BICYCLETTES ET CADRES DE BICYCLETTES

Réexamens relatifs à l'expiration (article 76.03)


BICYCLETTES ET CADRES DE BICYCLETTES ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DU TAIPEI CHINOIS (DÉSIGNÉ AUPARAVANT COMME TAÏWAN) ET DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE
Réexamen relatif à l'expiration no RR-2002-001


TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 9 décembre 2002

Réexamen relatif à l'expiration no RR-2002-001

EU ÉGARD À un réexamen relatif à l'expiration, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, de l'ordonnance rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 10 décembre 1997, dans le cadre du réexamen no RR-97-003, prorogeant, avec modification, les conclusions qu'il a rendues le 11 décembre 1992, dans le cadre de l'enquête no NQ-92-002, concernant les :

BICYCLETTES ET CADRES DE BICYCLETTES ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DU TAIPEI CHINOIS (DÉSIGNÉ AUPARAVANT COMME TAÏWAN) ET DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE

ORDONNANCE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, a procédé à un réexamen relatif à l'expiration de l'ordonnance qu'il a rendue le 10 décembre 1997, dans le cadre du réexamen no RR-97-003, concernant les bicyclettes assemblées ou démontées, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, originaires ou exportées du Taipei chinois (désigné auparavant comme Taïwan) et de la République populaire de Chine, à l'exclusion des bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou République populaire de Chine est supérieur à 325 $ CAN, et les cadres de bicyclettes originaires ou exportés des pays susmentionnés, à l'exclusion des cadres de bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou République populaire de Chine est supérieur à 100 $ CAN.

Aux termes de l'alinéa 76.03(12)b) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur, par la présente :

1) proroge son ordonnance concernant les bicyclettes assemblées ou démontées, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, originaires ou exportées du Taipei chinois et de la République populaire de Chine, avec une modification afin d'exclure les bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou République populaire de Chine est supérieur à 225 $ CAN et d'exclure les bicyclettes avec cadres et potences pliables originaires ou exportées du Taipei chinois et de la République populaire de Chine;

2) proroge son ordonnance concernant les cadres de bicyclettes, originaires ou exportés des pays susmentionnés, avec une modification afin d'exclure les cadres de bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou République populaire de Chine est supérieur à 50 $ CAN.



Ellen Fry

Ellen Fry
Membre présidant


Richard Lafontaine

Richard Lafontaine
Membre


James A. Ogilvy

James A. Ogilvy
Membre


Michel P. Granger
Michel P. Granger
Secrétaire

 

 

Loi sur les mesures spéciales d'importation-Déterminer s'il y a lieu d'annuler ou de proroger, avec ou sans modification, l'ordonnance rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 10 décembre 1997, dans le cadre du réexamen no RR-97-003.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Dates de l'audience :

Du 21 au 24 octobre 2002

Date de l'ordonnance et des motifs :

Le 9 décembre 2002

   

Membres du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

 

Richard Lafontaine, membre

 

James A. Ogilvy, membre

   

Directeur de la recherche :

Réal Roy

   

Gestionnaire de la recherche :

Richard Cossette

   

Recherchiste :

Joël J. Joyal

   

Économiste :

Ihn Ho Uhm

   

Préposés aux statistiques :

Shawn Jeffrey

 

Julie Charlebois

 

Marie-Josée Monette

   

Conseiller pour le Tribunal :

Marie-France Dagenais

   

Agent du greffe :

Ingrid Sherling

Participants :

 

C.J. Michael Flavell, c.r.

   

Geoffrey C. Kubrick

   

J. Peter Jarosz

   

Yasir A. Naqvi

   

Jin Han

   

Robert Shum

   

Martin G. Masse

 

pour

Canadian Bicycle Manufacturers Association

     
   

Alain Poirier

   

Syndicat des Métallos

     
   

(Association des producteurs nationaux-autre partie)

     
   

Darrel H. Pearson

   

Jesse I. Goldman

   

Eli Fellman

   

Peter Collins

 

pour

Zellers Inc.

   

La Société Canadian Tire Limitée

     
   

Peter Clark

   

Chris Hines

   

Gordon LaFortune

   

Sean Clark

 

pour

A. Mordo & Son Ltd.

   

Liyang Machinery Ltd.

     
   

Elio Moracci

   

Genesis Cycle Inc.

     
   

D.H. Tseng

   

Taiwan Bicycle Exporters' Association

     
   

Paul K. Lepsoe

   

Grant R. Poulsen

 

pour

Specialized Bicycle Components Canada, Inc.

     
   

Gary Duke

   

Dukes Cycle

     
   

Jim McFarland

   

McBride Cycle

     
   

Stuart James

   

Jacob Heilbron

   

Martin Vellend

   

Canadian Association of Specialty Bicycle Importers

     
   

(Importateurs-autres parties)

Témoins :

Raymond Dutil
Président
Groupe Procycle Inc.

Daniel Maheux
Directeur des finances
Groupe Procycle Inc.

   

Kenneth B. Morrison
Vice-président, Finances
Les Industries Raleigh du Canada Limitée

Louis Nolet
Chef des opérations-contrôleur
Victoria Précision Inc.

   

Lawrence McBrearty
Directeur national
Métallurgistes Unis d'Amérique

Denis Cyr
Syndicat des Métallos

   

Jacques Rancourt
Syndicat des Métallos

Bruce Winder
Chef de catégorie, vélos, appareils d'exercice et sports d'action-Articles de sports
La Société Canadian Tire Limitée

   

John Simpson
Acheteur-Articles de sports
Zellers Inc.

Steve Hardie
Acheteur-Articles de sports
Zellers Inc.

   

Hubert Lippé
The Lippé Group

Larry Koury
Directeur général
Specialized Canada, Inc.

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

 

 

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

Il s'agit d'un réexamen relatif à l'expiration, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation 1 , de l'ordonnance rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) le 10 décembre 1997, dans le cadre du réexamen no RR-97-003, concernant les bicyclettes et cadres de bicyclettes originaires ou exportés du Taipei chinois (désigné auparavant comme Taïwan) et de la République populaire de Chine (Chine).

Le 8 février 2002, conformément aux termes du paragraphe 76.03(2) de la LMSI, le Tribunal a publié un avis d'expiration2 informant les parties intéressées que l'ordonnance qu'il avait rendue le 10 décembre 1997 allait expirer le 9 décembre 2002.

Le 2 avril 2002, le Tribunal a envoyé un avis de réexamen relatif à l'expiration3 aux termes du paragraphe 76.03(6) de la LMSI à toutes les parties intéressées connues. Dans le cadre du réexamen, le Tribunal, au nom du commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (le commissaire), a fait parvenir des questionnaires détaillés aux producteurs canadiens, aux importateurs et aux exportateurs et producteurs étrangers des marchandises en question. Ces questionnaires ont été élaborés conjointement par l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) et le personnel du Tribunal. Le 3 avril 2002, le commissaire a ouvert son enquête pour déterminer si l'expiration de l'ordonnance du Tribunal causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping des marchandises en question en provenance du Taipei chinois et de Chine. Le 31 juillet 2002, le commissaire a clos son enquête et a décidé, aux termes du paragraphe 76.03(7) de la LMSI, que l'expiration de l'ordonnance causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping des marchandises en question.

Le 1er août 2002, dès réception de la décision du commissaire et du dossier administratif de l'ADRC, le Tribunal a ouvert son enquête, aux termes du paragraphe 76.03(10) de la LMSI. Dans le cadre de l'enquête, des audiences publiques et à huis clos ont eu lieu à Ottawa (Ontario) du 21 au 24 octobre 2002.

La Canadian Bicycle Manufacturers Association (CBMA) et ses sociétés membres, le Groupe Procycle Inc. (Procycle), y compris sa division Rocky Mountain Bicycles, Les Industries Raleigh du Canada Limitée (Raleigh), Victoria Précision Inc. (Victoria) et Cycles Devinci Inc. (Devinci), étaient représentées par des conseillers à l'audience. Les parties ont présenté des éléments de preuve, et les conseillers ont présenté des arguments à l'appui d'une prorogation de l'ordonnance, sans modification. Le Syndicat des Métallos (le Syndicat) a aussi présenté des éléments de preuve à l'appui d'une prorogation de l'ordonnance, sans modification.

Des importateurs et d'autres parties étaient aussi représentés par des conseillers à l'audience. Ils ont présenté des éléments de preuve et des arguments à l'appui d'une annulation ou modification de l'ordonnance.

