CAILLEBOTIS EN ACIER

CAILLEBOTIS EN ACIER
Réexamen relatif à l’expiration no RR-2015-001

Ordonnance rendue
le lundi 18 avril 2016

Motifs rendus
le mardi 3 mai 2016

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un réexamen relatif à l’expiration, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, des conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 19 avril 2011 dans le cadre de l’enquête no NQ‑2010‑002, concernant :

LE DUMPING ET LE SUBVENTIONNEMENT DE CAILLEBOTIS EN ACIER ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE

ORDONNANCE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, conformément au paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, a procédé au réexamen relatif à l’expiration de ses conclusions rendues le 19 avril 2011, dans le cadre de l’enquête no NQ-2010-002, concernant le dumping et le subventionnement de caillebotis en acier au carbone et de caillebotis en alliage d’acier, composés de lames porteuses et de traverses, de type standard ou extra-fort, sous forme de panneaux, qu’ils soient galvanisés, peints, enduits, recouverts ou plaqués, originaires ou exportés de la République populaire de Chine.

Aux termes de l’alinéa 76.03(12)(b) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur proroge par la présente ses conclusions concernant les marchandises susmentionnées.

Rose Ritcey
Rose Ritcey
Membre présidant

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre

Peter Burn
Peter Burn
Membre

L’exposé des motifs sera publié d’ici 15 jours.

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Dates de l’audience : les 7 et 8 mars 2016

Membres du Tribunal : Rose Ritcey, membre présidant
Serge Fréchette, membre
Peter Burn, membre

Directeur intérimaire des enquêtes sur les

recours commerciaux : Gayatri Shankarraman

Agent principal des enquêtes sur les

recours commerciaux : Rebecca Campbell

Agent des enquêtes sur les recours commerciaux : Grant MacDougall

Conseiller juridique pour le Tribunal : Peter Jarosz

Stagiaire en droit : Jessica Spina

Agent principal du greffe : Lindsay Vincelli

Agent de soutien du greffe : Sara Pelletier

PARTICIPANTS :

Producteur national

Conseiller/représentant

Fisher & Ludlow

Lawrence L. Herman

TÉMOINS :

Michael Fernie
Vice-président
Fisher & Ludlow

Jim Sealy
Président
Borden Metal Products (Canada) Limited

David J. Halcrow
Vice-président, Achats
Russel Metals

Murray McDonald
Président
Accurate Screen & Grating

Glenn MacKay
Vice-président et directeur général
Amico Canada Inc.

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

  1. Il s’agit d’un réexamen relatif à l’expiration, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation[1], des conclusions de dommage rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), le 19 avril 2011, dans le cadre de l’enquête no NQ-2010-002 [Caillebotis en acier NQ], concernant le dumping et le subventionnement de caillebotis en acier au carbone et de caillebotis en alliage d’acier, composés de lames porteuses et de traverses, de type standard ou extra-fort, sous forme de panneaux, qu’ils soient galvanisés, peints, enduits, recouverts ou plaqués, originaires ou exportés de la République populaire de Chine (Chine) (les marchandises en question).
  2. Aux termes de la LMSI, les conclusions de dommage ou de menace de dommage, et les droits antidumping ou les droits compensateurs qui y sont associés, expirent cinq ans après la date de la dernière ordonnance ou des dernières conclusions, à moins qu’un réexamen relatif à l’expiration n’ait été entrepris avant cette date. Les conclusions rendues le 19 avril 2011 doivent donc expirer le 18 avril 2016.
  3. Le 12 août 2015, le Tribunal a amorcé le présent réexamen relatif à l’expiration. Le 10 décembre 2015, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a déterminé que l’expiration des conclusions causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping et du subventionnement des marchandises en question. Le mandat du Tribunal consiste à déterminer si la reprise ou la poursuite du dumping et du subventionnement causera vraisemblablement un dommage.
  4. En l’espèce, la période de réexamen s’étend du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

CONTEXTE DE LA PROCÉDURE

  1. Dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration, le Tribunal a demandé aux producteurs nationaux, aux importateurs et aux producteurs étrangers de caillebotis en acier de répondre à des questionnaires. À partir des réponses obtenues aux questionnaires et d’autres renseignements au dossier, le personnel du Tribunal[2] a préparé les rapports d’enquête public et protégé.
  2. Le Tribunal n’a reçu aucune demande d’exclusion de produits.
  3. Le Tribunal a tenu une audience publique les 7 et 8 mars 2016. La branche de production nationale a convoqué trois témoins et était représentée par un conseiller juridique. Aucune autre partie n’a pris part à l’audience. Le Tribunal a convoqué deux témoins.

PRODUIT

Définition du produit

  1. Les marchandises faisant l’objet du présent réexamen relatif à l’expiration sont définies comme suit :

Caillebotis en acier au carbone et caillebotis en alliage d’acier, composés de lames porteuses et de traverses, de type standard ou extra-fort, sous forme de panneaux, qu’ils soient galvanisés, peints, enduits, recouverts ou plaqués, originaires ou exportés de la Chine.

Renseignements additionnels sur le produit[3]

  1. Les marchandises en question (communément appelées « grilles d’acier », « grilles à lames métalliques », ou simplement « grilles métalliques ») sont un produit en aval de l’acier consistant en deux ou plusieurs pièces d’acier, dont des lames porteuses et des traverses, qui sont jointes pour former un « panneau » ou un « treillis » (ces termes sont utilisés de manière interchangeable au sein de la branche de production nationale).
  2. Les marchandises en question sont conçues et fabriquées pour soutenir et répartir le poids (communément appelé la « charge ») d’objets ou de personnes en variant les dimensions des lames porteuses et des traverses et l’espace entre celles-ci.
  3. Les marchandises en question sont des caillebotis de type standard ou extra-fort. Les modèles standard sont fabriqués au Canada conformément aux spécifications Metal Bar Grating (MBG) 531 de l’American National Standards Institute (ANSI) et de la National Association of Architectural Metal Manufacturers (NAAMM). L’épaisseur maximale des lames porteuses est de 3/16 po (4,76 mm). Les grilles de construction extra-forte sont fabriquées au Canada conformément aux spécifications MBG 532 de l’ANSI et de la NAAMM et l’épaisseur maximale des lames porteuses est de 3/8 po (9,53 mm).
  4. Les marchandises en question sont fabriquées et vendues sous forme de « panneaux » ou de « treillis ». Les grandeurs des panneaux ou des treillis sont généralement normalisées. La taille la plus habituelle pour les panneaux est de 3 pi (0,91 m) de largeur sur 24 pi (7,32 m) de longueur, bien que les treillis puissent être fabriqués dans des longueurs de 20 pi (6,1 m). Conformément aux spécifications de l’ANSI et de la NAAMM mentionnées ci-dessus, les dimensions des lames porteuses vont généralement de 1/8 po (3,18 mm) d’épaisseur et 3/4 po (19,05 mm) de largeur jusqu’à 3/8 po (9,53 mm) d’épaisseur et 5 po (127 mm) de largeur, selon les exigences de la charge[4].
  5. Sont exclues de la définition des marchandises en question 1) les grilles de métal déployé composées d’une seule pièce ou d’un seul rouleau d’acier en feuilles ou en plaques minces, qui a été fendu et déployé et qui n’est pas soudé ou joint à plusieurs autres pièces d’acier, et 2) les grilles de sécurité à plaques composées d’une seule pièce ou d’un seul rouleau d’acier en feuilles ou en plaques minces, habituellement d’une épaisseur numéro 10 à 18, perforé et formé à froid, qui n’est pas soudé ou joint à plusieurs autres pièces d’acier.
  6. Dans Caillebotis en acier NQ, le Tribunal a aussi mis fin à son enquête sur le dumping et le subventionnement de caillebotis en acier inoxydable originaires ou exportés de la Chine.

Utilisations du produit

  1. Les marchandises en question ont de multiples utilisations finales quant à la portance et à la distribution de la charge, y compris des planchers industriels, des passerelles, des tranchées, des mezzanines, des escaliers, des plateformes de signalisation suspendue (comme la signalisation routière) et des escaliers de secours. Les marchandises peuvent servir de platelage et de soutien pour des constructions industrielles, comme les couvertures de mine de drainage, les rampes de débarquement, les ponts routiers, le matériel roulant de chemin de fer, le revêtement de sol, etc.
  2. Les principaux marchés consistent en des utilisations industrielles et commerciales privées, y compris dans les structures et les systèmes de production pétrolière sur une grande échelle (par exemple les sables bitumineux de l’Alberta et le forage en mer), les centrales énergétiques, les aciéries, les cimenteries, les scieries, les usines de pâte et papier, l’exploitation minière, les usines automobiles et d’autres installations industrielles ou de fabrication. Bien que ces marchandises soient utilisées dans de gros travaux industriels, il est courant qu’elles aient aussi des utilisations commerciales ou résidentielles à plus petite échelle.

