Enquêtes de dommage antidumping

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Contenu de la décision

Enquête no NQ-2021-002

Certains sièges rembourrés pour usage domestique

Conclusions rendues
le jeudi 2 septembre 2021

Motifs rendus
le vendredi 17 septembre 2021

 



EU ÉGARD À une enquête aux termes de l’article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d’importation concernant :

CERTAINS SIÈGES REMBOURRÉS POUR USAGE DOMESTIQUE

CONCLUSIONS

Le Tribunal canadien du commerce extérieur a procédé à une enquête, aux termes des dispositions de l’article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI), afin de déterminer si le dumping et le subventionnement des marchandises suivantes ont causé un dommage ou menacent de causer un dommage, selon la définition de ces termes dans la LMSI :

Sièges rembourrés pour usage domestique, originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de la République socialiste du Vietnam, qu’ils soient mobiles (notamment inclinables, pivotants et autres) ou stationnaires, avec recouvrement en cuir (entier ou partiel), tissu (notamment cuir synthétique) ou les deux, y compris canapés, fauteuils, causeuses, canapés‑lits, lits de repos, futons, ottomans, tabourets et sièges de cinéma maison.

Sont exclus les :

  • a) sièges stationnaires (c.‑à‑d. non mobiles) rembourrés en tissu uniquement (plutôt qu’en cuir), même si le tissu est un cuir synthétique (polyuréthane ou vinyle similicuir ou imitation cuir);

  • b) chaises ou banquettes (avec ou sans bras) destinées à être utilisées dans la salle à manger, souvent jumelées avec des ensembles de table de salle à manger;

  • c) tabourets rembourrés dont le siège est à plus de 24 pouces de hauteur (de type bar ou comptoir), avec ou sans dossier, et/ou pliables;

  • d) sièges destinés à être utilisés à l’extérieur (p. ex. chaises de patio ou balançoires);

  • e) sièges‑sacs; et

  • f) sièges pliables ou empilables.

Il est entendu que la définition du produit comprend les :

  • a) sièges mobiles rembourrés, inclinables, pivotants, à bascule, « zéro gravité », coulissants, avec appuie‑tête réglable, fonctions de massage ou fonctions similaires;

  • b) sièges dont le cadre est fabriqué en métal, bois ou les deux;

  • c) sièges produits en modules ou parties de modules;

  • d) sièges avec ou sans bras, qu’ils fassent partie de modules ou non; et

  • e) repose-pieds et tabourets de pied (avec ou sans rangement).

Le 3 août 2021, conformément à l’alinéa 41(1)a) de la LMSI, le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a mis fin à l’enquête de subventionnement à l’égard des marchandises susmentionnées exportées au Canada de la Chine par Anji Hengrui Furniture Co., Ltd., Anji Hengyi Furniture Co., Ltd., Dongguan Tianhang Furniture Co., Ltd., Foshan DOB Furniture Co., Ltd., Foshan Xingpeichong Huitong Furniture Co., Ltd., Gu Jia Intelligent Household Jiaxing Co., Ltd., Haining Fanmei Furniture Co., Ltd., (Hangzhou) Huatong Industries Inc., HTL Furniture (China) Co., Ltd., HTL Furniture (Huai An) Co., Ltd., Jiaxing Motion Furniture Co., Ltd., Man Wah Furniture Manufacturing (Huizhou) Co., Ltd., Natuzzi (China) Ltd., Ruihao Furniture MFG Co., Ltd., Shanghai Trayton Furniture Co., Ltd., et Violino Furniture (Shenzhen) Ltd., et du Vietnam par Delancey Street Furniture Vietnam Co., Ltd., Koda Saigon Co. Ltd., Timberland Co., Ltd., UE Vietnam Co., Ltd., Vietnam Hang Phong Furniture Company Limited, Wanek Furniture Co., Ltd., et Wendelbo SEA JSC. Le même jour, conformément à l’alinéa 41(1)b) de la LMSI, le président de l’ASFC a rendu une décision définitive de dumping à l’égard des marchandises susmentionnées et une décision définitive de subventionnement à l’égard des marchandises susmentionnées pour lesquelles il n’y avait pas eu lieu de clore l’enquête de subventionnement.

À la suite de son enquête, le Tribunal conclut par les présentes, aux termes du paragraphe 43(1) de la LMSI, que le dumping des marchandises susmentionnées, ainsi que le subventionnement des marchandises susmentionnées (à l’exclusion des marchandises exportées au Canada par les exportateurs susmentionnés), ont causé un dommage à la branche de production nationale.

En outre, le Tribunal exclut de ses conclusions les produits décrits à l’annexe 1.

Cheryl Beckett

Cheryl Beckett
Membre présidant

Peter Burn

Peter Burn
Membre

Georges Bujold

Georges Bujold
Membre

L’exposé des motifs sera publié d’ici 15 jours.

ANNEXE 1

PRODUITS EXCLUS DES CONCLUSIONS

1. Fauteuils de massage inclinables spécialisés, non destinés à des fins générales, dotés d’un siège, d’un appuie-tête, d’un dossier et d’un repose-pieds rembourrés, munis de composants mécaniques motorisés intégrés qui fonctionnent au moyen de commandes informatisées permettant le massage complet du corps d’une seule personne, notamment de la tête et/ou du cou, des épaules, du dos, des fesses, des bras et des jambes et/ou des pieds.

2. Fauteuils releveurs à usage médical munis de mécanismes de mouvement électriques et de commandes de positionnement motorisées, conçus pour soulever, abaisser et incliner l’occupant avec soin (en soulevant ou en abaissant la base et le dossier du fauteuil), et pour régler autrement la position assise de l’occupant en ajustant un ou plusieurs des éléments suivants : appuie-tête, repose-pieds et siège; conçus, fabriqués et testés afin de respecter ou de dépasser les exigences applicables du Règlement sur les instruments médicaux (DORS/98-282) de Santé Canada et se conformant aux normes et méthodologies de vérification EN12182, ANSI/AAMI/ISO10993, ANSI/AAMI/ES60601-1, CAL117, BSEN1021, ISO8191, ANSI/AAMI/ES60601-1-2, ISO14971 ou à des normes et méthodologies équivalentes.

3. Fauteuils de jeu ergonomiques à hauteur ajustable pour utilisation de pair avec un bureau et destinés à être utilisés principalement en jouant à des jeux vidéo, recouverts de cuir ou de cuir synthétique, munis d’accoudoirs, d’un appuie-tête, d’un coussin offrant un soutien lombaire, d’une base pivotante en étoile à cinq branches et de roues ou de roulettes.


 


Lieu de l’audience :

par vidéoconférence

Dates de l’audience :

les 3, 4, 5 et 6 août 2021

Membres du Tribunal :

Cheryl Beckett, membre présidant
Peter Burn, membre
Georges Bujold, membre

Personnel de soutien :

Alain Xatruch, conseiller juridique principal
Isaac Turner, conseiller juridique
Gayatri Shankarraman, analyste principale
Rebecca Campbell, analyste
Mylène Lanthier, analyste
Grant MacDougall, analyste
Julie Charlebois, conseillère, Services des données
Marie-Josée Monette, conseillère, Services des données
Arthur Grenon, conseiller, Services des données

PARTICIPANTS :

Producteurs nationaux

Conseillers/représentants

Elran Furniture Ltd.
EQ3 Ltd.
Jaymar Furniture Corp.
Palliser Furniture Ltd.