Le dossier du présent réexamen relatif à l'expiration comprend les témoignages entendus pendant les audiences publiques et à huis clos, ainsi que tous les documents pertinents, y compris le Rapport protégé du réexamen relatif à l'expiration et l'Énoncé des motifs de l'ADRC, avec la documentation à l'appui, les réponses protégées et publiques aux questionnaires du Tribunal et de l'ADRC, et les rapports publics et protégés préalables à l'audience préparés par le personnel dans le cadre du présent réexamen et dans le cadre du réexamen de 1997. Toutes les pièces publiques ont été mises à la disposition des parties intéressées; seuls les conseillers qui avaient déposé auprès du Tribunal un acte de déclaration et d'engagement en matière de confidentialité ont eu accès aux pièces protégées.

PRODUITS

Les produits qui font l'objet du présent réexamen relatif à l'expiration sont les bicyclettes assemblées ou démontées, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, et les cadres de bicyclettes originaires ou exportés du Taipei chinois et de la Chine. Les bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine est supérieur à 325 $ CAN et les cadres de bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine est supérieur à 100 $ CAN sont exclus du présent réexamen.

Une bicyclette est constituée d'un cadre, d'un mécanisme de propulsion, de roues, d'une selle, d'un guidon et de freins, chacun de ces éléments étant à son tour constitué de plusieurs pièces.

La différence dans les matériaux utilisés et les technologies appliquées, ainsi que dans la qualité globale du cadre, du mécanisme de propulsion et des roues, explique le large éventail de modèles et de prix des bicyclettes. De plus, le coût de revient et le prix de vente final de la bicyclette dépendent de son système de changement de vitesses.

La conception, l'aspect et la construction des bicyclettes ont évolué rapidement ces dernières années. Outre l'acier et ses divers alliages, l'aluminium est de plus en plus utilisé dans la fabrication de cadres de bicyclettes, d'amortisseurs avant et arrière ainsi que de freins à disque. Les sept types de bicyclettes suivants sont généralement acceptés et vendus par la branche de production : BMX, vélo de randonnée, vélo de montagne, vélo hybride, vélo junior, vélo de course et vélo de cyclotourisme.

PRODUCTEURS NATIONAUX

Procycle, Raleigh et Victoria sont les trois principaux producteurs nationaux de bicyclettes au Canada. Il existe aussi plusieurs autres plus petits producteurs, comme Devinci et Norco Products Ltd.

En 2001, les membres de la CBMA représentaient plus de 95 p. 100 de la production de bicyclettes avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, vendues au prix de détail proposé de 800 $ ou moins.

Les principaux producteurs nationaux de bicyclettes ne fabriquent pas et n'importent pas de cadres pour la revente à d'autres fabricants de bicyclettes. Ils produisent eux-mêmes une partie des cadres servant à la production de bicyclettes finies et importent le reste des cadres de diverses sources. Ces principaux producteurs commercialisent leurs bicyclettes sous des marques nationales et des marques maison.

RÉSUMÉ DES CONCLUSIONS ET DE L'ORDONNANCE PRÉCÉDENTES

Le 11 décembre 1992, le Tribunal a conclu que le dumping au Canada de bicyclettes assemblées ou démontées, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, originaires ou exportées de Taïwan et de la Chine, à l'exclusion des bicyclettes en question dont le prix de vente FAB Taïwan ou Chine était supérieur à 325 $ CAN, avait causé, causait et était susceptible de causer un dommage sensible à la production au Canada de marchandises similaires et que le dumping au Canada des cadres de bicyclettes en question, originaires ou exportés des pays susmentionnés n'avait pas causé, ne causait pas, mais était susceptible de causer un dommage sensible à la production au Canada de marchandises similaires (conclusions de 1992).

Les conclusions de 1992 ont fait l'objet d'un réexamen en 1997. Dans le cadre de ce réexamen, le Tribunal a conclu que toutes les bicyclettes de production nationale dont le prix de vente au détail proposé était de 800 $ ou moins constituaient des marchandises similaires.

Le Tribunal a conclu que, si les conclusions étaient annulées, il y aurait probablement une reprise du dumping de marchandises en provenance des pays en question et que cette reprise du dumping était susceptible de causer un dommage sensible à la branche de production nationale sous forme de baisse des prix de vente ou des volumes de production et de diminution de part du marché, chacune de ces formes se traduisant par une baisse des revenus de la branche de production. En outre, la baisse des revenus entraînerait probablement une baisse du nombre d'emplois et un ralentissement de l'activité de recherche et de développement de la branche de production nationale. En ce qui a trait aux cadres, le Tribunal était d'avis que les conclusions devaient se limiter aux cadres normalement utilisés dans la production de bicyclettes dont le prix de détail proposé était de 800 $ et moins, conformément à la portée des conclusions concernant les bicyclettes finies. Par conséquent, le Tribunal a exclu des conclusions les cadres dont le prix de vente FAB Taïwan ou Chine était supérieur à 100 $ CAN.

POSITIONS DES PARTIES

Producteurs nationaux et parties appuyant une prorogation de l'ordonnance

CBMA

La CBMA a soutenu, eu égard aux bicyclettes et aux cadres, que l'ordonnance devrait être prorogée sans modification puisque les éléments de preuve montrent que, si l'ordonnance était annulée, les ventes du Taipei chinois et de la Chine augmenteraient, ce qui entraînerait un recul des prix qui se traduirait par un dommage sensible à la branche de production nationale et aurait une incidence sur sa viabilité générale. La CBMA a soutenu que, même si la protection antidumping est en place depuis environ 10 ans, le maintien de cette protection est plus nécessaire maintenant que jamais, particulièrement étant donné la présence accrue des importations à bas prix en provenance d'autres pays.

En ce qui a trait à la question du cumul, la CBMA a soutenu que les producteurs du Taipei chinois livrent directement concurrence aux producteurs chinois et que leur présence sur le marché canadien est importante.

Au sujet des facteurs dont il convient de tenir compte dans un réexamen relatif à l'expiration, énumérés au paragraphe 37.2(2) du Règlement sur les mesures spéciales d'importation 4 , la CBMA a soutenu que la probabilité d'une augmentation des volumes et la probabilité de baisses des prix, deux facteurs fondamentaux, ont été reconnues par les parties opposées. Au sujet des prix probables des marchandises en question, la CBMA a affirmé qu'il ressort des éléments de preuve que, si l'ordonnance était annulée, il y aurait une baisse considérable des prix qui entraînerait sans aucun doute des déplacements de volumes importants, ce qui, par voie de conséquence, causerait un dommage à la branche de production nationale. Elle a soutenu que, dans le cas des bicyclettes, le prix joue un rôle important, particulièrement sur le marché des marchands de masse où les producteurs nationaux livrent surtout concurrence aux importations à bas prix et où les ventes sont assorties de marges bénéficiaires minimes. Elle a ajouté que les éléments de preuve portent fortement à conclure qu'une faible baisse des prix aura une incidence majeure sur chaque producteur national et que, toutes autres choses étant égales, un écart des prix influencera la décision d'achat. La CBMA a invoqué les éléments de preuve selon lesquels un producteur national avait perdu un contrat parce qu'il ne s'était pas aligné sur le prix reconnu requis, même si l'écart était minime. Au sujet du volume probable des marchandises en question, la CBMA a soutenu que, étant donné la capacité excédentaire au Taipei chinois et en Chine, il y aurait vraisemblablement une augmentation considérable des importations et un déplacement important depuis les marchandises nationales vers les importations en question si l'ordonnance était annulée. Elle a soutenu que les éléments de preuve montrent que la Chine pourrait approvisionner la totalité du marché canadien de la bicyclette à partir d'une seule usine offrant des produits de qualité offerts à très bas prix.

Abordant la question des indices de dommage porté aux producteurs nationaux, la CBMA a soutenu que, étant donné les forts volumes de marchandises à bas prix en provenance du Taipei chinois et de Chine, si l'ordonnance était annulée, chaque producteur national souffrirait d'une plus faible part de marché et de plus faibles profits et que l'emploi afficherait une importante baisse.

