Enquêtes de dommage antidumping

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Enquête préliminaire de dommage no PI-2020-007

Certains sièges rembourrés pour usage domestique

Décision rendue
le vendredi 19 février 2021

Motifs rendus
le lundi 8 mars 2021

 



EU ÉGARD À une enquête préliminaire de dommage, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, concernant :

CERTAINS SIÈGES REMBOURRÉS POUR USAGE DOMESTIQUE

DÉCISION PROVISOIRE DE DOMMAGE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI), a procédé à une enquête préliminaire de dommage afin de déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause (définies comme suit) ont causé un dommage ou un retard ou menacent de causer un dommage :

Sièges rembourrés pour usage domestique, originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de la République socialiste du Vietnam, qu’ils soient mobiles (notamment inclinables, pivotants et autres) ou stationnaires, avec recouvrement en cuir (entier ou partiel), tissu (notamment cuir synthétique) ou les deux, y compris canapés, fauteuils, causeuses, canapés-lits, lits de repos, futons, ottomans, tabourets et sièges de cinéma maison.

Sont exclus les :

a) sièges stationnaires (c.‑à‑d. non mobiles) rembourrés en tissu uniquement (plutôt qu’en cuir), même si le tissu est un cuir synthétique (polyuréthane ou vinyle similicuir ou imitation cuir);

b) chaises ou banquettes (avec ou sans bras) destinées à être utilisées dans la salle à manger, souvent jumelées avec des ensembles de table de salle à manger;

c) tabourets rembourrés dont le siège est à plus de 24 pouces de hauteur (de type bar ou comptoir), avec ou sans dossier, et/ou pliables;

d) sièges destinés à être utilisés à l’extérieur (p. ex. chaises de patio ou balançoires);

e) sièges‑sacs; et

  • f) sièges pliables ou empilables.

Il est entendu que la définition du produit comprend les :

a) sièges mobiles rembourrés, inclinables, pivotants, à bascule, « zéro gravité », coulissants, avec appuie‑tête réglable, fonctions de massage ou fonctions similaires;

b) sièges dont le cadre est fabriqué en métal, bois ou les deux;

c) sièges produits en modules ou parties de modules;

d) sièges avec ou sans bras, qu’ils fassent partie de modules ou non; et

  • e) repose-pieds et tabourets de pied (avec ou sans rangement).

La présente enquête préliminaire de dommage fait suite à l’avis en date du 21 décembre 2020, selon lequel le président de l’Agence des services frontaliers du Canada avait ouvert des enquêtes concernant les présumés dumping et subventionnement dommageables des marchandises en cause.

Aux termes du paragraphe 37.1(1) de la LMSI, le Tribunal détermine par la présente que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale (opinion dissidente du membre Burn).

Georges Bujold

Georges Bujold
Membre présidant

Cheryl Beckett

Cheryl Beckett
Membre

Peter Burn (dissident)

Peter Burn (dissident)
Membre

L’exposé des motifs sera publié d’ici 15 jours.


 

Membres du Tribunal :

Georges Bujold, membre présidant
Peter Burn, membre
Cheryl Beckett, membre

Personnel de soutien :

Peter Jarosz, conseiller juridique principal
Kalyn Eadie, conseillère juridique
Isaac Turner, stagiaire en droit
Gayatri Shankarraman, analyste principal
Rebecca Campbell, analyste
Marie-Josée Monette, conseillère, Service des données

PARTICIPANTS :

 

Conseillers/représentants

2571882 Ontario Inc.

Neeraj Dewett

Arozzi North America Incorporated

Cyndee Todgham Cherniak

Canadian Tire Corporation, Limited

Riyaz Dattu

Conseil canadien du commerce de détail

Darrel H. Pearson
George Reid
Jessica Horwitz

Dodd’s Furniture Ltd.

Lovedip Singh Dodd

Dorel Industries Inc.

Peter Kirby

Fuli Furniture International Group Ltd

Zhang Xue Bin

Jag’s Furniture & Mattress

Gurpreet Jaswal

Palliser Furniture Ltd.

Neil Campbell
Jonathan O’Hara
Chris Scheitterlein
Lisa Page
Thomas van den Hoogen
Shahnaz Dhanani
Jeremiah Kopp
William Wu

Wayfair LLC

Greg Kanargelidis
Patrick Lapierre
Amy Lee
Brady Gordon
Philippe Dubois

Veuillez adresser toutes les communications à :

La greffière adjointe
Téléphone : 613-993-3595
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

[1] Le 16 octobre 2020, Palliser Furniture Ltd. (Palliser) a déposé une plainte auprès de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) alléguant que le dumping et le subventionnement de certains sièges rembourrés pour usage domestique originaires ou exportés de la République populaire de Chine (Chine) et de la République socialiste du Vietnam (Vietnam) (les marchandises en cause) ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale.

[2] Le 21 décembre 2020, l’ASFC a ouvert des enquêtes concernant le dumping et le subventionnement des marchandises en cause aux termes du paragraphe 31(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation [1] .

[3] En conséquence de la décision de l’ASFC d’ouvrir les enquêtes, le 22 décembre 2020 le Tribunal canadien du commerce extérieur a ouvert son enquête préliminaire de dommage, conformément au paragraphe 34(2) de la LMSI, pour déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale [2] .

[4] Le Tribunal a reçu des observations s’opposant à la plainte de la part d’un certain nombre d’importateurs : Arozzi North America Incorporated (Arozzi), Dodd’s Furniture Ltd. (Dodd’s Furniture), Dorel Industries Inc. (Dorel), le Conseil canadien du commerce de détail (CCCD) et Wayfair LLC (Wayfair). Un producteur étranger, Fuli Furniture International Group Ltd, a aussi déposé des observations s’opposant à la plainte. Canadian Tire Corporation, Limited (Canadian Tire), Jag’s Furniture & Mattress (Jag’s Furniture) et 2571882 Ontario Inc. ont déposé des avis de participation auprès du Tribunal mais n’ont pas déposé d’observations.

[5] Le 19 février 2021, aux termes du paragraphe 37.1(1) de la LMSI, le Tribunal a déterminé que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale. Les motifs de cette décision sont énoncés ci-dessous.

DÉFINITION DU PRODUIT

[6] L’ASFC a défini les marchandises en cause comme suit [3] :

Sièges rembourrés pour usage domestique, originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de la République socialiste du Vietnam, qu’ils soient mobiles (notamment inclinables, pivotants et autres) ou stationnaires, avec recouvrement en cuir (entier ou partiel), tissu (notamment cuir synthétique) ou les deux, y compris canapés, fauteuils, causeuses, canapés-lits, lits de repos, futons, ottomans, tabourets et sièges de cinéma maison.

Sont exclus les :

  • a) sièges stationnaires (c.‑à‑d. non mobiles) rembourrés en tissu uniquement (plutôt qu’en cuir), même si le tissu est un cuir synthétique (polyuréthane ou vinyle similicuir ou imitation cuir);

  • b) chaises ou banquettes (avec ou sans bras) destinées à être utilisées dans la salle à manger, souvent jumelées avec des ensembles de table de salle à manger;

  • c) tabourets rembourrés dont le siège est à plus de 24 pouces de hauteur (de type bar ou comptoir), avec ou sans dossier, et/ou pliables;

  • d) sièges destinés à être utilisés à l’extérieur (p. ex. chaises de patio ou balançoires);

  • e) sièges‑sacs; et

  • f) sièges pliables ou empilables.

Il est entendu que la définition du produit comprend les :

  • a) sièges mobiles rembourrés, inclinables, pivotants, à bascule, « zéro gravité », coulissants, avec appuie‑tête réglable, fonctions de massage ou fonctions similaires;

  • b) sièges dont le cadre est fabriqué en métal, bois ou les deux;

  • c) sièges produits en modules ou parties de modules;

  • d) sièges avec ou sans bras, qu’ils fassent partie de modules ou non; et

  • e) repose-pieds et tabourets de pied (avec ou sans rangement).

DÉCISION DE L’ASFC D’OUVRIR LES ENQUÊTES

[7] L’ASFC a ouvert les enquêtes aux termes du paragraphe 31(1) de la LMSI, car elle était d’avis qu’il y avait des éléments de preuve indiquant que les marchandises en cause avaient fait l’objet de dumping et de subventionnement, ainsi que des éléments de preuve qui révélaient une indication raisonnable que le dumping et de subventionnement avaient causé un dommage à la branche de production nationale.

[8] En utilisant les renseignements relatifs à la période choisie pour l’enquête de dumping, soit du 1er juin 2019 au 30 novembre 2020, l’ASFC a estimé les marges de dumping suivantes : 35,85 p. 100 pour la Chine et 28,45 p. 100 pour le Vietnam, chacune exprimée en pourcentage du prix à l’exportation [4] .

[9] En utilisant les renseignements relatifs à la même période choisie pour l’enquête de subventionnement, l’ASFC a estimé que les montants de subventionnement, exprimés en pourcentage du prix à l’exportation, étaient de 17,73 p. 100 pour la Chine et de 11,73 p. 100 pour le Vietnam [5] .

CADRE LÉGISLATIF

[10] Le paragraphe 34(2) de la LMSI énonce le mandat du Tribunal en ce qui concerne les enquêtes préliminaires de dommage. Il prévoit que le Tribunal doit déterminer « si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping ou le subventionnement des marchandises [en cause] a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage ».

[11] L’expression « indiquent, de façon raisonnable » n’est pas définie dans la LMSI, mais elle est comprise comme signifiant que les éléments de preuve n’ont pas à être « concluants ou probants selon la prépondérance des probabilités » [6] [traduction]. La norme de preuve requise par l’expression « indiquent, de façon raisonnable » est moins élevée que celle qui s’applique lors d’une enquête définitive de dommage menée aux termes de l’article 42 de la LMSI [7] .

[12] Les éléments de preuve recueillis dans la phase préliminaire de la procédure sont beaucoup moins détaillés et exhaustifs que dans une enquête définitive de dommage. Tous les éléments de preuve ne sont pas disponibles à la phase préliminaire [8] . En conséquence, la preuve n’est pas évaluée dans la même mesure que dans une enquête définitive de dommage.

[13] Étant donné que la norme de preuve requise est moins rigoureuse à cette étape-ci de l’enquête, les plaintes seront examinées libéralement [9] . Cette interprétation de la norme est conforme au but et à l’objet de la LMSI, qui est d’offrir une protection aux industries canadiennes qui sont pénalisées par les importations faisant l’objet d’un commerce déloyal [10] .

[14] En effet, les producteurs nationaux ne sont pas habilités à recueillir des données auprès des parties adverses, de leurs concurrents ou de leurs clients à l’étape de la plainte. Ils ne peuvent tout simplement pas recueillir le même niveau d’information détaillée que le Tribunal dans le cadre d’une enquête aux termes de l’article 42 de la LMSI. L’imposition aux parties plaignantes d’une norme de preuve élevée à cette étape-ci ferait peser un fardeau considérable sur les producteurs nationaux qui allèguent avoir subi un dommage en raison d’importations à des prix inéquitables et empêcherait probablement certains producteurs nationaux ainsi que certaines industries nationales d’avoir accès au redressement prévu dans le cadre d’un recours aux termes de la LMSI.

