PÂTES ALIMENTAIRES SÉCHÉES

Enquêtes


LE DUMPING ET LE SUBVENTIONNEMENT DE PÂTES ALIMENTAIRES SÉCHÉES, NON FARCIES NI AUTREMENT PRÉPARÉES ET NE CONTENANT PAS D’ŒUFS, EN PAQUETS DE 2,3 kg OU MOINS, ORIGINAIRES OU EXPORTÉES D’ITALIE
Enquête no : NQ-95-003

TABLE DES MATIERES


Ottawa, le lundi 13 mai 1996

EU ÉGARD À une enquête aux termes de l’article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d’importation concernant :

LE DUMPING ET LE SUBVENTIONNEMENT DE PÂTES ALIMENTAIRES SÉCHÉES, NON FARCIES NI AUTREMENT PRÉPARÉES ET NE CONTENANT PAS D’ŒUFS, EN PAQUETS DE 2,3 kg OU MOINS, ORIGINAIRES OU EXPORTÉES D’ITALIE

C O N C L U S I O N S

Le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a procédé à une enquête, aux termes des dispositions de l’article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, à la suite de la publication d’une décision provisoire datée du 12 janvier 1996 et d’une décision définitive datée du 11 avril 1996 rendues par le sous-ministre du Revenu national concernant le dumping et le subventionnement de pâtes alimentaires séchées, non farcies ni autrement préparées et ne contenant pas d’œufs, en paquets de 2,3 kg ou moins, originaires ou exportées d’Italie.

Conformément au paragraphe 43(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, le Tribunal conclut, par les présentes, que le dumping et le subventionnement des marchandises susmentionnées n’ont pas causé un dommage sensible à la branche de production nationale et ne menaçent pas de causer un dommage sensible à la branche de production nationale. Le Tribunal conclut également que les exigences de l’alinéa 42(1)b) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation en matière de dumping massif n’ont pas été satisfaites.

Anthony T. Eyton
_________________________
Anthony T. Eyton
Membre présidant


Arthur B. Trudeau
_________________________
Arthur B. Trudeau
Membre


Raynald Guay
_________________________
Raynald Guay
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire

L’exposé des motifs sera publié d’ici 15 jours.

Ottawa, le mardi 28 mai 1996

Enquête no : NQ-95-003

LE DUMPING ET LE SUBVENTIONNEMENT DE PÂTES ALIMENTAIRES SÉCHÉES, NON FARCIES NI AUTREMENT PRÉPARÉES ET NE CONTENANT PAS D’ŒUFS, EN PAQUETS DE 2,3 kg OU MOINS, ORIGINAIRES OU EXPORTÉES D’ITALIE

Loi sur les mesures spéciales d’importation - Déterminer si le dumping et le subventionnement des marchandises susmentionnées ont causé un dommage sensible ou un retard ou menacent de causer un dommage sensible à la branche de production nationale.

DÉCISION : Le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut, par la présente, que le dumping et le subventionnement de pâtes alimentaires séchées, non farcies ni autrement préparées et ne contenant pas d’œufs, en paquets de 2,3 kg ou moins, originaires ou exportées d’Italie n’ont pas causé un dommage sensible à la branche de production nationale et ne menacent pas de causer un dommage sensible à la branche de production nationale.

Le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut également que les exigences de l’alinéa 42(1)b) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation en matière de dumping massif n’ont pas été satisfaites.

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Dates de l’audience : Du 9 au 12 avril 1996
Du 15 au 17 avril 1996

Date des conclusions : Le 13 mai 1996
Date des motifs : Le 28 mai 1996

Membres du Tribunal : Anthony T. Eyton, membre présidant
Arthur B. Trudeau, membre
Raynald Guay, membre

Directeur de la recherche : Selik Shainfarber
Agent principal de la recherche : Tom Geoghegan
Agent de la recherche : Paule Couët

Économiste : Ihn Ho Uhm

Préposés aux statistiques : Shiu-Yeu Li
Nynon Pelland
Lise Lacombe
Craig Dillabaugh

Avocats pour le Tribunal : Hugh J. Cheetham
Shelley Rowe

Agent à l’inscription et
à la distribution : Margaret J. Fisher


Participants : Michael A. Kelen
Jeff Walker
pour L’Association canadienne des fabricants
de pâtes alimentaires

(partie plaignante)
Richard S. Gottlieb
Robert J. Bertrand, c.r.
Peter W. Collins
Lawrence S. Rosen
pour Aurora Importing & Distributing Ltd.
Bella International Food Brokers Inc.
Bertolli Canada Inc.
Canadian Global Foods Corporation
Falesca Importing Ltd.
Italfina Inc.
Molisana Imports
Numage Trading Inc.
Les produits alimentaires SA-GER Inc.
Santa Maria Foods Limited
Siena Foods Ltd.
Weston Produce, Division of
F & F Supermarkets Inc.

(importateurs)
et Unione Industriali Pastai Italiani

(association des producteurs italiens)
et Barilla Alimentare S.p.A.
Colavita Ind. Al. Co. Spa
Lli de Cecco Di Filippo S.p.A.
Delverde, S.R.L.
F. Divella S.P.A.
Pastificio Fabianelli S.p.A.
La Molisana Industrie Alimentari S.p.A.
Nestlé Italiana S.p.A.

(exportateurs)
Marcus Rössl
Rud-Al Co. Ltd.

(importateur)
Kenneth E. Beswick
Commission canadienne du blé

(partie intéressée)

Témoins :
Joseph Vitale
Président et Chef de l’exploitation
Italpasta Limited

Frank DeMichino
Vice-président des ventes
Italpasta Limited

Christine D. Holz
Contrôleur
Italpasta Limited

Bruce W. Major
Président
Division de l’épicerie Nabisco Brands Ltée

Clyde L. Noel
Vice-président et Directeur général
Produits Primo, Division de l’épicerie Nabisco Ltée

Brian V. Keddy
Vice-Président des finances
Division de l’épicerie Nabisco Brands Ltée

Jerry D. Young
Président et Chef de la direction
Borden Foods Canada

Mike Andrews
Vice-président des finances
Borden Catelli
Groupe de l’épicerie et de la restauration
Division de La Compagnie Borden, Limitée

Don Meaker
Vice-président des ventes
Borden Catelli
Groupe de l’épicerie et de la restauration
Division de La Compagnie Borden, Limitée

Charles L. McKague
Vice-président de l’approvisionnement
The Great Atlantic & Pacific Company of Canada Limited

Robert Galati
Directeur
Galati Bros. Supermarkets

Chester Dziemanko
Gestionnaire des catégories
National Grocers Co. Ltd.

Don Jarvis
Directeur exécutif
Association canadienne des fabricants de pâtes alimentaires

Kenneth E. Beswick
Commissaire
Commission canadienne du blé

Marcus Rössl
Rud-Al Co. Ltd.

John Porco
Vice-président des ventes
Unico Inc.

Luigi Paccione
Vice-président
Ventes et exploitation
Bertolli Canada Inc.

Bruno Salafia
Directeur de l’exploitation et Acheteur
Aurora Importing & Distributing Ltd.

Italo P. Rosati
Président et Chef de la direction
Santa Maria Foods Limited

Jack Lo Giacco
Gérant des clients importants
Santa Maria Foods•Sales•Limited

Santo A. Fata
Président
Les produits alimentaires SA-GER Inc.

Vito Violante
Associé et Directeur général
Italfina Inc.

Frank Trimarchi
Directeur général
Bella International Food Brokers Inc.

Anna Di Biase
Directeur général
Molisana Imports
A Division of 996660 Ontario Limited

Frank Di Biase
Directeur-adjoint
Molisana Imports
A Division of 996660 Ontario Limited

Eddy Petaccia
Vice-président
Produits Grisspasta Ltée

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a procédé à une enquête, aux termes des dispositions de l’article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d’importation [1] (la LMSI), à la suite de la publication par le sous-ministre du Revenu national (le Sous-ministre) d’une décision provisoire [2] datée du 12 janvier 1996 et d’une décision définitive [3] datée du 11 avril 1996 concernant le dumping et le subventionnement de pâtes alimentaires séchées, non farcies ni autrement préparées et ne contenant pas d’œufs, en paquets de 2,3 kg ou moins, originaires ou exportées d’Italie.

Le 12 janvier 1996, le Tribunal a publié un avis d’ouverture d’enquête [4] . Dans le cadre de l’enquête, le Tribunal a envoyé des questionnaires détaillés aux fabricants, aux importateurs et aux acheteurs canadiens de pâtes alimentaires séchées ainsi qu’aux représentants de la branche de production italienne de pâtes alimentaires séchées. Les répondants ont fourni des renseignements sur la production, la situation financière, les importations, les exportations et le marché, ainsi que d’autres données se rapportant aux pâtes alimentaires séchées, pour la période allant du 1er janvier 1992 au 31 décembre 1995.

Le dossier de la présente enquête comprend toutes les pièces du Tribunal, y compris les réponses publiques et protégées aux questionnaires, toutes les pièces déposées par les parties à l’audience et la transcription de toutes les délibérations. Toutes les pièces publiques ont été mises à la disposition des parties, mais seuls les avocats indépendants qui avaient déposé un acte de déclaration et d’engagement auprès du Tribunal ont eu accès aux pièces protégées.

RÉSULTATS DE L’ENQUÊTE DU SOUS-MINISTRE

Les produits qui font l’objet de la présente enquête sont décrits par le Sous-ministre dans la décision définitive comme étant des pâtes alimentaires (désignées ci-après «pâtes») séchées, non farcies ni autrement préparées et ne contenant pas d’œufs, en paquets de 2,3 kg ou moins, originaires ou exportées d’Italie. Dans ses décisions provisoire aussi bien que définitive, le Sous-ministre a indiqué que les marchandises en question étaient des pâtes séchées préparées à partir de blé dur, y compris les pâtes séchées contenant d’autres ingrédients comme des épinards, des tomates et des vitamines, qui ont pu y être ajoutés à des fins esthétiques et nutritives.

Les pâtes séchées sont souvent appelées macaroni ou vermicelle, selon leur forme. Dans le cas des pâtes longues, on parlera généralement de vermicelle, ce qui comprend les spaghettis, les capellis, les linguinis, les vermicelles proprement dits, les cheveux d’ange et les fettucinis. Les pâtes courtes sont normalement appelées macaroni et comprennent les coudes, les plumes, les rigatonis, les rotinis, les fusillis et les zitis. On trouve aussi des produits de pâtes séchées qui ont des formes spéciales, notamment les boucles, les coquilles, les cannellonis, la lasagne et les roues. Les pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins sont emballées dans du cellophane ou des boîtes en carton, de différents formats, les paquets de 450 g, de 500 g et de 900 g étant les plus populaires.

Dans la décision définitive, le Sous-ministre a énuméré 106 sociétés italiennes qui ont exporté les marchandises en question au Canada. Le ministère du Revenu national a demandé des renseignements à 13 de ces sociétés, qui représentaient environ 80 p. 100 des importations des marchandises en question au Canada au cours des périodes visées par l’enquête sur le dumping et le subventionnement, et a indiqué que d’autres sociétés pouvaient fournir des exposés si elles le désiraient.

L’enquête menée par le Sous-ministre sur le dumping visait les expéditions des marchandises en question effectuées au cours de la période allant du 1er juillet 1994 au 30 juin 1995. La période visée par l’enquête sur le subventionnement allait du 1er janvier 1993 au 30 juin 1995.

Le Sous-ministre a conclu qu’au cours de la période visée par l’enquête sur le dumping, 91 p. 100 des marchandises en question exportées au Canada étaient sous-évaluées. Les marges de dumping variaient entre 0 et 50,0 p. 100, les marges de dumping moyennes pondérées étant de 18,8 p. 100. Au cours de la période visée par l’enquête sur le subventionnement, le Sous-ministre a conclu que les exportateurs italiens avaient expédié environ 41 millions de kilogrammes de marchandises en question, dont 34 millions de kilogrammes donnaient droit à des restitutions à l’exportation de l’Union européenne. Le montant de subvention moyen pondéré était de 212 lires/kg, soit environ 0,18 $/kg. Le tableau 1 présente les résultats de l’enquête du Sous-ministre pour les exportateurs sélectionnés.

Tableau 1

MARGES DE DUMPING ET MONTANTS DES SUBVENTIONS
POUR LES EXPORTATEURS SÉLECTIONNÉS

Société

Marge de dumping exprimée en pourcentage de la valeur normale

Montant de la subvention à l’exportation interdite (lires/kg)

Barilla S.p.A.

9,1

258
(usine de Parme)
217
(usines de Caserta et Matera)

Industrie Alimentare Colavita S.p.A.

23,5

24

Delverde S.R.L.

8,8

197

La Molisana Industrie Alimentari S.p.A.

29,7

202

Pastificio De Cecco Di Filippo S.p.A.

11,8

73

Nestlé Italiana S.p.A.

31,4

161
(usine de Sansepolcro)
208
(usine d’Eboli)

Pastificio Fabianelli S.p.A.

6,6

139

Pasta Bernardo S.N.C.

4,8

116

Petrini S.p.A.*

50

299

Liquori S.p.A.

50

186

Pastificio F. Lli Federici S.p.A.*

50

282

Pastificio F. Lli Pagani S.p.A.*

50

233

Pastificio Antonio Pallante S.R.L.*

50

269

Corex S.R.L.

12,1

434

Pasta Combattenti S.p.A.

s.o.

0

Alimentitalia Industria E Commercio

12,1

0

Apulia Traditions S.A.S.

12,1

0

F. Divella S.p.A.

27,1

228

s.o.= Sans objet.

* Aucune réponse fournie à la demande de renseignements du Sous-ministre.

Source : Ministère du Revenu national, décision définitive de dumping et de subventionnement, le 11 avril 1996, Énoncé des motifs, pièce du Tribunal NQ-95-003-4, dossier administratif, vol. 1 aux pp. 150-59.

POSITION DES PARTIES

L’Association canadienne des fabricants de pâtes alimentaires

L’Association canadienne des fabricants de pâtes alimentaires (l’ACFPA), la partie plaignante à cette enquête, est une association corporative représentant tous les producteurs nationaux de pâtes séchées au Canada, à savoir : Borden Catelli Consumer Products, division de La Compagnie Borden, Limitée (Borden), Les Aliments Primo, division de Nabisco Ltée (Primo), Italpasta Limited (Italpasta) et Produits Grisspasta Ltée (Grisspasta).

Borden, le plus important producteur national de pâtes séchées, est une division de La Compagnie Borden, Limitée qui est une unité de Borden Inc., située à Columbus (Ohio). Elle vend des pâtes séchées sous des marques nominales comme Catelli, Lancia, Gattuso, Creamette, Splendor et Romi, ainsi que des produits de marques de distribution à tous les secteurs du marché, c.-à-d. vente au détail, institutions et services d’alimentation et industriel, d’un bout à l’autre du Canada et à l’étranger.

Primo est une division de Nabisco Ltée [5] . La société est intégrée verticalement, effectuant la mouture de son propre blé dur, et ses activités consistent principalement à produire, à distribuer et à vendre des pâtes séchées et d’autres produits alimentaires italiens. Elle vend ses pâtes séchées principalement sous sa propre marque nominale, «Primo», mais vend aussi des produits de marques de distribution. Elle effectue des ventes à l’échelle nationale à tous les secteurs alimentaires, mais elle concentre ses activités dans les secteurs de la vente au détail en Ontario et au Québec.

Italpasta a été créée en 1989, à Brampton (Ontario). La société produit des pâtes séchées en paquets de tous les formats sous sa propre marque nominale «Italpasta», et de marques de distribution qu’elle vend sur les marchés de détail, des services d’alimentation et industriel, surtout en Ontario et au Québec.

Grisspasta, le plus petit des quatre producteurs nationaux de pâtes séchées, est une entreprise familiale qui se spécialise dans la production (conditionnement à forfait) pour d’autres sociétés, notamment d’autres producteurs nationaux, et pour la vente à la branche de production des services d’alimentation, ainsi que dans la production de sa propre marque de pâtes, «Giardino» en paquets de plus de 2,3 kg.

Dans leur argumentation, les avocats de l’ACFPA ont d’abord examiné la question du dommage. Ils ont énuméré divers moyens par lesquels, à leur avis, les retombées des importations sous-évaluées et subventionnées avaient causé un dommage aux producteurs nationaux. D’abord, ceux-ci ont subi une compression des prix au niveau des opérations de gros. C’est ce que reflètent les éléments de preuve qui indiquent que les producteurs nationaux n’ont pas pu répercuter les augmentations de prix sur les clients de détail après l’augmentation des coûts de leurs intrants attribuable à la montée du prix du blé dur, surtout en 1993, en raison de l’offre de pâtes italiennes peu coûteuses. Les hausses de prix s’étant poursuivies en 1994 et 1995, elles n’ont pas permis aux producteurs nationaux de rattraper les augmentations des coûts auxquelles ils ont été confrontés, et les avocats ont indiqué que, dans certains cas, ces hausses de prix n’ont pas persisté.

