MODULES MURAUX UNITISÉS

Enquêtes préliminaires de dommage (paragraphe 34(2))


MODULES MURAUX UNITISÉS
Enquête préliminaire de dommage no PI-2012-006

Décision rendue
le vendredi 3 mai 2013

Motifs rendus
le mardi 21 mai 2013


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À une enquête préliminaire de dommage, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, concernant des :

MODULES MURAUX UNITISÉS ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE

DÉCISION PROVISOIRE DE DOMMAGE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, a procédé à une enquête préliminaire de dommage afin de déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement de modules muraux unitisés, avec ou sans remplissage, qui comprennent une ossature entièrement assemblée, avec ou sans fixations, des garnitures, des couvercles, des mécanismes d'ouverture de fenêtre, des joints d'étanchéité, des barres de transfert de charge, des pare-soleil et des assemblages d'ancrage, excluant les systèmes d'enveloppe de bâtiments non unitisés tels que les systèmes de murs-rideaux montés sur grille ou les systèmes de murs-rideaux à fixation par points, originaires ou exportés de la République populaire de Chine, ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage.

La présente enquête préliminaire de dommage fait suite à l'avis en date du 4 mars 2013, selon lequel le président de l'Agence des services frontaliers du Canada avait ouvert des enquêtes concernant les présumés dumping et subventionnement dommageables des marchandises susmentionnées.

Aux termes du paragraphe 37.1(1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine par la présente que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises susmentionnées ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage.

Pasquale Michaele Saroli
Pasquale Michaele Saroli
Membre présidant

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre

Daniel Petit
Daniel Petit
Membre

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

L'exposé des motifs sera publié d'ici 15 jours.

Membres du Tribunal : Pasquale Michaele Saroli, membre présidant
Jason W. Downey, membre
Daniel Petit, membre

Directeurs de la recherche : Rose Ritcey
Randolph W. Heggart

Gestionnaire de la recherche : Simon Glance

Agent principal de la recherche : Gary Rourke

Agent de la recherche : Sarah MacMillan

Conseillers juridiques pour le Tribunal : Nick Covelli
Courtney Fitzpatrick

Gestionnaire, Programmes et services du greffe : Michel Parent

Agent principal du greffe : Lindsay Vincelli

Agent de soutien du greffe : Alexis Chénier

PARTICIPANTS :

  Conseillers/représentants
Allan Window Technologies
Ferguson Neudorf Glass Inc.
Flynn Canada Ltd.
Inland Glass & Aluminum Ltd.
Oldcastle Building Envelope
Sota Glazing Inc.
Starline Architectural Windows Ltd.
State Window Corporation
Toro Aluminum/Toro Glasswall Inc.
Windsor Glass Company (1992) Ltd.
Ronald C. Cheng
Stéphane am Rhyn
Paul Conlin
Benjamin Bedard
Drew Tyler
Paul E. Brunetta
Anne-Marie Guindon
Shenyang Yuanda Aluminium Industry Engineering Co., Ltd.
Yuanda Canada Enterprises Ltd.
Peter Clark
Renée Clark
James Anderson
Jangho Curtain Wall Canada Co., Ltd. Vincent Routhier
Jessica Di Maria

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. La présente enquête préliminaire de dommage concerne une plainte déposée par 10 producteurs nationaux1 de modules muraux unitisés2.

2. Les parties plaignantes allèguent que le dumping et le subventionnement de modules muraux unitisés, avec ou sans remplissage, qui comprennent une ossature entièrement assemblée, avec ou sans fixations, des garnitures, des couvercles, des mécanismes d'ouverture de fenêtre, des joints d'étanchéité, des barres de transfert de charge, des pare-soleil et des assemblages d'ancrage, excluant les systèmes d'enveloppe de bâtiments non unitisés tels que les systèmes de murs-rideaux montés sur grille ou les systèmes de murs-rideaux à fixation par points, originaires ou exportés de la République populaire de Chine (les marchandises en question), ont causé ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale.

3. Le président de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a ouvert des enquêtes de dumping et de subventionnement relativement aux marchandises en question le 4 mars 2013. Le 5 mars 2013, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a entamé la présente enquête préliminaire de dommage3.

4. Il s'agit de la deuxième fois que le Tribunal procède à une enquête préliminaire de dommage relativement à des modules muraux unitisés. Le 14 septembre 2012, le Tribunal a conclu que les éléments de preuve déposés dans le cadre de la première plainte des producteurs nationaux de modules muraux unitisés n'indiquaient pas, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question avaient causé un dommage ou un retard ou menaçaient de causer un dommage.

5. Comme dans le cadre de la première plainte, Jangho Curtain Wall Canada Co., Ltd. (Jangho), un importateur, ainsi que Yuanda Canada Enterprises Ltd. et Shenyang Yuanda Aluminum Industry Engineering Co., Ltd. (collectivement, Yuanda), un importateur et un exportateur respectivement, s'opposent à la présente plainte.

6. Le 3 mai 2013, aux termes du paragraphe 37.1(1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation4, le Tribunal a déterminé que les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question avaient causé ou menaçaient de causer un dommage.

DÉCISION DE L'ASFC D'OUVRIR DES ENQUÊTES

7. Conformément au paragraphe 31(1) de la LMSI, l'ASFC était d'avis que les éléments de preuve indiquaient que les marchandises en question avaient été sous-évaluées et subventionnées et que les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement avaient causé ou menaçaient de causer un dommage. Par conséquent, l'ASFC a ouvert des enquêtes de dumping et de subventionnement le 4 mars 2013.

8. La période d'enquête de l'ASFC sur les présumés dumping et subventionnement s'est échelonnée du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012.

9. L'ASFC est d'avis que toutes les marchandises en question importées au Canada au cours de la période visée par l'enquête ont été sous-évaluées, selon une marge estimative globale de dumping de 28 p. 100, exprimée en pourcentage du prix à l'exportation des marchandises en question5.

10. En ce qui concerne le présumé subventionnement, l'ASFC est d'avis que 72 p. 100 des marchandises en question importées au Canada au cours de la période visée par l'enquête ont été subventionnées, selon un montant estimatif global de subvention égal à 18 p. 100, exprimé en pourcentage du prix à l'exportation des marchandises en question6.