[15] Il doit aussi être souligné que, à cette étape-ci de la procédure prévue par la LMSI, le rôle du Tribunal est d’évaluer si les éléments de preuve sont suffisants pour que l’ASFC poursuive avec une enquête, tandis qu’à l’étape de l’enquête définitive de dommage, le rôle du Tribunal est de déterminer s’il doit imposer les mesures de redressement convoitées dans un recours commercial [11] . Par conséquent, la norme de preuve requise par l’expression « indiquent, de façon raisonnable » pour ce qui est du dommage ou de la menace de dommage n’exige pas que les éléments de preuve satisfassent au seuil plus élevé sur le plan de la fiabilité et de la force probante qui est établi dans le contexte d’une enquête définitive de dommage.

[16] Toutefois, de simples affirmations ne sont pas suffisantes. Les plaintes, ainsi que le dossier des parties opposées, doivent être étayées d’éléments de preuve positifs et suffisants, répondant aux conditions nécessaires de la LMSI et aux facteurs pertinents énoncés à l’article 37.1 du Règlement sur les mesures spéciales d’importation [12] . Dans des causes précédentes, le Tribunal a affirmé que le critère établi par l’expression « indiquent, de façon raisonnable » est rempli si, compte tenu des éléments de preuve présentés, les allégations résistent à un examen assez poussé, même si la thèse avancée peut ne pas sembler convaincante ou incontestable [13] .

[17] Dans la présente enquête, la thèse avancée par la plaignante se résume comme suit :

  • La prédominance des marchandises en cause sur le marché canadien remonte au début des années 2000, lorsque les marchandises chinoises se sont emparées des grands détaillants canadiens (comme Leon’s et The Brick) pour ensuite pénétrer le marché de détail à plus petite échelle. Palliser et les autres producteurs ont été de façon continue mais inexorablement expulsés de ce vaste marché en raison des énormes quantités de marchandises en cause et de leurs bas prix.
  • La plaignante a réagi à cet afflux de marchandises importées en mettant au point des produits plus spécialisés et haut de gamme. Par la suite, pendant une brève période, les importations fabriquées en grandes séries de la Chine et du Vietnam n’ont pu livrer directement concurrence aux produits plus personnalisés qu’elle offrait.
  • S’étant emparés du marché de détail grand public, les producteurs chinois et vietnamiens ont maintenant commencé à cibler de façon semblable le segment haut de gamme du marché canadien, le dernier segment de clients dont disposent les producteurs canadiens.
  • · Les données sur le marché montrent une augmentation du volume des importations de marchandises en cause à bas prix [14] au cours de la période récente, notamment de 2017 jusqu’en 2020.

  • · Cela s’est soldé par un dommage causé à la plaignante sous forme d’une érosion des marges brutes, d’une perte de recettes, de marges nettes négatives importantes, d’une perte de ventes et d’une diminution de l’utilisation de sa capacité de fabrication et de son rendement sur le capital investi [16] .

  • La réaction de la plaignante a été de tenter de conserver sa part de marché restante en livrant concurrence aux marchandises en cause par les prix. Pour reprendre les paroles de son témoin, « Palliser a tenté de conserver sa part de marché en sacrifiant ses prix et en réduisant sa marge bénéficiaire » [15] [traduction].
  • Cette situation est financièrement insoutenable. Si les tendances actuelles se poursuivent, la plaignante et les autres producteurs canadiens restants seront expulsés de ce dernier segment du marché, ce qui compromettra l’existence de la branche de production nationale.

[18] Comme il est exposé dans le détail ci-dessous, les éléments de preuve pertinents et crédibles versés au dossier sont suffisants pour appuyer ces allégations à cette étape-ci. Bien que les éléments de preuve ne soient pas nécessairement concluants selon la prépondérance des probabilités, la majorité du Tribunal est d’avis que les allégations de la plaignante résistent clairement à un examen assez poussé. Ce n’est que dans le contexte d’une enquête aux termes de l’article 42 de la LMSI, si l’ASFC conclut dans sa décision provisoire que les marchandises en cause ont été sous‑évaluées ou subventionnées, que le Tribunal pourra déterminer, bénéficiant d’un dossier de preuve plus étoffé, si la branche de production nationale a droit aux mesures de redressement prévues au terme d’un recours commercial.

MARCHANDISES SIMILAIRES ET CATÉGORIES DE MARCHANDISE

[19] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » par rapport aux autres marchandises de la façon suivante : « a) marchandises identiques aux marchandises en cause; b) à défaut, marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause ».

[20] Pour trancher la question des marchandises similaires et celle de savoir s’il y a plus d’une catégorie de marchandise, le Tribunal tient généralement compte d’un certain nombre de facteurs, y compris les caractéristiques physiques des marchandises (comme leur composition et leur apparence) et leurs caractéristiques de marché (comme la substituabilité, les prix, les circuits de distribution, les utilisations finales et la question de savoir si elles répondent aux mêmes besoins des clients)

[21] Pour déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé ou menacent de causer un dommage aux producteurs nationaux de marchandises similaires, le Tribunal doit définir quelles sont les marchandises similaires par rapport aux marchandises en cause. Dans cet exercice, le Tribunal ne peut modifier ou amender la définition de l’ASFC des marchandises en cause. Il doit mener son enquête préliminaire en se fondant sur la définition du produit de l’ASFC [17] .

[22] Pour déterminer la portée des marchandises similaires, le Tribunal part du principe, exprimé clairement dans des décisions antérieures, que la portée des marchandises similaires doit être coextensive avec celle des marchandises en cause, telles que définies par l’ASFC dans la définition du produit [18] . Cela signifie que les marchandises similaires ne devraient pas inclure des marchandises qui ne seraient pas des marchandises en cause si elles étaient exportées des pays visés plutôt que produites au pays, bien qu’on puisse soutenir que ces marchandises produites au pays partagent des caractéristiques physiques et de marché avec les marchandises comprises dans la définition du produit, ont des utilisations finales semblables à ces dernières ou leur livrent concurrence.

[23] Le Tribunal constate que le CCCD soutient que certaines des marchandises que l’ASFC a exclues de la portée de la définition des marchandises en cause constituent des marchandises similaires qui livrent concurrence aux marchandises en cause sur le marché canadien. Cependant, le Tribunal n’est pas convaincu, à cette étape-ci, qu’il existe des motifs adéquats pour s’écarter de ses décisions antérieures concernant la caractérisation des marchandises similaires et l’application du principe de la portée coextensive. Par conséquent, le Tribunal conclut, dans le cadre de la présente enquête préliminaire de dommage, que les marchandises similaires ne comprennent pas les sièges rembourrés qui sont exclus de la définition du produit (un champ de compétence exclusive de l’ASFC). Ces exclusions comprennent entre autres les sièges rembourrés pour usage non domestique (c’est-à-dire pour usage commercial), les sièges stationnaires rembourrés en tissu uniquement (plutôt qu’en cuir) pour usage domestique et les chaises ou banquettes destinées à être utilisées dans une salle à manger. Par conséquent, dans le cadre de la présente enquête préliminaire, le Tribunal n’a pas à tenir compte de ces marchandises exclues ou de la production nationale de telles marchandises dans son analyse des marchandises similaires ou des catégories de marchandise, ni dans son analyse visant à déterminer s’il y a indication raisonnable de dommage [19] .

Exclusions de produits

[24] Les participants soulèvent aussi la question de savoir si le Tribunal doit accorder certaines exclusions de produits à la conclusion de la présente enquête préliminaire. En fait, Arozzi soutient qu’une exclusion devrait être accordée pour les « fauteuils de jeu à être utilisés avec un bureau » [traduction], et, dans ses observations, la plaignante se dit d’accord avec cette demande. En outre, le témoin de la plaignante semble indiquer qu’il consentirait aux exclusions d’autres produits apparemment visés par la définition des marchandises en cause, comme les ottomans de rangement rembourrés en tissu, les futons ou les lits de repos composés uniquement d’un cadre externe et les meubles rembourrés en tissu prêts à monter [20] .

[25] Il semble que le Tribunal n’ait jamais accordé d’exclusions de produits à l’étape de l’enquête préliminaire de dommage. Cependant, le Tribunal a déjà indiqué qu’il pourrait accorder des exclusions de produits dans des « circonstances exceptionnelles » [21] . En présumant que la LMSI habilite le Tribunal à exclure de la portée de sa décision dans le cadre d’une enquête préliminaire de dommage des produits visés par la définition des marchandises en cause fournie par l’ASFC [22] , le Tribunal conclut que la demande d’exclusion de produits faite dans la présente enquête préliminaire de dommage ne révèle pas de circonstances exceptionnelles qui justifieraient qu’elle soit prise en compte à ce stade. En conséquence, il serait prématuré de statuer sur cette demande à cette étape-ci de la procédure.

Catégories de marchandise

[26] En ce qui concerne la question des marchandises similaires, la plaignante soutient que les sièges rembourrés pour usage domestique produits au pays, qui sont définis de la même façon que les marchandises en cause, sont des marchandises similaires par rapport aux marchandises en cause et qu’il n’y a qu’une catégorie de marchandise. À cet égard, la plaignante indique que la gamme de produits qu’elle fabrique est interchangeable avec la gamme des marchandises en cause. Selon les éléments de preuve, elles partagent toutes deux des caractéristiques similaires en ce qui a trait à leur fonction, leur composition et leur aspect physique [23] . Les marchandises similaires de production nationale et les marchandises en cause ont toutes deux pour fonction de s’asseoir ou de s’allonger dans un domicile.

[27] Les caractéristiques de marché des sièges rembourrés pour usage domestique importés et produits au pays sont aussi très similaires, tout comme les besoins des clients auxquels ils répondent [24] . La plaignante produit les divers sièges rembourrés pour usage domestique désignés dans la définition du produit de l’ASFC ou des produits substituables [25] . Compte tenu des éléments de preuve au dossier et des facteurs pertinents ayant trait à la question des marchandises similaires [26] , le Tribunal conclut que les sièges rembourrés pour usage domestique produits au pays qui sont de même description que les marchandises en cause sont des « marchandises similaires » par rapport aux marchandises en cause.

[28] En ce qui concerne les catégories de marchandise, le Tribunal a souligné cette question dans son avis d’ouverture d’enquête en raison de l’éventail de marchandises apparemment visées par la définition des marchandises en cause fournie par l’ASFC. Pour ce motif, le Tribunal a demandé aux participants de traiter, dans leurs observations, de la question de savoir si les marchandises en cause comportent plusieurs catégories de marchandise. Le 28 janvier 2021, le Tribunal a aussi tenu une téléconférence avec les parties intéressées afin de leur poser des questions et de recueillir des éléments de preuve à cet égard. Le Tribunal avait pour objectif de rendre possible la résolution rapide de cette question afin d’éventuellement simplifier toute enquête définitive de dommage qu’il pourrait ouvrir à la suite d’une décision provisoire de dumping ou de subventionnement rendue par l’ASFC et d’une décision provisoire de dommage en l’espèce.

[29] Palliser, Arozzi, Dorel, Canadian Tire, Wayfair, le CCCD, Dodd’s Furniture et Jag’s Furniture ont pris part à la téléconférence – seules Palliser et Dodd’s Furniture ont fourni des éléments de preuve. Les parties ayant participé à la téléconférence ont avancé les arguments suivants relativement aux catégories de marchandise :

  • Palliser soutient qu’en dépit de certaines différences entre les marchandises en cause, celles-ci représentent un « continuum » [traduction] de marchandises similaires qui constituent une seule catégorie de marchandise.