Au sujet de la vulnérabilité, la CBMA a soutenu que les éléments de preuve montrent que les producteurs nationaux offrent des bicyclettes de bonne qualité présentant les innovations récentes, à des prix concurrentiels. La CBMA a aussi soutenu que la décision des producteurs nationaux de ne pas vendre leurs marques nationales aux marchands de masse n'accroît pas leur vulnérabilité. Selon elle, il serait insensé, d'un point de vue commercial, que certains producteurs nationaux offrent leurs marques réputées, à de bas premiers prix reconnus, à des marchands de masse qui les vendraient à un prix inférieur aux niveaux de prix des détaillants de bicyclettes indépendants (DBI). La CBMA a soutenu qu'une telle pratique dévaloriserait la valeur de la marque sur le marché des DBI et aurait une incidence négative sur ce volet à marge plus élevée de l'activité commerciale. Selon la CBMA, chaque producteur peut raisonnablement justifier sa décision d'affaires de permettre ou non que sa marque nationale soit vendue à des marchands de masse. Selon la CBMA, le refus de fournir une marque nationale ne peut être considéré comme un facteur pertinent dans la détermination de la vulnérabilité de la branche de production canadienne.

La CBMA a de plus soutenu que, même si certaines lacunes ont pu se retrouver chez les producteurs nationaux pendant l'application de l'ordonnance, de telles lacunes n'empêcheraient pas la prorogation de l'ordonnance. La CBMA a invoqué le précédent établi par le Tribunal dans le réexamen no RR-99-0045 , où le Tribunal, après avoir résumé certains problèmes de la branche de production, a exprimé l'avis que l'annulation de l'ordonnance causerait une détérioration de la situation de cette dernière « en rendant plus pénible encore une situation déjà difficile ».

En ce qui a trait à la question de savoir si la portée de l'ordonnance devrait être réduite au moyen d'une baisse du prix reconnu d'exclusion, la CBMA a affirmé que les producteurs nationaux livrent concurrence sur tous les segments du marché et que la baisse du prix reconnu d'exclusion aurait de graves répercussions sur le chiffre d'affaires crucial des DBI de la branche de production canadienne.

Eu égard à la demande d'exclusion des bicyclettes pliables, déposée par Pacific Waterhouse Inc., la CBMA a renvoyé aux éléments de preuve produits par Procycle et selon lesquels cette dernière serait disposée à envisager la production de ce type de bicyclette si les volumes demandés à cet égard étaient suffisants.

Le Syndicat

Le Syndicat a témoigné que, à son avis, la branche de production nationale subirait un dommage sensible sous forme de perte d'emplois si l'ordonnance était annulée.

Parties appuyant une annulation de l'ordonnance ou demandant des exclusions

La Société Canadian Tire Limitée et Zellers Inc. (les détaillants)

Les détaillants ont présenté leur point de vue, à titre de marchands de masse. Ils ont soutenu que, à la lumière de l'ensemble des éléments de preuve, l'ordonnance concernant les bicyclettes et les cadres devrait être annulée.

En ce qui a trait au cumul, les détaillants ont dit être d'accord avec la CBMA sur le fait que le Tribunal doit évaluer les effets cumulatifs du dumping, puisque les marchandises en provenance des pays en question se livrent concurrence entre elles et livrent concurrence aux marchandises similaires de production nationale, qu'elles sont interchangeables et qu'elles sont présentes à divers degrés sur le marché.

Les détaillants ont soutenu que le Tribunal doit conclure qu'un fondement d'éléments de preuve positifs justifie la prorogation d'une ordonnance et que, dans des circonstances où une protection a été en vigueur pendant une période aussi longue que 10 ans, les éléments de preuve à l'appui dans un réexamen doivent être particulièrement convaincants.

En ce qui concerne la probabilité de dommage, les détaillants ont dit être d'avis que Procycle n'avait plus besoin de la protection spéciale fournie par la mesure antidumping en vigueur et que la situation financière des autres demeurerait précaire à cause de problèmes sans rapport avec une reprise du dumping.

Dans l'évaluation de la probabilité qu'un dommage soit causé aux producteurs nationaux, les détaillants ont soutenu que le Tribunal devait tenir compte de l'incidence des facteurs suivants : la livraison d'innovations par les fabricants des marchandises en question d'une manière plus rapide et plus attrayante que dans le cas des producteurs nationaux; l'important volume des ventes à des détaillants de produits non sous-évalués à des prix visant des profits par des exportateurs établis situés au Taipei chinois et en Chine; le volume accru des importations à bas prix en provenance de pays non en question; le refus des producteurs nationaux d'offrir leurs marques nationales aux marchands de masse qui vendent de forts volumes, malgré des propositions attrayantes, y compris l'établissement de prix majorés, des volumes supérieurs et une distribution à l'échelle nationale; la stratégie des producteurs nationaux axée sur des produits à faible marge; la production, par les pays en question, de bicyclettes de qualité supérieure qui livrent directement concurrence aux produits canadiens; le fait que le prix n'est pas le seul facteur qui détermine la source d'approvisionnement.

Les détaillants ont soutenu que ces autres facteurs démontrent l'absence d'un lien de causalité entre les importations et le dommage allégué causé par de possibles importations sous-évaluées, que la vulnérabilité des producteurs nationaux, le cas échéant, n'est pas attribuable aux importations et qu'une annulation de l'ordonnance n'aurait pas d'incidence sur leurs perspectives de rétablissement. Les détaillants ont soutenu que les producteurs canadiens de bicyclettes seraient plus concurrentiels s'ils avaient choisi d'appliquer une stratégie axée sur la production haut de gamme, offrant des marges plus élevées en volumes suffisants.

En ce qui a trait à la question de savoir si la portée de l'ordonnance devrait être réduite au moyen d'une baisse du prix reconnu d'exclusion, les détaillants ont soutenu que les conditions de la concurrence et l'absence d'un lien de causalité entre ledit prix reconnu et le dommage allégué militent clairement contre une modification de ce prix reconnu.

Enfin, quant à la demande d'exclusion des bicyclettes pliables, les détaillants ont affirmé que, puisqu'il n'y a pas de production canadienne ni imminence d'une telle production, l'exclusion devrait être accordée.

A. Mordo & Son Ltd. (Mordo) et Liyang Machinery Ltd. (Liyang)

Mordo et Liyang ont soutenu que, pour décider si l'ordonnance doit être annulée, le Tribunal doit d'abord déterminer si la branche de production canadienne est vulnérable à une reprise du dumping ou à une baisse de prix sur le marché canadien. Elles ont soutenu que la branche de production est vulnérable à de multiples égards et que les prix de la Chine ne sont qu'un facteur.

Mordo et Liyang ont soutenu que les producteurs nationaux sont eux-mêmes responsables de toute vulnérabilité qui pourrait exister, notamment à cause de la concurrence qu'ils se livrent entre eux, le nombre de concurrents sur le marché étant trop grand, et des stratégies restrictives de vente et de commercialisation qui entravent leur aptitude à satisfaire leurs grands clients.

Tout en reconnaissant le caractère très innovateur de Procycle, et l'adaptation de cette dernière aux tendances en matière de conception, Mordo et Liyang ont soutenu qu'il ressort des éléments de preuve que peu de choses ont changé dans la branche de production nationale. Elles ont soutenu que, après 10 ans de protection contre le dumping, les producteurs canadiens ne fabriquent encore que certains cadres au pays et assemblent des pièces qui proviennent de partout dans le monde et, plus particulièrement, de Chine.

Enfin, Mordo et Liyang ont soutenu que la branche de production nationale ne peut livrer concurrence aux producteurs internationaux les plus efficaces sur l'ensemble de la gamme de produits, si ce n'est en s'appuyant sur ses marchandises de marque nationale, des marchandises qu'elle est réticente à vendre aux marchands de masse.

Mordo et Liyang ont donc soutenu que l'ordonnance doit être annulée.

Specialized Bicycle Components Canada, Inc. (Specialized)

Specialized a soutenu qu'elle doit être exclue d'une prorogation de l'ordonnance ou, à titre de mesure subsidiaire, qu'une telle exclusion devrait être limitée au Taipei chinois en tant que pays de provenance ou, à titre de deuxième mesure subsidiaire, que le prix reconnu d'exclusion des bicyclettes devrait être baissé à 200 $ CAN ou 225 $ CAN FAB Taipei chinois ou Chine.

Specialized a soutenu que des éléments de preuve non contestés montrent qu'elle est un importateur tout à fait conforme et qui collabore pleinement. Elle a soutenu ne pas être motivée par le magasinage des prix, mais, plutôt, par d'autres facteurs que le prix, notamment la qualité, le développement de produits et les innovations, les rapports à long terme et les délais de livraison convenables. Tout en reconnaissant que le marché des marchands de masse est sensible au prix, Specialized a dit offrir ses produits sur des segments du marché tout à fait différents.