Jonathan O’Hara
Chris Scheitterlein
Lisa Page
Adelaide Egan
Justin Novick-Faille
William Wu
Thomas van den Hoogen

Importateurs/exportateurs/autres

Conseillers/représentants

Ashley Furniture Industries, LLC
Violino Hong Kong Ltd.

Jesse Goldman
Matthew Kronby
Erica Lindberg
Jacob Mantle
Carlota Claveron-Wilkins
Daehyun (Danny) Yeo
Zoey Chau
Nigah Awj

Canadian Tire Corporation, Limited

Riyaz Dattu

Conseil canadien du commerce de détail

Darrel H. Pearson
George Reid
Jessica Horwitz
Quentin Vander Shueren
Kathleen (Kailing) Wang

Costco Wholesale Canada Ltd.

Richard A. Wagner
Erin E. Brown
Erika Woolgar
Carl Farah

Dodd’s Furniture and Mattress

Lovedip Dodd

Dorel Industries Inc.

Peter Kirby

Furnish Concept Plus Ltd.

Peiman Mizraei

Groupe BMTC Inc.

Ariane Hunter-Meunier
Nathalie Goyette

HTL Furniture (China) Co., Ltd.
HTL Furniture (Huai An) Co., Ltd.
HTL Manufacturing Pte. Ltd.
Wayfair LLC

Greg Kanargelidis
Amy Lee
Patrick Lapierre
Philippe Dubois
Cameron Hogg-Tisshaw
Brady Gordon

IKEA Canada Limited Partnership

Jean-Marc Clement
Gordon LaFortune

La-Z-Boy Ottawa & Kingston

Ron Mathurin

Modern Form Furniture Ltd.

Jesper Langballe

Nordic Holdings Ltd.

Michael Gustavsson

Octane Seating, LLC

Peter Goldstein

Restoration Hardware, Inc.

Wendy Wagner
Hunter Fox
David Plotkin
Heather Lischak
Jonathan Liu
Peter Clark
Barry Desormeaux

Zhejiang Haozhonghao Health Products Co.

Aaron Zhang

Parties qui ont demandé l’exclusion de produits

Conseillers/représentants

2834342 Ontario Inc.
Arozzi North America Incorporated
Handy Button Machine Co.
(dba Handy Living)

Cyndee Todgham Cherniak

Best Buy Canada Ltd.

Katherine Xilinas
Justin Kutyan
Thang Trieu
Chandrasekar Venkataraman

DHP Furniture

Peter Kirby

Expand Furniture Inc.

Adam Joubert

Innovation Living Inc.

Jean-Guillaume Shooner
Candace Cerone
Geneviève Paradis

Limitless-Calgary / Limitless-Canada

Bruce D. MacMillan

Medical Breakthrough Massage Chairs LLC

Vincent Routhier
Yannick Trudel

Moe’s Classic Rugs & Home Accessories Inc.

Marco Ouellet
Jeffrey Goernet

Pride Corp.
Pride Mobility Products Corporation

Jesse Goldman
Jacob Mantle
Carlota Claveron-Wilkins
Daehyun (Danny) Yeo
Zoey Chau
Nigah Awj

Restoration Hardware, Inc.

Wendy Wagner
Hunter Fox
David Plotkin
Heather Lischak
Jonathan Liu
Peter Clark
Barry Desormeaux

Wayfair LLC

Greg Kanargelidis
Amy Lee
Patrick Lapierre
Philippe Dubois
Cameron Hogg-Tisshaw
Brady Gordon

Zhuhai Ido Furniture Co. Ltd.

Paul. M. Lalonde
Sean Stephenson

TÉMOINS :

 

Art DeFehr
Président exécutif
Palliser Furniture Ltd.

Jim Hunt
Vice-président des ventes – Canada
Palliser Furniture Ltd.

Darren Stevenson
Vice-président principal – Finances
Palliser Furniture Ltd.

Peter Tielmann
Président et chef de la direction
Palliser Furniture Ltd. et EQ3 Ltd.

Diana Sisto
Directrice artistique
Brentwood Classics Ltd.

Daniel Walker
Propriétaire et président
Jaymar Furniture Corp.

Brad Dawson
Gestionnaire des marchandises
Leon’s Furniture Limited

Graeme Leon
Président – Division des meubles
Leon’s Furniture Limited

Gary Blake
Directeur de la mise en marché
The Brick Warehouse LP

Doug Allen
Directeur principal de la mise en marché et de l’approvisionnement
The Brick Warehouse LP

Shaun Dufresne
Directeur principal de la mise en marché
The Dufresne Group, Inc.

Sarah Sullivan
Directeur des opérations internationales
Crate & Barrel Canada Inc.

Sara Khodja
Chef de la Division de la mise en marché
Crate & Barrel Canada Inc.

Sébastien Fauteux
Directeur général de la mise en marché et directeur artistique
Urban Barn Ltd.

Duncan Johnston
Directeur financier
Urban Barn Ltd.

Jesse Davidson
Acheteur de mobiliers
Urban Barn Ltd.

Matthew Fischel
Vice-président
Struc-Tube Ltd.

Eric Knafo
Président
Struc-Tube Ltd.

Johannes Kau
Président
Mobilia Interiors Inc.

Brigitte Hervieu
Vice-présidente, Finances et Opérations
Mobilia Interiors Inc.

Brian Adams
Vice-président, Opérations de sourçage international, Approvisionnement et Systèmes de qualité globaux
Ashley Furniture Industries, LLC

John Mailman
Vice-président des ventes – Canada
Ashley Furniture Industries, LLC

Carlos Bosch
Président des ventes et de la mise en marché
Violino North America

Giro Rizzuti
Vice-président, gestionnaire de la marchandise générale
Costco Wholesale Canada Ltd.

Jeremy King
Gestionnaire général, Wayfair Canada
Wayfair LLC

Pierre Normandin
Vice-président des ventes – Canada
HTL International

Dubravka Ivanovic
Dirigeante, sièges de salon et rangement
IKEA Canada Limited Partnership

Katie O’Connor
Vice-présidente, mise en marché et rembourrage
Restoration Hardware, Inc.

Allen Bilston
Chef de galerie – Toronto, Ontario
Restoration Hardware, Inc.

 

Veuillez adresser toutes les communications à :

La greffière adjointe
Téléphone : 613-993-3595
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

[1] Le mandat du Tribunal canadien du commerce extérieur dans la présente enquête menée aux termes de l’article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d’importation [1] est de déterminer si le dumping et le subventionnement de certains sièges rembourrés pour usage domestique (SRUD) originaires ou exportés de la République populaire de Chine (Chine) et de la République socialiste du Vietnam (Vietnam) (les marchandises en cause) ont causé ou menacent de causer un dommage à la branche de production nationale.

[2] Le Tribunal a déterminé, pour les motifs qui suivent, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage à la branche de production nationale.

CONTEXTE

[3] La présente enquête découle d’une plainte déposée auprès de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) le 16 octobre 2020 par Palliser Furniture Ltd. (Palliser) [2] et de la décision subséquente, rendue par l’ASFC le 21 décembre 2020, d’ouvrir des enquêtes aux termes du paragraphe 31(1) de la LMSI sur le dumping et le subventionnement allégués des marchandises en cause.