Procédé de production

  1. Les marchandises sont fabriquées sur des machines spéciales qui font l’assemblage de deux composantes pour transformer un profilé de grilles en panneaux ou en treillis. Les principales composantes du panneau sont les suivantes : 1) les lames porteuses, qui s’étendent sur toute la longueur du profilé de grilles; 2) les traverses, qui croisent les lames porteuses habituellement de façon perpendiculaire à celles-ci. L’assemblage des lames porteuses et des traverses se fait soit par soudure, soit par rivetage, soit par assemblage hydraulique. Au Canada, des caillebotis en acier sont couramment fabriqués conformément aux spécifications de l’ANSI et de la NAAMM susmentionnées, selon l’un ou l’autre de ces procédés de fabrication (soudure, assemblage hydraulique ou rivetage).
  2. La fabrication comprend généralement les trois étapes suivantes : 1) le refendage; 2) le formage, la soudure ou d’autres méthodes d’assemblage; 3) la finition.
  3. La première étape comporte le dimensionnement du panneau ou du treillis. Des couronnes d’acier laminé à chaud servant à fabriquer les lames porteuses principales sont déroulées et refendues sur le long suivant la largeur voulue puis coupées à la longueur voulue. Des plats d’acier peuvent aussi être utilisés, précoupés aux longueurs et aux largeurs requises. Les barres ou les tiges d’acier servant de traverses sont aussi coupées aux dimensions requises. Quant aux grilles qui utilisent des traverses torsadées, la tige ou la barre peut être mise dans une retordeuse et vrillée avant d’être coupée à la longueur voulue. Comme les lames porteuses refendues sur le long, des traverses en acier précoupées et prétorsadées peuvent être employées.
  4. Les lames porteuses sont mises dans la machine d’assemblage afin d’être dûment espacées. Dans le cas du caillebotis soudé, les lames passent ensuite dans une soudeuse électrique à haute tension qui chauffe le même endroit le long de chacune des lames porteuses jusqu’à une température élevée. Immédiatement après le chauffage, les traverses sont pressées à la machine dans les lames porteuses chauffées. Le pressage des traverses dans les lames porteuses met fin au processus de soudure, formant ainsi la grille en acier semi‑finie en panneau ou treillis. Après cette étape, le panneau subit un test et une inspection qui assurent l’intégrité de l’assemblage soudé, qui garantissent que le produit possède la résistance à la traction voulue, que les lames porteuses sont bien alignées et que le panneau dans son ensemble peut résister aux tolérances de la charge.
  5. D’autres méthodes d’assemblage sont aussi utilisées pour produire des caillebotis en acier. Dans la formation d’une grille « sous-pression », produite au moyen de pressage hydraulique, les lames porteuses et les traverses sont réunies par pression hydraulique pour créer un lien solide entre les lames porteuses et les traverses, ce qui essentiellement les fixe en place. Dans la fabrication des « grilles sertissées », qui constitue une autre forme de pressage hydraulique, les traverses sont enfoncées dans les lames porteuses (habituellement au centre).
  6. Dans le processus de rivetage, des traverses réticulées sont rivées aux lames porteuses. Un orifice rond est préperforé dans les lames avant qu’elles ne soient mises dans le gabarit de montage. Le pressage donne à la traverse une forme en « W » et elle est mise entre les lames porteuses. La hauteur du « W » donne l’espacement des lames. Un rivet est ensuite inséré à la pointe du « W » par l’orifice perforé dans la lame porteuse de manière à fixer la traverse à la lame porteuse.
  7. Les processus de production des grilles pressées hydrauliquement et des grilles rivetées sont similaires à celui de la production des grilles soudées. Dans chaque cas, les lames porteuses longitudinales sont mises dans un gabarit d’assemblage qui tient les lames en place. Les traverses et les lames porteuses sont ensuite jointes par divers processus : soudure, pressage et/ou rivetage. Le pressage hydraulique et le rivetage sont les plus anciennes méthodes de production; elles nécessitent plus de main-d’œuvre et occasionnent des coûts en matériaux plus élevés que la soudure.
  8. La dernière étape peut comprendre la peinture, la galvanisation ainsi que la finition des extrémités. Les panneaux peints sont plongés dans un bain de laque et sont ensuite séchés à l’air. Les panneaux galvanisés sont plongés dans un bain de zinc chargé électrolytiquement pour les protéger contre la corrosion. Les opérations de finition peuvent comprendre l’addition de bandes d’extrémité, de petits assemblages soudés ou d’éléments découpés de base.
  9. D’autres transformations peuvent être faites sur le panneau ou le treillis avant la vente, par exemple il peut être coupé, soudé et façonné. Habituellement, ces étapes supplémentaires ont lieu après le formage du panneau ou du treillis et avant l’étape finale de fabrication. Par exemple, si un panneau doit être coupé, cette étape de la production se situe habituellement avant la peinture ou la galvanisation du panneau.

PRODUCTEURS NATIONAUX

  1. Il y a deux producteurs nationaux de caillebotis en acier au Canada, soit Fisher & Ludlow et Borden Metal Products (Canada) Limited (Borden). Tous deux ont répondu au questionnaire du Tribunal à l’intention des producteurs sur les caillebotis en acier ainsi qu’à l’annexe.

Fisher & Ludlow

  1. Fisher & Ludlow a été établie en 1954 en tant que société privée Canadienne, fabricant de caillebotis, et elle est le plus important fabriquant canadien de caillebotis en acier. Elle possède une usine à Burlington (Ontario), où elle fabrique des caillebotis de type standard extra-fort et en acier inoxydable, principalement selon la méthode du soudage, et d’autres produits, tels que des caillebotis en aluminium, des caillebotis de sécurité et des caillebotis en métal déployé. La société possède une autre usine à Wetaskiwin (Alberta), où elle fabrique des caillebotis en acier de type standard depuis 2006.
  2. Fisher & Ludlow est une division de Harris Steel ULC, qui, à son tour, est détenue en propriété exclusive par Nucor Corporation, de Charlotte (Caroline du Nord). Elle est aussi affiliée à Fisher & Ludlow Inc., un fabricant de caillebotis situé à Wexford (Pennsylvanie).

Borden

  1. Borden, qui a été constituée en société en 1955, est située à Beeton (Ontario). Elle fabrique des caillebotis de type extra-fort et en acier inoxydable au moyen des méthodes de rivetage et de pressage hydraulique. Depuis 1973, Borden produit également des caillebotis en acier en utilisant la méthode de soudage par résistance.

IMPORTATEURS ET PRODUCTEURS ÉTRANGERS

  1. Le Tribunal a demandé aux importateurs potentiels de caillebotis en acier de remplir le questionnaire sur les caillebotis en acier à l’intention des importateurs ainsi que l’annexe. Le Tribunal a reçu sept réponses de sociétés indiquant qu’elles importent des marchandises en question ou des marchandises correspondant à la définition du produit originaires de pays non visés, et 85 réponses de sociétés qui n’importent pas de caillebotis en acier[5].
  2. Le Tribunal a demandé à des producteurs et exportateurs étrangers potentiels de répondre au questionnaire à l’intention des producteurs étrangers. La seule réponse est venue de la société Xinle Boya Metal Products Co. Ltd., qui affirme être un producteur étranger de caillebotis en acier visés par le réexamen relatif à l’expiration du Tribunal[6].
  3. Le Tribunal a convoqué deux témoins à l’audience publique, l’un associé à Accurate Screen & Grating (Accurate) et l’autre à Amico Canada Inc. (Amico).

ÉTABLISSEMENT DES PRIX

  1. Dans le secteur des caillebotis en acier, la vaste majorité des ventes de caillebotis (qu’ils soient achetés au pays ou à l’étranger) se fait selon le « prix au comptant »[7]. Chaque vente faite de cette façon est négociée avec le client. Les acheteurs demandent habituellement des propositions de prix afin d’établir les prix des transactions. Ils peuvent aussi négocier les prix auprès de leurs fournisseurs à partir de l’information commerciale disponible.
  2. Le prix des caillebotis en acier consiste habituellement en un « prix de base » pour les caillebotis de type standard, auquel s’ajoutent des frais selon les différentes caractéristiques demandées par le client pour répondre aux exigences techniques de l’utilisation à laquelle les caillebotis en acier sont destinés. Les caractéristiques importantes qui déterminent le prix des caillebotis en acier sont la nuance, l’épaisseur, la largeur, le type de produit, l’enduit, la finition de surface et l’importance de la transformation ultérieure requise.