  • Dorel soutient que, selon les différences ayant trait aux caractéristiques physiques des marchandises, à leur méthode de fabrication, à leur composition, à leurs caractéristiques de marché et aux besoins des clients auxquels elles répondent, plusieurs catégories de marchandise différentes doivent être considérées dans le cadre de l’enquête de dommage [27] .
  • Wayfair soutient que la multitude d’articles inclus dans la définition du produit n’ont pas une « apparence semblable » [traduction] ou ne sont pas « des versions plus grandes ou plus petites les unes des autres » [traduction] et ne correspondent pas aux mêmes utilisations finales des consommateurs nationaux. En outre, Wayfair fait valoir que ces grandes catégories de mobilier comportent différentes caractéristiques en ce qui a trait à la commercialisation, aux prix, à la distribution et aux utilisations finales, selon que les marchandises sont des modèles faits sur mesure ou « standard » et selon leurs caractéristiques physiques [28] .
  • Le CCCD reconnaît qu’il semble possible que les marchandises en cause ne constituent qu’une seule catégorie de marchandise, mais soutient qu’il est prématuré pour le Tribunal de rendre une décision sur les catégories de marchandise à l’étape préliminaire.

[30] Les marchandises en cause et les marchandises similaires comprennent des sièges rembourrés pour usage domestique de divers types et configurations, comme les canapés, les fauteuils, les causeuses, les canapés-lits, les lits de repos, les futons, les ottomans, les tabourets et les sièges de cinéma maison. Dans l’examen de la question des catégories de marchandise, le Tribunal détermine habituellement si les marchandises censément comprises dans des catégories de marchandise distinctes constituent des « marchandises similaires » les unes par rapport aux autres, auquel cas elles seront considérées comme constituant une seule catégorie de marchandise.

[31] À cet égard, le Tribunal souligne qu’il a affirmé, dans des causes précédentes, 1) que si certaines marchandises ne sont pas nécessairement entièrement substituables les unes aux autres pour certaines utilisations finales, cela ne constitue pas en soi une justification suffisante pour déterminer qu’il y a plusieurs catégories de marchandise, et 2) que des marchandises peuvent appartenir à la même catégorie même s’il en existe un grand nombre de styles et de variétés [29] . Par conséquent, la jurisprudence du Tribunal appuie essentiellement une application large plutôt que restreinte de la définition de « marchandises similaires » énoncée dans la LMSI pour déterminer s’il y a plusieurs catégories de marchandise dans une enquête.

[32] Le Tribunal est convaincu que, dans l’ensemble, bien que les divers types de sièges rembourrés pour usage domestique qui sont compris dans la définition du produit ne soient pas, de toute évidence, identiques à tous les égards les uns aux autres, ils ont des caractéristiques physiques et de marché et des utilisations finales semblables et se ressemblent de façon générale.

[33] À cet égard, la plaignante a fourni des éléments de preuve indiquant ce qui suit :

  • Les marchandises sont toutes constituées des mêmes matériaux, notamment de cadres en bois ou en métal, de mousse et d’un recouvrement en cuir ou tissu (qui, à cette fin, comprend des matériaux comme le polyuréthane et le polyvinyle). Les marchandises sont généralement semblables dans leur apparence, d’autant que les canapés, les causeuses et les fauteuils sont souvent, en fait, des versions plus grandes ou plus petites les uns des autres.
  • Les marchandises ont la même utilisation finale et répondent aux mêmes besoins des clients : elles sont conçues pour qu’une personne s’assoie dans un contexte domestique ou ménager. Les matériaux dont les marchandises sont recouvertes (comme différents types de tissu ou de cuir, ou une combinaison des deux) et leurs caractéristiques (comme de pivoter, de s’incliner ou d’autres mouvements, ou d’autres caractéristiques, comme l’éclairage, un compartiment de refroidissement ou de rangement intégré) constituent des caractéristiques secondaires par rapport à leur utilisation finale primaire, qui est de s’asseoir dans un contexte ménager.
  • Les circuits de distribution des marchandises sont semblables. Les producteurs les vendent essentiellement à des détaillants canadiens, qui les revendent aux clients [30] .

[34] En outre, il ressort des éléments de preuve que les divers sièges rembourrés pour usage domestique sont souvent vendus en groupes ou ensembles comprenant un canapé ou une causeuse et des fauteuils ou ottomans assortis. Le prix de chaque élément d’un groupe est relatif à celui du canapé du même groupe [31] . À titre d’exemple, le témoin de la plaignante a expliqué que le prix des ottomans représente environ 20 p. 100 du prix du canapé, tandis que le prix des fauteuils importés et produits au pays correspond habituellement à 60 ou 70 p. 100 du prix du canapé assorti [32] .

[35] Selon la plaignante, les producteurs offrent généralement un rabais sur les ensembles de meubles, qui peuvent comprendre un canapé, une causeuse, un fauteuil et un ottoman [33] . Cette pratique de la branche de production indique que, en ce qui concerne les prix, les divers sièges rembourrés pour usage domestique sont considérés comme un ensemble ou comme faisant partie de la même catégorie générale.

[36] De plus, M. Dodd, qui représente un détaillant de marchandises en cause et de marchandises similaires, a indiqué que les clients sont souvent indécis par rapport au type de siège qu’ils préfèrent. Il a confirmé avoir vu des clients hésiter entre acheter un canapé ou deux fauteuils pour meubler leur salle de séjour [34] . Il a aussi corroboré les éléments de preuve présentés par la plaignante concernant la similarité des matériaux utilisés et de l’usage principal des marchandises en cause et des marchandises similaires.

[37] Ces éléments de preuve appuient la position de la plaignante selon laquelle les sièges rembourrés pour usage domestique représentent un continuum de marchandises similaires qui constituent une seule catégorie de marchandise. En bref, la situation en l’espèce ressemble à celle de nombreuses causes antérieures qui concernaient une gamme de marchandises dont les caractéristiques physiques, l’apparence et les niveaux d’efficacité différaient, mais qui avaient la même utilisation finale générale et qui étaient, dans les circonstances appropriées, suffisamment substituables les unes aux autres [35] .

[38] Les parties opposées à la plainte soutiennent qu’il est justifié de séparer les marchandises en cause et les marchandises similaires dans plusieurs catégories compte tenu que leur style, leur conception, leur personnalisation et leur qualité diffèrent. Elles ont fait des suggestions concernant des catégories éventuelles, mais elles n’ont fourni aucun élément de preuve qui pourrait convaincre le Tribunal que les différences entre ces produits suffisent pour justifier la séparation des marchandises en différentes catégories. En fait, outre M. Dodd [36] , les parties opposées à la plainte n’ont pas profité de la téléconférence pour présenter des témoignages en vue de réfuter les éléments de preuve avancés par la plaignante ou d’appuyer autrement leurs points de vue concernant les prétendues catégories distinctes de marchandise.

[39] Enfin, le Tribunal doit tenir compte de la faisabilité administrative pour déterminer si les marchandises doivent être séparées en plusieurs catégories [37] . Il serait déraisonnable de demander au Tribunal de définir une catégorie distincte de marchandise pour chaque configuration particulière de sièges (sièges individuels, sièges à plusieurs places, etc.) ou pour chaque utilisation finale ou caractéristique particulière (ranger, se coucher, etc.) des sièges rembourrés pour usage domestique. Cette approche exigerait que le Tribunal mène plusieurs analyses de dommage, chacune nécessitant, par exemple, une décision distincte relativement à la composition de la branche de production nationale, des informations financières distinctes et un rapport d’enquête particulier. Tout compte fait, il serait arbitraire et peu pratique, pour l’accomplissement du mandat du Tribunal en l’espèce, de séparer les sièges rembourrés pour usage domestique en différentes catégories en se fondant sur leurs caractéristiques personnalisées ou variables.

[40] Pour ces motifs, le Tribunal n’est pas convaincu par les arguments avancés par les parties opposées à la plainte selon lesquels il y a plusieurs catégories de marchandise.

BRANCHE DE PRODUCTION NATIONALE

[41] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit la « branche de production nationale » comme « l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires ».

[42] Les éléments de preuve fournis par la plaignante et l’exposé des motifs de l’ASFC concernant l’ouverture d’enquêtes indiquent qu’il y a sept producteurs confirmés et 40 autres producteurs nationaux potentiels de sièges rembourrés pour usage domestique.

[43] Le Tribunal doit définir la branche de production nationale comme l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. L’expression « proportion majeure » n’est pas définie dans la LMSI. Toutefois, elle a été interprétée comme signifiant une proportion importante ou considérable de la production collective nationale de marchandises similaires, et pas forcément d’une majorité [38] . Le Tribunal a déjà laissé entendre que, dans certaines circonstances, une proportion d’au moins 20 p. 100 de la production collective nationale pourrait constituer une proportion majeure [39] .

[44] Le Tribunal est aussi au fait de la conclusion de l’Organe d’appel de l’OMC selon laquelle, dans le cas d’une branche de production fragmentée avec de nombreux producteurs, comme cela semble être le cas en l’espèce, une proportion majeure peut, en fait, être une proportion plus petite que dans le cas d’une branche de production concentrée [40] . Par conséquent, dans les circonstances de la présente enquête, il est raisonnable d’accepter qu’une « proportion majeure » peut être inférieure à ce qu’elle est dans un cas normal.

[45] Il ressort des éléments de preuve au dossier que la production de la plaignante représente, selon la valeur, plus de 20 p. 100 de la production collective de marchandises similaires de la branche de production nationale [41] . Dans les circonstances de l’espèce, surtout en tenant compte du fait qu’est en jeu l’incidence des marchandises en cause sur une branche de production qui est très fragmentée et qui semble comprendre de nombreux petits producteurs, le Tribunal conclut que la plaignante représente une proportion majeure de la production collective nationale. Par conséquent, dans le cadre de la présente enquête préliminaire de dommage, le Tribunal tiendra compte de l’incidence des marchandises en cause sur la plaignante puisque, selon les renseignements disponibles, sa production semble être suffisante pour constituer une proportion majeure de la production collective nationale de marchandises similaires.

[46] Bien que le Tribunal estime que les données concernant la situation de la plaignante sont raisonnablement représentatives de l’état de la branche de production nationale aux fins de la présente enquête préliminaire, il a l’intention de recueillir des données auprès d’autres producteurs nationaux dans le contexte d’une enquête définitive de dommage éventuelle. En conséquence, la question de la composition de la branche de production nationale devra être examinée plus en détail si l’ASFC conclut, dans sa décision provisoire, que les marchandises en cause ont été sous-évaluées ou subventionnées et si la procédure passe à l’étape suivante.

CUMUL ET CUMUL CROISÉ

[47] Dans le cadre d’une analyse définitive de dommage, le paragraphe 42(3) de la LMSI exige que le Tribunal évalue les effets cumulatifs du dumping ou du subventionnement des marchandises importées au Canada en provenance de plus d’un des pays visés s’il est convaincu 1) que la marge de dumping ou le montant de subvention relativement aux importations de marchandises de chacun des ces pays n’est pas minimale et que le volume des marchandises importées de chacun de ces pays n’est pas négligeable, et 2) qu’une telle évaluation est indiquée compte tenu des conditions de concurrence entre les marchandises de n’importe quel de ces pays et les marchandises de n’importe quel autre de ces pays ou les marchandises similaires produites au pays.

[48] Bien que le paragraphe 42(3) de la LMSI traite des enquêtes définitives de dommage, le Tribunal applique généralement le même cadre d’analyse dans une enquête préliminaire de dommage [42] . Le Tribunal estime normalement que le fait de ne pas évaluer les effets cumulatifs des marchandises en cause dans le cadre d’une enquête préliminaire de dommage est un cas d’exception lorsque les éléments de preuve disponibles semblent justifier le cumul [43] .

