FILS MACHINE DE CUIVRE

Enquêtes préliminaires de dommage (paragraphe 34(2))


FILS MACHINE DE CUIVRE
Enquête préliminaire de dommage no PI-2006-002

Décision rendue
le lundi 30 octobre 2006

Motifs rendus
le mardi 14 novembre 2006


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une enquête préliminaire de dommage aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation concernant :

LE DUMPING DE FILS MACHINE DE CUIVRE ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DU BRÉSIL ET DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE ET LE SUBVENTIONNEMENT DE FILS MACHINE DE CUIVRE ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DU BRÉSIL

DÉCISION PROVISOIRE DE DOMMAGE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, a procédé à une enquête préliminaire de dommage afin de déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping de fils machine de cuivre d’un diamètre d’au moins 6 mm mais n’excédant pas 11 mm, fabriqués de sorte à répondre au marquage B 49 de la American Society for Testing and Materials (ASTM) ou son équivalent, originaires ou exportés du Brésil et de la Fédération de Russie et le subventionnement de fils machine de cuivre d’un diamètre d’au moins 6 mm mais n’excédant pas 11 mm, fabriqués de sorte à répondre au marquage ASTM B 49 ou son équivalent, originaires ou exportés du Brésil ont causé un dommage ou un retard ou menacent de causer un dommage.

La présente enquête préliminaire de dommage fait suite à l’avis en date du 30 août 2006, annonçant que le président de l’Agence des services frontaliers du Canada avait ouvert une enquête concernant les présumés dumping et subventionnement dommageables des marchandises susmentionnées.

Aux termes du paragraphe 37.1(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine par la présente que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises susmentionnées ont causé un dommage.

Elaine Feldman
Elaine Feldman
Membre présidant

James A. Ogilvy
James A. Ogilvy
Membre

Meriel V. M. Bradford
Meriel V. M. Bradford
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

L’exposé des motifs sera publié d’ici 15 jours.

Membres du Tribunal :

Elaine Feldman, membre présidant

 

James A. Ogilvy, membre

 

Meriel V. M. Bradford, membre

   

Directeur de la recherche :

Réal Roy

   

Agent principal de la recherche :

Joël Joyal

   

Agents de la recherche :

Sheena France

 

Rhonda Heintzman

   

Préposé à la recherche statistique :

Lise Lacombe

   

Conseillers juridiques pour le Tribunal :

Eric Wildhaber

 

Nick Covelli

   

Greffier adjoint :

Marija Renic

   

Agent du greffe :

Virginie Désilets

PARTICIPANTS :

 

Conseillers/représentants

   

Nexans Canada Inc.

Cliff Sosnow
Ken Purchase
Greg Kanargelidis
Roy Millen
Elysia Van Zeyl

   

Prysmian Power Cables and Systems Canada, Ltd.
Prysmian Power Cables and Systems USA, LLC

Greg Tereposky
Georges Bujold

   

Mitsubishi International Corporation

John W. Boscariol
Brenda C. Swick

   

Caraíba Metais S.A.

Victoria Bazan
Philippe M. Bruno
Rosa S. Jeong

   

Ambassade du Brésil

Norberto Moretti
Pedro Murilo Ortega Terra

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le 30 août 2006, le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a ouvert une enquête sur le présumé dumping dommageable de fils machine de cuivre d’un diamètre d’au moins 6 mm mais n’excédant pas 11 mm, fabriqués de sorte à répondre au marquage B 49 de la American Society for Testing and Materials (ASTM) ou son équivalent, originaires ou exportés du Brésil et de la Fédération de Russie (Russie) et le présumé subventionnement dommageable de fils machine de cuivre d’un diamètre d’au moins 6 mm mais n’excédant pas 11 mm, fabriqués de sorte à répondre au marquage ASTM B 49 ou son équivalent, originaires ou exportés du Brésil (les marchandises en question) à la suite d’une plainte déposée le 10 juillet 2006 par Nexans Canada Inc. (Nexans).

2. Le 31 août 20061 , le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a publié un avis d’ouverture d’enquête préliminaire de dommage.