Specialized a soutenu qu'il ressort des éléments de preuve qu'un très petit nombre de producteurs canadiens haut de gamme fabriquent des bicyclettes vendues à des prix qui s'inscrivent dans la fourchette des prix haut de gamme des marchandises en question, à savoir le segment auquel elle destine ses produits. Specialized a donc soutenu qu'elle devrait être exclue d'une prorogation de l'ordonnance.

En ce qui a trait à l'exclusion des marchandises importées par Specialized du Taipei chinois seulement, Specialized a soutenu qu'il convient d'établir une distinction entre ces importations et les bicyclettes en provenance de Chine étant donné qu'elles visent principalement les produits de plus grande valeur. Par conséquent, Specialized a soutenu que l'ordonnance devrait être annulée eu égard à ses importations en provenance du Taipei chinois.

Enfin, Specialized a soutenu que, étant donné que la branche de production nationale ne vend pas une proportion importante de bicyclettes dans le segment supérieur du marché des marchandises en question, le prix reconnu d'exclusion devrait être réduit de manière à correspondre à un niveau de vente au détail de 400 $ plutôt que de 800 $, puisque les producteurs ne subiront vraisemblablement pas de dommage dans ce segment du marché.

Canadian Association of Specialty Bicycle Importers (CASBI)

La CASBI a soutenu que l'ordonnance devrait être annulée ou, subsidiairement, que le prix reconnu d'exclusion des bicyclettes devrait être réduit à 225 $ CAN FAB Taipei chinois ou Chine.

La CASBI a soutenu que le marché de la bicyclette est demeuré stable depuis les conclusions de 1992 et qu'il existe deux marchés de la bicyclette au Canada : 1) le marché des marchands de masse, qui est principalement approvisionné par les producteurs canadiens; 2) le marché des produits de spécialité, qui est principalement approvisionné par des importateurs de produits de spécialité comme la CASBI. Elle a soutenu que le chevauchement, qui existe à son niveau de la vente au détail lorsque les bicyclettes importées et les bicyclettes de production nationale sont offertes au même prix, a très peu d'importance eu égard à la santé financière des producteurs canadiens. De ce fait, la CASBI a soutenu que le prix reconnu d'exclusion des bicyclettes devrait être réduit à 225 $ CAN FAB Taipei chinois ou Chine.

ANALYSE

Aux termes du paragraphe 76.03(1) de la LMSI, une ordonnance expire après cinq ans à moins de faire l'objet d'un réexamen et d'être prorogée par le Tribunal. Dans le cadre de réexamens relatifs à l'expiration, lorsque le commissaire décide que l'expiration de l'ordonnance à l'égard des marchandises en question causera vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping, le Tribunal doit, aux termes du paragraphe 76.03(10), décider si l'expiration de l'ordonnance à l'égard des marchandises en question causera vraisemblablement un dommage. L'alinéa 76.03(12)b) exige que le Tribunal rende une ordonnance en vue de proroger l'ordonnance avec ou sans modification à l'égard des marchandises pour lesquelles il a déterminé une telle vraisemblance.

Ces dispositions législatives, qui sont conformes à l'article 11.3 de l'Accord sur la mise en _uvre de l'article VI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 de l'Organisation mondiale du commerce6 , établissent les mêmes prescriptions pour tous les réexamens relatifs à l'expiration, peu importe si l'ordonnance visée dans le réexamen a été prorogée. Cet article de l'Accord antidumping indique également qu'une ordonnance ne doit rester en vigueur que le temps nécessaire pour contrebalancer le dumping qui cause un dommage.

Avant d'analyser la probabilité de dommage, le Tribunal déterminera d'abord quelles marchandises de production nationale constituent des marchandises similaires aux importations en question et décidera ensuite si l'analyse doit être effectuée séparément pour chaque pays en question ou cumulativement pour les deux pays.

Marchandises similaires

Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires », par rapport à toutes les autres marchandises, de la façon suivante :

a) marchandises identiques aux marchandises en cause;

b) à défaut, marchandises dont l'utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

À la lumière des éléments de preuve, le Tribunal n'est pas convaincu que les prix de détail proposés pour les bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine est de 325 $ CAN ont évolué depuis le dernier réexamen. En outre, les considérations de prix mises à part, rien n'indique que les bicyclettes de production nationale, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, sont sensiblement différentes des marchandises en question. Par conséquent, le Tribunal est toujours d'avis que les bicyclettes de production nationale d'un prix de vente proposé de 800 $ ou moins sont identiques aux importations en question ou sont des marchandises dont l'utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des importations en question.

Par conséquent, le Tribunal conclut que les bicyclettes de production nationale, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, dont le prix de vente au détail proposé est de 800 $ ou moins, constituent des marchandises similaires aux marchandises en question.

Cumul

Le paragraphe 76.03(11) de la LMSI stipule que le Tribunal doit évaluer les effets cumulatifs du dumping, s'il est convaincu qu'une telle évaluation est indiquée, compte tenu des conditions de concurrence entre les marchandises en question en provenance des pays en question et entre les marchandises en question et les marchandises similaires de production nationale.

Dans le cadre de la plaidoirie, un certain nombre de parties ont soutenu que les conditions préalables pour cumuler prévalent dans le présent réexamen relatif à l'expiration.

À l'étude des éléments de preuve, le Tribunal conclut que les marchandises en question en provenance de chacun des pays se livrent concurrence entre elles sur le marché canadien des points de vue de la qualité du produit et des prix et, de ce fait, qu'elles sont hautement interchangeables. Il fait observer, dans un tel contexte, que les éléments de preuve montrent que les importateurs peuvent facilement passer d'un pays à l'autre pour l'achat des marchandises en question. Le Tribunal est aussi d'avis que les marchandises en question en provenance des deux pays livrent concurrence aux marchandises similaires sur les mêmes segments du marché, étant donné que les éléments de preuve indiquent que de nombreux acheteurs des marchandises en question ont également acheté des marchandises similaires. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal estime qu'il est indiqué d'évaluer cumulativement l'effet vraisemblable d'une reprise du dumping des marchandises en provenance des pays en question.

Probabilité de dommage

Dans le cadre de l'examen de la question de savoir si l'expiration de l'ordonnance causera vraisemblablement un dommage, le Tribunal peut tenir compte des facteurs énumérés au paragraphe 37.2(2) du Règlement.

Les divers facteurs que le Tribunal estime pertinents en l'espèce, tous énumérés au paragraphe 37.2(2) du Règlement, sont regroupés sous les rubriques suivantes : « Volumes probables des importations sous-évaluées »; « Prix probables des importations sous-évaluées »; « Effets probables des importations sous-évaluées sur la branche de production nationale »; « Autres facteurs ayant une incidence sur la branche de production nationale ».

Volumes probables des importations sous-évaluées

Dans le cadre du réexamen de 1997 concernant les bicyclettes et les cadres de bicyclettes, le Tribunal a conclu qu'il y avait une indication claire que les branches de production de bicyclettes, tant au Taipei chinois qu'en Chine, affichaient une capacité disponible et une orientation marquée vers les exportations nécessaires au maintien de leurs volumes de production. Il a aussi constaté que les deux branches de production de bicyclettes avaient fait l'objet de mesures antidumping dans d'autres pays.

Les éléments de preuve, dans le présent réexamen, indiquent une situation similaire concernant la capacité disponible et l'orientation vers les exportations des branches de production de bicyclettes au Taipei chinois et en Chine.

Il ressort des éléments de preuve que la branche de production de bicyclettes de la Chine demeure la plus importante au monde. Elle se compose présentement de plus de 1 000 usines7 qui produisent des bicyclettes, des pièces et des accessoires. Environ 450 usines se consacrent à la production de bicyclettes complètes. La capacité de production actuelle de ces usines est estimée à 70 millions d'unités par année8 . Pour tirer avantage de moindres coûts de production, on y ajoute de nouvelles usines, habituellement sous forme de sociétés en coentreprise ou d'investissements privés de sociétés situées partout dans le monde9 . Une partie importante de la production de bicyclettes du Taipei chinois s'est déplacée vers la Chine au cours des 10 dernières années.

La bicyclette constitue le principal moyen de transport d'environ les trois quarts de la population de la Chine. Toutefois, les bicyclettes sont peu à peu supplantées par les véhicules, au fur et à mesure que le niveau de vie de la population s'améliore. La taille du marché national de la bicyclette devrait lentement rétrécir à l'avenir10 .

