Enquêtes de dommage antidumping

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Enquête préliminaire de dommage
no PI-2021-002

Certains châssis porte-conteneur

Décision rendue
le lundi 9 août 2021

Motifs rendus
le mardi 24 août 2021

 



EU ÉGARD À une enquête préliminaire de dommage, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, concernant :

CERTAINS CHÂSSIS PORTE-CONTENEUR

DÉCISION PROVISOIRE DE DOMMAGE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, a procédé à une enquête préliminaire de dommage afin de déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause (définies ci-après) ont causé un dommage ou un retard ou menacent de causer un dommage :

Châssis porte-conteneur et cadres de châssis porte-conteneur, finis ou non, assemblés ou non, quel que soit le nombre d’essieux, pour le transport de conteneurs ou d’autres charges utiles (y compris les charges utiles autonomes) dans les modes routier, maritime (roulier) et/ou ferroviaire, et certains sous-ensembles de châssis porte-conteneur originaires ou exportés de la République populaire de Chine.

Sont exclus :

a) les remorques à conteneur sec, c’est-à-dire les remorques dotées d’un espace de chargement entièrement clos qui se compose de parois latérales, d’un nez, d’un plancher et d’un plafond fixes et qui compte des panneaux articulés (portes) à l’arrière et parfois à des endroits précis sur les côtés, l’espace de chargement étant incorporé de façon permanente à la remorque même;

b) les remorques réfrigérées, c’est-à-dire les remorques dotées d’un espace de chargement entièrement clos qui se compose de parois latérales, d’un nez, d’un plancher et d’un plafond fixes et qui compte des panneaux articulés (portes) à l’arrière et parfois à des endroits précis sur les côtés, l’espace de chargement étant incorporé de façon permanente à la remorque même, et isolé, possédant des propriétés thermiques précises devant servir avec des systèmes de réfrigération autonomes; et

c) les remorques à plateau ou à plate-forme, c’est-à-dire les remorques qui se composent de bâtis principaux auto-porteurs et d’un pont ou d’un plancher de chargement uni, plat ou étagé, incorporé de façon permanente aux longerons et aux traverses de cadre de châssis et soutenu par eux.

Il est entendu que la définition du produit comprend : les marchandises en cause comprennent* les principaux sous-ensembles ci-dessous, complets ou presque, lorsqu’ils sont importés, achetés ou fournis avec les cadres de châssis porte-conteneur en cause, ou pour assemblage avec ceux-ci :

i) ensembles de train de roulement pour la connexion au cadre de châssis porte-conteneur, fixes ou coulissants vers l’avant et vers l’arrière, ou élevables et abaissables, pouvant contenir des composants de suspension et d’extrémité de roue, rattrapeurs d’usure, essieux, récepteurs de frein, goupilles de verrouillage, pneus et roues;

ii) ensembles de train d’atterrissage pour la connexion au cadre de châssis porte-conteneur, capables de soutenir le châssis porte-conteneur lorsqu’il n’est pas attelé à un tracteur; et

iii) ensembles de connexion au cadre de châssis porte-conteneur, ou à une de ses parties, comme les trains de type B et de type A, permettant de relier un châssis porte-conteneur à un chariot de conversion ou à un autre châssis porte-conteneur.

* Le Tribunal constate cette redondance dans le libellé de la décision rendue par le vice-président de l’Agence des services frontaliers du Canada (pièce PI-2021-002-02.09).

La présente enquête préliminaire de dommage fait suite à l’avis en date du 10 juin 2021, selon lequel le président de l’Agence des services frontaliers du Canada avait ouvert des enquêtes concernant les présumés dumping et subventionnement dommageables des marchandises susmentionnées.

Aux termes du paragraphe 37.1(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine par la présente que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage à la branche de production nationale.

Frédéric Seppey

Frédéric Seppey
Membre présidant

Susan D. Beaubien

Susan D. Beaubien
Membre

Randolph W. Heggart

Randolph W. Heggart
Membre

L’exposé des motifs sera publié d’ici 15 jours.


 

Membres du Tribunal :

Frédéric Seppey, membre présidant
Susan D. Beaubien, membre
Randolph W. Heggart, membre

Personnel de soutien :

Kalyn Eadie, conseillère juridique principale
Jessye Kilburn, conseillère juridique
Mark Howell, analyste principal
Thy Dao, analyste
Josée St-Amand, analyste

PARTICIPANTS :

 

Conseillers/représentants

Canadian Tire Corporation, Limited

Riyaz Dattu

CIE Manufacturing
Dongguan CIMC Vehicle Co., Ltd.
Groupe St-Henri (GSH)
Ocean Trailer/C Keay Investments

Carlota Claveron-Wilkins
Jesse Goldman
Matthew Kronby
Erica Lindberg
Jacob Mantle

Fédération démocratique de la métallurgie, des mines et des produits chimiques (Fédém)

Dany Caron

Max-Atlas Équipement International Inc.

Adelaide Egan
Peter Jarosz
Joshua Krane
Jonathan O’Hara
Chris Scheitterlein

Veuillez adresser toutes les communications à :

La greffière adjointe
Téléphone : 613-993-3595
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

[1] Le 20 avril 2021, Max-Atlas Équipement International Inc. (Max-Atlas) a déposé une plainte auprès de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) alléguant que le dumping et le subventionnement de certains châssis porte-conteneur et cadres de châssis porte-conteneur originaires ou exportés de la République populaire de Chine (Chine) (les marchandises en cause) ont causé ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale.

[2] Le 10 juin 2021, en réponse à la plainte de Max-Atlas, l’ASFC a ouvert des enquêtes sur le dumping et le subventionnement des marchandises en cause en vertu du paragraphe 31(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation [1] .