Deuxièmement, les états financiers consolidés de la branche de production nationale révèlent d’importantes pertes financières en 1993, 1994 et 1995.

Troisièmement, entre 1992 et 1994, les marchandises en question ont enlevé une part du marché à la branche de production nationale. Ces pertes ont été relevées à la fois dans les rapports des Services de recherche et marketing de Nielsen (Nielsen) déposés par la branche de production nationale et dans les données statistiques plus complètes du Tribunal incluses dans le rapport préalable à l’audience préparé par le personnel. Les avocats de l’ACFPA ont fait remarquer que 10 points de pourcentage de la part du marché ont été perdus au cours de cette période et que, en 1994 seulement, les marchandises en question ont doublé leur part du marché. Ces augmentations ont été particulièrement marquées pour les paquets de 450 g et de 500 g.

Quatrièmement, les avocats de l’ACFPA ont rappelé la perte de ventes et la perte d’espace d’étalage, mentionnées à la fois dans les études de Nielsen et dans les éléments de preuve directs de chaque producteur. Ces éléments de preuve ont montré à quel point les marchandises en question avaient pénétré le segment des magasins à succursales multiples du marché et révélé que les producteurs nationaux perdaient des ventes ou de l’espace d’étalage, ou les deux à la fois, avec presque tous les clients.

Enfin, les avocats de l’ACFPA ont soutenu que les éléments de preuve présentés au Tribunal montraient également une érosion des prix en 1993, qui s’est traduite par l’augmentation des dépenses de stimulation du commerce inscrites dans les états financiers des producteurs nationaux.

Les avocats de l’ACFPA ont fait valoir que le dommage susmentionné ne peut être dit avoir été causé par la concurrence au sein de la branche de production parce que tous les producteurs nationaux voulaient augmenter les prix. En outre, pour ce qui est de l’incidence possible des conclusions de dommage, ils ont soutenu qu’une augmentation de seulement 10 p. 100 des prix de la branche de production nationale ferait croître les revenus avant impôt dont le chiffre négatif deviendrait positif et aiderait énormément la branche de production nationale à s’approcher d’un rendement de 10 p. 100 sur les ventes nettes, niveau considéré par tous les producteurs comme raisonnable dans cette branche de production.

Les avocats de l’ACFPA ont également soutenu que ni les importateurs ou exportateurs qui ont comparu devant le Tribunal, ni les détaillants qui importent directement des producteurs en Italie n’avaient présenté réellement de «défense» à l’égard de la plainte. Pour ce qui est du premier groupe, les avocats ont d’abord indiqué que ces importateurs ne représentaient qu’une partie des importateurs des marchandises en question. Ils ont ensuite déclaré que le rapport du Tribunal sur l’établissement des prix confirmait que les prix de nombre de marques d’importateurs étaient inférieurs à ceux des marques de producteurs nationaux au niveau des opérations de gros. Ils ont aussi déclaré que les éléments de preuve comme la vérification, établie par Nielsen, de l’espace que les produits de la branche de production nationale occupait sur les étalages prouvaient que l’affirmation des importateurs selon laquelle leurs marques ne faisaient pas concurrence aux marques nationales était incorrecte.

En ce qui a trait à la menace de dommage, les avocats de l’ACFPA ont soutenu que le Tribunal pouvait trouver de nombreux éléments de preuve établissant l’existence d’une menace dans les habitudes d’approvisionnement de seule Unico Inc. (Unico). Les avocats ont soutenu qu’en l’absence de conclusions de dommage, Unico se remettrait vraisemblablement à acheter ses pâtes en Italie et fait remarquer que la part du marché d’Unico était environ deux fois celle des marchandises en question. En outre, les avocats ont prévenu que la tendance récente à s’approvisionner en marques de distribution (p. ex., Loblaws Supermarkets Ltd. [Loblaws], A&P Food Stores Ltd. [A&P] et Galati Bros. Supermarkets [Galati]) serait renforcée si le Tribunal ne rendait pas de conclusions de dommage. Les avocats ont souligné que ce dernier point n’était pas une pure conjecture, à preuve le témoignage de l’un des importateurs et ses discussions récentes avec l’un des gros détaillants.

Enfin, les avocats de l’ACFPA ont fait valoir qu’il convenait de distinguer, de la manière suivante, les circonstances entourant la présente enquête de celles qui ont entouré l’enquête de 1987 [6] menée devant le Tribunal canadien des importations (le TCI). D’abord, le volume des marchandises en question est trois fois plus élevé qu’en 1987, étant passé d’environ 5 millions de kilogrammes à plus de 15 millions de kilogrammes. Deuxièmement, la distinction essentielle établie dans la décision de 1987, à savoir que le produit italien se retrouve principalement dans les magasins spécialisés ou à caractère ethnique et le produit national, dans les magasins à succursales multiples et les supermarchés, n’existe plus, comme l’indique à la fois la pénétration importante par les marchandises en question des magasins à succursales multiples et le fait que les détaillants importent maintenant directement de l’Italie. Ils ont soutenu que ces changements ont été renforcés du fait que de nombreux magasins à caractère ethnique qui existaient en 1987 sont eux-mêmes par la suite devenus des magasins à succursales multiples (par exemple, Fortino’s Supermarket Ltd., Galati, Longo’s et Highland Farms).

La Commission canadienne du blé

La Commission canadienne du blé (la CCB) est le seul organisme autorisé à commercialiser et à vendre au Canada, et dans tous les autres pays, tout le blé et l’orge produits dans l’Ouest canadien. Au Canada, le blé et l’orge sont vendus principalement aux minoteries et aux malteries. La CCB a soutenu que la quantité de pâtes séchées sous-évaluées et subventionnées en provenance d’Italie a fait diminuer la demande de farine de semoule par les fabricants canadiens de pâtes séchées ce qui, par ricochet, a poussé à la baisse la demande de blé dur en provenance de l’Ouest canadien par les minoteries canadiennes et a réduit les recettes des producteurs de blé canadiens.

Exportateurs [7] et importateurs [8]

Les avocats des exportateurs et des importateurs qui s’opposent à la plainte ont soutenu que les éléments de preuve montrent qu’il existe essentiellement trois catégories de produits de pâtes séchées : les marques de fabricants, les marques de distribution ou marques de détaillants et les marques contrôlées ou marques de distributeurs-importateurs. Tenant compte de ces catégories, ils ont soutenu que les pâtes séchées importées d’Italie et, en particulier, les marques de fabricants de pâtes séchées importées d’Italie [9] , dont ils représentaient les sociétés et qui constituent la majorité de toutes les importations de pâtes séchées en provenance d’Italie, n’ont pas causé la concurrence des prix sur le marché des pâtes séchées et n’ont pas causé ou ne menacent pas de causer un dommage.

Les avocats des exportateurs et des importateurs ont soutenu que les marques de fabricants de pâtes séchées importées d’Italie ne font pas concurrence aux marques de producteurs ou aux marques de distribution de détaillants de pâtes séchées du Canada. Ils ont renvoyé aux éléments de preuve fournis par divers importateurs selon lesquels les marques de fabricants de pâtes séchées italiennes sont vendues à différentes catégories de clients, aussi bien à des Italiens qu’à des non-Italiens, en raison de différences réelles ou perçues, au niveau de la qualité, de l’image, de la réputation du produit ou tout simplement parce que le produit est fabriqué en Italie. Les avocats ont également souligné que, pour ce qui est de chacune des marques de fabricants de pâtes séchées italiennes dont ils représentaient les sociétés, aucun élément de preuve n’indique l’existence d’une concurrence des prix avec les produits de pâtes séchées fabriqués au pays, ni de compression des prix, notamment parce que les marques de fabricants de pâtes séchées italiennes sont vendues à des prix plus élevés au gramme que les pâtes séchées produites au pays.

Puisque les marques de fabricants de pâtes séchées importées d’Italie ne font pas concurrence aux pâtes séchées produites au pays, les avocats des exportateurs et des importateurs ont soutenu que le Tribunal devrait examiner séparément la question du dommage lié expressément aux marques de fabricants de pâtes séchées importées d’Italie et la question du dommage lié à d’autres catégories de pâtes séchées, notamment les pâtes de marques de distribution et de marques contrôlées. En procédant ainsi, le Tribunal conclurait que les marques de fabricants de pâtes séchées importées d’Italie n’ont pas causé et ne menacent pas de causer un dommage. À titre d’alternative, les avocats ont soutenu que le Tribunal devrait exclure les producteurs italiens qui fabriquent ces marques des conclusions de dommage.

En examinant les prétendues pertes financières des producteurs nationaux, les avocats des exportateurs et des importateurs ont remis en question la répartition, entre les divers produits, des frais de commercialisation se rapportant aux groupes de produits alimentaires italiens connexes, qu’il s’agisse de pâtes et d’autres produits, vendus par Borden et Primo. En particulier, ils se sont demandés pourquoi, dans le cas de Borden et de Primo, les frais généraux et d’administration attribués aux pâtes séchées étaient proportionnellement plus élevés que ceux attribués aux autres produits. Les avocats ont, en outre, soutenu que ce sont les mécanismes financiers que Borden et Primo ont adoptés conjointement avec leurs sociétés mères américaines en vue de réduire le revenu déclaré au Canada qui touchent les deux entreprises. En outre, les avocats ont fait valoir que les deux plus petits producteurs nationaux de pâtes séchées, à savoir Italpasta et Grisspasta, n’avaient subi aucune perte financière et que leur rentabilité dans le secteur de la vente au détail de pâtes séchées était semblable à celle qu’elles réalisaient dans les secteurs institutionnel et des services d’alimentation.

En ce qui a trait aux allégations des producteurs nationaux selon lesquelles leurs produits ont occupé moins d’espace d’étalage, les avocats des exportateurs et des importateurs ont soutenu que cet espace n’est pas indicatif des ventes et est, par conséquent, sans aucune importante. Pour illustrer leur propos, les avocats ont cité la vérification que Primo avait faite de l’espace d’étalage et, en particulier, de l’espace d’étalage dans le magasin de Fortino, un magasin de vente au détail qui, selon eux, desservait les consommateurs italiens. Chez ce client, les marques de fabricants de pâtes séchées importées occupaient environ 57 p. 100 de l’espace d’étalage, mais ne représentaient que 22 p. 100 des ventes, tandis que les pâtes séchées produites au pays représentaient 78 p. 100 des ventes.

Les avocats des exportateurs et des importateurs ont allégué que, tout compte fait, ce sont les producteurs nationaux qui se font mutuellement la concurrence, lançant des promotions auprès des détaillants qui compriment les prix. Les raisons pour lesquelles ces promotions sont faites n’ont rien à voir avec les importations de pâtes séchées. À l’appui de leurs exposés, les avocats se sont reportés aux plans d’entreprise de Borden, ainsi qu’à un rapport rédigé pour RJR Nabisco Holdings Corp. en prévision de son achat de Primo. En particulier, les avocats ont fait remarquer que les plans de Borden et le document d’achat de Primo considèrent tous deux les producteurs canadiens et Unico comme des concurrents et ne disent rien des importations et de la nécessité de faire face à la concurrence des importations.

En examinant les allégations de menace de dommage, les avocats des exportateurs et des importateurs ont avancé que Primo et Borden se restructurent de manière à simplifier leurs activités et à accroître leur efficacité et leur rentabilité, et que les producteurs italiens ne reçoivent plus, en général, de restitutions à l’exportation ou de subventions. De l’avis des avocats, s’il y a une menace de dommage, elle vient des importations de pâtes de marques de distribution et de marques contrôlées, comme les importations de pâtes «Reggia» de Galati et les importations de pâtes séchées «Sapori Mediterranei» d’A&P, et non des importations de pâtes séchées italiennes de marques de fabricants. Enfin, les avocats ont déclaré qu’un nouveau producteur de pâtes séchées était récemment arrivé sur le marché au Québec et ont soutenu qu’un tel investissement n’aurait pas été fait si de prétendues graves menaces de dommage avaient existé.

De l’avis des avocats des exportateurs et des importateurs, mise à part l’introduction de marques contrôlées de détaillants de pâtes séchées, très peu de choses ont changé depuis les conclusions rendues en 1987 par le TCI concernant les pâtes séchées. Les avocats ont cité un passage de l’Exposé des motifs de 1987 dans lequel le TCI déclare, en partie, que les pâtes séchées italiennes sont vendues principalement en paquets de 500 g aux Canadiens d’origine italienne, à des prix par gramme supérieurs au prix des pâtes séchées produites au pays, et que ces pâtes sont le plus souvent vendues en paquets de 900 g au prix cible de 0,99 $, comme produit d’appel.

DEMANDES D’EXCLUSIONS DE PRODUITS PRÉCIS

Le Tribunal a reçu quatre demandes d’exclusions de certains produits de pâtes séchées importés en cas de conclusions de dommage ou de conclusions de menace de dommage causés par le dumping et le subventionnement des marchandises en question.

M. Enzo Salvatori, avocat pour Brunello Imports Inc., a demandé une exclusion pour les importations de pâtes «de spécialités» en provenance d’Italie. Il a soutenu que ces pâtes importées sont des pâtes «haut de gamme» qui ne font pas concurrence aux pâtes produites au pays puisqu’elles sont préparées à partir de blé différent, requièrent un autre procédé de séchage, sont conditionnées différemment et ont un prix plus élevé.

M. Marcus Rössl, de la société Rud-Al Co. Ltd., a comparu à l’audience et a demandé une exclusion pour les importations de pâtes séchées aromatisées Dalla Costa de formes spéciales. M. Rössl a d’abord soutenu que les pâtes séchées Dalla Costa ne font pas concurrence aux pâtes séchées produites par les fabricants canadiens, puisque ceux-ci ne produisent pas certaines des formes spéciales ou n’ajoutent pas d’arômes semblables à ceux que l’on trouve dans les pâtes séchées Dalla Costa. Deuxièmement, il a soutenu que le prix de détail des pâtes séchées Dalla Costa est plus de trois fois supérieur au prix de n’importe laquelle des marques canadiennes, si l’on compare des paquets de produits de pâtes séchées Dalla Costa de 500 g et des paquets de produits de pâtes séchées fabriqués au Canada de 900 g. Il a déposé auprès du Tribunal des factures qui, selon lui, montrent que les prix d’achat et de vente des pâtes séchées Dalla Costa sont beaucoup plus élevés que ceux des pâtes séchées aromatisées produites au pays. Troisièmement, il a allégué que c’était en juin et en juillet 1994 qu’il avait, pour la première fois, importé des pâtes séchées Dalla Costa et seulement en très petites quantités représentant, en tout, environ 0,0025 p. 100 du total du marché. Enfin, il a soutenu que le fabricant italien, Dalla Costa Alimentare, l’avait informé qu’il n’avait jamais reçu de subvention du gouvernement italien.

L’ACFPA s’est opposée à ces deux demandes d’exclusions pour le motif que les pâtes séchées importées font concurrence aux pâtes séchées produites au pays.

M. Nick Orton, directeur général de la société Ports West International, a demandé une exclusion pour les importations de pâtes Organica Di Sicilia produites par le Grouppo Agricoltura Sana Sal, en Italie. Il a soutenu que ces pâtes importées sont les seules dont 100 p. 100 des ingrédients ont été certifiés être d’origine organique en vertu du règlement de la Communauté économique européenne. Il a, en outre, soutenu que le Grouppo Agricoltura Sana Sal avait déclaré n’avoir jamais fait de demande de subventions pour ses exportations, que le prix d’achat de ce type de pâtes était beaucoup plus élevé que celui des pâtes séchées ordinaires, et que cette marque est uniquement acceptée dans le secteur des aliments naturels et au sein des magasins de détail autonomes spécialisés.

M. Ralph Moscovitch, acheteur pour Pro Organics Marketing Inc., a demandé une exclusion pour les pâtes séchées organiques importées et produites sur commande. Il a souligné que le prix et les quantités expédiées de pâtes séchées organiques importées ne causent pas et ne causeront vraisemblablement pas de dommage aux producteurs nationaux de pâtes séchées, que ses clients sont des détaillants de produits organiques et de produits alimentaires, un marché à créneaux au Canada, et que les prix de détail des pâtes organiques sont de 50 à 70 p. 100 plus élevés que ceux des pâtes séchées classiques.

L’ACFPA a consenti à ce que les pâtes organiques certifiées d’Italie, qui sont accompagnées d’un certificat de transaction organique délivré en vertu du règlement no 2092/91 de la Communauté économique européenne, bénéficient d’une exclusion.