En 1995, la branche de production en Chine a produit environ 45 millions de bicyclettes. Toutefois, étant donné que la demande pour ce produit a reculé, à la fois sur le marché national et sur les marchés à l'exportation, la production a chuté pour atteindre 38 millions d'unités en 1999. Cependant, la Chine demeure un grand exportateur de bicyclettes. En 1999, l'année la plus récente pour laquelle des données sont disponibles, la Chine a exporté environ 23 millions de bicyclettes. Un tel volume représentait environ 60 p. 100 de sa production totale et environ 70 p. 100 du commerce mondial de ce produit. En comparaison, la taille du marché canadien entier des bicyclettes qui font l'objet du présent réexamen est seulement d'environ 1,5 million d'unités.

Du point de vue du volume, la branche de production de bicyclettes au Taipei chinois est la troisième plus importante au monde. Il existe plus de 400 producteurs de bicyclettes et de pièces de bicyclettes, y compris les cadres et les accessoires, au Taipei chinois11 . La branche de production est fortement axée vers les exportations, exportant habituellement nettement plus de 90 p. 100 de sa production.

Les éléments de preuve concernant le Taipei chinois indiquent qu'il a exporté 7,8 millions de bicyclettes en 1999. Ce volume a reculé, passant à seulement 4,8 millions d'unités en 200112 . Le recul est attribuable, en partie, au fait que certaines sociétés ont déplacé leur production vers la Chine et le Vietnam. Malgré un déplacement de la production vers la Chine et le Vietnam, les producteurs au Taipei chinois continuent d'exploiter leurs usines au Taipei chinois, ce qui porte à croire qu'il y a encore une surcapacité de production importante au Taipei chinois.

En plus de ces données collectives publiées, des données propres à des exportateurs ont été reçues de deux producteurs étrangers qui ont répondu au questionnaire de réexamen relatif à l'expiration à l'intention des exportateurs, à savoir Giant Manufacturing Co., Ltd. (Taipei chinois) et Shen Zhen Bo An Bike Co., Ltd. (Chine), et de deux sociétés de commerce extérieur, à savoir Krane Corporation (Krane) et Specialized Bicycle Components Inc. Les réponses montrent que les deux producteurs étrangers qui ont exporté au Canada avaient une capacité disponible en 2001 et que tous deux avaient l'intention d'augmenter leurs exportations vers le Canada13 . En outre, Krane a affirmé que les importations en question inonderaient le marché à des prix bien inférieurs aux valeurs normales si l'ordonnance était annulée14,15 .

Il est manifeste, à la lumière de ces éléments de preuve, que les branches de production de bicyclettes, tant au Taipei chinois qu'en Chine, possèdent une importante capacité disponible de production de bicyclettes et de cadres destinés à l'exportation et peuvent facilement déplacer la production entre le Taipei chinois et la Chine afin de maximiser l'utilisation de la capacité.

Il existait aussi des éléments de preuve selon lesquels les producteurs de bicyclettes au Taipei chinois et en Chine ont moins de débouchés pour leurs produits. La demande nationale récente de bicyclettes stagne ou baisse tant au Taipei chinois qu'en Chine et baisse aussi dans le monde16 . Cet état des choses contribue sensiblement à une surcapacité et causera vraisemblablement une dépendance accrue sur les ventes à l'exportation dans les deux pays en question, ainsi qu'une plus forte pression à vendre à des prix sous-évalués pour garantir le volume des ventes.

Le Tribunal fait observer que la part du marché canadien détenue par les importations en provenance de Chine a augmenté durant la période de 1999 à 2001 et représentait un quart du marché canadien en 2001, un niveau sans précédent de participation au marché. Les importations en provenance du Taipei chinois, même si leur part de marché s'est rétrécie entre 1999 et 2001, continuaient à détenir une part de 6 p. 100 du marché en 2001. Le Tribunal fait également observer que des produits en provenance du Taipei chinois et de Chine sont associés à des vendeurs établis au Canada qui importent depuis des années17 . Le Tribunal ne doute aucunement que ces vendeurs soient en mesure d'augmenter facilement leurs importations en provenance des deux pays en question si l'ordonnance est annulée18 .

De plus, le Tribunal constate que d'autres pays imposent des droits antidumping contre les exportations de bicyclettes ou de pièces de bicyclettes, ou des deux, en provenance du Taipei chinois et de Chine. La plupart de ces mesures ont été mises en vigueur ou ont été prorogées de 1997 jusqu'à ce jour19 . L'Argentine a institué des mesures antidumping contre les bicyclettes en provenance des deux pays en question en 1995 et a prorogé l'ordonnance en 2000. En 1993, la Commission européenne a institué des mesures antidumping contre les bicyclettes en provenance de Chine et, en 1997, a étendu la portée de l'ordonnance afin d'inclure les cadres de bicyclettes. En 1999, des mesures antidumping ont également été instituées pour englober le Taipei chinois. Ces mesures ont ensuite été prorogées en 200020 .

Ces mesures antidumping imposées par d'autres pays sur les importations des marchandises en question en provenance du Taipei chinois et de Chine ont poussé le commissaire à conclure à l'existence d'une propension au dumping chez les exportateurs des deux pays en question. Selon le Tribunal, la limitation de l'accès à ces marchés des exportations en provenance des pays en question fait du Canada un débouché vraisemblable pour les importants volumes disponibles en provenance des pays en question si l'ordonnance est annulée.

Enfin, le Tribunal fait observer que certains exportateurs ont continué à pratiquer le dumping de bicyclettes et de cadres au Canada malgré l'ordonnance antidumping en vigueur. De fait, les droits antidumping sur les bicyclettes prélevés par l'ADRC se sont élevés à 1,3 million de dollars entre 1999 et 2001, les droits antidumping prélevés sur les cadres atteignant, pour leur part, 412 000 $ durant la même période21 . Bien qu'elles ne représentent qu'une faible proportion de la totalité des importations des marchandises en question, le fait que certaines des marchandises en question fassent l'objet de dumping, même en présence d'une ordonnance antidumping, porte le Tribunal à croire que les pays en question vendront vraisemblablement des volumes beaucoup plus importants à des prix sous-évalués si l'ordonnance est annulée.

Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal est d'avis que, si l'ordonnance était annulée, le volume des importations sous-évaluées en provenance du Taipei chinois et de Chine augmenterait vraisemblablement d'une manière importante.

Prix probables des importations sous-évaluées

Malgré les arguments présentés par certains importateurs et selon lesquels d'autres facteurs que les prix, comme la qualité et le service, jouent un rôle important, il existe des éléments de preuve qui indiquent clairement que, là où la qualité et le service sont équivalents, ce qui est le cas pour beaucoup des fournisseurs établis au Taipei chinois et en Chine qui expédient présentement sur le marché canadien, le prix est le facteur déterminant22 . À cet égard, le Tribunal fait observer, tout particulièrement, les éléments de preuve de deux des plus grands marchands de masse canadiens, La Société Canadian Tire Limitée (Canadian Tire) et Zellers Inc. (Zellers).

Canadian Tire a affirmé que la concurrence au niveau des prix était très vive dans le milieu de la vente au détail de bicyclettes au Canada et que, pour satisfaire la demande de leurs clients et maintenir leur part du marché, les marchands de masse doivent pouvoir offrir des produits dont les caractéristiques et les prix sont aussi bons ou meilleurs que ceux de leurs concurrents23 . L'exposé protégé de Canadian Tire contient d'autres éléments de preuve qui font ressortir l'importance du prix24 . Zellers, pour sa part, a souligné son changement de politique, passant d'une pratique d'établissement de bas et moyens prix à une stratégie d'établissement de bas prix quotidiens en 2002 en réponse à la concurrence féroce25 . L'importance du prix ressort en outre du déplacement des sources d'approvisionnement des principaux détaillants vers des sources asiatiques non en question de produits à plus bas prix, ainsi que des pertes ou des gains de ventes associés aux concessions au niveau des prix26 . Le dossier montre aussi les graves préoccupations soulevées par les offres à bas prix faites par des concurrents, comme Wal-Mart, pour certains modèles de bicyclette et les mesures prises par Canadian Tire et Zellers pour réagir aux offres de Wal-Mart27 . Selon le Tribunal, tous ces éléments de preuve témoignent de la forte concurrence au niveau des prix dans le segment des marchands de masse du marché canadien de la bicyclette.