[3] À la suite de la décision de l’ASFC d’ouvrir les enquêtes, le Tribunal canadien du commerce extérieur a commencé son enquête préliminaire de dommage aux termes du paragraphe 34(2) de la LMSI pour déterminer si des éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale [2] . L’enquête préliminaire de dommage du Tribunal a commencé le 11 juin 2021.

[4] Le Tribunal a reçu des avis de participation d’Ocean Trailer/C Keay Investments, de CIE Manufacturing, de Groupe St-Henri, de Dongguan CIMC Vehicle Co., Ltd. (CIMC), de Canadian Tire Corporation, Ltd. et de la Fédération démocratique de la métallurgie, des mines et des produits chimiques. Malgré le dépôt d’avis de participation, aucune de ces entités n’a déposé d’éléments de preuve ou d’observations auprès du Tribunal afin de contester des aspects quant au fond de la plainte.

[5] Le 9 août 2021, aux termes du paragraphe 37.1(1) de la LMSI, le Tribunal a déterminé que des éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale. Les motifs de cette décision sont exposés ci-après.

DÉFINITION DU PRODUIT

[6] L’ASFC a défini les marchandises en cause comme suit [3] :

Châssis porte-conteneur et cadres de châssis porte-conteneur, finis ou non, assemblés ou non, quel que soit le nombre d’essieux, pour le transport de conteneurs ou d’autres charges utiles (y compris les charges utiles autonomes) dans les modes routier, maritime (roulier) et/ou ferroviaire, et certains sous-ensembles de châssis porte-conteneur originaires ou exportés de la République populaire de Chine.

Sont exclus :

a) les remorques à conteneur sec, c’est-à-dire les remorques dotées d’un espace de chargement entièrement clos qui se compose de parois latérales, d’un nez, d’un plancher et d’un plafond fixes et qui compte des panneaux articulés (portes) à l’arrière et parfois à des endroits précis sur les côtés, l’espace de chargement étant incorporé de façon permanente à la remorque même;

b) les remorques réfrigérées, c’est-à-dire les remorques dotées d’un espace de chargement entièrement clos qui se compose de parois latérales, d’un nez, d’un plancher et d’un plafond fixes et qui compte des panneaux articulés (portes) à l’arrière et parfois à des endroits précis sur les côtés, l’espace de chargement étant incorporé de façon permanente à la remorque même, et isolé, possédant des propriétés thermiques précises devant servir avec des systèmes de réfrigération autonomes; et

c) les remorques à plateau ou à plate-forme, c’est-à-dire les remorques qui se composent de bâtis principaux auto-porteurs et d’un pont ou d’un plancher de chargement uni, plat ou étagé, incorporé de façon permanente aux longerons et aux traverses de cadre de châssis et soutenu par eux.

Il est entendu que la définition du produit comprend : les marchandises en cause comprennent* les principaux sous-ensembles ci-dessous, complets ou presque, lorsqu’ils sont importés, achetés ou fournis avec les cadres de châssis porte-conteneur en cause, ou pour assemblage avec ceux-ci :

i) ensembles de train de roulement pour la connexion au cadre de châssis porte-conteneur, fixes ou coulissants vers l’avant et vers l’arrière, ou élevables et abaissables, pouvant contenir des composants de suspension et d’extrémité de roue, rattrapeurs d’usure, essieux, récepteurs de frein, goupilles de verrouillage, pneus et roues;

ii) ensembles de train d’atterrissage pour la connexion au cadre de châssis porte-conteneur, capables de soutenir le châssis porte-conteneur lorsqu’il n’est pas attelé à un tracteur; et

iii) ensembles de connexion au cadre de châssis porte-conteneur, ou à une de ses parties, comme les trains de type B et de type A, permettant de relier un châssis porte-conteneur à un chariot de conversion ou à un autre châssis porte-conteneur.

* Le Tribunal constate cette redondance dans le libellé de la décision rendue par le vice‑président de l’Agence des services frontaliers du Canada (pièce PI-2021-002-02.09).

DÉCISION DE L’ASFC D’OUVRIR LES ENQUÊTES

[7] L’ASFC a ouvert les enquêtes aux termes du paragraphe 31(1) de la LMSI, car elle était d’avis qu’il y avait des éléments de preuve indiquant que les marchandises en cause avaient fait l’objet de dumping et de subventionnement, ainsi que des éléments de preuve qui indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement avaient causé un dommage à la branche de production nationale.

[8] En utilisant les renseignements relatifs à la période choisie pour l’enquête de dumping, soit du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020, l’ASFC a estimé la marge de dumping à 39 p. 100, exprimée en pourcentage du prix à l’exportation [4] .

[9] En utilisant les renseignements relatifs à la même période choisie pour l’enquête de subventionnement, l’ASFC a estimé que le montant de subventionnement, exprimé en pourcentage du prix à l’exportation, était de 33 p. 100 [5] .

CADRE LÉGISLATIF

[10] Le paragraphe 34(2) de la LMSI énonce le mandat du Tribunal en ce qui concerne les enquêtes préliminaires de dommage. Il prévoit que le Tribunal doit déterminer « si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping ou le subventionnement des marchandises [en cause] a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage ».

[11] L’expression « indiquent, de façon raisonnable » n’est pas définie dans la LMSI, mais elle est comprise comme signifiant que les éléments de preuve n’ont pas à être « concluants ou probants selon la prépondérance des probabilités » [6] [traduction]. De plus, la norme de preuve requise par l’expression « indiquent, de façon raisonnable » est moins élevée que celle qui s’applique lors d’une enquête définitive de dommage menée aux termes de l’article 42 de la LMSI [7] . En effet, les éléments de preuve ne sont pas tous disponibles au stade de l’enquête préliminaire. Les éléments de preuve disponibles seront nettement moins détaillés et exhaustifs que les éléments de preuve soumis au cours d’une enquête définitive de dommage.