11. En outre, l'ASFC est d'avis que la marge estimative de dumping et le montant estimatif de subvention n'étaient pas minimaux et que les volumes estimatifs de marchandises sous-évaluées et subventionnées n'étaient pas négligeables7.

12. L'ASFC a également pu estimer les marges de dumping et les montants de subvention de plusieurs projets particuliers pour lesquels les parties plaignantes ont présenté des soumissions en vue de livrer concurrence aux fournisseurs des marchandises en question. Ces estimations liées à des projets particuliers varient entre bien inférieures et bien supérieures aux estimations globales.

OBSERVATIONS SUR LES QUESTIONS DE DOMMAGE ET DE MENACE DE DOMMAGE

Parties plaignantes

13. À l'appui de leur affirmation selon laquelle le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé un dommage, les parties plaignantes ont présenté des éléments de preuve concernant une augmentation des volumes d'importation des marchandises en question, une perte de ventes et de part de marché, une baisse et une compression des prix ainsi qu'une diminution de l'utilisation de la capacité, de l'emploi, du revenu, de la marge brute et des bénéfices. Les parties plaignantes mettent l'accent sur les allégations de sous-cotation et de baisse des prix de projets particuliers, plutôt que sur les allégations découlant des données globales sur les importations et les prix.

14. À l'appui de leur affirmation selon laquelle le dumping et le subventionnement des marchandises en question menacent de causer un dommage, les parties plaignantes allèguent que les volumes d'importation des marchandises en question continueront d'augmenter et que la diminution de la rentabilité continuera de se refléter dans leurs résultats financiers en raison du délai entre l'adjudication d'un contrat et la livraison. Elles prétendent également que l'augmentation prévue de la capacité de production des marchandises en question donnera accès à une capacité disponible pour les marchés d'exportation, y compris pour le Canada, ce qui sera intéressant compte tenu de son marché de la construction relativement solide.

Parties opposées à la plainte

15. Jangho et Yuanda soutiennent que les éléments de preuve n'indiquent pas, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé ou menacent de causer un dommage.

16. Plus particulièrement, Jangho affirme ce qui suit :

  • que les éléments de preuve indiquent une augmentation de la production nationale, en dépit de la présence des marchandises en question sur le marché;
  • que la valeur des ventes des marchandises en question et des modules muraux unitisés produits au pays a grimpé au cours de la période visée par l'enquête, la valeur des ventes des produits nationaux augmentant plus rapidement que celle des marchandises en question;
  • que la perte de ventes alléguée par chacune des parties plaignantes ne peut être considérée comme un dommage causé à l'ensemble de la branche de production nationale, puisque bon nombre de celles-ci n'ont pas été invitées ou n'étaient pas admissibles à soumissionner à l'égard des contrats.

17. Yuanda soutient que les éléments de preuve présentés par les parties plaignantes concernant les données du marché ne sont pas fiables et qu'il y a de nombreuses divergences entre les éléments de preuve produits dans le cadre de la première plainte8 et ceux qui sont déposés dans le cadre de la présente enquête préliminaire. Plus particulièrement, Yuanda désigne des changements apportés aux données liées aux importations en provenance des États-Unis. Yuanda soutient également que les éléments de preuve présentés par les parties plaignantes n'englobent pas exactement l'ensemble du marché canadien, puisqu'il y a insuffisance d'éléments de preuve concernant les importations mêmes des marchandises en question par les producteurs nationaux, les importations de modules muraux unitisés en provenance de pays tiers et les exportations des producteurs nationaux.

18. En ce qui concerne les affirmations des parties plaignantes quant à la menace de dommage, Jangho soutient que peu d'éléments de preuve appuient la diminution prévue dans un proche avenir par les parties plaignantes de la demande pour les marchandises en question. Yuanda affirme qu'une reprise économique s'est produite depuis 2011 et met en doute l'insuffisance des éléments de preuve concernant les données du marché à partir de la mi-2012.

ANALYSE

Cadre législatif

19. Le mandat du Tribunal en matière d'enquête préliminaire de dommage est énoncé au paragraphe 34(2) de la LMSI, qui exige du Tribunal qu'il détermine « [...] si les élément de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping ou le subventionnement des marchandises [en question] a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage ».

20. En l'espèce, il est allégué que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé ou menacent de causer un dommage; il n'y a aucune allégation de retard.

21. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit le « dommage » comme « [l]e dommage sensible causé à une branche de production nationale ». Le terme « branche de production nationale » signifie « [...] l'ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires ». Le terme « marchandises similaires », par rapport à des marchandises sous-évaluées ou subventionnées, signifie des marchandises identiques aux marchandises sous-évaluées ou subventionnées ou, à défaut, des marchandises dont l'utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises sous-évaluées ou subventionnées.

22. Le paragraphe 2(1.5) de la LMSI prévoit que, « [...] pour qu'il puisse être décidé que le dumping ou le subventionnement de marchandises menace de causer un dommage ou cause une menace de dommage, il faut que les circonstances dans lesquelles le dumping ou le subventionnement est susceptible de causer un dommage soient nettement prévues et imminentes ».

23. Il ne suffit pas que le dumping ou le subventionnement contribue à un dommage sensible causé à une branche de production nationale ou à une menace de dommage sensible. Le dumping ou le subventionnement lui-même doit avoir causé ou doit menacer de causer un dommage sensible9.

24. L'expression « indiquent, de façon raisonnable » n'est pas définie dans la LMSI, mais elle est comprise en ce sens que les éléments de preuve n'ont pas à être « [...] concluants ou probants selon la prépondérance des probabilités [...] »10. Les éléments de preuve doivent plutôt étayer de manière suffisante les allégations de dommage, de retard ou de menace de dommage pour justifier l'enquête11. Les conditions suivantes doivent être satisfaites :

  • les éléments de preuve sont pertinents, exacts et adéquats;
  • compte tenu des éléments de preuve, les allégations résistent à un examen assez poussé, même si la théorie de la cause peut ne pas sembler convaincante ou incontestable12.

