AIL FRAIS

Demandes de réexamens (article 76)


LE DUMPING AU CANADA DE L’AIL FRAIS ORIGINAIRE OU EXPORTÉ DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE
Demande de réexamen no : RD-97-002

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le lundi 24 novembre 1997

EU ÉGARD À une demande de réexamen, aux termes du paragraphe 76(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, des conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 21 mars 1997 dans le cadre de l’enquête no NQ-96-002;

CONCERNANT le dumping au Canada de l’ail frais originaire ou exporté de la République populaire de Chine.

O R D O N N A N C E

Le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut par la présente, sur la foi des renseignements déposés par la Garlic Growers Association of Ontario, qu’il n’y a pas lieu de procéder à un réexamen et rend une ordonnance en ce sens conformément au paragraphe 76(3.1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation.

Robert C. Coates, c.r.
_________________________
Robert C. Coates, c.r.
Membre présidant


Raynald Guay
_________________________
Raynald Guay
Membre


Charles A. Gracey
_________________________
Charles A. Gracey
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire






Date de l’ordonnance et des motifs : Le 24 novembre 1997

Membres du Tribunal : Robert C. Coates, c.r., membre présidant
Raynald Guay, membre
Charles A. Gracey, membre

Directeur de la recherche : Selik Shainfarber

Avocats pour le Tribunal : Joël J. Robichaud
Heather A. Grant

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

Le 21 mars 1997, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a conclu que le dumping au Canada de l’ail frais originaire ou exporté de la République populaire de Chine (la Chine) avait causé un dommage sensible à la branche de production nationale [1] . Les conclusions s’appliquaient uniquement à l’ail frais importé de la Chine du 1er juillet au 31 décembre, inclusivement, de chaque année civile. Cette dernière partie des conclusions a pour effet de permettre l’entrée en franchise au Canada de l’ail chinois durant la période de janvier à juin de chaque année civile.

Dans une lettre datée du 7 août 1997, aux termes du paragraphe 76(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation [2] (LMSI), la Garlic Growers Association of Ontario (GGAO) a demandé un réexamen des conclusions susmentionnées. La GGAO a demandé que le Tribunal procède immédiatement au réexamen des conclusions qu’il avait rendues et rende une ordonnance modifiant les conclusions pour imposer des droits antidumping durant toute l’année.

Le 12 septembre 1997, le Tribunal a reçu une réponse de la China Chamber of Commerce of Importers & Exporters of Foodstuffs, Native Produce and Animal By-Products (la Chambre de commerce chinoise) dans laquelle elle fait opposition à la demande de la GGAO.

EXPOSÉ DE LA GGAO

Dans leur exposé au Tribunal, les avocats de la GGAO soutiennent que des éléments de preuve montrent que les conclusions du Tribunal sont contournées, ce qui cause et menace de causer un dommage sensible continu à la branche de production canadienne de l’ail. Les avocats indiquent que le contournement prend la forme de l’importation d’une très grande quantité d’ail frais en provenance de la Chine immédiatement avant la période visée dans les conclusions, ce qui sape l’allégement accordé par le Tribunal à la branche de production canadienne de l’ail. De plus, les avocats observent que, au moment des conclusions, le Tribunal a considéré que le contournement n’était qu’une faible possibilité et a donc rendu des conclusions qui s’appliquent uniquement aux importations du 1er juillet au 31 décembre, inclusivement. Les avocats indiquent que les faits démontrent maintenant que le contournement a effectivement eu lieu et constitue maintenant une réalité certaine. Sur la foi de ce qui précède, les avocats soutiennent qu’un réexamen du Tribunal peut se faire selon la procédure expéditive et qu’une audience ne sera pas nécessaire.

EXPOSÉ DE LA CHAMBRE DE COMMERCE CHINOISE

Les avocats de la Chambre de commerce chinoise soutiennent que le volume des importations d’ail frais en provenance de la Chine entre le 1er janvier et le 30 juin 1997 n’est pas « massif », contrairement à ce que l’a laissé entendre la GGAO. Ils soutiennent que les cultivateurs d’ail canadiens n’ont pas subi et ne subiront pas de dommage sensible attribuable au volume d’ail importé de la Chine entre le 1er janvier et le 30 juin 1997, inclusivement, parce que les droits antidumping imposés à la suite des conclusions seront plus que suffisants pour donner aux cultivateurs d’ail canadiens l’occasion de vendre toute leur récolte de 1997 durant la période de juillet à décembre 1997 sans devoir faire concurrence à l’ail « sous-évalué » de la Chine. Les avocats soutiennent qu’il n’est pas nécessaire de modifier les conclusions puisque la GGAO n’a pas présenté d’élément de preuve pour montrer que les cultivateurs d’ail canadiens seront capables d’approvisionner le marché canadien de l’ail durant la période du 1er janvier au 30 juin de chaque année civile. En tout état de cause, la demande de la GGAO est prématurée, puisque le Tribunal n’a pas eu l’occasion de déterminer si les conclusions avaient produit l’effet recherché.

ANALYSE

Aux termes de la LMSI, le Tribunal peut réexaminer une ordonnance ou des conclusions à la demande d’une personne ou d’un gouvernement. Plus précisément, le paragraphe 76(2) de la LMSI prévoit ce qui suit :

Le Tribunal peut, de sa propre initiative ou à la demande du sous-ministre, de toute autre personne ou d’un gouvernement, réexaminer une ordonnance ou des conclusions rendues en vertu des articles 3 à 6 [de la LMSI] et à cette fin, accorder une nouvelle audition sur toute question.

