BOTTES ET SOULIERS EN CUIR ET AUTRES QU'EN CUIR POUR DAMES

Demandes de réexamens (article 76)


BOTTES ET SOULIERS EN CUIR POUR DAMES, ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DU BRÉSIL, DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE ET DE TAIWAN; BOTTES EN CUIR POUR DAMES, ORIGINAIRES OU EXPORTÉES DE LA POLOGNE, DE LA ROUMANIE ET DE LA YOUGOSLAVIE; ET BOTTES ET SOULIERS AUTRES QU'EN CUIR POUR DAMES, ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE ET DE TAIWAN
Demande de réexamen no : RD-93-004

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le mardi 8 mars 1994

Demande de réexamen no : RD-93-004

EU ÉGARD À une demande de réexamen, aux termes du paragraphe 76(2) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, des conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 3 mai 1990 dans le cadre de l'enquête no NQ-89-003;

CONCERNANT des bottes et souliers en cuir pour dames, originaires ou exportés du Brésil, de la République populaire de Chine et de Taiwan; des bottes en cuir pour dames, originaires ou exportées de la Pologne, de la Roumanie et de la Yougoslavie; et des bottes et souliers autres qu'en cuir pour dames, originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de Taiwan.

O R D O N N A N C E

Le Tribunal conclut par la présente, aux termes du paragraphe 76(3.1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, qu'il n'y a pas lieu, sur la foi des renseignements déposés par le demandeur, de procéder à un réexamen.

Lise Bergeron
_________________________
Lise Bergeron
Membre présidant


Anthony T. Eyton
_________________________
Anthony T. Eyton
Membre


Michèle Blouin
_________________________
Michèle Blouin
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire

Date de l'ordonnance et
des motifs : Le 8 mars 1994

Membres du Tribunal : Lise Bergeron, membre présidant
Anthony T. Eyton, membre
Michèle Blouin, membre

Directeur de la recherche : Réal Roy

Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

Le 3 mai 1990, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a conclu que : 1) le dumping au Canada des bottes en cuir pour dames, originaires ou exportées du Brésil, de la Pologne, de la Roumanie et de la Yougoslavie et des bottes en cuir et autres qu'en cuir originaires ou exportées de la République populaire de Chine et de Taiwan, et le subventionnement des bottes en cuir pour dames en provenance du Brésil avaient causé, causaient et étaient susceptibles de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires; et 2) le dumping au Canada des souliers en cuir pour dames, originaires ou exportés du Brésil et des souliers en cuir et autres qu'en cuir pour dames, originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de Taiwan, et le subventionnement des souliers en cuir pour dames en provenance du Brésil avaient causé, causaient et étaient susceptibles de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires. Les conclusions susmentionnées ne visaient pas les sandales, les pantoufles, les chaussures de sport, les chaussures en caoutchouc imperméable, les chaussures en plastique imperméable, les chaussures de sécurité avec bouts protecteurs en métal, les chaussures orthopédiques, les souliers en bois, les chaussures jetables, les chaussures de quilles, les chaussures de curling, les bottes de moto-cross et les chaussures en toile.

M. Michael Wagen, de la société Delmar International Inc. (le demandeur), a demandé au Tribunal, dans une lettre datée du 9 septembre 1993, de réexaminer les conclusions susmentionnées aux termes de l'article 76 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation [1] (la LMSI), pour ce qui est de leur application aux «chaussures de sport».

Aux termes du paragraphe 70(2) des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [2] , le Tribunal a informé au moyen d'une lettre datée du 19 novembre 1993 toutes les parties à l'enquête de la réception de la demande et a donné aux parties la possibilité de présenter des observations au sujet de la demande. Le Tribunal a reçu des exposés du procureur représentant l'Association des manufacturiers de chaussures du Canada (l'AMCC), la partie plaignante lors de l'enquête, de l'Association canadienne des détaillants en chaussures, un comité du Conseil canadien du commerce de détail qui représente les rayons de chaussures (le comité de la chaussure) et de l'Association canadienne des importateurs de chaussures Inc. (l'ACIC), un sous-comité de l'Association des importateurs canadiens Inc.

