CERTAINES TÔLES D'ACIER AU CARBONE LAMINÉES À CHAUD

Réexamens relatifs à l'expiration (article 76.03)


CERTAINES TÔLES D'ACIER AU CARBONE LAMINÉES À CHAUD
Réexamen relatif à l'expiration no RR-2004-004

Ordonnance et motifs rendus
le lundi 27 juin 2005


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un réexamen relatif à l'expiration, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, des conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 27 juin 2000, dans le cadre de l'enquête no NQ-99-004, modifiées le 23 août 2004, dans le cadre du réexamen intermédiaire no RD-2004-002, concernant :

LE DUMPING DE CERTAINES TÔLES D'ACIER AU CARBONE LAMINÉES À CHAUD ORIGINAIRES OU EXPORTÉES DU BRÉSIL, DE LA FINLANDE, DE L'INDE, DE L'INDONÉSIE, DE LA THAÏLANDE ET DE L'UKRAINE, ET LE SUBVENTIONNEMENT DE CERTAINES TÔLES D'ACIER AU CARBONE LAMINÉES À CHAUD ORIGINAIRES OU EXPORTÉES DE L'INDE, DE L'INDONÉSIE ET DE LA THAÏLANDE

ORDONNANCE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, a procédé à un réexamen relatif à l'expiration des conclusions qu'il avait rendues le 27 juin 2000, dans le cadre de l'enquête no NQ-99-004, modifiées le 23 août 2004, dans le cadre du réexamen intermédiaire no RD-2004-002, concernant le dumping de certaines tôles d'acier au carbone laminées à chaud originaires ou exportées du Brésil, de la Finlande, de l'Inde, de l'Indonésie, de la Thaïlande et de l'Ukraine, et le subventionnement de certaines tôles d'acier au carbone laminées à chaud originaires ou exportées de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande.

Aux termes de l'alinéa 76.03(12)a) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur annule par la présente ses conclusions concernant les marchandises susmentionnées.

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre présidant

Richard Lafontaine
Richard Lafontaine
Membre

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Dates de l'audience :

Les 2 et 3 mai 2005

   

Membres du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

 

Richard Lafontaine, membre

 

Zdenek Kvarda, membre

   

Directeur de la recherche :

Réal Roy

   

Agent principal de la recherche :

Douglas Kemp

   

Préposé aux statistiques :

Lise Lacombe

   

Conseiller pour le Tribunal :

Eric Wildhaber

   

Greffier adjoint :

Gillian E. Burnett

   

Agent de soutien au greffe :

Marija Renic

PARTICIPANTS :

Producteurs nationaux

Conseillers/représentants

   

Algoma Steel Inc.

Ronald Cheng
Raahool Watchmaker

   

IPSCO Inc.

Dalton Albrecht
Winxie Tse

   

Exportateur

Conseillers/représentants

   

Azovstal Iron & Steel Works

Donald J. Goodwin
Evgeny G. Pavlenko

TÉMOINS :

Mark Mittleman
Directeur, Produits de tôles
Algoma Steel Inc.

Robert A. Clark
Directeur, Commerce et développement des entreprises
Algoma Steel Inc.

   

Glenn A. Gilmore
Superviseur, Affaires commerciales
IPSCO Inc.

Geoffrey Hatfield
Directeur général, Produits d'acier
Région de l'Ouest
IPSCO Inc.

   

James May
Président
May Commodity Associates

 

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : (613) 993-3595
Télécopieur : (613) 990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Il s'agit d'un réexamen relatif à l'expiration, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation 1 , des conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) le 27 juin 2000, dans le cadre de l'enquête no NQ-99-004 (les conclusions), modifiées le 23 août 2004, dans le cadre du réexamen intermédiaire no RD-2004-002, concernant le dumping de certaines tôles d'acier au carbone laminées à chaud (tôles) originaires ou exportées du Brésil, de la Finlande, de l'Inde, de l'Indonésie, de la Thaïlande et de l'Ukraine, et le subventionnement des tôles originaires ou exportées de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande.

2. Le 13 octobre 2004, le Tribunal a envoyé un avis de réexamen relatif à l'expiration2 à toutes les parties intéressées. De plus, le Tribunal et l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) ont envoyé des questionnaires aux producteurs canadiens, aux importateurs, aux exportateurs et aux producteurs étrangers de tôles.

3. Le 14 octobre 2004, l'ASFC a ouvert une enquête pour déterminer si l'expiration des conclusions causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping et du subventionnement des tôles originaires des pays visés.

4. Le 10 février 2005, l'ASFC a terminé son enquête et a décidé, aux termes du paragraphe 76.03(7) de la LMSI, que l'expiration des conclusions causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping des tôles provenant du Brésil, de l'Inde, de l'Indonésie et de l'Ukraine, ne causerait vraisemblablement pas la poursuite ou la reprise du dumping des tôles provenant de la Finlande et de la Thaïlande et causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du subventionnement des tôles provenant de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande.

5. Le 11 février 2005, le Tribunal a ouvert une enquête, aux termes du paragraphe 76.03(10) de la LMSI, pour déterminer si l'expiration des conclusions causerait vraisemblablement un dommage ou un retard à la branche de production nationale.

6. Le dossier de la présente procédure comprend les pièces suivantes : la transcription des témoignages entendus dans le cadre des parties publiques et à huis clos de l'audience (collectivement, l'audience) tenue à Ottawa (Ontario) les 2 et 3 mai 2005; tous les documents pertinents de l'ASFC, y compris son rapport protégé sur le réexamen relatif à l'expiration, son énoncé des motifs, son index des documents d'information générale et des documents pertinents; les réponses publiques et protégées aux questionnaires de réexamen relatif à l'expiration; les demandes de renseignements et les réponses des parties fournies conformément aux directives du Tribunal; les conclusions; l'avis de réexamen relatif à l'expiration; les rapports publics et protégés préalables à l'audience préparés dans le cadre de l'enquête no NQ-99-004, ainsi que ceux qui ont été préparés dans le cadre de la présente procédure. Toutes les pièces publiques ont été mises à la disposition des parties intéressées, tandis que seuls les conseillers qui avaient déposé auprès du Tribunal un acte de déclaration et d'engagement ont eu accès aux renseignements protégés.

7. Algoma Steel Inc. (Algoma) et IPSCO Inc. (IPSCO) étaient représentées par des conseillers à l'audience. Elles ont présenté des éléments de preuve et des arguments à l'appui d'une prorogation des conclusions.

8. Azovstal Iron & Steel Works (Azovstal), un producteur étranger en Ukraine, était représentée par des conseillers à l'audience et a présenté un exposé à l'appui d'une annulation des conclusions.

9. Un témoin du Tribunal, M. James May, de May Commodity Associates, a aussi comparu à l'audience. La biographie et deux des articles de M. May ont été versés au dossier.

PRODUIT

Définition et description du produit

10. Le produit visé dans le présent réexamen relatif à l'expiration est défini comme il suit : tôles d'acier au carbone laminées à chaud et tôles d'acier allié résistant à faible teneur, n'ayant subi aucun autre complément d'ouvraison que le laminage à chaud, traitées thermiquement ou non, coupées en longueurs, d'une largeur allant de 24 po (+/- 610 mm) à 152 po (+/- 3 860 mm) inclusivement et :

· d'une épaisseur allant de 0,187 po (+/- 4,75 mm) à 5,25 po (+/- 133 mm) inclusivement, à l'exclusion des tôles fabriquées selon les spécifications A515 et A516M/A516 de l'American Society for Testing & Materials (ASTM), nuance 70, d'une épaisseur supérieure à 3,125 po (+/- 79,3 mm), originaires ou exportées du Brésil, de la Finlande, de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande,

· d'une épaisseur allant de 4 po (+/- 101 mm) à 5,25 po (+/- 133 mm) inclusivement, à l'exclusion des tôles fabriquées selon les spécifications A515 et A516M/A516 de l'ASTM, nuance 70, originaires ou exportées de l'Ukraine3 ,

· d'une épaisseur allant de 0,187 po (+/- 4,75 mm) à 3,125 po (+/- 79,3 mm) inclusivement, originaires ou exportées de l'Ukraine, fabriquées selon les spécifications A515 et A516M/A516 de l'ASTM, nuance 70, qui correspondent au carbone équivalent ci-dessous selon la norme SA-20 de l'American Society of Mechanical Engineers (ASME) :

- carbone équivalent égal ou inférieur à 0,40 pour les tôles dont l'épaisseur ne dépasse pas 1,5 po (38,1 mm); ou

- carbone équivalent égal ou inférieur à 0,42 pour les tôles dont l'épaisseur est supérieure à 1,5 po (38,1 mm); ou

- carbone équivalent égal ou inférieur à 0,42, dont les teneurs maximales en hydrogène et en oxygène sont respectivement de 2 parties par million et de 10 parties par million, pour les tôles dont l'épaisseur ne dépasse pas 1,5 po (38,1 mm)4 ,

originaires ou exportées du Brésil, de la Finlande, de l'Inde, de l'Indonésie, de la Thaïlande et de l'Ukraine.