[49] Le Tribunal évalue habituellement le caractère minimal et négligeable en se fondant sur l’estimation des marges de dumping, des montants de subvention et des volumes d’importation de l’ASFC durant la période visée par son enquête de dumping. En l’espèce, la marge de dumping et le montant de subvention estimés de chaque pays ne sont pas minimaux (c’est-à-dire que la marge de dumping ne constitue pas moins de 2 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises et que le montant de subvention ne constitue pas moins de 1 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises), et le volume estimé des importations de chaque pays n’est pas négligeable (c’est-à-dire qu’il ne constitue pas moins de 3 p. 100 du total du volume des importations de tous les pays) [44] . Les marges de dumping estimées pour la Chine et le Vietnam étaient de 35,85 p. 100 et de 28,45 p. 100, et les montants de subventionnement estimés étaient de 17,73 p. 100 et de 11,73 p. 100 respectivement. Les volumes estimés des importations d’août 2019 à juillet 2020, exprimés en pourcentage du volume (unités), étaient de 71 p. 100 pour la Chine et de 11 p. 100 pour le Vietnam [45] .

[50] Pour ce qui est des conditions de concurrence, le Tribunal a précédemment fait son évaluation en fonction de facteurs comme l’interchangeabilité, la qualité, les prix, les circuits de distribution, le mode de transport, les délais de livraison et la répartition géographique [46] . En l’espèce, la plaignante affirme qu’il n’y a aucune distinction entre les marchandises en cause et les marchandises similaires sur le marché canadien sur le plan de l’utilisation finale et des caractéristiques. En outre, la plaignante soutient que les importations de marchandises en cause livrent directement concurrence aux marchandises similaires à plusieurs niveaux commerciaux, en particulier aux niveaux de la vente en gros et de la vente au détail [47] . Aucune des parties opposées à la plainte n’a présenté d’éléments de preuve indiquant que les conditions de concurrence entre les marchandises en cause ou entre les marchandises en cause et les marchandises similaires rendraient inappropriée l’évaluation des effets cumulatifs en l’espèce.

[51] Le Tribunal conclut que les éléments de preuve dont il dispose à cette étape-ci de la procédure indiquent, de façon raisonnable, que les conditions de concurrence entre les marchandises en cause, et entre les marchandises en cause et les marchandises similaires sont semblables.

[52] Lorsque des marchandises en cause provenant de plusieurs sources sont à la fois sous-évaluées et subventionnées, comme en l’espèce, le Tribunal considère qu’il n’est pas nécessaire ni possible de désenchevêtrer les effets du subventionnement et ceux du dumping de ces marchandises. Dans le cadre de la présente enquête préliminaire, le Tribunal évalue donc de façon cumulative l’incidence du dumping et du subventionnement des marchandises provenant de la Chine et du Vietnam.

ANALYSE DE DOMMAGE

Volumes d’importation des marchandises sous-évaluées et subventionnées

[53] L’ASFC a fait ses propres estimations du volume et de la valeur des importations de marchandises en cause, lesquelles diffèrent considérablement de celles qui ont été effectuées par la plaignante, qui ne se fondent que sur la valeur comme approximation indirecte en l’absence de données sur le volume par unité ou pièce dans la plainte. À cet égard, la plaignante a exprimé la justification suivante :

Dans la branche de production de sièges rembourrés pour usage domestique, le dénombrement par unités ou les prix unitaires ne sont pas utilisés lorsqu’il est question de parts de marché et le sont rarement à toute autre fin. Cela s’explique par le fait que les sièges rembourrés pour usage domestique ne sont pas des produits de base et par le vaste éventail de produits connexes. Sont actuellement offerts au Canada des milliers, voire des dizaines de milliers de différents styles et configurations de canapés, de causeuses, de fauteuils, de fauteuils inclinables, etc. Certains sièges rembourrés pour usage domestique peuvent aussi être commandés sur mesure. Dans ce contexte, le dénombrement par unités ou les prix unitaires moyens ne veulent rien dire, et la mesure pertinente est la valeur en dollars. L’ensemble de l’analyse de Palliser portant sur la taille et les parts de marché sera fondé sur la valeur en dollars [48] .

[Traduction]

[54] Les estimations de la plaignante calculées selon la valeur en dollars indiquent que les importations provenant de la Chine et du Vietnam ont augmenté de 11,5 p. 100 de 2017 à 2019 [49] .

[55] Selon ses propres estimations de la valeur des importations, l’ASFC a conclu que le volume total des importations provenant des pays visés a collectivement augmenté dans une importante proportion de 60 p. 100 de 2017 à 2019. Les données de l’ASFC sur les importations de marchandises en cause par unité montrent une augmentation plus marquée de 118 p. 100 au cours de la même période [50] .

[56] Ayant examiné les éléments de preuve au dossier, et en particulier les estimations de l’ASFC du volume des importations, le Tribunal conclut qu’il existe une indication raisonnable d’une augmentation marquée des importations de marchandises en cause.

[57] Dans le contexte de l’enquête définitive de dommage, le Tribunal examinera de façon approfondie les données sur les importations de façon à s’assurer de ne pas inclure des marchandises non visées et surestimer le volume des marchandises en cause. Étant donné la réserve de la plaignante à l’égard du recours au dénombrement par unités pour évaluer la production nationale et le volume des importations dans cette industrie, le Tribunal devra aussi tenir compte du poids à accorder aux informations ventilées par unité et déterminer si, comme le soutient la plaignante, la valeur ou une autre mesure est plus appropriée pour évaluer le volume des importations.

Effets sur les prix des marchandises similaires

[58] La plaignante soutient que les marchandises en cause ont entraîné une sous-cotation des prix, ce qui a donné lieu à une perte de ventes et de parts de marché. La plaignante soutient également que les marchandises en cause ont eu pour effet de réduire, de façon marquée, ses prix sur le marché canadien.

[59] Le Tribunal a utilisé les données sur le volume et la valeur fournies par la plaignante et l’analyse confidentielle de la plainte de l’ASFC pour estimer les ventes nationales moyennes et les valeurs unitaires moyennes des importations. Les résultats montrent des valeurs unitaires moyennes des importations anormalement très élevées par rapport aux prix moyens indiqués par la plaignante. Bien que cet exercice ne révèle pas une sous-cotation des prix moyens, les prix moyens par unité ne sont peut-être pas un indicateur fiable en l’espèce puisque les sièges rembourrés pour usage domestique ne sont pas des produits de base et en raison du vaste éventail de produits connexes [51] .

[60] Le Tribunal souligne que la combinaison de produits est un sujet de préoccupation dans de nombreuses causes aux termes de la LMSI, car il est rare de trouver une branche de production nationale ou un groupe d’importateurs qui produit ou importe, respectivement, les mêmes assortiments de marchandises d’année en année. À la lumière du nombre particulièrement important de produits différents visés en l’espèce, le Tribunal reconnaît les contraintes liées à l’utilisation des prix moyens pour ces types de produits [52] .

[61] En outre, les données sur les prix moyens sont en contradiction avec d’autres données versées au dossier concernant les prix auxquels les marchandises en cause sont apparemment offertes aux importateurs canadiens. À cet égard, la plaignante a estimé le prix à l’exportation des marchandises en cause en fonction des meilleures informations dont elle disposait, y compris les sources suivantes : la liste confidentielle de prix d’un exportateur en Chine et au Vietnam, les documents commerciaux d’un exportateur chinois, les renseignements commerciaux d’exportateurs chinois et vietnamiens et les prix révisés obtenus sur des sites Web de détaillants canadiens où il était indiqué que les marchandises provenaient de la Chine et du Vietnam [53] .

[62] Selon ces informations, les prix des marchandises en cause qui livrent concurrence aux marchandises offertes par la plaignante sont inférieurs aux valeurs unitaires moyennes estimées. Il semble aussi que les détaillants importateurs profitent de l’offre des marchandises en cause à bas prix pour obtenir des concessions sur les prix auprès de la plaignante.

[63] À l’appui de ses allégations concernant les effets négatifs sur les prix, la plaignante indique des cas spécifiques où elle allègue avoir subi un dommage, notamment des pertes de ventes en raison de la sous-cotation des prix et des cas où les producteurs nationaux ont dû baisser leurs prix pour conserver des ventes [54] .

[64] Tout compte fait, le Tribunal conclut que ces allégations sont crédibles et étayées, de façon raisonnable, compte tenu des informations limitées dont dispose la plaignante concernant les prix probables des marchandises en cause.

[65] En l’espèce, la concurrence a lieu au niveau commercial de la vente en gros. La comparaison de prix pertinente est donc entre le prix de gros de la plaignante et le prix de gros à l’importation, c’est-à-dire le prix offert aux détaillants par les producteurs nationaux ou les exportateurs des marchandises en cause. Selon la plainte, les détaillants sont habituellement les importateurs. Par conséquent, les prix à l’importation (et non les prix de détail) constituent l’étalon le plus exact pour comparer les prix, étant donné le niveau commercial auquel a lieu la concurrence. Toutefois, les prix de détail à l’importation que la plaignante a fournis pour chaque allégation propre à un client peuvent être utilisés pour tenter d’estimer des prix de gros à l’importation plausibles.

[66] Une fois de plus, on ne peut s’attendre, à cette étape-ci, à ce que la plaignante ait directement accès aux prix de gros à l’importation et fournisse des éléments de preuve concluants à cet égard. Étant entendu que les éléments de preuve versés au dossier seront nécessairement incomplets dans le cadre d’une enquête préliminaire de dommage et que ces allégations devront donc être examinées plus minutieusement dans le cadre d’une enquête définitive de dommage éventuelle, les éléments de preuve indiquent néanmoins ce qui suit :

  • Les prix de détail des marchandises en cause fournis par la plaignante pour les comparaisons propres à des modèles particuliers sont dans tous les cas inférieurs et dans la plupart des cas considérablement inférieurs aux prix de détail des produits similaires de la plaignante. Cela indique que les prix de gros à l’importation sous-jacents sont aussi considérablement inférieurs aux prix de gros des produits similaires de la plaignante. En effet, on peut s’attendre à ce qu’un détaillant agissant de façon rationnelle et cherchant à optimiser ses bénéfices vise des marges brutes semblables, quel que soit le fournisseur.
  • Selon les éléments de preuve présentés par la plaignante [55] , il y a un grand écart entre ses prix de gros et les prix de détail correspondants pour ses produits. Cela indique que, dans cette industrie, la majoration des prix de gros pratiquée par les détaillants est considérable.
  • Aucun élément de preuve n’indique que les majorations des détaillants au-delà des prix de gros à l’importation des marchandises en cause différeraient ou seraient inférieures à celles ajoutées aux prix de gros de la plaignante pour obtenir les prix de détail des marchandises similaires de production nationale. En fait, certains éléments de preuve montrent que les majorations d’au moins un détaillant sont habituellement très élevées et se situent dans la même fourchette dans le cas des marchandises importées [56] .
  • Selon ces renseignements, il est raisonnable de déduire que, pour toutes les allégations de dommage propres à un client, les prix de gros à l’importation étaient considérablement inférieurs aux prix de détail à l’importation (après rajustement de ces derniers à la baisse pour tenir compte des majorations des détaillants qui ont apparemment cours dans cette industrie). Cette analyse indique, de façon raisonnable, que les prix de gros à l’importation étaient inférieurs aux prix de gros de la plaignante dans tous les cas.
  • En bref, les renseignements versés au dossier indiquent que, comme l’allègue la plaignante, dans les cas où des éléments de preuve montrent qu’il y a eu une concurrence directe au niveau de clients particuliers, les prix de gros à l’importation ont entraîné une sous-cotation des prix de gros nationaux et souvent par une marge importante.
  • Il y a même certains cas où les prix de détail à l’importation sont inférieurs au prix de gros de la plaignante [57] . Dans d’autres cas, les prix de détail à l’importation se rapprochent des prix de gros de la plaignante, bien qu’ils soient supérieurs. Cela est une indication d’une sous-enchère importante au niveau commercial où se livre la concurrence.