EXPOSÉ DU DEMANDEUR

Le demandeur a formulé la demande de réexamen au nom des sociétés Adidas Canada Ltée, The Indeka Group, Nike Canada Ltée, RMP Athletic Locker Ltd., Reebok Canada Inc. et Wolverine Canada Inc. Toutes ces entreprises importent des chaussures de sport haute performance vendues sous marque. Ces chaussures sont conçues avec des caractéristiques spéciales qui les rendent tout particulièrement appropriées à la pratique de sports précis comme le basket-ball, le volley-ball, le squash, la balle au mur, la course à pied et la danse aérobique. Le demandeur a soutenu que les chaussures de sport haute performance vendues sous marque ne sont pas fabriquées au Canada et ont été exclues des conclusions.

Le demandeur a fait valoir qu'à la fin de 1992, à la suite de la décision rendue par le Tribunal aux termes de l'article 61 de la LMSI dans la cause J.V. Marketing Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [3] , qui portait sur des chaussures de marche de santé, le ministère du Revenu national (Revenu Canada) a commencé à imposer des droits antidumping sur des chaussures de sport haute performance vendues sous marque importées par les clients du demandeur, si ces chaussures n'étaient pas commercialisées en tant que chaussures haute performance pour la course, le jogging ou le tennis.

Le demandeur a soutenu que le Tribunal doit réexaminer les conclusions qu'il a rendues dans la cause Bottes et souliers en cuir pour dames dans le but exprès d'élargir la portée de l'exclusion au regard des chaussures de sport afin d'inclure les chaussures de sport haute performance vendues sous marque. De plus, il a allégué que les chaussures de sport haute performance vendues sous marque pouvaient être éliminées de la portée des conclusions en élargissant la définition de chaussures de sport pour y inclure les chaussures de sport haute performance vendues sous marque qui sont achetées à un prix F.A.B. supérieur à un niveau donné. Cela, a-t-il prétendu, permettrait d'exclure des conclusions du Tribunal, de façon claire et incontestée, les chaussures de sport haute performance vendues sous marque qui se distinguent des «trotteurs».

EXPOSÉ DE LA PARTIE PLAIGNANTE

L'AMCC a demandé au Tribunal de ne pas procéder à un réexamen des conclusions pour le moment. Elle a souligné, entre autres, que : 1) lorsque l'AMCC a inclus de sa propre initiative dans sa plainte les «chaussures de sport» au nombre des six catégories de chaussures à exclure, l'objectif était d'exclure de la plainte les marchandises décrites comme des «chaussures de sport» dans le Système harmonisé de description et de codification des marchandises [4] ; 2) les circonstances n'ont pas changé (comme par exemple la fin de la production au Canada), ce qui aurait justifié un réexamen à ce moment-ci d'une sous-catégorie de chaussures de sport haute performance vendues sous marque; 3) tout différend concernant la définition de chaussures de sport haute performance vendues sous marque doit être réglé entre les importateurs et Revenu Canada, et ce serait abuser du processus de réexamen des conclusions de préjudice que d'y avoir recours pour régler un différend concernant le classement que le Tribunal n'a pas suscité; et 4) les conclusions devront être réexaminées dans leur ensemble d'ici 17 mois, et un réexamen portant seulement sur une partie des conclusions de préjudice assujettirait l'AMCC, et peut-être d'autres parties intéressées, à un doublement des efforts et des dépenses. L'AMCC a exhorté le Tribunal à ne pas procéder à un réexamen à ce moment-ci et d'attendre le réexamen global qui doit être fait avant l'expiration de cinq ans suivant la date des conclusions.