11. Les marchandises suivantes sont spécifiquement exclues de la définition des marchandises en question dans le présent réexamen relatif à l'expiration : les larges-plats, les tôles devant servir à la fabrication de tuyaux et les tôles dont la surface présente, par intervalle régulier, un motif laminé en relief (aussi appelées tôles de plancher), originaires ou exportées du Brésil, de la Finlande, de l'Inde, de l'Indonésie, de la Thaïlande et de l'Ukraine.

12. Pour plus de clarté, les spécifications de l'Association canadienne de normalisation (ACNOR) visées dans la définition du produit représentent diverses nuances dans la spécification générale G40.21 qui s'applique à l'acier destiné à la construction générale.

13. Les spécifications A283M/A283 et A36M/A36 de l'ASTM comprennent les tôles fortes de construction, les spécifications A572M/A572, A588M/A588 et A242M/A242 comprennent les tôles d'acier allié résistant à faible teneur et les spécifications A515M/A515 et A516M/A516 comprennent les tôles utilisées dans les appareils à pression (ci-après tôles pour appareils à pression). La spécification A36M/A36 de l'ASTM est considérée l'équivalent de la spécification G40.21 de l'ACNOR, nuance 300W/44W et, ensemble, ces spécifications sont les plus communes pour les tôles de construction vendues au Canada. La spécification A516M/A516 de l'ASTM, nuance 70, est celle qui est la plus courante pour les tôles utilisées pour appareils à pression vendues au Canada.

14. Dans le cadre du réexamen intermédiaire no RD-2004-002, le Tribunal a exclu des conclusions les tôles pour appareils à pression désulfurisées, de la spécification A516 de l'ASTM, nuance 60 modifiée. Anchor Lamina Inc., de Windsor (Ontario), avait demandé l'exclusion au motif que le produit n'était pas fabriqué au Canada. Algoma a consenti à l'exclusion et précisé qu'elle n'avait pas la capacité de fabriquer un produit identique ou substituable. IPSCO a déclaré qu'elle pouvait fabriquer le produit, mais qu'il n'était pas commercialement efficient d'en fabriquer seulement quelques tonnes. IPSCO a ajouté ne jamais avoir eu de demande pour ledit produit.

Procédé de production

15. Algoma produit de l'acier liquide dans des hauts fourneaux et des convertisseurs basiques (aciérie intégrée). IPSCO produit de l'acier liquide par fusion de ferraille dans des fours électriques à arc (mini-aciérie). Même si certains détails peuvent varier d'une aciérie à l'autre, le procédé de production des tôles à partir de l'acier liquide au Canada est essentiellement le même pour tous les producteurs et comprend la production et le chauffage d'une brame, le décalaminage, le laminage, le dressage, la coupe à dimension, le contrôle et les essais. Les tôles peuvent être traitées thermiquement, ce traitement pouvant comprendre le recuit, la normalisation, la stabilisation, le refroidissement, la trempe ou des combinaisons de ces opérations.

16. Les tôles produites directement sous forme rectangulaire sont désignées par l'expression « tôles en feuilles » et peuvent être produites à toute épaisseur visée par la définition du produit. Les tôles peuvent aussi être produites à partir de tôles en bobines qui sont ensuite coupées à longueur. On parle alors de « tôles coupées à partir de bobines », et ces tôles sont en général produites dans une épaisseur n'excédant pas 0,75 po.

Utilisation

17. Les tôles servent principalement à la fabrication de wagons de chemin de fer, de réservoirs pour le pétrole et le gaz, d'appareils à pression, de machines de construction lourdes, de machines agricoles, de ponts, de navires et de chalands, de pièces d'automobiles et de camions et dans des bâtiments industriels.

PRODUCTEURS NATIONAUX

18. Jusqu'en 2003, la branche de production de tôles au Canada était composée d'Algoma, d'IPSCO et de Stelco Inc. (Stelco). En août 2002, Stelco a réduit le taux d'exploitation de son laminoir à tôles fortes d'Hamilton (Ontario) à 25 p. 100 de la capacité et, en avril 2003, elle l'a réduit à zéro. Le laminoir d'Hamilton pouvait produire la gamme complète de tôles, y compris les tôles épaisses. Aujourd'hui, Algoma et IPSCO produisent une proportion majeure des tôles produites au Canada.

19. Certains centres de service de l'acier produisent aussi des tôles à partir de bobines. D'après les données obtenues dans le cadre d'enquêtes précédentes, les ventes estimatives de tôles coupées à partir de bobines par les centres de service de l'acier représentent environ 15 p. 100 du marché des tôles.

Algoma

20. Algoma, située à Sault Ste. Marie (Ontario) a été constituée en société le 1er juin 1992 conformément à la Loi sur les sociétés par actions de l'Ontario5 . Elle a acquis l'actif et une partie du passif de la société Aciers Algoma Limitée. Le 29 janvier 2002, elle a fait l'objet d'une autre réorganisation en vertu d'un plan d'arrangement et de réorganisation aux termes de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies 6 .

21. Algoma est un producteur de fer et d'acier primaire à intégration verticale qui fabrique, entre autres, des tôles et des feuilles laminées à chaud à ses installations de Sault Ste. Marie (Ontario). Elle peut produire environ 2,7 millions de tonnes d'acier brut par année.

22. Algoma produit des tôles d'une épaisseur pouvant atteindre 4 po sur son laminoir à tôles fortes de 166 po. Pour la fabrication de tôles de moindre épaisseur, le laminoir de 166 po sert de laminoir ébaucheur, et la tôle d'épaisseur réduite est ensuite introduite dans un laminoir d'une largeur de 106 po où elle est ramenée à son épaisseur finale puis enroulée en bobines. En 1997, Algoma a mis en place son nouveau complexe sidérurgique de coulée en bande, ce qui lui a permis de libérer une capacité de production supplémentaire de tôles d'acier à son complexe de laminage de tôles.

IPSCO

23. IPSCO, située à Regina (Saskatchewan), a été constituée en société en 1956 sous la raison sociale Prairie Pipe Manufacturing Company Ltd. Elle est entrée en exploitation en 1957 après avoir terminé la construction de ses installations de fabrication de tuyaux soudés par résistance électrique à Regina. En 1959, IPSCO a acquis l'actif de la société Interprovincial Steel Corp. Ltd. et, en 1960, elle a commencé à produire ses propres laminés plats d'acier, y compris les tôles. Depuis, elle a accru sa capacité de production par des acquisitions et la construction d'usines au Canada et aux États-Unis.

24. L'exploitation d'IPSCO au Canada comprend trois unités d'entreprise : matières premières et transformation des tôles en bobines, activités sidérurgiques canadiennes et produits tubulaires. Les deux premières unités fabriquent et vendent des tôles. IPSCO fabrique des tôles en feuilles à son laminoir de Regina et des tôles coupées à longueur à Regina, à Toronto (Ontario) et à Surrey (Colombie-Britannique). Récemment, elle a modifié son procédé de réduction de brames et remplacé le ratio de réduction/laminage de 3:1 par un ratio de 2:1. Elle a ainsi pu accroître l'épaisseur des tôles qu'elle produit à ses installations de Regina.

25. IPSCO fabrique d'autres produits, y compris des tôles laminées à chaud, des profilés de construction creux, des tuyaux pour canalisation, des tubes ordinaires, des tuyaux pour pilotis, des tubes pour puits de pétrole et de gaz, des caissons de puits d'eau et des caissons de puits de pétrole et de gaz.