[12] Cependant, l’issue des enquêtes préliminaires de dommage ne doit pas être tenue pour acquise [8] . Le Tribunal doit être d’avis que les éléments de preuve au dossier sont positifs et suffisants afin d’appuyer une décision provisoire de dommage ou de menace de dommage. Ces éléments de preuve doivent répondre aux exigences de la LMSI et aux facteurs pertinents du Règlement sur les mesures spéciales d’importation [9] .

[13] Avant d’examiner les allégations de dommage ou de menace de dommage, le Tribunal doit d’abord déterminer quelles sont les marchandises similaires et la branche de production nationale qui les produit. Cette analyse préliminaire est nécessaire étant donné que le paragraphe 2(1) de la LMSI définit le terme « dommage » comme « [l]e dommage sensible causé à une branche de production nationale [10] » et l’expression « branche de production nationale » comme « l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires [...] ».

MARCHANDISES SIMILAIRES ET CATÉGORIES DE MARCHANDISES

[14] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » par rapport aux autres marchandises de la façon suivante :

a) marchandises identiques aux marchandises en cause;

b) à défaut, marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause ».

[15] Pour trancher la question des marchandises similaires et des catégories de marchandises [11] , le Tribunal tient généralement compte d’un certain nombre de facteurs, y compris les caractéristiques physiques des marchandises (comme leur composition et leur apparence) et leurs caractéristiques de marché (comme la substituabilité, les prix, les circuits de distribution, les utilisations finales et la question de savoir si elles répondent aux mêmes besoins des clients) [12] .

[16] Max-Atlas soutient qu’elle fabrique divers modèles de marchandises qui sont interchangeables avec les marchandises en cause et qu’il y a une seule catégorie de marchandises. L’ASFC a déterminé que les marchandises fabriquées au Canada portant la même description sont des marchandises similaires par rapport aux marchandises en cause et qu’il y a une seule catégorie de marchandises [13] .

[17] De l’avis du Tribunal, les éléments de preuve indiquent que les châssis fabriqués au Canada ne sont pas identiques à tous les égards aux marchandises en cause. La définition du produit et les renseignements additionnels sur le produit ne décrivent pas un seul type de produit, mais couvrent un éventail relativement vaste de produits comportant des caractéristiques physiques et des caractéristiques de marché similaires qui font en sorte qu’il est difficile de déterminer si les marchandises en cause et les marchandises similaires sont identiques à tous les égards [14] . Les marchandises en cause et les châssis fabriqués au Canada sont offerts dans un éventail de longueurs, de configurations et de caractéristiques afin de répondre à des besoins variés des clients.

[18] Cependant, le Tribunal conclut que l’utilisation et les caractéristiques des châssis fabriqués au Canada sont très proches de celles des marchandises en cause. Par conséquent, les châssis fabriqués au Canada sont des marchandises similaires aux marchandises en cause.

[19] Les documents promotionnels déposés au soutien de la plainte montrent que les châssis fabriqués au Canada et les marchandises en cause ont des fonctions et une utilisation très similaires ainsi que des caractéristiques similaires [15] . Les marchandises nationales, tout comme les marchandises en cause, servent à transporter des conteneurs (notamment des conteneurs intermodaux, des conteneurs maritimes et des générateurs d’énergie électrique, ainsi que d’autres conteneurs), peuvent accueillir des conteneurs de diverses longueurs (de 20 à 60 pieds) [16] , offrent un éventail de caractéristiques (telles que le nombre d’essieux, la capacité de basculement, l’extensibilité, la hauteur et d’autres) et sont fabriquées à partir de matériaux similaires [17] . Par conséquent, les marchandises nationales et les marchandises en cause sont interchangeables sur le plan des fonctions et des caractéristiques.

[20] De plus, les mêmes méthodes semblent être utilisées pour commercialiser les marchandises nationales et les marchandises en cause : ventes directes (Max-Atlas réalise des ventes directes en Ontario et au Québec, tandis qu’on rapporte que l’exportateur de marchandises en cause CIMC réalise des ventes directes principalement par l’entremise sa filiale américaine, CIE Manufacturing), réseaux de distribution, participation à des salons commerciaux, etc. [18] .

[21] Ces éléments de preuve ne sont pas contredits par des observations contraires puisqu’aucun mémoire en opposition à la plainte n’a été reçu. Par conséquent, le Tribunal est convaincu que les châssis fabriqués au Canada, y compris leurs sous-ensembles, sont des marchandises similaires par rapport aux marchandises en cause.

[22] Le Tribunal est également d’avis qu’il y a une seule catégorie de marchandises similaires. Bien que les longueurs, les configurations et les caractéristiques varient, les caractéristiques physiques et les caractéristiques de marché sont très similaires pour l’ensemble de l’éventail des châssis entrant dans la définition du produit [19] . Les différents modèles de châssis sont souvent interchangeables et la fonction de tous les modèles est le transport de conteneurs et de marchandises.

[23] Le Tribunal souligne également que la définition du produit inclut, outre les châssis porte‑conteneur et les cadres de châssis porte-conteneur, certains « principaux sous-ensembles [...], lorsqu’ils sont importés, achetés ou fournis avec les cadres de châssis porte-conteneur en cause, ou pour assemblage avec ceux-ci ». Les éléments de preuve présentés par Max-Atlas indiquent que les sous-ensembles servent généralement à fabriquer le châssis final et conservent les mêmes caractéristiques fondamentales après l’assemblage [20] . En substance, les sous-ensembles sont des composants discrets qui sont assemblés pour construire un châssis utilisable. En conséquence, les sous-ensembles de châssis non assemblés ont généralement la même fonction que les châssis entièrement assemblés, auxquels ils font concurrence. Après avoir pris en compte les éléments de preuve versés au dossier, le Tribunal conclut donc que les sous-ensembles ne forment pas une catégorie de marchandises distincte.

