Enquêtes de dommage antidumping

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Réexamen relatif à l’expiration no RR-2018-003

Silicium métal

Ordonnance et motifs rendus
le jeudi 22 août 2019

 



EU ÉGARD À un réexamen relatif à l’expiration, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, des conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 19 novembre 2013 dans le cadre de l’enquête no NQ-2013-003, concernant du :

SILICIUM MÉTAL ORIGINAIRE OU EXPORTÉ DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE

ORDONNANCE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, conformément au paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, a procédé au réexamen relatif à l’expiration de ses conclusions rendues le 19 novembre 2013 dans le cadre de l’enquête no NQ-2013-003 concernant le dumping et le subventionnement de silicium métal contenant au moins 96,00 p. 100 mais moins de 99,99 p. 100 de silicium en poids, et silicium métal contenant entre 89,00 p. 100 et 96,00 p. 100 de silicium en poids contenant de l’aluminium à plus de 0,20 p. 100 en poids, de toutes les formes et grandeurs, originaire ou exporté de la République populaire de Chine.

Aux termes de l’alinéa 76.03(12)b) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur proroge par les présentes ses conclusions concernant les marchandises susmentionnées.




Jean Bédard                            
Jean Bédard
Membre présidant




Randolph W. Heggart             
Randolph W. Heggart
Membre




Susan D. Beaubien                 
Susan D. Beaubien
Membre


Lieu de l’audience :                                               Ottawa (Ontario)
Dates de l’audience :                                             du 10 au 12 juin 2019

Membres du Tribunal :                                          Jean Bédard, membre présidant
Randolph W. Heggart, membre
Susan D. Beaubien, membre

Personnel de soutien :                                            Martin Goyette, conseiller juridique principal

                                                                              Gayatri Shankarraman, analyste principal

                                                                              Grant MacDougall, analyste

                                                                              Mylène Lanthier, analyste
Patrick Stidwill, analyste
Marie-Josée Monette, conseillère, Service de données

PARTICIPANTS :

Producteurs nationaux

Conseillers/représentants

Québec Silicon Limited Partnership et QSIP Canada ULC

Benjamin P. Bedard
R. Benjamin Mills
M. Drew Tyler
Shannel J. Rajan
Manon Carpentier
Shannon McSheffrey
Lydia Blois
Meagan Brae Vestby

 

Importateurs/exportateurs/autres

Conseillers/représentants

Unifor

Craig Logie

Rio Tinto Alcan

Matthew Kronby
Jesse Goldman
Julia Webster
Erica Lindberg
Jacob Mantle
Sam Levy
Hannibal El-Mohtar

Wacker Chemicals Norway AS, Norway, et Wacker Chemie AG, Germany

Peter Clark
William Bradley
Edwin Vermulst
Juhi Sud

TÉMOINS :

Jeff Watson
Vice-président exécutif, Ventes et commercialisation
Ferroglobe

Benjamin Crespy
Directeur d’usine
Québec Silicon LP

J. Marlin Perkins
Vice-président – Ventes
Ferroglobe

Annie Charland
Contrôleuse
Québec Silicon LP

John Caluori
Adjoint au directeur québécois
Unifor

Jean Simoneau
Président, Unifor, section locale 184/Membre directeur Conseil québécois Unifor/vice-président Conseil général FTQ Mauricie et Centre-du-Québec

Unifor Québec/FTQ

Oliver Majumdar
Directeur principal, Affaires commerciales mondiales
Produits principaux, Wacker Silicones
Wacker Chemie AG

Jéssica Verdini
Directrice de catégorie – Achats d’alliages
Rio Tinto

Jean-François Laplante
Aluminium, produits industriels et investissements
Gestion des métaux, ventes et commercialisation
Rio Tinto

 

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

1.                  Il s’agit d’un réexamen relatif à l’expiration, aux termes du paragraphe 76.03(3) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation[1] (LMSI). Le réexamen porte sur les conclusions rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) le 19 novembre 2013 dans le cadre de l’enquête no NQ‑2013‑003 concernant le dumping et le subventionnement de silicium métal originaire ou exporté de la République populaire de Chine (les marchandises en question).

2.                  Aux termes de la LMSI, les conclusions de dommage ou de menace de dommage (et les mesures de protection connexes prenant la forme de droits antidumping ou compensateurs) expirent cinq ans après la date où les conclusions ont été rendues ou, dans le cas où le Tribunal a rendu une ou plusieurs ordonnances prorogeant les conclusions, la date où la dernière ordonnance a été rendue conformément à l’alinéa 76.03(12)b), à moins que le Tribunal n’entreprenne un réexamen relatif à l’expiration avant cette date. Par conséquent, les conclusions de l’enquête no NQ-2013-003 devaient donc expirer le 19 novembre 2018.

3.                  Le 16 octobre 2018, le Tribunal a publié un avis selon lequel il allait procéder au réexamen relatif à l’expiration des conclusions, ce qui a entraîné l’ouverture d’une enquête de la part de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) le lendemain. L’enquête de l’ASFC visait à déterminer si l’expiration des conclusions du Tribunal causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping ou du subventionnement.

4.                  Le 15 mars 2019, l’ASFC a rendu une décision selon laquelle l’expiration des conclusions du Tribunal causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping et du subventionnement des marchandises en question. Le 18 mars 2019, à la suite de la décision de l’ASFC et conformément au paragraphe 76.03(10) de la LMSI, le Tribunal a entrepris la phase d’enquête de son réexamen relatif à l’expiration des conclusions.

5.                  Dans le cadre du présent réexamen, le Tribunal doit décider si l’expiration des conclusions causera vraisemblablement un dommage à la branche de production nationale. S’il conclut qu’il y aura vraisemblablement un dommage, le Tribunal doit rendre une ordonnance en vue de proroger les conclusions. S’il conclut qu’il n’y aura vraisemblablement pas de dommage à la branche de production nationale, le Tribunal doit rendre une ordonnance en vue d’annuler les conclusions.

6.                  La période visée par le présent réexamen s’étend sur trois ans, du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018.

7.                  Le Tribunal a fait parvenir des questionnaires à l’unique producteur national (Québec Silicon) et aux importateurs de silicium métal, de même qu’aux producteurs étrangers des marchandises en question. Le Tribunal a reçu une réponse du producteur national, ainsi que des réponses complètes de 10 importateurs[2]. Aucun producteur étranger n’a répondu au questionnaire.

8.                  À partir des réponses aux questionnaires et d’autres renseignements versés au dossier, le personnel du Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur a préparé une version non confidentielle et une version confidentielle du rapport d’enquête.

9.                  Le producteur national, c’est-à-dire le groupe d’entreprises composé de Québec Silicon Limited Partnership (QSLP) et QSIP Canada ULC (QSIP Canada) (collectivement, Québec Silicon), a déposé des observations à l’appui de la prorogation des conclusions.

10.              Unifor, un syndicat représentant, entre autres, des travailleurs employés par Québec Silicon, a aussi déposé des observations demandant au Tribunal de proroger les conclusions.

11.              Rio Tinto Alcan (RTA), un importateur, acheteur et utilisateur national de silicium métal, a déposé des observations s’opposant à la prorogation des conclusions.

12.              Wacker Chemie AG et Wacker Chemicals Norway AS (collectivement, Wacker) s’opposent également à la prorogation des conclusions. Wacker est un producteur étranger de silicium métal, qui a déjà importé du silicium métal acheté du producteur national avant l’application des conclusions. Wacker n’a pas acheté de silicium métal du producteur national pendant la période visée par le réexamen[3]. Le 30 mai 2019, Québec Silicon a déposé, outre ses observations en réplique, une requête en radiation du mémoire de Wacker et de la déclaration du témoin qu’elle désirait faire comparaître (M. Majumdar) et fait valoir que Wacker n’avait pas qualité pour participer au présent réexamen relatif à l’expiration. Le Tribunal a rejeté cette requête pour les motifs énoncés ci-dessous.

13.              Québec Silicon, RTA et Wacker ont également déposé des réponses à diverses demandes de renseignements faites par le Tribunal à la demande d’autres parties.

14.              Un autre utilisateur canadien de silicium métal, Alcoa, a également répondu à une demande de renseignements du Tribunal. Alcoa n’a pas autrement participé au réexamen.

15.              Le Tribunal a tenu à Ottawa, du 10 au 12 juin 2019, une audience comportant des témoignages publics et à huis clos. Québec Silicon, Unifor, RTA et Wacker ont fait comparaître des témoins et étaient représentés par des conseillers juridiques.

16.              Le Tribunal n’a reçu aucune demande d’exclusion de produit.

PRODUIT

Définition du produit

17.              Les marchandises en question sont définies comme suit[4] :

[S]ilicium métal contenant au moins 96,00 p. 100 mais moins de 99,99 p. 100 de silicium en poids, et [...] silicium métal contenant entre 89,00 p. 100 et 96,00 p. 100 de silicium en poids contenant de l’aluminium à plus de 0,20 p. 100 en poids, de toutes les formes et grandeurs, originaire ou exporté de la République populaire de Chine

Renseignements additionnels sur le produit

18.              L’ASFC a fourni les renseignements supplémentaires suivants sur le produit[5] :

Les marchandises en [question] incluent le silicium-métal de toutes formes et grandeurs, incluant les matériaux qui ne sont pas spécifiés comme le silicium-métal dont les taux d’autres éléments, notamment l’aluminium, le calcium, le fer, etc., sont élevés.

Le silicium est un élément chimique d’apparence métallique de couleur grise et ayant une masse solide. Il est très abondant dans la nature en combinaison avec l’oxygène sous forme de silice ou en combinaison avec l’oxygène et un métal, sous forme de silicates. Même s’il est souvent considéré comme un métal, le silicium possède autant les caractéristiques d’un métal que d’un non-métal. Le silicium-métal est un matériau polycristallin dont les cristaux ont une structure tridimensionnelle à la manière du diamant sous la pression atmosphérique. Il se vend généralement sous forme de blocs mesurant habituellement autour de 6 po × ½ po jusqu’à 4 po × ¼ po dans l’industrie de métallurgie, et autour de 1 po × 1 po dans l’industrie chimique. Il se vend aussi sous forme de poudre.

Le silicium-métal est principalement utilisé par les producteurs d’aluminium principaux et secondaires comme un élément d’alliage et par l’industrie chimique afin de produire des dérivés du silicium nommés silicones.

CADRE LÉGISLATIF

19.              Aux termes du paragraphe 76.03(10) de la LMSI, le Tribunal doit déterminer si l’expiration des conclusions rendues à l’égard des marchandises en question causera vraisemblablement un dommage sensible ou un retard à la branche de production nationale[6].

20.              Il doit également, aux termes du paragraphe 76.03(12) de la LMSI, rendre une ordonnance soit annulant les conclusions rendues dans le cadre de l’enquête no NQ-2013-003 s’il détermine que l’expiration des conclusions ne causera vraisemblablement pas de dommage, soit prorogeant les conclusions, avec ou sans modifications, s’il détermine que l’expiration des conclusions causera vraisemblablement un dommage.

21.              Avant de procéder à son analyse concernant la probabilité de dommage, le Tribunal doit d’abord déterminer ce qui constitue des « marchandises similaires ». Ensuite, le Tribunal doit déterminer quelles entreprises constituent la « branche de production nationale ».

22.              Le Tribunal doit également déterminer s’il évaluera les effets cumulatifs du dumping et du subventionnement des marchandises en question, c’est-à-dire s’il procédera au cumul croisé de leurs effets.

MARCHANDISES SIMILAIRES ET CATÉGORIES DE MARCHANDISE

23.              Afin de déterminer si la reprise ou la poursuite du dumping et du subventionnement des marchandises en question causera vraisemblablement un dommage sensible aux producteurs nationaux de marchandises similaires, le Tribunal doit déterminer quelles marchandises produites au pays, s’il y en a, constituent des marchandises similaires aux marchandises en question. Il doit également évaluer s’il y a plus d’une catégorie de marchandise parmi les marchandises en question et les marchandises similaires[7].

24.              Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » par rapport à toutes les autres marchandises comme suit :

a)    marchandises identiques aux marchandises en cause;

b)    à défaut, marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

25.              Pour trancher la question des marchandises similaires lorsque les marchandises ne sont pas en tous points identiques aux marchandises en question, le Tribunal tient habituellement compte de divers facteurs, dont les caractéristiques physiques des marchandises, comme leur composition et leur apparence, et leurs caractéristiques de marché, comme la substituabilité, les prix, les circuits de distribution, les utilisations finales et si les marchandises répondent aux mêmes besoins des clients[8].

26.              Dans l’enquête no NQ-2013-003, le Tribunal a conclu que le silicium métal produit au pays et les marchandises en question de même description étaient des marchandises similaires. Le Tribunal a également conclu que les marchandises en question et les marchandises similaires constituaient une seule catégorie de marchandise[9]. Le Tribunal n’a reçu aucun élément de preuve suggérant qu’il devrait réexaminer ses conclusions concernant ces questions. Aucune des parties n’a présenté d’observations remettant ces conclusions en question au cours du présent réexamen, et le Tribunal ne voit donc aucune raison de s’écarter de ses conclusions antérieures à l’égard des marchandises similaires et les catégories de marchandises.

