 14, dossier administratif, vol. 12.

56 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 aux pp. 57, 59.

57 . Ibid.

58 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-10.01E (protégée), dossier administratif, vol. 4 à la p. 148; pièce du Tribunal NQ-2004-006-10.01 (protégée), dossier administratif, vol. 4 à la p. 122; Transcription de l'argumentation publique, 25 mai 2005, aux pp. 195-196.

59 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 107-108.

60 . Ibid. à la p. 95-98.

61 . Pièce du fabricant A-01, para. 64, dossier administratif, vol. 11; pièce du fabricant A-06 (protégée), para. 76-77, dossier administratif, vol. 12.

62 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 aux pp. 57, 59; pièce du Tribunal NQ-2004-006-10.01 (protégée), dossier administratif, vol. 4 à la p. 15.

63 . Transcription de l'audience publique, vol. 4, 24 mai 2005, aux pp. 378, 396.

64 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, à la p. 27.

65 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 3, mai 18 2005, aux pp. 16-20; Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 27, 122-123.

66 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-18.11, dossier administratif, vol. 5.2A à la p. 95.

67 . Alberta Hardwood Flooring, François Lespérance, Home Hardware, AFA, et Multisol.

68 . Centura et Matériaux à Bas Prix.

69 . Rapport du personnel protégé préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-07.01B (protégée), dossier administratif, vol. 2.2 aux pp. 214-215.

70 . Ibid. aux pp. 218, 225-228.

71 . Transcription de l'audience publique, vol. 3, 24 mai 2005, aux pp. 303-304.

72 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, à la p. 24.

73 . Pièce du fabricant A-06 (protégée), para. 46, dossier administratif, vol. 12.

74 . Pièce de l'exportateur S-02, paras. 12, 15, dossier administratif, vol. 13A; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 27, 40, 43; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 19 mai 2005, aux pp. 139-140; pièce du fabricant A-06 (protégée), para. 46-55, dossier administratif, vol. 12.

75 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 33-35.

76 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, à la p. 28; pièce du fabricant A-05, para. 73, dossier administratif, vol. 11.

77 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 29-30.

78 . Pièce du fabricant A-01 (protégée), para. 64, dossier administratif, vol. 11.

79 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 82-83; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 19 mai 2005, à la p. 197.

80 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, aux pp. 108-109; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 19 mai 2005, aux pp. 181-182.

81 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-10.01E (protégée), dossier administratif, vol. 4 à la p. 148.

82 . Transcription de l'audience publique, vol. 4, 24 mai 2005, aux pp. 240, 274-275, 313-314.

83 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, à la p. 30.

84 . Ibid. à la p. 25.

85 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-39.01, dossier administratif, vol. 1 à la p. 365.

86 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 19 mai 2005, à la p. 177.

87 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, à la p. 33.

88 . Transcription de l'audience publique, vol. 4, 24 mai 2005 à la p. 334.

89 . Ibid. à la p. 377.

90 . Ibid. à la p. 347.

91 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, à la p. 33.

92 . Ibid. à la p. 113.

93 . Ibid. à la p. 72.

94 . Ibid. à la p. 73.

95 . Ibid. aux pp. 72-73.

96 . Ibid. à la p. 110.

97 . Pièce du fabricant A-03, para. 15, dossier administratif, vol. 11.

98 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 18 mai 2005, à la p. 110; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 19 mai 2005, aux pp. 207-212.

99 . Pièce du fabricant A-12, para. 20, dossier administratif, vol. 11.

100 . Pièce du Tribunal NQ-2004-005.04A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 182.130.

101 . D.O.R.S./2002-67, art. 2, lequel est entré en vigueur le 7 février 2002.

102 . Des questionnaires supplémentaires ont été envoyés à certains exportateurs et importateurs. De plus, le Tribunal a envoyé des demandes de renseignements aux exportateurs et importateurs qui étaient des parties devant le Tribunal. Le Tribunal a recueilli des données sur les volumes d'importations et de stocks pour chaque pays. En choisissant cette méthode, le Tribunal a tenu compte du libellé de l'alinéa 37.11a) du Règlement où il est discuté « des importations de ces marchandises qui proviennent d'un pays exportateur en particulier » [soulignement ajouté]. De plus, le Tribunal admet l'argument d'EPI selon lequel l'article 3 de l'Accord antidumping, celui qui traite de la cumulation, n'est pas incorporé par référence ou autrement dans l'article 10 de l'Accord antidumping, celui qui traite de l'importation massive.

103 . Pièce du Tribunal NQ-2004-006-06C, dossier administratif, vol. 1.1 à la p. 243.

104 . Rapport du personnel préalable à l'audience, pièce du Tribunal NQ-2004-006-06.01, dossier administratif, vol. 1.2 à la p. 20.

105 . (1 juin 2001), NQ-2000-007 (TCCE).

106 . Transcription de l'audience publique, vol. 4, 24 mai 2005, à la p. 389.

107 . (30 juillet 2004), NQ-2004-001 (TCCE).

108 . Ibid. à la p. 22.