[24] En résumé, le Tribunal procédera à son analyse en partant du principe que les marchandises fabriquées au Canada qui entrent dans la définition du produit sont des marchandises similaires aux marchandises en cause et qu’il y a une seule catégorie de marchandises similaires.

BRANCHE DE PRODUCTION NATIONALE

[25] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit la « branche de production nationale » comme « l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires [...] ».

[26] Le Tribunal doit donc déterminer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, qu’un dommage a été causé ou menace d’être causé aux producteurs nationaux dans leur ensemble ou aux producteurs nationaux dont la production constitue une proportion majeure de la production collective nationale de marchandises similaires. L’expression « proportion majeure » s’entend d’une proportion importante, considérable ou notable de la production collective nationale de marchandises similaires, et pas forcément d’une majorité [21] .

[27] En s’appuyant sur les éléments de preuve présentés par Max-Atlas et confirmés ensuite par l’ASFC, le Tribunal considère que la branche de production nationale est composée des quatre producteurs suivants : Max-Atlas, Innovative Trailer Design, Di-Mond et Raja Trailer, qui fabriquent tous des châssis porte-conteneur au Canada. Max-Atlas est la seule partie plaignante, mais Innovative Trailer Design et Di-Mond ont déposé des lettres appuyant la plainte, tandis que Raja Trailer est demeurée neutre [22] .

[28] Bien que les volumes de production précis de chacune des entités constituant la branche de production nationale aient été désignés comme renseignements confidentiels, le Tribunal est convaincu que les quatre producteurs susmentionnés représentent la totalité de la production connue de marchandises similaires, selon les informations recueillies par l’ASFC [23] .

[29] Chacun des quatre producteurs a fourni à l’ASFC des données sur la production nationale, mais seule Max-Atlas a fourni des données financières à ce stade. Par conséquent, l’évaluation des effets sur le rendement financier de la branche de production nationale qui est présentée ci-après se limite aux données fournies par Max-Atlas.

[30] Le Tribunal s’attend à ce que des renseignements et des éléments de preuve supplémentaires sur la production, les ventes et le rendement de la branche de production nationale soient disponibles lors d’une enquête définitive.

CUMUL CROISÉ

[31] Conformément à sa jurisprudence, le Tribunal estime qu’il n’est ni nécessaire ni possible de dissocier les effets du dumping et les effets du subventionnement des marchandises provenant d’un seul pays [24] .

[32] Le Tribunal évaluera donc l’incidence du dumping et du subventionnement des marchandises de façon cumulative dans le cadre de la présente enquête préliminaire.

ANALYSE DE DOMMAGE

[33] Le Tribunal doit maintenant évaluer si les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, qu’il y a dommage ou menace de dommage, compte tenu du cadre établi ci-dessus et des facteurs prescrits à l’article 37.1 du Règlement.

Volume des importations de marchandises en cause

[34] Le Tribunal conclut que les éléments de preuve dont il dispose quant aux volumes des importations indiquent, de façon raisonnable, que le volume des importations de marchandises en cause a augmenté de façon marquée en quantité absolue. Aucune partie à la présente procédure n’a contesté ces éléments de preuve.

[35] Max-Atlas a estimé les importations de marchandises en cause à l’aide des données d’IHS Markit, de Statistique Canada et de la Coalition of American Chassis Manufacturers. Puisque les numéros tarifaires (codes du Système harmonisé) des châssis porte-conteneur regroupent également certains produits non visés par la plainte, Max-Atlas a fait des rajustements afin de soustraire ces marchandises.

[36] L’ASFC a réalisé sa propre analyse des importations de marchandises en cause à partir des données sur les importations, des documents de déclaration douanière et des renseignements commerciaux fournis par Max-Atlas. L’ASFC a rajusté ses données sur les importations tirées du SGER [25] à l’aide de documents de déclaration d’importation non accessibles à Max-Atlas [26] .

[37] Lors d’une enquête préliminaire, le Tribunal s’appuie sur les volumes des importations estimés par l’ASFC, puisque ceux-ci intègrent certaines informations auxquelles la partie plaignante n’a pas accès. Les volumes estimés par l’ASFC montrent que les importations de marchandises en cause ont augmenté de 13 p. 100 en 2018 par rapport à 2017 et, plus significativement, de 106 p. 100 en 2019 par rapport à 2018. Les volumes des importations de marchandises en cause ont ensuite diminué de 69 p. 100 en 2020 par rapport aux volumes de 2019 [27] .

[38] Le Tribunal souligne que les estimations de l’ASFC et les informations fournies par Max‑Atlas et d’autres producteurs nationaux montrent que le marché des châssis porte-conteneur a ralenti en 2020, les ventes de châssis de toutes sources, nationales et importées, ayant reculé [28] . Néanmoins, le Tribunal conclut que le volume des importations de marchandises en cause a progressé pendant la période présentée dans la plainte, l’augmentation annuelle moyenne des importations de 2017 à 2019 ayant été de 53 p. 100.

[39] Le Tribunal fait remarquer que les volumes des importations fournis par l’ASFC sont exprimés en unités et couvrent autant les châssis complets que les cadres et autres sous-ensembles. Par conséquent, il est possible que l’assortiment de produits et la façon dont les ensembles complets sont importés (entièrement assemblés ou sous forme de sous-ensembles multiples à assembler) viennent fausser les données sur les volumes provenant de différentes sources et sur les variations de volume d’une année à l’autre. Le Tribunal examinera cette question plus en détail dans le cadre d’une enquête définitive de dommage si l’ASFC rend des décisions provisoires de dumping et de subventionnement.

[40] Nonobstant les questions soulevées ci-dessus et en tenant compte de la norme de preuve requise au stade de l’enquête préliminaire, le Tribunal est suffisamment persuadé que les éléments de preuve dont il dispose indiquent, de façon raisonnable, une augmentation marquée du volume des marchandises en cause en quantité absolue.