Le paragraphe 76(3) de la LMSI prévoit que le Tribunal ne fait droit à une demande de réexamen présentée par une personne ou un gouvernement que si le demandeur le convainc du bien-fondé de celle-ci. Pour décider si un réexamen « avant la publication d’un avis d’expiration » par opposition à un réexamen « à l’expiration » [3] , est justifié, le Tribunal examine s’il existe une indication raisonnable que les conditions qui ont donné lieu à l’ordonnance ou aux conclusions initiales ont changé à un point tel que le bien-fondé du maintien de l’ordonnance ou des conclusions est mis en question. De tels changements sont normalement liés à l’un des éléments essentiels qui fondent l’ordonnance ou les conclusions [4] .

Le Tribunal a entrepris des réexamens avant la publication d’un avis d’expiration dans des causes où il existait une indication raisonnable que la branche de production nationale en question avait mis fin à sa production de certaines ou de toutes les marchandises visées dans les conclusions, ou l’avait considérablement réduite [5] . Dans le cadre du réexamen no RR-94-001 [6] , par exemple, le Tribunal a entrepris un réexamen après avoir reçu des renseignements qui donnaient une indication raisonnable que la Colombie-Britannique n’était plus un marché régional pour la bière, comme il avait été déterminé dans le cadre des conclusions initiales.

En l’espèce, la GGAO a soulevé la question du « contournement » des conclusions du Tribunal sous la forme de l’importation d’une grande quantité d’ail frais en provenance de la Chine avant la période visée dans les conclusions et l’incidence que l’entrée au Canada des marchandises susmentionnées aura sur la branche de production canadienne de l’ail. Plus précisément, la GGAO soutient que, de janvier à juin 1997, par rapport à la même période en 1996, le volume des importations d’ail frais de la Chine a plus que doublé, passant d’environ 8 p. 100 du volume annuel des importations chinoises à environ 19 p. 100 du volume annuel des importations. L’augmentation, d’une année par rapport à l’autre, pour la période de six mois susmentionnée a fondamentalement été attribuable au décuplement des importations dans un seul mois, soit juin 1997 (660 000 kg), par rapport à juin 1996 (66 000 kg).

Le Tribunal est sensible aux préoccupations de la GGAO et considère que tout changement dans le mode et le volume des importations de l’ail frais en provenance de la Chine, au cours de la période de six mois durant laquelle les conclusions ne s’appliquent pas, qui se poursuit de manière soutenue, est une question qu’il faut prendre très sérieusement. Cependant, bien que l’augmentation d’environ 600 000 kg soit importante sur une base mensuelle, cette quantité est moins importante lorsqu’elle est considérée en termes de la consommation nationale mensuelle d’ail frais ou de la taille globale du marché canadien et du volume total des importations chinoises. Plus précisément, les 600 000 kg ne représentent environ que les trois quarts de la consommation d’un mois, environ 6 p. 100 du marché canadien et 10 p. 100 des importations chinoises, ces proportions étant toutes fondées sur les données de 1996.

Bien que le Tribunal reconnaisse que, dans son exposé des motifs daté du 7 avril 1997, il a tenu compte de l’argument des avocats de la GGAO concernant la possibilité de contournement de ses conclusions par la Chine, le Tribunal est d’avis que ce simple fait ne justifie pas la tenue d’un réexamen de ses conclusions.

Dans l’ensemble, le Tribunal n’est pas convaincu qu’un des éléments essentiels qui fondent ses conclusions a changé. Le Tribunal ne conclut pas qu’il y a eu des changements structuraux fondamentaux de la dynamique de la branche de production canadienne ou chinoise de l’ail.

CONCLUSION

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal n’est pas convaincu qu’il y a lieu de procéder présentement à un réexamen et rend, par la présente, une ordonnance en ce sens conformément au paragraphe 76(3.1) de la LMSI.


1. L’ail frais originaire ou exporté de la République populaire de Chine, enquête no NQ-96-002, Conclusions, le 21 mars 1997, Exposé des motifs, le 7 avril 1997.

2. L.R.C. (1985), ch. S - 15.

3. Un réexamen « à l’expiration » est tenu dans la dernière année du délai d’application de cinq ans des conclusions pour déterminer si les conclusions doivent être annulées ou prorogées, avec ou sans modification.

4. Voir, par exemple, la demande de réexamen sur les Bicyclettes assemblées ou démontées, et cadres de bicyclettes, avec des roues d’un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, originaires ou exportés de Taiwan et de la République populaire de Chine , demande de réexamen no RD-93-001, Ordonnance et Exposé des motifs, le 17 septembre 1993.

5. Voir, par exemple, l’Avis de réexamen des conclusions de préjudice au sujet de certains moteurs à induction , réexamen no RR-93-004, le 11 février 1994.

6. Boisson de malt, communément appelée bière, d’une teneur alcoolique en volume d’au moins 1 p. 100 et d’au plus 6 p. 100, en bouteilles ou en boîtes d’au plus 1 180 mL (40 oz), originaire ou exportée des États-Unis d’Amérique par Pabst Brewing Company, G. Heileman Brewing Company Inc. et The Stroh Brewery Company, leurs successeurs et ayants droit, ou en leur nom, pour utilisation ou consommation dans la province de la Colombie-Britannique, Ordonnance et Exposé des motifs, le 2 décembre 1994.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 24 novembre 1997