ANALYSE

Aux termes de l’article 42 de la LMSI, modifiée par la Loi de mise en œuvre de l’Accord sur l’Organisation mondiale du commerce [10] , le Tribunal «fait enquête sur [la question de savoir] [...] si le dumping des marchandises [visées par la décision provisoire] ou leur subventionnement soit a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage» (soulignement ajouté). Dans les décisions qu’il a rendues dans l’enquête no NQ-95-001 [11] ainsi que dans l’enquête no NQ-95-002 [12] , le Tribunal a conclu qu’à la suite des modifications apportées à la LMSI, lorsqu’il rend des conclusions en application du paragraphe 43(1) de la LMSI à l’égard d’une enquête menée aux termes de l’article 42, il est tenu de considérer si la branche de production nationale a subi un dommage ou est menacée par un dommage. En d’autres mots, le dommage et la menace de dommage sont des conclusions distinctes et le Tribunal n’est pas tenu de rendre des conclusions sur ces deux aspects aux termes du paragraphe 43(1) de la LMSI [13] à moins d’avoir d’abord rendu des conclusions de non-dommage. Dans la présente enquête, le Tribunal reprend cette position à son compte.

Le terme «dommage» est défini à l’article 2 de la LMSI comme étant le «dommage sensible causé à une branche de production nationale». La définition de «branche de production nationale» précise, entre autres, qu’il s’agit de «l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou [des] producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale de marchandises similaires». Par conséquent, pour rendre sa décision dans la présente enquête, le Tribunal déterminera d’abord quelles marchandises des producteurs nationaux sont des «marchandises similaires» aux marchandises en question, et ensuite quels sont les producteurs nationaux de ces marchandises, c.-à-d. quels producteurs constituent la branche de production nationale. Ensuite, le Tribunal déterminera si cette branche de production nationale a subi un dommage et, dans l’affirmative, s’il existe un lien de causalité entre le dommage et le dumping et le subventionnement des marchandises en question. S’il rend des conclusions de non-dommage, le Tribunal considérera alors si le dumping et le subventionnement des marchandises en question menacent de causer un dommage.

Marchandises similaires

En ce qui concerne toutes les autres marchandises, on trouve au paragraphe 2(1) de la LMSI la définition suivante de l’expression «marchandises similaires» :

a) marchandises identiques aux marchandises en cause;

b) à défaut, marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

Selon la description qu’en a donnée le Sous-ministre, les marchandises en question sont des pâtes séchées, non farcies ni autrement préparées et ne contenant pas d’œufs, en paquets de 2,3 kg ou moins. Le Sous-ministre a déclaré, en outre, que l’enquête portait sur les produits de pâtes séchées préparés à partir de blé et n’englobait pas les produits de pâtes faits avec d’autres types de grains. De l’avis du Tribunal, les éléments de preuve montrent que toutes les pâtes séchées à base de blé, ne contenant pas d’œufs ont des caractéristiques similaires, en ce sens qu’elles sont faites avec les mêmes ingrédients de base, renfermant du blé dur moulu, appelé farine de semoule, et de l’eau [14] . En fait, certaines des pâtes séchées en provenance d’Italie, surtout les marques haut de gamme, contiennent une proportion importante de farine de semoule canadienne reconnue pour ses qualités supérieures.

Les produits de pâtes séchées à base de blé, ne contenant pas d’œufs présentent des caractéristiques physiques différentes au niveau de la forme, des dimensions, de l’épaisseur et de la distribution de paquets de formats différents, c.-à-d. 375 g, 450 g, 500 g, 900 g et 2,3 kg. En outre, comme les témoins de certains importateurs l’ont précisé, certains consommateurs et, en particulier, les Canadiens d’origine italienne, peuvent avoir une préférence pour les pâtes séchées produites en Italie, pour des raisons d’ordre «sentimental» liées au fait que ces pâtes sont faites en Italie. Cependant, mise à part les questions de perception, aucune raison n’a été donnée au Tribunal pour l’amener à croire que les pâtes italiennes sont généralement supérieures aux pâtes produites au Canada du point de vue de la qualité.

En tenant compte de l’ensemble des éléments de preuve, le Tribunal est persuadé que les pâtes séchées à base de blé, ne contenant pas d’œufs, produites au pays en paquets de 2,3 kg ou moins, et les marchandises en question sont similaires du point de vue des caractéristiques physiques, qu’elles ont généralement les mêmes utilisations finales et que, au gré du consommateur, peuvent se faire mutuellement concurrence et, le plus souvent, se substituer l’une à l’autre. Le Tribunal est, par conséquent, d’avis que les pâtes séchées à base de blé, ne contenant pas d’œufs, produites au pays constituent des «marchandises similaires» aux marchandises en question.

Branche de production nationale

Ayant déterminé que les marchandises similaires dans la présente enquête sont des pâtes séchées à base de blé, ne contenant pas d’œufs, produites au pays, non farcies ni autrement préparées, en paquets de 2,3 kg ou moins, le Tribunal doit maintenant déterminer quels producteurs constituent la branche de production nationale aux fins d’évaluer le dommage. Les éléments de preuve montrent que la production de Borden, de Primo, d’Italpasta et de Grisspasta, toutes membres de l’ACFPA, représente 100 p. 100 du total de la production nationale de marchandises similaires. Le Tribunal conclut donc que ces producteurs constituent la branche de production nationale dans la présente enquête.

Dommage

En examinant la question de savoir si le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage, le Tribunal n’a pas cherché à dissocier un dommage ou une menace de dommage causés par le dumping du dommage ou de la menace de dommage causés par le subventionnement. De l’avis du Tribunal, les importations sous-évaluées et subventionnées en provenance d’Italie sont toutes les mêmes marchandises, et les effets du dumping et du subventionnement sont si étroitement liés les uns aux autres qu’il est impossible de dissocier le dommage ou la menace de dommage causés par le dumping du dommage ou de la menace de dommage causés par le subventionnement.

Le paragraphe 37.1(1) du Règlement sur les mesures spéciales d’importation [15] (le Règlement) prescrit au Tribunal les facteurs que celui-ci peut considérer pour déterminer si des importations sous-évaluées ou subventionnées ont causé un dommage à une branche de production nationale. Ces facteurs sont, entre autres, les suivants : le volume des marchandises sous-évaluées ou subventionnées et leur effet sur le prix des marchandises similaires sur le marché intérieur; et l’incidence de ces importations sur plusieurs facteurs économiques comme une baisse réelle ou potentielle de la production, des ventes, de la part du marché, des bénéfices et du rendement sur le capital investi. Avant d’examiner ces facteurs dans son analyse des indicateurs économiques entourant la présente enquête, le Tribunal se penchera sur la structure du marché des pâtes au Canada. Cette discussion est utile à ses yeux parce qu’elle donne une vue d’ensemble de l’évolution de ce marché au cours des 10 dernières années, c’est-à-dire depuis la dernière fois où la branche de production nationale de pâtes s’est plainte du bas prix des importations en provenance d’Italie [16] .

Structure du marché

Branche de production nationale

À l’époque où les premières conclusions ont été rendues en 1987, la branche de production nationale était beaucoup plus diversifiée qu’elle ne l’est aujourd’hui. Selon l’Exposé des motifs de 1987, cette branche était constituée de cinq entreprises nationales, ainsi que de quelques petites entreprises régionales. Les entreprises nationales étaient Catelli Inc., Les Aliments Lancia-Bravo, Les Aliments Primo Limitée, Creamette Company of Canada Limited et Gattuso, division des Soupes Campbell Ltée. Ces entreprises, qui représentaient 90 p. 100 de la production intérieure, fabriquaient des pâtes dans diverses usines installées un peu partout au Canada. Depuis 1987 et, en particulier, au cours des sept dernières années environ, la branche de production nationale de pâtes a été le théâtre d’une grande transformation. En effet, deux seulement des grosses sociétés de 1987 demeurent, à savoir Borden, qui participait au marché canadien par l’entremise de la société Creamette Company of Canada Limited, et Primo, et même ces deux sociétés ont énormément changé depuis la première enquête.

Le plus important de ces changements a été amorcé par Borden. En 1989, cette société a acheté la société Catelli Inc. de John Labatt Limitée. En 1990, elle a acheté les activités de production de pâtes de la société Les Aliments Lancia-Bravo de son propriétaire, General Mills, Inc., ainsi que la division Gattuso. Peu de temps après ces acquisitions, Borden a fermé plusieurs des usines qu’elle avait acquises au Canada et a regroupé toutes ses activités de production de pâtes dans deux usines, l’une à Lethbridge (Alberta) et l’autre à Montréal (Québec).

Les éléments de preuve indiquent que ces fusions et acquisitions font partie d’une stratégie de restructuration, de rationalisation et de modernisation des activités de production de pâtes de Borden. Bien que la plupart de ces fusions, acquisitions et fermetures d’usine se soient produites avant 1992, les éléments de preuve montrent que leurs effets se sont prolongés pendant des années, c’est-à-dire pendant toute la période visée par l’enquête. Cela a notamment entraîné un réaménagement de la production entre le Canada et les États-Unis ainsi que des compressions administratives, incluant la réduction de l’effectif au siège social [17] . En ce qui a trait au marketing, on a assisté à un important repositionnement des marques, certaines marques ayant gagné en importance et en profil contrairement à d’autres qui ont perdu [18] .

Bref, au cours des années 90, les activités de production de pâtes de Borden ont été en constante transition. La profondeur, la rapidité et les coûts de ce changement devaient immanquablement avoir des répercussions sur le rendement de Borden, et les éléments de preuve présentés par Borden montrent qu’il en a bien été ainsi [19] .

Primo, l’autre grosse société, a également beaucoup changé au cours des deux dernières années environ. En 1994, la société a fermé une usine de production de pâtes à Edmonton (Alberta) ne conservant qu’une seule usine de pâtes à Toronto (Ontario). Dans la réponse que Primo a donnée au questionnaire du Tribunal, cette fermeture de l’usine d’Edmonton est attribuée à des coûts d’exploitation plus élevés [20] . En janvier 1995, Primo a été vendue à la société Pillsbury par son propriétaire d’alors, Pet Inc., de St. Louis (Missouri) - qui était propriétaire de Primo depuis 1986. Dix mois plus tard, Pillsbury, ayant décidé que Primo ne cadrait pas bien avec ses plans stratégiques, a vendu les activités de production de pâtes de Primo, ainsi que certains autres actifs de Primo, à Nabisco Ltée. Dans son analyse de l’acquisition de Primo, Nabisco Ltée précise les mesures de rationalisation et de restructuration qu’il faudrait mettre en œuvre pour intégrer les activités de Primo à celles de Nabisco Ltée [21] .

En plus de Borden et de Primo, qui représentent une grande proportion de la production nationale, la branche de production canadienne de pâtes séchées comprend aujourd’hui deux autres producteurs principalement régionaux, à savoir Italpasta et Grisspasta, dont les activités de marketing ciblent les marchés du Québec et de l’Ontario. Italpasta n’existait pas en 1987. Elle a été créée en 1989 et est une société canadienne de droit privé. Grisspasta est également une société canadienne privée qui a été créée et a commencé à produire des pâtes en 1983 et dont la principale activité commerciale consiste à produire des pâtes pour d’autres (conditionnement à forfait). Depuis 1992, les deux sociétés ont fait des investissements de capitaux importants en vue d’étendre leurs activités de production de pâtes séchées et ont toutes les deux vu le volume de leurs ventes monter en flèche. Tous les autres producteurs régionaux de pâtes séchées qui existaient en 1987 ont disparu. Plusieurs entreprises produisent des pâtes fraîches au Canada, mais cette production ne fait pas et n’a jamais fait l’objet d’une enquête par le Tribunal.

Bref, la branche de production nationale d’aujourd’hui ressemble fort peu à celle de 1987. Les sociétés et les usines y sont moins nombreuses, mais chacune des usines est plus grosse, et la capacité de la branche de production a augmenté depuis 1992. En outre, la branche de production nationale se rationalise et s’organise en fonction du contexte nord-américain. De l’avis du Tribunal, la transition liée à cette restructuration a été un des facteurs à avoir influé sur le rendement de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête.

Importateurs et exportateurs

Bien que les membres de la branche de production nationale parties à la présente enquête soient fort différents de ceux de l’enquête de 1987, un grand nombre des participants du côté des importateurs et des exportateurs sont les mêmes qu’alors. On y retrouve, parmi les importateurs, Les produits alimentaires SA-GER Inc., Bertolli Canada Inc., Italfina Inc., Bella International Food Brokers Inc. et Numage Trading Inc. Comme en 1987, les produits de pâtes italiennes représentés par les importateurs comprennent des marques de fabricants de pâtes italiennes bien connues comme De Cecco et Barilla, ainsi que diverses autres marques secondaires moins bien connues.

Du côté des importateurs, une des diff?E9‚rences par rapport à 1987 concerne Unico. Cette société fournit depuis longtemps des produits italiens au marché canadien et a été une des principales sociétés sur le marché de détail de pâtes séchées pendant de nombreuses années. En 1987, Unico importait d’Italie des pâtes pour le marché canadien et elle a participé à la première enquête à titre d’importateur.

Au cours des 10 dernières années, Unico a fréquemment changé de source d’approvisionnement, passant d’un producteur et d’un pays à l’autre [22] . Au début des années 90, Unico s’est mise à acheter des pâtes au Canada pour satisfaire une importante part de ses besoins. Cependant, en 1992, elle s’est à nouveau tournée vers la production italienne pour une bonne partie de ses besoins. Cela a continué jusque vers la moitié de 1994, date à laquelle Unico a diminué progressivement ses achats en Italie pour se tourner vers la production canadienne et américaine afin de satisfaire ses besoins. Elle a mis entièrement fin à ses importations de pâtes séchées italiennes en 1995. Ces changements ont eu des effets sur la production canadienne, principalement sur les pâtes en paquets de 900 g, secteur dans lequel les ventes de pâtes séchées d’Unico sont concentrées. Ces effets sont examinés plus en détail dans la section des présents motifs qui traite du lien de causalité.

Détaillants

En 1987, le TCI a constaté qu’il existait essentiellement deux marchés de détail distincts pour les pâtes séchées produites au Canada. D’un côté, on trouvait le segment desservi par les grandes épiceries de détail à succursales multiples, à l’échelle du Canada, et qui répondaient aux besoins de la majorité de la population. De l’autre, on trouvait le segment desservi par les grands établissements de produits alimentaires autonomes installés principalement dans les grands centres urbains de Toronto et de Montréal, où l’on retrouve d’importantes concentrations de Canadiens d’origine italienne. Compte tenu des éléments de preuve présentés dans le cadre de cette enquête, le Tribunal conclut que la structure de base du marché de détail canadien des pâtes séchées, comme elle a été décrite ci-dessus, est encore généralement la même aujourd’hui.

Cependant, les éléments de preuve montrent également que d’importants changements sont survenus depuis 1987. En particulier, les 10 dernières années ont été marquées par l’apparition de magasins-entrepôts offrant une gamme de produits restreinte qui, en raison de leurs grandes dimensions et des économies d’échelle, sont devenus des concurrents entreprenants face aux épiceries à succursales multiples plus classiques. En outre, dans plusieurs cas, les épiceries à succursales multiples ont été reprises par d’autres magasins à succursales multiples ou ont fusionné avec ceux-ci. Par ailleurs, des magasins autrefois autonomes ont été acquis par des épiceries à succursales multiples, notamment des magasins autonomes comme Fortino qui est, et a été, un important fournisseur de la communauté ethnique. De nombreux magasins à succursales multiples ont également franchisé une partie de leurs activités. Ces magasins franchisés gérés séparément ainsi que d’autres grands magasins autonomes, se sont souvent associés pour former de grands consortiums d’achat par lesquels ils obtiennent la plupart de leurs fournitures.

Ces changements ont eu pour effet net, entre autres, d’accroître la concentration dans le secteur des épiceries de détail entre les mains de moins d’acheteurs. De l’avis du Tribunal, cela devrait normalement permettre aux acheteurs d’obtenir des concessions des fournisseurs sous diverses formes, par exemple, un plus grand nombre d’achats à des prix vedettes (c.-à-d. bas), le partage des coûts de la publicité et le paiement de frais considérables pour l’annonce de nouveaux produits. Ces paiements des fabricants ne sont pas nouveaux; déjà, dans l’enquête de 1987, ils étaient mentionnés comme étant d’importants éléments caractéristiques de la commercialisation des pâtes séchées au niveau de la vente au détail. Les éléments de preuve obtenus dans la présente enquête établissent clairement que ces types de dépenses ont été importantes pour la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête et ont eu une incidence sur son rendement financier [23] .

Circuits de distribution

En 1987, le TCI a conclu que la très grande majorité des pâtes italiennes importées étaient vendues par les gros magasins autonomes situés dans les grands centres urbains de Toronto et de Montréal. Le TCI a également conclu qu’à «l’exception d’une ou deux marques de magasin et de quelques marques italiennes bien connues, les importations n’ont pas occupé une place importante sur le marché des [magasins à succursales multiples] [24] ».