[41] Le Tribunal conclut également que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, une augmentation marquée du volume des importations de marchandises en cause par rapport à la production et à la consommation de marchandises similaires. Pour évaluer ces deux mesures du volume relatif des importations, le Tribunal examine les variations du rapport entre les importations de marchandises en cause et la production nationale de marchandises similaires, ainsi que du rapport entre les importations de marchandises en cause et les ventes de marchandises similaires pendant la période présentée dans la plainte.

[42] Le Tribunal conclut que le volume relatif des importations des marchandises en cause a augmenté de façon marquée au cours d’une période relativement courte. Avant le fléchissement du marché en 2020, les deux ratios ont augmenté d’un point de pourcentage en 2018 et de 43 points de pourcentage en 2019. Même s’ils ont diminué en 2020, les ratios sont demeurés nettement plus élevés qu’en 2017 et ont presque doublé au cours de la période, malgré le recul du marché en 2020 [29] .

[43] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que les volumes des marchandises en cause ont augmenté de façon marquée, tant en quantité absolue que par rapport aux marchandises similaires.

Effets sur les prix des marchandises similaires

Sous-cotation des prix

[44] Max-Atlas allègue que les prix des marchandises en cause ont mené à la sous-cotation des prix des marchandises similaires fabriquées au Canada. Elle a fourni des exemples concernant certains de ses clients où il y a eu sous-cotation causée par les marchandises en cause ainsi qu’une estimation de la sous‑cotation s’appuyant sur le prix moyen des marchandises en cause.

[45] Bien que Max-Atlas ait fourni une estimation du prix unitaire moyen des importations qui est fondée sur les données de Statistique Canada, le Tribunal s’appuiera sur l’analyse des prix unitaires moyens des importations réalisée par l’ASFC, qui s’est servie de données commerciales plus précises auxquelles Max-Atlas n’avait pas accès [30] . Ces éléments de preuve révèlent un écart important entre le prix des marchandises similaires de production nationale et celui des marchandises en cause.

[46] Pendant la période de 2017 à 2020, les prix des marchandises en cause étaient beaucoup plus bas que ceux des marchandises similaires fabriquées au Canada, la sous-cotation la plus marquée s’étant produite en 2019. Malgré le resserrement de cet écart en 2020, les prix des marchandises en cause sont demeurés nettement inférieurs à ceux des marchandises similaires de production nationale [31] .

[47] À la lumière de ces éléments de preuve et en l’absence d’éléments de preuve contraires ou d’observations de parties opposées à la plainte, le Tribunal est persuadé que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que les marchandises en cause ont mené à une sous-cotation marquée du prix des marchandises similaires de production nationale.

Baisse des prix

[48] Il y a baisse des prix lorsque les prix des marchandises similaires diminuent en raison de la présence des importations de marchandises en cause.

[49] Les éléments de preuve fournis par Max-Atlas, sur lesquels l’ASFC s’est appuyée, indiquent que le prix de vente des marchandises similaires sur le marché national est demeuré assez stable durant la période et n’a affiché qu’une légère augmentation de 2017 à 2020 [32] .

[50] Max-Atlas a donné plusieurs exemples de cas où elle a dû abaisser ses prix pour obtenir des ventes [33] . Malgré ces exemples de concurrence par les prix, la seule période où le Tribunal observe une baisse du prix moyen des marchandises similaires vendues par Max-Atlas est en 2019, et la baisse fut modeste.

[51] Les éléments de preuve n’indiquent pas que le prix des marchandises similaires a baissé en raison de la présence des importations de marchandises en cause. Par conséquent, le Tribunal n’est pas convaincu que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que les marchandises en cause ont mené à une baisse marquée du prix des marchandises similaires.

Compression des prix

[52] Dans son évaluation visant à déterminer si les marchandises en cause ont mené à la compression du prix des marchandises similaires, le Tribunal compare habituellement le coût unitaire moyen des marchandises fabriquées ou le coût unitaire moyen des marchandises vendues par la branche de production nationale avec le prix de vente moyen de la branche de production nationale sur le marché national afin de déterminer si la branche de production nationale a été en mesure d’augmenter ses prix de vente en fonction de la hausse de ses coûts [34] .

[53] Les états financiers fournis par Max-Atlas indiquent que la valeur unitaire des marchandises similaires de production nationale est demeurée assez stable pendant la période de 2017 à 2020, la hausse n’ayant été que légère, alors que le coût unitaire des marchandises vendues a augmenté de façon plus marquée [35] .

[54] Les éléments de preuve fournis dans les états financiers de Max-Atlas sont étayés par les exemples fournis concernant certains de ses clients, qui montrent que sa capacité d’augmenter ses prix pour tenir compte de la variation de ses coûts de fabrication est extrêmement limitée et qu’elle n’a d’autre choix que d’absorber toute augmentation de ces coûts [36] . Max-Atlas a ajouté que si elle augmentait son prix à la hauteur de la hausse de ses coûts, elle ne pourrait faire concurrence aux marchandises en cause.

[55] Compte tenu de l’analyse qui précède et en l’absence d’observations contraires, le Tribunal est persuadé que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que les marchandises en cause ont mené à une compression marquée du prix des marchandises similaires en empêchant les augmentations de prix qui auraient autrement été attendues.

Incidence sur la branche de production nationale

[56] Dans le cadre de son analyse en vertu de l’alinéa 37.1(1)c) du Règlement, le Tribunal tient compte de l’incidence des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur la situation de la branche de production nationale et, plus précisément, de tous les facteurs et indices économiques pertinents influant sur cette situation [37] . Il est nécessaire de distinguer l’incidence de ces facteurs de celle de tout autre facteur influant sur la branche de production nationale [38] . L’alinéa 37.1(3)a) du Règlement exige que le Tribunal examine s’il existe un lien de causalité entre le dumping ou le subventionnement des marchandises et le dommage selon le volume des marchandises sous-évaluées ou subventionnées, l’effet de ces marchandises sur le prix et leur incidence sur la situation de la branche de production nationale.