26. IPSCO Ontario Inc., une filiale d'IPSCO, a commencé à exploiter une nouvelle usine en janvier 1999, à Toronto. La ligne d'acier revenu nivelé à partir de bobines d'IPSCO Ontario Inc., qui représente la première ligne quarto d'acier revenu nivelé coupé à longueur au Canada, a été conçue pour améliorer la planéité et les propriétés matérielles des tôles et peut produire des tôles à partir de bobines d'une largeur maximale de 96 po et d'une épaisseur allant de 0,10 à 0,75 po.

PRODUCTEURS ÉTRANGERS

27. Le Tribunal n'a reçu que deux réponses au questionnaire de réexamen relatif à l'expiration qu'il a envoyé aux producteurs étrangers et aux exportateurs. Les entreprises qui ont fait parvenir une réponse sont Steel Authority of India Limited (SAIL) et Azovstal. Seule Azovstal a participé au réexamen relatif à l'expiration.

IMPORTATEURS

28. Le Tribunal a envoyé un questionnaire de réexamen relatif à l'expiration à 23 importateurs; Salzgitter Trade est toutefois la seule à avoir répondu à ce questionnaire. En l'absence de réponses plus complètes provenant des importateurs, le Tribunal s'est appuyé sur les données estimatives sur le volume et la valeur des importations de tôles de l'ASFC, telles qu'elles sont présentées dans les rapports de son Système de gestion de l'extraction de renseignements.

DISTRIBUTION DU PRODUIT

Produit national

29. Les producteurs canadiens vendent leurs tôles directement soit à des fabricants-transformateurs soit à des centres de service de l'acier. Les centres de service de l'acier revendent les tôles aux utilisateurs finals ou à d'autres centres de service de l'acier de plus petite taille. Les ventes aux centres de service de l'acier représentent la majeure partie du marché canadien des tôles. Les aciéries canadiennes vendent à leurs clients sur la base du fret payé d'avance (rendu) ou franco à bord (FAB) à l'usine canadienne, selon la préférence du client. Elles commercialisent leurs produits, y compris les tôles, par l'entremise de leur personnel de vente qui communique régulièrement avec leurs clients respectifs.

Produit importé

30. Des importateurs de tôles vendent également à des fabricants-transformateurs et à des centres de service de l'acier. Les importateurs ont recours à diverses méthodes pour vendre leurs produits. Certains font appel à des agents de vente ou à un personnel de vente désigné pour communiquer avec les clients. D'autres répondent aux demandes des clients et se procurent les produits lorsqu'ils reçoivent une demande ou encore sollicitent des commandes de clients lorsqu'ils savent qu'une certaine quantité de tôles est disponible. Certains importateurs expédient directement leurs produits à leurs clients depuis l'aciérie de provenance, tandis que d'autres vendent FAB au quai de déchargement au Canada.

RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE PRÉCÉDENTE

Conclusions

31. Le 27 juin 2000, dans le cadre de l'enquête no NQ-99-004, le Tribunal a conclu que le dumping au Canada de certaines tôles laminées à chaud, originaires ou exportées du Brésil, de la Finlande, de l'Inde, de l'Indonésie, de la Thaïlande et de l'Ukraine, et le subventionnement des tôles, originaires ou exportées de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande, avaient causé un dommage sensible à la branche de production nationale.

POSITION DES PARTIES 7

Position de la branche de production nationale

32. Algoma a soutenu que la branche de production nationale est considérablement plus vulnérable à un dommage sensible causé par la reprise du dumping et du subventionnement depuis l'annulation, dans Tôles II, de l'ordonnance du Tribunal.

33. Algoma a fait valoir que sa capacité de moderniser ses installations pour demeurer constamment concurrentielle dépend de la prorogation des conclusions par le Tribunal, particulièrement étant donné la sous-cotation des prix opérée par les marchandises qui sont importées de certaines sources « émergentes » (p. ex. la Belgique, la Malaysie et la Pologne) et qui livrent concurrence à ses produits. Elle a souligné l'ampleur de la capacité de production excédentaire et la sous-utilisation de la capacité de production de tôles, ces dernières étant un produit de base dont le prix est le principal facteur dans la décision d'achat.

34. Elle a soutenu que la branche de production nationale avait bénéficié, en 2004, d'une reprise notable de la demande et des prix mondiaux. Les revenus qu'elle espérait affecter à l'amélioration de ses installations seront complètement utilisés pour réagir à la concurrence des importations si les conclusions ne sont pas prorogées. Durant la période visée par le réexamen, Algoma n'était pas rentable.

35. Algoma a dit qu'elle devra composer avec des baisses de prix, le recul de la demande et l'accroissement des coûts en 2005 et en 2006, ce qui se traduira par la baisse de ses marges brutes et de ses bénéfices au moment où elle se dirige vers le creux des fluctuations cycliques de l'acier. L'annulation des conclusions exacerbera les difficultés pour une branche de production déjà vulnérable. La branche de production nationale subira également l'incidence négative de la fin de la forte demande d'importations vers la République populaire de Chine (Chine) et des conclusions appliquées par plusieurs administrations contre les tôles provenant de plusieurs des pays visés.

36. Algoma a ajouté que le Tribunal devrait appliquer le paragraphe 76.03(11) de la LMSI et évaluer les effets cumulatifs des marchandises provenant des pays visés dans son examen de la probabilité de dommage sensible puisque les tôles provenant de tous ces pays se livrent concurrence entre elles par l'intermédiaire des mêmes circuits de distribution.

37. IPSCO a ajouté que les produits de tôles importés, et particulièrement de l'Ukraine, se retrouveront rapidement au Canada si les conclusions ne sont pas prorogées, comme cela s'est produit peu après l'annulation de l'ordonnance dans Tôles II. Les exportateurs de l'Ukraine et d'autres pays visés aligneront leurs prix sur ceux des importations non en question, ces prix étant considérablement inférieurs aux prix nationaux actuels, ce qui aggravera d'autant l'effritement des prix nationaux. L'effritement des prix joint à l'accroissement des coûts causera un dommage sensible à la branche de production nationale.

38. IPSCO a aussi soutenu que le Tribunal devrait appliquer les dispositions de la LMSI pertinentes à l'évaluation des effets cumulatifs et a fait valoir que les tôles importées des pays visés sont de qualité comparable, interchangeables, arrivent au Canada par bateau et sont vendues par l'intermédiaire des mêmes circuits de distribution (c.-à-d. les centres de service de l'acier). Relativement aux tôles épaisses, elle a soutenu qu'il n'y avait qu'une seule catégorie de tôles dans le présent réexamen relatif à l'expiration et que le Tribunal n'avait jamais appliqué le critère des effets cumulatifs à une sous-catégorie de marchandises.

39. IPSCO a souligné que le marché national de l'acier est présentement confronté à une baisse des prix, à l'accroissement des coûts et au repli de la demande, certains clients annulant même leurs engagements d'achat. Elle a souligné que, même en présence de diverses mesures de protection du commerce, les tôles importées accroissent leur part de marché et que les tendances récentes se maintiendront si les conclusions ne sont pas prorogées.

40. IPSCO a fait valoir que la conjoncture générale actuelle et prévue n'est pas favorable à la branche de production nationale, soulignant, plus précisément, les éléments de preuve au dossier en ce qui concerne la Chine et la capacité de production inutilisée au Brésil, en Inde et dans les pays membres de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est, ainsi que de la République tchèque, la Roumanie et la Bulgarie. IPSCO a soutenu que les prix élevés qui ont cours sur les marchés d'Amérique du Nord attireront cette production excédentaire étrangère.

Position du fabricant étranger

41. Azovstal, la seule partie opposée à la prorogation des conclusions qui ait comparu dans le cadre de la présente procédure, a soutenu que les seules ventes provenant de l'Ukraine visées dans le présent réexamen relatif à l'expiration étaient les ventes de tôles d'une épaisseur supérieure à 4 po et n'excédant pas 5,25 po (tôles épaisses). De ce fait, elle a soutenu que ces ventes ne devraient pas être incluses dans le cumul des autres ventes de tôles parce que la branche de production nationale ne produit présentement pas de tôles épaisses et ne prévoit pas en produire non plus.