25. Afin d'en arriver à sa décision provisoire, le Tribunal tient compte des facteurs concernant le dommage et la menace de dommage qui sont prévus à l'article 37.1 du Règlement sur les mesures spéciales d'importation13, y compris les volumes d'importations des marchandises sous-évaluées et subventionnées, les effets qu'ont les marchandises sous-évaluées ou subventionnées sur le prix des marchandises similaires, l'incidence économique des marchandises sous-évaluées ou subventionnées sur la situation de la branche de production nationale, et — s'il existe un dommage ou une menace de dommage — la question de savoir s'il existe un lien de causalité entre le dumping ou le subventionnement des marchandises et le dommage ou la menace de dommage.

Question préliminaire — Chevauchement des définitions de produits

26. Jangho soutient qu'il y a chevauchement entre la définition de produit de l'ASFC et les conclusions du Tribunal dans Extrusions d'aluminium14, en ce sens que ces conclusions concernent des modules muraux unitisés non assemblés, faits à partir d'extrusions d'aluminium. Jangho affirme également qu'il pourrait y avoir chevauchement entre les modules muraux unitisés « avec ou sans fixations » mentionnés dans la définition de produit de l'ASFC et les conclusions du Tribunal dans Certaines pièces d'attache15.

27. L'application aux mêmes marchandises de plusieurs conclusions de dumping ou de subventionnement (ou leur « cumul ») ne serait pas autorisée, puisque tout effet dommageable sur les prix serait présumé avoir été corrigé par l'imposition initiale de droits antidumping et/ou compensateurs sur ces marchandises.

28. Cependant, les conclusions rendues dans Extrusions d'aluminium excluent les marchandises qui ont été davantage ouvragées (par exemple découpées avec précision, usinées, poinçonnées et percées), au point où elles ne possèdent plus la nature et les caractéristiques physiques d'une extrusion d'aluminium, mais sont devenues un produit fini différent16. Le Tribunal est convaincu que les modules muraux unitisés sont davantage ouvragés au point où ils ne sont pas visés par les conclusions rendues dans Extrusions d'aluminium. En outre, le Tribunal estime qu'un agent des douanes ne confondrait pas un module mural unitisé avec une pièce d'attache ni ne percevrait de droits aux termes de la LMSI sur des pièces d'attache fixées à des modules muraux unitisés. D'ailleurs, Jangho n'a présenté aucun élément de preuve selon lequel l'ASFC perçoit des droits aux termes de la LMSI sur les modules muraux unitisés, que ce soit par rapport aux conclusions rendues dans Extrusions d'aluminium ou dans Pièces d'attache17.

Marchandises similaires et catégories de marchandises

29. Bien que le Tribunal doive mener son enquête préliminaire de dommage en se fondant sur la définition de produit de l'ASFC, il doit définir la portée des marchandises similaires par rapport aux marchandises en question afin d'évaluer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé ou menacent de causer un dommage aux producteurs nationaux de marchandises similaires. À cette fin, le Tribunal peut également examiner la question de savoir si les marchandises en question constituent une ou plusieurs catégories de marchandises.

30. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » par rapport à toutes les autres marchandises de la façon suivante :

a) marchandises identiques aux marchandises en cause ;

b) à défaut, marchandises dont l'utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

31. Pour trancher les questions de marchandises similaires et de catégories de marchandises, le Tribunal tient généralement compte d'un certain nombre de facteurs, dont les caractéristiques physiques des marchandises (comme leur composition et leur apparence) et leurs caractéristiques de marché (comme la substituabilité, les prix, les circuits de distribution, les utilisations finales et la question de savoir si elles répondent aux mêmes besoins des clients)18.

32. Les parties s'entendent pour dire que les modules muraux unitisés produits au pays constituent des marchandises similaires par rapport aux marchandises visées par la définition de produit de l'ASFC.

33. Yuanda et Jangho soutiennent que les modules muraux unitisés constituent deux catégories de marchandises : des modules de murs-rideaux unitisés et des modules de pans de verre unitisés. De plus, Yuanda affirme que « les murs-rideaux montés sur grille et les murs-rideaux à fixation par points » [traduction] sont des marchandises similaires aux modules de murs-rideaux unitisés19, même si ces systèmes sont exclus de la définition des marchandises en question de l'ASFC.

34. En ce qui concerne le premier point, Yuanda et Jangho mettent l'accent sur les différences physiques, notamment sur le fait que les murs-rideaux sont des revêtements extérieurs, tandis que les pans de verre sont installés entre les dalles de plancher, ainsi que sur les différences quant aux prix, aux utilisations finales et à la manière dont la branche de production est structurée. Selon elles, il y a une branche de production nationale de murs-rideaux et une branche de production nationale de pans de verre, et seulement certains producteurs nationaux fabriquent ces deux produits, mais il n'y a aucune branche de production de « modules muraux unitisés » comme telle.

35. Pour ce qui est du second point, Yuanda allègue que de nombreux producteurs nationaux fabriquent à la fois les systèmes montés sur grille et à fixation par points et les murs-rideaux unitisés et que bon nombre de projets nécessitent une combinaison de ces marchandises.

36. Pour leur part, les parties plaignantes soulignent que les murs-rideaux et les pans de verre sont constitués des mêmes principaux éléments, ont la même application (c'est-à-dire recouvrir des bâtiments), sont produits au moyen des mêmes méthodes, sont presque d'apparence identique et sont vendus par le biais des mêmes circuits de distribution. Elles soutiennent que, contrairement aux modules muraux unitisés, les systèmes montés sur grille et à fixation par points ne pourraient être utilisés dans des bâtiments de moyenne ou de grande hauteur en raison des limites d'installation.

37. Étant donné les renseignements disponibles limités à cette étape préliminaire, le Tribunal ne peut conclure que les marchandises en question constituent une ou deux catégories ni que les marchandises similaires se limitent aux modules de murs-rideaux unitisés et aux modules de pans de verre unitisés produits au pays. Par conséquent, pour déterminer s'il y a indication raisonnable de dommage ou de menace de dommage, le Tribunal traitera les modules muraux unitisés comme constituant une seule catégorie de marchandises, les systèmes montés sur grille et à fixation par points n'étant pas des marchandises similaires.

38. Cependant, les arguments avancés à l'appui de l'existence de deux catégories de marchandises (c'est-à-dire les modules de murs-rideaux et les modules de pans de verre), ainsi que les arguments selon lesquels il faut traiter les systèmes montés sur grille et à fixation par points comme des marchandises similaires, méritent d'être examinés davantage au cours d'une enquête aux termes de l'article 42 de la LMSI et, si l'ASFC rend une décision provisoire de dumping ou de subventionnement, le Tribunal recueillera des données et demandera aux parties de présenter des observations sur ces questions. Le Tribunal demande donc à l'ASFC de recueillir des renseignements distincts concernant les deux catégories possibles de marchandises, soit les modules de murs-rideaux et les modules de pans de verre.