CADRE LÉGISLATIF

  1. Conformément au paragraphe 76.03(10) de la LMSI, le Tribunal doit déterminer si l’expiration des conclusions causera vraisemblablement un dommage[8]. Il doit également, aux termes du paragraphe 76.03(12), rendre une ordonnance annulant les conclusions, s’il détermine que l’expiration des conclusions ne causera vraisemblablement pas de dommage, ou prorogeant les conclusions avec ou sans modification, s’il détermine que l’expiration des conclusions causera vraisemblablement un dommage.
  2. Le Tribunal doit trancher un certain nombre de questions liées au cadre législatif et de questions préliminaires avant de rendre les conclusions mentionnées ci-dessus.
  3. La vraisemblance de dommage à la branche de production nationale doit être évaluée en fonction des producteurs nationaux des marchandises similaires aux marchandises en question. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer en quoi consistent les « marchandises similaires ». Une fois cette détermination faite, le Tribunal doit déterminer quels producteurs nationaux des marchandises similaires constituent la « branche de production nationale ».
  4. Le Tribunal doit ensuite déterminer s’il évaluera l’effet cumulatif du dumping et du subventionnement des marchandises en question (c’est-à-dire s’il procédera au cumul croisé des effets du dumping et du subventionnement)[9].

MARCHANDISES SIMILAIRES ET CATÉGORIES DE MARCHANDISE

  1. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » par rapport à toutes les autres marchandises comme suit :

a) marchandises identiques aux marchandises en cause;

b) à défaut, marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

Les marchandises en question et les marchandises similaires comprennent les caillebotis transformés

  1. Le Tribunal constate que la définition des marchandises en question ne fait pas expressément référence à la transformation. Par conséquent, avant de déterminer quelles sont les marchandises similaires, le Tribunal déterminera si les marchandises en question comprennent les caillebotis ordinaires et les caillebotis transformés. Cela est nécessaire pour que le Tribunal puisse déterminer quels sont les producteurs nationaux de marchandises similaires.
  2. La transformation des caillebotis consiste essentiellement à modifier des panneaux standard de 3 pi sur 24 pi[10] en les coupant[11], en y ajoutant des éléments découpés ou en y soudant d’autres éléments en acier (par exemple des nez de marche ou des garde-pieds)[12].
  3. Autrement dit, les caillebotis d’un autre format que le format standard de 3 pi sur 24 pi (par exemple des caillebotis coupés en panneaux de 3 pi sur 8 pi) sont des caillebotis transformés[13]. Les témoins conviennent que les marchandises similaires, selon l’interprétation qu’en fait la branche de production nationale, comprennent les caillebotis ordinaires et les caillebotis transformés. Par exemple, les normes de l’industrie mentionnent les éléments découpés et les éléments soudés[14].
  4. De l’avis du Tribunal, les caillebotis transformés décrits ci-dessus sont donc compris dans la définition des marchandises similaires.
  5. Logiquement, il existe un point où le caillebotis perd sa qualité de caillebotis, par exemple lorsqu’il est intégré à une structure industrielle complexe. Cependant, c’est à l’ASFC qu’il revient de déterminer quand ce point a été atteint dans son application de l’ordonnance.
  6. En ce qui concerne les marchandises similaires, dans Caillebotis en acier NQ, le Tribunal a déterminé que les caillebotis en acier de production nationale, correspondants à la même définition que les marchandises en question, représentaient des marchandises similaires aux marchandises en question[15]. La preuve présentée dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration étaye ces conclusions[16].
  7. Par conséquent, aux fins du présent réexamen relatif à l’expiration, les caillebotis en acier de production nationale constituent des marchandises similaires aux marchandises en question.

Catégories de marchandise

  1. Dans Caillebotis en acier NQ, la majorité du Tribunal a déterminé qu’il existait deux catégories de marchandise, soit les caillebotis en acier au carbone et en alliage d’acier et les caillebotis en acier inoxydable[17]. Comme le volume des caillebotis en acier inoxydable originaire de Chine était négligeable, le Tribunal a mis fin à son enquête portant sur ces marchandises[18]. Il ne reste qu’une catégorie de marchandise visée par les conclusions.
  2. Le Tribunal n’a entendu aucun élément de preuve dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration qui justifierait de s’écarter de ses conclusions antérieures.
  3. Par conséquent, aux fins du présent réexamen relatif à l’expiration, le Tribunal estime qu’il n’existe qu’une catégorie de marchandise.

BRANCHE DE PRODUCTION NATIONALE

  1. Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit « branche de production nationale » comme suit : « [...] l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires [...]. »

Fisher & Ludlow et Borden constituent la branche de production nationale

  1. Pour déterminer la composition de la branche de production nationale, le Tribunal doit déterminer s’il existe des producteurs nationaux de marchandises similaires et, par la même occasion et le cas échéant, lesquelles de leurs activités constituent la « production » des marchandises en question.
  2. Le Tribunal détermine ce qui constitue la « production » au cas par cas.
  3. Le Tribunal se fonde sur la signification générale du terme « production ». La « production » est définie, entre autres, de la manière suivante : « 1 Action de produire, de fabriquer à partir d’éléments ou de matières [...] 1.3 Création ou formation de quelque chose dans le cadre d’un processus physique »[19] [traduction]. Ainsi, dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration, le Tribunal est d’avis que Fisher & Ludlow et Borden sont des producteurs nationaux de marchandises similaires, parce qu’ils utilisent divers procédés de fabrication au Canada pour transformer des matières en marchandises similaires (c’est-à-dire des bobines d’acier et de la ferraille ou des barres d’acier en caillebotis en acier ordinaires).
  4. Tel qu’indiqué ci-dessus, étant donné que les marchandises similaires comprennent tant les caillebotis ordinaires que les caillebotis transformés, la question se pose à savoir si les entreprises qui ne font que transformer[20] des caillebotis ordinaires au Canada sont aussi des producteurs nationaux de marchandises similaires[21]. En particulier, le Tribunal a examiné la question de savoir si Accurate[22] et Amico[23] devraient faire partie de la branche de production nationale telle qu’elle a été définie, puisqu’elles transforment des caillebotis au Canada.
  5. Selon les témoins, il existe une large fourchette de produits à valeur ajoutée associés à la transformation et à la finition, selon la nature des activités[24]. Les panneaux en acier transformés sont souvent destinés à des utilisations particulières[25], mais ils ont toujours les mêmes utilisations finales générales que les panneaux de caillebotis en acier ordinaires.
  6. Le Tribunal n’est donc pas convaincu que les acteurs du marché qui n’ont que des activités de transformation au Canada, notamment Accurate et Amico, sont des producteurs nationaux de marchandises similaires. Par conséquent, dans le présent réexamen relatif à l’expiration, le Tribunal retient les conclusions auxquelles il était arrivé dans Caillebotis en acier NQ, soit que Fisher & Ludlow et Borden représentent la branche de production nationale.
  7. Enfin, le Tribunal souhaite répondre à certains arguments présentés à l’audience selon lesquels le Tribunal ne peut réexaminer les décisions qu’il a prises dans une enquête de dommage en ce qui a trait à la composition de la branche de production nationale.
  8. Le Tribunal ne partage pas cet avis. Au contraire, le Tribunal a compétence, dans le cadre d’un réexamen relatif à l’expiration, pour réexaminer toutes les décisions qu’il a prises dans le cadre de l’enquête de dommage, y compris les décisions portant sur les marchandises similaires, les catégories de marchandise, la composition de la branche de production nationale et le cumul des effets.
  9. Les décisions rendues, en vertu du cadre législatif, sont fondées sur la preuve dont dispose le Tribunal dans l’affaire étudiée. Des éléments de preuve portant sur les changements qui peuvent s’être produits au cours de la période de réexamen peuvent justifier de modifier des décisions antérieures. Par exemple, le Tribunal ne s’abstient pas de tenir compte de nouveaux producteurs nationaux ou de la disparition d’anciens producteurs lorsqu’il détermine la composition de la branche de production nationale[26]. De même, il est arrivé que le Tribunal rende des décisions différentes en matière de cumul des effets dans des réexamens relatifs à l’expiration lorsque les circonstances du marché avaient changé[27]. Comme les décisions portant sur les marchandises similaires et les catégories de marchandise sont généralement très influencées par les caractéristiques intrinsèques du produit, il est rare que le Tribunal modifie ses décisions sur ces éléments dans le cadre de réexamens subséquents relatifs à l’expiration. Cependant, le Tribunal a toute liberté de le faire si les circonstances le justifient[28].

