CAILLEBOTIS EN ACIER

Enquêtes préliminaires de dommage (paragraphe 34(2))


CAILLEBOTIS EN ACIER
Enquête préliminaire de dommage no PI-2010-001

Décision rendue
le vendredi 19 novembre 2010

Motifs rendus
le lundi 6 décembre 2010


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À une enquête préliminaire de dommage, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, concernant des :

CAILLEBOTIS EN ACIER ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE

DÉCISION PROVISOIRE DE DOMMAGE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, a procédé à une enquête préliminaire de dommage afin de déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement de caillebotis en acier au carbone, en alliage d’acier ou en acier inoxydable, composés de lames porteuses et de traverses, de type standard ou extra-fort, sous forme de panneaux, qu’ils soient galvanisés, peints, enduits, recouverts ou plaqués, originaires ou exportés de la République populaire de Chine, ont causé un dommage ou un retard ou menacent de causer un dommage.

La présente enquête préliminaire de dommage fait suite à l’avis en date du 20 septembre 2010, selon lequel le président de l’Agence des services frontaliers du Canada avait ouvert des enquêtes concernant les présumés dumping et subventionnement dommageables des marchandises susmentionnées.

Aux termes du paragraphe 37.1(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine par la présente que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises susmentionnées ont causé un dommage.

Stephen A. Leach
Stephen A. Leach
Membre présidant

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

L’exposé des motifs sera publié d’ici 15 jours.

Membres du Tribunal : Stephen A. Leach, membre présidant
Serge Fréchette, membre
Jason W. Downey, membre

Directeur de la recherche : Matthew Sreter

Agent principal de la recherche : Josée St-Amand

Agent à la recherche statistique : Marie-Josée Monette

Conseiller juridique pour le Tribunal : Nick Covelli

Gestionnaire, Bureau du greffe : Michel Parent

Agent du greffe : Julie Lescom

PARTICIPANTS :

Conseillers/représentants
Fisher & Ludlow Ltd. Lawrence L. Herman
Accurate Screen Ltd. Murray McDonald

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le 20 septembre 2010, à la suite d’une plainte déposée le 3 août 2010 par Fisher & Ludlow Ltd. (Fisher & Ludlow), le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) ouvrait des enquêtes sur les présumés dumping et subventionnement dommageables des caillebotis en acier au carbone, en alliage d’acier ou en acier inoxydable, composés de lames porteuses et de traverses, de type standard ou extra-fort, sous forme de panneaux, qu’ils soient galvanisés, peints, enduits, recouverts ou plaqués, originaires ou exportés de la République populaire de Chine (Chine) (les marchandises en question)1.

2. Le 21 septembre 2010, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) publiait un avis d’ouverture d’enquête préliminaire de dommage.

3. Borden Metal Products (Canada) Ltd. (Borden Metal) appuie la plainte.

4. Accurate Screen Ltd. (Accurate Screen), un importateur des marchandises en question, une partie à l’enquête préliminaire de dommage, n’a pas déposé d’observations auprès du Tribunal.

5. Le 19 novembre 2010, le Tribunal déterminait, aux termes du paragraphe 37.1(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation2, que les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question avaient causé un dommage.

DÉCISION DE L’ASFC D’OUVRIR DES ENQUÊTES

6. Conformément au paragraphe 31(1) de la LMSI, l’ASFC était d’avis qu’il y avait des éléments de preuve qui indiquaient que les marchandises en question avaient été sous-évaluées et subventionnées, ainsi que des éléments de preuve qui indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement avaient causé un dommage ou menaçaient de causer un dommage. Par conséquent, l’ASFC ouvrait des enquêtes le 20 septembre 2010.

7. Pour arriver à sa décision d’ouvrir des enquêtes sur le dumping et le subventionnement, l’ASFC a tenu compte de renseignements concernant le volume des marchandises sous-évaluées et subventionnées pour la période allant du 1er janvier 2009 au 30 juin 2010. Elle estimait que les importations provenant de la Chine représentaient 18 p. 100 de toutes les importations de caillebotis en acier au Canada pendant cette période.

8. L’ASFC estimait que 76 p. 100, en volume, des marchandises en question avaient été sous-évaluées selon une marge moyenne pondérée estimative globale de dumping de 21 p. 100, exprimée en pourcentage du prix à l’exportation3.

9. En ce qui concerne l’enquête sur le subventionnement, l’ASFC était d’avis que 74 p. 100 des marchandises en question avaient été subventionnées selon un montant moyen pondéré estimatif équivalant à 16 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises en question4.