Branche de production nationale

39. Bien que Yuanda et Jangho soulèvent certains doutes quant à la question de savoir si les parties plaignantes minimisent l'importance ou les activités de certains autres producteurs nationaux, selon les éléments de preuve déposés dans le cadre de la présente enquête préliminaire, le Tribunal est convaincu que la part de la production nationale de modules muraux unitisés des parties plaignantes constitue une proportion majeure de la production collective de marchandises similaires au Canada20.

40. Le Tribunal examinera davantage cette question au cours d'une enquête aux termes de l'article 42 de la LMSI, surtout s'il conclut qu'il y a, en fait, deux catégories de marchandises, ce qui sous-entendrait l'existence de deux branches de production nationales plutôt qu'une seule.

Cumul croisé

41. Yuanda soutient que l'incidence du dumping doit être évaluée séparément de celle du subventionnement. Toutefois, le « cumul croisé » n'est pas interdit aux termes de la LMSI. En outre, selon la position antérieure du Tribunal sur le sujet, il est impossible, d'un point de vue réaliste, d'isoler les effets causés par le dumping de ceux causés par le subventionnement, puisqu'ils sont trop étroitement enchevêtrés pour attribuer, de façon raisonnable, des fractions discrètes au dumping et au subventionnement, respectivement21.

Volume de marchandises sous-évaluées et subventionnées

42. Selon les données du SGER de l'ASFC22, la valeur absolue des importations en provenance de la Chine a augmenté de 45 p. 100 de 2010 à 2011 et de 16 p. 100 de 2010 à juin 2012. Cependant, la valeur des importations a diminué de 20 p. 100 en 2012.

43. La valeur des importations visées, qui est passée de 3 p. 100 en 2010 à 5 p. 100 en 2011, pour ensuite chuter à 3 p. 100 en 2012, a été stable par rapport à la valeur de la production de marchandises similaires23. La valeur des importations visées par rapport à celle de la consommation de marchandises similaires a suivi une tendance semblable, commençant et terminant la période à environ 3 p. 100.

44. Bien que les éléments de preuve indiquent que la valeur des importations des marchandises en question a enregistré une hausse absolue considérable de 2010 à juin 2012, la tendance semble s'être inversée au cours de la plus récente partie de cette période. En outre, la hausse a été modeste par rapport à la valeur de la production et de la consommation intérieures24.

Incidence sur le prix des marchandises similaires

45. Les estimations des parties plaignantes du prix unitaire moyen des marchandises similaires et de celui des marchandises en question25 montrent que le prix unitaire moyen des importations visées était inférieur de 33 p. 100 à celui des marchandises similaires en 2009 et 2010. Cependant, les éléments de preuve indiquent que le prix unitaire moyen des importations visées était supérieur de 38 p. 100 à celui des marchandises similaires en 2011 et de 27 p. 100 de janvier à juin 2012.

46. En ce qui concerne l'effritement des prix, l'ASFC a conclu que les allégations des parties plaignantes étaient bien étayées et que l'effritement des prix était raisonnablement lié aux importations sous-évaluées et subventionnées26. Le Tribunal ne voit aucune raison de conclure différemment.

47. Les parties plaignantes soutiennent avoir subi une compression des prix en raison des coûts accrus des matières premières et des augmentations de coûts découlant de la diminution des volumes d'expédition (c'est-à-dire des pertes d'économies d'échelle), ceux-ci n'ayant pas été recouvrés par des hausses de prix27. Cependant, les éléments de preuve indiquent que les coûts unitaires des marchandises vendues par les parties plaignantes ont, en fait, diminué de 3 p. 100 de 2009 à juin 2012. Par conséquent, le Tribunal est d'accord avec la position de l'ASFC selon laquelle l'allégation de compression des prix n'est pas suffisamment étayée.

48. Cela dit, les parties plaignantes affirment qu'en raison du caractère personnalisé des modules muraux unitisés, les prix de vente moyens ne constituent pas le fondement le plus fiable pour évaluer l'incidence des marchandises en question sur les prix. Jangho est d'accord28.

49. Ces affirmations sont appuyées par les écarts marqués de prix unitaires entre les modules de murs-rideaux et les modules de pans de verre, comme indiqué précédemment dans le contexte des catégories possibles de marchandises. Ces écarts de prix unitaires ainsi que les différences possibles dans la gamme de produits peuvent fausser les comparaisons de prix moyens globaux.

50. En effet, l'argumentaire des parties plaignantes repose essentiellement sur des allégations liées à des projets particuliers selon lesquelles il y a eu perte de ventes en raison de la sous-cotation et de la baisse des prix. Ces allégations de dommage font l'objet d'un examen plus approfondi ci-après.

Allégations liées aux projets particuliers et causalité

51. Les parties plaignantes allèguent qu'au cours de la période visée par l'enquête, elles ont perdu 21 projets et ont dû abaisser leurs prix afin d'obtenir sept autres projets, en raison du dumping ou du subventionnement des marchandises en question. Elles estiment que la valeur de cette perte de ventes représente près de 20 p. 100 des ventes brutes de 2009 à 201129.

52. Jangho et Yuanda soutiennent que ces allégations de perte de ventes sont erronées parce qu'elles ne sont pas suffisamment étayées et qu'elles comportent de graves divergences. En outre, selon Jangho, ces allégations ne doivent être prises en compte que pour chacune des sociétés de façon individuelle30.

53. En réponse, les parties plaignantes allèguent que les renseignements présentés dans le cadre de la plainte sont plus que suffisants pour fournir une indication raisonnable de dommage. Les parties plaignantes soulignent également qu'en dépit du fait que la grande majorité des allégations de perte de ventes concernent les ventes de Jangho et de Yuanda, ni l'une ni l'autre n'a fourni d'éléments de preuve en vue de nier les allégations avancées.