[4] Le 22 décembre 2020, à la suite de la décision de l’ASFC d’ouvrir les enquêtes, le Tribunal a entrepris une enquête préliminaire de dommage aux termes du paragraphe 34(2) de la LMSI. Le 19 février 2020, le Tribunal a déterminé, aux termes du paragraphe 37.1(1) de la LMSI, que les éléments de preuve indiquaient, de façon raisonnable, que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause avaient causé ou menaçaient de causer un dommage à la branche de production nationale [3] .

[5] Dans l’exposé des motifs de sa décision provisoire de dommage, rendu le 8 mars 2021, le Tribunal a indiqué que, bien qu’il n’était pas convaincu qu’il existait des motifs adéquats pour s’écarter de ses décisions antérieures concernant la caractérisation des marchandises similaires et l’application du principe de la portée coextensive (selon lequel la portée des marchandises similaires, c.-à-d. les marchandises de production nationale considérées « similaires » aux marchandises en cause importées, ne doit pas excéder la portée des marchandises en cause), les arguments présentés à l’appui d’une définition plus large des marchandises similaires pourraient faire l’objet un examen plus poussé dans l’éventualité d’une enquête aux termes de l’article 42 de la LMSI [4] .

[6] Le 5 mai 2021, l’ASFC a rendu des décisions provisoires de dumping et de subventionnement à l’égard des marchandises en cause [5] . Elle a aussi estimé que l’imposition de droits provisoires était nécessaire pour empêcher qu’un dommage ne soit causé [6] .

[7] Le 6 mai 2021, à la suite des décisions provisoires rendues par l’ASFC, le Tribunal a entrepris la présente enquête définitive de dommage. Dans son avis d’ouverture d’enquête, le Tribunal invitait les parties intéressées à déposer des observations à l’avance sur la question de savoir si 1) le principe appliqué antérieurement selon lequel les marchandises similaires doivent avoir la même portée que les marchandises en cause est bien fondé en droit et 2) « les sièges stationnaires (c.‑à‑d. non mobiles) pour usage domestique rembourrés en tissu uniquement (plutôt qu’en cuir), même si le tissu est un cuir synthétique (polyuréthane ou vinyle similicuir ou imitation cuir) » (appelés SRUD stationnaires en tissus, ou SRUDST), qui sont expressément exclus de la définition du produit, sont des marchandises similaires aux marchandises en cause [7] . Les observations devaient être déposées auprès du Tribunal au plus tard le 4 juin 2021 et les observations en réponse, au plus tard le 9 juin 2021.

[8] Le Tribunal a reçu des observations et des observations en réponse conjointes de la part de Palliser, EQ3 et Jaymar (ensemble, les producteurs nationaux participants), ainsi que des observations et des observations en réponse individuelles de la part d’Ashley Furniture Industries, LLC (Ashley), Costco Wholesale Canada Ltd. (Costco), IKEA Canada Limited Partnership (IKEA), Restoration Hardware, Inc. (RHI), le Conseil canadien du commerce de détail (CCCD) [8] et Wayfair LLC (Wayfair). Les producteurs nationaux participants étaient d’avis que le principe de la portée coextensive devait continuer de s’appliquer en l’espèce et que le Tribunal ne devait donc pas élargir la définition des marchandises similaires pour qu’elle englobe les SRUDST. En outre, ils étaient d’avis que, de toute façon, les SRUDST ne sont pas des marchandises similaires aux marchandises en cause. Toutes les autres parties étaient d’avis contraire.

[9] Le 16 juin 2021, le Tribunal a fait savoir aux parties qu’il avait déterminé que le principe de la portée coextensive ne devait pas s’appliquer en l’espèce et qu’il avait décidé d’élargir la définition des marchandises similaires pour qu’elle englobe les SRUDST de production nationale [9] . L’exposé détaillé des motifs de ces décisions est présenté ci-dessous.

[10] La période visée par l’enquête du Tribunal s’échelonnait sur quatre années complètes, soit du 1er janvier 2017 jusqu’au 31 décembre 2020. [10]

[11] Dans le cadre de la présente enquête, le Tribunal a demandé à un certain nombre de producteurs nationaux, d’importateurs, d’acheteurs et de producteurs étrangers connus et potentiels de SRUD de répondre à des questionnaires avant le 27 mai 2021. Le Tribunal a reçu 24 réponses au questionnaire à l’intention des producteurs de la part de sociétés indiquant qu’elles avaient produit des SRUD répondant à la définition du produit et/ou des SRUDST au Canada au cours de la période visée par l’enquête et 33 réponses au questionnaire à l’intention des acheteurs de la part de sociétés indiquant qu’elles avaient acheté de telles marchandises, soit produites au pays soit importées [11] . Le Tribunal a aussi reçu 26 réponses au questionnaire à l’intention des importateurs de la part de sociétés ayant importé des SRUD répondant la définition du produit et provenant de pays visés et non visés et 11 réponses au questionnaire à l’intention des producteurs étrangers de sociétés indiquant qu’elles produisaient des SRUD répondant à la définition du produit en Chine et/ou au Vietnam.

[12] À partir des réponses aux questionnaires et d’autres renseignements au dossier, le personnel du Secrétariat du Tribunal a préparé des versions publique et protégée du rapport d’enquête et les a versées au dossier le 24 juin 2021 [12] . Des versions entièrement révisées du rapport ont été publiées le 7 juillet 2021. Les rapports d’enquête ont ensuite fait l’objet de révisions mineures le 12 juillet 2020 et encore le 4 août 2021, après que l’ASFC a rendu ses décisions définitives de dumping et de subventionnement.

[13] Entre le 7 juin et le 2 juillet 2021, 14 parties ont déposé 67 demandes au total visant l’exclusion de certains produits de la portée de toutes éventuelles conclusions de dommage ou de menace de dommage à l’égard des marchandises en cause. Les producteurs nationaux participants ont déposé des réponses à l’encontre de toutes ces demandes, à l’exception d’une pour laquelle ils ont consenti de manière conditionnelle à l’exclusion. La majorité des demandeurs ont déposé des observations en réponse aux producteurs nationaux participants.

[14] Le 2 juillet 2021, Ashley et Violino Hong Kong Ltd. (Violino), le CCCD, Wayfair et HTL Furniture (China) Co., Ltd., HTL Furniture (Huai An) Co., Ltd. et HTL Manufacturing Pte. Ltd. (ensemble, HTL), et RHI ont déposé auprès du Tribunal diverses demandes d’information publiques et protégées, à l’intention des producteurs nationaux Palliser, EQ3, Elran et Jaymar, ou de certains d’entre eux. Le 5 juillet 2021, ces producteurs nationaux ont signalé au Tribunal leur opposition à certaines de ces demandes d’information. Le 8 juillet 2021, après avoir examiné ces demandes, la justification de chacune et les oppositions présentées, le Tribunal a transmis des directives à Palliser, EQ3, Elran et Jaymar, leur indiquant à quelles demandes d’information elles devaient répondre [13] . Leurs réponses ont été reçues le 18 juillet 2021.

[15] Le 2 juillet 2021, les producteurs nationaux participants ont déposé un mémoire, quatre énoncés de témoins et d’autres éléments de preuve au soutien de conclusions de dommage ou de menace de dommage relativement aux marchandises en cause.