10. De plus, l’ASFC était d’avis que la marge moyenne pondérée estimative globale de dumping et le montant de subvention n’étaient pas minimes et que les volumes estimatifs de marchandises sous-évaluées et subventionnées n’étaient pas négligeables5.

OBSERVATIONS SUR LA QUESTION DE DOMMAGE

Partie plaignante

11. Fisher & Ludlow soutient que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage. Pour appuyer ses allégations, elle a déposé des éléments de preuve sur l’augmentation des volumes des marchandises en question, la sous-cotation, la baisse des prix, la compression des prix, la perte de ventes, la diminution de revenus, la chute des marges brutes, la diminution des profits, la sous-utilisation et la chute du taux d’utilisation de la capacité, et la perte de la part de marché résultant du dumping et du subventionnement des marchandises en question.

12. Fisher & Ludlow soutient également que le dumping et le subventionnement des marchandises en question menace de causer un dommage. À cet égard, elle renvoie à l’imposition par les États-Unis de droits antidumping et de droits compensateurs sur les caillebotis en acier provenant de la Chine et au détournement probable des marchandises en question vers le marché canadien. Selon Fisher & Ludlow, la menace est davantage exacerbée par l’ouverture récente d’un nouvel entrepôt d’Accurate Screen en Ontario. Fisher & Ludlow soutient que lorsque l’on compare la très grande capacité de production de la Chine à la taille estimée du marché canadien, on constate que la capacité disponible accessible est suffisante pour inonder le marché canadien de marchandises sous-évaluées et subventionnées.

Partie opposée à la plainte

13. Aucune partie opposée à la plainte n’a déposé d’observations.

ANALYSE

Cadre législatif

14. Le mandat du Tribunal dans une enquête préliminaire de dommage, énoncé au paragraphe 34(2) de la LMSI, exige que le Tribunal détermine si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage6. Pour arriver à sa décision, le Tribunal tient compte des facteurs prescrits à l’article 37.1 du Règlement sur les mesures spéciales d’importation7.

15. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit « dommage » comme « [l]e dommage sensible causé à une branche de production nationale ». Il définit également le terme « branche de production nationale » comme suit : « [...] l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. » Par conséquent, le Tribunal doit déterminer quelles sont les marchandises similaires et quelle est la branche de production nationale qui les produit avant d’examiner les allégations de dommage ou de menace de dommage.

Marchandises similaires et catégories de marchandises

16. L’ASFC a défini les marchandises en question comme étant des caillebotis en acier ayant certaines caractéristiques, originaires ou exportés de la Chine, et le Tribunal doit mener son enquête préliminaire de dommage en fonction de cette description de produit.

17. Toutefois, lorsqu’il détermine si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage aux producteurs nationaux de marchandises similaires, le Tribunal peut déterminer si les marchandises en question constituent une ou plusieurs catégories de marchandises et doit définir la portée des marchandises similaires produites au pays par rapport à celle des marchandises en question.

18. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » par rapport à toutes les autres marchandises de la façon suivante :

a) marchandises identiques aux marchandises en cause;

b) à défaut, marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

19. Fisher & Ludlow soutient que les marchandises en question constituent une catégorie de marchandises et que les caillebotis en acier produits au pays sont des marchandises similaires par rapport aux marchandises en question.

20. Sur la question des « marchandises similaires » et des « catégories de marchandises », l’ASFC déclarait ce qui suit dans son exposé des motifs :

[29] Certains caillebotis en acier fabriqués par la branche de production nationale sont en concurrence directe avec les marchandises en cause importées de la Chine et ont les mêmes utilisations ultimes. Certains caillebotis en acier produits au Canada et en Chine sont entièrement interchangeables. Par conséquent, l’ASFC a conclu que certains caillebotis en acier produits par la branche de production nationale constituent des marchandises similaires aux marchandises en cause.

[30] Les marchandises en cause et les marchandises similaires ne peuvent être décomposées en catégories. Elles sont faites des mêmes matières d’intrant : l’acier au carbone, l’alliage d’acier ou l’acier inoxydable. Bien que certains caillebotis en acier puissent être produits au moyen de processus de fabrication différents (soudure, pressage hydraulique ou rivetage), ils sont tout à fait interchangeables. Qu’il s’agisse de marchandises en cause ou de marchandises similaires, lorsqu’ils sont vendus, certains caillebotis en acier le sont par les mêmes réseaux de distribution aux mêmes types de clients et, dans de nombreux cas, aux mêmes clients. Toutes les marchandises en cause et les marchandises similaires forment une seule et même catégorie de marchandises.