EXPOSÉS DES IMPORTATEURS

Dans son exposé, le comité de la chaussure a indiqué que les détaillants de chaussures sont mécontents de l'interprétation restrictive de l'exclusion des chaussures de sport faite par Revenu Canada et ne croient pas que cette interprétation soit conforme aux intentions des parties lors de l'enquête de 1990 ou aux conclusions rendues par le Tribunal. Toutefois, les détaillants de chaussures n'appuient pas la demande de réexamen dans la mesure où le réexamen tente de régler la question sur la base des prix arrondis ou du rendement. De plus, le comité de la chaussure a déclaré qu'il craignait qu'un réexamen à ce moment-ci ne soit pas dans l'intérêt de ses membres puisqu'il pourrait prolonger l'application de l'ensemble des conclusions de cinq autres années à compter de la date de la décision découlant du réexamen. En outre, il serait difficile pour les détaillants de chaussures de participer à un réexamen à ce moment-ci, ces derniers n'ayant pas prévu la tenue d'un tel réexamen avant 1995. Le comité de la chaussure a proposé de reporter la question de l'exclusion des chaussures de sport jusqu'au réexamen complet qui doit avoir lieu en 1995.

Enfin, dans son exposé dans lequel elle s'est opposée au réexamen des conclusions, l'ACIC a affirmé qu'en dépit du fait que les membres de l'association appuient l'initiative du demandeur et qu'ils croient que l'exclusion des chaussures de sport des conclusions ne doit pas s'appliquer uniquement aux chaussures de sport haute performance, un réexamen portant uniquement sur les chaussures de sport à ce moment-ci compromettrait le réexamen de l'ensemble des conclusions prévu pour 1995.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le demandeur a formulé une demande de réexamen pour faire préciser l'interprétation par Revenu Canada de l'expression «chaussures de sport» dans les conclusions rendues par le Tribunal dans la cause Bottes et souliers en cuir pour dames. Ces conclusions n'incluent pas ce qui suit :

les sandales, les pantoufles, les chaussures de sport, les chaussures en caoutchouc imperméable, les chaussures en plastique imperméable, les chaussures de sécurité avec bouts protecteurs en métal, les chaussures orthopédiques, les souliers en bois, les chaussures jetables, les chaussures de quilles, les chaussures de curling, les bottes de moto-cross et les chaussures en toile.

Dans l'exposé des motifs de la cause Bottes et souliers en cuir pour dames, l'expression «chaussures de sport» est définie, à la page 4, comme suit :

Les chaussures de sport étaient généralement définies comme des chaussures conçues pour le sport et qui comportaient, ou pouvaient comporter, des crampons, des bouts, des butoirs, des boucles, des bandes, etc. Ces chaussures englobaient également les bottes de patinage, les bottes de ski, les chaussures de ski de fond, les bottes de lutte, les bottes de boxe, les bottes de cyclisme, les souliers de quilles, les souliers de curling et les bottes de moto-cross. Aux fins de la présente enquête, les chaussures de sport comprenaient également les souliers de tennis, de jogging et de course.

De l'avis du Tribunal, la question que le demandeur a portée devant le Tribunal aux fins de réexamen n'est pas liée aux conclusions de préjudice rendues par le Tribunal, mais à l'interprétation par Revenu Canada de l'expression «chaussures de sport» dans l'exclusion des conclusions du Tribunal.

Dans une ordonnance rendue récemment dans la cause Bicyclettes assemblées ou démontées, et cadres de bicyclettes, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, originaires ou exportés de Taiwan et de la République populaire de Chine [5] , le Tribunal a fait connaître ses vues sur l'objectif de la LMSI en ce qui a trait aux réexamens de conclusions en vigueur et sur les conditions qui justifient de tels réexamens :

Aux termes du paragraphe 76(3) de la LMSI, le Tribunal ne fait droit à une demande de réexamen des conclusions déposée par une personne ou par un gouvernement que si le demandeur le convainc du bien-fondé de celle-ci. Par conséquent, les renseignements fournis par cette personne ou par ce gouvernement doivent être de nature à répondre à cette condition préliminaire imposée par la loi. Le Tribunal doit être convaincu, sur la foi des faits que lui présentent les parties intéressées par le réexamen, qu'un réexamen est justifié.