Part de marché

[57] Les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que les marchandises similaires fabriquées au Canada ont perdu une part de marché au profit des marchandises en cause de 2017 à 2020 [39] , en particulier en 2019, année où la part de marché des marchandises en cause a augmenté de façon marquée pendant que celle de la branche de production nationale rétrécissait [40] .

[58] Bien que la branche de production nationale ait regagné en 2020 une partie de la part de marché qu’elle a perdue en 2019, elle ne l’a pas regagnée en entier. De plus, le Tribunal estime que les conditions engendrées par la pandémie de COVID-19 ont vraisemblablement nui au marché de façon importante, puisque le volume de l’ensemble du marché a également diminué de façon marquée en 2020, tout comme les volumes de marchandises fabriquées au Canada et de marchandises en cause, en quantités absolues. La tendance globale qui se dégage d’une comparaison entre 2017 et 2020 est que les marchandises en cause ont gagné environ 13 points de pourcentage de part de marché pendant que la branche de production nationale en perdait environ 12, malgré ses gains relatifs en 2020 [41] .

[59] Par conséquent, aux fins de la présente enquête préliminaire, le Tribunal est d’avis que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que les marchandises en cause ont créé un effritement de la part de marché de la branche de production nationale.

Déclin dans la production

[60] Les éléments de preuve indiquent aussi, de façon raisonnable, que la production de la branche de production nationale en quantité absolue a décliné : la production a diminué pendant la période de 2017 à 2019, en dépit d’une légère hausse en 2018, et a baissé de nouveau en 2020 [42] .

[61] En chiffres relatifs, le marché canadien total a affiché une croissance de 10 p. 100 de 2017 à 2018, alors que la production nationale totale destinée aux ventes nationales n’a augmenté que de 8 p. 100. Pendant une année de contraction du marché, le déclin en chiffres relatifs est plus marqué : le marché total s’est contracté de 3 p. 100 de 2018 à 2019, mais la production nationale destinée aux ventes nationales a chuté de 24 p. 100 [43] . Il y a ici une corrélation avec l’augmentation marquée de la part de marché des marchandises en cause de 2018 à 2019. En 2020, l’ensemble du marché canadien et la production nationale destinée aux ventes nationales ont affiché des reculs importants, mais le déclin sur l’ensemble du marché a été légèrement plus prononcé.

[62] Exception faite des effets de la pandémie en 2020, le Tribunal ne dispose d’aucun élément de preuve d’une partie opposée à la plainte indiquant que des facteurs autres que les marchandises en cause ont mené aux baisses de production des producteurs nationaux notées précédemment. Par conséquent, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, qu’il y a eu un déclin réel et/ou relatif dans la production en raison des importations de marchandises en cause de 2017 à 2019.

Déclin dans les ventes

[63] Étant donné la corrélation étroite entre la production nationale et les ventes nationales dans le cas des produits visés (du moins en ce qui concerne Max-Atlas, dont les données sur les exportations ont été fournies au Tribunal) [44] , le Tribunal est d’avis que les ventes nationales ont probablement suivi des tendances similaires à celles de la production nationale décrites précédemment.

[64] Les ventes nationales de la branche de production nationale ont chuté de 24 p. 100 en 2019 par rapport à 2018 [45] . Ce constat est en corrélation, là encore, avec une augmentation significative de la part de marché des marchandises en cause de 2018 à 2019.

[65] Max-Atlas a aussi donné des exemples précis de ventes qu’elle a perdues au profit de CIMC, même après avoir abaissé ses prix [46] .

[66] En l’absence d’éléments de preuve montrant que d’autres facteurs pourraient avoir contribué à la baisse des ventes nationales de la branche de production nationale, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le déclin dans les ventes est attribuable à la présence des marchandises en cause.

Déclin dans les bénéfices

[67] Dans le contexte de la présente enquête préliminaire de dommage, le Tribunal dispose seulement des renseignements financiers de Max-Atlas, comme mentionné précédemment. Selon ces renseignements, la rentabilité de Max-Atlas a connu une baisse marquée de 2017 à 2019 [47] . Cette baisse s’est produite malgré l’augmentation des volumes dans l’ensemble du marché canadien de 2017 à 2018 et en parallèle avec une augmentation des volumes de marchandises en cause sur un marché national légèrement plus restreint en 2019.

[68] Le Tribunal fait remarquer que Max-Atlas a fourni des informations concernant d’autres facteurs qui pourraient avoir influé sur sa rentabilité en 2018 et en 2019 [48] . Cela dit, la présence accrue des marchandises en cause sur le marché canadien semble avoir été un facteur important et causal ayant mené à cette détérioration de la rentabilité de Max-Atlas, du moins en 2019. Par conséquent, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que la présence accrue de marchandises en cause sur le marché en 2019 coïncide avec un déclin dans les bénéfices de Max-Atlas qui est largement attribuable aux marchandises en cause.

Emplois

[69] Max-Atlas soutient que ses effectifs ont diminué en raison des marchandises en cause [49] . Après avoir examiné cet élément de preuve, le Tribunal conclut que celui-ci indique, de façon raisonnable, que Max-Atlas a connu une baisse de ses effectifs, même avant le début de la pandémie de COVID-19, et que cette baisse coïncide avec une augmentation importante de la présence des marchandises en cause en 2019 [50] .

Croissance

[70] Max-Atlas soutient que les marchandises en cause l’empêchent de prendre de l’expansion dans l’Ouest canadien, faute d’intérêt de la part des revendeurs potentiels en raison de la présence de CIMC [51] . Le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, particulièrement à la lumière du fait que les prix des marchandises en cause mènent à une sous‑cotation marquée des prix de Max-Atlas, que les marchandises en cause ont une incidence négative réelle ou potentielle sur la capacité de Max-Atlas de faire croître son entreprise, notamment en misant sur des perspectives d’expansion géographique, en particulier dans l’Ouest canadien.