54. En examinant les allégations de perte de ventes avancées par les parties plaignantes, le Tribunal a appliqué trois méthodes analytiques (examinées plus en détail ci-dessous) à deux catégories de projet : les 10 projets particuliers pour lesquels l'ASFC a estimé des marges de dumping et des montants de subvention et les projets pour lesquels l'ASFC n'a pas estimé de marges de dumping ni de montants de subvention.

Perte de ventes liée aux projets examinés par l'ASFC

55. En ce qui concerne les 10 projets particuliers pour lesquels l'ASFC a estimé des marges de dumping et des montants de subvention, le Tribunal a examiné, selon la première méthode analytique, la valeur normale des exportations de la Chine des marchandises en question estimée par l'ASFC. Le Tribunal a ajouté à cette valeur normale FAB Chine des estimations des coûts d'expédition et de vente au Canada31 et comparé la somme à la valeur de la soumission nationale initiale la plus basse32. Lorsque le devis initial fourni par un producteur national est inférieur à la « valeur normale » estimative de la soumission du fournisseur des marchandises en question, le Tribunal estime que cela constitue une indication raisonnable que le producteur national aurait vraisemblablement remporté le contrat en l'absence du dumping et du subventionnement des marchandises en question.

56. Selon cette méthode, une seule des 10 allégations de perte de ventes semble justifiable33.

57. La deuxième méthode analytique appliquée par le Tribunal ne diffère de la première qu'au sens où le montant de subvention de chaque projet, estimé par l'ASFC, a aussi été ajouté à la « valeur normale » de la soumission calculée en application de la première méthode. Selon cette deuxième méthode, si le devis initial d'un producteur national est inférieur à la valeur corrigée de la soumission relative aux marchandises en question, le Tribunal estime que cela constitue une indication raisonnable que le producteur national aurait vraisemblablement remporté le contrat en l'absence du dumping et du subventionnement.

58. Selon cette méthode, seulement trois des 10 allégations semblent justifiables34.

59. La troisième méthode analytique appliquée par le Tribunal reflète la méthode utilisée dans Modules muraux unitisés I relativement aux projets particuliers pour lesquels l'ASFC a estimé une marge de dumping et un montant de subvention.

60. Selon cette méthode, la valeur déclarée de la soumission relative aux marchandises en question a été multipliée par la marge de dumping et le montant de subvention combinés des projets particuliers et le résultat a été comparé à la valeur de la soumission canadienne initiale la plus basse.

61. Cette méthode est la plus favorable aux parties plaignantes35, mais compte tenu que les marges de dumping et les montants de subvention ne sont que des estimations et que la norme applicable est une « indication raisonnable » plutôt que la prépondérance des probabilités, le Tribunal est d'avis qu'à cette étape préliminaire son application est adéquate.

62. Selon cette méthode, si le devis initial d'un producteur national est inférieur à la soumission chinoise multipliée par la marge de dumping et le montant de subvention, le Tribunal estime qu'il y a indication raisonnable que le producteur national aurait vraisemblablement remporté le contrat en l'absence du dumping et du subventionnement. Selon cette troisième méthode, trois projets supplémentaires auraient pu être obtenus36, pour un total de 6 sur 10.

63. Si l'on se fonde sur les méthodes les plus rigoureuses, la première et la deuxième méthode, la perte de ventes relative à ces trois projets a représenté 4 p. 100 de la production totale et 4 p. 100 du revenu brut total.

Perte de ventes liée aux projets non examinés par l'ASFC

64. De même, le Tribunal a utilisé trois méthodes pour évaluer les allégations de perte de ventes liée aux projets particuliers pour lesquels l'ASFC n'a pas calculé de marges de dumping et de montants de subvention37.

65. Selon la première méthode, la marge moyenne pondérée de dumping de 28 p. 100 a été ajoutée à la valeur déclarée de la soumission relative aux modules muraux unitisés en provenance de la Chine. Cette valeur corrigée à la hausse de la soumission a ensuite été comparée à la valeur de la soumission initiale la plus basse des producteurs nationaux afin de déterminer si la soumission canadienne aurait été retenue en l'absence du dumping et du subventionnement des marchandises en question.

66. Selon cette méthode, les producteurs nationaux auraient pu obtenir trois projets supplémentaires38.

67. En application de la deuxième méthode, la valeur indiquée de la soumission relative aux marchandises en question a été multipliée par la marge moyenne pondérée estimative de dumping de l'ASFC. Une estimation du montant de subvention39 a été ajoutée au montant fondé sur l'offre des marchandises en question et le résultat a été comparé à la valeur de la soumission canadienne initiale la plus basse. Selon cette méthode, si le devis d'un producteur national est inférieur à la valeur indiquée de la soumission relative aux marchandises en question, augmentée de la marge estimative de dumping et du montant estimatif de subvention, le Tribunal considère que cela constitue une indication raisonnable que le producteur national aurait vraisemblablement remporté le contrat en l'absence du dumping et du subventionnement.

68. Selon cette méthode, il est possible que les producteurs nationaux auraient pu obtenir deux autres projets40.

69. En application de la troisième méthode, la valeur déclarée de la soumission relative aux marchandises en question a été multipliée par la marge moyenne pondérée estimative de dumping et le montant moyen pondéré estimatif de subvention calculés par l'ASFC et le résultat a été comparé à la valeur de la soumission canadienne initiale la plus basse.

70. L'application de cette méthode indique la possibilité que deux projets supplémentaires aient été perdus en raison du dumping et du subventionnement des marchandises en question41.

71. Selon les méthodes les plus rigoureuses, soit la première et la deuxième méthode, la perte de ventes relative à ces cinq projets a représenté 2 p. 100 de la production totale et 2 p. 100 du revenu brut total.

Allégations de baisse de prix liée à des projets particuliers

72. Les parties plaignantes ont avancé sept allégations de baisse des prix liée à des projets particuliers, c'est-à-dire qu'elles allèguent avoir eu à abaisser leurs prix afin de remporter le contrat par rapport à une offre concurrente d'un fournisseur des marchandises en question.

73. Cinq de ces allégations concernant des projets particuliers ne contiennent pas suffisamment de renseignements pour que le Tribunal examine s'il y a eu, en fait, baisse des prix. Ces allégations indiquent simplement que les prix respectifs ont été abaissés afin de livrer concurrence à l'offre d'un fournisseur des marchandises en question, mais ne précisent pas dans quelle mesure le prix proposé a été abaissé42.