[67] Par conséquent, les renseignements disponibles sur les prix de détail des marchandises en cause, lorsqu’ils sont examinés en tenant compte des autres renseignements versés au dossier, appuient la position de la plaignante selon laquelle les prix à l’importation entraînent une sous‑cotation marquée des prix de gros qu’elle offre à ses clients détaillants.

[68] La plaignante a également fourni, relativement à certaines allégations, des éléments de preuve confidentiels concernant le prix rendu au « débarquement » des marchandises en cause auquel elle livrait concurrence ou concernant les prix de gros des produits nationaux et importés comparables [58] . Ces informations confirment l’analyse ci-dessus et constituent des éléments de preuve documentaires d’une sous‑enchère.

[69] Ayant examiné les éléments de preuve au dossier, le Tribunal conclut qu’il y a une indication raisonnable d’une importante sous-cotation et d’une baisse de prix causées par les marchandises en cause sur le marché canadien. Dans l’ensemble, les éléments de preuve appuient les observations de la plaignante selon lesquelles, en raison de l’offre de marchandises sous-évaluées et subventionnées provenant de la Chine et du Vietnam, elle a réduit ses prix pour réaliser des ventes auprès des détaillants ou perdu des ventes.

Incidence sur la branche de production nationale

[70] Dans le cadre de son analyse en vertu de l’alinéa 37.1(1)c) du Règlement, le Tribunal tient compte de l’incidence des marchandises sous-évaluées ou subventionnées sur la situation de la branche de production nationale et, plus précisément, de tous les facteurs et indices économiques pertinents influant sur cette situation.

[71] Lors d’une enquête préliminaire de dommage, le Tribunal doit déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, l’existence d’un lien de causalité entre le dumping ou le subventionnement des marchandises en cause et le dommage subi selon l’incidence qu’a sur la branche de production nationale le volume des marchandises sous-évaluées ou subventionnées et l’effet de ces marchandises sur les prix. Le critère qui s’applique consiste à se demander si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping ou le subventionnement des marchandises en cause a, à lui seul [59] , causé un dommage.

[72] La plaignante allègue que les marchandises en cause ont causé un dommage sensible à la branche de production nationale sous forme d’une sous-cotation et d’une baisse des prix, d’une perte de ventes et de parts de marché, d’une sous-utilisation de sa capacité et d’effets négatifs sur ses résultats financiers et son rendement sur le capital investi.

[73] Le Tribunal a examiné les éléments de preuve versés aux dossiers public et confidentiel par la plaignante à la lumière des facteurs pertinents. Il ressort de la jurisprudence du Tribunal que lorsque les producteurs nationaux sont en concurrence avec des importations sous-évaluées ou subventionnées, ils peuvent décider de maintenir leur part de marché en réduisant leurs prix et que cette réduction de prix peut causer un dommage :

Ce n’est qu’à un coût considérable qu’elle a pu maintenir ses volumes de ventes. Sa force sur le marché avait été ses prix moindres, mais elle a dû les baisser encore davantage pour maintenir sa part du marché, ce qui a eu un effet négatif considérable sur son rendement financier. [60]

[74] En l’espèce, la force de la plaignante sur le marché semble être ses produits d’une plus grande valeur [61] . Les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, qu’elle a été contrainte de baisser ses prix pour maintenir sa part de marché dans ce segment en raison d’une concurrence accentuée des produits chinois et vietnamiens à bas prix de qualité comparable.

[75] Par exemple, le témoin de la plaignante a affirmé que, à partir de 2018, Palliser a tenté de faire concurrence aux importations de marchandises en cause pour la clientèle des grands détaillants au Canada. Il a affirmé que ces grands détaillants exigeaient tous des prix concurrentiels par rapport aux bas prix des importations, mais qu’ils exigeaient aussi une livraison locale rapide, alors que les produits importés d’Asie arrivaient en trois à quatre mois par porte-conteneurs [62] .

[76] En outre, il a indiqué que les concessions de prix que la plaignante a faites pour garder un grand détaillant comme client a donné lieu à une marge insoutenable qui l’a finalement forcée à résilier l’accord d’approvisionnement conclu avec ce détaillant [63] . D’autres éléments de preuve montrent que ce n’est qu’en réduisant ses marges auprès de ses clients que la plaignante a apparemment réussi à garder une part de marché [64] .

[77] Selon les renseignements disponibles à cette étape-ci, l’effet négatif de cette perte de ventes et de recettes sur le rendement financier de la plaignante peut donc, de façon raisonnable, être attribué aux marchandises en cause. À titre d’exemple, le coût considérable supporté par la plaignante se manifeste dans la diminution de sa marge brute sur les ventes intérieures de la production nationale [65] . Les renseignements financiers fournis montrent aussi une détérioration du bénéfice net.

[78] En résumé, les données confidentielles et les tendances relatives au rendement financier de la plaignante révèlent, de façon générale, que les importations des marchandises en cause ont eu une incidence négative [66] . Le Tribunal est convaincu à cette étape-ci que ces informations témoignent de la situation de la branche de production nationale dans son ensemble, puisque la production de la plaignante représente une proportion suffisante de la production collective nationale de marchandises similaires. L’enquête définitive de dommage du Tribunal (si l’ASFC rend une décision provisoire de dumping ou de subventionnement) permettra de dresser un portrait plus complet et plus exact de la situation de la branche de production nationale dans son ensemble.

[79] La plaignante a aussi présenté des éléments de preuve confidentiels concernant une stratégie qu’elle a dû mettre en œuvre afin de faire concurrence aux marchandises en cause et de survivre financièrement [67] . Selon le Tribunal, ces éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que les marchandises en cause ont déjà eu des répercussions négatives graves sur la production nationale de marchandises similaires. En outre, ils appuient les observations de la plaignante selon lesquelles, si les tendances dommageables actuelles se poursuivent, l’existence même des producteurs canadiens de marchandises similaires serait menacée [68] .

[80] Enfin, certains éléments de preuve montrent qu’en raison de l’incidence négative des marchandises en cause, la plaignante a vu diminuer l’utilisation de sa capacité et son rendement sur le capital investi [69] .

[81] Après avoir examiné tous les éléments de preuve versés au dossier, le Tribunal conclut qu’ils fournissent une indication raisonnable que la branche de production nationale a subi un dommage sensible. Plus particulièrement, les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, une perte de ventes et une diminution des résultats financiers.

[82] De plus, les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, l’existence d’un lien de causalité entre l’augmentation marquée du volume des importations de marchandises en cause et la sous-cotation du prix des marchandises similaires de production nationale en raison de ces importations, d’une part, et la dégradation du rendement économique de la branche de production nationale de 2017 à 2019, d’autre part. Si une enquête définitive de dommage est menée, le Tribunal déterminera si d’autres facteurs ont contribué à la dégradation du rendement économique de la branche de production nationale [70] .

[83] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage sensible à la branche de production nationale.

MENACE DE DOMMAGE

[84] Compte tenu de la conclusion selon laquelle il y a une indication raisonnable que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage, le Tribunal n’examinera pas, pour des raisons d’économie judiciaire, la question de savoir s’il existe une indication raisonnable que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause menace de causer un dommage.

OPINION CONCORDANTE ADDITIONNELLE DE GEORGES BUJOLD, MEMBRE PRÉSIDANT, CONCERNANT LES EXCLUSIONS DE PRODUITS

  • [85] Compte tenu des faits de l’espèce, je conviens avec ma collègue qu’il n’y a aucun motif probant permettant de donner suite à la demande d’exclusion de produits d’Arozzi à cette étape-ci. Cependant, je considère aussi qu’il y a un autre fondement, encore plus convaincant, pour ne pas accorder d’exclusions de produits lors d’une enquête préliminaire de dommage. En bref, l’évolution récente de la jurisprudence semble indiquer que, en droit, le Tribunal n’a pas le pouvoir discrétionnaire d’accorder des exclusions de produits à cette étape-ci.

  • [86] Dans sa récente décision dans Fluor Canada Ltd. [71] , la Cour d’appel fédérale a laissé entendre que le Tribunal n’a pas le pouvoir d’accorder des exclusions de produits dans une enquête préliminaire de dommage. La Cour a indiqué que le pouvoir d’accorder des exclusions de produits est conféré au Tribunal en vertu du paragraphe 43(1) de la LMSI, qui lui permet de déclarer, à la conclusion d’une enquête définitive de dommage menée aux termes de l’article 42, « quelles marchandises font l’objet de ses conclusions » [traduction]. La Cour a ajouté ce qui suit : « Aux termes de cette disposition, le Tribunal a l’autorisation implicite d’accorder des demandes d’exclusion pour des marchandises en particulier qui ne causeront pas de dommage » [72] [traduction].

  • [87] Il n’y a aucune disposition habilitante semblable dans le cadre d’une enquête préliminaire de dommage menée aux termes du paragraphe 34(2) de la LMSI. À cette étape, le mandat du Tribunal semble se limiter à trancher la question étroite de savoir si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping ou le subventionnement des marchandises en cause, telles qu’elles sont définies par l’ASFC, a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage. Comme dans le cas de la présente enquête préliminaire de dommage, lorsqu’il n’y a qu’une seule catégorie de marchandise et que le Tribunal a déterminé que les éléments de preuve révèlent une telle indication raisonnable, je ne vois pas quelle disposition de la loi lui conférerait le pouvoir d’accorder des demandes d’exclusion de certaines marchandises visées par la définition du produit.

  • [88] Par conséquent, le Tribunal ne semble pas avoir le pouvoir de préciser quelles marchandises en particulier font l’objet de sa décision, un pouvoir qu’il a, de toute évidence, dans une enquête définitive de dommage. Étant donné cette différence dans le cadre législatif entre une enquête préliminaire et une enquête définitive de dommage, il est loin d’être certain que, à ce stade précoce, la LMSI donne l’autorisation implicite au Tribunal d’accorder des demandes d’exclusion de marchandises en particulier comprises dans l’univers des marchandises en cause définies par l’ASFC, comme elle le fait dans le cadre d’une enquête définitive de dommage.

[89] Par conséquent, je considère comme étant erronées les décisions antérieures du Tribunal qui supposent, sans discuter du cadre législatif ni désigner une disposition habilitante, qu’il y a une autorisation implicite d’accorder des demandes d’exclusion de marchandises en particulier dans le cadre d’une enquête préliminaire de dommage. Je suis d’avis que ces causes ne font plus jurisprudence sur cette question, surtout en raison du doute soulevé quant à la compétence du Tribunal à cet égard par les récentes directives formulées par la Cour d’appel fédérale. Pour ces motifs, je conclus qu’il serait tout à fait inapproprié de traiter les demandes d’exclusion à ce stade.

CONCLUSION

[90] Compte tenu de l’analyse qui précède, le Tribunal détermine que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale.

Georges Bujold

Georges Bujold
Membre présidant

Cheryl Beckett

Cheryl Beckett
Membre

OPINION DISSIDENTE DE PETER BURN, MEMBRE

[91] Je rédige cette opinion dissidente sachant que mes collègues ont déterminé que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage, permettant ainsi à la procédure de passer à l’étape de la décision définitive de dommage. À ce titre, je reconnais que ma situation ressemble à celle d’un quart-arrière qui sait qu’il peut tenter une longue passe puisqu’il bénéficie d’un jeu gratuit signalé par le jet d’un drapeau jaune indiquant un hors-jeu défensif.