La question de savoir si les importations italiennes ont, dans une large mesure, accru leur présence sur le marché et leur pénétration de celui-ci, par comparaison à leur situation dans les magasins autonomes à caractère ethnique en 1987, pour faire partie des grands circuits de marketing des principaux magasins à succursales multiples et magasins associés canadiens, a beaucoup attiré l’attention des parties à la présente enquête. Les éléments de preuve présentés dans le cadre de cette enquête amènent le Tribunal à conclure qu’une proportion importante des importations italiennes continue d’être vendue dans des magasins et dans des points de vente autonomes qui ne sont associés à aucun magasin à succursales multiples national ou grand consortium d’achat. Par exemple, dans son questionnaire à l’intention de l’importateur, le Tribunal demandait aux répondants d’identifier leurs cinq plus gros clients. La majorité des clients qui ont été nommés font partie de la catégorie des autonomes non associés. En outre, un grand nombre de ces clients se trouve à Toronto et à Montréal et ont des points de vente dans les secteurs à caractère ethnique.

Cependant, le Tribunal conclut 9‚galement que les importations italiennes ont accru leur présence et ont pénétré les grands magasins à succursales multiples et consortiums d’achat. Les divers rapports de Nielsen présentés par les deux côtés, qui étudient les ventes par marque dans les principaux magasins d’alimentation, font tous état d’une croissance rapide des ventes de diverses marques de pâtes italiennes, bien qu’à partir de niveaux de vente de départ assez bas dans certains cas. Dans leurs déclarations à titre de témoins et dans les réponses qu’ils ont données au questionnaire du Tribunal, plusieurs importateurs ont aussi clairement indiqué qu’une partie importante de leurs ventes sont faites aux grands magasins à succursales multiples [25] .

Un autre document portant sur cette question est une vérification effectuée par Nielsen [26] pour le compte de la branche de production nationale, aux fins de la présente enquête, concernant l’espace d’étalage occupé par chaque marque de pâtes. Le but de cette étude était d’établir l’espace que les marques de pâtes produites au Canada et importées occupaient sur les étalages d’un nombre total de 220 magasins à Toronto et à Montréal, incluant les grands magasins à succursales multiples. Selon la branche de production nationale, les résultats de cette étude, que le Tribunal accepte, indiquent que certaines marques de pâtes italiennes ont obtenu beaucoup d’espace sur les étalages dans les grands magasins à succursales multiples de ces deux grandes villes.

Cependant, le rapport indique aussi clairement que, contrairement aux marques de pâtes produites au Canada qui sont distribuées dans la plupart des magasins interrogés, les marques de pâtes italiennes ne sont pas toutes distribuées également. Par exemple, la marque de pâtes italiennes bien connue De Cecco n’a été trouvée que dans 30 des 115 magasins interrogés à Toronto. Pour illustrer la part inégale que la marque de pâtes De Cecco occupe, il faut ajouter qu?92'elle n’était présente que dans 2 des 9 magasins A&P interrogés, 4 des 15 magasins Loblaws, 12 des 20 magasins MFM (Miracle Food Mart), 1 des 24 magasins Dominion, 2 des 11 magasins Food City et n’était vendue dans aucun des 11 magasins IGA interrogés. Cela correspond, en général, aux dépositions des témoins du Tribunal pour Loblaws, A&P et Galati, qui ont tous indiqué que certains de leurs magasins mettaient plus de produits italiens sur les étalages parce que ces magasins se trouvaient dans des secteurs où la demande de pâtes séchées italiennes était plus forte [27] . Le Tribunal fait remarquer que cette répartition inégale avait aussi été constatée lors de l’enquête de 1987.

Néanmoins, il est évident pour le Tribunal qu’au cours de la période visée par l’enquête, les pâtes séchées italiennes ont été de plus en plus faciles à obtenir dans les principaux points de vente au détail, surtout dans les grands centres urbains, où elles figurent sur les étalages et sont vendues à côté des pâtes séchées produites au Canada.

Coût de la farine de semoule

Une autre caractéristique fondamentale de ce marché est que le sort de la branche de production nationale de pâtes est intimement lié à la disponibilité et aux coûts du blé dur et de la farine de semoule. Selon les éléments de preuve, la farine de semoule est le principal composant au niveau des coûts dans la fabrication de pâtes représentant, au cours de la période allant de 1992 à 1995, de 60 à 75 p. 100 du total des coûts de production [28] .

Le Tribunal fait également remarquer que, pour ce qui est du coût du blé dur, la présente cause atteste d’une situation historique qui se répète en grande partie. Dans l’enquête de 1987, le TCI a souligné qu’entre 1985 et 1986, le prix du blé dur, alors fixé par la CCB, avait augmenté d’environ 26 p. 100, et le coût de la farine de semoule avait fait un bond correspondant d’environ 18 p. 100, portant le prix de la farine de semoule d’environ 0,17 $/lb à environ 0,20 $/lb. En outre, alors que les prix canadiens augmentaient, le cours du blé à l’échelle mondiale diminuait d’environ 23 p. 100 au cours de la même période, en 1985-1986. Le TCI a constaté, dans les conclusions de 1987, que ces augmentations des coûts intérieurs n’étaient pas assorties d’augmentations des prix de vente des pâtes et que, par conséquent, la branche de production nationale avait été prise dans un étau coût-prix, qui a été exacerbé par les avantages dont les produits importés ont bénéficié au niveau des coûts à cause de la baisse des cours mondiaux du blé dur.

Le Tribunal fait remarquer que, selon un témoin de la CCB, les prix du blé dur au Canada aujourd’hui sont fondés sur le «marché nord-am?E9‚ricain», ce qui signifie qu’un meunier canadien paie en magasin, à Thunder Bay (Ontario), un prix qui est fondamentalement le même que le prix en magasin payé à Minneapolis (Minnesota) [29] . Selon les éléments de preuve recueillis pendant la présente enquête, au cours de la période allant de 1992 à 1995, la branche de production nationale a de nouveau été prise dans un étau coût-prix en raison de la montée en flèche des coûts du blé dur et de la farine de semoule, particulièrement entre 1993 et 1994. Plus précisément, de 1992 à 1995, le prix de la farine de semoule a augmenté, selon les témoins de Borden, d’environ 76 p. 100, la plus grosse partie de cette augmentation s’étant produite en 1993-1994, alors que les prix ont fait un bond ahurissant de 70 p. 100 [30] . Contrairement à 1985-1986, les augmentations des prix canadiens dans les années 90 ont été reflétées dans les cours mondiaux à la hausse du blé dur. Les témoins de Borden ont également déclaré que l’augmentation du prix de la farine de semoule en 1993-1994 a entraîné une hausse de 42 p. 100 des coûts de production de pâtes [31] .

Le Tribunal fait remarquer que le prix du blé dur au Canada a fluctué selon des cycles au cours des 10 dernières années, comme cela est indiqué à la figure ci-dessous, qui faisait partie de l’analyse sur l’établissement des prix effectuée par le Tribunal [32] .

image

Source : Statistique Canada, catalogues nos 62-001, 62-010 et 62-011.

Aussi bien au début du cycle, correspondant à l’enquête de 1987, qu’à la fin du cycle, correspondant à la présente enquête, les prix de la farine de semoule étaient élevés et à la hausse, selon l’indice, et la branche de production nationale a signalé un dommage financier. Au milieu du cycle, soit en 1990 et 1991, alors que les prix de la farine de semoule étaient bas et à la baisse, la branche de production nationale semble s’être bien tirée d’affaire. En effet, selon un témoin de la branche de production nationale, sa société a enregistré, en 1991, un rendement de plus de 10 p. 100 sur les ventes nettes de pâtes [33] ce qui, de l’avis de tous les témoins de la branche de production nationale, était considéré comme un taux de rendement cible dans le secteur des pâtes. Ce que cela donne clairement à penser au Tribunal, c’est qu’il existe une corrélation entre le rendement de la branche de production nationale et le prix de la farine de semoule.

De plus, une des raisons de cette corrélation ressort avec évidence de l’examen de la figure ci-dessus. Bien que les prix des pâtes au cours du cycle aient généralement fluctué dans le même sens que les prix de la farine de semoule, ils ont eu tendance à diminuer plus lentement et moins que les prix de la farine de semoule, et également à augmenter plus lentement et de façon moins marquée que les prix de la farine de semoule. Cette situation aurait tendance à causer une expansion des marges lorsque les coûts de la branche de production de la farine de semoule diminuent, comme ce fut le cas au cours de la période 1988-1991, et une contraction des marges lorsque les coûts augmentent, comme on a pu remarquer au cours de la période 1992-1995. À vrai dire, cela aiderait également à expliquer l’apparent paradoxe du bon rendement enregistré par la branche de production nationale en 1990-1991, en dépit du fait que les prix des pâtes, selon l’indice, étaient moins élevés en 1990-1991 qu’en 1986 ou 1995.

Le phénomène susmentionné des prix qui tombent moins rapidement que les coûts et des augmentations de coûts devant être absorbées initialement alors que les prix regrimpent serait, de l’avis du Tribunal, généralement applicable à de nombreux secteurs manufacturiers. Cela est particulièrement vrai dans le secteur du commerce intérieur des pâtes où, selon un témoin du secteur de la branche de production nationale, un avis de jusqu’à 12 semaines doit être donné aux clients avant d’«accepter» toute augmentation de prix [34] . Ce délai pour donner un avis est important ce qui signifie que, lorsque les coûts montent rapidement, comme ce fut le cas en 1993-1994, la branche de production nationale n’a probablement d’autre choix que de constater une érosion des marges [35] .

Dans ce contexte, le Tribunal n’est guère surpris que la branche de production nationale ait encaissé ses plus lourdes pertes au cours de la période visée par l’enquête, soit en 1993-1994. En 1995, le rendement de la branche de production nationale s’est nettement amélioré (bien que des pertes aient encore été signalées), à mesure que les coûts d’achat de la farine de semoule se stabilisaient et que la branche de production nationale rattrapait le chemin perdu en mettant en œuvre plusieurs augmentations de prix [36] . (Voir le tableau 4 et l’analyse des résultats financiers de la branche de production nationale pour obtenir d’autres détails sur le rendement de cette branche de production au cours de la période visée par l’enquête.)

Bref, le Tribunal est d’avis que, face à la hausse des coûts de la farine de semoule à laquelle la branche de production nationale a été confrontée de 1992 à 1995, cette branche de production ne pouvait que subir un certain dommage financier en raison du jeu normal des forces du marché.

Analyse des indicateurs économiques

Production

Comme cela est indiqué au tableau 2, les pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins sont de loin la plus importante catégorie de pâtes séchées produites au Canada. Au cours de la période visée par l’enquête, c’est-à-dire de 1992 à 1995, ces marchandises représentaient environ 65 p. 100 de toutes les pâtes séchées produites au Canada. La production a atteint un sommet de 90,8 millions de kilogrammes en 1993, avant de diminuer de 9,3 millions de kilogrammes en 1994. En 1995, la production a augmenté d’environ 8,0 millions de kilogrammes pour se situer à 89,3 millions de kilogrammes. Les niveaux de production réalisés en 1995 étaient à peine inférieurs à ceux enregistrés durant l’année record de 1993.

La production de pâtes séchées en paquets de plus de 2,3 kg, qui sortent des mêmes chaînes de fabrication essentiellement que celles des pâtes en paquets de 2,3 kg ou moins, a augmenté de 1,4 million de kilogrammes pour atteindre 25,5 millions de kilogrammes en 1993, et a été suivie d’une forte poussée de près de 10,0 millions de kilogrammes en 1994. Cette montée en flèche de la production a plus que compensé la diminution affichée dans la production de pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins au cours de cette année-là. En 1995, la production a enregistré une baisse de moins de 5 p. 100 par rapport à l’année record de 1994.

La troisième catégorie de pâtes, également produites sur du matériel commun, est constituée d’autres pâtes séchées (p. ex., les pâtes contenant des œufs et les pâtes utilisées à des fins de transformation ultérieure). La production de ces pâtes a progressé de 26 p. 100 en 1993, atteignant un sommet de 20,0 millions de kilogrammes. Cependant, en 1994 et 1995, la production est tombée de près de 20 p. 100; en 1995, elle avait diminué de 13,2 millions de kilogrammes, niveau le plus bas enregistré durant la période visée par l’enquête.

Tableau 2

PRODUCTION

1992

1993

1994

1995

Pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins

Production (000 kg)

84 425

90 859

81 563

89 302

Taux de variation

8

(10)

9

Pâtes séchées en paquets de plus de 2,3 kg

Production (000 kg)

24 135

25 535

35 344

33 756

Taux de variation

6

38

(4)

Autres pâtes séchées1

Production (000 kg)

15 838

20 021

16 315

13 219

Taux de variation

26

(19)

(19)

Total des pâtes séchées

Production (000 kg)

124 398

136 415

133 222

136 277

Taux de variation

10

(2)

2

Note :

1. Comprend la production de pâtes contenant des œufs et de pâtes utilisées à des fins de transformation ultérieure.

Source : Protected Pre-Hearing Staff Report, le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ-95-003-7 (protégée), dossier administratif, vol. 2 à la p. 128.

Bref, la production de pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins a fluctué au cours de la période, mais a terminé à un niveau un peu plus élevé en 1995 qu’en 1992. Dans l’ensemble, la branche de production nationale de pâtes séchées a augmenté après 1992 et est demeurée constante après cette date [37] .

Marché de détail apparent

L’enquête a porté sur le marché de détail des pâtes séchées, étant donné que plus de 90 p. 100 des ventes de pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins étaient réalisées sur ce marché, selon les données du Tribunal [38] .

Comme cela est indiqué au tableau 3, le marché de détail apparent des pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins, exprimé en volume, a progressé de 13 p. 100 entre 1992 et 1995. Au cours de cette période d’expansion du marché, les parts de marché détenues par la branche de production nationale et par les importations en provenance d’Italie et des États-Unis ont beaucoup fluctué. Le volume des ventes de la branche de production nationale est demeuré relativement le même au cours de la période de croissance du marché; c’est ce qui explique que sa part du marché est passée de 89 à 80 p. 100.

Les importations en provenance d’Italie et des États-Unis ont augmenté leur part respective du marché au cours de la période visée par l’enquête. Les importations italiennes ont augmenté leur part du marché de 7 points de pourcentage entre 1992 et 1994, avant de perdre 2 points de pourcentage de cette part en 1995. Les importations en provenance des États-Unis ont augmenté leur part du marché de 4 points de pourcentage, la plupart de ce gain se produisant en 1994.

Tableau 3

MARCHÉ DE DÉTAIL APPARENT

1992

1993

1994

1995

Marché de détail apparent

Volume des ventes (000 kg)

103 021

109 318

113 021

116 721

Taux de variation

6

3

3

Part du marché (%)

Producteurs nationaux

89

87

79

80

Importations d’Italie

8

11

15

13

Importations des É.-U.

3

2

6

7

Note :

1. Les chiffres sont arrondis et ne donnent donc pas nécessairement un total juste.

Source : Public Pre-Hearing Staff Report, révisé le 7 mars 1996, pièce du Tribunal NQ-95-003-6A, dossier administratif, vol. 1A à la p. 109.2.

Le marché de détail apparent pour les pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins peut être analysé en fonction des principaux formats de paquets dans lesquels le produit est vendu, à savoir les paquets de 450 g et de 500 g, les paquets de 900 g et les autres formats de paquets.

Comme cela est indiqué au tableau 4, les paquets de 450 g et de 500 g ont affiché un gain de 37 p. 100, en volume, entre 1992 et 1995. La part du marché de la branche de production nationale pour les paquets de ces formats a enregistré une baisse graduelle et constante au cours de la période visée par l’enquête. En 1995, la part du marché de la branche de production nationale s’établissait à 46 p. 100, en baisse par rapport à 65 p. 100 en 1992.

Les importations en provenance d’Italie de paquets de 450 g et de 500 g ont gagné 14 points de pourcentage de part du marché entre 1992 et 1995. La part des importations en provenance des États-Unis est demeurée relativement stable entre 1992 et 1994 pour ensuite augmenté de 6 points de pourcentage en 1995.

Le tableau 4 indique, en outre, que les ventes de paquets de 900 g détiennent la plus grosse part du marché des pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins. Au cours de la période allant de 1992 à 1995, le marché apparent pour les paquets de ce format est demeuré relativement stagnant. Tout en préservant son rôle de participant prédominant pour les paquets de ce format, la branche de production a néanmoins vu sa part du marché diminuer, en volume, de 7 points de pourcentage entre 1992 et 1994. En 1995, la branche de production nationale a regagné 5 points de pourcentage de sa part du marché, conservant 94 p. 100 du marché, comparativement à 96 p. 100 en 1992.

Les ventes de pâtes en paquets de 900 g importées d’Italie ont augmenté leur part du marché de 3 points de pourcentage entre 1992 et 1994, selon les éléments de preuve, en grande partie à cause d’une augmentation des ventes d’Unico, un gros importateur et distributeur de produits alimentaires italiens à l’époque. Les éléments de preuve montrent également qu’à la fin de 1994, Unico a décidé d’abandonner les fournisseurs italiens au profit de fournisseurs canadiens et américains. C’est ce qui explique que la part du marché détenue par les importations d’Italie soit tombée à un niveau dérisoire en 1995. Les importations des États-Unis ont gagné 4 points de pourcentage de part du marché pour les paquets de 900 g au cours de la période allant de 1992 à 1994. En 1995, la part des importations des États-Unis est tombée, mais cette baisse n’a pas été aussi forte que celle enregistrée par les importations italiennes.