Autres facteurs pertinents

[71] Les autres facteurs énumérés au paragraphe 37.1(1) du Règlement sont la productivité, le rendement sur capital investi, l’utilisation de la capacité de la branche de production, les stocks, les salaires, la capacité de financement et l’importance de la marge de dumping des marchandises ou du montant de subvention octroyé pour celles-ci. Le Tribunal ne dispose pas d’informations suffisantes, au stade de la présente enquête préliminaire de dommage, pour arriver à une conclusion quant à la pertinence de ces facteurs ou à leur incidence possible sur la branche de production nationale. Néanmoins, étant donné la norme de preuve applicable lors d’une enquête préliminaire de dommage, le Tribunal conclut que les éléments de preuve disponibles sur les facteurs susmentionnés sont suffisamment convaincants pour appuyer une conclusion d’indication raisonnable de dommage découlant du dumping et du subventionnement.

Causalité et caractère sensible

[72] Aucun élément de preuve n’a été soumis par des parties opposées à la plainte quant à d’autres facteurs causals qui pourraient expliquer, atténuer ou contrer le dommage à la branche de production nationale.

[73] Max-Atlas a invoqué la pandémie de COVID-19 comme un facteur possible autre que le dumping ou le subventionnement nuisant à la branche de production nationale. Au moment du dépôt de la plainte, l’usine de Max-Atlas fonctionnait à capacité réduite pour se conformer aux mesures de santé publique [52] . Max-Atlas a soutenu que, bien que les effets de la pandémie soient temporaires, la branche de production nationale demeurera vulnérable face aux marchandises en cause. Dans son analyse ci-dessus, le Tribunal s’est penché sur les cas où les tendances de 2020 se sont écartées de celles qui ont été observées de 2017 à 2019, et il estime qu’il est probable que cette situation soit largement attribuable à la pandémie.

[74] Malgré les perturbations sur le marché en 2020, en particulier une contraction importante du marché canadien dans son ensemble, le Tribunal a tout de même observé une sous-cotation et une compression soutenues des prix tout au long de la période de 2017 à 2020, ainsi qu’un effritement global de la part de marché de la branche de production nationale et un déclin dans les emplois de 2017 à 2020. Le Tribunal est convaincu que, en plus des effets observés seulement en 2018 ou en 2019, ces éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, un dommage sensible. Le Tribunal est également persuadé que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé, en eux-mêmes [53] , ce dommage sensible.

Conclusion

[75] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage sensible à la branche de production nationale.

MENACE DE DOMMAGE

[76] Comme il y a des éléments de preuve qui indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage, le Tribunal n’examinera pas, pour des raisons d’économie judiciaire, la question de savoir s’il existe une indication raisonnable que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause menacent de causer un dommage.

CONCLUSION

[77] À la lumière de l’analyse qui précède, le Tribunal détermine que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage à la branche de production nationale.

Frédéric Seppey

Frédéric Seppey
Membre présidant

Susan D. Beaubien

Susan D. Beaubien
Membre

Randolph W. Heggart

Randolph W. Heggart
Membre

 



[1] L.R.C. (1985), ch. S-15 [LMSI].

[2] Comme la branche de production nationale est déjà établie, le Tribunal n’a pas besoin d’examiner la question du retard.

[3] Pièce PI-2021-002-02.09 aux p. 1-3.

[4] Pièce PI-2021-002-05 aux par. 75, 77.

[5] Ibid. au par. 112.

[6] Ronald A. Chisholm Ltd. v. Deputy M.N.R.C.E. (1986), 11 CER 309 (FCTD) [en anglais seulement].

[7] Maïs-grain (10 octobre 2000), PI-2000-001 (TCCE) à la p. 6.

[8] Barres d’armature pour béton (12 août 2014), PI-2014-001 (TCCE) au par. 19.

[9] DORS/84-927 [Règlement]. Pour en arriver à sa décision provisoire, le Tribunal tient compte des facteurs concernant le dommage et la menace de dommage que prévoit l’article 37.1 du Règlement, notamment le volume des importations des marchandises sous-évaluées et subventionnées, les effets de ces marchandises sur le prix des marchandises similaires, l’incidence économique des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur la branche de production nationale et, si le Tribunal conclut qu’il existe un dommage ou une menace de dommage, l’existence ou non d’un lien de causalité entre le dumping et le subventionnement des marchandises et le dommage ou la menace de dommage.

[10] Il ne suffit pas que le dumping ou le subventionnement contribue à un dommage sensible causé à une branche de production nationale ou à une menace de dommage sensible. Il doit y avoir des éléments de preuve qui indiquent, de façon raisonnable, que le dumping ou le subventionnement a causé, ou menace de causer, un dommage sensible. Voir Modules muraux unitisés (3 mai 2013), PI-2012-006 (TCCE) au par. 23.

[11] Pour trancher la question de savoir s’il y a plus d’une catégorie de marchandises, le Tribunal doit déterminer si des marchandises pouvant être comprises dans des catégories distinctes de marchandises constituent des « marchandises similaires » les unes par rapport aux autres. Dans l’affirmative, ces marchandises seront considérées comme constituant une seule catégorie de marchandises. Voir, par exemple, Extrusions d’aluminium (17 mars 2009), NQ-2008-003 (TCCE) au par. 115; Panneaux d’isolation thermique en polyisocyanurate (11 avril 1997), NQ-96-003 (TCCE) à la p. 10.

[12] Voir, par exemple, Raccords de tuyauterie en cuivre (19 février 2007), NQ-2006-002 (TCCE) au par. 48.