21. Pour trancher les questions de marchandises similaires et de catégories de marchandises, le Tribunal tient habituellement compte d’un certain nombre de facteurs, dont les caractéristiques physiques des marchandises (comme leur composition et leur apparence) et leurs caractéristiques de marché (comme la substituabilité, les prix, les circuits de distribution, les utilisations finales et la question de savoir si elles répondent aux mêmes besoins des clients)8.

22. Sur la foi des éléments de preuve au dossier concernant ces facteurs, et considérant qu’il n’a pas reçu d’éléments de preuve ni d’observations les contredisant, le Tribunal estime raisonnable de conclure, aux fins de son enquête préliminaire de dommage, que les marchandises en question constituent une seule catégorie de marchandises et que les caillebotis en acier produits au pays constituent des marchandises similaires par rapport aux marchandises en question.

Branche de production nationale

23. Dans sa décision d’ouvrir des enquêtes, l’ASFC a déterminé que Fisher & Ludlow représentait plus de la moitié de la production nationale de caillebotis en acier9. L’ASFC et Fisher & Ludlow ont nommé Borden Metal comme étant le seul autre producteur national connu de marchandises similaires; celle-ci appuie entièrement la plainte10.

24. Par conséquent, à la lumière des éléments de preuve figurant au dossier de la présente enquête préliminaire de dommage, le Tribunal conclut que Fisher & Ludlow et Borden Metal sont les seuls producteurs nationaux de marchandises similaires et, par conséquent, constituent la branche de production nationale. Le Tribunal conclut que Fisher & Ludlow représente à elle-seule une proportion majeure de la production nationale totale de marchandises similaires.

Volume de marchandises sous-évaluées et subventionnées

25. Fisher & Ludlow soutient que les volumes d’importations des marchandises en question sur le marché canadien augmentent de manière constante depuis 2007. Plus particulièrement, Fisher & Ludlow fait observer que les volumes d’importations des marchandises en question étaient faibles en 2007, mais qu’ils ont augmenté de manière substantielle depuis 2008, malgré la récession en 2009.

26. Les données sur les importations compilées par l’ASFC indiquent qu’il y a eu une tendance à la hausse du volume d’importations des marchandises en question entre 2007 et les six premiers mois de 201011. Le volume absolu d’importations des marchandises en question a augmenté de 131 p. 100 entre 2007 et 200912.

27. L’augmentation des volumes d’importations des marchandises en question a coïncidé avec une baisse des volumes globaux d’importations de caillebotis en acier, y compris une baisse des volumes d’importations provenant des États-Unis, soit l’autre source principale d’importations de caillebotis en acier. En 2007, le volume d’importations des marchandises en question représentait 4 p. 100 des importations totales de caillebotis en acier et a augmenté à près de 11 p. 100 en 2009, période de récession, et à un peu plus de 28 p. 100 au cours des six premiers mois de 201013. Pendant la même période, les importations de caillebotis en acier provenant des États-Unis ont chuté, passant de 96 p. 100 à 70 p. 10014.

28. Le volume des marchandises en question a également augmenté comparativement au volume de la production nationale et au volume de la consommation nationale entre 2007 et 2009. Même si les ratios calculés pour 2007, 2008 et 2009 étaient faibles, ils démontrent tous une augmentation constante de 4 points de pourcentage entre 2007 et 2009.

29. Par conséquent, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que les volumes d’importations des marchandises en question ont augmenté de manière significative en termes absolus, de 2007 jusqu’au premier semestre de 2010, et que les importations des marchandises en question ont augmenté relativement à la production et à la consommation nationales de caillebotis en acier, entre 2007 et 2009.

Incidence sur le prix des marchandises similaires

30. En se fondant sur sa connaissance du marché canadien et sur ses perspectives du marché nord-américain en général, Fisher & Ludlow soutient que, depuis 2006, les prix des marchandises en question ont été constamment inférieurs aux prix moyens des marchandises similaires, ce qui a entraîné la sous-cotation, la baisse et la compression des prix des marchandises similaires. Fisher & Ludlow soutient de plus qu’elle a perdu des commandes à cause des marchandises en question. Pour démontrer l’incidence négative de la concurrence provenant des marchandises en question sur ses prix de vente pendant la période examinée, et pour justifier son allégation de sous-cotation, de baisse et de compression des prix et de pertes de ventes, Fisher & Ludlow a présenté des éléments de preuve confidentiels, y compris des rapports d’activités spécifiques d’importation pour la période allant de 2009 jusqu’au premier semestre de 2010.

