RACCORDS DE TUYAUTERIE EN CUIVRE

Réexamens intermédiaires (article 76.01)


RACCORDS DE TUYAUTERIE EN CUIVRE
Réexamen intermédiaire no RD-2009-002

Ordonnance et motifs rendus
le vendredi 5 février 2010


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un réexamen intermédiaire, aux termes du paragraphe 76.01(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, des conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 19 février 2007, dans l’enquête no NQ-2006-002, concernant :

LE DUMPING DE RACCORDS DE TUYAUTERIE EN CUIVRE ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DES ÉTATS-UNIS D’AMÉRIQUE, DE LA RÉPUBLIQUE DE CORÉE ET DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE ET LE SUBVENTIONNEMENT DE RACCORDS DE TUYAUTERIE EN CUIVRE ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE

ORDONNANCE

Le 13 novembre 2009, Lee Brass a déposée une demande de réexamen intermédiaire des conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur dans l’enquête no NQ-2006-002 concernant le dumping de raccords de tuyauterie à souder, de types à pression et à drainage, renvoi et évent, faits en alliage de cuivre coulé, en alliage de cuivre ouvré ou en cuivre ouvré, utilisés dans le chauffage, la plomberie, la climatisation et la réfrigération, se limitant aux produits énumérés à l’annexe qui est jointe aux présentes conclusions (raccords de tuyauterie en cuivre), originaires ou exportés des États-Unis d’Amérique, de la République de Corée et de la République populaire de Chine et le subventionnement de raccords de tuyauterie en cuivre originaires ou exportés de la République populaire de Chine.

Aux termes des paragraphes 76.01(3) et 76.01(4) de la Loi sur les mesures spéciales d’exportation, le Tribunal canadien du commerce extérieur décide de ne pas procéder au réexamen intermédiaire des conclusions susmentionnées.

Pasquale Michaele Saroli
Pasquale Michaele Saroli
Membre présidant

Stephen A. Leach
Stephen A. Leach
Membre

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Membres du Tribunal :

Pasquale Michaele Saroli, membre présidant
Stephen A. Leach, membre
Jason W. Downey, membre

   

Directeur de la recherche :

Audrey Chapman

   

Agent principal de la recherche :

Nadine Apollon-Cabana

   

Agent de la recherche :

Michael W. Morden

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Nick Covelli

   

Adjoint au greffier :

Michel Parent

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le 13 novembre 2009, aux termes du paragraphe 76.01 de la Loi sur les mesures spéciales d’exportation 1 , le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) recevait de Lee Brass, un exportateur américain de raccords de tuyauterie en cuivre, une demande de réexamen intermédiaire des conclusions rendues par le Tribunal le 19 février 2007 dans l’enquête no NQ-2006-002, concernant le dumping de raccords de tuyauterie à souder, de types à pression et à drainage, renvoi et évent, faits en alliage de cuivre coulé, en alliage de cuivre ouvré ou en cuivre ouvré, utilisés dans le chauffage, la plomberie, la climatisation et la réfrigération, se limitant aux produits énumérés à l’annexe qui est jointe aux présentes conclusions (raccords de tuyauterie en cuivre), originaires ou exportés des États-Unis d’Amérique (États-Unis), de la République de Corée (Corée du Sud) et de la République populaire de Chine (Chine) et le subventionnement de raccords de tuyauterie en cuivre originaires ou exportés de la Chine.

2. Le 19 février 2007, aux termes des paragraphes 43(1) et 43(1.01) de la LMSI, le Tribunal concluait que:

le dumping des raccords de tuyauterie en cuivre originaires ou exportés des États-Unis, de la Corée du Sud et de la Chine et le subventionnement des raccords de tuyauterie en cuivre originaires ou exportés de la Chine avaient causé un dommage à la branche de production nationale;

le dumping des raccords de tuyauterie en cuivre originaires ou exportés des États-Unis avait causé un dommage à la branche de production nationale.

Les raccords de tuyauterie en cuivre suivants étaient exclus de ses conclusions de dommage : a) « 4 plomb 8 oz bride de toilette coulé à drainage » et b) « 4 plomb 14 oz bride de toilette coulé à drainage ».