BRANCHE DE PRODUCTION NATIONALE

27.              Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit la « branche de production nationale » de la façon suivante :

[...] l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. Peut toutefois en être exclu le producteur national qui est lié à un exportateur ou à un importateur de marchandises sous-évaluées ou subventionnées, ou qui est lui-même un importateur de telles marchandises.

28.              Le Tribunal doit donc déterminer si un dommage sera vraisemblablement causé à l’ensemble des producteurs nationaux ou aux producteurs nationaux dont la production constitue une proportion majeure de la production collective de marchandises similaires[10].

29.              QSLP est le seul producteur de silicium métal au Canada. Les installations de QSLP sont situées à Bécancour (Québec).

30.              QSIP Canada, une entreprise affiliée à QSLP, vend le silicium métal produit par QSLP sur le marché canadien et les marchés d’exportation. QSLP appartient à QSIP Canada (50,99 %), à Québec Silicon General Partnership Inc. (le commandité) (0,01 %) et à Dow Chemical Canada (Dow) (49 %, par l’intermédiaire de sa filiale en propriété exclusive, DC Global Holdings S.r.a.l). Le commandité administre QSLP en vertu d’une procuration, et appartient lui-même à 51 % à QSIP Canada et à 49 % à Dow Switzerland Holding GmbH[11].

31.              Au moment de l’enquête no NQ-2013-003, Globe Specialty Metals Inc. (Globe) était le détenteur ultime de QSIP Canada[12]. À la suite de la fusion de Globe et de Grupo FerroAtlántica en 2015, QSIP Canada est maintenant détenue en propriété exclusive par la société résultant de la fusion, Ferroglobe PLC (Ferroglobe). Par conséquent, Ferroglobe est propriétaire majoritaire de QSLP et la contrôle, et détient et contrôle QSIP Canada en propriété exclusive. Ferroglobe est un producteur mondial majeur de silicium métal et de métaux spéciaux[13].

32.              La production de QSLP est répartie aux termes d’une entente entre Ferroglobe et Dow. Dow a droit à 49 % de la production de QSLP, quoique la proportion de la production remise à chaque partenaire varie d’année en année[14]. La part de la production de QSLP qui est remise à Dow est exportée aux États-Unis, où Dow l’utilise à l’interne[15]. La part de Dow est remise directement à Dow par QSLP, sans passer par QSIP Canada[16]. QSIP Canada vend la part restante, soit environ 51 % de la production de QSLP, sur le marché libre à des clients nationaux ou étrangers[17].

33.              Tant dans l’enquête no NQ-2013-003 que dans Silicium métal II, le Tribunal a conclu que QSLP et QSIP Canada étaient intégrées dans un seul groupe de sociétés. Le Tribunal a également conclu que le groupe de sociétés intégré constitué de QSLP et de QSIP Canada (collectivement, Québec Silicon) constitue la branche de production nationale[18]. Cette conclusion n’a pas été contestée à l’occasion du présent réexamen, et le Tribunal fonde donc son analyse sur la même conclusion.

CUMUL CROISÉ

34.              Le Tribunal doit également déterminer s’il évaluera les effets cumulatifs du dumping et du subventionnement des marchandises en question.

35.              Dans son analyse dans le cadre de l’enquête no NQ-2013-003, le Tribunal n’a pas fait de distinction entre les effets résultant du dumping des marchandises en cause de ceux résultant de leur subventionnement. Le Tribunal a expliqué qu’il n’était pas possible d’isoler les effets du dumping de ceux du subventionnement, car ils étaient si inextricablement liés qu’ils ne pouvaient être démêlés de façon à attribuer une part précise ou discrète des effets au dumping ou au subventionnement[19]. Le Tribunal a procédé de la même façon dans Silicium métal II, ainsi que dans d’autres enquêtes et réexamens[20].

36.              Aucun élément de preuve ni argument n’a été présenté au Tribunal qui justifierait qu’il s’écarte de cette façon de procéder en l’espèce. Par conséquent, dans l’analyse qui suit, le Tribunal a évalué de façon cumulative l’incidence probable de la poursuite ou de la reprise du dumping et du subventionnement des marchandises en question sur la branche de production nationale si les conclusions étaient annulées.

REQUÊTE EN EXCLUSION DE WACKER DU PRÉSENT RÉEXAMEN RELATIF À L’EXPIRATION

37.              Le 30 mai 2019, en même temps que ses observations en réplique, Québec Silicon a déposé une requête portant sur la participation de Wacker au réexamen relatif à l’expiration, conformément aux articles 23.1 et 24 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur[21] (Règles). Dans sa requête, Québec Silicon demandait au Tribunal de rendre une ordonnance radiant du dossier le mémoire de Wacker et la déclaration du témoin qu’elle désirait faire comparaître (M. Majumdar). Québec Silicon demandait également au Tribunal de statuer que Wacker n’avait pas la qualité de participer au présent réexamen relatif à l’expiration.

38.              Le 3 juin 2019, RTA, Wacker et Unifor ont déposé des observations sur la demande de Québec Silicon. Québec Silicon a répondu à ces observations le 4 juin 2019.

39.              RTA s’est opposée à la réponse de Québec Silicon et fait valoir que le Tribunal ne devrait pas en tenir compte, car elle n’a pas été sollicitée. Nonobstant l’argument de RTA, le Tribunal a décidé de verser la réponse de Québec Silicon au dossier et d’en tenir compte dans sa décision à l’égard de la requête.

40.              Le 6 juin 2019, le Tribunal a rendu une ordonnance rejetant la requête de Québec Silicon. Le Tribunal a annoncé que les motifs de cette ordonnance seraient inclus dans l’exposé des motifs se rapportant au présent réexamen relatif à l’expiration. Les motifs de l’ordonnance rendue par le Tribunal sont exposés ci-dessous.

Introduction

41.              Québec Silicon cherchait à exclure Wacker des parties à la procédure au motif que Wacker n’était pas une « partie intéressée ».

42.              Selon l’article 2 des Règles, une « partie », dans le cadre d’une enquête menée en vertu de la LMSI ou d’un réexamen relatif à l’expiration, est « toute partie intéressée qui a déposé un avis de participation ». Une « partie intéressée », quant à elle, est définie comme le plaignant, tout producteur national, exportateur ou importateur des marchandises en question, toute association regroupant ou comptant des producteurs nationaux, des importateurs ou des exportateurs, le gouvernement de tout pays mentionné dans la décision provisoire, tout syndicat représentant des personnes employées dans la branche de production nationale ou toute association comprenant de tels syndicats, ou :

(e)   toute autre personne qui, parce que ses droits ou ses intérêts pécuniaires peuvent être touchés ou pour toute autre raison, a le droit d’être entendue par le Tribunal avant que celui-ci rende sa décision au terme de l’enquête ou du réexamen, selon le cas, conformément à cette loi.

43.              Wacker n’est ni un producteur national, ni un producteur ou exportateur des marchandises en question. Wacker n’a répondu à aucun des questionnaires du Tribunal. Le désaccord entre les parties était circonscrit à la question de savoir si l’alinéa e) ci-dessus s’applique à Wacker.

Position des parties

44.              Québec Silicon a fait valoir que Wacker n’a pas établi que ses droits ou ses intérêts pécuniaires pouvaient être touchés par la prorogation des conclusions. Québec Silicon a admis que l’alinéa e) indique par ailleurs que le droit d’être entendu par le Tribunal peut être accordé à une personne « pour toute autre raison ». Québec Silicon a cependant fait valoir que la définition de « partie intéressée » fait en sorte que le Tribunal doit cerner un motif positif et légitime justifiant le droit d’une personne à participer, et qu’aucun tel motif n’existe en l’espèce. Selon Québec Silicon, Wacker n’a aucun lien avec le marché canadien. Elle ne produit pas de silicium métal en Chine, elle n’a aucun intérêt pour l’exportation au Canada, elle n’a répondu à aucun questionnaire du Tribunal et la procédure n’a aucune incidence sur ses intérêts pécuniaires.

45.              Québec Silicon a aussi fait valoir que l’intérêt général pour les questions liées au commerce évoqué par Wacker dans son mémoire et dans la déclaration de son témoin, M. Majumdar, n’est pas un motif admissible pour demander le droit de participer, car il réduirait à néant toute limite imposée par la définition de « partie intéressée ». Selon Québec Silicon, le fait que Wacker ait participé à des procédures dans d’autres pays et qu’elle ait participé à Silicium métal II (qui portait sur du silicium métal originaire, entre autres, de la Norvège) ne justifie pas sa participation à la présente enquête.

46.              Wacker s’est opposée à la requête de Québec Silicon. Elle a fait valoir que son droit de participer au réexamen est prévu à l’alinéa e). Wacker a fait valoir que le Tribunal a un vaste pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne l’inclusion de parties intéressées et souligne que dans Tubes de canalisation[22], le Tribunal a énoncé qu’il ne refuserait la participation d’une personne que dans des circonstances « exceptionnelles ».

47.              Wacker a affirmé qu’elle souhaitait présenter des faits et des témoignages du point de vue d’un utilisateur majeur qui a une expérience directe du fonctionnement des marchés de l’Union européenne, des États-Unis et de la Chine. Wacker a souligné, par ailleurs, qu’elle importait des quantités importantes de silicium métal du Canada au moment de l’enquête no NQ-2013-003 et que son nom est mentionné à plusieurs reprises dans l’exposé des motifs de cette enquête. Wacker a fait aussi valoir que son témoignage permettrait au Tribunal de prendre une décision réellement éclairée et que sa participation n’est ni frivole ni vexatoire. Elle a également fait valoir qu’elle a soumis des renseignements pertinents qui ne l’ont pas été par Québec Silicon et que les utilisateurs canadiens de silicium métal sont dans l’impossibilité de posséder ou de communiquer. Selon Wacker, la radiation du dossier de ses observations et des données qu’elle présente priverait le Tribunal d’éléments de preuve pertinents pour son analyse des facteurs prévus au Règlement sur les mesures spéciales d’importation[23] (Règlement).

48.              RTA s’est également opposée à la requête de Québec Silicon. Elle a fait valoir que les Règles donnent au Tribunal une grande discrétion pour déterminer qu’une personne a le droit de participer à un réexamen relatif à l’expiration. RTA a souligné que dans Tubes de canalisation, le Tribunal a accueilli des parties en fonction de leur seul potentiel de fournir des éléments de preuve considérés comme « éventuellement pertinents ou utiles ». RTA a indiqué que Wacker est un des plus importants acheteurs et utilisateurs mondiaux de silicium métal, et que ses observations pourraient donc contribuer à offrir au Tribunal « la meilleure preuve possible ». Le mémoire de Wacker et la déclaration de M. Majumdar comportent des éléments de preuve qui concernent directement les facteurs que le Tribunal doit prendre en considération dans son analyse. RTA a par ailleurs fait valoir que Wacker avait des liens avec le réexamen au vu du rôle qu’elle a joué dans l’enquête no NQ-2013-003. Compte tenu de ces facteurs, RTA a fait valoir que la participation de Wacker ne serait pas exceptionnelle, frivole ni vexatoire.

49.              Unifor a fait valoir que le Tribunal devrait préserver une interprétation libérale de « partie intéressée ». L’alinéa e) est une disposition générale qui accorde au Tribunal la discrétion de laisser participer toute partie qui pourrait présenter des éléments de preuve pertinents pour l’analyse dans un cas donné, même si elle n’est pas considérée comme une des parties selon l’usage conventionnel du terme. Unifor souligne que jusqu’à l’ajout récent de l’alinéa d.1) aux Règles, le droit pour les syndicats de participer aux procédures relevant de la LMSI se fondait sur l’alinéa e)[24]. Toutefois, Unifor était d’accord avec Québec Silicon que certains liens avec le Canada allant au-delà d’un intérêt général pour le commerce doivent avoir été établis afin que l’alinéa e) s’applique. Unifor ne s’est pas prononcé à savoir si Wacker remplit cette condition.

Analyse

50.              Les Règles donnent une définition large de « partie intéressée »; mentionnons plus particulièrement la formulation « ou pour toute autre raison » à l’alinéa e), citée précédemment. Dans Tubes de canalisation, le Tribunal a affirmé ce qui suit :

24.   La décision du Tribunal de considérer qu’une personne qui dépose un avis de participation est une « partie intéressée » est discrétionnaire. Il donne généralement à ces règles une interprétation libérale de façon à favoriser l’équité, l’accès à la justice et la transparence.

[...]

27.     En s’appuyant sur ce pouvoir discrétionnaire, la pratique habituelle du Tribunal, dans le cadre d’enquêtes de dommage aux termes de l’article 42 de la LMSI, est d’accepter les participants et le dépôt d’éléments de preuve de façon libérale. [...] [L]es personnes qui déposent un avis de participation ne sont généralement pas tenues d’établir la nature de leur intérêt avant que le Tribunal ne consente à leur participation.

28.   En tant que responsable de l’enquête, le Tribunal peut remettre en question la participation d’une personne qui ne semble appartenir à aucune des catégories énoncées à l’article 2 des Règles. Toutefois, selon toute vraisemblance, cette démarche se limiterait à refuser la participation d’une personne dans des circonstances exceptionnelles, par exemple dans le cas de personnes qui ne correspondent manifestement pas aux critères de l’article 2 ou dont la participation serait frivole ou vexatoire [...].