[13] Pièce PI-2021-002-05 aux par. 33-39.

[14] Ibid. aux par. 14-20.

[15] Pièce PI-2021-002-02.01 aux p. 418-541.

[16] Ibid. à la p. 13.

[17] Selon l’échantillon de fiches techniques fourni; voir pièce PI-2021-002-02.01 aux p. 29, 418-541.

[18] Pièce PI-2021-002-02.01 aux p. 26-27.

[19] Voir l’analyse de Max-Atlas à la pièce PI-2021-002-02.01 aux p. 29-30.

[20] Pièce PI-2021-002-02.01 à la p. 20.

[21] Japan Electrical Manufacturers Association c. Canada (Tribunal antidumping), [1986] 2 C.F. 652 (C.A.F.); McCulloch of Canada Limited et McCulloch Corporation c. Le Tribunal antidumping, [1978] 1 C.F. 222 (C.A.F.); Rapport du Groupe spécial, Chine – Automobiles (États-Unis), WT/DS440/R au par. 7.207; Rapport de l’Organe d’appel, CE – Éléments de fixation (Chine), WT/DS397/AB/R aux par. 411, 419, 430; Rapport du Groupe spécial, Argentine – Viande de volaille (Brésil), WT/DS241/R aux par. 7.341-7.344.

[22] Pièce PI-2021-002-05 aux par. 40-42; pièce PI-2020-03.10 (protégée) à la p. 14.

[23] Pièce PI-2020-002-03.10 (protégée) à la p. 14.

[24] Voir, par exemple, Fils machine de cuivre (28 mars 2007), NQ-2006-003 (TCCE) au par. 48; Caissons sans soudure en acier au carbone ou en acier allié pour puits de pétrole et de gaz (10 mars 2008), NQ-2007-001 (TCCE) au par. 76; Extrusions d’aluminium (17 mars 2009), NQ-2008-003 (TCCE) au par. 147; Feuilles d’acier résistant à la corrosion (7 janvier 2020), PI-2019-002 (TCCE) au par. 36.

[25] Système de gestion de l’extraction de renseignements.

[26] Pièce PI-2021-002-05 au par. 47.

[27] Pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) aux p. 13, 14.

[28] Pièce PI-2021-002-05 au par. 118; pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) aux p. 13, 14; pièce PI-2021-002-03.01A (protégée) à la p. 3378.

[29] Pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) aux p. 13, 14; pièce PI-2021-002-03.01A (protégée) à la p. 3378.

[30] Pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) à la p. 28.

[31] Pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) à la p. 28; pièce PI-2021-002-03.01A (protégée) à la p. 3378.

[32] Pièce PI-2021-002-03.01A à la p. 3378.

[33] Pièce PI-2021-002-02.01 aux p. 133-139.

[34] Contreplaqués décoratifs et autres contreplaqués non structuraux (8 mars 2021), NQ-2020-002 (TCCE) au par. 148.

[35] Pièce PI-2021-002-03.01A (protégée) à la p. 3378.

[37] Les facteurs et indices comprennent (i) tout déclin réel ou potentiel dans la production, les ventes, la part de marché, les bénéfices, la productivité, le rendement sur capital investi ou l’utilisation de la capacité de la branche de production, (ii) toute incidence négative réelle ou potentielle sur les liquidités, les stocks, les emplois, les salaires, la croissance ou la capacité de financement, (ii.1) l’importance de la marge de dumping des marchandises ou du montant de subvention octroyé pour celles-ci, et (iii) dans le cas des produits agricoles qui sont subventionnés, y compris tout produit qui est un produit ou une marchandise agricole aux termes d’une loi fédérale ou provinciale, toute augmentation du fardeau subi par un programme de soutien gouvernemental.

[38] Aux termes de l’alinéa 37.1(3)b) du Règlement, le Tribunal doit examiner si des facteurs autres que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage. Les facteurs prescrits à cet égard sont (i) le volume et le prix des importations de marchandises similaires qui ne sont pas sous-évaluées ou subventionnées, (ii) la contraction de la demande pour les marchandises ou pour des marchandises similaires, (iii) tout changement des habitudes de consommation des marchandises ou de marchandises similaires, (iv) les pratiques commerciales restrictives des producteurs étrangers et nationaux, ainsi que la concurrence qu’ils se livrent, (v) les progrès technologiques, (vi) le rendement à l’exportation et la productivité de la branche de production nationale à l’égard de marchandises similaires, et (vii) tout autre facteur pertinent, compte tenu des circonstances.

[39] Pièce PI-2021-002-05 au par. 119; pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) à la p. 14.

[40] Ibid.

[41] Pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) à la p. 14; pièce PI-2021-002-03.01A (protégée) à la p. 3378.

[42] Ibid.

[43] Ibid.

[44] Pièce PI-2021-002-03.01A (protégée) à la p. 3378.

[45] Pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) à la p. 14. Pièce PI-2021-002-03.01A (protégée) à la p. 3378.

[46] Pièce PI-2021-002-02.01 aux p. 133-141.

[47] Pièce PI-2021-002-03.01A (protégée) at 3378; pièce PI-2021-002-03.10 (protégée) aux p. 13-14.

[48] Pièce PI-2021-002-02.01 à la p. 144; pièce PI-2021-002-03.01 (protégée) à la p. 144.

[49] Les données précises sur l’emploi ont été désignées par Max-Atlas comme des renseignements confidentiels.

[50] Pièce PI-2021-002-02.01 aux p. 148-149.

[51] Ibid. aux p. 147-148.

[52] Ibid. à la p. 150.

[53] Plaques de plâtre (5 août 2016), PI-2016-001 (TCCE) au par. 44; Fils d’acier galvanisés (22 mars 2013), PI‑2012-005 (TCCE) au par. 75; Tubes en cuivre circulaires (22 juillet 2013), PI-2013-002 (TCCE) au par. 82.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.