Les «autres formats pour la vente au détail» (350 g, 375 g, etc.) figurant au tableau 4 représentent le plus petit des trois groupes. Au cours de la période visée par l’enquête, le volume des ventes de ce groupe de formats a augmenté d’environ 5 millions de kilogrammes, plus ou moins également répartis entre la branche de production nationale et les importations d’Italie. Les ventes dans ce groupe sont constituées, en grande partie, de formes et d’articles spéciaux qui sont offerts généralement à des prix au gramme considérablement plus élevés que les prix des paquets ordinaires de 450 g, de 500 g et de 900 g.

Tableau 4

MARCHÉ DE DÉTAIL APPARENT SELON LE FORMAT DES PAQUETS
(000 kg)

1992

1993

1994

1995

Paquets de 450 g et de 500 g

Marché apparent (000 kg)

19 634

21 359

24 545

26 921

Taux de variation

9

15

10

Part du marché (%)

Producteurs nationaux

65

59

52

46

Importations d’Italie

32

39

45

46

Importations des É.-U.

3

2

3

9

Paquets de 900 g

Marché apparent (000 kg)

73 362

76 893

76 596

72 453

Taux de variation

5

(0)

(5)

Part du marché (%)

Producteurs nationaux

96

95

89

94

Importations d’Italie

2

3

5

1

Importations des É.-U.

2

1

6

5

Autres formats pour la vente au détail

Marché apparent (000 kg)

10 023

11 057

11 880

14 734

Taux de variation

10

7

24

Part du marché (%)

Producteurs nationaux

90

83

76

78

Importations d’Italie

2

10

17

17

Importations des É.-U.

8

7

7

5

Notes :

1. Le marché apparent pour 1995 comprend 2,6 millions de kilogrammes de pâtes séchées en formats non spécifiés. Le tableau ci-dessus n’en tient pas compte.

2. Les chiffres sont arrondis et ne donnent donc pas nécessairement un total juste.

Source : Public Pre-Hearing Staff Report, le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ-95-003-6, dossier administratif, vol. 1A à la p. 73.

Résultats financiers de la branche de production nationale

Le tableau 5 présente les résultats financiers consolidés de la branche de production nationale [39] . En raison du caractère confidentiel des données financières, l’information est présentée sous forme d’indice, 1992 étant l’année de référence.

Tableau 5

DONNÉES FINANCIÈRES
(indice 1992=100)

1993

1994

1995

Volume des ventes

104,5

101,3

99,5

Recettes unitaires moyennes

97,9

104,9

119,1

Ventes nettes

102,7

106,7

118,9

Coût des marchandises
vendues

107,5

134,4

139,4

Montant total de la stimulation
du commerce


118,2


99,4


98,2

Frais généraux de vente et
d’administration et autres frais


100,5


105,1


120,6

Bénéfice net (perte nette)

(63,1)

(201,6)

(11,0)

Source : Protected Pre-Hearing Staff Report, révisé le 1er avril 1996, pièce du Tribunal NQ-95-003-7C (protégée), dossier administratif, vol. 2 à la p. 187.

Ces résultats montrent que les recettes de ventes nettes de la branche de production nationale ont augmenté de 19 p. 100 entre 1992 et 1995. Cependant, au cours de la même période, le coût des marchandises vendues a fait un bond de 39 p. 100.

Les dépenses de la branche de production nationale, autres que celles affectées à la stimulation du commerce, ont augmenté de 21 p. 100 au cours de la période. Le total des dépenses associées à la stimulation du commerce avait augmenté de 18 p. 100 en 1993, comparativement à 1992, et a ensuite diminué en 1994 et 1995 pour atteindre un niveau moins élevé qu’en 1992. Les résultats nets indiquent que 1992 a été une année rentable mais que, par la suite, la branche de production nationale a enregistré des pertes pour chacune des années 1993 et 1994, les niveaux de prix moyens accusant un retard par rapport aux augmentations de coût. En 1995, les résultats se sont nettement améliorés grâce, en grande partie, à une augmentation de 14 p. 100 des prix de vente unitaires moyens. Ces résultats financiers donnent une idée de l’étau coût-prix dans lequel la branche de production nationale a été prise, au cours de la période visée par l’enquête, à cause, en partie, de la fluctuation du coût de la farine de semoule, dont il a déjà été question dans les présents motifs.

Résumé

Bref, au cours de la période visée par l’enquête, la branche de production nationale a vu sa part du marché de détail des pâtes séchées se rétrécir et, au total, cette branche de production a perdu de grosses sommes sur la portion de ses affaires que représentaient les pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins. De l’avis du Tribunal, le dommage subi, notamment sur le plan financier, est sensible.

Lien de causalité

Le Tribunal doit maintenant examiner s’il existe un lien de causalité entre le dommage sensible subi par la branche de production nationale et les importations sous-évaluées et subventionnées. Le paragraphe 37.1(3) du Règlement prescrit au Tribunal les facteurs que celui-ci peut considérer pour examiner cette question. Le Tribunal doit également examiner d’autres facteurs pour s’assurer que le dommage causé par ces facteurs n’est pas imputable aux importations sous-évaluées et subventionnées. En examinant la question du lien de causalité dans la présente enquête, le Tribunal s’est particulièrement attaché à l’évolution d’ensemble du marché ainsi qu’à la question des formats différents et des marques de détaillants contrôlées et aux liens existant entre ces questions et l’établissement des prix. En outre, le Tribunal a examiné les éléments de preuve concernant les allégations de clients perdus et de compression et d’érosion des prix pour des clients particuliers.

Vue d’ensemble du marché

Selon les conclusions rendues en 1987, le taux de croissance du marché canadien des pâtes avait été assez constant à partir de 1983. La branche de production nationale et les importations italiennes avaient participé plus ou moins également à cette croissance du marché. Ainsi, leur part du marché était demeurée relativement la même au cours de la période, la branche de production nationale occupant environ 89 p. 100 du marché et les importations italiennes, près de 9 p. 100. La part résiduelle était surtout détenue par les États-Unis.

Comme cela a été indiqué à la section intitulée «Analyse des indicateurs économiques», au cours de la période visée par la présente enquête, le marché des pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins a également connu un taux de croissance moyen relativement constant d’environ 3 points de pourcentage par année. Cependant, contrairement à 1987, les données statistiques fournies pour la présente enquête indiquent que la branche de production nationale n’a pas participé à cette croissance qui a plutôt été due presque entièrement aux importations en provenance d’Italie, ainsi qu’aux importations des États-Unis. Par suite de l’augmentation de ces importations, même si les volumes des ventes des producteurs nationaux sont demeurés sensiblement les mêmes de 1992 à 1995, la part du marché de la branche de production nationale a reculé de 9 points de pourcentage, passant de 89 à 80 p. 100. Ces 9 points de pourcentage ont été répartis presque également entre les importations italiennes, qui ont augmenté d’environ 5 points de pourcentage leur part du marché, la portant à 13 p. 100 en 1995 d’une part, et les importations américaines, qui ont accaparé environ 4 points de pourcentage du marché pour porter leur part à 7 p. 100 en 1995.

En 1987, comme la branche de production nationale n’avait pas perdu de part du marché, l’analyse de dommage avait essentiellement porté à ce moment-là sur la question de savoir si les importations italiennes lui avaient causé un dommage financier à cause de la compression des prix. Dans la présente enquête, l’accent est mis à la fois sur la perte de sa part du marché, comme cela est indiqué ci-dessus, et sur le dommage causé par la compression et l’érosion des prix. Cependant, pour ce qui est de la perte de la part du marché de la branche de production nationale, il importe de ne pas oublier que, dans une perspective générale, cette perte n’est pas due à une diminution des ventes, mais plutôt à un manque de participation aux possibilités de croissance qui se présentaient. La question essentielle à poser, dans ces conditions, est celle de savoir où se trouvaient ces possibilités de croissance et pour quelle raison la branche de production n’en a pas profité.

Les paquets de 450 g et de 500 g

Le Tribunal fait remarquer que, dans l’enquête de 1987, l’analyse de dommage portait essentiellement sur deux formats, à savoir les paquets de 500 g et de 900 g. La présente enquête a également surtout examiné ces deux formats, ainsi que les paquets de 450 g qui, apparemment, n’étaient pas sur le marché en 1987. Le Tribunal conclut que les paquets de 450 g et de 500 g sont tout à fait interchangeables du point de vue de la vente au détail et aux yeux des consommateurs, et a donc regroupé ces deux formats aux fins de l’analyse qui suit. Les formats de 900 g ainsi que de 450 g et de 500 g forment le noyau du marché de détail des pâtes séchées, puisqu’ils représentent ensemble environ 90 p. 100 du total des ventes au détail.

En 1987, le TCI a conclu que la plupart des pâtes séchées italiennes vendues sur le marché canadien étaient emballées dans des paquets de 500 g. Les éléments de preuve dans la présente enquête indiquent que la vaste majorité des pâtes séchées italiennes continuent d’être vendues dans de petits paquets, ceux de 500 g ayant maintenant été rattrapés par les paquets de 450 g. Le Tribunal fait remarquer que les données statistiques recueillies pour la présente enquête indiquent que, de 1992 à 1995, toute la croissance sur le marché, dans les principaux formats, a été dans le secteur des paquets de 450 g et de 500 g, représentant une augmentation d’environ 7,3 millions de kilogrammes. Les paquets de 900 g, dont les ventes sont en très grande majorité attribuables à la production nationale, n’ont enregistré aucune croissance soutenue au cours de la même période de quatre ans [40] .

Les données montrent également qu’environ 80 p. 100 de l’augmentation des ventes de paquets de 450 g et de 500 g, soit environ 6 millions de kilogrammes, provenaient d’importations italiennes, le reste allant aux importations américaines [41] . Selon les réponses obtenues du questionnaire à l’intention de l’importateur, des nombreuses marques de pâtes italiennes vendues sur le marché canadien, seul un nombre limité de marques de fabricants de pâtes italiennes bien connues représentent la très grande majorité des ventes et l’augmentation des ventes entre 1993 et 1995, notamment Barilla, De Cecco, Delverde, La Molasina et Buitoni.

Plus précisément, l’analyse des ventes au détail par marque nominale, pour les années allant de 1993 à 1995 (les ventes par marque nominale n’étaient pas disponibles pour 1992), montre que ces cinq marques de pâtes italiennes qui représentaient environ 53 p. 100 du total des ventes de pâtes italiennes en 1993 ont augmenté pour accaparé environ 75 p. 100 de ce total en 1995. Cette croissance de part du marché, exprimée en pourcentage, de ces cinq marques est attribuable au fait qu’elles ont accaparé quelque 93 p. 100 de la croissance des ventes de pâtes en provenance d’Italie en paquets de 450 g et de 500 g au cours de cette période de trois ans. Cela représentait une augmentation du volume des ventes de ces cinq marques d’environ 3,8 millions de kilogrammes, sur une croissance totale de 4,0 millions de kilogrammes des ventes de pâtes en paquets de 450 g et de 500 g [42] .

Si l’on pousse un peu plus loin l’analyse des ventes de pâtes séchées italiennes on trouve que, du point de vue du prix, il faut distinguer les ventes de marques de fabricants de pâtes italiennes haut de gamme des autres produits italiens vendus sur le marché canadien, comprenant les marques de fabricants, les marques de distribution et les marques de détaillants moins connues. En particulier, au niveau de la vente au détail, les divers rapports préparés par Nielsen indiquent que, de 1993 à 1996, les cinq marques de pâtes italiennes auxquelles la presque totalité de la croissance des ventes de pâtes italiennes est attribuable, se vendaient couramment à des prix de 10 à 50 p. 100 plus élevés que les autres marques de pâtes en provenance d’Italie.

Le prix de détail cible des cinq marques, pour les pâtes ordinaires de formes courantes, a constamment été d’environ 1,00 $ pour les paquets de 450 g et de 500 g. Par exemple, selon l’enquête menée par Nielsen sur la catégorie des principaux supermarchés nationaux, au cours des 52 semaines se terminant à la fin du mois de février des années 1994, 1995 et 1996 [43] , le prix des spaghettis Delverde et De Cecco, en emballages de cellophane de 450 g, variait entre 1,00 $ et 1,20 $. Les autres marques comme Bertolli et Fabianelli vendaient au détail leurs paquets de spaghettis de 500 g à un prix qui variait entre 0,65 $ et 0,85 $ pour la même période. Dans le marché bas de gamme, on retrouve des marques comme San Marco, dont les paquets de spaghettis de 500 g se vendaient au prix d’environ 0,50 $ le paquet pendant la même période.

Cette distinction, au niveau du prix de détail, entre les cinq marques de pâtes italiennes et les autres marques de pâtes italiennes est confirmée par une comparaison des prix de gros de ces grandes marques comparativement aux autres marques, selon les indications fournies dans le rapport du Tribunal sur l’établissement des prix et selon les questionnaires. Depuis 1993, au niveau du prix de gros, le prix des cinq grandes marques de pâtes ordinaires italiennes, en paquets de 450 g et de 500 g, a été nettement plus élevé que celui des autres marques de pâtes en provenance d’Italie. Par exemple, les prix de gros des grandes marques étaient de 42 à plus de 100 p. 100 supérieurs à ceux des autres marques de pâtes en provenance d’Italie [44] .

Plusieurs témoins ont indiqué que le marché des pâtes était formé de pâtes séchées haut de gamme, de milieu de gamme et bas de gamme [45] . En reprenant cette terminologie, il est évident pour le Tribunal, selon l’analyse précédente, qu’au cours de la période visée par l’enquête, les importations de pâtes italiennes ciblaient, en général, le marché haut de gamme. C’est dans ce segment du marché que la croissance s’est surtout produite au Canada, et se sont les marques de pâtes italiennes haut de gamme qui ont accaparé la presque totalité de cette croissance.

Le Tribunal fait remarquer que la branche de production nationale a allégué que les paquets de 450 g et de 500 g lui sont importants et que les importations italiennes lui ont causé un dommage important dans ce secteur du marché. Selon les éléments de preuve, le seul producteur canadien important de pâtes en paquets de ces formats est Borden [46] . Au cours de la période visée par l’enquête, ses ventes ont représenté environ 80 à 85 p. 100 des ventes de paquets de ces formats par les producteurs nationaux et environ 50 p. 100 du total des ventes de paquets de 450 g et de 500 g. La plupart des ventes de paquets de ces formats effectuées par Borden visaient une marque, à savoir Catelli, dont les pâtes sont en paquets de 500 g. Les renseignements fournis par Borden indiquent que Lancia, son autre grande marque de pâtes, n’est pas vendue en paquets de 500 g, à l’exception de la lasagne. Selon l’enquête menée par Nielsen, le prix de détail des spaghettis Catelli en paquets de 500 g a constamment augmenté depuis 1993, passant de 0,90 $ en 1993 à bien au-dessus de 1,00 $ en 1995. Ces données montrent à l’évidence que Catelli est positionnée dans le segment haut de gamme du marché, où elle vend ses produits à des prix cibles semblables à ceux des marques de pâtes italiennes haut de gamme [47] .

Le positionnement de Catelli dans le segment haut de gamme du marché de détail est confirmé par les données concernant l’établissement des prix de gros recueillies par le personnel du Tribunal. En particulier, les données montrent que les prix de gros de Catelli pour toutes les pâtes ordinaires, comme le prix de détail moyen des spaghettis Catelli en paquets de 500 g, ont augmenté régulièrement à partir de 1993. Depuis 1994, les prix de gros moyens des pâtes ordinaires de marque Catelli en paquets de 500 g classent cette marque dans la même gamme de prix que les prix de gros moyens des marques de pâtes italiennes haut de gamme [48] . Bref, le Tribunal conclut que les pâtes Catelli en paquets de 500 g concurrencent, dans le segment haut de gamme du marché, les marques de pâtes italiennes haut de gamme.

Cependant, les éléments de preuve dont dispose le Tribunal ne prouvent pas que les prix de détail ou de gros ont été comprimés pour les paquets de ce format et que ce format est une source de problèmes financiers pour Borden. À cet égard, le Tribunal souligne que Borden a fourni des données indiquant son coût moyen des marchandises vendues pour les pâtes ordinaires, soit les spaghettis et macaronis Catelli, pour les années 1994 et 1995 [49] . Selon ces données, il existe une marge raisonnable entre les coûts moyens des marchandises vendues par Borden et ses prix de gros moyens pour les pâtes ordinaires de Catelli en paquets de 500 g.