[92] Je vais tenter le coup.

Au sujet de la définition du produit

[93] Les lecteurs d’un certain âge se souviendront de la scène du restaurant dans le film Cinq pièces faciles, où le personnage joué par Jack Nicholson (qui se nomme Bobby Dupea) désire une omelette avec des toasts de blé entier. Mais comme les toasts ne figurent pas au menu et que le restaurant a pour politique « aucune substitution », « Bobby » cherche à obtenir des toasts en commandant un sandwich grillé à la salade de poulet, sans beurre, ni mayonnaise, ni laitue, ni poulet. Après une confrontation avec la serveuse, il est expulsé du restaurant pour ses tentatives.

[94] Je soupçonne que si les auteurs de la définition du produit dans Certains sièges rembourrés pour usage domestique avaient rédigé le scénario de Cinq pièces faciles, Bobby Dupea aurait obtenu et accepté des toasts de blé entier, mais les aurait ensuite renvoyés en cuisine pour que la croûte soit enlevée.

[95] Dans le régime canadien de recours commerciaux bifurqué, l’ASFC a le pouvoir exclusif de définir les marchandises importées faisant l’objet d’une enquête et de déterminer la marge de dumping et/ou le montant de la subvention. Le pouvoir conféré au Tribunal par la loi se limite à déterminer si l’importation des marchandises en cause, telles qu’elles sont définies par l’ASFC, a causé ou menace de causer un dommage sensible aux marchandises similaires produites au Canada.

[96] En l’espèce, l’ASFC a défini les marchandises en cause comme suit [73] :

Sièges rembourrés pour usage domestique, originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de la République socialiste du Vietnam, qu’ils soient mobiles (notamment inclinables, pivotants et autres) ou stationnaires, avec recouvrement en cuir (entier ou partiel), tissu (notamment cuir synthétique) ou les deux, y compris canapés, fauteuils, causeuses, canapés lits, lits de repos, futons, ottomans, tabourets et sièges de cinéma maison.

Sont exclus les :

  • g) sièges stationnaires (c.‑à‑d. non mobiles) rembourrés en tissu uniquement (plutôt qu’en cuir), même si le tissu est un cuir synthétique (polyuréthane ou vinyle similicuir ou imitation cuir);

  • h) chaises ou banquettes (avec ou sans bras) destinées à être utilisées dans la salle à manger, souvent jumelées avec des ensembles de table de salle à manger;

  • i) tabourets rembourrés dont le siège est à plus de 24 pouces de hauteur (de type bar ou comptoir), avec ou sans dossier, et/ou pliables;

  • j) sièges destinés à être utilisés à l’extérieur (p. ex. chaises de patio ou balançoires);

  • k) sièges‑sacs; et

  • l) sièges pliables ou empilables.

Il est entendu que la définition du produit comprend les :

  • f) sièges mobiles rembourrés, inclinables, pivotants, à bascule, « zéro gravité », coulissants, avec appuie‑tête réglable, fonctions de massage ou fonctions similaires;

  • g) sièges dont le cadre est fabriqué en métal, bois ou les deux;

  • h) sièges produits en modules ou parties de modules;

  • i) sièges avec ou sans bras, qu’ils fassent partie de modules ou non; et

  • j) repose-pieds et tabourets de pied (avec ou sans rangement).

[97] Le Tribunal n’a pas le pouvoir de modifier la définition du produit de l’ASFC. Cependant, cette absence de pouvoir conféré par la loi ne l’empêche pas de faire des observations.

[98] Le Tribunal est confronté à deux grands défis dans le cadre de l’enquête dans « Certains sièges rembourrés pour usage domestique ». Le premier est la décision de l’ASFC de limiter les marchandises en cause visées par la définition du produit aux sièges essentiellement pour usages domestiques, selon la définition énoncée dans la jurisprudence du Tribunal concernant les tarifs douaniers [74] . Le second est la décision d’exclure sciemment les sièges stationnaires rembourrés en similicuir.

[99] Selon le récit présenté en l’espèce, au cours des 10 à 15 dernières années le mobilier à bas prix provenant principalement de la Chine a constamment acquis des parts du marché canadien de meubles bas de gamme, ce qui a contraint la plaignante à se réfugier dans le segment du marché haut de gamme. Plus récemment, le dumping et le subventionnement de meubles d’une qualité toujours plus élevée provenant de la Chine et du Vietnam permettent aux importations asiatiques de conquérir une plus grande part du marché haut de gamme, ce qui a pour effet de compromettre l’existence de la branche de production canadienne [75] .

[100] Les sièges importés qui approvisionnent le marché résidentiel haut de gamme entrent au Canada en étant classés aux fins du classement tarifaire à titre (i) de sièges servant principalement pour usages domestiques ou (ii) de sièges servant pour d’« autres » usages, ces derniers s’entendant essentiellement de sièges commercialisés principalement pour le marché commercial non résidentiel (hôtels, copropriétés, espaces de réception de commerces, etc.) ou destinés à la fois aux marchés commercial et résidentiel (haut de gamme) [76] .

[101] Il est relativement facile pour l’ASFC de distinguer au point d’entrée les sièges importés conçus principalement pour usages domestiques – les marchandises en cause – des sièges servant pour d’« autres » usages, en se fondant, entre autres, sur les documents pertinents concernant les plans d’affaires, les documents de conception et les documents promotionnels qui lui sont alors remis. Le bon sens veut que ces classements tarifaires distincts des sièges pour usages « domestiques » par rapport aux sièges pour « autres » usages et les données fragmentées sur les importations qui en découlent aient influé sur l’élaboration de la définition du produit, y compris sur l’exclusion de cette définition de certains produits (comme les chaises rembourrées destinées à être utilisées dans la salle à manger, les tabourets rembourrés de type bar et les chaises de patio) qui sont souvent conçus pour être utilisés dans des établissements commerciaux et comme produit haut de gamme dans des résidences privées.

[102] Ce qui est pratique pour l’ASFC lors de la collecte de données sur les importations ne l’est pas nécessairement pour le Tribunal dans son enquête de dommage. Pour évaluer le dommage, le Tribunal doit désigner les marchandises de production nationale qui constituent des « marchandises similaires » par rapport aux marchandises en cause. Ce faisant, il cherche à appliquer le principe de la portée coextensive de l’OMC en s’assurant que les marchandises similaires produites au Canada reflètent les marchandises en cause décrites dans la définition du produit de l’ASFC [77] .

[103] Il est beaucoup plus difficile de faire la distinction entre les « marchandises similaires » de jure fabriquées au Canada qui sont prévues pour usages domestiques et les marchandises semblables de facto prévues pour usages à la fois dans les marchés commercial et résidentiel haut de gamme. Pourtant, c’est ce que le Tribunal doit tenter de faire suite à la décision de l’ASFC de limiter la définition du produit aux sièges servant principalement pour un usage domestique. Sinon, le Tribunal pourrait surévaluer les ventes nationales de marchandises similaires réalisées par les producteurs canadiens. Le personnel du Secrétariat du Tribunal devra être créatif pour obtenir les renseignements dont il aura besoin s’il veut évaluer adéquatement la dynamique de marché du segment résidentiel haut de gamme.

[104] Un grand défi auquel fait face le Tribunal dans son analyse du dommage est la manière de traiter l’exclusion des sièges destinés à la fois aux marchés commercial et résidentiel des « marchandises en cause » et des « marchandises similaires ». Un autre défi est l’exclusion explicite des sièges stationnaires (c’est-à-dire non mobiles) rembourrés en cuir synthétique (plutôt qu’en « cuir véritable »).

[105] La plaignante soutient, et le Tribunal en convient, que les marchandises visées par la définition du produit représentent un « continuum de marchandises similaires » [traduction] qui constituent une seule catégorie de marchandise [78] . On pourrait aussi soutenir que ce continuum de marchandises similaires englobe un continuum de marchandises identiques recouvertes de différents types de cuir et de similicuir.

[106] Aux fins de sa définition du produit, l’ASFC a expliqué ce qui suit :

En particulier, le matériau de couverture en cuir ou similicuir peut contenir les matériaux suivants :

  • (a) Cuir : Le cuir véritable est connu dans le commerce comme le cuir « côté fleur » [79] . La surface extérieure de la peau reçoit un traitement de finition variable, mais conservant son caractère original.

  • (b) Cuir fendu : Le cuir traité en tannerie est normalement fendu pour obtenir une couche extérieure et une deuxième couche appelée « refente ». Il s’agit de cuir véritable auquel on donne une surface manufacturée. Le cuir fendu a une structure moins solide, il est moins cher, et il peut être utilisé sur les côtés ou le dos de meubles, où la solidité n’est pas un facteur.

  • (c) Bycast : Le cuir fendu est recouvert d’une pellicule de matière plastique quelconque pour lui donner l’aspect recherché et une surface plus durable.

  • (d) Cuir reconstitué : Il s’agit d’un cuir synthétique, comme le polyuréthane, au dos duquel sont collées des dérayures du cuir. Les dérayures ne peuvent être ni vues ni palpées, et ajoutent très peu au coût par rapport à un substitut de cuir véritable. Elles sont utilisées dans le cadre d’une stratégie de commercialisation visant à permettre l’emploi du mot « cuir ».

  • (e) Leather‑match : Il s’agit d’un produit rembourré qui combine cuir véritable ou « côté fleur » et cuir synthétique comme le vinyle ou le polyuréthane. Le cuir est normalement utilisé sur les surfaces pouvant être touchées par le consommateur, ou plus visibles, tandis que le cuir synthétique est fabriqué de manière à ressembler le plus possible au cuir véritable, et est utilisé sur le côté ou le dos du produit. Puisque cette combinaison permet de réduire le coût, les produits « leather‑match » se vendent généralement moins cher que les produits comparables uniquement en cuir.

  • (f) Cuir synthétique : Les matériaux de couverture sont le polyuréthane, le vinyle ou d’autres produits chimiques, ils peuvent prendre la forme d’une toile ou d’un tissu et, dans tous les cas, ils sont conçus pour reproduire l’aspect tactile ou visuel du cuir. Les produits en cuir synthétique sont normalement moins chers que les produits comparables uniquement en cuir [80] .

[107] Dans le cadre de la définition du produit, et nonobstant la reconnaissance par l’ASFC que la plupart des clients ne peuvent facilement faire la distinction entre les divers types de marchandises en « cuir véritable » et en similicuir [81] , l’ASFC a déterminé que toutes les marchandises énumérées ci‑dessus sont en « cuir », sauf les marchandises en cuir synthétique (aussi appelé « similicuir »).

[108] La création d’une ligne de démarcation entre les marchandises « leather-match » et les marchandises en similicuir est particulièrement intéressante compte tenu de l’argumentation (réussie) des conseillers juridiques de la plaignante selon laquelle les marchandises constituent une seule catégorie, le principal facteur regroupant les marchandises dans un continuum de marchandises constituant une seule catégorie étant « leur utilisation finale primaire, qui est de s’asseoir dans un domicile » [traduction], et les autres facteurs (comme le tissu) étant « secondaires par rapport à leur utilisation finale primaire » [82] [traduction]. Pourquoi donc exclure du continuum les sièges stationnaires rembourrés en similicuir, alors que les mêmes cadres rembourrés en tissu « leather-match » impossibles à distinguer sont inclus?