L’analyse de la branche de production nationale reposera principalement sur les données de Fisher & Ludlow

  1. Le Tribunal est conscient des difficultés qu’ont eues tous les acteurs du marché à répondre aux questionnaires, dans lesquels l’unité de mesure utilisée était la tonne métrique alors que c’est la surface en pieds carrés qui est principalement utilisée dans la branche de production.
  2. Le témoignage de Borden, malgré toute la bonne volonté de l’entreprise, a soulevé des doutes quant à la fiabilité de certains aspects de ses réponses au questionnaire[29]. Par conséquent, l’analyse du Tribunal reposera généralement sur les données quantitatives fournies par Fisher & Ludlow. La production de Fisher & Ludlow représente une proportion majeure de la production nationale totale. Cependant, où cela s’avère approprié, le Tribunal utilisera aussi les renseignements qualitatifs fournis par Borden et ceux du témoin qu’elle a fait comparaître.

CUMUL CROISÉ

  1. Dans sa plaidoirie, en réponse à des questions posées par le Tribunal sur la manière dont le cumul croisé devrait être abordé, Fisher & Ludlow a fait valoir que le Tribunal devrait étudier les effets dommageables du dumping et du subventionnement d’un pays donné de manière cumulée.
  2. La LMSI ne fait pas mention du cumul croisé. Par conséquent, dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration, le Tribunal commencera par évaluer si la poursuite ou la reprise du dumping et du subventionnement causera vraisemblablement un dommage, dans l’éventualité où les conclusions étaient annulées, en fonction des effets cumulés de la poursuite ou de la reprise du dumping et du subventionnement.
  3. Si le Tribunal détermine qu’il y aura vraisemblablement dommage, compte tenu du rapport intitulé États‑Unis – Mesures compensatoires visant certains produits plats en acier au carbone laminés à chaud en provenance de l’Inde[30], le Tribunal entreprendra subséquemment d’évaluer séparément les effets de la poursuite ou de la reprise du dumping et du subventionnement, de manière à déterminer si sa décision serait la même que celle prise en fonction du cumul croisé.

ANALYSE DE LA PROBABILITÉ DE DOMMAGE

  1. Le réexamen relatif à l’expiration est de nature prospective[31]. Il en découle que les éléments de preuve recueillis pendant la période de réexamen, au cours de laquelle des conclusions ou une ordonnance étaient en vigueur, ne sont pertinents que dans la mesure où ils influent sur l’analyse prospective visant à déterminer si l’expiration des conclusions ou de l’ordonnance causera vraisemblablement un dommage[32].
  2. Il n’y a pas de présomption de dommage dans le cadre d’un réexamen relatif à l’expiration; les conclusions du Tribunal doivent être fondées sur des éléments de preuve positifs, en conformité avec la législation nationale et les exigences des accords de l’Organisation mondiale du commerce[33]. Dans le contexte d’un réexamen relatif à l’expiration, les éléments de preuve positifs peuvent comprendre des éléments de preuve fondés sur des faits antérieurs qui appuient des conclusions prospectives[34].
  3. Aux fins de l’évaluation de la probabilité de dommage, le Tribunal a constamment indiqué qu’il faut s’en tenir aux circonstances auxquelles on peut raisonnablement s’attendre à court et à moyen terme, soit généralement dans les 12 à 24 mois après l’expiration des conclusions ou de l’ordonnance.
  4. Il n’y a pas eu d’opposition au présent réexamen relatif à l’expiration. En pareilles circonstances, le Tribunal s’efforce d’être aussi rigoureux que possible dans son examen de la preuve et son interrogation des témoins.
  5. Étant donné le petit nombre de producteurs nationaux et d’importateurs concernés par le présent réexamen relatif à l’expiration, la plupart des données sur les importations, les ventes, les prix, la production et les résultats financiers, même agrégées, ne peuvent être divulguées, pour des raisons de confidentialité. Dans la mesure du possible, les présents motifs donnent un pourcentage approximatif ou un ordre de grandeur général.
  6. Le paragraphe 37.2(2) du Règlement sur les mesures spéciales d’importation[35] énonce les facteurs dont le Tribunal peut tenir compte lorsqu’il évalue la probabilité de dommage. Les facteurs que le Tribunal estime pertinents dans le contexte du présent réexamen relatif à l’expiration sont analysés ci-dessous.

Changements dans les conditions du marché

  1. En règle générale, afin d’évaluer le volume et les prix probables des marchandises en question et leur incidence sur la branche de production nationale advenant l’annulation des conclusions, le Tribunal examine d’abord les changements dans les conditions du marché à l’échelle internationale et nationale[36].
  2. À l’échelle internationale et nationale, les changements observés dans les conditions du marché depuis que le Tribunal a rendu ses conclusions comprennent une morosité économique générale, la récente et brusque chute des prix du pétrole et du gaz, et la baisse des prix de l’acier.

Conditions du marché à l’échelle internationale

  1. La demande de caillebotis en acier est largement tributaire de la vigueur des secteurs du pétrole et du gaz, de la construction et de la fabrication[37], dans lesquels les conditions se sont grandement détériorées au cours de la période de réexamen, surtout vers la fin[38].
  2. L’économie mondiale a connu une croissance anémique au cours de la période de réexamen[39]. En particulier, la croissance de l’économie chinoise ralentit[40].
  3. Les prix du pétrole ont dégringolé sur le marché mondial, d’où un ralentissement des activités de forage[41]. Les prix devraient demeurer faibles en 2016, soit dans une fourchette d’environ 35 $ à 40 $ CAN/baril[42].
  4. Le prix de l’acier a diminué, dans un contexte de surabondance de l’offre et de baisse continue des coûts des intrants[43]. La capacité de production d’acier de la Chine demeure grandement excédentaire[44]. En dépit du fait que les mesures prises récemment par le gouvernement de la Chine pour réduire la capacité de production d’acier[45] portent fruit, il faudra des années avant d’en voir les effets concrets.

Conditions du marché à l’échelle nationale

  1. L’économie canadienne a connu une expérience semblable à celle de l’économie mondiale; la croissance a ralenti au cours de la période de réexamen, et l’économie s’est repliée à chacun des deux premiers trimestres de 2015. Si le produit intérieur brut réel s’est ressaisi en 2015, enregistrant une croissance annualisée de 2,3 p. 100 au troisième trimestre[46], on s’attend à une croissance modeste de l’économie canadienne pour la prochaine année[47].
  2. Les prix du gaz naturel au Canada ont diminué, passant d’une moyenne annuelle de 5,25 $ US/MMBtu entre 2000 et 2014 à une moyenne annuelle prévue de 2,63 $ US/MMBtu en 2015. Les prix devraient poursuivre leur baisse, pour tomber à une moyenne annuelle de 2,37 $ US/MMBtu en 2016[48]. Les prix du pétrole ont suivi une tendance similaire; le prix du West Texas Intermediate est passé d’une moyenne annuelle de 65 $ US/baril de 2000 à 2014 à une moyenne annuelle prévue de 49 $ US/baril en 2015[49]. On s’attend à ce que les prix poursuivent leur déclin, et que leur moyenne annuelle se situe dans une fourchette de 35 $ à 40 $ US/baril en 2016[50].
  3. Faisant écho à la chute des prix du pétrole et du gaz, les dépenses en immobilisations ont également diminué dans les secteurs de l’extraction minière, de l’exploitation en carrière et de l’extraction du pétrole et du gaz. De manière générale, les dépenses en immobilisations étaient inférieures de 18,7 p. 100 en 2015 par rapport à l’année précédente[51], et la baisse devrait se poursuivre au cours de 12 prochains mois[52].
  4. M. David Halcrow, de Russel Metals, a indiqué que le fléchissement marqué des ventes de produits en acier était généralement attribuable au recul des prix du pétrole « de 100 $/baril à 30 $/baril »[53] [traduction]. Il a souligné que les ventes de caillebotis en acier avaient suivi à peu près la même tendance à la baisse, surtout dans l’ouest du Canada[54].
  5. De fait, les témoins se sont généralement entendus pour dire que le marché des caillebotis était morose, surtout dans l’ouest du Canada[55]. Bien que la demande dans l’est du Canada ne se soit pas repliée autant que dans l’ouest du pays, les conditions défavorables dans le secteur manufacturier ont eu pour conséquence qu’il y a eu peu de travaux de construction ou d’expansion d’installations de fabrication[56].
  6. Parmi les autres développements dignes de mention sur le marché canadien au cours de la période de réexamen figurent les suivants :
    • le dollar canadien s’est déprécié d’environ 20 p. 100 par rapport au dollar américain, d’où une hausse des coûts des intrants et des biens d’équipement importés[57];
    • Le Taipei chinois a remplacé la Chine en tant que première source en importance de caillebotis en acier importés et en tant que source offrant ces marchandises aux prix les plus bas[58];
    • Accurate a accru sa capacité de transformation depuis 2011[59].

