BICYCLETTES

Questions d'intérêt public (article 45)


BICYCLETTES ASSEMBLÉES OU DÉMONTÉES, ET CADRES DE BICYCLETTES, AVEC DES ROUES D'UN DIAMÈTRE DE 16 POUCES (40,64 CM) ET PLUS, ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE TAÏWAN ET DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE
Opinion no : PB-92-001

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le mercredi 27 janvier 1993

Opinion no : PB-92-001

EU ÉGARD À une opinion du Tribunal canadien du commerce extérieur aux termes de l'article 45 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, découlant de l'enquête no NQ-92-002 menée conformément à l'article 42 de la loi précitée, et des conclusions rendues à cet égard le 11 décembre 1992, et à la suite des observations présentées dans l'intérêt public au Tribunal canadien du commerce extérieur;

CONCERNANT la question de savoir si l'imposition de droits antidumping, ou leur imposition à leur plein montant, sur des bicyclettes assemblées ou démontées, et des cadres de bicyclettes, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, originaires ou exportés de Taïwan et de la République populaire de Chine, serait ou pourrait être contraire à l'intérêt public.

O P I N I O N

Le Tribunal canadien du commerce extérieur est d'avis qu'il ne serait pas dans l'intérêt public de réduire les droits antidumping imposés à leur plein montant sur les importations au Canada des marchandises en question susmentionn 9‚es. Par conséquent, aucun rapport ne sera présenté au ministre des Finances.

Arthur B. Trudeau
_________________________
Arthur B. Trudeau
Membre présidant


Robert C. Coates, c.r.
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Robert C. Coates, c.r.
Membre


Desmond Hallissey
_________________________
Desmond Hallissey
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire

O P I N I O N

CONTEXTE

Le 11 décembre 1992, conformément aux dispositions du paragraphe 43(1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation [1] (la LMSI), le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a conclu que le dumping au Canada des bicyclettes assemblées ou démontées, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, originaires ou exportées de Taïwan et de la République populaire de Chine, à l'exclusion des bicyclettes en question dont le prix de vente est supérieur à 325 $ CAN F.A.B. Taïwan et République populaire de Chine, avait causé, causait et était susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires, et que le dumping au Canada des cadres de bicyclettes en question, originaires ou exportés des pays susmentionnés, n'avait pas causé, ne causait pas, mais était susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires.

Dans le cours des procédures qui ont mené à ces conclusions, un certain nombre de mémoires ont été présentés relativement à la question de l'intérêt public. Canadian Tire Corporation, Limited et al., un groupe formé surtout de grandes surfaces, The Canadian Association of Specialty Bicycle Importers et Action Vélo Plus Inc., un consortium d'achat représentant quelque 35 distributeurs du Québec, ont soutenu qu'il n'était pas dans l'intérêt public d'imposer à leur plein montant les droits antidumping, si le Tribunal devait conclure au préjudice. Un certain nombre d'arguments ont été invoqués à l'appui de cette thèse. On a fait valoir, par exemple, que l'industrie nationale n'avait pas une capacité de production suffisante pour répondre à la demande du marché canadien et était incapable de fournir toute la gamme de composants demandés par les consommateurs, que l'industrie n'avait pas offert de bicyclettes à un grand nombre de grandes surfaces et de distributeurs, ou avait refusé de leur en fournir, et que l'imposition à leur plein montant des droits antidumping ne ferait qu'aggraver les difficultés économiques qu'éprouvent déjà bon nombre de distributeurs à cause de la récession, de la taxe sur les produits et services et des effets des achats transfrontières, facteurs qui ont provoqué une hausse du nombre de faillites et de pertes d'emploi.

L'industrie canadienne, représentée par la Canadian Bicycle Manufacturers' Association, le Groupe Procycle Inc., Les Industries Raleigh du Canada Limitée et Victoria Precision Inc., s'est opposée à la thèse avancée par les parties susmentionnées. Selon l'industrie, il n'existe aucune considération prédominante d'intérêt public qui pourrait justifier la réduction des droits antidumping. Elle soutient qu'il est dans l'intérêt public de maintenir la production au Canada et d'accroître les perspectives d'emploi, tant au niveau des fabricants de bicyclettes au Canada qu'au niveau des industries connexes qui approvisionnent les producteurs canadiens.