[109] Cette exclusion laisse un trou béant dans le « continuum de marchandises en cause et de marchandises similaires » qui pourrait empêcher le Tribunal de comprendre les tendances du marché et le degré de concurrence entre les sièges stationnaires rembourrés en cuir synthétique (qu’ils soient importés ou fabriqués au Canada) et les sièges, qu’ils soient stationnaires ou mobiles, rembourrés avec un des divers types de « cuir véritable » définis par l’ASFC.

Au sujet des catégories de marchandise et des exclusions

[110] Il est à noter que le manque d’éléments de preuve à l’étape préliminaire d’une enquête a contraint le Tribunal à s’abstenir, à cette étape-ci, de diviser une seule catégorie de marchandises similaires en plusieurs catégories de marchandises similaires. Le Tribunal a plutôt décidé de laisser présager la création éventuelle de différentes catégories en formulant ses questions aux entreprises en termes de catégories « probables ou possibles » [83] . Ce faisant, le Tribunal peut éviter une impasse éventuelle frustrante, dans laquelle il ne pourrait diviser les marchandises similaires en plusieurs catégories en raison d’éléments de preuve imprécis.

[111] À cette fin, le Tribunal a tenu une téléconférence avec les parties intéressées le 27 janvier 2021 pour discuter de la question des catégories de marchandise. Durant cette téléconférence préalable à l’audience, certaines parties ne se sont pas arrêtées à cette question et ont demandé des exclusions de marchandises en particulier, la plaignante ayant indiqué qu’elle consentait à l’exclusion des « futons et lits de repos constitués d’un matelas et d’un cadre externe non fixé » [traduction], des « ottomans rembourrés en tissu avec rangement » [traduction] et des « meubles rembourrés en tissu en pièces détachées à assembler » [traduction] [84] . La plaignante a aussi indiqué précédemment, dans des observations écrites, qu’elle consentait à l’exclusion des « fauteuils de jeu pour utilisation avec un bureau » [85] [traduction].

[112] L’auteur constate avec plaisir que l’ASFC a déjà fourni des éclaircissements sur le statut des « fauteuils de jeu pour utilisation avec un bureau » [86] . Il faut espérer que l’ASFC clarifiera le statut des autres marchandises décrites ci-dessus relativement à la définition du produit, car cela apportera non seulement aux producteurs canadiens concernés une prévisibilité sur le plan juridique, mais aidera aussi le Tribunal à organiser sa collecte de données.

Au sujet des éléments de preuve

[113] Le mandat du Tribunal en ce qui concerne une enquête préliminaire de dommage est énoncé au paragraphe 34(2) de la LMSI. Il prévoit que le Tribunal doit déterminer « si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping ou le subventionnement des marchandises [en cause] a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage ».

[114] L’expression « indiquent, de façon raisonnable » n’est pas définie dans la LMSI, mais elle est comprise comme signifiant que les éléments de preuve n’ont pas à être « concluants ou probants selon la prépondérance des probabilités » [87] [traduction]. La norme de preuve requise dans le cadre d’une enquête préliminaire de dommage est aussi moins élevée que celle qui s’applique lors d’une enquête définitive de dommage aux termes de l’article 42 de la LMSI [88] . En effet, à cette étape des procédures, le Tribunal ne dispose pas de tous les éléments de preuve, et ceux dont il dispose sont beaucoup moins détaillés que lors d’une enquête définitive de dommage.

[115] Toutefois, même si la norme de preuve requise est moins élevée, le Tribunal souligne de façon répétée que l’issue des enquêtes préliminaires de dommage ne doit pas être prise pour acquis [89] . Le Tribunal doit être satisfait que les éléments de preuve versés au dossier sont positifs et suffisants pour appuyer une décision provisoire de dommage ou de menace de dommage. Ces éléments de preuve doivent satisfaire aux exigences de la LMSI et concerner les facteurs pertinents du Règlement.

[116] Pour en arriver à sa décision provisoire de dommage, le Tribunal tient compte des facteurs de dommage et de menace de dommage énoncés à l’article 37.1 du Règlement, et – s’il conclut qu’il y a dommage ou menace de dommage – doit déterminer s’il y a un lien de causalité entre le dumping des marchandises et le dommage ou la menace de dommage.

[117] Dans le cadre de son analyse de dommage, le Tribunal doit tenir compte de l’incidence des marchandises sous-évaluées sur la situation de la branche de production nationale et, plus précisément, de tous les facteurs et indices économiques pertinents influant sur cette situation [90] . Le Tribunal doit aussi déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, l’existence d’un lien de causalité entre le dumping des marchandises en cause et le dommage subi [91] . Le critère qui s’applique est la question de savoir si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping des marchandises en question a, à lui seul [92] , causé un dommage.

[118] Dans son énoncé des motifs en date du 5 janvier 2021, l’ASFC a affirmé ce qui suit : « La nature du dommage subi est bien étayée pour ce qui est du volume des importations sous‑évaluées et subventionnées, de la perte de part du marché et de ventes, du gâchage et de la baisse des prix, des mauvais résultats financiers et de la réduction de l’utilisation de la capacité et du rendement des investissements [93] . »

[119] L’auteur n’est pas d’accord. Il est vrai qu’il y a une certaine indication de dommage, mais il y a lieu de douter que les marchandises importées rapportées par l’ASFC correspondent à la combinaison de marchandises vendues par la plaignante. La preuve prescrite concernant les volumes de marchandises en cause et de marchandises similaires est nettement insuffisante. Par conséquent, le manque de données fiables sur les volumes empêche une analyse des prix unitaires. Les comparaisons entre les prix des marchandises en cause et ceux des marchandises similaires ont été effectuées à différents niveaux commerciaux. Le personnel du Tribunal a calculé, au moyen des données sur le volume et la valeur fournies par l’ASFC dans son analyse confidentielle de la plainte, les valeurs unitaires à l’importation et a constaté que les prix moyens à l’importation sont nettement supérieurs aux prix de vente nationaux et n’indiquent pas une sous-cotation des prix moyens. Une grande importance a été accordée à la prétendue sous-cotation des prix à l’égard de clients individuels clés; pourtant, il y avait un manque d’exemples étayés, y compris une absence évidente de factures pour les marchandises en cause concernant la perte de ces clients clés – des factures que l’ASFC aurait pu obtenir et partager dans son analyse confidentielle de la plainte. En outre, il n’y a aucune donnée sur l’utilisation de la capacité ou l’emploi durant la période visée par l’enquête.

[120] La nature du dommage subi est bien étayée? Malheureusement, je ne suis pas d’accord. L’affirmation de l’ASFC semble plutôt être un énoncé pour la forme qui suit les étapes et présume de l’issue de l’enquête préliminaire.

[121] Bien que je comprenne très bien qu’il s’agit d’une branche de production complexe méconnue par l’ASFC et le Tribunal, je suis d’avis que la preuve prescrite présentée au Tribunal en l’espèce n’est pas suffisante pour indiquer, de façon raisonnable, que le dumping/subventionnement des marchandises en cause a, à lui seul, causé un dommage à la branche de production nationale. L’insuffisance des éléments de preuve découle en partie de la nature du commerce des meubles, mais également en partie d’une définition du produit astucieuse, mais inconsidérée.

[122] Trois derniers commentaires à prendre en considération.

[123] Premièrement, ce n’est pas la première fois que l’absence dans le cadre de la LMSI d’un rôle consultatif pour le Tribunal dans la formulation de la définition du produit entraîne des problèmes plus tard dans le processus de recours commerciaux – des problèmes qui nuisent souvent à la branche de production nationale. Et ce ne sera pas la dernière fois si aucun changement n’est apporté à la façon de procéder, en particulier si les parties plaignantes et l’ASFC ne commencent pas à porter plus attention aux problèmes que peut causer la définition des marchandises en cause quant à la détermination des marchandises similaires.

[124] Deuxièmement, il est temps de procéder à une réflexion sérieuse sur la façon de mener le processus d’exclusions et sur le moment de le faire. Cela importe particulièrement dans le contexte des réexamens relatifs à l’expiration, lorsque le Tribunal doit appliquer la même ancienne définition du produit à des circonstances et une conjoncture du marché différentes, nouvelles et qui évoluent souvent rapidement.

[125] Enfin, j’espère sincèrement que ces observations inciteront tous les intéressés dans le processus lié à la LMSI à ne pas présumer du succès du processus de recours commerciaux, mais plutôt à redoubler leurs efforts, à s’améliorer et à être plus circonspects dans l’avenir.

Peter Burn

Peter Burn
Membre

 



[1] L.R.C., 1985, ch. S-15 [LMSI].

[2] Comme la branche de production nationale est déjà établie, le Tribunal n’a pas besoin d’examiner la question du retard.

[3] Pièce PI-2020-007-05 à la p. 69.

[4] Ibid. à la p. 84.

[5] Ibid. à la p. 91.

[6] Ronald A. Chisholm Ltd. v. Deputy M.N.R.C.E. (1986), 11 CER 309 (FCTD) [en anglais seulement].

[7] Maïs-grain (10 octobre 2000), PI-2000-001 (TCCE) à la p. 5.

[8] En l’espèce, le Tribunal a tenu, de sa propre initiative, une téléconférence avec les participants afin de recueillir des éléments de preuve sur la question des catégories de marchandise. Toutefois, la portée de la téléconférence était limitée. Elle visait seulement à entendre le genre d’éléments de preuve que le Tribunal considère normalement lorsqu’il examine les questions de marchandises similaires et/ou de catégories de marchandise, y compris leurs caractéristiques physiques et leurs caractéristiques de marché. Les éléments de preuve concernant la question centrale de l’indication raisonnable de dommage ou de menace de dommage n’ont pas été discutés ni examinés durant la téléconférence.

[9] Voir par exemple Feuilles d’acier résistant à la corrosion (7 janvier 2020), PI-2019-002 (TCCE) au par. 12.

[10] Plaques de plâtre (19 janvier 2017), GC-2016-001 (TCCE) au par. 37.

[11] Conformément aux dispositions pertinentes de la LMSI, la conséquence, en vertu de la loi, d’une décision rendue par le Tribunal selon laquelle il y a une indication raisonnable de dommage ou de menace de dommage est la poursuite de l’enquête de dumping ou de subventionnement des marchandises en cause de l’ASFC ouverte antérieurement. En revanche, à la conclusion d’une enquête menée aux termes de l’article 42 de la LMSI, le Tribunal indique précisément quelles sont les marchandises visées par l’ordonnance ou les conclusions selon lesquelles un dommage sensible a été causé, y compris, le cas échéant, le fournisseur et le pays d’exportation (voir l’article 43).

[12] D.O.R.S./84-927 [Règlement].

[13] Voir par exemple Silicium métal (21 juin 2013), PI-2013-001 (TCCE) au par. 16 et les autres causes auxquelles il est fait référence dans ce paragraphe.

[14] L’ASFC a estimé qu’au cours de la période visée par son enquête de dumping, soit du 1er juin 2019 au 30 novembre 2020, les marchandises en cause avaient été sous-évaluées selon des marges substantielles : 35,85 p. 100 pour la Chine et 28,45 p. 100 pour le Vietnam, comme mentionné ci-dessus.

[15] Pièce PI-2020-007-09.01A au par. 20.

[16] Pièce PI-2020-007-02.01 aux p. 129, 144 et 145.

[17] MAAX Bath Inc. c. Almag Aluminum Inc., 2010 CAF 62 au par. 35; Modules muraux unitisés (3 mai 2013), PI‑2012-006 (TCCE) au par. 29.