42. Azovstal a demandé l'annulation des conclusions concernant l'Ukraine ou, à défaut, l'exclusion, des conclusions, des tôles épaisses provenant de l'Ukraine.

43. À titre subsidiaire, Azovstal a fait valoir l'absence, en l'espèce, d'éléments de preuve de probabilité quelconque de dommage causé par les marchandises en provenance des pays visés et a souligné plusieurs facteurs qui, à son avis, prouvent son point; elle a donc demandé l'annulation des conclusions.

ANALYSE

44. Le 10 février 2005, conformément au paragraphe 76.03(7) de la LMSI, l'ASFC a décidé que l'expiration des conclusions causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping des tôles provenant du Brésil, de l'Inde, de l'Indonésie et de l'Ukraine, ne causerait vraisemblablement pas la poursuite ou la reprise du dumping des tôles provenant de la Finlande et de la Thaïlande et causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du subventionnement des tôles provenant de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande. Le Tribunal doit donc déterminer, aux termes du paragraphe 76.03(10), si l'expiration des conclusions causera vraisemblablement un dommage ou un retard, selon le cas, à la branche de production nationale. Étant donné qu'il existe présentement une branche de production nationale établie, la question de savoir si l'expiration des conclusions causera vraisemblablement un retard ne se pose pas dans le présent réexamen relatif à l'expiration8 .

45. Le Tribunal doit donc, aux termes du paragraphe 76.03(12) de la LMSI, rendre une ordonnance en vue d'annuler les conclusions, s'il détermine que l'expiration des conclusions ne causera vraisemblablement pas un dommage, ou de proroger les conclusions, avec ou sans modification, s'il détermine que l'expiration des conclusions causera vraisemblablement un dommage.

46. L'ASFC a aussi décidé que l'expiration des conclusions ne causerait vraisemblablement pas la poursuite ou la reprise du dumping des tôles provenant de la Finlande et de la Thaïlande.

47. Par conséquent, conformément au paragraphe 76.03(8) de la LMSI, le Tribunal ne tiendra pas compte de ces marchandises dans l'évaluation des effets cumulatifs du dumping ou du subventionnement aux termes du paragraphe 76.03(11). La question des effets cumulatifs est traitée ci-dessous.

48. En outre, conformément à l'alinéa 76.03(12)a) de la LMSI, le Tribunal rendra une ordonnance annulant les conclusions concernant les tôles provenant de la Finlande et de la Thaïlande au sujet desquelles l'ASFC a décidé que l'expiration des conclusions ne causerait vraisemblablement pas la poursuite ou la reprise du dumping au Canada.

Marchandises similaires et catégories de marchandises

49. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires », par rapport à toutes les autres marchandises, en partie ainsi : « a) marchandises identiques aux marchandises en cause; b) à défaut, marchandises dont l'utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause. »

50. Dans l'examen de la question des marchandises similaires, le Tribunal examine habituellement divers facteurs, y compris les caractéristiques physiques des marchandises, leur méthode de fabrication, leurs caractéristiques de marché et la question de savoir si les marchandises répondent aux mêmes besoins des clients que les marchandises importées en provenance des pays visés. En outre, lorsque les marchandises en question dans une enquête ou un réexamen relatif à l'expiration ne sont pas des marchandises similaires les unes par rapport aux autres, des catégories distinctes de marchandises sont établies.

51. Dans le cadre de l'enquête initiale, le Tribunal a déclaré ce qui suit dans son exposé des motifs :

[L]es tôles d'acier au carbone sont fabriquées selon diverses spécifications. Les éléments de preuve indiquent que, pour chacune des spécifications, les tôles d'acier au carbone de production nationale concurrencent les marchandises en question, telles que les a définies le Commissaire, qu'elles ont les mêmes utilisations finales et qu'elles peuvent leur être substituées. Le Tribunal est donc d'avis que toutes les tôles d'acier au carbone de production nationale répondant à la définition des marchandises en question qu'a donnée le Commissaire, y compris les tôles de construction, les tôles pour appareils sous pression, les tôles en feuilles et les tôles coupées à partir de bobines, sont des « marchandises similaires » aux marchandises en question.

[. . .]

Il est clair pour le Tribunal que, d'une façon générale, il existe différentes utilisations finales des tôles de différentes épaisseurs ou spécifications. Cela dit, toutes les tôles font l'objet de procédés communs de fabrication et présentent des caractéristiques de marché similaires, comme les structures de prix et les circuits de distribution. À cet égard, le Tribunal prend note des éléments de preuve introduits à l'audience selon lesquels le prix des tôles d'une épaisseur particulière ou fabriquées selon une spécification particulière, comme les tôles pour appareils sous pression, est dérivé du prix de base établi pour les tôles de construction standard. Un montant spécifique en dollars est ensuite ajouté en fonction des différentes épaisseurs et des propriétés chimiques ou mécaniques. Le Tribunal est d'avis que les tôles qui satisfont à une spécification particulière peuvent être substituées dans les applications qui exigent des spécifications moins rigoureuses. L'occurrence d'une telle substitution est plus probable dans les cas où de telles tôles sont offertes à des prix compétitifs par rapport aux prix des autres tôles9 .

Le Tribunal conclut donc qu'il n'existe qu'une catégorie de marchandises aux fins du présent réexamen relatif à l'expiration.

52. En l'espèce, le Tribunal n'a pas été saisi d'éléments de preuve qui justifieraient de s'écarter des conclusions sur les « marchandises similaires » et les « catégories de marchandises » rendues au moment de l'enquête. Par conséquent, le Tribunal est d'avis qu'il n'existe qu'une catégorie de marchandises aux fins du présent réexamen relatif à l'expiration et que les utilisations et les autres caractéristiques des tôles produites par la branche de production nationale qui satisfont à la définition du produit sont très proches de celles des tôles importées en provenance des pays visés, qu'elles peuvent leur être substituées et qu'elles sont donc des marchandises similaires aux marchandises importées des pays visés.

Branche de production nationale

53. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit « branche de production nationale » en partie ainsi : « l'ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. »

54. La production totale de marchandises similaires des producteurs nationaux qui ont participé au présent réexamen relatif à l'expiration représente environ 85 p. 100 de la production collective nationale des marchandises similaires. Certains centres de service de l'acier qui coupent des tôles à partir de bobines représentent les autres 15 p. 100 de la production nationale. Par conséquent, le Tribunal conclut que, aux fins du présent réexamen relatif à l'expiration, les producteurs nationaux qui ont participé à la procédure représentent une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires.

Effets cumulatifs

55. Aux termes du paragraphe 76.03(11) de la LMSI, le Tribunal évaluera les effets cumulatifs du dumping ou du subventionnement des marchandises importées de plus d'un pays s'il est convaincu qu'une telle évaluation est indiquée, compte tenu des conditions de concurrence entre les marchandises importées d'un ou de plusieurs de ces pays et soit les marchandises importées d'un ou de plusieurs autres de ces pays soit les marchandises similaires des producteurs nationaux10 .

56. Comme il a déjà été indiqué, en raison de l'application du paragraphe 76.03(8) de la LMSI, si le Tribunal est convaincu qu'une évaluation des effets cumulatifs est indiquée, il ne tient compte que des marchandises au sujet desquelles l'ASFC a décidé que l'expiration des conclusions causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping (du Brésil, de l'Inde, de l'Indonésie et de l'Ukraine) ou du subventionnement (de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande).

57. Si le Tribunal n'est pas convaincu que l'évaluation des effets cumulatifs est indiquée, il doit alors procéder à une analyse distincte des effets du dumping relativement à chaque pays.

58. Les conditions de concurrence que le Tribunal a pris en considération par le passé comprenaient le prix, la qualité, les modes de transport, les circuits de distribution et les marchés géographiques.

59. Il ressort des éléments de preuve que les tôles sont un produit de base. Le prix est donc un facteur clé pour enlever des ventes, indépendamment de la source du produit. En tant que produit de base, les tôles importées de chacun des pays visés sont interchangeables et le Tribunal voit dans cette interchangeabilité une nette indication que leur qualité est semblable. De plus, les tôles importées de chacun des pays visés sont expédiées au Canada par l'intermédiaire du même mode de transport (c.-à-d. les navires océaniques) et distribuées au Canada par l'intermédiaire du même type de circuit de distribution (c.-à-d. les courtiers et les centres de service de l'acier). Rien n'indique que ces conditions de concurrence vont changer dans un avenir prévisible.