[16] Le 12 juillet 2021, Ashley et Violino, Costco, Groupe BMTC Inc. (BMTC), HTL, IKEA, le CCCD, RHI et Wayfair (ensemble, les parties opposées) ont déposé des mémoires, 18 énoncés de témoins et d’autres éléments de preuve à l’encontre de conclusions de dommage ou de menace de dommage [14] . Le Tribunal a aussi reçu des observations publiques et protégées de la part d’un certain nombre de sociétés et d’individus qui n’avaient pas déposé d’avis de participation et qui n’étaient donc pas des parties à la procédure [15] .

[17] Le 19 juillet 2021, les producteurs nationaux participants ont déposé un mémoire en réponse, un énoncé de témoin en réponse et des éléments de preuve supplémentaires.

[18] Le 5 juillet 2021, le Tribunal a informé les parties qu’il avait l’intention de tenir une audience par vidéoconférence en l’espèce afin d’entendre des témoignages et les plaidoiries finales sur la question de dommage, ajoutant que la question des demandes d’exclusion serait traitée dans le cadre d’une audience sur pièces seulement. Le 14 juillet 2021, le Tribunal a tenu une vidéoconférence sur la gestion des dossiers, lors de laquelle tous les conseillers et tous les participants non représentés étaient présents, afin de discuter de la forme et de la logistique de l’audience.

[19] Les 3, 4, 5 et 6 août 2021, Tribunal a tenu une audience par vidéoconférence comportant des séances publiques et confidentielles. Le Tribunal a entendu la grande majorité des 29 témoins présentés par les parties. Le Tribunal a aussi entendu les plaidoiries finales sur les questions de dommage et de menace de dommage.

[20] Le Tribunal a rendu ses conclusions le 2 septembre 2021.

RÉSULTATS DES ENQUÊTES DE L’ASFC

[21] Le 3 août 2021, conformément à l’alinéa 41(1)a) de la LMSI, l’ASFC a mis fin à l’enquête de subventionnement à l’égard des marchandises en cause exportées au Canada de la Chine par Anji Hengrui Furniture Co., Ltd., Anji Hengyi Furniture Co., Ltd., Dongguan Tianhang Furniture Co., Ltd., Foshan DOB Furniture Co., Ltd., Foshan Xingpeichong Huitong Furniture Co., Ltd., Gu Jia Intelligent Household Jiaxing Co., Ltd., Haining Fanmei Furniture Co., Ltd., (Hangzhou) Huatong Industries Inc., HTL Furniture (China) Co., Ltd., HTL Furniture (Huai An) Co., Ltd., Jiaxing Motion Furniture Co., Ltd., Man Wah Furniture Manufacturing (Huizhou) Co., Ltd., Natuzzi (China) Ltd., Ruihao Furniture MFG Co., Ltd., Shanghai Trayton Furniture Co., Ltd., et Violino Furniture (Shenzhen) Ltd., et du Vietnam par Delancey Street Furniture Vietnam Co., Ltd., Koda Saigon Co. Ltd., Timberland Co., Ltd., UE Vietnam Co., Ltd., Vietnam Hang Phong Furniture Company Limited, Wanek Furniture Co., Ltd., et Wendelbo SEA JSC [16] . L’ASFC était convaincu que les marchandises de ces exportateurs n’avaient pas été subventionnées ou que le montant de subvention octroyé relativement à ces marchandises était minimal. [17] L’ASFC n’a cessé son enquête de dumping relativement à quelques marchandises que ce soit d’exportateurs en particulier puisqu’elle était convaincue que toutes les marchandises en cause avaient fait l’objet de dumping et que les marges de dumping de tous les exportateurs n’étaient pas minimales [18] .

[22] Le même jour, conformément à l’alinéa 41(1)b) de la LMSI, l’ASFC a rendu une décision définitive de dumping à l’égard des marchandises en cause et une décision définitive de subventionnement à l’égard des marchandises en cause pour lesquelles il n’y avait pas eu lieu de clore l’enquête de subventionnement (c.-à-d. les marchandises en cause autres que celles qui étaient exportées au Canada en provenance des exportateurs susmentionnés) [19] .

[23] La période visée par l’enquête de dumping et l’enquête de subventionnement de l’ASFC s’échelonnait du 1er juin 2019 au 30 novembre 2020 [20] . Les marges de dumping fixées par l’ASFC par rapport à chaque exportateur pour cette période étaient de 9,3 à 188,0 p. 100, quant aux marchandises en cause originaires ou exportées de la Chine, et de 9,9 p. 100 à 179,5 p. 100, quant aux marchandises en cause originaires ou exportées du Vietnam [21] . Les montants de subventionnement fixés par l’ASFC par rapport à chaque exportateur à l’égard desquels il n’y avait pas eu lieu de clore l’enquête de subventionnement étaient de 1,1 p. 100 à 81,1 p. 100, quant aux marchandises en cause originaires ou exportées de la Chine, et de 3,7 p. 100 à 5,5 p. 100, quant aux marchandises en cause originaires ou exportées du Vietnam [22] .

PRODUIT

Définition du produit

[24] L’ASFC a défini les marchandises en cause comme suit :

Sièges rembourrés pour usage domestique, originaires ou exportés de la République populaire de Chine et de la République socialiste du Vietnam, qu’ils soient mobiles (notamment inclinables, pivotants et autres) ou stationnaires, avec recouvrement en cuir (entier ou partiel), tissu (notamment cuir synthétique) ou les deux, y compris canapés, fauteuils, causeuses, canapés‑lits, lits de repos, futons, ottomans, tabourets et sièges de cinéma maison.

Sont exclus les :

  • a) sièges stationnaires (c.‑à‑d. non mobiles) rembourrés en tissu uniquement (plutôt qu’en cuir), même si le tissu est un cuir synthétique (polyuréthane ou vinyle similicuir ou imitation cuir);

  • b) chaises ou banquettes (avec ou sans bras) destinées à être utilisées dans la salle à manger, souvent jumelées avec des ensembles de table de salle à manger;

  • c) tabourets rembourrés dont le siège est à plus de 24 pouces de hauteur (de type bar ou comptoir), avec ou sans dossier, et/ou pliables;

  • d) sièges destinés à être utilisés à l’extérieur (p. ex. chaises de patio ou balançoires);

  • e) sièges‑sacs; et

  • f) sièges pliables ou empilables.

Il est entendu que la définition du produit comprend les :

  • a) sièges mobiles rembourrés, inclinables, pivotants, à bascule, « zéro gravité », coulissants, avec appuie‑tête réglable, fonctions de massage ou fonctions similaires;

  • b) sièges dont le cadre est fabriqué en métal, bois ou les deux;

  • c) sièges produits en modules ou parties de modules;

  • d) sièges avec ou sans bras, qu’ils fassent partie de modules ou non; et

  • e) repose-pieds et tabourets de pied (avec ou sans rangement) [23] .

Renseignements additionnels

[25] Bien qu’ils ne soient pas reproduits ici, l’ASFC a fourni, dans son énoncé des motifs de ses décisions définitives de dumping et de subventionnement, beaucoup de renseignements additionnels sur le produit, ses utilisations et ses caractéristiques, ainsi que sur son processus de fabrication [24] . Des renseignements additionnels de la sorte donnent souvent le contexte nécessaire au Tribunal pour comprendre la portée des marchandises en cause, la mesure dans laquelle ils livrent concurrence aux marchandises similaires de production nationale, et certains des facteurs pouvant avoir des effets sur l’état de la branche de production nationale.