51.              Dans Tubes de canalisation, le Tribunal a rejeté une requête visant à obtenir une ordonnance refusant la participation de deux parties, Atlas et DFI, qui ne produisaient, n’importaient, ni ne vendaient de marchandises en question ou de marchandises similaires. Le Tribunal a estimé qu’Atlas et DFI remplissaient la condition « ou pour toute autre raison » prévue à l’alinéa e) des Règles du fait qu’elles avaient affirmé qu’elles fourniraient des observations et des éléments de preuve que le Tribunal considérait comme éventuellement pertinents ou utiles au regard des questions concernant son enquête. Le Tribunal a également mentionné qu’il souhaitait obtenir « la meilleure preuve possible », affirmant ce qui suit :

31.   La participation d’une partie qui possède des renseignements pertinents peut aider le Tribunal à vérifier les éléments de preuve fournis par les autres parties ainsi qu’à prendre une meilleure décision en connaissance de cause. La pertinence et l’utilité de la participation d’Atlas et de DFI ainsi que des éléments de preuve qu’elles présenteront seront donc évaluées par le Tribunal à la conclusion de l’enquête de dommage.

52.              Conformément à son raisonnement dans Tubes de canalisation, le Tribunal a conclu que la position de Wacker lui permet de déposer des observations et des éléments de preuve étant éventuellement pertinents ou utiles au regard des questions concernant le présent réexamen relatif à l’expiration. Plus particulièrement, l’un des facteurs dont doit tenir compte l’analyse du Tribunal dans le cadre de ce réexamen relatif à l’expiration se rapporte à la situation du marché international[25]. Le Tribunal est d’avis que les éléments de preuve et les observations déjà versés au dossier par Wacker sont pertinents et pourraient l’aider à mieux comprendre les circonstances pertinentes dans le cadre de son analyse.

53.              De même, les renseignements additionnels que Wacker et son témoin peuvent présenter au Tribunal pourraient aider ce dernier à obtenir « la meilleure preuve possible » et à vérifier les éléments de preuve fournis par les autres parties, y compris Québec Silicon.

54.              En outre, la participation de Wacker à la procédure n’est ni frivole ni vexatoire. Au cours de la période visée par l’enquête no NQ-2013-003, Wacker était une cliente de Québec Silicon, de laquelle elle achetait du silicium métal. Wacker est mentionnée à plusieurs reprises dans l’analyse du Tribunal[26]. Wacker a aussi affiché un intérêt constant pour les procédures subséquentes du Tribunal se rapportant au silicium métal. Elle a participé à l’enquête de Silicium métal II à titre de producteur étranger, de même qu’à la procédure se rapportant à l’expiration (LE-2018-003), au terme de laquelle le Tribunal a décidé de procéder au présent réexamen relatif à l’expiration.

55.              Pour les motifs ci-dessus, le Tribunal a rejeté la requête de Québec Silicon.

ANALYSE DE LA PROBABILITÉ DE DOMMAGE

Introduction

56.              Le réexamen relatif à l’expiration est de nature prospective[27]. Par conséquent, les éléments de preuve recueillis pendant la période visée par le réexamen, au cours de laquelle une ordonnance ou des conclusions étaient en vigueur, sont pertinents dans la mesure où ils influent sur l’analyse prospective visant à déterminer si l’expiration de l’ordonnance ou des conclusions causera vraisemblablement un dommage[28].

57.              Il n’y a pas de présomption de dommage dans le cadre d’un réexamen relatif à l’expiration; les conclusions doivent être fondées sur des éléments de preuve positifs, en conformité avec la législation nationale et les exigences des accords de l’Organisation mondiale du commerce[29]. Dans le contexte d’un réexamen relatif à l’expiration, les éléments de preuve positifs peuvent comprendre des éléments de preuve fondés sur des faits antérieurs qui appuient des conclusions prospectives[30].

58.              Le paragraphe 37.2(2) du Règlement sur les mesures spéciales d’importation[31] dresse la liste des facteurs dont le Tribunal peut tenir compte lorsqu’il évalue la probabilité de dommage quand l’ASFC a déterminé qu’il y a probabilité de poursuite ou de reprise du dumping. Les facteurs que le Tribunal juge pertinents en l’espèce sont exposés en détail plus bas.

Observations de RTA sur la pertinence de la conjoncture du marché pour les produits en aval

59.              RTA a présenté un certain nombre d’arguments relatifs à la pertinence de la conjoncture du marché en aval et aux répercussions de l’annulation ou de la prorogation des conclusions sur les producteurs en aval. Les témoins de RTA ont souligné les pressions concurrentielles que subit la société sur le marché des alliages d’aluminium de fonderie, et affirmé que celle-ci devait s’approvisionner, du moins en partie, en silicium métal auprès de fournisseurs de silicium métal à plus bas prix, comme la Chine, de façon à pouvoir obtenir un coût moyen mixte et ainsi garder ses coûts de production à un niveau raisonnable[32]. Ces témoins ont ajouté que les concurrents de RTA ont accès à du silicium métal chinois à bas prix[33].

60.              Aux termes du paragraphe 76.03(10) de la LMSI, le Tribunal doit déterminer si l’expiration de l’ordonnance ou des conclusions causera vraisemblablement un « dommage » ou un retard. Comme il a précédemment été mentionné, l’article 2 de la LMSI définit un « dommage » comme « [l]e dommage sensible causé à une branche de production nationale », et la « branche de production nationale » par référence aux producteurs nationaux de marchandises similaires. L’incidence sur les utilisateurs en aval n’est pas un facteur que doit prendre en compte le Tribunal, selon ces dispositions. De la même façon, les facteurs dont le Tribunal peut tenir compte en vertu du paragraphe 37.2(2) du Règlement portent sur l’incidence probable de l’expiration de l’ordonnance ou des conclusions sur les producteurs de marchandises similaires. Il n’est fait nulle mention de l’incidence sur les utilisateurs en aval. En résumé, l’incidence de l’expiration de l’ordonnance ou des conclusions sur les utilisateurs en aval (c’est-à-dire les producteurs d’aluminium et d’alliages de fonderie) n’est pas inscrite dans la portée de l’enquête du Tribunal dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration[34].

Période visée par l’analyse du Tribunal

61.              En ce qui concerne ses évaluations de la probabilité de dommage, le Tribunal a toujours été d’avis que son analyse devrait principalement s’attacher aux circonstances auxquelles on peut raisonnablement s’attendre à court et à moyen terme, ce qui correspond en général à la période de 12 à 24 mois qui suit la date de l’ordonnance du réexamen relatif à l’expiration. Cependant, le Tribunal a estimé qu’il était approprié de limiter son analyse à une période plus courte dans les situations où le marché est particulièrement volatil, ou lorsque les éléments de preuve relatifs à une période de plus de 18 mois sont limités[35].

62.              Québec Silicon a d’abord fait valoir que l’analyse du Tribunal devrait se limiter aux 12 à 18 prochains mois plutôt que porter sur la période de 12 à 24 mois habituellement prise en compte dans un réexamen relatif à l’expiration. Elle a justifié cette approche par les conditions actuelles des marchés canadien et mondial du silicium métal. Elle a plus tard déclaré qu’elle ne prendrait pas de position ferme sur la question de la période pertinente et qu’elle était prête à accepter que la période plus longue est appropriée[36].

63.              RTA a quant à elle affirmé que la période de 12 à 24 mois habituellement prise en compte par le Tribunal dans le cadre des réexamens relatifs à l’expiration était appropriée. Elle fait la distinction entre le présent réexamen relatif à l’expiration et les décisions Feuillards et tôles laminés à chaud et Lamelles en bois[37], où la période était plus courte, parce qu’on ne retrouve pas en l’espèce les mêmes types de volatilité ou d’éléments de preuve limités que dans ces décisions.

64.              En l’espèce, les éléments de preuve permettent au Tribunal de réaliser son analyse en se fondant sur la période de 12 à 24 mois qui est habituellement applicable dans le cadre de réexamens relatifs à l’expiration. Par conséquent, et compte tenu des positions des parties, le Tribunal ne voit aucune raison de déroger à son approche habituelle, laquelle consiste à tenir compte des événements susceptibles de se produire au cours des 12 à 24 prochains mois.

Changements dans les conditions du marché

65.              Le Tribunal déterminera d’abord si des changements sont survenus dans les conditions du marché international et national afin d’évaluer les volumes et les prix probables des marchandises en question et leur incidence sur la branche de production nationale advenant l’annulation des conclusions[38].

Conditions du marché international

66.              Le silicium métal vendu peut être de différentes qualités. C’est la proportion maximale des autres éléments (notamment le fer, le calcium et l’aluminium) présents dans le produit qui en détermine la qualité.

67.              Le silicium métal est utilisé en tant qu’élément d’alliage par les producteurs d’aluminium ainsi que par l’industrie chimique, qui produit des silicones et du silicium polycristallin, ce dernier étant utilisé dans les cellules photovoltaïques des panneaux solaires. L’usage prévu n’a pas de répercussions importantes sur le processus de production du silicium métal. La production d’une qualité particulière de silicium métal n’est pas fonction de l’équipement ou du processus de production utilisé dans une usine de fabrication en particulier. Cela dépend plutôt de la matière première utilisée et des procédés de finition. Ainsi, n’importe quelle installation de production de silicium métal pourrait fabriquer du silicium métal destiné à n’importe quelle utilisation finale[39].

68.              À l’échelle mondiale, tant la demande en silicium métal que sa production ont augmenté de façon importante depuis les conclusions rendues par le Tribunal dans le cadre de l’enquête no NQ-2013-003. En 2018, la demande en silicium métal et la production du produit à l’échelle mondiale s’établissaient à environ trois millions de tonnes[40]. Selon les prévisions de CRU, la demande mondiale en silicium métal devrait continuer à croître de façon modérée en 2019, et de manière plus importante en 2020 et en 2021[41].

69.              La part de la production mondiale de silicium métal de la Chine a augmenté depuis la période visée par l’enquête no NQ-2013-003. La Chine produit désormais approximativement les deux tiers du silicium métal à l’échelle mondiale[42]. Les exportations chinoises de silicium métal ont atteint un sommet en 2018, mais elles devraient diminuer graduellement jusqu’en 2023[43].

Conditions du marché national

70.              Il y a deux principaux utilisateurs canadiens de silicium métal au pays : RTA et Alcoa. On compte également un certain nombre de clients et de revendeurs de moindre envergure. Le silicium métal produit et importé au Canada est principalement vendu directement aux utilisateurs finaux.

71.              L’ensemble du marché intérieur apparent s’est contracté de 17 p. 100 entre 2016 et 2017, avant d’augmenter de 13 p. 100 entre 2017 et 2018[44]. À l’heure actuelle, le marché canadien compte pour environ 30 000 tonnes métriques[45], et les prévisions de CRU affichent une hausse régulière du marché canadien du silicium métal pour chacun des exercices 2019, 2020 et 2021[46].

72.              Ces prévisions à la hausse peuvent être liées à l’augmentation prévue de la demande en produits d’alliages d’aluminium de fonderie en aval, laquelle devrait être stimulée par la demande croissante pour des véhicules plus légers, par la relocalisation d’usines de fabrication d’automobiles en Amérique du Nord, ainsi que par les changements apportés aux règles d’origine et les nouvelles règles qui prescrivent la proportion d’aluminium d’origine nord-américaine qui doit être utilisée dans la fabrication de nouvelles automobiles, conformément au nouvel Accord Canada-États-Unis-Mexique[47].

73.              Les prix au comptant (spot price) du silicium métal ont augmenté pendant la période visée par le réexamen, atteignant un sommet en 2018[48]. Selon les prévisions de CRU, les indices des prix au comptant devraient diminuer en 2019 avant d’augmenter à un moment donné en 2020 et en 2021[49].

74.              Alors que les importations des marchandises en question ont occupé une grande partie du marché intérieur pendant la période visée par l’enquête no NQ-2013-003[50], seuls des volumes négligeables des marchandises en question ont été importés au cours de la période visée par le réexamen[51].

75.              Les importations de marchandises non visées représentaient une plus grande part du marché intérieur au cours de la période visée par le réexamen comparativement à la période visée par l’enquête no NQ-2013-003[52]. En outre, au moment de l’enquête no NQ-2013-003, le producteur canadien (et unique fournisseur national) Québec Silicon exportait la plus grande partie de sa production non captive. Depuis l’enquête, Québec Silicon a accru sa présence sur le marché intérieur, comme l’a conclu le Tribunal dans la décision Silicium métal II. La société approvisionne désormais une partie importante du marché canadien[53].

76.              Les conclusions du Tribunal dans la décision Silicium métal II soulignent le rôle qu’ont joué les conclusions de l’enquête no NQ-2013-003 dans la stabilisation du marché canadien du silicium métal. Dans cette décision, le Tribunal a conclu que les gains réalisés par Québec Silicon sur le marché intérieur étaient attribuables à l’absence de silicium métal chinois à des quantités et prix qui avaient cours au moment de l’enquête no NQ-2013-003. Québec Silicon a aussi pu réaliser ces gains parce que RTA et Alcoa avaient besoin d’un approvisionnement fiable et sûr[54].

77.              L’essentiel des achats en silicium métal faits par RTA et Alcoa auprès de Québec Silicon le sont par le biais d’ententes qui fixent le volume et la valeur de leurs achats pour les 6 à 12 mois subséquents. RTA et Alcoa font toutes deux occasionnellement de petits achats au comptant[55].