60. Le Tribunal fait observer que, à plusieurs reprises, y compris au moment de l'enquête initiale concernant cette question, il a procédé à l'évaluation des effets cumulatifs dommageables à la fois des marchandises sous-évaluées et des marchandises subventionnées (« cumul croisé »)11 .

61. Compte tenu des conditions de concurrence dont il a déjà été traité, et des effets entremêlés du dumping et du subventionnement lorsqu'ils sont présents ensemble, le Tribunal est convaincu qu'il est indiqué de procéder à l'évaluation des effets cumulatifs à la fois des tôles sous-évaluées provenant du Brésil, de l'Inde, de l'Indonésie et de l'Ukraine et des tôles subventionnées provenant de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande.

62. Les arguments présentés par Azovstal concernant les effets cumulatifs en ce qu'ils se rapportent aux tôles épaisses provenant de l'Ukraine n'ont pas convaincu le Tribunal, car à son avis il n'existe qu'une seule catégorie de marchandises aux fins du présent réexamen relatif à l'expiration.

Probabilité de dommage

63. Le paragraphe 37.2(2) du Règlement sur les mesures spéciales d'importation 12 énumère certains facteurs que le Tribunal peut prendre en compte dans l'examen de la probabilité de dommage. Ces facteurs sont analysés ci-après sous les cinq rubriques générales suivantes : les conditions du marché à l'échelle internationale et à l'échelle nationale; le volume probable des marchandises sous-évaluées ou subventionnées; les prix probables des marchandises sous-évaluées ou subventionnées; l'incidence probable des marchandises sous-évaluées ou subventionnées sur la branche de production nationale et le rendement probable de la branche de production nationale.

64. Dans l'évaluation de la probabilité de dommage, le Tribunal a, de façon constante, été d'avis qu'il doit concentrer son attention sur ce qui va raisonnablement se passer à court ou à moyen terme, en général dans les 18 à 24 mois13 .

Conditions du marché à l'échelle internationale et à l'échelle nationale

65. Durant la période visée par le réexamen du Tribunal, les marchés nationaux et mondiaux de l'acier ont considérablement évolué. Entraînés par l'augmentation rapide de la demande d'acier et des matières premières nécessaires à sa fabrication, particulièrement en Chine, les prix des tôles ont affiché une hausse spectaculaire. Les données de MEPS montrent que les prix mondiaux des tôles laminées à chaud ont plus que doublé depuis le milieu de 200214 . D'une façon similaire, les prix des matières premières ont atteint des records historiques et devraient poursuivre leur ascension dans la foulée de la mise en service de nouvelles capacités de production15 .

66. Il ressort des éléments de preuve que, de 1998 à 2004, la consommation apparente chinoise d'acier brut a augmenté en moyenne de 14,4 p. 100 par année. Cette augmentation éclipse celle de la consommation apparente d'acier brut dans le reste du monde, à savoir environ 2,8 p. 100 par année durant la même période16 . En 2004, cependant, la demande d'acier a augmenté considérablement dans tous les pays. La consommation mondiale d'acier a bondi de presque 9 p. 100 par rapport à 2003. L'Amérique du Nord a affiché la croissance la plus forte, plus de 15 p. 100, la consommation dans le reste des pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques affichant un taux de croissance de 3,4 p. 100. Dans les Nouveaux États indépendants, cette croissance a atteint 13,5 p. 100, la demande étant également à la hausse en Asie, en Amérique latine et au Moyen-Orient17 .

67. Metal Bulletin Research (MBR) prévoit que l'Asie dans son ensemble sera, en 2005, à l'origine de la majeure partie de la croissance de la consommation mondiale d'acier. De plus, il prévoit que les prix de la plupart des produits de l'acier augmenteront sur la plupart des marchés asiatiques tant au deuxième qu'au troisième trimestres de 200518 .

68. Il ressort aussi des éléments de preuve que, en raison des énormes ajouts de capacité présentement constatés en Chine, certains analystes de l'acier croient qu'il y aura un excédent de l'offre de tôles en Chine en 200719 .

69. En Amérique du Nord, d'après les prévisions, le marché de l'acier continuera de croître, mais moins rapidement, et les ventes de biens durables et d'équipement devraient afficher une croissance stable, mais non rapide20 . Aux États-Unis, les dépenses dans le secteur de la construction non résidentielle, le principal marché consommateur de tôles, ont augmenté de 9 p. 100 aux deux premiers mois de 200521 . Au Canada, la construction non résidentielle devrait afficher une robustesse relative. Par conséquent, la demande de tôles devrait elle aussi être relativement forte22 . Une telle conjoncture devrait s'accompagner d'une stabilité des prix.

Volume probable des marchandises sous-évaluées ou subventionnées

70. Durant la période de janvier 2001 à décembre 2004, le volume des importations en provenance des pays visés a été négligeable. Cependant, la branche de production nationale a soutenu qu'il existe une importante capacité inutilisée dans les pays visés et que, advenant l'annulation des conclusions, ces pays utiliseraient cette capacité pour expédier d'importantes quantités d'acier vers le marché canadien, à des prix sous-évalués.

71. À l'appui de sa position, la branche de production nationale a soutenu que la Chine est devenue un exportateur net de tôles et que les pays qui approvisionnaient la Chine par le passé sont maintenant à la recherche de nouveaux marchés. En outre, puisque les prix de l'acier en Amérique du Nord sont parmi les plus élevés au monde, la branche de production nationale a avancé que ces prix élevés attireront naturellement les importations. La branche de production nationale a soutenu que les activités des importateurs et des commerçants qui sont constamment à la recherche de nouvelles sources d'approvisionnement à bas prix faciliteront ces importations. Enfin, pour regagner une part de marché perdue au profit des pays émergents, les exportations des pays visés devraient être vendues à des prix inférieurs aux prix offerts par les pays émergents.

72. À la lumière des éléments de preuve au dossier, le Tribunal a une opinion différente sur la manière dont les producteurs de tôles des pays visés pourraient livrer concurrence advenant l'annulation des conclusions.

73. L'Ukraine, par exemple, est un grand producteur de tôles et une importante source de préoccupations pour la branche de production nationale. Durant la période visée par le réexamen23 , les producteurs de l'Ukraine n'ont pratiquement pas exporté de tôles au Canada. Cependant, il importe de prendre note que, à la suite de l'annulation de l'ordonnance dans Tôles II, les tôles provenant de l'Ukraine constituent un petit sous-ensemble de la gamme totale de tôles, composé uniquement de tôles d'une épaisseur allant de 4,0 po à 5,25 po et certaines tôles à faible teneur en carbone pour appareils à pression d'une épaisseur allant de 0,187 po à 3,125 po24 .

74. Les producteurs nationaux ont reconnu que, dans la plupart des cas, ils ne peuvent pas produire de tôles d'une épaisseur excédant 4,0 po, ou ne sont pas intéressés à le faire. Un témoin d'Algoma a déclaré que cette dernière a produit et vendu des tôles d'une épaisseur se situant entre 3/16 po et 4 po25 . D'après les éléments de preuve, IPSCO peut produire des tôles de construction d'une épaisseur pouvant atteindre 4 po par application d'un ratio de réduction de 2 à 1; elle a fabriqué des tôles d'une épaisseur atteignant jusqu'à 4,25 po, mais seulement dans les nuances d'acier allié26 . Un témoin d'IPSCO a fait observer que la production de tôles d'une épaisseur excédant 3 po se rapporte généralement à des produits haut de gamme de spécialité, des nuances alliées d'acier autre que de construction27 . De plus, le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels les tôles d'acier allié d'une épaisseur de 4,25 po d'IPSCO étaient exclusivement vendues sur les marchés d'exportation28 .