CADRE LÉGISLATIF

[26] Aux termes du paragraphe 42(1) de la LMSI, le Tribunal est tenu d’enquêter afin de déterminer si le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage ou un retard [25] ou menacent de causer un dommage, le terme « dommage » étant défini au paragraphe 2(1) comme « [l]e dommage sensible causé à une branche de production nationale ». À cet égard, l’expression « branche de production nationale » est définie au paragraphe 2(1) par référence à la production nationale de « marchandises similaires ».

[27] Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer ce qui constitue des « marchandises similaires ». Ensuite, le Tribunal doit déterminer ce qui constitue la « branche de production nationale » aux fins de son analyse de dommage.

[28] Étant donné que les marchandises en cause sont originaires ou exportées de plus d’un pays, le Tribunal doit aussi déterminer si les conditions préalables à une évaluation des effets cumulatifs du dumping et du subventionnement des marchandises en cause, provenant de tous les pays visés, sur la branche de production nationale sont satisfaites.

[29] En outre, puisque l’ASFC a déterminé que la grande majorité des marchandises en cause ont fait l’objet de dumping et de subventionnement [26] , le Tribunal doit déterminer s’il doit, dans la présente enquête, évaluer les effets cumulatifs du dumping et du subventionnement de ces marchandises sur la branche de production nationale (c.-à-d. s’il procédera au cumul croisé des effets).

[30] Le Tribunal peut ensuite évaluer si le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage sensible à la branche de production nationale [27] . Si le Tribunal conclut à l’absence de dommage sensible, il déterminera s’il existe une menace de dommage sensible à la branche de production nationale [28] .

[31] Dans le cadre de son analyse, le Tribunal examinera aussi d’autres facteurs qui ont pu avoir des répercussions sur la branche de production nationale, de manière à s’assurer qu’un dommage ou une menace de dommage causé par de tels facteurs ne soit pas attribué aux effets du dumping et du subventionnement.

MARCHANDISES SIMILAIRES ET CATÉGORIES DE MARCHANDISES

[32] Pour déterminer si le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé ou menacent de causer un dommage aux producteurs nationaux de marchandises similaires, le Tribunal doit déterminer quelles marchandises produites au Canada, s’il en existe, constituent des marchandises similaires aux marchandises en cause. Le Tribunal doit aussi déterminer si les marchandises en cause et les marchandises similaires comprennent plus d’une catégorie de marchandises [29] .

[33] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires », par rapport à toutes les autres marchandises, de la façon suivante :

a) marchandises identiques aux marchandises en cause;

b) à défaut, marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

[34] Pour trancher la question des marchandises similaires lorsque les marchandises ne sont pas en tous points identiques aux marchandises en cause, le Tribunal tient habituellement compte de divers facteurs, dont les caractéristiques physiques des marchandises (comme leur composition et leur apparence) et leurs caractéristiques de marché (comme la substituabilité, les prix, les circuits de distribution, les utilisations finales et la question de savoir si les marchandises répondent aux mêmes besoins des clients) [30] . Lorsqu’il examine la question des catégories de marchandises, le Tribunal détermine habituellement si les marchandises potentiellement comprises dans des catégories distinctes de marchandise constituent des « marchandises similaires » les unes par rapport aux autres. Le cas échéant, elles seront considérées comme constituant une seule catégorie de marchandises [31] .

Marchandises similaires

[35] Comme susmentionné, dans son avis d’ouverture d’enquête, le Tribunal invitait les parties intéressées à déposer des observations à l’avance sur la question de savoir si 1) le principe appliqué antérieurement selon lequel les marchandises similaires doivent avoir la même portée que les marchandises en cause est bien fondé en droit et 2) les SRUDST, expressément exclus de la définition du produit, sont des marchandises similaires aux marchandises en cause.

[36] Après avoir reçu les observations et les éléments de preuve à l’appui de la part des producteurs nationaux participants et d’Ashley, de Costco, d’IKEA, du CCCD, de RHI et de Wayfair [32] , le Tribunal a informé les parties qu’il avait déterminé que le principe de la portée coextensive ne devait pas s’appliquer en l’espèce puisque les marchandises de production nationale qui entrent dans la portée de la définition du produit ne sont pas « identiques » aux marchandises en cause, au sens de l’alinéa a) de la définition de « marchandises similaires » prévue au paragraphe 2(1) de la LMSI. En outre, le Tribunal a conclu que, selon l’alinéa b) de cette définition, les utilisations et autres caractéristiques des SRUD de production nationale répondant à la définition du produit et les utilisations et autres caractéristiques des SRUDST de production nationale sont très proches de celles des marchandises en cause et sont donc similaires à ces marchandises. Les motifs de ces conclusions sont les suivantes.

Principe de la portée coextensive

[37] Pendant la phase de l’enquête préliminaire de dommage de l’espèce, le Tribunal n’était pas convaincu qu’il existait des motifs adéquats pour s’écarter de ses décisions antérieures concernant l’application du principe selon lequel la portée des marchandises similaires de production nationale doit être coextensive avec celle des marchandises en cause, telles que définies par l’ASFC dans la définition du produit [33] . Il avait donc conclu que les marchandises similaires ne comprenaient pas les SRUD qui sont expressément exclus de la définition du produit, comme les SRUDST, sans toutefois fermer la porte au réexamen de la question dans le cadre d’une enquête future menée aux termes de l’article 42 de la LMSI.

[38] Dans ces « décisions antérieures » concernant l’application du principe de la portée coextensive, le Tribunal avait affirmé que la sélection de marchandises similaires dont la portée est plus vaste que celle des marchandises en cause n’était pas soutenue par la jurisprudence pertinente de l’OMC [34] . Cependant, dans certaines enquêtes précédentes, le Tribunal avait pris la décision d’élargir la définition des marchandises similaires, pour y inclure des marchandises dont la portée va au-delà de celle des marchandises en cause [35] .

[39] Les producteurs nationaux participants soutiennent que, conformément à la structure disjonctive de la définition de « marchandises similaires » prévue au paragraphe 2(1) de la LMSI, le principe de la portée coextensive ne s’applique que s’il existe des marchandises de production nationale qui sont identiques aux marchandises en cause et que, à défaut, le Tribunal doit considérer quelles sont les marchandises de production nationale dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause. En ce qui concerne le mot « identiques » contenu dans l’alinéa a) de la définition de « marchandises similaires », les producteurs nationaux participants soulignent que, si le Tribunal a indiqué dans Caissons sans soudure que ce mot créait une « norme très élevée », il a par la suite clarifié que les marchandises étaient « identiques » lorsqu’il y avait « identité de toutes les caractéristiques qui sont significatives » [36] .

[40] Les producteurs nationaux participants soutiennent que la détermination visant à établir si des marchandises sont identiques doit être effectuée à l’échelle agrégée ou du groupe, et non à l’échelle des modèles individuels. Ils affirment en outre que les marchandises de production nationale répondant à la définition du produit (c.-à-d. dont la portée est coextensive avec celle des marchandises en cause) seront généralement identiques aux marchandises en cause. Selon eux, le principe de la portée coextensive devrait s’appliquer à l’espèce puisque, selon la comparaison groupe par groupe, il y a identité de toutes les caractéristiques qui sont significatives des SRUD de production nationale répondant à la définition du produit et de celles des marchandises en cause.