31. Fisher & Ludlow a présenté des données qui indiquent que les prix de vente moyens des marchandises similaires sur le marché canadien ont augmenté de plus de 10 p. 100 entre 2006 et 2008, alors que les prix de vente des marchandises en question sont demeurés relativement stables. En outre, Fisher & Ludlow soutient que la présence des marchandises en question sur le marché canadien est de plus en plus importante depuis 2008 et que les prix des marchandises en question sont en déclin depuis 2008.

32. Pour appuyer son allégation de sous-cotation, Fisher & Ludlow a déposé des éléments de preuve anecdotiques confidentiels sur un cas spécifique dans lequel un producteur chinois a offert de vendre les marchandises en question à un prix très inférieur au prix de vente moyen des marchandises similaires de Fisher & Ludlow pendant la période correspondante15. De plus, le Tribunal est d’avis que les prix de vente moyens des marchandises en question étaient constamment inférieurs aux prix de vente moyens des marchandises similaires de Fisher & Ludlow, entre 2006 et le premier trimestre de 2010. Une comparaison entre les prix des marchandises en question et les prix des marchandises similaires indique, de façon raisonnable, une importante sous-cotation pendant toute la période16.

33. Les éléments de preuve confidentiels de Fisher & Ludlow indiquent également que dans certaines circonstances, elle a baissé ses prix pour conserver sa clientèle17. De plus, entre 2008 et le premier trimestre de 2010, les prix nationaux des marchandises similaires ont chuté de façon importante, alors que les prix des marchandises en question ont diminué de manière modérée et sont demeurés constamment inférieurs aux prix des marchandises similaires18. Le Tribunal conclut que les renseignements indiquent, de façon raisonnable, que les marchandises en question ont causé une baisse des prix.

34. En ce qui concerne la compression des prix, les éléments de preuve confidentiels de Fisher & Ludlow indiquent que pendant la période allant de 2008 jusqu’au premier trimestre de 2010, Fisher & Ludlow a connu une hausse de coûts qui ne s’est pas traduite par une hausse des prix des marchandises similaires19. Le Tribunal conclut que les éléments de peuvent indiquent, de façon raisonnable, que la hausse de prix prévue n’a pas eu lieu en raison de la concurrence découlant des faibles prix des marchandises en question.

35. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que, aux fins de la présente enquête préliminaire de dommage, les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont mené à la sous-cotation, à la baisse et à la compression des prix.

Incidence sur la branche de production nationale

36. Fisher & Ludlow soutient que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage à la branche de production nationale sous forme de réduction des prix, des ventes et des revenus, de perte de part de marché, et de diminution des marges brutes, du revenu net et du taux d’utilisation de la capacité. Fisher & Ludlow soutient que bien que la majorité de ses ventes aient lieu dans l’Ouest canadien, particulièrement en Colombie-Britannique et en Alberta, elle subit des incidences dans l’ensemble du Canada. Fisher & Ludlow fait également remarquer que ses résultats financiers ont chuté considérablement depuis 2008.

37. Les éléments de preuve indiquent que la part de marché des marchandises en question est passée de presque zéro en 2006 et 2007 à environ 15 p. 100 du marché canadien au cours des trois premiers mois de 201020. Comme il est mentionné ci-dessus, les éléments de preuve indiquent également que les volumes de vente des marchandises en question ont augmenté de 131 p. 100 entre 2007 et 200921. Simultanément, le marché apparent canadien a diminué de 23 p. 100, et la part de marché de la branche de production nationale a diminué, alors que ses volumes de ventes chutaient de 27 p. 100. La part de marché des États-Unis est demeurée relativement stable, alors que ses volumes d’importations ont diminué de 19 p. 100 au cours de cette période22. Les éléments de preuve susmentionnés indiquent, de façon raisonnable, que la diminution de la part de marché de la branche de production nationale découle du dumping et du subventionnement des marchandises en question.

38. La production nationale a diminué de manière significative et les ventes nationales ont connu une baisse globale importante entre 2006 et le premier trimestre de 2010. La production nationale totale de caillebotis en acier a chuté de 51 p. 100 de 2006 à 2009. Comme il est mentionné ci-dessus, le Tribunal a examiné les rapports confidentiels de Fisher & Ludlow et ceux-ci indiquent des circonstances où elle a baissé ses prix de vente afin de conserver des ventes. Dans d’autre cas, les rapports indiquent la perte de ventes au profit des marchandises en question à prix plus faibles.

39. Les éléments de preuve indiquent une détérioration des résultats financiers de Fisher & Ludlow, tant au niveau des marges brutes qu’au niveau du revenu net, pendant cette période23. Les éléments de preuve indiquent également une importante sous-utilisation de la capacité et une diminution du taux d’utilisation de la capacité entre 2008 et le premier trimestre de 201024.