Le Tribunal souligne qu’au cours de la période visée par l’enquête, Primo a eu une présence assez constante, quoique faible, dans le secteur des ventes de pâtes en paquets de 450 g et de 500 g. La seule autre entreprise de la branche de production nationale présente sur ce marché est Italpasta, dont la participation a récemment augmenté, mais elle était très peu importante [50] . Ensemble, ces deux entreprises représentent de 5 à 10 p. 100 des ventes des paquets de ces formats, au cours de la période de quatre ans. Selon les éléments de preuve, du point de vue du prix, Primo est positionnée dans le segment de milieu de gamme du marché, pour ce qui est des prix de détail et de gros. Quant à Italpasta, les données concernant l’établissement des prix recueillies par le personnel du Tribunal indiquent qu’elle se trouve dans le segment bas de gamme du marché [51] . À l’audience, Italpasta a confirmé cet établissement de prix, mais a soutenu qu’il lui fallait suivre cette stratégie en matière d’établissement des prix pour s’imposer sur le marché à cause de la concurrence des importations italiennes [52] .

Les éléments de preuve montrent clairement qu’il existe, sur le marché, une variété de pâtes italiennes à bas prix, de milieu de gamme et bas de gamme, en paquets de 450 g et de 500 g. Cependant, la présence de ces marques secondaires est, par moments, instable, et elles n’ont pas représenté, au cours des 10 à 15 dernières années, et ne représentent pas à l’heure actuelle, plus qu’un faible pourcentage des importations en provenance d’Italie. Néanmoins, de l’avis du Tribunal, leur présence pourrait bien avoir pour effet de comprimer les prix dans les segments de milieu de gamme et bas de gamme du marché, là où le prix est une considération plus importante. Toutefois, compte tenu du fait que la grande majorité des ventes de pâtes produites au Canada et italiennes portent sur des pâtes haut de gamme en paquets de 450 g et de 500 g, le dommage que ces importations italiennes de milieu de gamme et bas de gamme peuvent avoir causé n’a pas, à ce jour, été important, selon les estimations du Tribunal.

Les paquets de 900 g

En 1987, le TCI a conclu que les ventes nationales étaient surtout concentrées dans le secteur des paquets de 900 g. En outre, le TCI a constaté qu’aussi bien dans les magasins à succursales multiples que chez les gros magasins autonomes, ce format faisait souvent l’objet de promotions, surtout à Montréal et à Toronto, la plus grande partie des frais de promotion des ventes étant supportés par les producteurs, à un prix de détail cible de 0,99 $, ce qui en faisait en réalité de ce format un «produit d’appel important». Le TCI a conclu à l’existence d’une pression et d’une compression des prix sur le marché de détail, mais a ajouté que cela était principalement dû à la concurrence au sein même de la branche de production plutôt qu’à celle des produits italiens.

Après avoir examiné les éléments de preuve dans la présente enquête, le Tribunal est d’avis que la situation qui régnait dans ce segment du marché au cours de la période visée par l’enquête est, en grande partie, la même que la situation qui existait au cours de la période visée par l’enquête menée il y a près de 10 ans. En particulier, la branche de production nationale occupe encore une place prédominante dans ce segment du marché. Les importations en provenance d’Italie formaient de 2 à 5 p. 100 de ce marché entre 1992 et 1994 et ont pratiquement disparu en 1995 [53] . La plupart de ces importations italiennes étaient effectuées par une société, Unico, qui en fait était la seule source de concurrence italienne dans le secteur des paquets de 900 g de la production nationale au cours de la période visée par l’enquête [54] . Une autre petite partie des ventes de pâtes en paquets de 900 g, représentant également moins de 5 p. 100 du total des ventes de pâtes en paquets de 900 g, est la responsabilité des importations, en provenance des États-Unis, de pâtes de marques contrôlées de détaillants comme les produits «sans nom» de Loblaws [55] .

Le prix de détail cible promotionnel de 0,99 $, qui avait beaucoup retenu l’attention lors de la première enquête, a de nouveau attiré l’attention au cours de cette enquête. Tous les témoins du Tribunal, représentant un détaillant national, un détaillant régional de l’Ontario et un détaillant indépendant, ont affirmé que le prix vedette de 0,99 $ pour le paquet de 900 g se retrouvait encore fréquemment, surtout dans la région de Toronto [56] . Un témoin a indiqué que cela ne représentait même plus un prix vedette dans ses magasins, mais était offert comme un bas prix quotidien [57] . Ces témoins ont également signalé que, parfois, les prix des paquets de 900 g tombaient souvent bien en dessous de 0,99 $ [58] .

Ces t 9‚moins ont, en général, confirmé que lorsque les pâtes étaient vendues à des prix vedettes, les détaillants réalisaient peu ou pas de profit sur ces ventes. En fait, elles étaient considérées comme des «produits d’appel» dont le but était d’attirer les clients dans le magasin [59] . En général, les détaillants ont été insatisfaits des niveaux de prix de détail pour les produits en paquets de 900 g et souhaitaient voir leur disparition. Cependant, ils se montraient sceptiques à l’idée que l’offre fréquente de produits en paquets de 900 g à des prix vedettes, incluant le prix de détail cible populaire de 0,99 $, deviendrait une chose du passé, quel que soit l’issue de la présente enquête [60] . En effet, certains éléments de preuve présentés indiquent que, malgré la mise en œuvre de droits antidumping et de droits compensateurs provisoires, les paquets de pâtes de 900 g ont continué à être vendus au prix vedette de 0,99 $ [61] .

Il est évident, comme le montre bien le phénomène de l’établissement des prix vedettes, que les pâtes en paquets de 900 g ont fait et continuent de faire l’objet d’intenses pressions des prix au niveau du prix de détail, ce qui soumet invariablement les prix de gros à des pressions semblables. Selon les éléments de preuve fournis, le Tribunal estime que plusieurs facteurs expliquent cette situation. D’abord, le milieu de la vente au détail, auquel les témoins de ce secteur ont fait allusion, est la scène d’une concurrence très vive dans les grands centres urbains, où les grands magasins à succursales multiples et gros magasins autonomes cherchent tous à s’attirer l’attention du consommateur [62] . L’une des principales armes utilisées dans cette bataille est l’établissement du prix vedette annoncé dans des encarts publicitaires et autres moyens promotionnels. Certains produits attirent plus que d’autres. Selon les témoins, les pâtes séchées, surtout en paquets de 900 g, ont été un des principaux produits pour les promotions et les encarts en raison de leur popularité reconnue auprès des consommateurs [63] . D’une certaine manière, les pâtes en paquets de 900 g semblent être victimes de leur propre succès pour ce qui est d’attirer les consommateurs. Cependant, selon les éléments de preuve, en attirant les clients dans un magasin, les détaillants peuvent compenser une partie ou la totalité des pertes liées aux ventes de pâtes en paquets de 900 g par des ventes d’autres produits [64] .

Un deuxième facteur est la concurrence au sein même de la branche de production. Bien qu’un moins grand nombre d’entreprises nationales se fassent aujourd’hui la concurrence dans le segment du marché des paquets de 900 g qu’au moment de la première enquête, de l’avis du Tribunal, la «vive» concurrence que les sociétés se livraient en 1987 n’a pas sensiblement diminué depuis lors. Selon les éléments de preuve, Borden, Primo et, dans une moindre mesure, Italpasta ont toutes affecté d’importantes sommes à leurs frais promotionnels en vue d’accroître leurs ventes de pâtes séchées pendant la période visée par l’enquête. Puisque la très grande majorité des ventes de la branche de production nationale est constituée de paquets de 900 g, il s’ensuit qu’une forte proportion de ces dépenses doivent être liées aux ventes des paquets de ce format.

Bien que les détaillants aient affirmé qu’ils absorbent une partie des coûts de ces promotions, ils ont aussi fait allusion au flux régulier de chèques qu’ils reçoivent de la branche de production nationale pour appuyer les prix vedettes auxquels les pâtes en paquets de 900 g sont fréquemment offertes [65] . Les détaillants ont également indiqué que, dans de nombreux cas, cet argent de la branche de production nationale leur était offert en connexion avec des programmes de promotion consistant à emballer les pâtes avec d’autres marchandises d’un fournisseur en particulier, par exemple, des sauces aux tomates et des huiles végétales [66] . Dans les documents qu’elle a présentés comme éléments de preuve, la branche de production nationale précise que cette technique de regroupement à des fins promotionnelles ou «vente réciproque» est un moyen de répercuter les dépenses de commercialisation sur toute une famille de produits. Grâce à cette technique, les produits regroupés peuvent être vendus à des marges différentes, certaines élevées d’autres basses, dans l’espoir d’obtenir une marge satisfaisante pour l’ensemble du groupe [67] . Cependant, en vendant plusieurs produits ensemble, il peut être plus difficile d’attribuer une valeur nette réelle fixe aux pâtes séchées. Néanmoins, il est clair pour le Tribunal que la pratique de l’établissement des prix vedettes poursuivie par les détaillants, incluant un prix de 0,99 $ pour un paquet de 900 g de pâtes ordinaires, serait moins répandue qu’elle ne l’est actuellement sur le marché si elle ne bénéficiait pas du soutien financier important des fabricants nationaux, au détriment des marges de la branche de production nationale [68] .

Le Tribunal souligne que les pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins ne sont qu’une des nombreuses variétés de produits de pâtes fabriqués par la branche de production nationale. Cependant, les paquets de 900 g de pâtes séchées ordinaires représentent le volet volume de la chaîne de fabrication de pâtes de la branche de production nationale. Ce qui signifie que, pour que la production des produits de pâtes en usine soit efficace de façon générale, il importe que les taux de production de la chaîne des pâtes séchées en paquets de 900 g soient élevés [69] . Cet impératif de la production explique en partie, de l’avis du Tribunal, la vivacité de la concurrence au sein de la branche de production nationale dans le secteur des ventes de paquets de 900 g ainsi que certains des bas prix de détail et de gros qui ont été mentionnés.

Le Tribunal fait remarquer que, dans le cadre de l’enquête, il a été demandé à la branche de production nationale de fournir un certain nombre de documents, préparés à des fins d’utilisation interne, qui renferment diverses informations commerciales [70] . Mis à part certains renvois à Unico, ces éléments de preuve ne mentionnent pratiquement pas que les importations italiennes sont une source de concurrence, encore moins de dommage [71] . Au contraire, lorsqu’il est question de concurrents principaux, ce sont d’autres fabricants nationaux qui sont habituellement mentionnés [72] . Ces éléments de preuve ayant trait à la concurrence au sein de la branche de production pour les paquets de 900 g sont confirmés par les propres données statistiques du Tribunal, qui révèlent une importante évolution des parts de marché parmi les producteurs nationaux au cours de la période visée par l’enquête. En particulier, les pertes de la part des ventes intérieures subies par un producteur national ont été largement compensées par des gains que d’autres producteurs nationaux ont réalisés dans le secteur des paquets de 900 g [73] .

Comme cela a déjà été mentionné, Unico a vendu et continue de vendre des pâtes en paquets de 900 g. En outre, il a été indiqué dans la section intitulée «Importateurs et exportateurs», qu’Unico était un gros importateur de pâtes italiennes de 1992 jusqu’au début de 1995, lorsqu’elle a cessé d’importer des pâtes d’Italie. Le Tribunal fait remarquer qu’Unico, qui s’est montrée disposée dans le passé à s’approvisionner dans des pays différents, est clairement une source de concurrence pour la branche de production nationale. Les renseignements sur l’établissement des prix dont dispose le Tribunal concernant les ventes de pâtes en paquets de 900 g par Unico indiquent que, indépendamment de la source du produit, les prix d’Unico sont tout à fait concurrentiels avec ceux de la branche de production nationale. Cependant, la part des ventes de paquets de 900 g détenue par Unico a fluctué dans des limites étroites et est demeurée relativement faible au cours de la période visée par l’enquête.

Un dernier facteur susceptible de comprimer les prix des paquets de 900 g est l’effet de transfert que suscitent les pâtes séchées italiennes à bas prix en paquets de 450 g et de 500 g. La branche de production nationale a allégué que certains consommateurs se contentent de regarder les prix de ces deux formats et qu’ils achètent le paquet le moins cher, c’est-à-dire le paquet le plus petit, indépendamment du fait que, par gramme, ils peuvent payer davantage pour ce paquet plus petit que pour le plus gros. Les détaillants qui ont témoigné ont convenu que cela caractérisait le comportement de certains consommateurs [74] . Tout en reconnaissant que ce genre de comportement existe parmi les consommateurs, il n’est pas évident pour le Tribunal comment cela appuie nécessairement l’affirmation de la branche de production nationale selon laquelle les importations italiennes sous-évaluées et subventionnées lui causent un dommage.

Diverses raisons personnelles peuvent pousser le consommateur à acheter le paquet plus petit. Ce peut être une préférence pour une marque donnée, le paquet plus petit peut être jugé plus commode ou peut répondre à son désir d’acheter des pâtes de formes différentes ou encore le consommateur peut tout simplement vouloir réduire au minimum la somme totale qu’il est prêt à payer pour tel ou tel achat. Quelle que soit la raison, si le paquet plus petit est beaucoup plus cher, par gramme, que le paquet plus gros, il est difficile de conclure que l’établissement du prix du paquet plus petit comprime celui du paquet plus gros.

À cet égard, les éléments de preuve établissent que, dans le secteur des ventes de pâtes haut de gamme [75] en paquets de 450 g et de 500 g, au niveau du détail, le paquet plus petit non seulement se vend, en général, à des prix beaucoup plus élevés que le paquet plus gros, par gramme, mais aussi, à l’occasion, par paquet. En d’autres termes, le paquet plus petit se vend parfois au détail à des prix plus élevés que le paquet plus gros, surtout quand ce dernier est en vedette. Par ailleurs, cela semble se vérifier à la fois pour les marques de pâtes italiennes haut de gamme et pour la marque de pâtes haut de gamme produites au Canada, à savoir Catelli, en paquets plus petits. Au niveau des opérations de gros, les éléments de preuve sont semblables. Au gramme, les pâtes séchées italiennes haut de gamme en paquets de 450 g et de 500 g se vendent entre 30 et 60 p. 100 plus cher que les pâtes produites au Canada en paquets de 900 g [76] .

Comme cela était indiqué dans la section précédente, dans les segments de milieu de gamme et bas de gamme du marché de détail des pâtes séchées, on trouve un certain nombre de pâtes italiennes à bas prix. Ces pâtes séchées italiennes peuvent établir, à certains endroits concurrentiels, un prix plancher qui pourrait bien pousser à la baisse le prix de certaines pâtes produites au Canada en paquets de 900 g. Cependant, comme cela a déjà été indiqué, ces marques de pâtes italiennes secondaires sont relativement peu présentes sur le marché canadien, et sont peu distribuées et de façon sporadique, surtout à Toronto et à Montréal. Par conséquent, de l’avis du Tribunal, leur capacité de causer un dommage à la production canadienne est plutôt limitée.

Marques de distribution de détaillants

Au cours de la période visée par l’enquête, les pâtes séchées de marques de distribution de détaillants ont représenté entre 15 et 20 p. 100 du total du marché de détail des pâtes séchées [77] . Un des principaux détaillants a déclaré que la croissance du marché des marques de distribution semble s’être ralentie récemment comparativement à son rythme de croissance antérieur [78] .

Le Tribunal conclut que la situation qui prévaut, et qui a prévalu au cours de la période visée par l’enquête, est assez semblable à celle présentée dans la première enquête. Plus précisément, les ventes de produits de marques de distribution de détaillants continuent d’être dominées par des pâtes produites au Canada. Cependant, les pâtes de marques de distribution produites aux États-Unis ont pris plus d’importance, reflétant, en grande partie, la croissance des produits de marques de distribution. Selon les éléments de preuve, une portion très importante de ces pâtes pourrait, dans un proche avenir, provenir d’une production canadienne plutôt qu’américaine [79] .

Pour ce qui est de la part du marché détenue, les pâtes italiennes continuent d’occuper une petite place dans le secteur des produits de marques de distribution. En effet, les éléments de preuve dont dispose le Tribunal ne font état que d’une seule situation notable dans laquelle un détaillant achète en Italie les produits de marques de distribution dont il a besoin, à savoir ceux d’A&P. Selon le témoin d’A&P, en 1994, cette dernière a décidé de développer un programme de produits alimentaires italiens de marques de distribution, qui comprenait des pâtes, lancé sous un thème de marketing méditerranéen. Il lui a fallu abandonner la production de pâtes de marques de distribution aux États-Unis pour la concentrer en Italie. Les pâtes italiennes qui ont, par la suite, été importées dans le cadre de ce programme étaient présentées dans des paquets de 450 g et étaient vendues sous la marque de distribution Master Choice «Sapori Meditterranei» [80] .

Une autre situation examinée à l’audience et relevant de la question des produits de marques de distribution, a été l’importation de pâtes italiennes par un gros détaillant autonome à Toronto, à savoir Galati, pâtes qui étaient vendues sous la marque «Reggia». Selon le témoin de Galati, ce produit était l’équivalent d’une marque de distribution de Galati, mais ce n’était pas un produit de marque exclusive pour cette société, puisque la marque existait déjà en Italie. Il a, de plus, indiqué qu’il ne pouvait envisager, en ce moment, aucune circonstance en vertu de laquelle les produits Reggia pourraient être achetés au Canada, puisque sa clientèle principale exigeait d’avoir des pâtes italiennes [81] .