[41] Les producteurs nationaux participants font valoir que les parties opposées interprètent erronément la jurisprudence sur laquelle elles prétendent se fonder puisque, dans Sarco [37] et Caissons sans soudure, la Cour d’appel fédérale et le Tribunal, respectivement, ont conclu que les marchandises de production nationale n’étaient pas identiques aux marchandises en cause.

[42] Les producteurs nationaux participants soutiennent que, puisque des produits identiques sont plus susceptibles de se livrer directement concurrence, le principe de la portée coextensive concentre à juste titre l’analyse de dommage sur les produits (et les producteurs) qui sont susceptibles de subir un dommage direct en raison des marchandises en cause. Ils affirment que l’élargissement de la portée des marchandises similaires pour inclure des marchandises très proches limiterait systématiquement la capacité de la branche de production nationale à obtenir des conclusions de dommage et saperait par conséquent l’objet de la LMSI. Les producteurs nationaux participants font aussi valoir que l’application du principe offre une certitude accrue aux parties et au Tribunal, car elle procure une limite pratique de la portée des marchandises similaires et permet aux parties plaignantes de connaître dès le départ la portée de la branche de production nationale auprès de laquelle elles doivent obtenir du soutien.

[43] Enfin, les producteurs nationaux participants soutiennent que le principe de la portée coextensive a été avalisé par le groupe spécial de l’OMC dans É-U – Bois d’œuvre et que le Tribunal a invariablement appliqué le principe dans le passé, même s’il n’y a pas toujours nommément fait référence [38] . Ils affirment que, si le Tribunal n’est pas strictement lié à ses décisions antérieures, il doit néanmoins viser la cohérence et, dans les causes où il s’écarte de ces décisions, il a le fardeau d’expliquer une telle dérogation [39] .

[44] Les parties opposées font valoir que la LMSI et les accords de l’OMC ne renferment aucune disposition prévoyant que la portée des marchandises similaires doive être coextensive avec celle des marchandises en cause et que la conclusion de portée coextensive a priori mine la compétence du Tribunal et rend superflue l’analyse des « marchandises similaires ». Elles soulignent que, dans Sarco, la Cour d’appel fédérale a conclu que, pour définir les « marchandises similaires », le Tribunal est tenu de prendre en considération toutes les caractéristiques ou qualités des marchandises et qu’il s’agit fondamentalement de déterminer si les marchandises de production nationale livrent concurrence sur le marché aux marchandises en cause. Elles font valoir que la définition de « marchandises similaires » ne repose donc pas sur la détermination des produits qui, selon la branche de production nationale, causent le plus de dommage, mais sur la détermination des produits qui sont véritablement des « marchandises similaires ».

[45] Les parties opposées soutiennent également que le mot « identiques » contenu dans l’alinéa a) de la définition de « marchandises similaires » est clair et dénué d’ambiguïté et que, comme le Tribunal l’affirme dans Caissons sans soudure, il crée une « norme très élevée ». Elles font valoir que, dans la présente cause, les marchandises de production nationale répondant à la définition du produit ne sont pas identiques aux marchandises en cause parce que les SRUD sont des biens de consommation dont les styles, variétés, caractéristiques, matériaux de composition et processus de fabrication diffèrent toujours. Selon elles, il ne s’agit pas de « différences mineures négligeables » [40] . Elles ajoutent qu’aucune norme technique ne circonscrit la portée de la définition du produit dans la présente cause de façon qu’il soit possible de conclure que les marchandises sont identiques.

[46] Les parties opposées affirment que le Tribunal a défini la portée des marchandises similaires de façon plus vaste que celle des marchandises en cause dans de nombreux enquêtes et réexamens relatifs à l’expiration récents, y compris des affaires dans lesquelles le Tribunal a conclu que des marchandises expressément exclues de la portée des marchandises en cause étaient similaires aux marchandises en cause [41] . Elles ajoutent que, dans Caissons sans soudure, le Tribunal affirme que le défaut de se demander si d’autres marchandises de production nationale ressemblent de près aux marchandises en cause et si elles sont en concurrence avec ces dernières « ne tiendrait pas compte de la réalité commerciale du marché sur laquelle [l’]enquête de dommage est fondée [42] ». Elles font en outre valoir que, lorsque le Tribunal a utilisé des définitions de marchandises similaires et de marchandises en cause qui étaient coextensives, ces décisions se fondaient véritablement sur des évaluations factuelles selon lesquelles certaines marchandises de production nationale dont la portée dépassait celle des marchandises en cause n’étaient pas « similaires » aux marchandises en cause, plutôt que sur une disposition législative ou une décision judiciaire exigeant que ces portées soient coextensives [43] .

[47] Les parties opposées soutiennent par ailleurs que l’exposé du Tribunal dans Modules muraux unitisés sur la jurisprudence de l’OMC n’est pas fondé en droit et repose sur une mauvaise interprétation de cette jurisprudence. Elles font valoir que, dans les causes citées par le Tribunal, les groupes spéciaux de l’OMC ont observé que les définitions de « marchandises similaires » et de « marchandises en cause » étaient coextensives, et non qu’elles devaient ou devraient l’être. Selon elles, cette jurisprudence peut, au mieux, servir à soutenir la thèse voulant que, si la portée des marchandises similaires est coextensive avec celle des marchandises en cause, il n’y ait pas en soi d’incompatibilité avec les dispositions pertinentes de l’Accord antidumping et de l’ASMC de l’OMC.

[48] Le Tribunal a précédemment décrit le principe de la portée coextensive comme une exigence voulant que la portée des marchandises similaires de production nationale ne puisse être élargie au-delà de celle des marchandises en cause [44] . Toutefois, dans la mesure où ce principe est destiné à être appliqué de façon stricte et universelle, cette exigence minerait la compétence du Tribunal et viderait de son sens la définition de « marchandises similaires » prévues au paragraphe 2(1) de la LMSI et aux dispositions correspondantes de l’Accord antidumping et de l’ASCM de l’OMC [45] . En vertu de cette définition, à défaut de marchandises de production nationale identiques aux marchandises en cause, les marchandises de production nationale dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause sont considérées comme des « marchandises similaires ». Par conséquent, si le Tribunal conclut qu’il n’existe pas de telles marchandises identiques, il définira les marchandises similaires de production nationale en appliquant une démarche qui risque d’entraîner l’élargissement de leur portée au-delà de celle des marchandises en cause.

[49] Nul ne conteste que, à défaut de marchandises de production nationale dont la description est la même que celle des marchandises en cause (c.-à-d. qui répondent à la définition du produit), il ne peut y avoir de marchandises identiques au sens de l’alinéa a) de la définition de « marchandises similaires » et la portée des marchandises similaires de production nationale sera ainsi nécessairement élargie au-delà de celle des marchandises en cause. Cependant, s’il existe des marchandises de production nationale ayant la même description que les marchandises en cause, le Tribunal doit déterminer si les marchandises sont identiques. Il s’agit là d’une question de fait devant être tranchée au cas par cas [46] . Le caractère identique ne peut être présumé par opération du principe de la portée coextensive, puisqu’une telle présomption aurait pour effet de miner la compétence du Tribunal. En d’autres mots, si le caractère coextensif peut être le résultat d’une conclusion du Tribunal au sujet du caractère identique, il ne peut contraindre cette conclusion. La jurisprudence de l’OMC citée par le Tribunal dans Modules muraux unitisés n’impose pas non plus une telle conclusion [47] .