Rendement probable de la branche de production nationale advenant la prorogation des conclusions

  1. Aux termes de l’alinéa 37.2(2)c) du Règlement, le Tribunal doit examiner le rendement probable de la branche de production nationale, compte tenu de son rendement récent, y compris les tendances de la production, de l’utilisation de la capacité, des niveaux d’emploi, des prix, des ventes, des stocks, de la part de marché, des exportations et des bénéfices.
  2. Aux fins de cette analyse, le Tribunal tiendra d’abord compte du rendement récent de la branche de production nationale, puis évaluera ensuite son rendement probable advenant la prorogation des conclusions. Dans les deux cas, le Tribunal déterminera si des facteurs pertinents autres que le dumping et le subventionnement des marchandises en question ont ou auront vraisemblablement, à court ou à moyen terme, une incidence sur le rendement de la branche de production nationale.
  3. Le Tribunal a demandé aux répondants de fournir des prévisions concernant des mesures clés, suivant deux scénarios : dans le premier, les conclusions sont prorogées; dans le second, elles sont annulées. Le but de l’exercice était d’obtenir des données quantitatives qui aideraient le Tribunal à déterminer si l’annulation des conclusions causerait vraisemblablement un dommage sensible à la branche de production nationale. Tous les répondants n’ont pas fourni de prévisions, et ceux qui l’ont fait n’ont pas toujours présenté d’éléments suffisants pour étayer les hypothèses qu’ils avaient avancées. Par conséquent, le Tribunal a fait une utilisation qualitative des prévisions pour corroborer d’autres éléments de preuve.
  4. Au cours de la période de réexamen, alors que les conclusions étaient en vigueur, les indicateurs de rendement clés de la branche de production nationale se sont améliorés, y compris la production, les ventes intérieures, l’emploi, l’utilisation de la capacité et la productivité[60].
  5. Le témoin de Fisher & Ludlow a affirmé que l’entreprise avait eu des résultats « plutôt satisfaisants » [traduction] durant la période de réexamen, ayant dégagé des marges et un revenu net positifs et ayant réussi à investir dans une soudeuse robotisée[61]. Le témoin de Borden a quant à lui souligné que les « marges bénéficiaires [avaient été] raisonnables »[62] [traduction] et que l’entreprise avait investi dans une machine de soudage par forgeage[63].
  6. Par conséquent, le Tribunal est d’avis qu’en dépit des conditions défavorables des marchés mondial et intérieur, les conclusions ont réellement contribué à la vigueur de la branche de production nationale.
  7. En ce qui concerne l’avenir, M. Michael Fernie a mentionné dans son témoignage que si les conclusions étaient prorogées, Fisher & Ludlow serait en mesure de conserver ses marges positives et son revenu en 2016 et 2017, en dépit de la dégradation du marché[64]. De même, selon les prévisions présentées par Fisher & Ludlow en réponse au questionnaire du Tribunal, l’entreprise ne s’attend pas à une baisse de sa production à court ou à moyen terme advenant la prorogation des conclusions[65].
  8. De l’avis du Tribunal, la branche de production nationale se heurte à des obstacles qui, à court ou à moyen terme, pourraient faire en sorte que ses résultats se détériorent sensiblement. Surtout, selon les prévisions, la persistance des faibles prix du pétrole et du gaz plomberont les activités de forage et l’expansion des sables bitumineux et, donc, la demande de caillebotis en acier. Au vu des prévisions de croissance anémique de l’économie canadienne au cours des prochaines années, les perspectives de croissance de la demande de caillebotis en acier dans d’autres secteurs semblent plutôt sombres.
  9. En outre, l’expansion des activités d’Accurate à Toronto (Ontario) et à Montréal (Québec) pourrait constituer une nouvelle source de concurrence pour la branche de production nationale dans l’est du Canada, ce qui exercerait une pression sur les ventes de la branche de production nationale en ce qui concerne le restant de son marché relativement plus vigoureux.
  10. Ainsi, même advenant la prorogation des conclusions, le Tribunal est d’avis que le rendement de la branche de production nationale pourrait se dégrader sensiblement par rapport à ce qu’il était au cours de la période de réexamen.

Volume probable des marchandises sous-évaluées advenant l’annulation des conclusions

  1. Aux termes de l’alinéa 37.2(2)a) du Règlement, le Tribunal doit prendre en compte le volume probable des marchandises sous-évaluées ou subventionnées advenant l’annulation des conclusions, et tout particulièrement la vraisemblance d’une augmentation importante du volume des importations de marchandises en question, soit en quantité absolue, soit par rapport à la production ou à la consommation de marchandises similaires.
  2. Dans son évaluation du volume probable des importations de marchandises en question, le Tribunal tient compte du rendement probable de la branche de production étrangère, de la possibilité pour les producteurs étrangers de produire les marchandises dans des installations servant actuellement à la production d’autres marchandises, de la preuve de l’imposition de mesures antidumping ou compensatoires par les autorités d’autres pays et de la question de savoir si les mesures prises par les autorités d’un pays autre que le Canada causeront vraisemblablement ou non le détournement au Canada de marchandises en question.
  3. Au cours de la période d’enquête dans Caillebotis en acier NQ, soit de 2007 à 2009, le volume des importations de marchandises en question avait augmenté de manière constante, et avait bondi de plus de 300 p. 100 du milieu de 2009 au milieu de 2010[66]. Les données suivantes recueillies dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration indiquent que les conditions de l’offre ayant mené à une hausse si rapide du volume des importations demeureront en place à court et à moyen terme.
    • La branche de production chinoise de caillebotis est énorme. L’ASFC a identifié plus de 60 exportateurs potentiels dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration, et la branche de production américaine mentionne, dans le récent réexamen réalisé par la Commission du commerce international des États-Unis, 26 entreprises chinoises qui seraient des fabricants de caillebotis en acier[67].
    • Bon nombre d’exportateurs chinois ont à eux seuls une capacité plus grande que la taille du marché canadien dans son ensemble, selon les estimations des témoins[68].
    • Les fabricants et les exportateurs chinois de caillebotis en acier doivent composer avec le ralentissement de l’économie chinoise[69]. Le secteur du pétrole et du gaz en Chine, comme ailleurs dans le monde, se heurtera à certaines faiblesses et incertitudes à court et à moyen terme[70].
    • Les coûts de transport océanique sont actuellement à un creux sans précédent, ce qui réduit les obstacles liés aux coûts pour les importateurs[71].
    • L’intérêt des exportateurs chinois pour le marché canadien ne s’est pas démenti. Le témoin de Fisher & Ludlow a affirmé que l’entreprise est sollicitée quotidiennement par des producteurs chinois de caillebotis[72]. Par ailleurs, en dépit de droits de douane élevés, de petits volumes de marchandises en question ont été importés au cours de la période de réexamen[73].
    • Aux États-Unis, les caillebotis en acier sont visés par une mesure restreignant les exportations de la Chine à destination de ce grand marché[74]. Dans l’éventualité où la protection du marché canadien était levée, la proximité du marché canadien et du marché américain inciterait vraisemblablement les exportateurs chinois à recommencer à expédier leurs marchandises au Canada.
  1. Ainsi, le Tribunal est d’avis qu’en dépit de la léthargie de la demande sur le marché, le Canada serait sans doute une destination attrayante pour les marchandises en question advenant l’annulation des conclusions.
  2. À cet égard, le Tribunal n’est pas convaincu par l’affirmation du témoin d’Accurate, selon laquelle l’entreprise ne se remettrait pas à importer des marchandises en question advenant l’annulation des conclusions, étant donné qu’Accurate mise sur la maximisation des profits tirés de l’importation de caillebotis en acier aux meilleurs prix possibles[75].
  3. Quant à l’affirmation de M. McDonald, selon laquelle Accurate a cessé d’importer des marchandises en question pour importer des caillebotis en acier en provenance du Taipei chinois, en partie en raison de préoccupations soulevées par la qualité des marchandises en question[76], le Tribunal souligne que même si le producteur chinois duquel Accurate importait des marchandises en question au cours de la période d’enquête a eu des problèmes de qualité, rien ne permet de croire que la totalité de la branche de production chinoise de caillebotis en acier fabrique des produits de piètre qualité. Il est raisonnable de conclure que la hausse rapide des importations au cours de la période d’enquête n’aurait pas eu lieu si les marchandises en question avaient été de mauvaise qualité en général.
  4. De même, l’observation de M. McDonald selon laquelle les importations seraient freinées par les coûts initiaux et les longs délais de livraison doit être examinée en tenant compte du fait qu’Accurate a été en mesure d’importer de grands volumes de marchandises en question, plutôt rapidement, au cours de la période d’enquête. Par-dessus tout, Accurate a d’importantes installations d’entreposage lui permettant de stocker de grandes quantités de caillebotis importés[77]. M. McDonald a affirmé qu’Accurate s’était heurtée à des obstacles similaires quand elle avait commencé à importer en provenance du Taipei chinois, et qu’elle avait réussi à les surmonter[78].
  5. En particulier, le délai de trois à quatre mois qui s’écoule entre la commande et la livraison de caillebotis en acier importés d’Asie n’est pas un obstacle à l’importation de caillebotis sous forme de panneaux normalisés, qui ont constitué la majorité des marchandises en question importées au cours de la période d’enquête, et qui représentent actuellement la majeure partie des importations en provenance du Taipei chinois[79].
  6. Ces importations augmenteraient vraisemblablement de façon importante au cours des 18 à 24 prochains mois si les conclusions étaient annulées. Ainsi, les autres importateurs seraient vraisemblablement contraints de réagir en important des marchandises en question eux aussi, comme il en est question plus loin dans l’analyse du dommage probable.
  7. En résumé, le Tribunal est d’avis que l’annulation des conclusions se traduirait par une hausse importante du volume des importations de marchandises en question (tant en valeur absolue qu’en valeur relative).