Les éléments de preuve susmentionnés indiquent au Tribunal non seulement que les importations italiennes sont relativement peu présentes dans le secteur canadien des produits de marques de distribution mais aussi que, lorsqu’elles sont présentes, les affaires qu’elles représentent ne sont pas disponibles à la production canadienne en raison des exigences des détaillants et des préférences des consommateurs qui n’ont rien à voir avec le dumping ou le subventionnement.

Cependant, le Tribunal fait remarquer que, même si les pâtes italiennes n’ont eu qu’une faible incidence sur les volumes des ventes de la branche de production nationale dans le secteur des produits de marques de distribution, la branche de production nationale prétend également que les détaillants utilisent les pâtes séchées à bas prix en provenance d’Italie comme simple moyen de pression pour tenir les prix au Canada à un niveau peu élevé. Les éléments de preuve renferment un exemple particulièrement significatif de ce phénomène pour un important client de détail canadien [82] . Le Tribunal fait remarquer que ces affirmations de compression des prix dans le secteur des produits de marques de distribution reprennent des affirmations semblables faites par la branche de production nationale en 1987.

Le Tribunal estime qu’il est difficile d’évaluer ces affirmations, étant donné que les volumes des ventes de produits de marques de distribution en provenance d’Italie au cours de la période visée par l’enquête ne sont pas importants. Il est courant que des acheteurs opposent les uns aux autres des fournisseurs potentiels pour minimiser leurs coûts d’achat, même s’ils n’ont nullement l’intention ou le désir de s’approvisionner ailleurs. Dans la présente cause, les acheteurs pourraient se tourner vers d’autres sources intérieures d’approvisionnement, ainsi que du côté des États-Unis et de l’Italie, dans leurs négociations avec des fournisseurs particuliers. Il revient à ceux-ci d’évaluer soigneusement ces démarches des acheteurs de manière à offrir des prix qui ne soient pas plus bas que cela n’est réellement nécessaire pour conserver les affaires.

Néanmoins, le Tribunal accepte que la présence et l’offre de sources d’approvisionnement italiennes à bas prix ont quelque peu comprimé les prix que les fournisseurs nationaux peuvent obtenir pour leurs produits de marques de distribution avec les détaillants. On retrouve parmi ces sources d’approvisionnement italiennes, des fabricants italiens qui produisent des pâtes à bas prix directement pour les détaillants sous des étiquettes de marques contrôlées, ceux qui produisent des pâtes de ce genre pour les importateurs et les distributeurs qui les commercialisent sous leur propre dénomination, et ceux qui ciblent le marché bas de gamme avec leurs propres marques de fabricants.

Cependant, le Tribunal estime que le principal facteur qui empêche les prix de monter dans la catégorie des produits de marques de distribution est l’établissement de bas prix sur le marché des pâtes en paquets de 900 g de marques nominales. Les pâtes de marques de distribution, qui représentent le gros du marché des paquets de 900 g, sont généralement positionnées à des prix cibles qui sont réduits par rapport aux pâtes de marques nominales [83] . Si les prix établis des pâtes de marques nominales sont comprimés, il s’ensuit invariablement que ceux des pâtes de marques de distribution le seront aussi. Comme cela a déjà été expliqué, le Tribunal conclut que le principal problème dans la catégorie des paquets de 900 g est la concurrence entre détaillants et au sein même de la branche de production. De l’avis du Tribunal, la situation des marques de distribution n’est qu’une extension de ce problème.

Clients précis

Comme cela a été indiqué au début du présent exposé, à un niveau général, cette enquête ne traite pas d’abord de perte de ventes, étant donné que les ventes totales de la branche de production nationale sont demeurées relativement stables au cours de la période visée par l’enquête. Cependant, à l’appui de ses arguments, la branche de production a mentionné des cas précis, au niveau des clients, de dommage qu’elle avait subi sous forme de perte de ventes, de perte d’espace d’étalage ou de compression et d’érosion des prix relativement à des clients particuliers à cause de la concurrence des importations italiennes. De façon générale, les avocats des importateurs et des exportateurs n’ont présenté aucun élément de preuve qui contredit ces exemples de la branche de production nationale sauf, dans quelques cas, où certains importateurs disent avoir en fait perdu plutôt que gagné de l’espace d’étalage, contrairement aux affirmations de la branche de production nationale.

Les éléments de preuve indiquent clairement que la catégorie des pâtes est au premier plan de la situation très concurrentielle à laquelle de nombreux produits d’épicerie ont à faire face [84] . Les détaillants qui ont témoigné ont indiqué qu’ils passent leur temps à surveiller le taux de rotation et le rendement des stocks (UGS ou unités de gestion de stock) qu’ils présentent sur leurs étalages. Les stocks ou marques difficiles à écouler sont régulièrement abandonnés ou reçoivent moins d’espace d’étalage au profit des nouveaux produits ou nouvelles marques dans la même catégorie. Dans ce contexte, le Tribunal conclut que les détaillants ont, dans certains cas et à certaines occasions, manifesté peu de loyauté à l’égard des fournisseurs en décidant quel UGS ils placeraient sur leurs étalages.

En effet, dans certains cas figurant au dossier, en quelques années, des clients de détail ont rayé de leur liste des fournisseurs nationaux, se sont tournés vers d’autres fournisseurs nationaux ou vers des importations italiennes ou américaines pour revenir par la suite au fournisseur national initial [85] . De l’avis du Tribunal, un assez grand roulement d’UGS de fournisseurs semble faire naturellement partie du milieu concurrentiel sur ce marché. Cela étant, le fait qu’il y ait des exemples de pertes et de gains de ventes (et d’espace d’étalage) de la part des fournisseurs particuliers pour des clients particuliers n’est pas, en soi, inhabituel et ne permet pas de tirer des conclusions concernant les effets des importations italiennes sur le rendement de la branche de production nationale.

Quoi qu’il en soit, le Tribunal a examiné chacun des exemples précis que lui a présentés la branche de production nationale et accepte que ces éléments de preuve montrent que, dans certains cas, les importations italiennes ont causé un dommage. Cependant, dans d’autres cas, cet effet est moins clair. Par exemple, le Tribunal estime que, dans le cas de l’un des producteurs nationaux, un nombre disproportionné d’exemples visent une perte d’espace d’étalage survenue dans des magasins autonomes à caractère principalement ethnique à Toronto et dans la région avoisinante [86] . Un grand nombre de ces magasins desservent en général une clientèle multiculturelle. Ils sont également portés à offrir un trop grand nombre de pâtes d’Italie sur leurs étalages comparativement aux magasins à succursales multiples parce qu’un plus grand nombre de leurs clients exigent d’avoir exclusivement des pâtes faites en Italie pour satisfaire à leurs exigences dans le domaine des pâtes.

En outre, dans certains exemples fournis par la branche de production nationale, les allégations de dommage font état de pertes de ventes au profit des importations italiennes en général, mais ne fournissent aucun détail sur la marque, le format du paquet concerné ou le nom de l’importateur. Il est dans ces conditions difficile pour le Tribunal d’évaluer lesquels des divers facteurs concurrentiels examinés dans les sections précédentes sont susceptibles d’expliquer pourquoi telle ou telle vente a pu Aˆtre perdue. Dans certains autres exemples, assortis de détails, les renseignements indiquent que la marque de pâtes italiennes concurrente est une marque de pâtes secondaire [87] . Le Tribunal a déjà conclu que, même si ces marques de milieu de gamme et bas de gamme ont pu causer un certain dommage, elles n’ont qu’une présence limitée sur le marché et n’ont enregistré que peu ou pas de croissance au cours de la période visée par l’enquête.

Le Tribunal a également examiné d’autres documents versés au dossier conjointement à son évaluation des exemples de dommage causé à des clients précis. Ces éléments de preuve montrent clairement que, dans certains cas, des ventes ont été perdues à cause de l’établissement des prix des marques et des stratégies de positionnement qui n’ont pas connu le succès escompté pour diverses raisons non liées aux importations italiennes sous-évaluées ou subventionnées [88] . Il est clair également selon ces éléments de preuve et selon d’autres données dont dispose le Tribunal que, globalement, une proportion importante des pertes de ventes subies par certains producteurs n’ont pas bénéficié aux importations italiennes mais plutôt à d’autres producteurs nationaux.

Résumé

Le marché canadien des pâtes a connu une expansion au cours de la période visée par l’enquête. Cependant, cette croissance s’est surtout produite non pas dans le secteur des pâtes en paquets de 900 g qui est dominé par la production nationale, mais dans celui des pâtes en paquets de 450 g et de 500 g et, en particulier, des pâtes italiennes en paquets de 450 g et de 500 g. En outre, cette croissance des paquets de plus petits formats a surtout été celle des marques de pâtes italiennes haut de gamme bien reconnue qui, au cours de la période visée par l’enquête, ont généralement été vendues à des prix cibles de détail et de gros se situant dans le segment haut de gamme du marché. Selon les éléments de preuve, il n’y a essentiellement qu’une seule grande marque de pâtes produites au Canada qui soit concurrentielle au marché haut de gamme dans le secteur des paquets de 450 g et de 500 g. Les données dont dispose le Tribunal n’indiquent pas que cette marque est vendue à des prix cibles dommageables.

Selon les éléments de preuve, les prix de détail et de gros des pâtes en paquets de 900 g, incluant les marques de distribution, sont surtout comprimés à Toronto et à Montréal. Cependant, le Tribunal conclut que cela est principalement le résultat de la vive concurrence que se livrent les détaillants pour attirer les consommateurs et qui existe entre les producteurs nationaux pour réaliser le volume de ventes indispensables au bon fonctionnement global de leurs usines de pâtes.

Il existe une variété de pâtes de milieu de gamme et bas de gamme provenant d’Italie vendues à bas prix sur le marché canadien, notamment des marques de fabricants secondaires, des marques de distribution et des marques de distribution de détaillants. Cependant, le Tribunal estime que ces marques représentent une petite proportion du total des importations italiennes et que leur part du marché n’a enregistré que peu ou pas de croissance au cours de la période visée par l’enquête. Même si ces produits peuvent établir un prix plancher et, de ce fait, maintenir certains prix à un niveau peu élevé à certains endroits, leur présence faible et sporadique sur le marché limite le dommage qu’ils ont pu causer, à ce jour, à la branche de production nationale, de l’avis du Tribunal.

Les activités de la branche de production nationale n’ont pas, dans l’ensemble, été rentables pour la plus grande partie de la période visée par l’enquête, mais plusieurs facteurs importants, sans rapport avec la concurrence des importations italiennes, semblent expliquer cette situation. Mentionnons la montée en flèche du coût de la farine de semoule, particulièrement en 1993-1994, et l’impossibilité pour les prix de suivre le rythme de ces augmentations, en partie, en raison du régime d’établissement de prix communs qui prévoit, dans cette branche de production, que d’importants délais doivent être donnés aux principaux clients avant la mise en œuvre de toute augmentation de prix. Mentionnons également les répercussions de l’importante restructuration de la branche de production pendant la période visée par l’enquête, à partir de 1992 et au cours des trois ou quatre années précédant 1992.

Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les importations italiennes n’ont pas causé un dommage sensible à la branche de production nationale.

Menace de dommage

Ayant établi que les marchandises en question n’ont pas causé un dommage sensible à la branche de production nationale, le Tribunal aborde maintenant la question de savoir si ces marchandises menacent de causer un dommage sensible à la branche de production nationale. Le paragraphe 37.1(2) du Règlement prescrit au Tribunal les facteurs que celui-ci peut considérer pour rendre sa décision. Ces facteurs sont, entre autres : la nature de la subvention en cause et les répercussions qu’elle aura vraisemblablement sur le commerce; s’il y a eu un taux d’augmentation marquée des marchandises en question au Canada; s’il y a eu une augmentation importante des importations au Canada des marchandises en question; s’il y a une capacité disponible accessible suffisante ou une augmentation imminente et marquée de la capacité, en l’occurrence, des producteurs en Italie. En outre, le Tribunal fait remarquer que pour rendre des conclusions de menace de dommage, il doit, aux termes du paragraphe 2(1.5) de la LMSI, établir que «les circonstances dans lesquelles le dumping ou le subventionnement [des marchandises en question] est susceptible de causer un dommage [sont] nettement prévues et imminentes».

Le Tribunal fait remarquer que l’Italie a une forte capacité de production de pâtes [89] . On compte un très grand nombre de gros fabricants et d’innombrables petits fabricants dans tous les coins de ce pays. Ces fabricants, collectivement, produisent des pâtes haut de gamme aussi bien que des pâtes de milieu de gamme et bas de gamme. Une proportion importante de la production de pâtes italiennes est exportée dans le monde entier [90] . Au cours de la période visée par l’enquête du Sous-ministre, plus de 100 producteurs italiens ont expédié des pâtes au Canada. Il est clair pour le Tribunal que les exportateurs italiens peuvent accroître de façon marquée leur participation sur le marché canadien des pâtes, incluant les pâtes vendues dans les segments de milieu de gamme et bas de gamme du marché. Cependant, le Tribunal est persuadé que les éléments de preuve indiquent qu’à l’heure actuelle ce risque est plus spéculatif que «nettement prévu et imminent».

Par ailleurs, selon les conclusions rendues en 1987, les importations italiennes étaient concentrées dans le marché haut de gamme. À cette époque, on trouvait, comme aujourd’hui, une petite quantité de pâtes italiennes bas de gamme sur le marché canadien. Au cours des années qui ont suivi les conclusions de 1987, la composition de base des expéditions de pâtes italiennes vers le Canada est sensiblement demeurée la même. En d’autres termes, les pâtes italiennes destinées au marché bas de gamme n’ont pas pénétré le marché canadien en quantités importantes après les conclusions de 1987. Au contraire, les pâtes séchées italiennes ont continué à être concentrées dans certains créneaux du marché et à rapporter du succès surtout sur le marché haut de gamme. Le Tribunal ne voit aucune raison immédiate pour laquelle cela devrait changer. Cependant, si la situation devait ne pas évoluer en ce sens, la branche de production nationale pourrait recourir à des mesures commerciales.

En outre, un importateur a signalé qu’il avait eu des discussions qui lui ont fait penser qu’un grand magasin à succursales multiples avait récemment exploré, sans succès, la possibilité d’acheter une partie ou la totalité de ses pâtes d’un producteur italien. Le Tribunal est d’avis qu’aucun autre élément de preuve versé au dossier n’indique qu’un gros détaillant est sur le point de changer de source d’approvisionnement. De l’avis du Tribunal, même s’il est évident que les grandes épiceries à succursales multiples nationales ont, par leurs décisions d’achat, le pouvoir de modifier l’aspect du marché canadien des pâtes séchées, il n’est pas persuadé que des éléments de preuve indiquent que ces détaillants, dans l’ensemble, exerceront ce pouvoir imprudemment dans l’avenir, puisque ceux-ci savent fort bien qu’un manque de prudence risquerait de leur faire perdre leur source d’approvisionnement au pays.

Le Tribunal souligne que depuis l’automne 1995, les producteurs de pâtes italiennes n’ont reçu aucune subvention dans le cadre du Programme de restitutions à l’exportation (PRE), qui est la principale source de subventions à l’exportation au cours de la période visée par l’enquête. De façon générale, les versements du PRE diminuent à mesure que les cours mondiaux du blé dur augmentent et ces paiements sont nuls, aux prix actuels, et ne peuvent donc être considérés comme une cause immédiate de pression des prix sur le marché canadien.

Enfin, le Tribunal fait remarquer qu’au cours des 18 derniers mois environ, le niveau des prix des pâtes sur le marché de détail s’est sensiblement amélioré. Les éléments de preuve montrent que la branche de production a mis en œuvre des augmentations de prix en 1995 [91] , de plus de 20 p. 100 dans un cas, les prix commençant à rattraper le terrain perdu au niveau des coûts qui, en pourcentage des ventes nettes, ont en fait diminué quelque peu en 1995 comparativement à 1994 [92] . Au cours des 18 derniers mois, les importateurs ont également augmenté leurs prix [93] . Ces augmentations ne sont pas toutes dues à la mise en œuvre de droits provisoires [94] et, dans au moins un cas significatif, l’augmentation est supérieure au montant de ces droits. Bref, certaines des pressions sur les prix qui ont caractérisé ce marché dans le passé se sont affaiblies.

Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que le dumping et le subventionnement de pâtes italiennes ne menacent pas de causer un dommage sensible à la branche de production nationale.

Dumping massif

L’ACFPA a soutenu qu’en plus de rendre des conclusions de dommage ou de menace de dommage, le Tribunal doit également conclure, conformément à l’article 5 et à l’alinéa 42(1)b) de la LMSI, qu’il y a eu une importation massive des marchandises en question, et doit donc exiger que des droits soient imposés rétroactivement sur ces importations.