[50] Par conséquent, le Tribunal conclut que l’application stricte et universelle du principe de la portée coextensive n’est pas bien fondée en droit. La LMSI, ou encore l’Accord antidumping et l’ASCM de l’OMC, ne contiennent pas de règle impérative exigeant que la portée des marchandises similaires de production nationale ne soit pas élargie au-delà de celle des marchandises en cause. Le Tribunal ne peut donc présumer que la portée des marchandises similaires de production nationale doit être coextensive avec celle des marchandises en cause, comme définies par l’ASFC dans la définition du produit. Le Tribunal est d’abord tenu d’effectuer l’analyse prévue au paragraphe 2(1) de la LMSI, en vérifiant s’il existe des marchandises de production nationale identiques aux marchandises en cause et, à défaut, de déterminer quelles sont les marchandises de production nationale dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause. Si, dans certains cas, les éléments de preuve peuvent indiquer que l’univers des marchandises de production nationale qui sont très proches des marchandises en cause se limite aux marchandises dont la description est la même que celle des marchandises en cause, dans d’autres cas, ils peuvent indiquer que cet univers est différent. En ce sens, le principe de la portée coextensive ne poursuit pas de but utile, sauf peut-être pour soutenir la thèse selon laquelle le point de départ dans la détermination de la portée des marchandises similaires devrait être la portée des marchandises en cause.

[51] En l’espèce, il ne fait aucun doute qu’il existe des marchandises de production nationale ayant la même description que les marchandises en cause. Le Tribunal doit donc établir si les marchandises sont « identiques ». Comme le Tribunal l’affirme dans Caissons sans soudure, ce mot crée une « norme très élevée ». Le Tribunal n’est pas convaincu que l’abaissement subséquent de cette norme pour permettre les « différences mineures négligeables [48] » était approprié compte tenu de la clarté et de l’absence d’ambiguïté du libellé de l’alinéa a) de la définition de « marchandises similaires » prévue au paragraphe 2(1) de la LMSI [49] .

[52] Le Tribunal se demande également comment l’évaluation visant à établir si les marchandises sont identiques peut être effectuée à l’échelle agrégée ou du groupe, comme les producteurs nationaux participants le soutiennent, plutôt qu’à l’échelle des modèles individuels [50] . Sans comparer chacun des modèles de marchandises de production nationale et de marchandises en cause les uns aux autres, il ne serait possible de conclure que ces marchandises sont identiques qu’en se fondant sur le fait que chaque groupe répond à la même définition du produit, même si cette définition est très vaste et ne contient aucune référence à des normes techniques. Il est difficile de concevoir de quelle façon de tels groupes aussi vastes pourraient être déclarés identiques les uns aux autres dans ces circonstances (c.-à-d. lorsque toutes les caractéristiques des marchandises ne sont pas circonscrites par la définition du produit).

[53] Quoi qu’il en soit, le Tribunal n’a pas à trancher définitivement la question de la norme exacte imposée par le mot « identique » et l’échelle à laquelle l’évaluation est réalisée puisque, peu importe la norme adoptée et l’échelle à laquelle l’évaluation est réalisée, la seule conclusion qui puisse être raisonnablement rendue dans la présente cause est qu’il n’y a pas de SRUD de production nationale répondant à la définition du produit qui est identique aux marchandises en cause. Les SRUD sont des biens de consommation dont le style, les couleurs, la forme, les caractéristiques, les matériaux de composition et les dimensions varient beaucoup, même au sein de l’offre d’un seul producteur. Le Tribunal est d’avis que ces différences sont manifestement significatives; il n’est donc pas en mesure de conclure que les marchandises de production nationale sont identiques aux marchandises en cause, ni même qu’il y a identité de toutes les caractéristiques qui sont significatives. À l’échelle des modèles individuels, aucun élément de preuve n’indique que les marchandises produites au Canada sont identiques aux importations des marchandises en cause. À l’échelle agrégée ou du groupe, le manque de spécificité dans la définition du produit quant aux matériaux, aux dimensions, aux caractéristiques, au style, aux formes et aux couleurs, ainsi que l’absence de normes techniques, font en sorte qu’il est impossible de conclure que les marchandises sont identiques.

[54] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les SRUD de production nationale qui entrent dans la portée de la définition du produit ne sont pas « identiques » aux marchandises en cause, au sens de l’alinéa a) de la définition de « marchandises similaires » prévue au paragraphe 2(1) de la LMSI.

Les SRUDST de production nationale sont-ils similaires aux marchandises en cause?

[55] Ayant déterminé que les SRUD de production nationale qui répondent à la définition du produit ne sont pas identiques aux marchandises en cause, le Tribunal doit maintenant établir, conformément à l’alinéa b) de la définition de « marchandises similaires », quels SRUD de production nationale ont une utilisation et d’autres caractéristiques qui sont très proches de celles des marchandises en cause. Même s’ils ne sont pas identiques aux marchandises en cause, il ne fait aucun doute, compte tenu des éléments de preuve quant aux facteurs que le Tribunal considère généralement pour trancher la question de similarité des marchandises, que les SRUD de production nationale qui répondent à la définition du produit sont similaires aux marchandises en cause [51] . La dernière question à laquelle le Tribunal doit donc répondre est celle de savoir si les SRUDST de production nationale devraient aussi être inclus dans les marchandises similaires, nonobstant l’exclusion expresse des SRUDST de la définition du produit. Même si le Tribunal doit déterminer si les SRUDST de production nationale sont similaires aux marchandises en cause, ce faisant, il établira essentiellement si tous les SRUDST et les SRUD qui répondent à la définition du produit sont, entre eux, des marchandises similaires. Dans la présente section, « SRUD » s’entendra des SRUD qui répondent à la définition du produit.

[56] Le Tribunal fait remarquer que la définition du produit couvre (1) les SRUD mobiles avec recouvrement en cuir, (2) les SRUD stationnaires avec recouvrement en cuir, et (3) les SRUD mobiles avec recouvrement en tissu, mais non les SRUD stationnaires avec recouvrement en tissu (c.-à-d. les SRUDST) [52] .

[57] Les producteurs nationaux participants soutiennent que les SRUDST ne sont pas des marchandises similaires aux marchandises en cause, car, si les SRUD font partie d’une catégorie de produits ayant un niveau de complexité plus élevé, qui ont un recouvrement en cuir et des fonctions mobiles, ou les deux, les SRUDST font partie d’une catégorie de produits ayant un niveau de complexité moins élevé qui n’ont pas de recouvrement en cuir ni de fonctions mobiles. Selon eux, si les SRUD et les SRUDST ont quelques caractéristiques similaires, il existe des différences significatives au niveau de leurs caractéristiques physiques et des caractéristiques de marché les plus importantes.