Effets probables des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur les prix advenant l’annulation des conclusions

  1. Aux termes de l’alinéa 37.2(2)b) du Règlement, le Tribunal doit prendre en compte les prix probables des marchandises sous-évaluées ou subventionnées advenant l’annulation des conclusions, et le fait que le dumping ou le subventionnement entraînera vraisemblablement ou non, de façon marquée, soit la sous-cotation des prix des marchandises similaires, soit la baisse de ces prix, soit la compression de ceux-ci en empêchant les augmentations de prix qui autrement se seraient vraisemblablement produites pour ces marchandises. À cet égard, le Tribunal fait une distinction entre les effets des marchandises sous-évaluées ou subventionnées sur les prix et les effets découlant vraisemblablement d’autres facteurs ayant une incidence sur les prix.
  2. Les caillebotis en acier sont un produit de base[80]. Le prix est le principal facteur jouant dans les décisions d’achat[81], et les caillebotis en acier produits au pays ne commandent qu’une faible majoration de prix, s’il en est[82]. Cette grande sensibilité aux prix est exacerbée par la précarité actuelle de l’environnement commercial[83]. Le marché des caillebotis en acier est transparent, et l’information sur les prix se propage rapidement[84].
  3. Les témoins conviennent que les caillebotis en acier originaires du Taipei chinois sont actuellement les produits dont les prix sont les moins élevés sur le marché canadien, et qu’Accurate est le principal importateur de ces caillebotis en acier en provenance du Taipei chinois[85]. Fisher & Ludlow a présenté des éléments de preuve étayant différentes transactions au cours desquelles l’entreprise s’est heurtée à la concurrence livrée par Accurate, qui offrait des caillebotis en acier à faible prix provenant du Taipei chinois[86]. Dans certains cas, l’entreprise a réussi à conclure la vente en baissant ses prix, mais dans d’autres cas, elle a perdu la vente.
  4. Cet élément de preuve confidentiel, et le témoignage à huis clos le corroborant[87], fait ressortir le degré de sous-cotation des prix attribuable aux marchandises originaires du Taipei chinois au cours de la période de réexamen.
  5. En raison de difficultés posées par la gamme de produits, il n’est pas aisé de tirer des conclusions des données sur les prix figurant dans le rapport d’enquête. De même, bien qu’Accurate convienne qu’un prix de 1 200 $ CAN/tonne métrique semble représentatif pour les caillebotis du Taipei chinois[88], au débarquement à Vancouver, il s’agit d’une moyenne qui inclut des caillebotis en acier ordinaires, galvanisés et transformés[89].
  6. Par conséquent, le Tribunal a demandé aux témoins présents à l’audience de fournir des données sur les coûts et les prix en dollars le pied carré, pour des produits de caillebotis en acier particuliers. Ces données offrent la meilleure base de comparaison pour évaluer la concurrence par les prix sur le marché.
  7. Compte tenu du coût de transport terrestre relativement élevé des caillebotis en acier et de la diversité des pratiques de paiement du fret dans l’industrie, le Tribunal a déterminé que les comparaisons les plus justes sont celles entre le coût des produits de caillebotis en acier débarqués à Calgary d’Accurate, d’une part, et le coût standard et le prix de vente cible des marchandises produites par Fisher& Ludlow à son usine située en Alberta, d’autre part[90].
  8. Ces comparaisons révèlent que les prix des caillebotis en acier importés du Taipei chinois sont beaucoup plus avantageux que ceux des marchandises similaires.
  9. Puisque les caillebotis en acier sont des produits de base sensibles aux prix et que leurs prix sont transparents, le Tribunal est d’avis qu’advenant l’annulation des conclusions, la branche de production nationale devra rapidement composer avec une importante pression sur les prix exercée par les marchandises chinoises qui, de retour sur le marché, tenteront de s’approprier des ventes aux dépens des sources existantes d’importations à bas prix, notamment le Taipei chinois.
  10. À cet égard, le témoin d’Amico a affirmé qu’il n’y aurait dans les faits aucun prix plancher si les importations chinoises reprenaient. Selon lui, « [l]a surcapacité de la Chine et les efforts qu’elle déploie, ou doit déployer, pour déplacer ses produits font en sorte que, selon moi, elle sautera à pieds joints dans tout marché ouvert »[91] [traduction]. Le témoin de Fisher & Ludlow a souligné que la situation serait semblable à celle observée en 2009 et 2010, quand il n’y avait « vraiment aucune discipline sur le marché »[92] [traduction].
  11. Bien que, vraisemblablement, la branche de production nationale devrait d’abord affronter une concurrence par les prix livrée par les marchandises en question dans l’ouest du Canada, les données sur les coûts et les prix des caillebotis en acier susmentionnés donnent à penser que le prix des marchandises en question diminuerait suffisamment pour permettre à un importateur, comme Accurate, d’expédier les produits dans l’est du Canada et de livrer une concurrence sur ce marché. Le Tribunal souligne que l’incidence des marchandises en question a suivi une tendance similaire au cours de la période d’enquête[93].
  12. Même si M. McDonald a souligné à juste titre que les prix des marchandises en question ne sont pas aussi bas qu’il y a cinq ans (en raison de hausses de salaires et des coûts des contrôles environnementaux, entre autres facteurs)[94], le Tribunal demeure convaincu, étant donné que les caillebotis en acier sont des produits de base, qu’advenant l’annulation des conclusions, les marchandises en question feront un retour au Canada à des prix suffisamment bas pour s’approprier des ventes aux dépens du Taipei chinois et, donc, entraîneront également la sous-cotation des prix des marchandises similaires.
  13. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que l’annulation des conclusions aurait vraisemblablement pour conséquence que la branche de production nationale aurait à composer avec une sous-cotation marquée des prix, si bien qu’elle aurait à réduire de façon importante les prix des marchandises similaires (c’est-à-dire qu’il y aurait baisse des prix)[95] ou encore composer avec le risque de perte de ventes et de parts de marché. Dans un cas comme dans l’autre, les effets probables sur les prix auraient une incidence négative sur le rendement de la branche de production nationale, comme il en est question ci-après.

Incidence probable sur la branche de production nationale advenant l’annulation des conclusions