Les avocats de l’ACFPA ont souligné que le volume des marchandises en question a beaucoup augmenté au cours des mois de juillet à octobre 1995, comparativement aux mois correspondants de 1994. Ils ont soutenu que cela avait été fait en prévision d’une décision provisoire. Ils ont aussi fait remarquer que le volume et la part du marché des marchandises en question pour les pâtes en paquets de 450 g et de 500 g, secteur dans lequel les marchandises en question représentaient plus de 50 p. 100 du marché, ont augmenté plus rapidement que dans l’ensemble du marché. Les avocats ont affirmé que ces circonstances correspondaient à celles de l’enquête sur les Albums de photos [95] et qu’elles satisfaisaient à toutes les exigences de la disposition de la loi. Les avocats ont ajouté que les importateurs à la présente enquête auraient dû savoir que les prix qu’ils avaient obtenu pour les marchandises en question étaient sous-évalués.

Les avocats des importateurs et des exportateurs ont soutenu qu’aucun élément de preuve n’établissait que les importateurs avaient constitué des réserves de pâtes et que ces éléments révélaient qu’il n’existait aucun lien entre les restrictions imposées aux importations découlant de certaines mesures prises par la CCB en 1995 d’une part, et les activités des importateurs et des exportateurs d’autre part.

De l’avis du Tribunal, l’imposition de droits rétroactifs aux termes de l’alinéa 42(1)b) de la LMSI n’est pas justifiée dans la présente cause puisque les exigences énoncées à cet alinéa n’ont pas été satisfaites. Le Tribunal fait remarquer que, contrairement à l’enquête sur les Albums de photos, le volume et la part du marché des marchandises en question ont en réalité diminué en 1995, alors que les ventes et la part du marché de la branche de production nationale ont augmenté, calculés annuellement. Le Tribunal souligne également que, même si le volume des marchandises en question a augmenté en juillet 1995, il a beaucoup diminué en août comparativement à juillet et est ensuite demeuré assez constant au cours des deux mois suivants. Le Tribunal ne relève pas, dans ces mouvements, de courbe ascendante et, par conséquent, estime qu’il n’y a pas eu une «importation massive» ni «une série d’importations, massives dans l’ensemble», comme l’exige l’article 42 de la LMSI. En outre, le Tribunal constate que les chiffres mentionnés par l’ACFPA à cet égard proviennent de Statistique Canada et peuvent donc viser des marchandises autres que les marchandises en question (par exemple, des dîners aux macaronis). En outre, les éléments de preuve n’appuient pas la conclusion selon laquelle les importateurs canadiens des marchandises en question ont gonflé leurs stocks à la suite de l’ouverture de l’enquête par le Sous-ministre et en prévision d’une décision provisoire. Le Tribunal fait remarquer que l’une des plus fortes augmentations de stocks effectuée par un importateur n’était pas due aux mesures commerciales, mais plutôt au désir de cet importateur de profiter d’une nouvelle occasion sur le marché. Enfin, le Tribunal souligne qu’à son avis, il est peu probable qu’il conclue, dans une enquête comme la présente, à un dommage causé par une importation massive, étant donné qu’il rend des conclusions de non-dommage et d’aucune menace de dommage.

CONCLUSION

Pour les raisons susmentionnées et en application du paragraphe 43(1) de la LMSI, le Tribunal conclut que le dumping et le subventionnement des marchandises en question n’ont pas causé un dommage sensible à la branche de production nationale et ne menacent pas de causer un dommage sensible à la branche de production nationale. Le Tribunal conclut également que les exigences de l’alinéa 42(1)b) de la LMSI en matière de dumping massif n’ont pas été satisfaites.


1. L.R.C. (1985), ch. S - 15.

2. Gazette du Canada Partie I, vol. 130, n o 4, le 27 janvier 1996 à la p. 365.

3. Ibid. , n o 17, le 27 avril 1996 à la p. 1263.

4. Ibid. , n o 3, le 20 janvier 1996 à la p. 316.

5. Cette société appartient à Nabisco Enterprises IHC, Inc. et à Nabisco Holdings IHC, Inc., du Delaware. Le propriétaire ultime de l’entreprise est RJR Nabisco Holdings Corp., également du Delaware.

6. Pâtes alimentaires sèches originaires ou exportées de la Communauté économique européenne , Tribunal canadien des importations, enquête n o CIT - 5 - 86, Conclusions , le 28 janvier 1987, Exposé des motifs , le 12 février 1987.

7. Barilla Alimentare S.p.A., Colavita Ind. Al. Co. Spa, Lli de Cecco Di Filippo S.p.A., Delverde, S.R.L., F. Divella S. p .A., Pastificio Fabianelli S.p.A., La Molisana Industrie Alimentari S.p.A. et Nestlé Italiana S.p.A.

8. Aurora Importing & Distributing Ltd., Bella International Food Brokers Inc., Bertolli Canada Inc., Canadian Global Foods Corporation, Falesca Importing Ltd., Italfina Inc., Molisana Imports, Numage Trading Inc., Les produits alimentaires S a - G er Inc., Santa Maria Foods Limited, Siena Foods Ltd. et Weston Produce, Division of F & F Supermarkets Inc.

9. Barilla, Colavita, De Cecco, Delverde, Bertolli, Divella, Fabianelli, La Molisana, San Marco, Buitoni et Mastro.

10. L.C. 1994, ch. 47.

11. Couvercles, disques et bocaux destinés à la mise en conserve domestique, importés soit séparément ou conditionnés ensemble, originaires ou exportés des États - Unis d'Amérique , Conclusions , le 20 octobre 1995, Exposé des motifs , le 6 novembre 1995.

12. Le dumping au Canada du sucre raffiné originaire ou exporté des États - Unis d'Amérique, du Danemark, de la République fédérale d'Allemagne, des Pays - Bas, du Royaume - Uni et de la République de Corée, et le subventionnement du sucre raffiné originaire ou exporté de l'Union européenne , Conclusions , le 6 novembre 1995, Exposé des motifs , le 21 novembre 1995.

13. Couvercles, disques et bocaux à la p. 11; et Sucre raffiné à la p. 14.

14. Les pâtes peuvent aussi contenir d'autres ingrédients qui sont ajoutés à des fins de coloration ou de saveur, ou elles peuvent être enrichies ou fortifiées de vitamines.

15. DORS/95 - 26, Gazette du Canada Partie II, vol. 129, n o 1, le 11 janvier 1995 à la p. 80.

16. Supra , note 6. Cette cause ne traitait que du subventionnement des pâtes séchées.

17. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 9.1, dossier administratif, vol. 3 aux pp. 70 et 72; et pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48C (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17A à la p. 5.

18. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48C (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17A aux pp. 22, 24, 70, 80 - 82, 116 et 121.

19. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48C (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17A aux pp. 5, 46, 50 et 53.

20. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 9.2, dossier administratif, vol. 3 à la p. 86.

21. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48A (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17 aux pp. 6 et 22 - 23.

22. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 19.1C (protégée), dossier administratif, vol. 6.1 à la p. 24; pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 19.1E (protégée), dossier administratif, vol. 6.1 à la p. 249; et Transcription de la session publique , vol. 4, le 12 avril 1996 aux pp. 531 - 33 et 554 - 57.

23. Protected Pre - Hearing Staff Report , révisé le 1 er avril 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 7C (protégée), dossier administratif, vol. 2 à la p. 187; Transcription de la session à huis clos , vol. 1, le 9 avril 1996 aux pp. 82 - 84, et vol. 4, le 12 avril 1996 à la p. 643; et pièce du fabricant A - 18 (protégée), paragraphes 14 - 16, dossier administratif, vol. 10A.

24. Supra , note 6, Exposé des motifs à la p. 7.

25. Par exemple, pièces des importateurs D - 1, G - 1 et K - 1, dossier administratif, vol. 11; et réponses à l'annexe VIII du questionnaire à l'intention de l'importateur, pièces du Tribunal NQ - 95 - 003 - 16.1 à 16.12 (protégées), dossier administratif, vol. 6, 6A et 6B.

26. Pièce du fabricant A - 24 (protégée), dossier administratif, vol. 10A.

27. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 301 et 332 - 33.

28. Protected Pre - Hearing Staff Report , révisé le 1 er avril 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 7C (protégée), dossier administratif, vol. 2 à la p. 193.

29. Transcription de la session publique , vol. 4, le 12 avril 1996 à la p. 493.

30. Transcription de la session à huis clos , vol. 2, le 10 avril 1996 aux pp. 194 et 327.

31. Transcription de la session à huis clos , vol. 2, le 10 avril 1996 aux pp. 174 et 194.

32. Pricing and Market Characteristics , le 29 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 51, dossier administratif, vol. 1A à la p. 177.

33. Transcription de la session à huis clos , vol. 2, le 10 avril 1996 à la p. 365.

34. Pièce du fabricant A - 15, dossier administratif, vol. 9; et Transcription de la session à huis clos , vol. 2, le 10 avril 1996 à la p. 328, et vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 528.

35. L'ampleur de l'érosion est difficile à mesurer parce qu'elle dépend de plusieurs facteurs, notamment de l'intervalle entre le moment où la farine de semoule est achetée et celui où les pâtes produites avec cette farine sont vendues, de la capacité de faire diminuer les stocks évalués à des niveaux d'augmentation antérieurs au coût et de la mesure dans laquelle les achats à terme de farine de semoule peuvent servir de couverture temporaire contre les fluctuations défavorables entre le coût et le prix.

36. Pièces du fabricant A - 5, A - 11 et A - 17, dossier administratif, vol. 9.

37. Cela indique que la baisse des ventes de blé dur aux meuniers canadiens signalée par la CCB semble être attribuable à des facteurs autres qu'une réduction de la production de pâtes séchées par la branche de production nationale.

38. Le reste des pâtes séchées en paquets de 2,3 kg ou moins est vendu dans le secteur des services d'alimentation et institutionnel. Public Pre - Hearing Staff Report , révisé le 7 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 6A, dossier administratif, vol. 1A à la p. 109.2.

39. Ce tableau ne tient pas compte de la société Grisspasta qui représente bien en deça de 5 p. 100 du total des ventes nationales en 1995. Grisspasta a été incapable de fournir des données financières plus précises que celles de la marge brute.

40. Voir le tableau 4 des présents motifs.

41. Public Pre - Hearing Staff Report , le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 6, dossier administratif, vol. 1A à la p. 72.

42. L'analyse des ventes au détail par marque nominale a été effectuée en utilisant les données que les importateurs ont fournies aux annexes III et VII du questionnaire à l'intention de l'importateur, pièces du Tribunal NQ - 95 - 003 - 16.1 à 16.12 (protégées), dossier administratif, vol. 6, 6A et 6B; et Public Pre - Hearing Staff Report , le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 6, dossier administratif, vol. 1A à la p. 72.

43. Pièce du fabricant A - 2 (protégée), annexes 4 - B, 4 - C et 4 - E, dossier administratif, vol. 10.

44. Pricing and Market Characteristics , le 29 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 52 (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 83 et annexe I aux pp. 84 - 98.

45. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996, aux pp. 360 et 393, et vol. 5, le 15 avril 1996 aux pp. 643 et 648.

46. Public Pre - Hearing Staff Report , le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 6, dossier administratif, vol. 1A à la p. 73; et réponses des fabricants nationaux à l'annexe V du questionnaire à l'intention du fabricant, pièces du Tribunal NQ - 95 - 003 - 10.1 à 10.4B (protégées), dossier administratif, vol. 4, 4.1, 4A, 4B et 4C.

47. Voir, par exemple, pièce du fabricant A - 2, annexe 4 - E, dossier administratif, vol. 10.

48. Pricing and Market Characteristics , le 29 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 52 (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 83 et annexe I aux pp. 84 - 98.

49. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 10.1AB (protégée), dossier administratif, vol. 4.1B à la p. 115.

50. Public Pre - Hearing Staff Report , le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 6, dossier administratif, vol. 1A à la p. 73; et réponses des fabricants nationaux à l'annexe V du questionnaire à l'intention du fabricant, pièces du Tribunal NQ - 95 - 003 - 10.1 à 10.4B (protégées), dossier administratif, vol. 4, 4.1, 4A, 4B et 4C.

51. Pricing and Market Characteristics , le 29 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 52 (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 83 et annexe I aux pp. 84 - 98; et pièce du fabricant A - 2 (protégée), annexe 4 - E, dossier administratif, vol. 10.

52. Pièce du fabricant A - 11, dossier administratif, vol. 9; et Transcription de la session à huis clos , vol. 1, le 9 avril 1996 aux pp. 6 - 8.

53. Public Pre - Hearing Staff Report , le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 6, dossier administratif, vol. 1A à la p. 73.

54. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 19.1C (protégée), dossier administratif, vol. 6.1 aux pp. 30 et 39.

55. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 25.2 (protégée), dossier administratif, vol. 6.3 à la p. 73.

56. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 467, 576 et 580; et Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 388, et vol. 4, le 12 avril 1996 à la p. 458.

57. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 583; et Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 352 et 388.

58. Transcription de la session publique , vol. 5, le 15 avril 1996 à la p. 771.

59. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 370 et 391, et vol. 4, le 12 avril 1996 aux pp. 566 - 67; et Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 468 et 562 - 63.

60. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 598; et Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 398.

61. Transcription de la session à huis clos , vol. 6, le 16 avril 1996 aux pp. 958 - 60.

62. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 331.

63. Transcription de la session publique , vol. 4, le 12 avril 1996 aux pp. 566 - 67.

64. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 469 - 70, et vol. 4, le 12 avril 1996 à la p. 667.

65. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 598 - 99.

66. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 549 et 562.

67. Transcription de la session à huis clos , vol. 4, le 12 avril 1996 aux pp. 662 - 63 et 667.

68. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 598 - 99.

69. Transcription de la session à huis clos , vol. 6, le 16 avril 1996 aux pp. 986 - 88.

70. Pièces du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48A et 48B (protégées — exemplaires uniques), dossier administratif, vol. 17; pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48C (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17A; et pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48D (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17B.

71. Le Tribunal reconnaît que la branche de production préférerait qu'il y ait moins d'importations italiennes, comme en font foi ses démarches auprès de la Commission canadienne du blé et d'autres ministères au cours des deux dernières années.

72. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48C (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17A aux pp. 28, 59 et 82; et pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48D (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17B aux pp. 34, 84, 200, 221 et 242.

73. Protected Pre - Hearing Staff Report , révisé le 11 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 7B (protégée), dossier administratif, vol. 2 à la p. 181; et réponses au questionnaire à l'intention du fabricant, pièces du Tribunal NQ - 95 - 003 - 10.1, 10.1J, 10.1V, 10.2, 10.3 et 10.4 (protégées), dossier administratif, vol. 4, 4.1A, 4.1B, 4A, 4B et 4C.

74. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 341.

75. Pièce de l'importateur D - 3 (protégée) aux pp. 12 et 14, dossier administratif, vol. 12.

76. Pricing and Market Characteristics , le 29 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 52 (protégée), dossier administratif, vol. 2A.

77. Public Pre - Hearing Staff Report , le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 6, dossier administratif, vol. 1A à la p. 30.

78. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 377.

79. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 391.

80. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 319.

81. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 362; et Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 559.

82. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 348 - 49.

83. Pièce de l'importateur D - 22 (protégée) à la p. 1, dossier administratif, vol. 12.

84. Transcription de la session publique , vol. 3, le 11 avril 1996 à la p. 288.

85. Transcription de la session à huis clos , vol. 3, le 11 avril 1996 aux pp. 440 - 44.

86. Pièce du fabricant A - 6 (protégée), rapports d'étude sur l'espace d'étalage dans les magasins de l'agglomération torontoise et dans d'autres magasins du sud de l'Ontario à la p. 2, dossier administratif, vol. 10A.

87. Pièce du fabricant A - 6 (protégée), rapports d'étude sur l'espace d'étalage dans les magasins de l'agglomération torontoise et dans d'autres magasins du sud de l'Ontario aux pp. 5 - 11, dossier administratif, vol. 10A; pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 10.3 (protégée), dossier administratif, vol. 4B aux pp. 159 et 162; et pièce du fabricant A - 12 (protégée), dossier administratif, vol. 10A (Galati Bros.).

88. Pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 48C (protégée — exemplaire unique), dossier administratif, vol. 17A aux pp. 18, 28, 49 et 53.

89. Public Pre - Hearing Staff Report , le 4 mars 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 6, dossier administratif, vol. 1A à la p. 53.

90. Ibid .

91. Transcription de la session à huis clos , vol. 2, le 10 avril 1996 aux pp. 198 et 327.

92. Protected Pre - Hearing Staff Report , révisé le 1 er avril 1996, pièce du Tribunal NQ - 95 - 003 - 7C (protégée), dossier administratif, vol. 2 aux pp. 107, 187 et 191.

93. Transcription de la session à huis clos , vol. 4, le 12 avril 1996 aux pp. 706 et 783.

94. Transcription de la session à huis clos , vol. 4, le 12 avril 1996 à la p. 710.

95. Albums de photos à feuilles auto - adhésives (importés ensemble ou séparément) et feuilles auto - adhésives originaires ou exportés d'Indonésie, de Thaïlande et des Philippines , Tribunal canadien du commerce extérieur, enquête n o NQ - 90 - 003, Conclusions , le 2 janvier 1991, Exposé des motifs , le 17 janvier 1991.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 28 août 1996