3. Le 30 octobre 2006, aux termes du paragraphe 37.1(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation 2 , le Tribunal a déterminé que les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question avaient causé un dommage.

DÉCISION DE L’ASFC

4. L’ASFC a estimé des marges de dumping pour la période allant du 1er janvier 2005 au 30 juin 2006. Exprimées en pourcentage du prix à l’exportation, ces marges étaient de 6,0 p. 100 pour le Brésil et de 3,2 p. 100 pour la Russie3 . L’analyse de l’ASFC indiquait que le volume estimatif des marchandises sous-évaluées en provenance de chacun des pays visés n’était pas négligeable et que la marge moyenne pondérée estimative globale de dumping pour chaque pays visé n’était pas minimale4 .

5. L’ASFC a accepté l’estimation faite par Nexans quant au niveau de subventionnement du Brésil à l’exportateur, qui s’élevait à au moins 14 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises en question en 2003, à 8 p. 100 en 2004 et à 5 p. 100 en 2005, excluant certains programmes que Nexans n’avait pas pu évaluer5 . L’ASFC a également pris en considération le fait que tous les présumés programmes sont toujours disponibles en 2006 et, par conséquent, elle a estimé le subventionnement à un minimum de 5 p. 1006 pour la période allant du 1er janvier 2005 au 30 juin 2006. L’analyse de l’ASFC indiquait que le volume estimatif des marchandises subventionnées originaires du Brésil n’était pas négligeable et que les montants estimatifs des subventions du Brésil n’étaient pas minimaux7 .

6. En résumé, l’ASFC était d’avis que, selon les éléments de preuve, les marchandises en question avaient été sous-évaluées et subventionnées. De plus, elle a déclaré que des éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement avaient causé et menaçaient de causer un dommage à la branche de production nationale.

EXPOSÉS 8

Branche de production nationale

7. Dans sa plainte, Nexans a prétendu que les marchandises sous-évaluées et subventionnées avaient causé et menaçaient de causer un dommage à la branche de production nationale. Elle a allégué que le dommage se manifestait sous forme de perte importante de part de marché, de pertes de ventes à son client le plus important, de tendances de prix à la baisse et de profits réduits. À l’appui de ses allégations, Nexans a fourni à titre d’éléments de preuve un compte perdu, des pertes de revenus sur ses ventes nationales, une part de marché à la baisse et une rentabilité réduite sur ses ventes canadiennes de fils machine de cuivre.

Parties s’opposant à la plainte

8. Trois parties s’opposant à la plainte ont déposé des exposés auprès du Tribunal : Prysmian Power Cables and Systems Canada, Ltd. et Prysmian Power Cables and Systems USA, LLC (Prysmian)9 , Mitsubishi International Corporation (Mitsubishi) et l’Ambassade du Brésil (au nom du gouvernement du Brésil).

9. De façon générale, les parties s’opposant à la plainte ont soutenu que la plainte de Nexans était complètement sans fondement à deux chefs : 1) elle ne traite pas du caractère sensible du dommage en relation à la production de marchandises similaires de la branche de production nationale dans son ensemble; 2) elle n’établit pas de relation de cause à effet entre le dumping et le subventionnement présumés et le dommage présumé.

10. Les exposés portaient également sur : 1) la production, les exportations, les transferts internes, la capacité et le taux d’utilisation de Nexans; 2) les programmes présumés de prêts et de subventionnement du Brésil; 3) le taux de change entre le Canada et les États-Unis.

ANALYSE

Contexte législatif

11. Le mandat du Tribunal à l’étape préliminaire d’une enquête de dommage est énoncé au paragraphe 34(2) de la LMSI, lequel prévoit que le Tribunal doit déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage ou un retard ou menacent de causer un dommage. En rendant sa décision, le Tribunal a tenu compte des facteurs énoncés à l’article 37.1 du Règlement sur les mesures spéciales d’importation 10 .

12. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit « dommage » comme le « dommage sensible causé à une branche de production nationale » et « retard » comme le « retard sensible de la mise en production d’une branche de production nationale ». Il définit en outre « branche de production nationale » comme l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. Peut toutefois en être exclu le producteur national qui est lié à un exportateur ou à un importateur de marchandises sous-évaluées ou subventionnées, ou qui est lui-même un importateur de telles marchandises. Par conséquent, le Tribunal doit déterminer quelles sont les marchandises similaires et quelle est la composition de la branche de production nationale qui produit ces marchandises avant de traiter des questions de dommage, de retard ou de menace de dommage.

Marchandises similaires

13. Le Tribunal constate que, en ouvrant son enquête, l’ASFC a défini les marchandises en question comme étant des fils machine de cuivre d’un diamètre d’au moins 6 mm mais n’excédant pas 11 mm fabriqués de sorte à répondre au marquage ASTM B 49 ou son équivalent.

14. Pour décider de la question des marchandises similaires, le Tribunal tient compte d’un certain nombre de facteurs, y compris les caractéristiques physiques des marchandises (telles que la composition et l’apparence), leurs caractéristiques de marché (comme leur substituabilité, les prix et la distribution) et la question de savoir si les marchandises nationales répondent aux mêmes besoins des clients que les marchandises importées.

15. Nexans a soutenu que les marchandises en question et les marchandises fabriquées par la branche de production nationale sont essentiellement identiques, étant donné qu’elles sont semblables dans leur apparence et dans leur fonction, qu’elles sont de qualité égale11 et qu’elles sont en concurrence directe les unes avec les autres sur le marché canadien. Le Tribunal constate que ces exposés n’ont pas été réfutés par les parties s’opposant à la plainte.

16. Compte tenu des éléments de preuve au dossier, le Tribunal conclut que le fil machine de cuivre fabriqué au Canada qui correspond à la même description que les marchandises en question est une marchandise similaire parce qu’il ressemble de près aux marchandises en question en termes de ses caractéristiques physiques, de ses caractéristiques de marché et de ses utilisations finales.

Branche de production nationale

17. Il n’y a que deux fabricants de fils machine de cuivre au Canada, soit Nexans et Southwire Canada Company (Southwire). Selon les renseignements au dossier, Southwire ne fabrique du fil machine de cuivre que pour transformation ultérieure à l’interne. Southwire ne vend de fils machine de cuivre ni sur le marché national ni sur le marché d’exportation. Nexans fabrique du fil machine de cuivre pour le marché marchand canadien, pour transformation ultérieure à l’interne12 et pour le marché d’exportation. La production annuelle totale de fils machine de cuivre par les deux producteurs était d’environ 275 000 tonnes en 2004 et 200513 .

18. Le Tribunal constate que, dans sa décision d’ouvrir une enquête, ni l’ASFC ni Nexans n’ont contacté Southwire. De plus, Southwire n’a pas pris position à propos de la présente plainte.

19. Compte tenu des éléments de preuve au dossier, le Tribunal conclut que la production de marchandises similaires par Nexans représente une production suffisante de marchandises similaires pour constituer une proportion majeure de la production nationale totale de marchandises similaires14 .

Effets cumulatifs

20. L’article 42 de la LMSI prévoit notamment que, lorsqu’il procède à une enquête définitive de dommage, le Tribunal doit évaluer les effets cumulatifs du dumping ou du subventionnement des marchandises importées au Canada s’il est convaincu que certaines conditions ont été remplies. Comme il l’a énoncé dans Tôles d’acier résistant à la corrosion 15 , bien que le paragraphe 42(3) de la LMSI traite d’enquêtes définitives de dommage et ne traite pas explicitement d’enquêtes préliminaires de dommage, le Tribunal est d’avis qu’il serait illogique de ne pas évaluer les effets cumulatifs des importations des marchandises en question à cette étape, lorsque le cumul semble indiqué en raison des éléments de preuve présentés.

21. En ce qui concerne les conditions de la concurrence au moment d’examiner la question du cumul, le Tribunal est convaincu que, en se fondant sur les éléments de preuve au dossier de la présente enquête préliminaire de dommage, les marchandises en question sont en concurrence les unes avec les autres et avec les marchandises similaires. Par conséquent, le Tribunal a procédé à une analyse de dommage sur la base d’une évaluation cumulative de l’impact des importations des marchandises en question.