Le Tribunal est convaincu que, étant donné la forte concurrence au niveau des prix, l'annulation de l'ordonnance entraînerait rapidement une baisse des prix des marchandises en question dans le segment des marchands de masse du marché canadien. À cet égard, le Tribunal fait observer que l'ADRC a analysé le niveau des prix à l'importation proposés pour les marchandises en question. L'ADRC indique que, pour l'année modèle 2002, 31 exportateurs ont demandé 861 valeurs normales provisoires relativement aux bicyclettes et aux cadres. De ces 861 demandes, 472 (55 p. 100) ont proposé des prix de vente qui auraient été sous-évalués selon une marge moyenne de dumping de 28,4 p. 10028 .

Le témoin de The Lippé Group (Lippé), un agent représentant de grands exportateurs au Taipei chinois et en Chine, a dit croire que l'ADRC devrait établir les valeurs normales des marchandises en provenance de Chine à un montant sensiblement moindre29 . Il ressort de ce fait, selon le Tribunal, que Lippé aimerait vendre des marchandises en provenance de Chine à des prix sensiblement plus bas, des prix que l'ADRC considère présentement comme des prix sous-évalués30 .

De plus, d'autres éléments de preuve indiquent que les prix des marchandises en question afficheraient une baisse si l'ordonnance était annulée. Mordo, un grand importateur de marchandises en question, a dit estimer que les prix fléchiraient sur le marché31 et Krane, un grand exportateur des marchandises en question, a déclaré que les importations en question inonderaient le marché à des prix bien inférieurs aux valeurs normales si l'ordonnance était annulée32 .

À la lumière des éléments de preuve qui précèdent, le Tribunal est convaincu que, si l'ordonnance était annulée, les exportateurs au Taipei chinois et en Chine établiraient le prix de leurs exportations au Canada à des prix inférieurs au niveau des prix actuels, à des prix sous-évalués, ce qui, ainsi qu'il est discuté ci-après, contribuerait d'une manière importante à un recul des prix sur le marché, étant donné la forte concurrence au niveau des prix qui prévaut dans le secteur de la vente de bicyclettes au Canada.

Effets probables des importations sous-évaluées sur la branche de production nationale

Même s'il ressort des éléments de preuve que l'ordonnance a eu certains effets positifs des points de vue du rendement financier et de l'emploi, la situation financière actuelle de la branche de production canadienne est fragile. L'état consolidé des ventes nationales de la branche de production montre que le revenu net avant impôt, en pourcentage du chiffre d'affaires net, a baissé, passant d'un revenu net de 3 p. 100 en 1999 à une perte de 3 p. 100 en 200133 . Les marges de profit traditionnellement minces qui prévalent dans la branche de production nationale de bicyclettes, particulièrement sur les marchandises vendues aux marchands de masse, laissent peu ou pas de place pour baisser les prix tout en maintenant un rendement raisonnable. Étant donné la vulnérabilité de la branche de production nationale, et étant donné que les ventes nationales des marchandises destinées aux marchands de masse représentent la vaste majorité de la production de la branche de production, le Tribunal est d'avis que même une faible baisse des prix aurait un effet sensible sur la viabilité financière globale de la branche de production.

Les données de l'ADRC montrent que les prix de vente proposés déclarés par les exportateurs au Taipei chinois et en Chine auraient été sous-évalués selon une marge moyenne combinée de dumping de 28,4 p. 100 en l'absence de l'ordonnance. Le témoin de Lippé a indiqué que, selon lui, l'ADRC devrait réduire les valeurs normales dans le cas de la Chine au même niveau que les valeurs normales dans le cas du Taipei chinois34 . Il ressort de ce qui précède que, de son avis, une importante baisse du prix à l'importation des marchandises en question en provenance de Chine serait raisonnable. Selon les éléments de preuve produits par Procycle, le dumping des bicyclettes, même à une marge de dumping de 10 p. 100, rendrait les producteurs nationaux vulnérables à des baisses de prix et aurait une incidence sur leur volume de ventes. Raleigh et Victoria ont soutenu qu'une annulation de l'ordonnance entraînerait l'arrêt de leur production nationale et les contraindrait à importer des bicyclettes.

Le marché canadien de la bicyclette devrait, selon les prévisions, demeurer stable dans un avenir prévisible35 . Dans de telles circonstances, tant les fournisseurs de produits nationaux que les fournisseurs de produits importés devront se livrer une vive concurrence au niveau des prix ou risquer de perdre un certain volume de ventes. Étant donné le volume et les prix vraisemblables des importations sous-évaluées en provenance des deux pays en question, dont il a déjà été traité, il ne fait aucun doute selon le Tribunal que les marchandises sous-évaluées en question en provenance du Taipei chinois et de Chine contribueraient d'une manière importante à une baisse générale des prix du marché dans le segment des marchands de masse si l'ordonnance était annulée.

Le Tribunal n'accueille pas l'argument selon lequel la recherche du profit suffirait à garder les prix des marchandises en question en provenance de Chine au-dessus des prix sous-évalués si l'ordonnance était annulée. Il prend note de la forte présence des importations à bas prix en provenance de pays non en question36 et du fait que, étant donné la pression exercée par les marchands de masse au niveau des prix, les importations en provenance du Taipei chinois et de Chine devront être offertes aux mêmes bas prix pour demeurer concurrentielles. Les données sur l'exécution compilées par l'ADRC indiquent aussi qu'un certain nombre d'exportateurs dans les deux pays en question sont disposés à vendre à des prix sous-évalués même sur le marché canadien d'aujourd'hui. Le Tribunal est convaincu que d'autres exportateurs qui, jusqu'à présent, ont choisi de vendre aux valeurs normales n'auraient pas d'autre choix que de faire la même chose et de vendre à des prix sous-évalués si l'ordonnance était annulée.

Même en tenant compte du prix majoré qu'un marchand de masse a dit qu'il paierait pour des bicyclettes de production canadienne, dans certains cas37 , la branche de production nationale devrait suivre les réductions du prix des marchandises sous-évaluées pour maintenir des volumes raisonnables de production. Selon le Tribunal, une détérioration financière considérable s'ensuivrait pour la branche de production, étant donné les effets combinés des prix et des volumes.

Les éléments de preuve produits par les producteurs nationaux étaient, dans une forte mesure, axés sur le dommage que causeraient les marchandises sous-évaluées en question, en l'absence d'une ordonnance, dans le segment des marchands de masse du marché. Il est clair, selon le Tribunal, qu'une annulation de l'ordonnance entraînerait rapidement un afflux d'importations sous-évaluées en provenance des deux pays en question et que, étant donné l'intensité de la concurrence au niveau des prix dans ce segment, d'autres fournisseurs seraient contraints de réagir pour protéger leur part du marché, contribuant de la sorte à une vraisemblable baisse en spirale des prix.

Le Tribunal est de plus convaincu que l'annulation de l'ordonnance, en raison de ses répercussions financières, aurait vraisemblablement une forte incidence négative sur l'emploi38 et sur la capacité des producteurs d'investir en recherche et développement39 .

Par conséquent, le Tribunal est convaincu qu'une annulation de l'ordonnance causerait un dommage sensible à la branche de production nationale.

Autres facteurs ayant une incidence sur la branche de production nationale

Le Tribunal a aussi examiné les facteurs non liés au dumping qui pourraient avoir un effet préjudiciable sur la branche de production nationale. Les principaux facteurs soulevés par les parties qui s'opposent à une prorogation de l'ordonnance sont la présence d'importations à bas prix en provenance de pays non en question, la présence d'importations à bas prix non sous-évaluées en provenance des pays en question, le manque d'innovation allégué dans les produits des producteurs nationaux, le refus des producteurs nationaux d'offrir leurs marques nationales aux marchands de masse, le dommage que se portent eux-mêmes les producteurs nationaux en vendant à bas prix et la stratégie des producteurs nationaux qui consiste à cibler des produits à faible marge.

Le Tribunal fait observer que les importations en provenance de pays non en question étaient présentes en volume considérable durant la période visée par le réexamen et qu'elles détiennent présentement environ un cinquième du marché. Ces importations ont parfois été livrées ou vendues au Canada à de très bas prix moyens40 et la branche de production nationale a soutenu que ces importations étaient source d'une certaine préoccupation. Cependant, il existe aussi certains éléments de preuve selon lesquels une proportion élevée des importations à bas prix en provenance de ces pays non en question était des bicyclettes pour enfants et pour jeunes, dont le prix est moindre que celui des bicyclettes pour adultes41 , et fait baisser la moyenne des prix. Rien ne permet de croire que la présence sur le marché canadien des importations en provenance de pays non en question ne persistera pas à l'avenir et que celles-ci ne livreront pas concurrence aux marchandises des producteurs nationaux et d'autres fournisseurs de marchandises importées. Cependant, le Tribunal est d'avis que les éléments de preuve n'indiquent pas que les importations à bas prix en provenance de pays non en question seraient un facteur suffisamment important pour rendre non sensible le dommage attribuable aux importations sous-évaluées en question. En fait, le Tribunal est d'avis que la présence soutenue d'importations à bas prix en provenance de pays non en question est un facteur qui contribuera à la baisse en spirale des prix et, par conséquent, rendra la branche de production nationale plus vulnérable à une reprise du dumping des marchandises en provenance des pays en question.