[18] Voir Certains éléments d’acier de fabrication industrielle (25 mai 2017), NQ-2016-004 (TCCE) aux par. 46-48; Tubes en acier pour pilotis (4 juillet 2018), RR-2017-003 (TCCE) aux par. 30-33; Plaques de plâtre (20 août 2018), PI-2018-003 (TCCE) aux par. 32-34.

[19] Bien que le Tribunal reconnaisse l’existence d’éléments de preuve indiquant que les marchandises exclues de la définition du produit représentent une portion importante de l’ensemble du vaste marché national des sièges rembourrés, une analyse des résultats de la branche de production nationale effectuée en intégrant la production et la vente de telles marchandises irait à l’encontre de l’approche du Tribunal décrite précédemment à l’égard de la définition des marchandises similaires. Selon cette approche, la portée des marchandises similaires ne doit pas excéder celle des marchandises en cause. Toutefois, les arguments à l’appui d’une définition plus large des marchandises similaires pourraient faire l’objet d’un examen plus poussé dans l’éventualité d’une enquête aux termes de l’article 42 de la LMSI.

[20] Transcription de la téléconférence sur les catégories de marchandise [Transcription de la téléconférence] aux p. 28-32, 36-41 et 45-47.

[21] Voir par exemple Tôles d’acier au carbone et tôles d’acier allié résistant à faible teneur, laminées à chaud (12 août 2003), PI-2003-002 (TCCE) à la p. 5.

[22] Comme exposé ci-dessous, de l’avis du membre présidant, Georges Bujold, il n’est pas clair que le Tribunal dispose de ce pouvoir.

[23] Pièce PI-2020-007-02.01 aux p. 19-24 et 40.

[24] Ibid. aux p. 35-38.

[25] Bien qu’il semble que la plaignante ne produise pas de futons, elle fabrique des canapés-lits et des lits de repos, des marchandises ayant une utilisation finale semblable ou répondant à des besoins similaires des clients.

[26] Pour trancher les questions de marchandises similaires et de catégories de marchandise, le Tribunal tient généralement compte d’un certain nombre de facteurs, y compris les caractéristiques physiques des marchandises (comme leur composition et leur apparence) et leurs caractéristiques de marché (comme la substituabilité, les prix, les circuits de distribution, les utilisations finales et la question de savoir si elles répondent aux mêmes besoins des clients). Raccords de tuyauterie en cuivre (19 février 2007), NQ-2006-002 (TCCE) au par. 48.

[27] Dorel propose les catégories de marchandise suivantes : futons (meubles conçus pour dormir ou s’asseoir), lits de repos (meubles conçus pour dormir ou se détendre qui ne se plient pas et ne sont pas mobiles comme un futon) et mobilier prêt à monter (meubles qui sont expédiés en pièces détachées au consommateur et qui exigent un assemblage important). Le Tribunal souligne qu’il a été reconnu que ces catégories proposées n’englobent pas toutes les marchandises similaires.

[28] Wayfair propose les catégories de marchandise suivantes : les sièges rembourrés faits sur mesure pour usage domestique par opposition aux sièges pour usage domestique en stock, les sièges individuels (fauteuils inclinables, fauteuils berçants coulissants, berceuses, fauteuils stationnaires, fauteuils de jeu, fauteuils de massage et chaises longues), les sièges à plusieurs places (canapés, canapés modulables et sièges de cinéma maison), le mobilier destiné au coucher (canapés-lits, lits de repos et futons) et le mobilier complémentaire (ottomans, repose‑pieds, tabourets et banquettes pour la décoration, et mobilier de salle de jeux pour enfants).

[29] Tubes soudés en acier au carbone (20 août 2008), NQ-2008-001 (TCCE) au par. 45; Chaussures et semelles extérieures étanches (8 décembre 2000), NQ-2000-004 (TCCE) à la p. 9.

[30] Pièce PI-2020-007-09.01A aux par. 4-6.

[31] Pièce PI-2020-007-02.01 à la p. 17.

[32] Transcription de la téléconférence aux p. 19-21.

[33] Pièce PI-2020-007-02.01 à la p. 37.

[34] Transcription de la téléconférence à la p. 51.

[35] Par exemple Gluten de blé (13 octobre 2020), PI-2020-003 (TCCE) au par. 23.

[36] Comme indiqué ci-dessus, son témoignage appuie, en définitive, la position de la plaignante à plusieurs égards.

[37] Extrusions d’aluminium (17 mars 2009), NQ-2008-003 (TCCE) au par. 131.

[38] Japan Electrical Manufacturers Assoc. c. Canada (Tribunal antidumping), [1982] 2 CF 816 (C.A.F.).

[39] Stores vénitiens et lamelles en bois (20 juillet 2004), NQ-2003-003 (TCCE) aux par. 66-67.

[40] Rapport de l’Organe d’appel, CE – Éléments de fixation (Chine), WT/DS397/AB/R aux par. 415-416.

[41] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée) au par. 25.

[42] Fils d’acier galvanisés (22 mars 2013), PI-2012-005 (TCCE) au par. 40; Tôles d’acier résistant à la corrosion (2 février 2001), PI-2000-005 (TCCE) aux p. 5, 6.

[43] Voir par exemple Tôles fortes (27 juillet 2020), PI-2020-001 (TCCE) au par. 51.

[44] Les termes « minimal » et « négligeable » sont définis au paragraphe 2(1) de la LMSI.

[45] Pièce PI-2020-007-05 aux p. 16, 23.

[46] Voir par exemple Feuillards et tôles plats en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (17 août 2001), NQ-2001-001 (TCCE) à la p. 18; Chaussures étanches (25 septembre 2009), NQ-2009-001 (TCCE), note 28. Le Tribunal a reconnu que d’autres facteurs peuvent être pris en considération et qu’aucun facteur n’a à lui seul un poids déterminant. Voir Planchés laminés (16 juin 2005), NQ-2004-006 (TCCE) au par. 80.

[47] Pièce PI-2020-007-02.01 au par. 61.

[48] Pièce PI-2020-007-02.01 à la p. 47.

[49] Pièce PI-2020-007-02.01 aux p. 123-124.

[50] Pièce PI-2020-007-03.13 (protégée) aux p. 16-17.

[51] Comme mentionné ci-dessus, la plaignante est d’avis que les prix unitaires moyens ne sont pas significatifs dans cette branche de production.

[52] Dans le cadre d’une enquête future menée aux termes de l’article 42 de la LMSI, le Tribunal recueillera des données sur les importations au moyen de questionnaires et définira des produits de référence afin d’obtenir des données qui atténuent les problèmes éventuels concernant la combinaison de produits. À cette occasion, et bénéficiant de meilleures données, il se peut que les prix unitaires moyens à l’importation et les prix de vente moyens demeurent des indicateurs fiables pour examiner les conditions de concurrence sur le marché.

[53] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée) aux p. 95-97.

[54] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée) aux p. 130-143.

[56] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée) à la p. 138.

[57] Pièce PI-2020-007-02.01 au par. 467. Voir aussi pièce PI-2020-007-03.01 (protégée) aux p. 188-239.

[58] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée) aux par. 444-453, 478-479.

[59] Fils machine de cuivre (30 octobre 2006), PI-2006-002 (TCCE) aux par. 40, 43.

[60] Panneaux de béton (27 juin 1997), NQ-96-004 (TCCE) à la p. 9.

[61] Le témoin de la plaignante a indiqué que la majorité de ses ventes sont des sièges rembourrés pour usage domestique munis de mécanismes de mouvement. Pièce PI-2020-007-09.01A au par. 31.

[62] Ibid. au par. 19.

[63] Ibid. au par. 20.

[64] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée), annexes 10 et 11.

[65] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée), annexe 10.

[66] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée) aux p. 128-129.

[67] Pièce PI-2020-007-03.01 aux p. 121-122.

[68] À cet égard, des éléments de preuve indiquent que la concurrence étrangère à bas prix, notamment de la Chine, est une préoccupation majeure pour les fabricants de meubles au Canada et que Barrymore Furniture, un des plus grands fabricants de meubles dans l’est du Canada, a déclaré faillite en janvier 2020 et a été mise en liquidation. Pièce no 03.01 à la p. 157 et annexe 8.

[69] Pièce PI-2020-007-03.01 (protégée) à la p. 145.

[70] Le Tribunal fait remarquer que Dodd’s Furniture a soulevé certains facteurs autres que le dumping qui, selon elle, ont causé un dommage auto-infligé à la plaignante (comme des problèmes de qualité et une incapacité à approvisionner la clientèle en raison de ralentissements de production et de livraison). La plaignante a répondu en détail à ces allégations en présentant des éléments de preuve contraires et crédibles sous la forme d’une déclaration de témoin. Ce n’est qu’après la tenue d’une audience complète dans le cadre d’une enquête définitive de dommage que le Tribunal pourra évaluer l’incidence potentielle des facteurs allégués par Dodd’s Furniture.

[71] Fluor Canada Ltd. v. Supreme Group LP, 2020 FCA 58 [Fluor Canada Ltd.] [en anglais seulement].

[72] Fluor Canada Ltd. au par. 16.

[73] Pièce PI-2020-007-05 à la p. 69.

[74] Voir par exemple Jardin de Ville c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (8 mars 2019), AP‑2017-052 (TCCE).

[75] Pièce PI-2020-007-02.01 aux par. 548-549.

[76] Pièce PI-2020-007-05 aux par. 23-27. Voir aussi Mémorandum D10-15-30.

[77] Voir Certains éléments d’acier de fabrication industrielle (25 mai 2017), NQ-2016-004 (TCCE) aux par. 46-48; Tubes en acier pour pilotis (4 juillet 2018), RR-2017-003 (TCCE) aux par. 30-33; Plaques de plâtre (20 août 2018), PI-2018-003 (TCCE) aux par. 32-34.

[78] Pièce PI-2020-007-09.01 au par. 18; ci-dessus au par. 37.

[79] L’auteur ne croit pas que cette phrase soit correcte.

[81] Pièce PI-2020-007-05 au par. 32.

[82] Pièce PI-2020-007-09.01 au par. 23.

[83] Voir Contreplaqués décoratifs et autres contreplaquées non structuraux (10 août 2020), PI-2020-002 (TCCE) au par. 16; Barres d’armature pour béton (12 août 2014), PI-2014-001 (TCCE) au par. 41.

[84] Transcription de la téléconférence aux p. 28, 30, 32, 36-38, 41, 45-47.

[85] Pièce PI-2020-007-09.01 au par. 73.

[86] Pièce PI-2020-007-11 à la p. 1; pièce PI-2020-007-12 (protégée) à la p. 2.

[87] Ronald A. Chisholm Ltd. v. Deputy M.N.R.C.E. (1986), 11 CER 309 (FCTD) [en anglais seulement].

[88] Maïs-grain (10 octobre 2000), PI-2000-001 (TCCE) à la p. 5.

[89] Barres d’armature pour béton (12 août 2014), PI-2014-001 (TCCE) au par. 19.

[90] Voir l’alinéa 37.1(1)c) du Règlement.

[91] Voir le paragraphe 37.1(3) du Règlement.

[92] Plaques de plâtre (5 août 2016), PI-2016-001 (TCCE) au par. 44; Fils d’acier galvanisés (22 mars 2013), PI‑2012-005 (TCCE) au par. 75; Tubes en cuivre circulaires (22 juillet 2013), PI-2013-002 (TCCE) au par. 82.

[93] Pièce PI-2020-007-05 au par. 150.

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