78.              Les stratégies d’achat de RTA et d’Alcoa jouent un grand rôle dans le façonnage du marché canadien du silicium métal. Dans l’enquête no NQ-2013-003, le Tribunal a conclu que le silicium métal était un produit de base qui se négociait essentiellement (mais pas exclusivement) en fonction du prix[56].

79.              De la même façon, dans la décision Silicium métal II, le Tribunal a conclu que le silicium métal était un produit de base et que les prix canadiens du produit étaient en grande partie subordonnés aux tendances du marché mondial. En outre, le Tribunal a conclu que les prix canadiens n’étaient pas nécessairement identiques à ceux reflétés par les indices des prix mondiaux et américains, mais qu’ils suivaient habituellement les mêmes tendances. Le Tribunal a aussi conclu que la grande majorité de la production canadienne de silicium métal n’était pas vendue comme un produit de base typique parce que le silicium métal n’est pas vendu sur la base du moindre prix. Bien que le prix fasse partie des facteurs clés d’une décision d’achat, d’autres considérations, comme la fiabilité et la sécurité de l’approvisionnement, jouaient un rôle beaucoup plus déterminant dans les décisions d’achat de silicium métal que dans le cas d’autres produits de base[57].

80.              Ainsi, dans la décision Silicium métal II, le Tribunal a conclu que RTA et Alcoa avaient fait de la sécurité et de la fiabilité de l’approvisionnement les éléments décisifs de leurs stratégies d’achat de silicium métal dans la foulée des conclusions de l’enquête no NQ-2013-003[58]. Le Tribunal a conclu que RTA et Alcoa avaient toutes les deux des stratégies d’approvisionnement bien définies selon lesquelles leurs achats de silicium métal canadien étaient complétés par des importations. Il a en outre conclu que les deux sociétés évitaient délibérément de dépendre trop fortement d’une source unique d’approvisionnement[59].

81.              Le processus d’approvisionnement de RTA est demeuré essentiellement le même après la décision Silicium métal II. La politique d’approvisionnement de RTA est fondée sur la stratégie du « coût de propriété total », et elle met l’accent sur la sécurité, la fiabilité et la diversité de l’approvisionnement. Le prix est un facteur pertinent, mais il n’est ni le facteur principal ni le seul facteur pour RTA; le facteur dominant est la sécurité de l’approvisionnement[60].

82.              Les témoins de RTA ont affirmé dans leur témoignage que, lors de la prise de décisions relatives à l’approvisionnement[61], la société tenait compte des facteurs suivants, en plus du prix : la qualité du produit en question; la fiabilité de la source d’approvisionnement; la rentabilité de la chaîne d’approvisionnement; la réputation du fournisseur; le respect par le fournisseur des politiques de RTA en matière d’éthique; la volonté du fournisseur de faire des affaires avec Rio Tinto[62] à long terme et la santé financière du fournisseur.

83.              En outre, les témoins ont expliqué que RTA appliquait une stratégie d’approvisionnement « à deux volets » [traduction]. Elle a en effet recours à différentes stratégies pour s’approvisionner en silicium métal au Canada et à l’étranger. Plus particulièrement, le Tribunal a été informé que RTA utilisait différents points de référence pour l’établissement des prix dans ses négociations pour chacune de ces sources d’approvisionnement[63].

84.              Les témoins de RTA ont souligné l’importance, pour RTA, de conserver Québec Silicon comme fournisseur local fiable pouvant fournir du silicium métal de grande qualité avec une livraison « juste à temps »[64]. Ils ont affirmé que RTA continuera à s’approvisionner en silicium métal auprès de Québec Silicon si les conclusions sont annulées.

85.              La stratégie d’approvisionnement d’Alcoa a évolué dans les dernières années. Depuis 2016, la société a regroupé l’ensemble de ses achats de silicium métal pour ses activités de fonderie à l’échelle mondiale. La qualité du produit, la fiabilité de la chaîne d’approvisionnement et la diversité des options d’approvisionnement demeurent des facteurs clés des décisions d’approvisionnement d’Alcoa. Cependant, lorsque les fournisseurs potentiels respectent tous les critères relatifs à la qualité du produit et à la fiabilité de l’approvisionnement, et que le facteur de la diversité de l’approvisionnement est pris en compte, la politique d’Alcoa est que, « toute choses étant égales par ailleurs, le prix est le facteur dont il sera tenu compte au final ».[65] [traduction].

Rendement probable de la branche de production nationale si les conclusions sont prorogées

86.              Le Tribunal examinera maintenant le rendement probable de la branche de production nationale si les conclusions étaient prorogées en tenant compte de son rendement récent[66]. Aux fins de cette analyse, le Tribunal examinera s’il y a d’autres facteurs que le dumping et/ou le subventionnement des marchandises en question qui ont ou qui pourraient avoir une incidence sur le rendement de la branche de production nationale à court et à moyen terme[67].

87.              Les données du rapport d’enquête indiquent que, pendant la période visée par le réexamen (années civiles 2016 à 2018), certains indicateurs de rendement relatifs aux ventes de la branche de production nationale révélaient une faible baisse des tendances. Cette situation a coïncidé avec les fluctuations du marché intérieur. D’autres indicateurs de rendement se sont quant à eux améliorés au cours de la période visée par le réexamen.Au chapitre des ventes à l’exportation, le rendement de Québec Silicon s’est amélioré pendant la période visée par le réexamen. Comme la branche de production nationale est constituée d’un unique producteur, la plus grande partie de la preuve présentée au Tribunal est de nature confidentielle et ne peut être divulguée. Le Tribunal procédera donc à une description générale des tendances pertinentes. La production destinée aux ventes nationales du producteur national a diminué de 11 p. 100 en 2017 par rapport à 2016, et de 7 p. 100 en 2018 par rapport à 2017. Par contre, la production destinée aux ventes à l’exportation et la production totale ont augmenté d’année en année pour toute la période visée par le réexamen : la production destinée aux ventes à l’exportation a augmenté de 17 p. 100 en 2017 et de 20 p. 100 en 2018; la production totale a augmenté de 4 p. 100 en 2017 et de 9 p. 100 en 2018[68].

88.              Les ventes nationales de marchandises produites au pays ont diminué de 13 p. 100 en 2017 (alors que le marché apparent total s’est contracté de 17 p. 100[69]), avant de connaître une hausse de 9 p. 100 en 2018 (alors que le marché apparent total a crû de 13 p. 100[70]). La part de marché de Québec Silicon, qui comme susmentionné a considérablement augmenté depuis la période visée par l’enquête, est restée assez stable au cours de la période visée par le réexamen et n’a connu que des variations mineures d’une année à l’autre[71]. Le prix des ventes nationales a diminué de 1 p. 100 en 2017 et augmenté de 22 p. 100 en 2018[72]. Le volume des stocks a augmenté de 69 p. 100 en 2017 par rapport à celui de 2016 et a diminué de 8 p. 100 en 2018 par rapport à celui de 2017[73]. Les volumes des ventes à l’exportation ont augmenté de 19 p. 100 en 2017 et de 20 p. 100 en 2018[74].

89.              La capacité pratique de production des usines a augmenté de 9 p. 100 en 2017 et de 2 p. 100 en 2018[75]. L’utilisation de la capacité a quant à elle diminué de 5 p. 100 en 2017, puis augmenté de 7 p. 100 en 2018[76]. L’emploi direct et indirect est pour l’essentiel resté stable au cours de la période visée par le réexamen, encore que le nombre d’heures travaillées ait augmenté de 2 p. 100 par année durant la période[77], et la rémunération totale a augmenté de 6 p. 100 en 2017 et de 8 p. 100 en 2018[78]. La productivité a également augmenté[79].

90.              La branche de production nationale a été en mesure de faire des investissements au cours de la période visée par le réexamen. Québec Silicon affirme avoir l’intention de faire de nouveaux investissements (outre l’entretien annuel) en 2019 et en 2020. Elle prévoit accroître la capacité de ses installations et y apporter des améliorations[80].

91.              Les données concernant la situation financière du producteur national sont confidentielles. M. Watson, de Ferroglobe, a toutefois témoigné publiquement du fait que Québec Silicon avait réussi à rester rentable en 2018[81].

92.              Le Tribunal se penche maintenant sur le rendement probable de la branche de production nationale advenant la prorogation des conclusions. Comme mentionné précédemment, selon les prévisions de CRU le marché canadien devrait croître de manière constante entre 2019 et 2021[82]. Après une baisse en 2019, on s’attend à ce que le prix au comptant sur le marché des É.-U. monte en 2020 et en 2021[83].

93.              Les ventes de Québec Silicon sur le marché national au cours des 12 à 24 prochains mois dépendent largement de ses accords de vente annuels ou semestriels avec ses deux principaux clients canadiens, RTA et Alcoa.

94.              Selon la preuve, tant que les conclusions sont en vigueur, et malgré certaines variations annuelles[84], RTA continuera d’acheter d’importantes quantités de silicium métal à Québec Silicon, conformément à sa stratégie d’approvisionnement[85].

95.              Il y a moins de certitude en ce qui concerne les quantités de silicium métal qu’Alcoa se procurerait auprès de Québec Silicon advenant la prorogation des conclusions[86]. Le fait qu’une des usines d’Alcoa est en lockout au moment de fermer le dossier dans l’enquête en cours ne fait qu’accroître l’incertitude[87].

96.              Les parties qui s’opposent à la prorogation des conclusions font valoir qu’un certain nombre de facteurs auront une incidence négative sur le rendement de Québec Silicon et/ou limiteront le volume de silicium métal que Québec Silicon sera en mesure de fournir à RTA et à Alcoa, peu importe l’issue du présent réexamen relatif à l’expiration. Les conclusions du Tribunal dans Silicium métal II sont citées à l’appui de cet argument.

97.              Pour commencer, le Tribunal constate que la situation du producteur national a changé depuis les conclusions du Tribunal dans l’enquête nº NQ-2013-003 et dans Silicium métal II. Certaines circonstances qui pouvaient être pertinentes par le passé ne le sont plus, comme le lockout qui était en cours au moment de l’enquête de 2013 et qui s’est réglé peu après la décision. En conséquence, les facteurs de dommage auto-infligé identifiés par le Tribunal dans l’enquête nº NQ-2013-003 et dans Silicium métal II doivent être réexaminés à la lumière des faits portés devant le Tribunal dans le présent réexamen[88].

98.              Le Tribunal a tenu compte des arguments des parties qui s’opposent. Il estime que la preuve ne permet pas d’établir que les autres facteurs sur lesquels s’appuient les parties qui s’opposent auront vraisemblablement une incidence négative importante sur la branche de production nationale à court ou à moyen terme.

99.              La situation actuelle est toute autre qu’au moment de l’enquête nº NQ-2013-003 : Québec Silicon, avec l’aide des mesures prises à la suite des conclusions, a recentré ses activités sur le marché national et en possède maintenant une part substantielle.

100.          De plus, Québec Silicon continue d’écouler près de la moitié de sa production sous forme d’exportations destinées à Dow. L’entente selon laquelle Québec Silicon vend une partie de sa production à Dow lui a garanti un certain volume d’exportations, lesquelles n’ont pas empêché Québec Silicon d’accroître sa part du marché national ni de rester rentable pendant au moins une partie de la période visée par le réexamen[89]. Pour ces raisons, le Tribunal ne considère pas que l’entente selon laquelle Québec Silicon vend près de la moitié de sa production à Dow soit un facteur pertinent dans l’analyse de la probabilité de dommage.

101.          RTA fait valoir un argument se rapportant au volume de la production de Québec Silicon qui est disponible sur le marché canadien et à la capacité pour Québec Silicon de répondre aux besoins de ses clients compte tenu de ses exportations[90]. Après examen des calculs détaillés de RTA sur la question[91], le Tribunal n’est pas convaincu par les arguments soulevés par RTA et ne croit pas que Québec Silicon se trouve dans l’incapacité de fournir le marché canadien et de répondre aux besoins de ses clients canadiens à court ou à moyen terme. Cette conclusion est étayée par l’incertitude entourant les futures ventes à l’exportation de Québec Silicon destinées à d’autres clients que Dow[92], la confirmation par les témoins de Québec Silicon du fait que l’augmentation de la demande nationale aura préséance sur les exportations[93] et d’autres renseignements confidentiels au dossier[94].

102.          Les parties qui s’opposent soutiennent par ailleurs que la clientèle de Québec Silicon n’est pas suffisamment variée. Elles soutiennent que sa société mère (Ferroglobe) a donné comme instructions à Québec Silicon de compter principalement sur le marché canadien, qui est de petite taille et axé sur l’aluminium (par opposition aux segments de marché des produits solaires et chimiques, qui sont de plus grande taille, croissent plus rapidement et sont plus lucratifs), et qu’on empêche Québec Silicon d’exporter à destination des marchés nationaux d’autres filiales de Ferroglobe.

103.          La stratégie d’entreprise de Ferroglobe privilégie de répondre à la demande locale avec la production locale[95]. Exception faite des ventes à Dow, Québec Silicon se concentre sur le marché canadien[96], lequel se limite au silicium métal de qualité métallurgique (destiné à la production d’aluminium)[97]. Toutefois, Québec Silicon produit non seulement du silicium métal de qualité métallurgique, mais aussi du silicium métal de qualité chimique, notamment pour Dow[98].