Le Tribunal fait également observer que des importations à bas prix non sous-évaluées sont entrées au Canada en provenance des pays en question depuis le dernier réexamen. Selon le Tribunal, le succès remporté sur le marché actuel par les importations non sous-évaluées en provenance des pays en question ne signifie pas qu'une reprise du dumping ne causerait pas un dommage sensible. En fait, les conclusions de probabilité de dommage s'appuient sur les éléments de preuve selon lesquels, même à des prix non sous-évalués, les marchandises en question sont compétitives sur ce marché.

Le Tribunal n'accueille pas l'argument voulant qu'il y ait eu un manque d'innovation dans les produits de la branche de production nationale et que ce manque d'innovation aura une incidence importante sur le rendement de cette dernière. Le Tribunal fait observer que, dans certains cas, Procycle a été la première à introduire certaines des nouvelles caractéristiques que l'on retrouve sur les bicyclettes sur le segment des marchands de masse du marché42 . À ce même égard, le Tribunal fait de plus observer que, bien qu'il puisse examiner si la branche de production nationale a procédé à des améliorations pour rehausser sa compétitivité sur le marché canadien, rien dans la LMSI n'exige explicitement que les producteurs nationaux aient à agir de la sorte.

Il a été soutenu qu'un autre important facteur se rapporte à la stratégie commerciale des producteurs nationaux de ne pas offrir leurs marques nationales aux marchands de masse. Le Tribunal fait observer que la protection des marques nationales n'est pas uniquement le propre de la branche de production de bicyclettes et qu'elle peut s'inscrire dans une stratégie de commercialisation normale axée sur la diversification et la maximisation des rendements des ventes. Le Tribunal n'est pas convaincu qu'une telle stratégie soit déraisonnable, et les éléments de preuve n'appuient pas une conclusion selon laquelle l'incidence négative, le cas échéant, d'une telle stratégie serait suffisamment importante pour rendre non sensible le dommage causé par les importations sous-évaluées en question.

Il a aussi été soutenu que les producteurs nationaux ont eux-mêmes contribué au dommage qu'ils ont subi en vendant aux marchands de masse, dans certains cas, à bas prix. Le Tribunal est d'avis que sur un marché normal, tous les fournisseurs, y compris les producteurs nationaux, doivent être concurrentiels et réagir aux pressions du marché. Étant donné la fragilité de leur position financière, les producteurs nationaux ne joueraient vraisemblablement pas le rôle de chef de file dans une baisse des prix au-delà de la baisse nécessaire pour livrer concurrence aux importations à bas prix. Les importations sous-évaluées en provenance des pays en question exacerberaient les pressions qui s'exercent présentement sur les prix au sein du marché. Le Tribunal n'est donc pas convaincu que l'établissement de bas prix par les producteurs nationaux serait un facteur d'une importance suffisante pour rendre non sensible le dommage causé par les importations sous-évaluées en question. Il est convaincu, plutôt, que les marchandises sous-évaluées en question entraîneraient vraisemblablement les prix à la baisse, pour les motifs décrits ci-dessus.

Enfin, les parties qui s'opposent à une prorogation de l'ordonnance ont soutenu que la décision des producteurs nationaux de continuer d'attacher de l'importance aux produits à faible marge des marchands de masse était une mauvaise stratégie commerciale. Le Tribunal n'est pas convaincu que la stratégie de la branche de production soit déraisonnable. Les éléments de preuve des producteurs nationaux indiquent que la branche de production a besoin du volume que représente le segment des marchands de masse du marché, un segment où les bas prix prévalent, pour constituer une base solide afin d'absorber ses frais fixes et de garantir une mesure suffisante d'investissement dans ses usines et dans sa technologie de production43 . D'après la branche de production, il s'agit là d'un élément crucial dans la mise en place d'une assise solide en vue de la production des marchandises à marge bénéficiaire élevée de la fourchette supérieure du marché.

En résumé, bien que certains des autres facteurs dont il a été discuté ci-dessus puissent avoir une incidence sur le rendement futur de la branche de production nationale, le Tribunal est convaincu qu'une telle incidence ne serait pas suffisamment importante pour rendre non sensible le dommage causé par la poursuite du dumping des bicyclettes et des cadres en provenance du Taipei chinois et de Chine si l'ordonnance était annulée.

EXCLUSIONS

Selon le Tribunal, une exclusion est justifiée dans le cas des bicyclettes originaires ou exportées des pays en question dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine est supérieur à 225 $ CAN et des cadres de bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine est supérieur à 50 $ CAN.

Le Tribunal est convaincu que, si l'ordonnance était annulée, la presque totalité du dommage que causeraient les marchandises sous-évaluées en question serait attribuable aux marchandises en question qui livrent concurrence à un prix de détail proposé de 400 $ ou moins. De ce fait, la protection accordée à la branche de production nationale devrait se limiter au segment des prix de détail correspondant.

Les éléments de preuve indiquent que, en 2001, la dernière année complète pour laquelle cette information est disponible, les ventes de la branche de production nationale ont été faites, dans une proportion de 95 p. 100 en volume, au prix de détail reconnu proposé de 400 $ ou à un prix moindre44 . D'une façon similaire, en 2000, 97 p. 100 des ventes ont été faites à ce prix reconnu ou à un prix moindre45 .

Il ressort également des éléments de preuve que la plupart des bicyclettes vendues par les marchands de masse correspondent au segment des prix de détail proposés de 400 $ ou moins. Canadian Tire et Zellers, qui représentent environ 80 p. 100 des ventes dans le segment des marchands de masse46 et qui sont au nombre des principaux importateurs des marchandises en question en provenance des pays en question, n'ont pas importé de bicyclettes des pays en question dont le prix de détail dépassait 400 $47 . De même, ils n'ont pas importé de bicyclettes de pays non en question dont le prix de détail dépassait ce prix de détail reconnu48 . Tel qu'indiqué plus haut, les éléments de preuve au sujet de la probabilité de dommage étaient dans une grande mesure axés sur le dommage causé dans le segment des marchands de masse du marché.

Dans de telles circonstances, le Tribunal estime qu'il ne serait pas indiqué de proroger l'ordonnance visant les bicyclettes d'un prix de détail reconnu proposé supérieur à 400 $.

Plusieurs témoins ont présenté des éléments de preuve sur la relation qui existe, à leur avis, entre les prix de détail proposés des bicyclettes et les prix FAB. Étant donné que la presque totalité du dommage serait vraisemblablement causé dans le segment où les prix de détail proposés sont de 400 $ ou moins, le Tribunal a accordé un poids particulier aux éléments de preuve produits par les témoins ayant une expérience pertinente de ce segment du marché. À la lumière des éléments de preuve, le Tribunal estime que, sur le marché d'aujourd'hui, un prix de détail proposé d'environ 400 $ équivaut à un prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine de 225 $ CAN49 .

Le Tribunal a aussi entendu des déclarations de témoins de la branche de production nationale concernant le prix FAB des cadres de bicyclettes dont le prix de détail proposé est de 400 $. À la lumière de ces éléments de preuve, le Tribunal a conclu que le prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine de ces cadres serait vraisemblablement de 50 $ CAN ou moins50 .

Une exclusion est également justifiée dans le cas des bicyclettes pliables. Selon les déclarations d'un certain nombre de témoins, ces bicyclettes, qui comprennent des cadres et potences pliables, suscitent une très faible demande, ne sont pas fabriqués au Canada et ne livrent pas concurrence aux bicyclettes de production nationale51 . De plus, même si Procycle a manifesté son intérêt à l'endroit de la production de telles bicyclettes, le Tribunal est d'avis que cette production n'aura vraisemblablement pas lieu, étant donné que Procycle a affirmé qu'il lui faudrait une commande d'au moins 1 000 unités52 et qu'elle n'a aucunement indiqué qu'elle prévoit le lancement imminent d'une telle production.