75. Au sens strict, les éléments de preuve établissent qu'IPSCO peut produire des tôles d'une épaisseur excédant 4,0 po. Cependant, il ressort aussi des éléments de preuve que ces tôles sont des tôles de spécialité haut de gamme autres que de construction qui ne sont pas destinées à livrer concurrence aux tôles sous-évaluées sur le marché national29 . De ce fait, le Tribunal est d'avis que les producteurs nationaux ne livrent pas véritablement concurrence sur le marché national en ce qui a trait aux tôles d'une épaisseur excédant 4,0 po. Par conséquent, tout en prévoyant que l'Ukraine expédiera des tôles épaisses au Canada advenant l'annulation des conclusions, le Tribunal n'est pas d'avis que de telles importations causeront vraisemblablement un dommage.

76. En ce qui a trait aux tôles à faible teneur en carbone pour appareils à pression, les producteurs nationaux ont soutenu que, par le passé, l'Ukraine avait exporté de telles tôles vers le Canada pour tenter de contourner des conclusions précédentes du Tribunal concernant certaines tôles de construction. Cependant, ces conclusions ont depuis été annulées, et l'Ukraine peut à loisir exporter vers le Canada des tôles de construction d'une épaisseur de moins de 4 po30 . Dans la mesure où les exportations provenant de l'Ukraine ne sont plus maintenant assujetties aux mesures antidumping canadiennes et l'Ukraine livre maintenant concurrence sur le marché national en offrant des tôles de moindre valeur, le Tribunal est d'avis que, étant donné la vive concurrence au niveau des prix sur le marché national des tôles31 , l'Ukraine ne continuera vraisemblablement pas d'expédier au Canada des tôles à valeur plus élevée pour appareils à pression comme autre moyen de concurrencer les tôles de construction de moindre valeur32 .

77. En ce qui a trait au volume potentiel des importations provenant de l'Inde, le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels, même si la capacité de production de ce pays en ce qui concerne les tôles galvanisées et les bobines de laminés à chaud destinés à la fabrication de produits de bandes affichent une forte croissance, cette croissance n'a pas été accompagnée d'une augmentation correspondante de la capacité de production de tôles de l'Inde33 . Selon le témoin du Tribunal, la capacité de production de tôles de l'Inde ne devrait vraisemblablement pas augmenter sensiblement avant 2007. Ce témoignage est corroboré par les données soumises au Tribunal par Steel Authority of India Limited (SAIL), un des plus grands producteurs de tôles d'acier laminées à chaud en Inde, sinon le plus grand34 . La capacité de production de tôles de SAIL est demeurée stable depuis 2001. En outre, le taux d'utilisation de cette compagnie a augmenté chaque année au point où, présentement, sa capacité est à toutes fins pratiques pleinement utilisée35 .

78. En plus des indications selon lesquelles la capacité de production de tôles de l'Inde ne devrait pas augmenter dans un proche avenir, le Tribunal a aussi pris connaissance d'éléments de preuve que la demande d'acier en Inde affiche une croissance rapide et l'acier qui était auparavant dirigé vers le marché d'exportation est maintenant utilisé à l'interne36 . Pour ces motifs, le Tribunal est d'avis que, si l'Inde exporte des tôles vers le Canada advenant l'annulation des conclusions, le volume de ces exportations sera vraisemblablement faible.

79. Même si le Brésil contribue dans une proportion de moins de 5 p. 100 à la production mondiale d'acier brut, il est un acteur international important, les taux de croissance de sa consommation d'acier dépassant récemment celui de la consommation mondiale. De plus, selon les prévisions, le taux de croissance de la consommation d'acier au Brésil continuera de dépasser les taux de croissance mondiaux à court terme, dans la foulée de la poursuite du boom de la construction dans ce pays et de l'augmentation de la production dans son secteur de l'automobile37 . Il ressort des éléments de preuve que la demande issue des secteurs de la construction et de l'automobile contribuera à garder les laminés plats d'acier au Brésil. Malgré cette croissance considérable de la consommation, les aciéries brésiliennes, qui étaient exploitées à pleine capacité en 2004, n'ont pas procédé à des expansions importantes de leur capacité de production de laminés plats38 .

80. Le Tribunal a pris connaissance de certains éléments de preuve que le marché de l'acier au Brésil a fléchi au début de 2005 et que les exportations de produits plats du Brésil ont légèrement augmenté39 . Toutefois, le Tribunal a aussi entendu des témoignages selon lesquels le marché des tôles au Brésil est restreint et les exportations en provenance de ce pays se composent surtout de brames et d'acier laminé à froid40 . Le Tribunal est d'avis que la preuve d'une activité économique accrue au Brésil, et particulièrement dans les secteurs consommateurs de tôles, corrobore la proposition selon laquelle les tôles produites au Brésil seront vraisemblablement destinées à ce pays, pour satisfaire à la demande intérieure croissante, plutôt qu'expédiées au Canada à des prix sous-évalués.

81. Certains éléments de preuve montrent que l'Indonésie projette d'accroître sa capacité de production d'acier de 2,5 millions de tonnes d'ici 200841 . Toutefois, il ne semble guère y avoir de projet concernant la production de tôles, au dire du témoin du Tribunal42 . Par ailleurs, il ressort aussi des éléments de preuve que l'Australie a imposé des droits antidumping sur les importations de tôles laminées à chaud provenant de l'Indonésie en avril 200443 . Cependant, un tsunami dans l'océan Indien a depuis cette date causé un dommage étendu à l'infrastructure de l'Indonésie et des pays voisins, y compris la Thaïlande et l'Inde. Selon MBR44 , le dommage causé par le tsunami a donné naissance à une importante demande d'acier devant servir à la reconstruction de l'infrastructure, des ponceaux, des routes, des ponts et des ports. De plus, les nouvelles constructions contiendront vraisemblablement beaucoup plus d'acier que celles qu'elles remplacent, ce qui augmentera d'autant la demande d'acier dans ces pays.

82. Le Tribunal ne peut prévoir combien de temps il faudra pour restaurer l'infrastructure dans les régions dévastées par le tsunami; il est cependant convaincu que, puisque l'Indonésie n'a pas expédié de tôles au Canada durant la période visée par le réexamen du Tribunal et que l'industrie sidérurgique indonésienne concentrera vraisemblablement ses efforts vers l'approvisionnement de l'initiative de reconstruction en Indonésie dans les régions frappées par le tsunami, le volume de tôles que l'Indonésie pourrait exporter vers le Canada, le cas échéant, sera vraisemblablement faible.

83. En ce qui a trait à la Thaïlande, il ressort des éléments de preuve que sa capacité a augmenté en 2004 et que d'autres ajouts de capacité sont envisagées pour les années 2006 et 200745 . Au sujet de ces ajouts, le témoin du Tribunal a fait observer que la Thaïlande est un importateur net de tôles et que toute expansion de capacité dans cette région servira vraisemblablement à remplacer les importations de tôles46 . Le témoin a aussi fait observer que le haut fourneau d'une capacité annuelle de 5 millions de tonnes prévu par le Sahaviriya Group n'approvisionnera pas nécessairement le laminoir de tôles de cette société, mais plutôt le laminoir d'acier en bobines et les installations de production de billettes et de relaminage des tiges47 .

84. Comme l'Indonésie, la Thaïlande a été frappée par le tsunami. Le Tribunal est d'avis que la demande intérieure thaïlandaise d'acier, au-delà des besoins normaux, augmentera certainement dans la foulée des efforts de reconstruction. Le Tribunal est convaincu que, puisqu'elle est un importateur net de tôles en temps normal, la Thaïlande le demeurera et il est peu probable que les producteurs de tôles de la Thaïlande expédient un volume notable de tôles au Canada dans un proche avenir.

85. Par conséquent, à la lumière des témoignages et des éléments de preuve susmentionnés, le Tribunal conclut qu'il n'y aura vraisemblablement pas d'augmentation importante du volume des tôles sous-évaluées ou subventionnées provenant des pays visés advenant l'annulation des conclusions, sauf possiblement une augmentation des tôles épaisses provenant de l'Ukraine, dans quel cas il n'y aura vraisemblablement pas d'incidence sur la branche de production nationale, tel qu'il est indiqué plus haut.