Volume des marchandises sous-évaluées et subventionnées

22. Nexans a prétendu que, depuis 2004, la pénétration importante des importations sous-évaluées et subventionnées provenant du Brésil et de la Russie a déplacé de plus en plus ses ventes canadiennes. Avant 2004, les seules importations de fils machine de cuivre au Canada provenaient des États-Unis, et les volumes d’importation étaient minimes16 .

23. Le Tribunal constate que les données disponibles à cette étape montrent que, de 2003 à 2005, les importations en provenance des pays visés ont augmenté en volume et en pourcentage des parts des importations canadiennes totales. En ce qui concerne les six premiers mois de 2006, le Tribunal ne dispose pas de renseignements suffisants à cette étape pour déterminer si les importations provenant des pays visés sont à la baisse lorsqu’on les considère sur une base annuelle17 .

24. De 2003 à 2005, le Tribunal constate que, par rapport à la production de marchandises similaires par les producteurs nationaux, l’augmentation du volume des marchandises sous-évaluées et subventionnées est significative18 . Il constate également que, pendant la même période, le marché marchand au Canada, exprimé en relation à la production canadienne totale, n’est pas sans importance19 .

Effet sur le prix des marchandises similaires

25. Nexans a allégué que ses prix pour le fil machine de cuivre avaient été dégonflés car elle avait été obligée de les réduire en conséquence directe des offres de marchandises en question sur le marché canadien. À l’appui de ses allégations, Nexans a fourni des exemples d’effritement des prix de ses ventes à Prysmian, qui est son client canadien le plus important.

26. Nexans a soutenu que, du fait de la pénétration du marché canadien par le fil machine de cuivre brésilien en 2004, elle avait subi une réduction des prix de son fil machine de cuivre. Nexans a soutenu que, même quand elle avait réduit son prix, Prysmian avait réduit son tonnage d’achats en 2004. En 2005, avec l’arrivée du fil machine de cuivre russe qui est venu s’ajouter au fil machine de cuivre brésilien sur le marché canadien, Prysmian a cessé de s’approvisionner auprès de Nexans. En 2006, Nexans a obtenu quelques contrats de Prysmian, mais à un prix de vente unitaire réduit par rapport à son offre de prix en vigueur sur le marché canadien20 . Le Tribunal constate que cette allégation n’a pas été contestée par les parties s’opposant à la plainte.

27. La structure du prix du fil machine de cuivre comprend plusieurs composantes dictées par le marché. Les éléments typiques de la structure du prix du fil machine de cuivre comprennent : 1) le prix du cuivre affiné; 2) la prime sur la cathode; 3) la prime sur le fil machine. Le prix offert par Nexans pour le fil machine de cuivre fait typiquement référence à un montant d’« additionneurs pour fils machine » plus le prix du cuivre affiné; l’« additionneur pour fils machine » comprend à la fois la prime sur la cathode et la prime sur le fil machine21 .

28. Le prix du cuivre affiné est publié par le London Metal Exchange (LME) et le New York Commodity Exchange (COMEX).

29. La prime sur la cathode, également publiée par le LME et COMEX, comprend le coût de transformation du cuivre affiné en forme cathodique, le transport au client et les bénéfices du fabricant de cathodes.

30. La prime sur le fil machine comprend le coût de transformation de la cathode de cuivre en forme de fil machine, le transport au client et les bénéfices au fabricant de fils machine.

31. Nexans a soutenu que le fil machine de cuivre est un produit à basse valeur ajoutée22 . De plus, elle a indiqué que plus de 95 p. 100 du coût du fil machine de cuivre est composé du prix du cuivre affiné qui est un produit de base négocié sur les marchés mondiaux, plus la prime sur la cathode23 . Étant donné que le prix du cuivre affiné et la prime à la cathode sont établis au niveau international, la structure du prix ne varie généralement que pour la prime sur le fil machine, quoiqu’il soit possible pour les producteurs intégrés d’avoir une prime sur la cathode moins élevée.