  1. Le Tribunal évaluera maintenant l’incidence probable des volumes et des prix susmentionnés sur la branche de production nationale advenant l’annulation des conclusions, en tenant compte du rendement probable de la branche de production nationale dans l’éventualité où les conclusions seraient prorogées, comme mentionné précédemment. Dans le cadre de cette analyse, le Tribunal fait une distinction entre l’incidence probable des marchandises sous-évaluées et subventionnées et l’incidence probable de tout autre facteur qui agit ou qui pourrait vraisemblablement agir sur la branche de production nationale, comme mentionné précédemment dans la section portant sur le rendement probable de la branche de production nationale advenant la prorogation des conclusions.
  2. Selon Fisher & Ludlow, le retour des marchandises en question en quantités importantes et à des prix cassés aurait une incidence « dévastatrice » [traduction] sur ses activités liées aux caillebotis en acier[96].
  3. De même, Borden a affirmé que les importations de panneaux normalisés auraient une incidence négative sur ses activités de transformation[97]. Bien que la plupart des caillebotis ordinaires de Borden soient destinés à la transformation, elle subirait aussi une incidence négative, étant donné que ses clients seraient en mesure d’obtenir des panneaux transformés à moindre prix en les important directement, en les achetant auprès d’entreprises comme Accurate, ou en transformant eux-mêmes des panneaux ordinaires importés[98].
  4. À l’opposé, le témoin d’Accurate a affirmé que la suppression des droits aurait une incidence minime sur le marché national[99], n’étant pas d’accord qu’un petit volume d’importations de marchandises en question puisse avoir une incidence importante[100], et soulignant qu’il n’y aurait aucune incidence dans l’est du Canada.
  5. Ayant conclu qu’advenant l’annulation des conclusions, de grands volumes d’importations de marchandises en question feraient un retour sur le marché canadien à des prix qui entraîneraient, de façon marquée, la sous-cotation des prix des marchandises similaires, le Tribunal cite sa décision dans Caillebotis en acier NQ, où il a conclu que même un faible volume d’importations de marchandises en question offertes à un prix légèrement inférieur pouvait avoir « une incidence importante sur le marché canadien des caillebotis en acier »[101].
  6. Par conséquent, dans le contexte du présent réexamen relatif à l’expiration, le Tribunal est d’avis que l’annulation des conclusions aura une incidence négative importante sur la branche de production nationale. À cet égard, comme expliqué précédemment, le Tribunal n’adhère pas au scénario présenté par le témoin d’Accurate.
  7. Étant donné que les caillebotis en acier importés d’Asie, que ce soit de Chine ou du Taipei chinois, arrivent généralement au Canada par la côte ouest, au port de Vancouver, l’incidence de l’annulation des conclusions se ferait d’abord sentir dans l’ouest du Canada, sur un marché du pétrole et du gaz déprimé. Selon les observations des témoins, il n’en faudrait pas beaucoup pour dérégler le marché canadien; la cargaison d’un seul navire débarquée à Vancouver pourrait être nettement suffisante pour alimenter la moitié du marché un mois durant[102]. De fait, le marché canadien est très restreint, comptant deux producteurs nationaux, deux grands importateurs et une poignée d’acheteurs d’envergure.
  8. Cela dit, les effets négatifs des marchandises en question se répercuteraient éventuellement dans l’est du Canada également. Comme l’a décrit le témoin de Russel Metals, ce serait « comme une vague qui vient se fracasser sur la côte »[103] [traduction], pour illustrer le fait que l’incidence négative des marchandises en question se répandrait, au fil du temps, dans des marchés plus éloignés. Les coûts de transport des caillebotis en acier de l’ouest du Canada vers les marchés de l’est du Canada agissent comme une barrière – le fret à destination de Toronto est supérieur de 75 p. 100 à 80 p. 100 par rapport au fret à destination de Vancouver. Cela dit, les marchandises en question entreraient vraisemblablement au Canada à un prix qui permettrait éventuellement l’absorption des coûts de transport à destination de l’est du Canada.
  9. Étant donné les différences de prix actuelles entre les caillebotis en acier nationaux et importés, toute marchandise en question importée devrait être offerte à un prix moindre que celui des marchandises importées et des marchandises nationales pour être vendue, ce qui amènerait sans aucun doute les fournisseurs de marchandises importées et les fournisseurs de marchandises nationales à baisser leurs prix. Cette situation sur le marché aurait vraisemblablement des conséquences néfastes graves pour la branche de production nationale, sous la forme de pertes de ventes et de pressions à la baisse sur la production et l’emploi, ou sous la forme de réduction du revenu et des marges. Dans un cas comme dans l’autre, il en résulterait une incidence sensible sur les profits et les liquidités, entre autres.
  10. Par ailleurs, la branche de production nationale ne pourrait continuer à investir dans les immobilisations en vue de réaliser des gains d’efficacité et de productivité, comme elle l’a fait au cours de la période de réexamen[104].
  11. Par conséquent, le Tribunal conclut que l’incidence de volumes importants et des faibles prix des marchandises en question, advenant l’annulation des conclusions, causerait un dommage sensible à la branche de production nationale.

DÉCISION

  1. À la lumière de l’analyse qui précède, le Tribunal conclut qu’advenant l’annulation des conclusions, la reprise ou la poursuite probable du dumping et du subventionnement des marchandises en question causera vraisemblablement un dommage sensible à la branche de production nationale.

ANALYSES DISTINCTES EN CE QUI CONCERNE LE DUMPING ET LE SUBVENTIONNEMENT

  1. En toute déférence à l’égard du point de vue adopté précédemment par d’autres membres dans le cadre d’enquêtes où il était question de dumping et de subventionnement de marchandises originaires d’un même pays[105], les membres saisis du présent réexamen relatif à l’expiration sont d’avis que le scénario dans lequel il n’y a qu’un seul pays en question ne semble pas offrir de motifs suffisants pour déroger au cadre analytique adopté par le Tribunal dans le réexamen relatif à l’expiration no RR-2014-006[106] et dans l’enquête no NQ-2015-001[107]. Ce cadre repose sur le principe que le Tribunal doit à tout le moins se demander si les circonstances de l’espèce font en sorte que les effets du dumping et les effets du subventionnement sur le marché canadien seront différents.
  2. Par conséquent, le Tribunal fera une analyse distincte des effets de la reprise ou du maintien du dumping et de la reprise ou du maintien du subventionnement, puis déterminera si sa décision serait la même qu’au terme d’une analyse reposant sur le cumul croisé.
  3. Le Tribunal constate que le volume des importations de caillebotis en acier en provenance de Chine serait le même que celui obtenu au moyen du scénario reposant sur le cumul croisé. La question déterminante est donc celle de savoir quels seraient les effets probables sur les prix de la reprise du dumping, d’une part, et de la reprise du subventionnement, d’autre part.
  4. Au terme du dernier réexamen, le 14 juillet 2015, auquel aucun exportateur chinois de caillebotis en acier n’a participé, l’ASFC a fixé une prescription ministérielle de 85 p. 100 du prix à l’exportation dans le cas de la marge de dumping, et de 13 064 renminbi la tonne métrique dans le cas du montant de subvention[108].
  5. À la lumière de ces résultats, le Tribunal s’attend à ce que le prix des caillebotis en acier originaires de Chine, s’il sont frappés de droits antidumping nuls, sera beaucoup plus bas que le prix actuel des marchandises en question et entraînera, de façon marquée, la sous-cotation du prix des marchandises similaires, ce qui entraînera une baisse de prix ou une perte de ventes, ou les deux, avec l’incidence négative que cela suppose sur le rendement de la branche de production, comme mentionné précédemment. Le scénario suivant lequel les caillebotis en acier importés de Chine ne sont pas assujettis à des droits compensateurs mène à une conclusion similaire.
  6. Ainsi, dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal conclut que sa décision est la même, que son analyse tienne compte du cumul croisé des effets du dumping et du subventionnement ou de ces effets pris séparément.

CONCLUSION

  1. Aux termes de l’alinéa 76.03(12)b) de la LMSI, le Tribunal proroge ses conclusions à l’égard des marchandises en question.
 

[1].      L.R.C. 1985, ch. S-15 [LMSI].

[2].       Le « personnel du Tribunal » désigne le personnel de la Direction des enquêtes sur les recours commerciaux du Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur, qui relève du Service canadien d’appui aux tribunaux administratifs.

[3].      Les renseignements additionnels sur le produit, les utilisations du produit et le procédé de production sont tirés des motifs de la décision concernant l’enquête de réexamen relatif à l’expiration menée par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et des motifs du Tribunal dans Caillebotis en acier NQ. Pièce RR-2015-001-03A, vol. 1A à la p. 87; pièce RR-2015-001-01, vol. 1 aux pp. 10-12.

[4].      Selon Fisher & Ludlow, la configuration la plus courante pour les caillebotis en acier de production nationale et pour les marchandises en question comprend les lames porteuses de 3/16 po (4,76 mm) d’épaisseur et de 1 1/4 po (31,75 mm) de largeur. Caillebotis en acier NQ à la p. 4.

[5].      Pièce RR-2015-001-5, vol. 1.1 à la p. 7.

[6].      Ibid. à la p. 8.

[7].      Bien que cette pratique soit moins courante, en plus de faciliter la vente de caillebotis en acier et la logistique afférente au transport du produit entre un producteur ou un importateur et l’acheteur, les caillebotis en acier peuvent également être vendus comme partie d’un « groupe » de produits.

[8].      Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit « dommage » comme le « dommage sensible causé à une branche de production nationale » et « retard » comme le « retard sensible de la mise en production d’une branche de production nationale » [nos italiques]. Comme il existe actuellement une branche de production nationale établie, la question de savoir si l’expiration de l’ordonnance causera vraisemblablement un retard ne se pose pas dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration.

[9].      Comme le présent réexamen relatif à l’expiration ne vise qu’un seul pays, la question de l’évaluation des effets cumulatifs des importations de plusieurs pays ne se pose pas.

[10].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 16.

[11].    Selon les éléments de preuve, la coupe peut être plus ou moins complexe. Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 125-126.

[12].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 16, 27, 48, 80.

[13].    Ibid. à la p. 80.