104.          De plus, en 2018 et en 2019, Québec Silicon a pu faire des exportations à destination des marchés nationaux d’autres filiales de Ferroglobe à la suite de la récente suspension de la production à l’usine de Ferroglobe située à Niagara Falls (New York)[99]. Québec Silicon a donc parfois l’occasion d’exporter vers les marchés nationaux d’autres sociétés appartenant à Ferroglobe. Quoi qu’il en soit, Québec Silicon exporte une portion importante de sa production totale. Selon la preuve, tout bien considéré, il est improbable que, dans l’ensemble, les activités d’exportation de Québec Silicon aient une incidence négative importante sur le rendement de la société à court ou à moyen terme.

105.          Les parties qui s’opposent font aussi valoir que Québec Silicon, en tant que membre du groupe Ferroglobe, doit mettre l’accent sur la génération de profits pour le groupe dans son ensemble plutôt que sur sa propre rentabilité. Selon elles, Québec Silicon est limitée dans sa capacité à prendre des décisions concernant ses activités canadiennes, y compris l’approvisionnement en matières premières et la maximisation du profit. Toutefois, selon M. Crespy de Québec Silicon, les décisions de la société (y compris pour l’approvisionnement en matières premières) sont prises dans une perspective de maximisation de ses propres profits[100].

106.          RTA soutient qu’en raison de certains faits récents concernant Ferroglobe, s’approvisionner auprès de Québec Silicon comporte des risques en matière de fiabilité de l’approvisionnement ainsi que des risques de réputation[101]. Lors de l’audience, Mme Verdini de RTA a aussi soulevé des préoccupations à l’égard de la santé financière globale de Ferroglobe[102].

107.          Le Tribunal constate cependant que ces problèmes allégués n’ont pas encore poussé RTA à cesser de s’approvisionner en silicium métal auprès de Québec Silicon ni à changer sa stratégie d’approvisionnement. Par ailleurs, les inquiétudes de RTA pourraient bien ne jamais se concrétiser. Dans l’éventualité où elles le faisaient, le Tribunal n’est pas persuadé que RTA réduirait ses commandes auprès de Québec Silicon, et encore moins qu’elle mettrait complètement fin à sa relation d’affaires avec Québec Silicon[103]. Un tel scénario, outre qu’il relève de la spéculation, est en contradiction avec la preuve présentée par RTA elle-même, dans laquelle elle insiste sur l’importance d’avoir accès à un fournisseur local afin de sécuriser et de fiabiliser l’approvisionnement, des éléments considérés comme essentiels dans sa stratégie d’approvisionnement.

108.          Enfin, la preuve au dossier montre clairement que les contraintes limitant l’approvisionnement de RTA et d’Alcoa auprès de Québec Silicon sont directement attribuables au fait que leur stratégie d’approvisionnement respective est axée sur un besoin de diversification des fournisseurs. Ce facteur n’a aucun lien avec les conclusions et jouera qu’elles soient prorogées ou non. Nonobstant ces contraintes, Québec Silicon a été en mesure de conserver une part importante du marché national pendant la période visée par le réexamen. Rien dans la preuve au dossier n’indique un changement probable de cette situation à court ou à moyen terme.

109.          En conséquence, en se fondant sur son évaluation de la preuve au dossier et sur les motifs susmentionnés, le Tribunal conclut que le rendement de la branche de production nationale, particulièrement en ce qui a trait aux ventes et à la rentabilité, restera probablement essentiellement le même que pendant la période visée par le réexamen ou se détériorera légèrement advenant la prorogation des conclusions.

Volume probable des importations de marchandises sous-évaluées et subventionnées

110.          En vertu de l’alinéa 37.2(2)a) du Règlement, le Tribunal peut prendre en compte le volume probable des marchandises sous-évaluées ou subventionnées advenant l’expiration de l’ordonnance ou des conclusions, et tout particulièrement le fait qu’une augmentation importante du volume des importations des marchandises sous-évaluées ou subventionnées, soit en quantité absolue, soit par rapport à la production ou à la consommation de marchandises similaires, est vraisemblable ou non.

111.          Pour évaluer le volume probable des importations de marchandises sous-évaluées et subventionnées, le Tribunal prend en compte plusieurs facteurs, parmi les suivants : le rendement probable de la branche de production étrangère, la possibilité pour les producteurs étrangers de produire les marchandises dans des installations servant actuellement à la production d’autres marchandises, la preuve de l’imposition de mesures antidumping et/ou compensatoires par d’autres gouvernements et le fait que les mesures prises par d’autres gouvernements causeront vraisemblablement ou non une réaffectation au Canada des marchandises sous-évaluées ou subventionnées[104].

Capacité excédentaire en Chine et rendement probable des producteurs des marchandises en question

112.          Selon la preuve dont dispose le Tribunal, les producteurs chinois représentent une très forte proportion de la production mondiale totale et de la capacité de production mondiale[105]. La production chinoise de silicium métal a crû depuis l’enquête nº NQ-2013-003, alors que les importations de marchandises en question représentaient une part importante du marché canadien[106].

113.          La capacité de production excédentaire des producteurs chinois est énorme, et dans l’ensemble la capacité de production chinoise continue de croître[107]. Selon les données de CRU, la capacité excédentaire chinoise correspond à plus de 100 fois la totalité du marché canadien du silicium métal[108]. La plus grande part de la capacité chinoise n’est pas captive[109].

114.          De plus, les producteurs chinois s’appuient fortement sur les exportations pour atténuer l’effet de l’offre excédentaire de silicium métal sur le marché chinois. Les exportations chinoises ont augmenté de façon marquée depuis les conclusions[110] et correspondent maintenant à environ 26 fois le marché canadien[111]. L’énorme capacité excédentaire chinoise continuera d’inciter fortement les producteurs chinois à chercher des débouchés d’exportation.

115.          Selon les parties qui s’opposent, les données de CRU sur la production chinoise citées par Québec Silicon ne reflètent pas fidèlement la capacité de production réelle de la Chine. Elles font valoir que ces données correspondent à la capacité nominale, qui tient compte de fourneaux qui ont été démantelés ou mis hors service depuis longtemps.

116.          Selon M. Majumdar, de Wacker, s’il est vrai que de nouvelles installations de production sont en construction en Chine, de nombreuses installations anciennes sont hors service ou en voie d’être fermées[112]. De plus, les nouvelles installations de production sont situées dans la province de Xinjiang, qui n’a pas accès à la mer, et sont axées sur la production de silicium métal de qualité chimique probablement destiné à la consommation nationale ou au Moyen-Orient, étant donné les faibles coûts de transport[113].

117.          Les parties qui s’opposent soutiennent que dans bon nombre de provinces chinoises, la production de silicium métal est saisonnière[114]. De plus, elles font valoir qu’une grande partie de la capacité de production chinoise est « captive »[115].

118.          Les parties qui s’opposent renvoient aussi à des déclarations publiques de Ferroglobe faisant état de perspectives favorables quant aux exportations chinoises et aux tendances en Chine[116].

119.          RTA et Wacker avancent plusieurs arguments concernant l’évolution prévue de la demande et de la production chinoise, la part de la production chinoise destinée à l’exportation et le volume d’exportations chinoises[117]. De plus, selon elles, la croissance de la production chinoise de silicium métal ralentira en raison de politiques du gouvernement chinois visant à restreindre la croissance des industries polluantes ou à forte consommation d’énergie et pour favoriser la fabrication à valeur ajoutée[118].

120.          Les témoins de Québec Silicon reconnaissent qu’il est possible que la production chinoise soit surévaluée. Différentes raisons peuvent expliquer une telle surévaluation, comme les variations saisonnières de la quantité d’électricité disponible, le manque de matières premières et d’électrodes et l’application resserrée de la réglementation environnementale[119]. Nonobstant ces facteurs, Québec Silicon soutient que la capacité excédentaire chinoise reste énorme. De plus, la diminution prévue du taux de TVA applicable aux secteurs chinois de la fabrication, de la construction et du transport encouragera une hausse de la production et des exportations[120].

121.          Québec Silicon fait aussi valoir que différents facteurs entraînent un ralentissement de l’économie chinoise et de la demande de silicium métal en Chine comparativement aux périodes antérieures[121]. Québec Silicon reconnaît qu’on projette une baisse des exportations chinoises dans les prochaines années, mais soutient que cette baisse est insignifiante au regard de la taille du marché canadien[122].

122.          Dans son analyse, le Tribunal met l’accent sur les éléments qui seront pertinents dans les 12 à 24 prochains mois.

123.          Selon les prévisions de CRU, la demande de silicium métal sur le marché chinois augmentera de façon importante en 2019, en 2020 et en 2021[123]. CRU estime que la capacité de production excédentaire de la Chine par rapport à sa demande, le volume des exportations chinoises et la part du total de la production chinoise destinée aux exportations diminueront progressivement à l’avenir[124]. Toutefois, il faut contraster ces tendances avec la hausse prévue de la production. La diminution attendue des exportations chinoises dans les 12 à 24 prochains mois sera relativement mineure[125].

124.          La demande chinoise est nettement inférieure à la production chinoise, et devrait le rester dans les 12 à 24 mois à venir[126]. Par conséquent, le marché chinois n’atteindra pas l’équilibre pendant cette période. Selon les projections, la demande chinoise restera considérablement inférieure à la capacité de production actuelle en Chine, et même si on s’attend à une diminution des exportations chinoises, celles-ci continueront de faire paraître insignifiante la taille du marché canadien. Enfin, et principalement, on ne peut nier que la capacité de production totale de la Chine, de même que sa capacité de production excédentaire, représentent des dizaines de fois, voire des centaines de fois, la taille du marché canadien dans sa totalité. Cela est vrai même si les données de CRU surévaluent la capacité de production chinoise (comme le reconnaît CRU[127]).

125.          Compte tenu de l’énorme et constante capacité de production excédentaire chinoise, il est évident que les producteurs des marchandises en question seront en mesure d’exporter d’énormes quantités de silicium métal au Canada dans les 12 à 24 prochains mois advenant l’annulation des conclusions.

126.          Les parties qui s’opposent font valoir que les exportations chinoises pourraient répondre à la demande dans d’autres marchés. Les principaux marchés d’exportations de la Chine sont le Japon, la Corée et le Taipei chinois, mais les fournisseurs chinois exportent aussi vers d’autres marchés, comme l’Inde, la Thaïlande, la Malaisie, le Moyen-Orient, certains pays africains, la Turquie, le Mexique et l’Argentine, auxquels les importations chinoises ont librement accès. Les parties qui s’opposent soutiennent que la demande dans ces marchés restera élevée dans l’ensemble et pourra absorber une forte proportion des exportations chinoises qui pourraient autrement être envoyées au Canada.

127.          Selon la preuve sur laquelle s’appuient les parties qui s’opposent[128], il ne semble pas que ces autres marchés absorberont suffisamment de l’énorme capacité excédentaire chinoise pour réduire sensiblement la motivation pour les producteurs chinois à exporter vers d’autres marchés, comme le Canada.

128.          Les projections de CRU pour les deux principaux marchés d’exportation des producteurs chinois des marchandises en question, le Japon et la Corée, prévoient une réduction de la demande totale dans ces deux marchés en 2019, puis un rebond en 2020 et en 2021. Toutefois, ce rebond laisserait toujours la demande à un niveau inférieur à celui de 2018[129].

129.          On prévoit une hausse de la demande dans d’autres marchés, mais elle ne sera pas d’une ampleur suffisante pour absorber une portion importante de la capacité de production excédentaire chinoise. Ainsi, même compte tenu de la demande dans ces marchés, d’importantes quantités de marchandises chinoises resteront disponibles pour une éventuelle exportation au Canada[130]. De plus, la capacité de production de silicium métal est en hausse dans d’autres pays que la Chine[131]. Cette capacité additionnelle pourrait répondre à une partie de la hausse de la demande dans d’autres marchés qui s’approvisionnent habituellement en Chine.

130.          Il y a un autre élément à prendre en considération. Selon la preuve au dossier, des producteurs chinois de ferrosilicium pourraient investir dans leurs installations afin de les convertir pour y produire du silicium métal[132]. Toutefois, l’information au dossier n’est pas suffisante pour permettre au Tribunal d’évaluer si de telles conversions par certains producteurs chinois pourraient se solder par l’ajout d’une capacité de production substantielle.

Risque de détournement

131.          Les États-Unis et l’Union européenne appliquent actuellement des droits antidumping au silicium métal originaire de Chine. Quant à elle, l’Australie impose à la fois des droits antidumping et des droits compensateurs au silicium métal chinois[133].

132.          Par contre, advenant l’annulation des conclusions, le Canada constituerait un marché ouvert. Par conséquent, les droits antidumping et compensatoires en vigueur aux États-Unis, dans l’Union européenne et en Australie amplifient le risque que les marchandises en question soient détournées vers le marché canadien si les conclusions sont annulées. Selon la preuve dont dispose le Tribunal, le silicium métal chinois possède une part de marché importante dans les pays qui n’imposent pas de droits antidumping ou de droits compensatoires[134].

Volume probable en quantité absolue et volume probable relatif

133.          Les marchandises en question possédaient une part importante du marché avant les conclusions du Tribunal dans l’enquête nº NQ-2013-003[135], mais le volume des importations en question pendant la période visée par le réexamen est négligeable.

134.          Comme expliqué ci-dessous, advenant l’annulation des conclusions, le volume et la part de marché des importations en question augmenteront considérablement.