Enfin, le Tribunal ne trouve aucun motif qui justifierait d'accueillir la demande de Specialized visant l'exclusion de ses importations en provenance des pays en question ou, subsidiairement, en provenance seulement du Taipei chinois. Bien que Specialized exploite le marché des DBI, où les importations en question sont moins présentes, elle importe toujours plusieurs modèles de bicyclettes de prix reconnus moindres qui livrent concurrence aux produits de la branche de production nationale. En outre, des éléments de preuve indiquent que la production de ces bicyclettes peut facilement être déplacée de la Chine au Taipei chinois53 .

CONCLUSION

Aux termes de l'alinéa 76.03(12)b) de la LMSI, le Tribunal, par la présente :

1) proroge son ordonnance concernant les bicyclettes assemblées ou démontées, avec des roues d'un diamètre de 16 pouces (40,64 cm) et plus, originaires ou exportées du Taipei chinois et de la Chine, avec une modification afin d'exclure les bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine est supérieur à 225 $ CAN et d'exclure les bicyclettes avec cadres et potences pliables originaires ou exportées du Taipei chinois et de la Chine;

2) proroge son ordonnance concernant les cadres de bicyclettes, originaires ou exportés des pays susmentionnés, avec une modification afin d'exclure les cadres de bicyclettes dont le prix de vente FAB Taipei chinois ou Chine est supérieur à 50 $ CAN.


1 . L.R.C. 1985, c. S-15 [ci-après LMSI].

2 . Gaz. C. 2002.I.381.

3 . Gaz. C. 2002.I.1010.

4 . D.O.R.S./84-927 [ci-après Règlement].

5 . Tubes soudés en acier au carbone (5 juin 2000) (TCCE).

6 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm> [ci-après Accord antidumping].

7 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-03A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 115.

8 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-03A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 115.

9 . Ibid.; pièce du Tribunal RR-2002-001-25.04, dossier administratif, vol. 5.2 à la p. 219; pièce des importateurs et des autres parties B-09/C-08, para. 2, dossier administratif, vol. 13.

10 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-03A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 115.

11 . Ibid. à la p. 116.

12 . Ibid.

13 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-25.04, dossier administratif, vol. 5.2 à la p. 219; pièce du Tribunal RR-2002-001-26.02 (protégée), dossier administratif, vol. 6.2 aux pp. 56, 58; pièce du Tribunal RR-2002-001-26.04 (protégée), dossier administratif, vol. 6.2A à la p. 75.

14 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-25.01, dossier administratif, vol. 5.2 à la p. 93.

15 . Le Tribunal prend note des éléments de preuve protégés de M. Lippé à cet égard. Voir la pièce des importateurs et des autres parties B-10/C-09 (protégée), para. 27, dossier administratif, vol. 14.

16 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-13.04, dossier administratif, vol. 3C aux pp. 226-227; pièce du Tribunal RR-2002-001-13.04, dossier administratif, vol. 3D aux pp. 210-211, 234; pièce des producteurs et des autres parties A-02, paras. 36-37, dossier administratif, vol. 11.

17 . Pièce des producteurs et des autres parties A-02, para. 20, dossier administratif, vol. 11.

18 . Transcription de l'audience publique, vol. 3, 23 octobre 2002, aux pp. 467, 494.

19 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-03A, dossier administratif, vol. 1 aux pp. 119-120.

20 . Ibid.

21 . Public Pre-hearing Staff Report, révisé (8 octobre 2002), pièce du Tribunal RR-2002-001-05A, dossier administratif, vol. 1A à la p. 140.

22 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 22 octobre 2002, à la p. 285; Transcription de l'audience publique, vol. 3, 23 octobre 2002, à la p. 356.

23 . Pièce des importateurs et des autres parties C-01, para. 3, dossier administratif, vol. 13.

24 . Pièce des importateurs et des autres parties C-06 (protégée) à la p. 8, dossier administratif, vol. 14; pièce des importateurs et des autres parties C-07A (protégée) aux pp. 9, 12, dossier administratif, vol. 14.

25 . Pièce des importateurs et des autres parties B-01, para. 33, dossier administratif, vol. 13.

26 . Pièce des importateurs et des autres parties B-02 (protégée), paras. 8-9, 28-39, dossier administratif, vol. 14; pièce des importateurs et des autres parties C-02 (protégée), paras. 30-66, dossier administratif, vol. 14.

27 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 22 octobre 2002, aux pp. 239-241; Transcription de l'audience publique, vol. 2, 22 octobre 2002, aux pp. 321-324; Transcription de l'audience publique, vol. 3, 23 octobre 2002, aux pp. 350-351.

28 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-03A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 119.

29 . Pièce des importateurs et des autres parties B-10B (protégée), para. 10, dossier administratif, vol. 14.

30 . Bien qu'un témoin ait contesté les résultats du calcul des marges de dumping fait par l'ADRC, le Tribunal n'a pas compétence pour contester l'exactitude des marges potentielles de dumping constatées par le commissaire.

31 . Pièce des importateurs et des autres parties D-01, para. 34, dossier administratif, vol. 13; pièce du Tribunal RR-2002-001-RI-04C (protégée), dossier administratif, vol. 10.

32 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-25.01, dossier administratif, vol. 5.2 à la p. 93.

33 . Public Pre-hearing Staff Report, révisé (8 octobre 2002), pièce du Tribunal RR-2002-001-05A, dossier administratif, vol. 1A à la p. 177.

34 . Pièce des importateurs et des autres parties B-10B (protégée), para. 10, dossier administratif, vol. 14.

35 . Pièce des importateurs et des autres parties B-02 (protégée), para. 40, dossier administratif, vol. 14; pièce des importateurs et des autres parties C-02 (protégée), para. 67, dossier administratif, vol. 14; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 1, 21 octobre 2002, à la p. 34.

36 . Public Pre-hearing Staff Report, révisé (8 octobre 2002), pièce du Tribunal RR-2002-001-05A, dossier administratif, vol. 1A à la p. 160.

37 . Pièce des importateurs et des autres parties C-01, para. 13, dossier administratif, vol. 13.

38 . Pièce des producteurs et des autres parties A-02, para. 65, dossier administratif, vol. 11; pièce des producteurs et des autres parties H-01 aux pp. 7, 9, dossier administratif, vol. 11.

39 . Pièce des producteurs et des autres parties A-02, para. 70, dossier administratif, vol. 11; pièce des producteurs et des autres parties A-04, paras. 21-22, dossier administratif, vol. 11.

40 . Protected Pre-hearing Staff Report, révisé (8 octobre 2002), pièce du Tribunal RR-2002-001-06A (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 169.

41 . Ibid. aux pp. 220-222; pièce des importateurs et des autres parties B-09/C-08, para. 21, dossier administratif, vol. 13; Transcription de l'audience publique, vol. 2, 22 octobre 2002, à la p. 341.

42 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 22 octobre 2002, à la p. 327; Transcription de l'audience publique, vol. 3, 23 octobre 2002, à la p. 373; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 22 octobre 2002, aux pp. 291-292.

43 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 21 octobre 2002, aux pp. 42, 43, 47; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 22 octobre 2002, à la p. 54.

44 . Protected Pre-hearing Staff Report, révisé (8 octobre 2002), pièce du Tribunal RR-2002-001-06A (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 172.

45 . Ibid.

46 . Transcription de l'audience publique, vol. 3, 23 octobre 2002, à la p. 433.

47 . Supra note 44.

48 . Pièce du Tribunal RR-2002-001-20.06 (protégée), dossier administratif, vol. 6C aux pp. 70-73; Ibid. à la p. 89; pièce du Tribunal RR-2002-001-20.09 (protégée), dossier administratif, vol. 6C aux pp. 249-250, 253-258.

49 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 21 octobre 2002, à la p. 202; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 3, 23 octobre 2002, aux pp. 304-305, 324.

50 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 21 octobre 2002, à la p. 205; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 22 octobre 2002, aux pp. 108-109, 214.

51 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 21 octobre 2002, aux pp. 205-207, 229; Transcription de l'audience publique, vol. 2, 22 octobre 2002, aux pp. 341-342; Transcription de l'audience publique, vol. 3, 23 octobre 2002, aux pp. 420-422, 554-555.

52 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 21 octobre 2002, aux pp. 208-209.

53 . Transcription de l'audience publique, vol. 3, 23 octobre 2002, aux pp. 444-445, 539-540.