Prix probables des importations sous-évaluées ou subventionnées

86. La branche de production nationale a soutenu que les prix des tôles évoluent présentement à la baisse par rapport au sommet qu'ils ont atteint en 2004. Au titre des causes de ce recul des prix, la branche de production nationale a inclus le fléchissement de la demande, la liquidation des stocks des centres de service de l'acier et les ventes de tôles à prix sous-évalués tant par les pays émergents que les pays visés par l'ordonnance annulée dans Tôles II. La branche de production nationale a soutenu que, si les conclusions devaient être annulées, l'effritement des prix s'en trouverait aggravé, puisque les importations sous-évaluées provenant des pays visés livreraient concurrence aux tôles à bas prix provenant des pays émergents pour capturer une part du marché.

87. D'après les éléments de preuve, les prix mondiaux de l'acier évoluent à la hausse depuis 2001 et ont affiché des augmentations particulièrement marquées en 2003 et 200448 . Les prix de l'acier atteignent aujourd'hui des sommets inégalés depuis 10 ou 15 ans49 . Les analystes du marché de l'acier semblent maintenant indiquer que, d'une façon générale, les prix de l'acier ont atteint leur sommet et se replieront au deuxième trimestre de 2005 et jusqu'en 2006, principalement en raison de l'offre croissante d'acier, combinée à la baisse de la demande et à la liquidation des stocks constitués en 2004 lorsqu'il y avait lieu de s'inquiéter de la disponibilité des approvisionnements50 .

88. Même s'il y a certaines indications d'un fléchissement des prix depuis quelques mois, les éléments de preuve dont le Tribunal est saisi portent à croire que, sur une base annuelle, le recul prévu des prix ne sera pas marqué. À la fin de 2004, les prix des tôles avaient atteint un seuil représentant presque le double de celui du début de 2004 et on prévoit que les prix demeureront élevés à cause de l'augmentation des prix des matières premières51 . Aux États-Unis, par exemple, le prix estimatif des transactions de tôles laminées à chaud en avril 2005 était toujours supérieur, dans une proportion d'environ 95 p. 100, au prix des tôles au premier trimestre de 200452 . En Union européenne, les prix des tôles ont continué à augmenter au premier trimestre de 2005 et semblaient devoir poursuivre leur croissance, principalement à cause des ventes de tôles des nuances supérieures pour les navires et des tôles larges haut de gamme pour les oléoducs ou gazoducs53 .

89. En outre, le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels les prix sur le marché des tôles sont d'une façon générale plus robustes que ceux sur le marché global de l'acier parce que les secteurs de l'économie mondiale qui consomment des tôles affichent une vigueur considérable. À l'échelle mondiale, la construction des navires, par exemple, devrait continuer à constituer un marché très robuste jusqu'en 2007, particulièrement en Asie54 . D'une façon similaire, il est prévu que la demande demeurera forte dans le secteur de la défense tout comme celle des wagons et de la machinerie lourde55 . Au Canada, le secteur de la construction prévoit que la forte croissance constatée au plan intérieur en 2004 devrait se poursuivre encore au moins deux ans56 .

90. Les analystes s'attendent donc que les prix sur le marché des tôles se comporteront mieux que ceux des autres secteurs. En Union européenne, par exemple, on prévoit que les prix des tôles reculeront quelque peu au premier trimestre de 2005, mais se redresseront au troisième trimestre de la même année. En Amérique du Nord, d'après les prévisions, les prix des tôles devraient être stables ou afficher certains gains, tandis qu'en Asie, il devrait évoluer fortement à la hausse durant le reste de 200557 .

91. Le Tribunal est d'avis, étant donné les tendances actuelles des prix des tôles dans le monde et au Canada, qu'il n'y a pas lieu de croire que, aux niveaux actuels et prévus de la demande, l'évolution du prix des tôles au Canada s'écartera de celle des prix ailleurs dans le monde. Sur le marché mondial où les prix des tôles devraient, selon les prévisions, augmenter un peu ou, à tout le moins, se maintenir à leurs sommets historiques actuels, le Tribunal conclut qu'il est difficile de prétendre que les pays visés vendront des tôles au Canada moins cher qu'ils les vendent dans d'autres régions du monde.

Incidence probable des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur la branche de production nationale et rendement probable de la branche de production nationale

92. La branche de production nationale a soutenu être devenue considérablement plus vulnérable à une reprise du dumping et du subventionnement depuis l'annulation de l'ordonnance dans Tôles II, en mai 2004, son rendement s'étant, selon les dires de la branche de production nationale, auparavant amélioré grâce à l'allégement dont elle avait bénéficié pour concurrencer les importations sous-évaluées et subventionnées.

93. D'après les éléments de preuve mis à la disposition du Tribunal, IPSCO et Algoma exploitent toutes deux présentement leurs installations à leur pleine capacité pratique, ou presque. Le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels Algoma atteint ses limites au plan de la quantité d'acier liquide qu'elle peut produire et cet acier liquide est réparti entre la production d'acier en feuilles et de tôles. L'acier en feuilles est normalement pour Algoma un produit plus rentable et, tant qu'il le demeurera, elle ne sera guère motivée à réduire le volume d'acier liquide qu'elle dirige vers ses activités de production d'acier en feuilles dans l'unique but d'augmenter sa production de tôles58 . D'après les témoignages, depuis deux ou trois ans, à l'exception de 2004, le rendement des tôles n'a pas été aussi bon que celui de l'acier en feuilles; Algoma n'a donc pas affecté plus d'acier liquide à la production de tôles aux dépens de celle d'acier en feuilles. Elle ne le ferait que si les tôles devaient devenir plus rentables sur une période de temps importante59 .

94. D'une façon similaire, les données produites par IPSCO montrent que cette dernière a constamment accru l'utilisation de sa capacité de 2001 à 2004 inclusivement60 . De plus, le rapport du premier trimestre de 2004 d'IPSCO soulignait que toutes ses aciéries étaient alors exploitées à pleine capacité, ou presque, la demande provenant de ses clients, anciens et nouveaux, dépassant sa capacité de production61 . Selon un témoin d'IPSCO, cette dernière a continué à produire à sa pleine capacité ou presque au premier trimestre de 2005 et a dû importer des tôles de ses installations aux États-Unis pour satisfaire à certaines demandes qui dépassaient sa capacité de production d'acier62 .

95. En outre, lorsque Stelco a interrompu l'exploitation de son laminoir de tôles en avril 2003, ni Algoma ni IPSCO n'ont entrepris de combler le vide ainsi créé sur le marché. Algoma a décidé de ne pas approvisionner les clients de Stelco, et ce, surtout parce que produire les tôles pour répondre à leurs besoins l'aurait forcée à réduire sa propre activité de fabrication d'acier en feuilles63 . D'autre part, IPSCO n'a pas pu approvisionner les clients de Stelco parce qu'elle ne fabriquait pas nombre de produits correspondant aux dimensions des tôles offertes par Stelco64 .

96. Le Tribunal est d'avis que ni Algoma ni IPSCO n'ont jugé financièrement attrayante la perspective d'approvisionner les clients de Stelco. L'interruption des activités de production de Stelco était prévisible bien avant le fait65 , et le Tribunal est donc d'avis qu'il aurait été possible de procéder à certains aménagements si l'expansion de la production de tôles de l'une ou de l'autre de ces sociétés avait été dans leur intérêt. Dans la mesure où ni l'une ni l'autre n'a choisi de concurrencer pour s'approprier la clientèle rendue disponible par l'interruption de la production de tôles de Stelco, selon le Tribunal, il est clair qu'Algoma et IPSCO étaient toutes deux disposées à laisser les importations répondre aux besoins des anciens clients de Stelco et qu'elles n'étaient pas intéressées à accroître leur production de tôles aux dépens de leur production d'autres produits.

97. Le Tribunal fait observer que la branche de production nationale s'est très bien tirée d'affaires en 2004, malgré sa volonté apparente de ne pas augmenter sa production de tôles en vue de répondre aux besoins d'une nouvelle source de demande sur le marché66 . De plus, il semblerait que, malgré un certain fléchissement des prix, la branche de production continuera de bien performer en 2005 et 2006. Le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels le marché mondial des tôles est dans l'ensemble plus vigoureux que le marché général de l'acier et que la branche de production peut s'attendre à une forte demande mondiale sur les grands secteurs du marché qu'elle approvisionne, comme ceux de la construction de navires (particulièrement en Asie), du gaz et du pétrole, de la défense, de l'agriculture et de la construction. En Amérique du Nord, on prévoit également une forte demande de tôles dans les secteurs de l'agriculture et de la construction non résidentielle67 .