32. La concurrence de Nexans ne survient qu’au niveau de la prime sur le fil machine, et son profit provient uniquement de cette composante. Étant donné que cet élément est relativement petit par rapport au prix total du fil machine de cuivre (c.-à-d. en raison du prix du cuivre affiné et de la prime sur la cathode), une grande différence dans la prime sur le fil machine n’entraîne qu’une petite différence dans le prix total du fil machine de cuivre. Par conséquent, le Tribunal est d’avis que même une marge de dumping et de subventionnement relativement faible peut avoir un impact important, étant donné que les autres composantes du prix du fil machine de cuivre sont des valeurs publiées.

33. Compte tenu des renseignements au dossier, il semble que Nexans ait subi des baisses du prix de vente unitaire à cause des importations provenant des pays visés.

Impact sur la branche de production nationale

34. En ce qui concerne l’impact des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur l’état de la branche de production nationale, Nexans a allégué qu’elle avait perdu une part importante du marché marchand canadien. En particulier, Nexans a prétendu que le volume des ventes nationales qu’elle avait perdues correspond de près au volume des importations des marchandises en question. De plus, Nexans a allégué que la pression des prix des importations sous-évaluées et subventionnées avait un impact direct sur ses résultats financiers, étant donné qu’elle avait subi une perte de rentabilité substantielle à son laminoir à fil machine24 .

35. Selon les éléments de preuve au dossier, le volume des ventes nationales de Nexans destinées au marché marchand et sa part du marché correspondante ont diminué de 2003 à 200525 . Par contre, les ventes des marchandises en question en termes de volume et de part de marché ont augmenté pendant la même période26 . Le Tribunal constate que ces chiffres semblent indiquer que les marchandises en question ont remplacé les ventes perdues par Nexans.

36. Mitsubishi a allégué que Nexans n’avait pas subi de dommage parce que sa production avait augmenté de 17 p. 100 entre 2003 et 2005 et qu’elle fonctionnait à pleine capacité ou presque27 . De plus, Prysmian a prétendu qu’il n’y avait pas de dommage parce que Nexans avait compensé ses pertes sur le marché marchand national en exportant de plus grandes quantités de fil machine de cuivre. Nexans a déclaré qu’elle avait augmenté sa production pour le marché d’exportation par suite des ventes qu’elle avait perdues sur le marché national.

37. Prysmian et Mitsubishi ont toutes deux allégué que tout dommage aux ventes de Nexans sur le marché marchand serait sans importance par rapport à sa production globale de marchandises similaires, y compris la transformation ultérieure à l’interne et les ventes de fil machine de cuivre à l’exportation. Nexans a indiqué que ce qui compte, c’est le dommage à la production nationale pour la consommation au pays et que le dommage à une branche de production nationale n’est pas annulé par ses ventes à l’exportation. Nexans a soutenu qu’en 2003 elle avait alimenté 95 p. 100 du marché marchand canadien, tandis qu’en 2005 elle n’avait alimenté que 43 p. 10028 de ce marché à cause de l’augmentation importante des importations des marchandises en question.

38. Selon le Tribunal, les éléments de preuve au dossier indiquent, de façon raisonnable, que l’effritement des prix subi par la branche de production nationale a été causé par une présence significative et croissante de marchandises en question à bas prix sur le marché canadien. L’effet de ces prix a résulté en une perte des revenus des ventes de la branche de production nationale. Dans l’ensemble, il y a eu une dégradation déclarée du rendement financier de la branche de production nationale.

39. Le Tribunal reconnaît que les transferts internes et les ventes à l’exportation de Nexans ont contribué positivement au bénéfice net de la compagnie. Cependant, selon le Tribunal, dans Feuillards et tôles plats en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud 29 , aux fins de l’évaluation du dommage causé à la branche de production nationale, un bon rendement dans une partie de la production nationale ne doit pas être invoqué comme une raison de ne pas tenir compte du dommage causé à une autre partie de cette production. Le Tribunal n’admet pas la notion que la détermination d’un dommage est une somme algébrique, où les plus et les moins aux profits et aux pertes dans différentes parties de la production s’annuleraient entre eux. Le Tribunal a souligné qu’il est tout à fait possible qu’une branche de production obtienne un bon rendement sur une certaine partie et, pourtant, subisse tout de même un dommage sous une autre partie, au détriment de la branche de production considérée dans son ensemble.