3. Le 26 novembre 2009, le Tribunal déterminait que le dossier de la demande était complet aux termes du paragraphe 70(1) des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 2 . De plus, aux termes du paragraphe 70(2), le Tribunal informait les parties ayant participé à l’enquête no NQ-2006-002 et à l’enquête d’intérêt public no PB-2006-001 qu’il avait reçu une demande, tout en leur donnant la possibilité de présenter des observations concernant cette demande au plus tard le 14 décembre 2009.

4. Le 14 décembre 2009, NCI Marketing Inc. (NCI) et BMI Canada Inc. (BMI), deux importateurs de raccords de tuyauterie en cuivre, déposaient des observations au soutien de la demande. À la même date, Cello Products Inc. (Cello) et Bow Plumbing Group (Bow), deux producteurs nationaux de raccords de tuyauterie en cuivre, déposaient des observations à l’encontre de la demande.

OBSERVATIONS DES PARTIES

5. Dans sa demande, Lee Brass allègue que l’état de la production canadienne a changé depuis que les conclusions ont été rendues en 2007. Selon Lee Brass, Cello, le seul producteur de raccords de tuyauterie en cuivre au Canada au moment des conclusions, a cessé de produire ces marchandises et n’a donc plus besoin de la protection que lui offrent les conclusions. Plus particulièrement, Lee Brass cherche à obtenir l’exclusion des conclusions de certains raccords de tuyauterie en cuivre.

6. NCI et BMI font remarquer que la demande de Lee Brass ne comprend pas tous les raccords de tuyauterie en cuivre visés par les conclusions et soutiennent que si tous les raccords de tuyauterie en cuivre n’étaient pas produits au Canada, il n’y aurait aucune raison valable de maintenir en vigueur les conclusions visant des raccords de tuyauterie en cuivre coulé quelconques.

7. Cello et Bow soutiennent que Lee Brass n’a pas prouvé son allégation que Cello a cessé de produire des raccords de tuyauterie en cuivre. À cet égard, Cello précise que, bien qu’elle importe des raccords de tuyauterie en cuivre coulé, elle continue de produire des raccords de tuyauterie en cuivre coulé, et elle en a fourni la preuve3 . Cello soutient qu’elle a suspendu temporairement l’exploitation de sa fonderie le 31 mars 2009, étant donné une concurrence croissante des importations à bas prix, mais l’a depuis exploitée à l’occasion4 . Elle soutient qu’elle prévoit continuer l’exploitation de sa fonderie en fonction de la demande du marché et qu’elle ne prévoit pas la vendre5 . Cello soutient de plus que certains articles coulés sont d’ailleurs disponibles en provenance de la production nationale d’autres fonderies au Canada6 .

8. Le 23 décembre 2009, Lee Brass déposait un mémoire préparé en réponse à l’allégation de Cello qu’elle n’avait que temporairement cessé l’exploitation de sa fonderie. Plus particulièrement, Lee Brass met en doute l’allégation que Cello est en effet un producteur national dont l’exploitation limitée lui vaudrait une protection complète et, à la lumière de l’allégation de Cello, se demande si elle n’est pas plutôt un importateur de raccords de tuyauterie en cuivre coulé.

ANALYSE

Cadre législatif

9. Aux termes des paragraphes 76.01(1) et 76.01(3) de la LMSI, le Tribunal ne procède au réexamen intermédiaire de conclusions, en tout ou en partie, que si le demandeur le convainc du bien-fondé de celui-ci. Il incombe donc au demandeur d’en établir le bien-fondé.

10. Afin de déterminer si le demandeur l’a convaincu du bien-fondé d’un réexamen, le Tribunal tient compte de l’article 72 des Règles, qui prévoit ce sui suit :

En vue de déterminer le bien-fondé d’un examen intermédiaire aux termes de l’article 76.01 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, le Tribunal peut ordonner aux parties de lui fournir les renseignements concernant :

a) tout changement ou fait postérieur au prononcé de l’ordonnance ou des conclusions;

b) tout fait dont l’existence ne pouvait être connu lors des procédures originales par l’exercice d’une diligence raisonnable;

c) toute autre question pertinente.

11. De façon semblable, la Ligne directrice sur les réexamens intermédiaires du Tribunal prévoit de qui suit :

Un réexamen intermédiaire peut être fondé lorsqu’il y a une indication raisonnable que des faits nouveaux suffisants se sont produits ou qu’il y a eu un changement suffisant de la situation qui a mené à l’ordonnance ou aux conclusions. [...] Un réexamen intermédiaire peut également être fondé lorsqu’il y a des faits suffisants, bien qu’ils existaient, qui n’ont pas été examinés au moment du réexamen précédent ou de l’enquête et qui ne pouvaient être connus par l’exercice d’une diligence raisonnable à ce moment-là.