74. Pour ce qui est des deux projets restants, le producteur national qui a présenté une offre relativement aux travaux prétend avoir réduit ses prix d'un montant considérable afin de remporter le contrat.

Résumé

75. Selon l'analyse la plus rigoureuse, celle de la première et de la deuxième méthode, les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que 8 des 21 pertes de ventes ont été causées par le dumping et le subventionnement des marchandises en question, ce qui représente 6 p. 100 de la production totale des parties plaignantes et 9 p. 100 de leurs ventes brutes43.

76. La branche de production nationale semble avoir subi une baisse des prix relativement à au moins deux autres ventes.

77. La valeur totale de ces allégations de baisse des prix et des huit allégations de perte de ventes représente des pertes totalisant environ 9 p. 100 des ventes brutes des parties plaignantes.

Incidence sur la branche de production nationale

78. En examinant les effets de la perte de ventes et de la baisse des prix alléguées, le Tribunal constate que les modules muraux unitisés possèdent un grand nombre des caractéristiques des biens d'équipement, un type de marchandises qui peut soulever des difficultés uniques dans le cadre de l'analyse de dommage et de menace de dommage. Premièrement, la production de modules muraux unitisés semble être marquée par des coûts fixes élevés, ce qui peut obliger les producteurs à maintenir le taux d'utilisation de la capacité de production, dont l'interruption pourrait être coûteuse44. Deuxièmement, étant donné que les modules muraux unitisés constituent généralement des commandes en un seul exemplaire personnalisé d'un grand volume, la perte d'une seule commande peut avoir des effets dommageables considérables et persistants pour un producteur national45. Troisièmement, puisque le délai entre l'adjudication d'un contrat et la livraison du produit peut s'étendre sur une ou plusieurs années, selon l'ampleur, la complexité et le calendrier de chaque projet, il est concevable que certains des effets du présumé dumping ou subventionnement sur les prix ne se concrétisent que plus tard.

79. Par conséquent, les parties plaignantes ont fourni des éléments de preuve concernant leur production, l'utilisation de leur capacité, l'emploi, leur part de marché, leurs ventes et leur rendement financier.

Production

80. Les parties plaignantes prétendent que la valeur totale de la production nationale46 a chuté de 25 p. 100 de 2009 à 2011. Les données annualisées de 2012 indiquent une augmentation de 10 p. 100 de la valeur de la production par rapport à 2011, soit une diminution nette de 17 p. 100 de 2009 à 201247. Selon les parties plaignantes, la production a diminué de 23 p. 100 de 2009 à 2011. Cependant, les données annualisées de 2012 montrent une augmentation de 17 p. 100 de la production par rapport à 2011, soit une diminution nette de 10 p. 100 de 2009 à 201248. Une partie importante de la baisse nette de 10 p. 100 de la production de 2009 à 2012 pourrait être attribuable à la perte de ventes liée à des projets particuliers.

Utilisation de la capacité

81. La baisse de la production s'est traduite par une diminution des taux d'utilisation de la capacité. Les données des parties plaignantes indiquent que les taux d'utilisation de la capacité sont passés de 56 p. 100 en 2009 à 41 p. 100 en 2011, pour ensuite grimper à 46 p. 100 en 2012 en raison de l'augmentation de la production.

82. Toutefois, le Tribunal constate que de 2009 à 2012, les parties plaignantes ont augmenté de 10 p. 100 leur capacité de production49. En l'absence de cet élargissement de la capacité, l'utilisation de la capacité aurait chuté de 5 points de pourcentage de 2009 à 2012.

Emplois

83. Tout comme les taux d'utilisation de la capacité, certains éléments de preuve empiriques50 présentés par les parties plaignantes indiquent que la réduction du carnet de commandes et de la production s'est traduite par une diminution de l'emploi51. Un producteur national affirme avoir licencié 40 employés. Un autre producteur national soutient avoir été forcé de mettre en place un programme de partage du travail, réduisant ainsi les heures des employés, en raison de la faiblesse des niveaux de production. Une troisième société affirme avoir licencié 40 employés permanents en 2011 et prévoir d'autres licenciements d'ici la fin de 2013, si elle n'obtient pas de nouveaux projets canadiens. La société envisage de déplacer toutes ses installations de production aux États-Unis.

Parts de marché

84. Selon la valeur des ventes, les données sur le marché apparent présentées par les parties plaignantes indiquent une diminution de leur part de marché de 2009 à 2010 ainsi que de janvier à juin 2011 comparativement à janvier à juin 201252. L'ASFC a indiqué que son analyse des données sur les importations appuie l'allégation avancée par les parties plaignantes que les marchandises en question prennent une plus grande part du marché canadien53.

85. Les parties qui s'opposent à la demande soutiennent que l'évaluation de la part de marché effectuée par le Tribunal dans Modules muraux unitisés I démontre que la part de marché des producteurs nationaux était légèrement plus grande en 2011 qu'en 2009. Elles affirment que cette croissance du rendement est confirmée dans le cadre de la présente plainte lorsqu'on compare la période de janvier à juin 2011 à celle de janvier à juin 2012. Ces données indiquent que les ventes nationales ont augmenté de 71 p. 100, selon leur valeur, et de 80 p. 100, selon leur volume54.

86. Le Tribunal observe que de 2009 à 2011, l'ensemble du marché apparent de modules muraux unitisés est estimé avoir progressé de 83 p. 100. Le marché a ensuite augmenté de 96 p. 100 de janvier à juin 2012, comparativement à janvier à juin 2011.

87. Bien que les parties plaignantes aient bénéficié de 86 p. 100 de la croissance du marché de 2009 à 2011 et de 76 p. 100 de la croissance observée entre janvier à juin 2011 et janvier à juin 2012, leur part de marché a diminué de 95 p. 100 en 2009 à 83 p. 100 pour la période de janvier à juin 2012. À l'inverse, la part de marché des importations visées est passée de 3 p. 100 en 2009 à 15 p. 100 pour la période de janvier à juin 2012.