Le réexamen de conclusions de préjudice envers la production canadienne vise, aux termes de l'article 76 de la LMSI, à déterminer s'il y a des motifs de proroger, de modifier ou d'annuler les conclusions. De tels motifs existeraient si, par exemple, les conditions qui ont donné lieu au préjudice ont changé sensiblement, si bien que les conclusions ne sont plus appropriées, en tout ou en partie. Les renseignements pertinents en cas de réexamen peuvent comprendre, par exemple, les changements survenus dans la structure de l'industrie, dans les circonstances financières, et dans les schémas de commercialisation ou de consommation. Toutefois, en l'absence d'au moins une indication raisonnable de tels changements de circonstances, procéder à un réexamen n'est guère utile [6] .

Tel qu'énoncé dans l'ordonnance sur les Bicyclettes, le Tribunal a affirmé qu'il pouvait procéder à un réexamen s'il était convaincu que les circonstances au sein de l'industrie ont changé sensiblement de manière à modifier les fondements des conclusions rendues dans la cause Bottes et souliers en cuir pour dames, justifiant ainsi le réexamen d'une partie au moins des conclusions.

Dans sa demande de réexamen, le demandeur n'a pas fourni de motifs permettant d'établir que les circonstances ont changé depuis les conclusions de manière à modifier les fondements des conclusions. Le demandeur, par exemple, ne soutient pas que l'industrie nationale a cessé de produire des chaussures de sport haute performance vendues sous marque puisque, à sa connaissance, ces chaussures n'ont jamais été produites au Canada.

Le Tribunal est d'avis que le demandeur devrait interjeter appel aux termes du paragraphe 61(1) de la LMSI. Plusieurs appels ont été portés devant le Tribunal en application du paragraphe 61(1) de la LMSI depuis les conclusions rendues dans la cause Bottes et souliers en cuir pour dames, dans le but de contester l'interprétation des expressions «chaussures de sport» et «sandales» faite par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise. Ces causes comprennent J.V. Marketing Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [7] , M & M Trading Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [8] , Chaussures Aldo Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [9] et, plus récemment, Les Importations APR Ltée c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [10] . Dans cette dernière cause, le Tribunal a déclaré :

De l'avis du Tribunal, l'expression «chaussures de sport» est une vaste description qui peut inclure toute chaussure conçue, fabriquée, commercialisée ou utilisée pour la pratique de sports [11] .

Le Tribunal n'est pas convaincu, sur la foi des renseignements déposés par le demandeur, qu'il y a lieu de procéder à un réexamen, et rend, par la présente, une ordonnance à cet effet aux termes du paragraphe 76(3.1) de la LMSI.


1. L.R.C. (1985), ch. S-15.

2. DORS/91-499, le 14 août 1991, Gazette du Canada Partie II, vol. 125, no 18 à la p. 2912.

3. Appel no AP-91-188, le 1er septembre 1992. Il s'agissait dans cet appel de déterminer si certaines chaussures pour dames, originaires de Taiwan et importées au Canada, étaient des marchandises de la même description que celles assujetties aux conclusions du Tribunal. L'avocat de la société J.V. Marketing Inc. soutenait que les chaussures étaient exclues des conclusions puisqu'il s'agissait de chaussures de sport. L'appel a été rejeté.

4. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1987.

5. Tribunal canadien du commerce extérieur, demande de réexamen no RD-93-001, le 17 septembre 1993.

6. Ibid. aux pp. 2-3.

7. Supra, note 3.

8. Appels nos AP-92-045 et AP-92-075, le 9 septembre 1993.

9. Appel no AP-93-010, le 20 janvier 1994.

10. Appel no AP-93-141, le 28 février 1994. Dans cet appel, le Tribunal a conclu que les chaussures décrites comme des souliers de court pour dames et conçues pour le jogging, la course, le tennis et le badminton étaient des «chaussures de sport» et, par conséquent, étaient exclues des conclusions rendues dans la cause Bottes et souliers en cuir pour dames.

11. Ibid. à la p. 4.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 12 août 1997