40. Bien qu’il n’y ait que très peu d’éléments de preuve, voire aucun, concernant l’effet sur d’autres facteurs et indices économiques pertinents, comme la productivité, le rendement sur capital investi, les flux de trésorerie, l’emploi et les salaires, le Tribunal conclut néanmoins que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage à la branche de production nationale.

Autres facteurs

41. Fisher & Ludlow soutient que les prix des marchandises en question ne réagissent pas aux fluctuations du taux de change. Elle soutient que le renminbi est demeuré relativement stable par rapport au dollar canadien en 2006 et 2007, mais qu’il s’est apprécié en 2008 et 2009, et que le prix des marchandises en question aurait donc dû augmenter, non diminuer.

42. Fisher & Ludlow reconnaît que la récession de 2008-2009 a eu un impact sur la demande globale de caillebotis en acier au Canada, mais attribue néanmoins le dommage qu’elle a subi au dumping et au subventionnement des marchandises en question. Fisher & Ludlow a déclaré que, bien que la taille estimative du marché canadien ait diminué d’environ 23,0 p. 100 en 2009, les importations des marchandises en question ont augmenté de 100 p. 100 au cours de ladite année, passant de 3,4 p. 100 du marché à près de 9,0 p. 100, en grande partie au détriment de la branche de production nationale.

43. Le Tribunal est d’avis que ces facteurs peuvent avoir eu un effet sur la branche de production nationale. Toutefois, le nombre limité d’éléments de preuve au dossier concernant l’incidence que ces autres facteurs puisse avoir eu sur la branche de production nationale est insuffisant pour contredire la conclusion du Tribunal que l’ensemble des éléments de preuve indique, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage. C’est seulement dans le contexte d’une enquête menée aux termes de l’article 42 de la LMSI que le Tribunal sera en mesure d’examiner pleinement ces facteurs, de même que d’autres facteurs, et leur importance relative.

CONCLUSION

44. Compte tenu de l’analyse qui précède, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage.


1 . Les caillebotis en acier, provenant de toute source, qui correspondent à la description du produit sont ci-après désignés caillebotis en acier.

2 . L.R.C. 1985, c. S-15 [LMSI].

3 . Dossier administratif, vol. 1F à la p. 313.

4 . Ibid. à la p. 317.

5 . Ibid. aux pp. 313-314, 317-319.

6 . Le paragraphe 34(2) de la LMSI prévoit également que le Tribunal détermine si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, un « retard », lequel est définit au paragraphe 2(1), comme étant « [l]e retard sensible de la mise en production d’une branche de production nationale. » Puisqu’il existe une branche de production nationale de caillebotis en acier au Canada, le « retard » n’est pas une question en litige dans la présente enquête préliminaire de dommage.

7 . D.O.R.S./84-927.

8 . Voir, par exemple, Raccords de tuyauterie en cuivre (19 février 2007), NQ-2006-002 (TCCE) au para. 48.

9 . Dossier administratif, vol. 1F à la p. 310.

10 . Ibid., vol. 2 aux pp. 222-223, 285-286.

11 . Dossier administratif, vol. 1F aux pp. 311, 319.

12 . Ibid. à la p. 319, vol. 2 à la p. 225.

13 . Dossier administratif, vol. 1F à la p. 311.

14 . Ibid.

15 . Les éléments de preuve au dossier indiquent que les prix de vente des marchandises en question ont été ajustés par Fisher & Ludlow pour inclure le coût de livraison au Canada, et c’est sur cette base que le Tribunal a effectué son analyse. Le Tribunal examinera cette question dans le contexte d’une enquête de dommage, le cas échéant. Dossier administratif, vol. 2 à la p. 57.

16 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 62, vol. 2 à la p. 56.

17 . Dossier administratif, vol. 1 aux pp. 67, 68, vol. 2 aux pp. 61, 62.

18 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 62, vol. 2 à la p. 56.

19 . Dossier administratif, vol. 2 aux pp. 56, 133, 134, 136.

20 . Dossier administratif, vol. 1 aux pp. 59, 62, 65, 73, vol. 1F à la p. 319.

21 . Dossier administratif, vol. 1F à la p. 319, vol. 2 à la p. 225.

22 . Dossier administratif, vol. 2 aux pp. 33, 222, 225, 286-287.

23 . Dossier administratif, vol. 1 à la p. 63.

24 . Ibid. aux pp. 68, 69, vol. 2 aux pp. 62, 63.