135.          RTA et ses témoins soutiennent qu’advenant l’annulation des conclusions, RTA n’abandonnerait pas sa chaîne d’approvisionnement canadienne. Elle aurait plutôt recours aux importations de silicium métal chinois afin de diversifier ses sources d’approvisionnement[136]. Cela permettrait également à RTA de réduire les coûts d’ensemble associés au silicium métal en obtenant un coût moyen mixte. Selon les témoins de RTA, les importations chinoises remplaceraient des importations non visées plutôt que des marchandises similaires de production nationale[137].

136.          Selon la stratégie d’approvisionnement de RTA, advenant l’annulation des conclusions, la société continuerait probablement d’acheter certaines quantités de silicium métal à Québec Silicon pour des raisons de proximité et dû à leur relation d’affaires bien établie. Ainsi, il est probable que la stratégie d’approvisionnement imposerait un plafond au volume des importations de marchandises en question au Canada si les conclusions étaient annulées. Toutefois, la preuve présentée par RTA établit sans l’ombre d’un doute qu’elle importerait bel et bien des marchandises en question si les conclusions étaient annulées.

137.          Selon Mme Verdini, RTA ferait face à un risque de réputation en s’approvisionnant en silicium métal dans la province chinoise de Xinjiang, compte tenu de rapports concernant certains événements ayant lieu dans cette province[138].

138.          Toutefois, tel qu’il vient d’être mentionné, les témoins de RTA ont aussi indiqué que RTA importerait du silicium métal d’origine chinoise advenant l’annulation des conclusions. Mme Verdini reconnaît que d’autres régions chinoises produisent du silicium métal qui permettrait de répondre aux besoins de RTA[139]. Par conséquent, le Tribunal ne considère pas que les circonstances propres à la province de Xinjiang aient une incidence substantielle sur le volume des marchandises en question que RTA pourrait se procurer en Chine advenant l’annulation des conclusions.

139.          La preuve dont dispose le Tribunal[140] le pousse à conclure qu’il est hautement probable qu’Alcoa importera des quantités importantes de silicium métal chinois si les conclusions sont annulées.

140.          RTA et Alcoa sont toutes deux des multinationales. À ce titre, elles ont la capacité et les ressources nécessaires pour facilement recommencer à s’approvisionner en silicium métal en Chine si les conclusions sont annulées[141].

141.          Même si RTA et Alcoa affirment qu’elles devront approuver d’éventuels fournisseurs chinois avant d’importer des marchandises en question, le processus de vérification et d’approbation d’un fournisseur chinois peut se dérouler prestement, parfois en quelques mois[142]. Par conséquent, compte tenu des stratégies d’approvisionnement de RTA et d’Alcoa, l’importation des marchandises en question reprendrait vraisemblablement au plus tard d’ici le milieu de 2020.

Conclusion à l’égard du volume probable des marchandises en question advenant l’annulation des conclusions

142.          Si les conclusions sont annulées, la reprise ou la poursuite du dumping mènerait probablement à une hausse marquée du volume des importations de marchandises en question (tant en termes relatifs qu’en termes absolus) dans les 12 à 24 prochains mois. Cette supposition est étayée par l’absence du silicium métal chinois sur le marché canadien pendant la période visée par le réexamen. L’augmentation du volume serait attribuable au faible prix des importations de marchandises en question[143], et se ferait aux dépens à la fois des importations non visées et des marchandises similaires, nonobstant le fait que la stratégie d’approvisionnement de RTA ferait probablement en sorte que la branche de production nationale conserverait un certain volume.

Effets probables des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur les prix

143.          Le Tribunal doit déterminer si l’expiration des conclusions mènera à la sous-cotation marquée ou à la baisse des prix de marchandises similaires, ou à la compression des prix de ces marchandises, en empêchant les augmentations de prix qui par ailleurs se seraient vraisemblablement produites pour ces marchandises[144]. À cet effet, le Tribunal fait une distinction entre les effets des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur les prix et tout autre effet qui pourrait vraisemblablement se produire dû à d’autres facteurs ayant un impact sur les prix.

144.          Le volume des importations de marchandises en question au cours de la période visée par le réexamen est négligeable. Par conséquent, le Tribunal ne dispose pas de données qui pourraient lui servir à analyser l’effet de ces importations sur les prix au cours de la période visée par le réexamen. D’ailleurs, étant donné les quantités négligeables dont il est question, tout effet sur les prix serait insignifiant.

Sous-cotation des prix

145.          Certains éléments de preuve indiquent que des importations non visées ont mené à une sous-cotation des prix pendant la période visée par le réexamen. Le prix de vente moyen des importations non visées (en provenance des États-Unis ou d’autres pays) est resté inférieur au prix des marchandises similaires de production nationale de façon marquée pendant toute la période visée par le réexamen[145]. On peut en conclure qu’advenant l’annulation des conclusions, pour réaliser des ventes, les marchandises en question devront concurrencer les prix à la fois des marchandises similaires de production nationale et des importations non visées.

146.          De plus, selon la preuve déposée par le producteur national, les prix moyens des marchandises chinoises sur le marché intérieur chinois et à l’exportation (FAB), sont inférieurs aux prix en vigueur dans tous les autres marchés de façon marquée[146]. Ils sont aussi inférieurs au prix des marchandises similaires de production nationale de façon marquée, même une fois les coûts de transport pris en compte[147].

147.          Au cours des 12 à 24 prochains mois, le prix des exportations chinoises devrait augmenter à un rythme supérieur à l’augmentation du prix dans les autres marchés[148]. Toutefois, on ne prévoit pas que le prix des marchandises chinoises atteigne le niveau de ceux des autres sources avant plusieurs années, bien au-delà de l’horizon de 12 à 24 mois pris en considération par le Tribunal[149].

148.          Pour finir, RTA reconnaît que le prix des marchandises en question est bas. De fait, le bas prix des marchandises en question fait partie des raisons avancées par RTA pour s’opposer à la prorogation des conclusions. Les témoins de RTA ont mentionné que la société, advenant l’annulation des conclusions, achèterait du silicium métal chinois pour, entre autres raisons, obtenir un coût moyen mixte[150].

149.          À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que les marchandises en question entraîneront probablement une sous-cotation marquée des prix des marchandises similaires de production nationale si les conclusions sont annulées.

Baisse des prix

150.          Le Tribunal a déjà conclu qu’il est probable que les marchandises en question entreraient de nouveau sur le marché canadien en quantité accrue de façon marquée et à un prix qui entraînerait une sous-cotation marquée des prix des marchandises similaires de production nationale. Il est donc probable que cette sous-cotation entraîne une baisse de prix pour la branche de production nationale. Dans leurs réponses au questionnaire, plusieurs importateurs ont exprimé l’opinion qu’en cas d’annulation des conclusions, le prix du silicium métal canadien diminuerait substantiellement[151].

151.          Selon le témoignage de M. Watson, lors de leur dernière ronde de négociation, Alcoa a tenté d’introduire une disposition dans son contrat avec Québec Silicon selon laquelle le prix serait renégocié dans l’éventualité où le Tribunal annulait ses conclusions au terme du présent réexamen relatif à l’expiration[152]. Cet élément, de même que d’autres renseignements au dossier[153], indiquent que l’annulation des conclusions créerait une pression sur Québec Silicon pour qu’elle baisse son prix de vente à Alcoa.

152.          En ce qui concerne les ventes à RTA, le prix de Québec Silicon serait protégé (dans une certaine mesure) de l’effet sur les prix des importations en question. RTA fonctionne selon une stratégie d’approvisionnement à deux volets dans laquelle le point de référence pour la négociation des prix diffère selon qu’il est question de silicium métal produit nationalement ou importé. RTA est disposée à payer une prime de production nationale pour s’approvisionner auprès de Québec Silicon[154]. Cela atténuerait probablement l’effet des importations en question à bas prix sur le prix des marchandises similaires dans l’éventualité où les conclusions étaient annulées.

153.          Cela dit, et bien qu’il ne soit pas possible de calculer avec exactitude la valeur de la prime de production nationale dont profite Québec Silicon dans ses tractations avec RTA, il existe forcément un point à partir duquel la différence de prix entre les marchandises en question et les marchandises similaires de production nationale se traduirait par une pression sur Québec Silicon pour qu’elle baisse son prix. La possibilité que cette situation se produise serait particulièrement élevée dans un contexte où Québec Silicon devrait composer avec une baisse de ses ventes et/ou de son prix dans ses tractations avec son autre grand client canadien. Les témoins de RTA ont expliqué que RTA est en concurrence avec des producteurs d’aluminium étrangers, et il est donc raisonnable de penser que RTA serait à l’affût de possibilités pour diminuer ses coûts d’approvisionnement en silicium métal.

154.          À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que l’annulation des conclusions mènerait probablement à une baisse marquée des prix des marchandises similaires de production nationale.

Compression des prix

155.          Comme susmentionné, le producteur national subirait des pressions pour baisser son prix si les conclusions étaient annulées. Dans ce contexte, il est peu probable que Québec Silicon soit en mesure d’élever son prix pour répondre à une éventuelle hausse de coûts dans les 12 à 24 prochains mois. Toutefois, la preuve au dossier ne permet pas au Tribunal de conclure qu’une hausse de coûts au cours des 12 à 24 prochains mois est probable.

156.          En conséquence, dans la mesure où le producteur national devrait composer avec une hausse de coûts, l’annulation des conclusions entraînerait probablement une compression des prix, mais la preuve ne permet pas au Tribunal de déterminer si cette compression serait marquée.

Incidence probable sur la branche de production nationale advenant l’annulation des conclusions

157.          Le Tribunal évaluera maintenant l’incidence probable des volumes et prix susmentionnés sur la branche de production nationale dans l’éventualité où les conclusions seraient prorogées[155]. Dans le cadre de cette analyse, le Tribunal tient compte du rendement probable de la branche de production nationale advenant la prorogation des conclusions, tel que discuté précédemment. Le Tribunal fait également une distinction entre l’incidence probable des marchandises sous-évaluées et subventionnées et l’incidence probable de tout autre facteur qui agit ou qui pourrait vraisemblablement agir sur la branche de production nationale[156].

158.          Dans les cas où d’importantes quantités de marchandises similaires sont exportées, comme en l’espèce, la démarche suivie par le Tribunal consiste à concentrer son analyse de dommage sur le marché marchand canadien. Toutefois, le Tribunal évalue le caractère sensible d’un dommage causé par les marchandises sous-évaluées ou subventionnées par rapport à l’ensemble de la production de marchandises similaires de la branche de production nationale[157].

159.          Selon Québec Silicon, l’annulation des conclusions nuirait considérablement à son rendement. Sa production et ses ventes seraient durement touchées. Québec Silicon ne pourrait pas continuer de faire des investissements nécessaires dans la mise à niveau de ses installations, elle se retrouverait dans une situation de croissance stagnante et des gains d’efficience récemment réalisés s’émousseraient. Les investissements futurs seraient aussi remis en cause. Il y aurait une incidence sur la production, et Québec Silicon se verrait forcée de faire des mises à pied, voire des licenciements.

160.          Selon les parties qui s’opposent, Québec Silicon ne subira pas de dommage si les conclusions sont annulées. RTA soutient que le rendement de Québec Silicon s’est nettement amélioré, au point où la société est maintenant « florissante » [traduction].

161.          Selon Wacker, la situation financière et le rendement de Québec Silicon se sont nettement améliorés depuis les conclusions de l’enquête nº NQ-2013-003. Wacker soutient que Québec Silicon n’est plus en situation de vulnérabilité, et ne subira probablement pas de dommage, tout particulièrement compte tenu du fait qu’elle continue d’être axée sur les exportations.

162.          Le Tribunal a déjà conclu précédemment que l’expiration des conclusions causerait probablement une augmentation importante des volumes de marchandises en question importées au Canada. Les marchandises en question entraîneraient probablement la sous-cotation et la baisse des prix des marchandises similaires de production nationale.

163.          L’ampleur des achats auxquels peut s’attendre Québec Silicon de la part d’Alcoa est incertaine, que les conclusions soient prorogées ou annulées[158]. Toutefois, l’annulation des conclusions placerait Québec Silicon dans une position de vulnérabilité accrue par rapport à ce client. Selon la preuve devant le Tribunal, Québec Silicon serait forcée de baisser ses prix ou d’accepter une réduction importante de ses volumes de ventes à Alcoa[159].

164.          Étant donné les contraintes que s’impose RTA sur les quantités achetées auprès d’un même fournisseur et le faible nombre d’acheteurs sur le marché national, Québec Silicon ne serait pas en mesure de compenser une perte de ses volumes de ventes ou de sa part de marché attribuable à un client national en se tournant vers l’autre client national.

165.          Selon les témoins de RTA, celle-ci continuera d’acheter du silicium métal à Québec Silicon advenant l’annulation des conclusions. Il est peu probable que les importations chinoises remplacent totalement les marchandises similaires de production nationale pour ce qui est des ventes à RTA.

166.          Cela dit, RTA ne s’est pas engagée à acheter une quantité précise de silicium métal à Québec Silicon. Elle pourrait, tout en conservant Québec Silicon au nombre de ses principaux fournisseurs, réduire sensiblement les quantités commandées auprès d’elle.

167.          Le Tribunal est arrivé à la conclusion que les marchandises en question entraîneraient probablement la sous-cotation des prix des marchandises similaires de production nationale et a pris note des déclarations de RTA selon lesquelles cette dernière subit des pressions pour réduire ses coûts en raison de la concurrence d’autres producteurs d’aluminium.