[14].    Transcription de l’audience publique, vol. 2, 8 mars 2016, à la p. 154.

[15].    Caillebotis en acier NQ au par. 87.

[16].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 18, 70.

[17].    Caillebotis en acier NQ au par. 119.

[18].    Caillebotis en acier NQ au par. 137.

[20].    Fisher & Ludlow et Borden transforment aussi toutes deux des caillebotis en acier. Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 16, 43-44.

[21].    Dans Caillebotis en acier NQ, au par. 140, le Tribunal ne s’est pas penché précisément sur cette question.

[22].    Selon le témoignage de M. Murray McDonald, Accurate a augmenté sa capacité de transformation pendant la période de réexamen et possède maintenant des installations à Toronto (Ontario), à Vancouver (Colombie-Britannique) et à Calgary (Alberta). Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 96.

[23].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 126.

[24].    Ibid. aux pp. 28-29, 126; Transcription de l’audience à huis clos, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 28-29.

[25].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 35-36.

[26].    Monuments commémoratifs faits de granit noir et tranches de granit noir (19 juillet 1999), RR-98-006 (TCCE) [Monuments commémoratifs en granit] à la p. 13; Raccords filetés de tuyaux en acier au carbone et raccords d’adaptateur (15 juillet 2008), RR-2007-003 (TCCE) aux par. 20-22, 34-35.

[27].    Certaines barres d’armature pour béton (11 janvier 2005), RR-2004-001 (TCCE) aux par. 66-71; Tôles d’acier au carbone laminées à chaud (9 janvier 2008), RR-2007-001 (TCCE) aux par. 46-59; Tubes structuraux (20 décembre 2013), RR-2013-001 (TCCE) aux par. 28-41.

[28].    Monuments commémoratifs en granit à la p. 13.

[29].    Transcription de l’audience à huis clos, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 42-43.

[30].    (8 décembre 2014), document no WT/DS436/AB/R de l’OMC. L’Organe d’appel a déterminé que le cumul croisé des importations visées par une enquête de dumping et de celles visées uniquement par une enquête de subventionnement constituait une violation de l’Accord sur les subventions et les mesures compensatoires de l’Organisation mondiale du commerce.

[31].    Certains lave-vaisselle et sécheuses (25 avril 2005), RD-2004-010 (TCCE) au par. 16.

[32].    Raccords de tuyauterie en cuivre (17 février 2012), RR-2011-001 (TCCE) au par. 56. Dans Conteneurs thermoélectriques (9 décembre 2013), RR-2012-004 (TCCE) au par. 14, le Tribunal a souligné que le contexte d’analyse dans lequel il est statué sur un réexamen relatif à l’expiration comprend souvent l’évaluation d’éléments de preuve rétrospectifs appuyant des conclusions prospectives. Voir aussi Extrusions d’aluminium (17 mars 2014), RR-2013-003 (TCCE) au par. 21.

[33].    Feuillards et tôles plats en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (16 août 2006), RR-2005-002 (TCCE) au par. 59.

[34].    Conteneurs thermoélectriques au par. 14; Extrusions d’aluminium au par. 21.

[35].    D.O.R.S./84-927 [Règlement].

[36].    Conformément à l’alinéa 37.2(2)j) du Règlement, le Tribunal peut prendre en compte « [...] tout changement des conditions du marché à l’échelle nationale et internationale, y compris les variations de l’offre et de la demande des marchandises, ainsi que tout changement des tendances et des sources des importations au Canada [...] ».

[37].    Pièce RR-2015-001-A-03, au par. 23, vol. 11A; pièce RR-2015-001-03A, vol. 1A à la p. 72.

[38].    Pièce RR-2015-001-A-01A, onglets 3, 5, 7, vol. 11.

[39].    Ibid. aux pp. 98-108, 114-118.

[40].    Ibid. aux pp. 26, 33, 126-143.

[41].    Ibid. aux pp. 43-44, 100.

[42].    Ibid. à la p. 27.

[43].    Ibid. à la p. 112.

[44].    Ibid. aux pp. 128-129.

[45].    Ibid. aux pp. 135-136, 142-164.

[46].    Ibid. à la p. 42.

[47].    Ibid. aux pp. 26, 36, 39, 42.

[48].    Ibid. à la p. 27.

[49].    Ibid.

[50].    Ibid.

[51].    Ibid. à la p. 16.

[52].    Ibid. à la p. 3.

[53].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 60.

[54].    Ibid. aux pp. 60-62.

[55].    Ibid. aux pp. 45, 48, 62, 117-118.

[56].    Ibid. à la p. 62.

[57].    Pièce RR-2015-001-05, vol. 1.1 à la p. 33.

[58].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 127.

[59].    Ibid. aux pp. 96, 112. Cela dit, le nombre d’autres acteurs du marché et leur taille relative sont demeurés sensiblement les mêmes qu’au cours de la période d’enquête.

[60].    Pièce RR-2015-001-05, vol. 1.1 à la p. 28; pièce RR-2015-001-A-03 aux par. 15, 17-20, vol. 11A; pièce RR‑2015-001-A-05 aux par. 14-17, vol. 11A; Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 13, 25, 46-47, 178.

[61].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 13; pièce RR-2015-001-A-03 au par. 32, vol. 11A.

[62].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 46.

[63].    Ibid.

[64].    Pièce RR-2015-001-A-03 au par. 32, vol. 11A.

[65].    Pièce RR-2015-001-16.03 (protégée), vol. 4 à la p. 63.

[66].    Caillebotis en acier NQ aux par. 170-172.

[67].    Pièce RR-2015-001-A-01A à la p. 201, vol. 11.

[68].    Pièce RR-2015-001-A-03A à la p. 92, vol. 1A; Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 50.

[69].    Pièce RR-2015-001-A-01A à la p. 126, vol. 11.

[70].    Ibid. aux pp. 33, 47-48, 111.

[71].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 63.

[72].    Ibid. aux pp. 21-22.

[73].    Ibid. à la p. 23.

[74].    Pièce RR-2015-001-A-01A à la p. 197, vol. 11.

[75].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 101-102.

[76].    Ibid. à la p. 86.

[77].    Ibid. aux pp. 78-79, 106-108.

[78].    Ibid. à la p. 88.

[79].    Ibid. aux pp. 31, 115-116; Caillebotis en acier NQ à la p. 75.

[80].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 116.

[81].    M. McDonald a affirmé : « Voilà où la concurrence se joue, […] sur les prix » [traduction]. Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 114.

[82].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 136.

[83].    Ibid. à la p. 20.

[84].    Ibid. à la p. 26.

[85].    Ibid. aux pp. 22, 127.

[86].    Pièce RR-2015-001-A-04 (protégée), pièces jointes, vol. 12.

[87].    Transcription de l’audience à huis clos, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 50, 90.

[88].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 85.

[89].    Ibid. aux pp. 33, 51, 79.

[90].    Pièce RR-2015-001-A-04A (protégée), vol. 12; pièce RR-2015-001-19.66A (protégée), vol. 6.

[91].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 129-130.

[92].    Ibid. à la p. 21.

[93].    Ibid. aux pp. 23, 63-64, 139; Caillebotis en acier NQ aux par. 194, 246; pièce RR-2015-001-10.01A, vol. 1.3A à la p. 64.

[94].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 90.

[95].    Comme on ne s’attend pas à une hausse importante du coût de l’acier à court ou à moyen terme, la compression des prix n’est pas une question pertinente aux fins du présent réexamen relatif à l’expiration.

[96].    Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, aux pp. 24-25.

[97].    Ibid. aux pp. 45-46, 51-53.

[98].    Ibid. aux pp. 50-52.

[99].    Ibid. aux pp. 87-89.

[100]. Ibid. aux pp. 119-121.

[101]. Caillebotis en acier NQ à la p. 198.

[102]. Transcription de l’audience publique, vol. 1, 7 mars 2016, à la p. 69.

[103]. Ibid.

[104]. Ibid. aux pp. 25-26; pièce RR-2015-001-05, Table 20, vol. 1.1.

[105]. Fournitures tubulaires pour puits de pétrole (2 mars 2015), RR-2014-003 (TCCE) aux pp. 39-40; Modules et laminés photovoltaïques (3 juillet 2015), NQ-2014-003 (TCCE) aux pp. 81-82; Tubes de canalisation en acier au carbone et en acier allié (29 mars 2016), NQ-2015-002 (TCCE) aux pp. 83-85.

[106]. Sucre raffiné (30 octobre 2015) (TCCE) aux pp. 39-48.

[107]. Tôles d’acier au carbone et tôles allié résistant à faible teneur, laminées à chaud (6 janvier 2016) (TCCE) aux pp. 74-92.

[108]. Pièce RR-2015-001-12.06, vol. 1.4 à la p. 120.