Rendement financier

88. Les parties plaignantes soutiennent que le dumping et le subventionnement des marchandises en question entraînent une diminution de la rentabilité depuis 2009. Elles allèguent que la perte de ventes au profit des marchandises en question à plus bas prix ou la conservation des ventes à des prix considérablement réduits se traduit déjà par une baisse de la rentabilité et continuera de se refléter dans les résultats financiers de 2013-2014 en raison du délai entre la commande et la livraison55. Néanmoins, les états financiers consolidés des parties plaignantes indiquent en effet une détérioration constante du rendement financier, à la fois au niveau de la marge brute unitaire et au niveau du revenu net avant impôts, de 2009 à juin 2012. Ces baisses vont de pair avec les pertes apparentes liées à des projets particuliers.

89. Le Tribunal conclut que les diminutions des ventes brutes découlant de la perte de ventes et de la baisse des prix alléguées ont contribué à cette réduction du rendement financier.

Autres indices de rendement

90. Il y a peu ou pas d'éléments de preuve concernant l'incidence sur d'autres facteurs économiques et indices de dommage prescrits, comme la productivité, le rendement sur capital investi, le flux de trésorerie, l'emploi et les salaires.

Menace de dommage

91. Le Tribunal examinera maintenant la question de savoir s'il y a indication raisonnable que le dumping et le subventionnement des marchandises en question menacent de causer un dommage. Les éléments de preuve présentés par les parties plaignantes se concentrent sur l'augmentation de la capacité, l'expansion des producteurs chinois, le ralentissement de la croissance économique en Chine, le ralentissement de la demande sur d'autres marchés extérieurs et la vigueur du marché immobilier au Canada.

92. En examinant la capacité disponible de la Chine, le Tribunal constate que les parties plaignantes ont déposé des éléments de preuve selon lesquels la capacité de production chinoise devrait passer de 22,7 millions de mètres carrés en 2011 à 37,1 millions de mètres carrés en 201556. Le taux d'utilisation de la capacité devrait également demeurer très élevé57. Ces estimations indiquent que la capacité disponible de la Chine représentera 3,2 millions de mètres carrés en 2014, soit suffisamment pour approvisionner deux fois le marché canadien58. En ce qui concerne la demande probable pour les marchandises en question, les parties plaignantes ont présenté certains articles qui prévoient une forte demande pour les biens à usage commercial au Canada « pendant une bonne partie de 2013 » [traduction] et prévoient « un nouveau cycle de construction [d'immeubles commerciaux] en 2013-2014 »59 [traduction]. Enfin, pour ce qui est de la disponibilité des marchés extérieurs pour absorber une augmentation de la capacité chinoise, les parties plaignantes ont également produit des éléments de preuve selon lesquels il est probable que la demande en Chine et sur d'autres marchés extérieurs, y compris le Proche-Orient et l'Europe, fléchisse60.

Résumé

93. Selon l'analyse qui précède, le Tribunal est convaincu que les éléments de preuve produits à l'appui de la plainte, particulièrement ceux qui portent sur certaines allégations de perte liée à des projets particuliers, indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé ou menacent de causer un dommage.

CONCLUSION

94. Par conséquent, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont causé ou menacent de causer un dommage.


1 . Allan Window Technologies (Allan), Ferguson Neudorf Glass Inc. (Ferguson), Flynn Canada Ltd. (Flynn), Inland Glass & Aluminum Ltd. (Inland), Oldcastle Building Envelope (Oldcastle), Sota Glazing Inc. (Sota), Starline Architectural Windows Ltd. (Starline), State Window Corporation (State), Toro Aluminum/Toro Glasswall Inc. (Toro) et Windsor Glass Company (1992) Ltd. (Windsor) (les parties plaignantes).

2 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-02.01, dossier administratif, vol. 1 aux pp. 116-126, 237-238; pièce du Tribunal PI-2012-006-05, dossier administratif, vol. 1D à la p. 168. Les parties plaignantes sont appuyées par 10 producteurs nationaux additionnels. Trois autres producteurs nationaux de modules muraux unitisés, Aluminum Window Designs Ltd., Basic Structures Engineering et Zimmcor, dont le nom est mentionné dans la plainte, appuient également les parties plaignantes mais n'ont pas déposé de lettre d'appui.

3 . Gaz. C. 2013.I.550.

4 . L.R.C. 1985, c. S-15 [LMSI].

5 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-05, dossier administratif, vol. 1F à la p. 178.

6 . Ibid. aux pp. 192-193.

7 . Ibid. aux pp. 178, 193.

8 . Modules muraux unitisés (14 septembre 2012), PI-2012-004 (TCCE) [Modules muraux unitisés I].

9 . Fournitures tubulaires pour puits de pétrole (23 mars 2010), NQ-2009-004 (TCCE) aux para. 210-216; Xanthates de toutes qualités, sous forme sèche ou liquide, à l'exclusion des xanthates de cellulose (4 mars 2003), NQ-2002-003 (TCCE) à la p. 11; Conteneurs thermoélectriques (11 décembre 2008), NQ-2008-002 (TCCE) au para. 144; Tapis produit sur machine à touffeter (7 avril 1993), CDA-92-1904-02 (groupe spécial binational).

10 . Ronald A. Chisholm Ltd. v. Deputy M.N.R.C.E. (1986), 11 CER 309 (FCTD).

11 . L'article 5 de l'Accord sur la mise en oeuvre de l'article VI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et l'article 11 de l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires de l'OMC exigent d'une autorité chargée d'une enquête qu'elle examine l'exactitude et l'adéquation des éléments de preuve fournis dans une plainte de dumping et de subventionnement afin de déterminer s'il y a des éléments de preuve suffisants pour justifier l'ouverture d'une enquête; une plainte sera rejetée ou une enquête sera close dès que l'autorité concernée sera convaincue que les éléments de preuve relatifs au dumping ou au dommage ne sont pas suffisants pour justifier la poursuite de la procédure, les affirmations non étayées ne constituant pas des éléments de preuve suffisants.

12 . Transformateurs à liquide diélectrique (22 juin 2012), PI-2012-001 (TCCE) au para. 86.

13 . D.O.R.S./84-927 [Règlement].

14 . (17 mars 2009), NQ-2008-003 (TCCE).

15 . (7 janvier 2005), NQ-2004-005 (TCCE), telles que modifiées dans Certaines pièces d'attache (6 janvier 2010), RR-2009-001 (TCCE) [Pièces d'attache].

16 . Extrusions d'aluminium aux para. 95-96.