168.          À la lumière de ces considérations, le Tribunal est d’avis que l’annulation des conclusions causerait probablement une baisse du prix auquel Québec Silicon vend son produit à RTA et/ou entraînerait une réduction marquée de la quantité de silicium métal vendue à RTA, comparativement au volume de ventes pendant la période visée par le réexamen et au volume de ventes auxquelles on pourrait s’attendre advenant la prorogation des conclusions[160].

169.          Pour les motifs ci-dessus, advenant l’annulation des conclusions, la facilité accrue d’accès au silicium métal chinois à bas prix importé au Canada exercerait une pression sur le producteur national pour qu’il baisse ses prix, sans quoi les importations de marchandises en question remplaceront une part importante de ses ventes à ses deux clients nationaux. Par conséquent, l’annulation des conclusions entraînerait vraisemblablement, en soi, une réduction marquée des ventes nationales et/ou des prix de vente. Compte tenu de la chronologie des négociations et du passage des commandes, il n’est pas sûr que l’annulation des conclusions ait une incidence sur les prix et les volumes en 2019. Par contre, il y aurait bel et bien une incidence sur les prix et les volumes en 2020 et en 2021.

170.          L’expiration des conclusions aurait donc une incidence négative sur les ventes et/ou la valeur des ventes de la branche de production nationale, avec une réduction connexe de la production, de l’utilisation de la capacité et de la part de marché. L’emploi serait touché, et des mises à pied pourraient survenir. La rémunération serait protégée, au départ, par la convention collective en vigueur. Toutefois, au moment de son renouvellement, en 2021, l’annulation des conclusions nuirait à la possibilité d’augmentations et pourrait entraîner des demandes de concessions. Les investissements prévus dans les 12 à 24 prochains mois seraient remis en question.

171.          La diminution des prix et/ou du volume de ventes aurait des conséquences sur la rentabilité. À cet égard, M. Watson a présenté des calculs pour illustrer quels auraient été les résultats financiers de Québec Silicon en 2018 dans l’éventualité où le prix et la quantité des commandes sur le marché canadien auraient été nettement plus bas. Ces calculs montrent une baisse marquée de la rentabilité en 2018[161].

172.          Le Tribunal a soigneusement examiné le scénario présenté par M. Watson, de même que des scénarios fondés sur les meilleures estimations du Tribunal quant au volume (en fonction de la preuve au dossier) et au prix probables des ventes de Québec Silicon advenant l’annulation des conclusions. Dans tous les scénarios examinés, la rentabilité de Québec Silicon (marge brute et revenus nets avant impôt) subit un dommage sensible par rapport à ses résultats avérés pour 2018, de même que par rapport aux résultats projetés de Québec Silicon advenant la prorogation des conclusions. De fait, le dommage est sensible non seulement sur le plan des ventes nationales, mais aussi en ce qui a trait à l’ensemble des ventes (ventes nationales et ventes à l’exportation). Par conséquent, le Tribunal est d’avis que l’annulation des conclusions causerait une baisse marquée de la rentabilité de Québec Silicon, tant en ce qui concerne ses ventes nationales de production nationale que l’ensemble de ses activités[162].

173.          En somme, le Tribunal a examiné l’incidence qu’aurait l’annulation des conclusions sur l’ensemble des activités de Québec Silicon. Il en arrive à la conclusion que le dommage causé par les importations en question serait sensible, tant en ce qui a trait aux ventes nationales de la branche de production nationale qu’aux activités de la branche de production nationale dans leur ensemble. Comme susmentionné, il n’y a aucun autre facteur qui cause un dommage sensible à la branche de production nationale ou menace de causer un dommage sensible à la branche de production nationale dans les 12 à 24 prochains mois.

174.          À la lumière de l’analyse qui précède, le Tribunal conclut que l’annulation des conclusions, en soi, causerait vraisemblablement un dommage sensible à la branche de production nationale.

CONCLUSION

175.          Aux termes de l’alinéa 76.03(12)b) de la LMSI, et pour les motifs susmentionnés, le Tribunal proroge ses conclusions concernant les marchandises en question.




Jean Bédard                            
Jean Bédard
Membre présidant




Randolph W. Heggart             
Randolph W. Heggart
Membre




Susan D. Beaubien                 
Susan D. Beaubien
Membre



[1].     L.R.C. (1985), ch. S-15.

[2].     Le Tribunal a également reçu des réponses incomplètes de deux importateurs, qui ont indiqué qu’ils avaient importé des volumes négligeables de marchandises en question et/ou de marchandises correspondant à la définition du produit originaires de pays non visés au cours de la période visée par le réexamen. Bien que les deux entreprises aient importé des marchandises en question et/ou des marchandises correspondant à la définition du produit originaires de pays non visés au cours de la période de réexamen, le Tribunal a estimé que l’obtention de leurs données n’était pas essentielle pour les fins du réexamen. Pièce RR-2018-003-05, vol. 1.1 à la p. 12.

[3].     Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 154-155.

[4].     Pièce RR-2018-003-03A, vol. 1 à la p. 42.

[5].     Ibid. aux p. 42-43.

[6].     Selon le paragraphe 2(1) de la LMSI, « dommage » s’entend d’un « dommage sensible causé à une branche de production nationale », et « retard » s’entend d’un « retard sensible de la mise en production d’une branche de production nationale » [nos italiques]. Comme il existe actuellement une branche de production nationale établie, la question de savoir si l’expiration des conclusions causera vraisemblablement un retard ne se pose pas dans le cadre du présent réexamen relatif à l’expiration.

[7].     Si le Tribunal détermine que le présent réexamen relatif à l’expiration vise plus d’une catégorie de marchandise, il doit effectuer des analyses de dommage distinctes et rendre une décision pour chacune de ces catégories. Voir Noury Chemical Corporation and Minerals & Chemicals Ltd. c. Pennwalt of Canada Ltd. and Anti-dumping Tribunal, [1982] 2 C.F. 283 (C.F.).

[8].     Voir par exemple Raccords de tuyauterie en cuivre (19 février 2007), NQ-2006-002 (TCCE) au par. 48.

[9].     NQ-2013-003 au par. 28. Voir aussi Silicium métal (2 novembre 2017), NQ-2017-001 (TCCE) [Silicium métal II] aux par. 37 et 41.

[10].   « Proportion majeure » s’entend d’une proportion importante ou considérable de la production collective nationale de marchandises similaires, et pas forcément d’une majorité. Japan Electrical Manufacturers Assoc. c. Canada (Tribunal antidumping), [1986] A.C.F. nº 652 (C.A.F.); McCulloch of Canada Limited et McCulloch Corporation c. Le Tribunal antidumping, [1978] 1 C.F. 222 (C.A.F.); Chine – Droits antidumping et compensateurs visant certaines automobiles en provenance des États-Unis (23 mai 2014), OMC Doc. WT/DS440/R, rapport du groupe spécial au par. 7.207; Communautés européennes – Mesures antidumping définitives visant certains éléments de fixation en fer ou en acier en provenance de Chine (15 juillet 2011), OMC Doc. WT/DS397/AB/R, rapport de l’Organe d’appel aux par. 411, 412, 419; Argentine – Droits antidumping définitifs visant la viande de volaille en provenance du Brésil (22 avril 2003), OMC Doc. WT/DS241/R, rapport du groupe spécial au par. 7.341.

[11].   Pièce RR-2018-003-A-03, vol. 11 aux par. 4-14; Silicium métal (21 avril 2017), PI-2016-004 (TCCE) [Silicium métal II PI] aux par. 29-35.

[12].   NQ-2013-003 au par. 39.

[13].   Pièce RR-2018-003-15.01, vol. 3 à la p. 20.

[14].   Pièce RR-2018-003-27.01, vol. 7.1 à la p. 4; NQ-2013-003 aux par. 33, 37 et note 17; Silicium métal II PI au par. 36; pièce RR-2018-003-06 (protégée), vol. 2.1, tableau 17.

[15].   Pièce RR-2018-003-27.01, vol. 7.1 à la p. 4; NQ-2013-003 au par. 37 et note 17; Silicium métal II PI au par. 36.

[16].   NQ-2013-003 au par. 37; pièce RR-2018-003-06 (protégée), vol. 2.1, tableau 17.

[17].   Pièce RR-2018-003-27.01, vol. 7.1 à la p. 6; Silicium métal II PI au par. 36.

[18].   NQ-2013-003 au par. 42; Silicium métal II au par. 49.

[19].   NQ-2013-003 aux par. 44-45.

[20].   Silicium métal II aux par. 59-60; voir aussi par exemple Caissons sans soudure (28 novembre 2018), RR-2017-006 (TCCE) aux par. 42-44.

[21].   DORS/91-499.

[22].   Tubes de canalisation en acier au carbone et en acier allié, (ordonnance du 19 janvier 2016), NQ-2015-002 (TCCE) [Tubes de canalisation].

[23].   DORS/84-927.

[24].   La référence à un syndicat ou à une association de syndicats a été ajoutée par voie de modification entrée en vigueur en avril 2018.

[25].   Alinéa 37.2(2)j) du Règlement.

[26].   NQ-2013-003 aux par. 35, 39, 50, 51, 98, 121-126, 129-130, 132, 134, 137, 153, 180-182.

[27].   Certains lave-vaisselle et sécheuses (ordonnance de procédure du 25 avril 2005), RR-2004-005 (TCCE) au par. 16.

[28].   Raccords de tuyauterie en cuivre (17 février 2012), RR-2011-001 (TCCE) au par. 56. Dans Conteneurs thermoélectriques (9 décembre 2013), RR-2012-004 (TCCE) au par. 14 [Conteneurs thermoélectriques], le Tribunal a affirmé que le contexte d’analyse dans lequel il est statué sur un réexamen relatif à l’expiration comprend souvent l'évaluation d’éléments de preuve rétrospectifs appuyant des conclusions prospectives. Voir aussi Extrusions d’aluminium (17 mars 2014), RR-2013-003 (TCCE) au par. 21 [Extrusions d’aluminium].

[29].   Feuillards et tôles plats en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (16 août 2006), RR-2005-002 (TCCE) au par. 59.

[30].   Conteneurs thermoélectriques; Extrusions d’aluminium.

[31].   DORS/84-927 [Règlement].

[32].   Pièce RR-2018-003-B-05, vol. 13, par. 57-59, aux p. 19-20; Transcription de l’audience publique, 11 juin 2019, vol. 2, aux p. 187, 216, 231.

[33].   Pièce RR-2018-003-B-05, vol. 13, par. 56, à la p. 19.

[34].   Voir aussi NQ-2013-003 aux par. 60-61, 64.

[35].   Feuillards et tôles plats en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (16 août 2006), RR-2005-002 (TCCE) au par. 37 [Feuillards et tôles laminés à chaud]; Lamelles en bois (15 juillet 2009), RR-2008-003 (TCCE) au par. 45 [Lamelles en bois].

[36].   Transcription de l’audience publique, vol. 3, 12 juin 2019, à la p. 401.

[37].   Feuillards et tôles laminés à chaud; Lamelles en bois.

[39].   Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 88-89; Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 157, 165-166. Pièce RR-2018-003-A-05, vol. 12, par. 6, à la p. 3.

[40].   Pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12, aux p. 55-56.

[41].   Ibid. à la p. 56.

[42].   Ibid. à la p. 55.

[43].   Ibid. à la p. 65.

[44].   Pièce RR-2018-003-05, vol. 1.1, tableau 9 à la p. 24.

[45].   Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 20, 99.

[46].   Pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 à la p. 57.

[47].   Pièce RR-2018-003-B-05, vol. 13 aux par. 45-47, 51-52; pièce RR-2018-003-B-07 aux p. 635, 640, 677-680; Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, à la p. 186.

[48].   Pièce RR-2018-003-A-04 (protégée), vol. 12 à la p. 34; pièce RR-2018-003-C-02, vol. 14 aux p. 82, 91; pièce RR-2018-003-26.01, vol. 8.1, à la p. 202.

[49].   Pièce RR-2018-003-A-04 (protégée), vol. 12 à la p. 34; pièce RR-2018-003-C-02, vol. 14 à la p. 91; pièce RR-2018-003-26.01, vol. 8.1 à la p. 202.

[50].   Pièce RR-2018-003-11D (protégée), vol. 2.3, tableau 32, à la p. 3.

[51].   Pièce RR-2018-003-05, vol. 1.1, tableau 5, à la p. 14; pièce RR-2018-003-03-03A, vol. 1 à la p. 10.

[52].   Pièce RR-2018-003-06, vol. 2.1, tableau 10, à la p. 25; pièce RR-2018-003-11D (protégée), vol. 2.3, tableau 32, à la p. 3.

[53].   Pièce RR-2018-003-06, vol. 2.1, tableau 10, à la p. 25.

[54].   Silicium métal II au par. 70.

[55].   Pièce RR-2018-003-A-03 (protégée), vol. 12 au par. 22; Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 24-25, 93. Québec Silicon et RTA ont conclu un contrat « de conditions générales » de trois ans qui fixe les modalités, mais qui ne prescrit ni les volumes ni les prix. Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 190-191.

[56].   NQ-2013-003 au par. 79.

[57].   Silicium métal II aux par. 63-65.

[58].   Ibid. au par. 68.

[59].   Ibid. au par. 67.

[60].   Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 171-172.