Le Tribunal s'est appuyé sur les observations qui précèdent, ainsi que sur les éléments de preuve et les témoignages présentés au cours de l'enquête, pour formuler son opinion sur l'intérêt public, exposée ci-après.

CONSIDÉRATIONS D'INTÉRÊT PUBLIC

L'article 45 de la LMSI prévoit que, dans les cas où après avoir rendu des conclusions de préjudice sensible, le Tribunal estime que l'assujettissement, total ou partiel, à des droits antidumping serait ou pourrait être contraire à l'intérêt public, il doit soumettre un rapport au ministre des Finances énonçant son opinion, faits et motifs à l'appui. Le Tribunal a examiné les observations susmentionnées et est d'avis qu'il ne serait pas dans l'intérêt public de réduire les droits antidumping.

Selon les éléments de preuve dont dispose le Tribunal, le marché canadien de la bicyclette, dans le passé, a été concurrentiel sur le plan du prix, les bicyclettes canadiennes étant parmi celles qui se vendent au plus bas prix dans le monde occidental. De l'avis du Tribunal, la vive concurrence au niveau des prix qui a caractérisé le marché canadien dans le passé continuera de s'exercer après l'imposition des droits antidumping. Comme toujours, la concurrence proviendra tant de l'industrie elle-même que de nombreux fournisseurs étrangers, qui continueront de jouir d'un accès illimité au marché canadien. Il s'agit d'exportateurs de pays tels que les États-Unis, la Corée du Sud, la Malaisie, l'Indonésie, la Thaïlande et l'Inde, dont les produits, selon les éléments de preuve présentés à l'audience, ont déjà pénétré sur le marché canadien ou sont sur le point de le faire. Cette concurrence provenant de l'industrie nationale et de l'étranger garantira aux grandes surfaces, aux distributeurs et, en fin de compte, aux utilisateurs de bicyclettes au Canada l'accès à une vaste sélection de modèles de bicyclettes à des prix abordables.

D'après les éléments de preuve, le Tribunal est convaincu que les bicyclettes fabriquées au Canada sont de haute qualité. Qui plus est, une vaste gamme de composants provenant de grands fournisseurs internationaux entrent dans la fabrication de ces bicyclettes. Les éléments de preuve révèlent également que l'industrie nationale a une capacité de production suffisante pour servir une part importante du marché canadien de la bicyclette. Dans les cas où les fournisseurs canadiens ne peuvent pas répondre à la demande, il existe, comme il a été mentionné précédemment, d'autres fournisseurs qui ne sont pas assujettis aux mesures antidumping. De fait, malgré les conclusions rendues par le Tribunal, il est probable que les exportateurs des pays en question, notamment ceux de Taïwan, continueront de répondre à une partie de cette demande, vu les marges de dumping relativement faibles, parfois inférieures à 10 p. 100, qui leur sont imposées. Il faut dire que, à l'appui de ce point de vue, les éléments de preuve produits au cours de l'audience semblent indiquer que certains des exportateurs en question pourraient se permettre de payer les droits antidumping et continuer quand même de toucher des marges bénéficiaires suffisantes pour pouvoir maintenir leur présence sur le marché canadien.

Enfin, le Tribunal fait remarquer que les importations des bicyclettes en question, dont le prix de vente est supérieur à 325 $ CAN F.A.B. Taïwan et République populaire de Chine, ne sont pas visées par les conclusions parce qu'elles ne causent pas de préjudice à la production canadienne. Cette exclusion touche le segment de haut de gamme du marché de la bicyclette, segment vers lequel est destinée une part importante des produits de bon nombre de distributeurs de bicyclettes spécialisés au Canada. En conséquence, bien que l'exclusion n'ait pas été fondée sur ce motif, elle contribuera néanmoins à protéger de nombreux distributeurs, soit totalement soit en partie, contre l'impact maximal des conclusions.


1. L.R.C. (1985), ch. S-15.


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Publication initiale : le 12 août 1997