98. Les coûts des matières premières et de l'énergie sont un facteur sur lequel la branche de production n'a guère d'emprise. Les prix des principaux intrants comme le minerai de fer et la houille à coke sont établis à l'échelle mondiale et, dans les contrats de 2005-2006, le prix du minerai de fer a augmenté de plus de 70 p. 100, tandis que celui de la houille à coke a presque doublé68 . Le Tribunal est d'avis qu'Algoma pourrait connaître un meilleur sort relativement à certains coûts des intrants, puisque le coût de son charbon est fixé dans des contrats valides jusqu'en 200669 . IPSCO, en tant que mini-aciérie, est davantage touchée par le prix de la ferraille. D'après les témoignages, les prix de la ferraille ont récemment fléchi et cette baisse devrait se révéler avantageuse au niveau des coûts pour IPSCO70 .

99. En résumé, selon le Tribunal, il est clair que la branche de production nationale produit présentement à peu près autant de tôles qu'elle le peut et n'a pas l'intention d'augmenter de manière importante le volume de tôles qu'elle produit aux fins de vente sur le marché intérieur. En outre, compte tenu de la bonne performance des secteurs du marché consommateurs de tôles, tant à l'échelle mondiale qu'en Amérique du Nord, une bonne performance qui devrait persister à court ou à moyen terme, le Tribunal est d'avis que les prix des tôles demeureront relativement élevés et que la branche de production nationale continuera d'être rentable.

CONCLUSION

100. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal n'est pas d'avis que l'expiration des conclusions causera vraisemblablement un dommage sensible à la branche de production nationale à court ou à moyen terme. Par conséquent, aux termes de l'alinéa 76.03(12)a) de la LMSI, le Tribunal annule par la présente ses conclusions concernant le dumping des tôles, originaires ou exportées du Brésil, de la Finlande, de l'Inde, de l'Indonésie, de la Thaïlande et de l'Ukraine, et le subventionnement des tôles, originaires ou exportées de l'Inde, de l'Indonésie et de la Thaïlande.


1 . L.R.C. 1985, c. S-15 [LMSI].

2 . Gaz. C. 2004.I.2880.

3 . Les tôles importées de l'Ukraine et d'une épaisseur allant de 0,187 po à 4,0 po, à l'exclusion des tôles fabriquées selon les spécifications A515 et A516M/A516 de l'ASTM, nuance 70, d'une épaisseur supérieure à 3,125 po, étaient visées dans Certaines tôles d'acier au carbone laminées à chaud et certaines tôles d'acier allié résistant à faible teneur (17 mai 2004), RR-2003-001 (TCCE) (Tôles II). L'ordonnance a été annulée, et les marchandises répondant à cette description en provenance de l'Ukraine ne sont plus assujetties aux droits antidumping.

4 . Afin de faciliter la lecture, les références futures à l'épaisseur et à la largeur des tôles d'acier au carbone ou aux dimensions des différents laminoirs à partir desquels les tôles d'acier au carbone sont produites seront données en unités de mesure du système impérial seulement.

5 . L.R.O. 1990, c. B.16.

6 . L.R.C. 1985, c. C-36 [LACC].

7 . Cette partie du texte a pour objet de décrire diverses observations clés soumises par les parties. Elle ne constitue pas un compte rendu exhaustif.

8 . Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit retard comme le retard sensible de la mise en production d'une branche de production nationale.

9 . Aux pp. 19-20.

10 . Paragraphe 76.03(11) de la LMSI.

11 . Maïs-grain (7 mars 2001), NQ-2000-005 (TCCE); Monuments commémoratifs faits de granite noir (20 juillet 1994), NQ-93-006 (TCCE) et (19 juillet 1999), RR-98-006 (TCCE); Sucre raffiné (6 novembre 1995), NQ-95-002 (TCCE); Tôles d'acier au carbone laminées à chaud (27 juin 2000), NQ-99-004 (TCCE).

12 . D.O.R.S./84-927 [Règlement].

13 . L'isolant préformé en fibre de verre pour tuyaux (17 novembre 2003), RR-2002-005 (TCCE) à la p. 12; Certaines préparations alimentaires pour bébés (28 avril 2003), RR-2002-002 (TCCE) à la p. 9; Certains raccords de tuyauterie à souder, de types à pression (16 octobre 1998), RR-97-008 (TCCE) à la p. 12.

14 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-05, dossier administratif, vol. 1A à la p. 44.

15 . Ibid. vol. 1.01C à la p. 363.

16 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-36.03, dossier administratif, vol. 1 à la p. 268.

17 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.16, dossier administratif, vol. 1.01C à la p. 295.

18 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.07, dossier administratif, vol. 1.01 à la p. 359.

19 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.15, dossier administratif, vol. 1.01C à la p. 259.

20 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.20, dossier administratif, vol. 1.01D à la p. 14.

21 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-36.01, dossier administratif, vol. 1 à la p. 244.

22 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, à la p. 203.

23 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-06 (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 23.

24 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-05, dossier administratif, vol. 1A aux pp. 15-16.

25 . Pièce du fabricant A-03, onglet 3 à la p. 2, dossier administratif vol. 11.

26 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 2 mai 2005, à la p. 143.

27 . Pièce du fabricant B-05 à la p. 1, dossier administratif, vol. 11.

28 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 2 mai 2005, à la p. 143.

29 . Pièce du fabricant B-05 à la p. 1, dossier administratif, vol. 11.

30 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 2 mai 2005, à la p. 15.

31 . Pièce du fabricant A-01 à la p. 6, dossier administratif, vol. 11.

32 . Pièce du fabricant B-03 à la p. 2, dossier administratif, vol. 11.

33 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, aux pp. 260-261.

34 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-6.1A (protégée), dossier administratif, vol. 6.1A à la p. 17.

35 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-06A (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 88.

36 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-10.29, dossier administratif, vol. 1.2C à la p. 356.

37 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.18, dossier administratif, vol. 1.01C à la p. 392; pièce du Tribunal RR-2004-004-36.01, dossier administratif, vol. 1 à la p. 255.

38 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.18, dossier administratif, vol. 1.01C à la p. 392.

39 . Pièce du fabricant B-09 à la p. 4, dossier administratif, vol. 11.

40 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, aux pp. 267-268.

41 . Pièce du fabricant A-01 à la p. 34, dossier administratif, vol. 11.

42 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, à la p. 263.

43 . Pièce du fabricant A-01 à la p. 52, dossier administratif, vol. 11.

44 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.06, dossier administratif, vol. 1.01 à la p. 354.

45 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.01, dossier administratif, vol. 1.01 à la p. 103.

46 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, aux pp. 262-263.

47 . Ibid. à la p. 263.

48 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-05, dossier administratif, vol. 1A à la p. 44.

49 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, à la p. 197.

50 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-36.02, dossier administratif, vol. 1A à la p. 261; Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, à la p. 200.

51 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, à la p. 241.

52 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.20, dossier administratif, vol. 1.01D à la p. 16.

53 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.07, dossier administratif, vol. 1.01 à la p. 367.

54 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, à la p. 201.

55 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-36.01, dossier administratif, vol. 1 à la p. 244.

56 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.17, dossier administratif, vol. 1.01C à la p. 377.

57 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-32.20, dossier administratif, vol. 1.01D à la p. 14.

58 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 2 mai 2005, aux pp. 86-87.

59 . Ibid.

60 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-06 (protégée), dossier administratif, vol. 2A à la p. 57.

61 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-13.02, dossier administratif, vol. 3.A à la p. 289.

62 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 2 mai 2005, aux pp. 165, 185.

63 . Ibid. à la p. 86.

64 . Ibid. à la p. 183.

65 . Stelco a réduit le taux d'exploitation de son aciérie de Hamilton à 25 p. 100 de sa capacité en août 2002 et à zéro en avril 2003.

66 . Pièce du Tribunal RR-2004-004-06 (protégée), dossier administratif, vol. 2A aux pp. 69-70.

67 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 3 mai 2005, à la p. 202.

68 . Ibid. à la p. 242.

69 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 2 mai 2005, à la p. 78.

70 . Ibid. à la p. 66.