40. Par conséquent, le Tribunal est d’avis que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage sensible à Nexans.

Autres facteurs

41. Les parties s’opposant à la plainte ont prétendu que le dommage subi par la branche de production nationale avait été causé par plusieurs facteurs non reliés au dumping et au subventionnement. Ceux-ci comprennent les effets de la dépréciation du dollar des États-Unis par rapport au dollar canadien; l’impact de l’appréciation du dollar canadien étant donné les taux très bas de sous-évaluation et de subventionnement; le fait que Nexans avait ciblé le marché des États-Unis; l’augmentation des importations en provenance des États-Unis; le fait que Nexans est en concurrence directe avec ses propres clients.

42. Le Tribunal a pris ces facteurs en considération mais, à ce stade, étant donné le peu d’éléments de preuve au dossier, il est difficile d’évaluer l’impact qu’ils ont eu sur la branche de production nationale. Par conséquent, le Tribunal conclut que ces questions seront résolues, de la meilleure façon, quand l’affaire fera l’objet d’une enquête aux termes de l’article 42 de la LMSI.

CONCLUSION

43. Compte tenu des renseignements au dossier, le Tribunal est d’avis que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé des pertes de vente, un effritement des prix importants et une détérioration du rendement financier de la branche de production nationale qui en résulte.


1 . Gaz. C. 2006.I.2587.

2 . L.R.C. 1985, c. S-15 [LMSI].

3 . Dossier administratif, vol. 1B à la p. 230.

4 . Dossier administratif, vol. 1B à la p. 231.

5 . Dossier administratif, vol. 1B à la p. 235.

6 . Dossier administratif, vol. 1B à la p. 235.

7 . Dossier administratif, vol. 1B à la p. 236. Puisque l’ASFC a considéré le Brésil comme un pays en développement, les seuils retenus pour déterminer si un volume de marchandise subventionné est négligeable et un montant de subvention est minimal étaient de 4 p. 100 et de 2 p. 100 respectivement.

8 . Cette partie du texte a pour objet de décrire diverses observations clés soumises par les parties et ne prétend pas être exhaustive.

9 . Vers la fin de l’année 2004, Pirelli Cables & Systems est devenue Prysmian. Dans le reste du présent document, il ne sera fait référence qu’à Prysmian.

10 . D.O.R.S./84-927.

11 . Dossier administratif, vol. 1 aux pp. 16-18.

12 . Nexans utilise le terme « Canada inter-company ».

13 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 21; dossier administratif, vol. 2 (protégé) à la p. 18.

14 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 21.

15 . (2 février 2001), PI-2000-005 (TCCE) à la p. 5.

16 . Dossier administratif, vol. 1B à la p. 227.

17 . Dossier administratif, vol. 1B à la p. 227; dossier administratif, vol. 2 (protégé) aux pp. 133, 385-395.

18 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 21; dossier administratif, vol. 2 (protégé) aux pp. 133, 385-395.

19 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 21; dossier administratif, vol. 2 (protégé) à la p. 18.

20 . Dossier administratif, vol. 1 aux pp. 40, 41; dossier administratif, vol. 2 (protégé) aux pp. 37, 38, 105.

21 . Dossier administratif, vol. 1 aux pp. 18, 19.

22 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 19.

23 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 28.

24 . Dossier administratif, vol. 2 (protégé) aux pp. 39, 112, 113.

25 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 39; dossier administratif, vol. 2 (protégé) aux pp. 36, 39, 136.

26 . Dossier administratif, vol. 2 (protégé) aux pp. 133, 136.

27 . Dossier administratif, vol. 3, exposé de Mitsubishi, para. 11.

28 . L’ASFC a ajusté les chiffres de Nexans en se fondant sur les données des importations à partir de la documentation des douanes et a conclu que Nexans avait, en fait, alimenté la moitié du marché marchand canadien en 2005. Dossier administratif, vol. 1 à la p. 39; dossier administratif, volume 1B, à la p. 227.

29 . (17 août 2001), NQ-2001-001 (TCCE) à la p. 15.