12. Le Tribunal a toujours soutenu qu’il ne procédera à un réexamen intermédiaire que s’il existe des raisons suffisamment impérieuses pour le convaincre de le faire. Des faits nouveaux ou un changement de la situation ne justifient pas, par eux-mêmes, un tel réexamen. Il s’agit plutôt de déterminer s’il existe des faits nouveaux ou un changement de la situation suffisants pour justifier un réexamen intermédiaire ou si des faits suffisants, même s’ils existaient au moment de l’enquête de dommage, n’ont pas été soumis en preuve à l’instance originale parce qu’il n’était pas possible de les connaître par l’exercice d’une diligence raisonnable7 .

13. Le Tribunal a d’ailleurs formulé le commentaire suivant en ce qui concerne les exigences auxquelles il faut satisfaire pour procéder à un réexamen intermédiaire :

Selon le Tribunal, les renseignements au dossier afférent à une demande doivent indiquer que, si un réexamen intermédiaire devait être tenu, il s’ensuivrait vraisemblablement une modification des conclusions ou de l’ordonnance. L’ouverture d’un réexamen intermédiaire pour des raisons moins probantes entraînerait un niveau d’incertitude inacceptable quant à la durée et à la robustesse de conclusions ou d’une ordonnance ainsi que des coûts pour les parties intéressées. Les procédures menées aux termes de la LMSI sont souvent complexes et onéreuses, et il ne serait pas raisonnable de permettre la réouverture d’une procédure, ou d’une partie d’une procédure, en s’appuyant sur une norme moins rigoureuse8 .

14. Il en va de même en ce qui concerne toute demande visant à obtenir l’annulation d’une ordonnance ou de conclusions au complet, où le demandeur doit indiquer qu’il est vraisemblable qu’une telle annulation se produira.

15. Autrement dit, la seule existence de faits nouveaux, de changement de la situation ou de faits qui existaient déjà mais qui ne pouvaient être connus par l’exercice d’une diligence raisonnable n’entraîne pas nécessairement un réexamen intermédiaire. À cet égard, de tels faits ou changement de la situation doivent indiquer qu’un réexamen intermédiaire donnerait lieu à la modification ou à l’annulation de l’ordonnance ou des conclusions en question.

État de la production nationale

16. Bien que Lee Brass, BMI et NCI affirment que la production nationale de raccords de tuyauterie en cuivre coulé a cessé, elles n’ont fourni que très peu de preuve, voire même aucune preuve, à l’appui de cette allégation.

17. M. Jason Aurini, vice-président de Cello, a fourni au Tribunal une déclaration, non contestée par Lee Brass, BMI ou NCI, par laquelle il assure le Tribunal que Cello n’a pas cessé de produire des raccords de tuyauterie en cuivre coulé et que, bien que Cello ait suspendu l’exploitation de sa fonderie en mars 2009, elle a intentionnellement produit un surplus de stocks de raccords de tuyauterie en cuivre et les a placés en inventaire afin de les usiner et de les finir plus tard, au besoin. M Aurini soutient que Cello continue d’avoir à son emploi ses travailleurs de fonderie et peut recommencer à l’exploiter pleinement en moins de deux heures. Effectivement, M. Aurini soutient aussi que Cello a produit des raccords de tuyauterie en cuivre en quantité limitée à tous les mois depuis mars 2009, en fonction de la demande. De plus, Cello soutient qu’elle ne prévoit pas vendre son matériel de fonderie et prévoit continuer à produire des raccords de tuyauterie en cuivre coulé au besoin9 .