[61].   Ibid. aux p. 171-173, 233.

[62].   En l’occurrence, en ce qui concerne la volonté du fournisseur de faire des affaires avec la société, les témoins faisaient référence à Rio Tinto plutôt qu’à RTA.

[63].   Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 180-181.

[64].   Ibid. à la p. 178.

[65].   Pièce RR-2018-003-RI-05, vol. 9 aux p. 1-4.

[68].   Pièce RR-2018-003-05, vol. 1.1, tableau 31, à la p. 46.

[69].   Ibid., tableau 8, à la p. 24.

[70].   Ibid., tableau 9, à la p. 24, et tableau 31, à la p. 46.

[71].   Pièce RR-2018-003-06 (protégée), vol. 2.1, tableau 10, à la p. 25.

[72].   Pièce RR-2018-003-05, vol. 1.1, tableau 21, à la p. 30.

[73].   Ibid., tableau 31, à la p. 46.

[74].   Ibid.

[75].   Ibid.

[76].   Ibid.

[77].   Ibid.

[78].   Ibid.

[79].   Ibid.

[80].   Pièce RR-2018-003-A-05, par. 46, à la p. 10.

[81].   Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, à la p. 30.

[82].   Pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 à la p. 57.

[83].   Pièce RR-2018-003-A-04 (protégée), vol. 12 à la p. 34.

[84].   Transcription de l’audience à huis clos, 11 juin 2019, vol. 2, aux p. 101 et 113; pièce RR-2018-003-B-06 (protégée), vol. 14, par. 31-32; pièce RR-2018-003-RI-02D (protégée), vol. 10, à la p. 1.

[85].   Voir également les conclusions du Tribunal au par. 110 ci-dessous en ce qui concerne les arguments de RTA à l’égard de certains risques allégués liés à l’approvisionnement auprès de Québec Silicon.

[86].   Pièce RR-2018-003-RI-05A (protégée), vol. 10.

[87].   Pièce RR-2018-003-RI-05, vol. 9 à la p. 3.

[88].   Voir les facteurs de dommage auto-infligé identifiés par le Tribunal dans l’enquête nº NQ-2013-003, aux par. 113-138, et dans Silicium métal II, aux par. 118-145 et 190-193.

[89].   Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, à la p. 30.

[90].   Pièce RR-2018-003-B-01, vol. 13, par. 148-149, aux p. 60-61; Transcription de l’audience publique, 12 juin 2019, vol. 3, aux p. 357-359; pièce RR-2018-003-B-03, vol. 13, par. 74, à la p. 25.

[91].   Aide à l’argumentation protégée de RTA, vol. 18, onglet 14.

[92].   Transcription de l‘audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 34-36 et 83-84.

[93].   Pièce RR-2018-003-A-03, vol. 11, par. 60, à la p. 15.

[94].   Transcription de l’audience à huis clos, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 2-3.

[95].   Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 16 et 33.

[96].   Ibid. aux p. 16 et 33.

[97].   Ibid. aux p. 90-91.

[98].   Ibid. à la p. 16.

[99].   Ibid. aux p. 33-36.

[100]. Pièce RR-2018-003-A-05, vol. 11, par. 31, à la p. 8; Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 17-18, 91 et 98; Transcription de l’audience à huis clos, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 11-12 et 31-33; pièce RR-2018-003-A-06 (protégée), vol. 12, par. 33-34, à la p. 8.

[101]. Pièce RR-2018-003-B-04 (protégée), vol. 14, par. 77-81; Transcription de l’audience à huis clos, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 124-125.

[102]. Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, à la p. 181.

[103]. Voir, notamment, Transcription de l’audience à huis clos, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 125-126.

[104]. Alinéas 37.2(2)a), d), f), h) et i) du Règlement.

[105]. Pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 aux p. 60-61 et 78-87.

[106]. Ibid. à la p. 55; pièce RR-2018-003-11D (protégée), vol. 2.3 à la p. 3.

[107]. Pièce RR-2018-003-19.15 (protégée), vol. 6 à la p. 43; pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 à la p. 67.

[108]. Pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 aux p. 60-61 et 78-87.

[109]. Pièce RR-2018-003-A-06 (protégée), vol. 12 au par. 28.

[110]. Pièce RR-2018-003-19.15 (protégée), vol. 6 à la p. 48.

[111]. Ibid. à la p. 47; Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 20 et 99; pièce RR-2018-003-06 (protégée), vol. 2.1, tableau 8, à la p. 17.

[112]. Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, à la p. 136.

[113]. Pièce RR-2018-003-B-03, vol. 13, par. 44, aux p. 15-16.

[114]. Pièce RR-2018-003-C-01, vol. 13, par. 15, à la p. 10.

[115]. Ibid., par. 17, à la p. 13.

[116]. Ibid., par. 24, aux p. 15-16; pièce RR-2018-003-C-02 (protégée), vol. 14, par. 24, aux p. 15-16 et 238.

[117]. Pièce RR-2018-003-B-02 (protégée), vol. 14, par. 63-64 et 159-161, aux p. 29, 65-67; pièce RR-2018-003-C-02 (protégée), vol. 14, par. 25-33, aux p. 16-18; pièce RR-2018-003-B-04 (protégée), vol. 14, par. 48-51, aux p. 20-21; pièce RR-2018-003-19.15 (protégée), vol. 6, à la p. 55.

[118]. Pièce RR-2018-003-B-01, vol. 13, par. 55-60, aux p. 25-27; pièce RR-2018-003-C-01, vol. 13, par. 37, à la p. 21; pièce RR-2018-003-B-04 (protégée), vol. 14, par. 42-44, aux p. 17-18; pièce RR-2018-003-B-02 (protégée), vol. 14, par. 55-62, 159, aux p. 25-28 et 65; pièce RR-2018-003-19.15 (protégée), vol. 6 à la p. 42.

[119]. Pièce RR-2018-003-A-03, vol. 11, par. 27, à la p. 7.

[120]. Pièce RR-2018-003-A-01, vol. 11, par. 128-129, à la p. 37.

[121]. Ibid., par. 104, à la p. 31; pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 aux p. 58-59.

[122]. Pièce RR-2018-003-A-01, vol. 11, par. 124, à la p. 36.

[123]. Pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 à la p. 56.

[124]. Ibid., aux p. 55-56; pièce RR-2018-003-19.15 (protégée), vol. 6 à la p. 47.

[125]. Pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 à la p. 65.

[126]. Ibid., vol. 12 aux p. 55-56.

[127]. Pièce RR-2018-003-19.15 (protégée), vol. 6 à la p. 43.

[128]. Pièce RR-2018-003-C-02 (protégée), vol. 14, par. 44 et 45, aux p. 24, 53 et 60.

[129]. Pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 à la p. 56.

[130]. Aide à l’argumentation protégée de Québec Silicon, vol. 18 à la p. 41.

[131]. Pièce RR-2018-003-19.15 (protégée), vol. 6 aux p. 43-44.

[132]. Transcription de l’audience publique, vol. 1, 10 juin 2019, aux p. 90 et 97; pièce RR-2018-003-A-02 (protégée), vol. 12 à la p. 237.

[133]. Pièce RR-2018-003-05, vol. 1.1, tableau 2.

[134]. Aide à l’argumentation protégée de Québec Silicon, vol. 18 à la p. 25; pièce RR-2018-003-C-02 (protégée), vol. 14 à la p. 136; pièce RR-2018-003-A-02, vol. 12 à la p. 77.

[135]. NQ-2013-003 au par. 166; pièce RR-2018-003-11D (protégée), vol. 2.3, tableau 32, à la p. 3.

[136]. Transcription de l’audience publique, 11 juin 2019, vol. 2, aux p. 188 et 231-232. Selon les témoins de RTA, l’offre mondiale de silicium métal est limitée. De plus, certains producteurs de silicium métal sont « captifs », appartiennent à Ferroglobe (qui limite habituellement les possibilités de vente sur les marchés nationaux de ses filiales, comme Québec Silicon), ont prouvé leur manque de fiabilité ou présentent de tels risques sur le plan de la réputation que RTA ne peut pas acheter son silicium métal auprès d’eux. Transcription de l’audience publique, 11 juin 2019, vol. 2, aux p. 174-178; pièce RR-2018-003-B-04 (protégée), vol. 14 aux par. 96-97; Transcription de l’audience à huis clos, 11 juin 2019, vol. 2, aux p. 62-63.

[137]. Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 188 et 230-232; pièce RR-2018-003-B-05, vol. 13, par. 37, à la p. 13.

[138]. Transcription de l’audience publique, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 182-183.

[139]. Ibid. à la p. 230; voir aussi Transcription de l’audience à huis clos, vol. 2, à la p. 115.

[140]. Pièce RR-2018-003-RI-05, vol. 9 aux p. 1 et 4.

[141]. Pièce 2018-003-RI-05A (protégée), vol. 10 à la p. 4; Transcription de l’audience à huis clos, vol. 2, 11 juin 2019, aux p. 74 et 103.

[142]. Pièce RR-2018-003-RI-05A (protégée), vol. 10 à la p. 4; Transcription de l’audience publique, 11 juin 2019, vol. 2, à la p. 228.

[143]. Voir la prochaine section sur l’incidence probable des importations en question sur les prix.

[144]. Alinéa 37.2(2)b) du Règlement.

[145]. Pièce RR-2018-003-06 (protégée), vol. 2.1, tableaux 20-25.

[146]. Pièce RR-2018-003-A-04 (protégée), vol. 12 à la p. 30. Québec Silicon fait également référence à trois devis fournis par des producteurs ou des fournisseurs chinois dont les prix étaient nettement inférieurs à ceux du marché (prix au comptant selon CRU) à ce moment-là; pièce RR-2018-003-A-04 (protégée), vol. 12, par. 61, aux p. 15-16.

[147]. Comparer la pièce RR-2018-003-06 (protégée), vol. 6, tableau 20, à la p. 35 avec la pièce RR-2018-003-A-04 (protégée), vol. 12 aux p. 29-30 et la pièce RR-2018-003-A08 (protégée), vol. 12 à la p. 140; aide à l’argumentation protégée de Québec Silicon, vol. 18 à la p. 49.

[148]. Pièce RR-2018-003-B-08 (protégée), vol. 14 à la p. 49; pièce RR-2018-003-C-02 (protégée), vol. 14 à la p. 331.

[149]. Pièce RR-2018-003-B-08 (protégée), vol. 14 à la p. 49.

[150]. Transcription de l’audience publique, 11 juin 2019, vol. 2, aux p. 187, 215-216 et 231; pièce RR-2018-003-B-05, vol. 13, par. 56-57, aux p. 21-22.

[151]. Pièce RR-2018-003-18.11B, vol. 5 à la p. 9; pièce RR-2018-003-18.19A à la p. 8; pièce RR-2018-003-18.20, vol. 5 à la p. 6.

[152]. Pièce RR-2018-003-A-03, vol. 11, par. 46, à la p. 12.

[153]. Pièce RR-2018-003-RI-5A (protégée), vol. 10.

[154]. Pièce RR-2018-003-B-03, vol. 13, par. 109-110, 124, 130-131, aux p. 39, 45, 47; Transcription de l’audience publique, 11 juin 2019, vol. 2, aux p. 215-216; voir aussi Silicium métal II au par. 135.

[155]. Voir les alinéas 37.2(2)e) et g) du Règlement.

[156]. Voir l’alinéa 37.2(2)(k) du Règlement.

[157]. NQ-2013-003 au par. 56, qui renvoie à Feuillards et tôles plats en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (17 août 2001), NQ-2001-001 (TCCE) aux p. 14-15; Fils machine de cuivre (28 mars 2007), NQ-2006-003 (TCCE) aux par. 50 et 67.

[158]. Pièce RR-2018-003-RI-05A (protégée), vol. 10.

[159]. Ibid.

[160]. Comme susmentionné, le mandat du Tribunal est d’évaluer l’effet de l’expiration des conclusions sur le producteur national de marchandises similaires, et non sur les utilisateurs en aval de ces marchandises. RTA fait valoir que son avenir et celui de Québec Silicon sont liés : si RTA améliore sa position concurrentielle et augmente son niveau de production, sa demande en silicium métal augmentera également. Toutefois, comme mentionné au paragraphe 169, le Tribunal est d’avis que si les conclusions sont annulées, RTA serait en mesure, tout en conservant Québec Silicon comme un de ses principaux fournisseurs, de réduire de façon marquée les quantités qu’elle commande à Québec Silicon. Étant donné l’importance de RTA comme cliente pour Québec Silicon, une telle réduction importante contribuerait probablement de manière substantielle au dommage causé par les marchandises en question.

[161]. Pièce RR-2018-003-A-04 (protégée), vol. 12, tableau 2, aux par. 67-68.

[162]. L’analyse du Tribunal tient compte des exportations de Québec Silicon, y compris celles qui sont destinées à un client américain de Ferroglobe qui était habituellement approvisionné par l’usine de Ferroglobe située à Niagara Falls (New York). Cette usine a suspendu sa production vers la fin de 2018, et il n’est pas garanti que Québec Silicon puisse continuer de vendre à ce client dans les 12 à 24 prochains mois. Le dommage vraisemblablement causé à la branche de production nationale est sensible, que les exportations destinées à ce client continuent ou non. Pièce RR-2018-003-C-02 (protégée), vol. 14 aux p. 312-315; Transcription de l’audience publique aux p. 34-36 et 83-84.

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