17 . Les conclusions rendues dans Extrusions d'aluminium sont en vigueur depuis plus de quatre ans et celles rendues dans Pièces d'attache le sont depuis presqu'une décennie.

18 . Voir par exemple Raccords de tuyauterie en cuivre (19 février 2007), NQ-2006-002 (TCCE) au para. 48.

19 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-08.01, dossier administratif, vol. 3 au para. 22.

20 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2, pièce jointe 19 à la p. 117.

21 . Voir par exemple Caissons sans soudure en acier au carbone ou en acier allié pour puits de pétrole et de gaz (10 mars 2008), NQ-2007-001 (TCCE) aux para. 75-77; Fils machine de cuivre (28 mars 2007), NQ-2006-003 (TCCE) à la p. 9; Raccords de tuyauterie en cuivre au para. 72; Certains maïs-grain (7 mars 2001), NQ-2000-005 (TCCE) au para. 48.

22 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.02 (protégée), vol. 2B à la p. 18.

23 . L'alinéa 37.1(1)a) du Règlement prévoit qu'il doit être tenu compte du « volume des marchandises sous-évaluées ou subventionnées [...] par rapport à la production ou à la consommation de marchandises similaires ». Le Tribunal a comparé la valeur des importations indiquée par l'ASFC à la valeur de la production indiquée par les parties plaignantes.

24 . Il semble y avoir des incohérences dans les données sur la production, l'utilisation de la capacité et les ventes selon la valeur ou le volume par mètre carré.

25 . Ces estimations sont dites provenir d'information commerciale sur l'industrie. Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2, pièce jointe 6.

26 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-05, dossier administratif, vol. 1F à la p. 194.

27 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2 aux para. 206, 238-240; pièce jointe 7 à la p. 115.

28 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2 aux pp. 15-16; pièce du Tribunal PI-2012-006-08.02, dossier administratif, vol. 3A au para. 10.

29 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2 au para. 236; pièce jointe 7 à la p. 115.

30 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-08.02, dossier administratif, vol. 3A à la p. 91.

31 . Les coûts d'expédition et de vente au Canada ont été estimés comme la différence entre la valeur à l'exportation FAB des marchandises déclarée par l'ASFC et la valeur de vente réelle au Canada déclarée par les parties plaignantes.

32 . Plusieurs projets ont fait l'objet de soumissions de la part de nombreux producteurs nationaux. Par conséquent, cette méthode tient compte de la soumission initiale la plus concurrentielle d'une des parties plaignantes. Dans les cas où le promoteur ou l'architecte a révisé les spécifications d'une demande de propositions, les soumissions révisées ont été utilisées.

33 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2 aux pp. 161-163.

34 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol 2A aux pp. 40-41, 160.

35 . Cette méthode est considérée comme plus favorable aux parties plaignantes parce que le pourcentage de la marge de dumping est appliqué à la valeur de vente des marchandises en question, ce qui gonfle la « valeur normale » de vente des marchandises en question au Canada en incluant des coûts en sus de la valeur à l'exportation FAB, comme les majorations des coûts de fret et des prix de revente. De même, selon cette méthode, le montant moyen pondéré de subvention, exprimé en pourcentage du prix à l'exportation, est appliqué à la valeur de vente au Canada (ce qui suppose le subventionnement des coûts de fret et autres frais), contrairement à l'application d'un montant de subvention fixe par unité d'exportation, comme le Tribunal l'a fait selon la deuxième méthode.

36 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2A aux pp. 5-6, 70-71, 231-232.

37 . L'ASFC a déterminé que 100 p. 100 des marchandises avaient été sous-évaluées, mais que seulement 72 p. 100 des importations visées avaient été subventionnées. Deux des 11 allégations de perte de ventes non examinées par l'ASFC ne contiennent pas suffisamment de renseignements pour évaluer les soumissions.

38 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2A aux pp. 105-107, 161, 235

39 . Le montant de subvention a été estimé en multipliant le montant moyen de subvention par mètre carré tel que déterminé par l'ASFC par le nombre de mètres carrés du projet.

40 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2A aux pp. 7-8, 159

41 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2 aux pp. 163-164; pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 159

42 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2 aux pp. 167-168; pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2A aux pp. 42-43, 69-70, 235-236.

43 . Durant cette enquête préliminaire, le Tribunal avait suffisamment d'information afin d'examiner sous tous les angles les allégations de perte de ventes (les méthodes un et deux) comparativement à l'examen de base utilisé dans Modules muraux unitisés I (la méthode trois), qui donnait tout le bénéfice du doute aux producteurs canadiens. Puisque les résultats de l'analyse plus approfondie révèlent suffisamment d'éléments de preuve afin de justifier une enquête plus poussée sur le dommage allégué, il n'est pas nécessaire, en l'espèce, de considérer davantage la troisième méthode.

44 . Alternateurs électriques (14 juillet 1983), ADT-8-83 (TA) aux pp. 15-16.

45 . Turbines hydrauliques (19 août 1983), ADT-4B-76 (TA) à la p. 7.

46 . Comme indiqué précédemment, il est difficile de savoir ce que représente la valeur de production déclarée.

47 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2, pièce jointe 19 à la p. 117.

48 . Ibid.

49 . Ibid., pièce jointe 84 aux pp. 156-157.

50 . Le Tribunal constate que la plainte ne fournit pas de renseignements sur le nombre réel d'employés ou le montant des salaires payés par année pour chacune des parties plaignantes ni pour l'ensemble de celles-ci.

51 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2A aux pp. 42, 113, 238.

52 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2, pièce jointe 6 aux pp. 111-112.

53 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-05, dossier administratif, vol. 1F à la p. 194.

54 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01 (protégée), dossier administratif, vol. 2, pièce jointe 6 à la p. 112.

55 . Ibid. aux para. 231-234.

56 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-02.01, dossier administratif, vol. 1 au para. 257.

57 . Ibid.

58 . Ibid. au para. 258.

59 . Ibid. aux para. 286-287; pièce du Tribunal PI-2012-006-02.01, dossier administratif, vol. 1C, pièces jointes 100, 102.

60 . Pièce du Tribunal PI-2012-006-02.01, dossier administratif, vol 1 aux para. 264, 267, 277-279, pièce jointe 17; pièce du Tribunal PI-2012-006-03.01A (protégée), dossier administratif, vol. 2.01, pièce jointe 13.