18. Le Tribunal a déjà déclaré que la cessation provisoire de la production n’équivaut pas à la cessation de la production nationale. Dans Tôles d’acier au carbone laminées à chaud 10 , le Tribunal a examiné le cas d’un producteur national important qui avait annoncé la suspension de l’exploitation de ses installations de production. Un importateur a alors demandé un réexamen intermédiaire en soutenant que les tôles d’acier épaisses ne seraient plus produites au Canada. Le producteur national en question a répondu qu’il n’avait pas cessé sa production de tôles de façon définitive mais prévoyait reprendre son exploitation quand la conjoncture économique le permettrait. De plus, un autre producteur national avait déposé une certaine preuve selon laquelle il avait produit une certaine quantité de tôles épaisses à la demande d’un client et qu’il prévoyait reprendre la production. En décidant de ne pas modifier l’ordonnance pour exclure les tôles épaisses, le Tribunal a conclu que la preuve était insuffisante pour établir l’absence d’une production récente ou imminente de tôles épaisses au Canada.

19. Quand il applique le même raisonnement en l’espèce, le Tribunal n’est pas convaincu que la production nationale de raccords de tuyauterie en cuivre coulé a cessé de façon définitive.

Une seule catégorie de marchandises

20. Le Tribunal a tenu compte de sa décision dans l’enquête no NQ-2006-002 selon laquelle les raccords de tuyauterie en cuivre coulé et les raccords de tuyauterie en cuivre ouvré sont substituables et se font concurrence entre eux et qu’ils appartiennent donc à une seule catégorie de marchandises. Aucune preuve n’a été présentée en l’espèce démontrant qu’il y a eu un changement suffisant de la situation et aucun fait nouveau ne s’est produit qui pousserait le Tribunal à modifier ses conclusions à cet égard.

21. De plus, la preuve ne démontre pas que la production nationale de raccords de tuyauterie en cuivre ouvré a cessé ou a été suspendue. Au contraire, selon la déclaration non contestée de M. Aurini, Cello continue de produire des raccords de tuyauterie en cuivre ouvré. Bien que Cello importe certains raccords de tuyauterie en cuivre coulé, elle est un producteur national de raccords de tuyauterie en cuivre aux fins des conclusions du Tribunal11 . De plus, aucune partie n’a suggéré que Bow avait cessé ou suspendu la production de raccords de tuyauterie en cuivre ouvré.

22. Par conséquent, même si la production nationale de raccords de tuyauterie en cuivre coulé avait cessé de façon définitive, la production nationale de marchandises similaires continuerait. La modification des conclusions du Tribunal afin d’exclure les raccords de tuyauterie en cuivre coulé causerait vraisemblablement la reprise ou la poursuite du dumping de raccords de tuyauterie en cuivre ouvré. Un résultat de la sorte compromettrait l’effet correctif des conclusions du Tribunal et serait contraire à l’objet et au but de la LMSI.

DECISION

23. Pour les raisons qui précèdent, le Tribunal n’est pas convaincu du bien-fondé d’un réexamen intermédiaire et, aux termes des paragraphes 76.01(3) et 76.01(4) de la LMSI, il décide donc de ne pas procéder au réexamen intermédiaire de ses conclusions.


1 . L.R.C. 1985, c. S-15 [LMSI].

2 . S.O.R./91-499 [Règles].

3 . Déclaration protégée de Jason Aurini, 14 décembre 2009, à la p. 4.

4 . Ibid., au para. 5.

5 . Déclaration publique de Jason Aurini, 14 décembre 2009, à la p. 3.

6 . Déclaration protégée de Jason Aurini, 14 décembre 2009, à la p. 3.

7 . Voir Chaussures et semelles extérieures étanches en matière plastique ou en caoutchouc (10 octobre 2002), RD-2002-001 (TCCE) à la p. 2; Chaussures en cuir avec embout protecteur en métal (25 novembre 2005), RD-2005-001 (TCCE) aux para. 8-9; Barres d’armature pour béton (9 novembre 2005), RD-2005-002 (TCCE) aux para. 9-10.

8 . Voir Tapis produit sur machine à touffeter (21 août 2000), RD-2000-001 (TCCE) à la p. 3.

9 . Déclaration publique de Jason Aurini, 14 décembre 2009, à la p. 3

10 . (28 novembre 2003), RD-2002-006 (TCCE).

11 . La définition du terme « branche de production nationale » au paragraphe 2(1) de la LMSI accorde au Tribunal le pouvoir discrétionnaire de ne pas considérer les producteurs nationaux de marchandises similaires comme des producteurs nationaux, s’ils importent les marchandises sous-évaluées ou subventionnées. Dans l’enquête no NQ-2006-002, le Tribunal a déterminé que Cello devait être considérée comme un producteur national malgré ses importations de raccords de tuyauterie en cuivre.