[58] En ce qui a trait aux caractéristiques physiques, les producteurs nationaux participants font valoir que tant l’apparence des SRUD avec recouvrement en cuir que celle des SRUD ayant des fonctions mobiles, qu’ils soient ou non recouvert de cuir, diffère de celle des SRUDST. Par ailleurs, en ce qui concerne les caractéristiques de marché, ils affirment que les SRUD sont généralement plus chers que les SRUDST ayant un niveau de complexité moins élevé en raison du prix du cuir et des mécanismes de mouvement et que ceux-ci ne répondent donc pas aux besoins du même type de clients. Les producteurs nationaux font remarquer que 21 des 34 répondants au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs ont confirmé qu’ils ne considéraient pas que les SRUD et les SRUDST étaient interchangeables, et que 19 des 34 répondants ont indiqué que leurs clients ne les considéraient pas comme interchangeables [53] . Les producteurs nationaux participants ajoutent que, bien que les SRUD et les SRUDST ont la même utilisation finale et sont typiquement distribués par les mêmes circuits de distribution, il ne convient pas d’attacher une grande importance à ces facteurs dans la présente cause, puisque beaucoup d’autres produits ont la même utilisation finale primaire et que les détaillants qui vendent des SRUD et des SRUDST vendent aussi généralement une vaste gamme d’autres marchandises.

[59] Au sujet de la force probante des réponses au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs, les producteurs nationaux participants soulignent qu’au moins 8 des 13 réponses indiquant que les SRUD et les SRUDST sont interchangeables proviennent d’acheteurs qui font valoir que les SRUDST sont des marchandises similaires. Ils suggèrent en conséquence que le Tribunal accorde davantage de poids aux autres réponses.

[60] Les parties opposées soutiennent que, puisque les facteurs utilisés pour trancher la question des marchandises similaires et des catégories de marchandises sont les mêmes, les conclusions du Tribunal à l’enquête préliminaire de dommage selon lesquelles tous les SRUD font partie d’un « continuum » de marchandises qui constituent une seule catégorie de marchandises conduisent logiquement à conclure que les SRUDST font également partie du même continuum. Elles font valoir que, si les SRUD mobiles en tissu sont similaires aux SRUD mobiles en cuir, et si les SRUD mobiles en cuir sont similaires aux SRUD stationnaires en cuir, les trois marchandises doivent aussi être similaires aux SRUDST.

[61] Les parties opposées font valoir que les réponses au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs révèlent que les répondants n’ont pas de compréhension uniforme ou qu’ils n’ont pas compris l’objet des questions posées, ce qui a donné lieu à des réponses contradictoires et donc limite l’utilité des informations.

[62] En ce qui concerne les caractéristiques physiques, les parties opposées soutiennent qu’il n’y a pas de différence significative dans la composition des SRUD et celle des SRUDST et que, si certains types de recouvrement se distinguent visuellement des autres, le consommateur moyen ne distingue pas facilement le cuir véritable du cuir synthétique. En ce qui concerne les caractéristiques de marché, elles soutiennent que la différence de prix entre les SRUD et les SRUDST n’est pas toujours importante et que, si l’on examine les prix chez différents détaillants (haut de gamme et entrée de gamme), la différence de prix entre les SRUD et les SRUDST disparaît. Elles ajoutent que les SRUD et les SRUDST sont entièrement interchangeables et substituables sur le marché, puisque bon nombre de consommateurs sont disposés à considérer différents types de produits à l’intérieur de leur fourchette de prix, qu’ils soient mobiles ou stationnaires, en tissu ou en cuir. Enfin, elles prétendent que les SRUD et les SRUDST sont vendus par le truchement des mêmes circuits de distribution, ont la même utilisation finale et sont vendus aux mêmes consommateurs.

[63] Allant au-delà des questions posées par le Tribunal dans son avis d’ouverture d’enquête, RHI soutient qu’il était prématuré pour le Tribunal de rendre une décision définitive à l’égard des « marchandises similaires » avant d’avoir accès à l’ensemble du dossier de preuves et que la définition des marchandises similaires doit être élargie afin d’inclure les sièges pour usage commercial.

[64] Dans son enquête préliminaire de dommage, le Tribunal a conclu que les divers types de SRUD qui entrent dans la portée de la définition du produit ont des caractéristiques physiques et de marché semblables et qu’ils représentent un continuum de marchandises similaires qui constituent une seule catégorie de marchandises [54] . En d’autres mots, le Tribunal était convaincu que les SRUD mobiles en cuir, les SRUD stationnaires en cuir et les SRUD mobiles en tissu sont similaires entre eux et qu’il n’y a pas, en réalité, de ligne de démarcation nette entre ces types de sièges, puisqu’ils forment un continuum de marchandises.

[65] Par conséquent, si les SRUD mobiles en tissu sont similaires aux SRUD mobiles en cuir, et si les SRUD mobiles en cuir sont similaires aux SRUD stationnaires en cuir, il peut être déduit, toutes choses étant égales par ailleurs, que les SRUD en tissu sont similaires aux SRUD en cuir et que les SRUD mobiles sont similaires aux SRUD stationnaires. Cela signifie que les SRUDST sont, au minimum, des marchandises similaires aux SRUD mobiles en tissu et aux SRUD stationnaires en cuir, et qu’ils font donc partie du continuum de marchandises similaires décrit par le Tribunal dans l’enquête préliminaire de dommage. Ainsi, il n’y a pas de ligne de démarcation nette entre les SRUD et les SRUDST. Sur ces seuls fondements, le Tribunal conclut que les SRUDST de production nationale sont des marchandises similaires aux marchandises en cause. Le fait que la première partie de la définition du produit de l’ASFC couvre tous les SRUD, qu’ils soient mobiles ou stationnaires, avec recouvrement de cuir ou de tissu, mais que les SRUDST soient postérieurement expressément exclus, indique également que les SRUDST appartiennent naturellement au groupe qui comprend tous les autres SRUD et qu’ils sont considérés comme tels.

[66] L’examen approfondi des caractéristiques physiques et de marché des SRUD et des SRUDST confirme également qu’il s’agit de marchandises similaires. Les SRUDST sont exclus de la définition du produit, car ils ont un recouvrement en tissu et n’ont pas de composante mobile. Il s’ensuit logiquement qu’ils ne seraient pas exclus s’ils avaient un recouvrement en cuir ou une composante mobile. Le Tribunal considère que ces différences ont peu d’incidences sur la composition globale et l’apparence générale des marchandises. En effet, le Tribunal fait remarquer que, conformément à la définition du produit, « tissu » comprend le cuir synthétique, dont les matériaux de couverture, selon l’ASFC, sont des produits chimiques et sont conçus pour reproduire l’aspect tactile ou visuel du cuir [55] . En outre, selon l’ASFC, les recouvrements en cuir comprennent le cuir véritable (ou « côté fleur »), mais également d’autres types de cuir moins chers, comme le cuir reconstitué, décrit comme un cuir synthétique au dos duquel sont collées des dérayures du cuir, et utilisé dans le cadre d’une stratégie de commercialisation visant à permettre l’emploi du mot « cuir » [56] . Ainsi, dans certains cas, les SRUD en cuir et les SRUDST sont visuellement impossibles à distinguer.

[67] En ce qui concerne les caractéristiques de marché, les producteurs nationaux participants admettent que les SRUD et les SRUDST ont la même utilisation finale et sont normalement vendus par le truchement des mêmes circuits de distribution. En ce qui concerne le prix, le Tribunal reconnaît que les SRUD sont généralement plus chers que les SRUDST. Cependant, cette situation est normale et est fonction de la position de la marchandise dans le continuum, les SRUD mobiles en cuir étant généralement les plus chers et les SRUDST, les moins chers; les deux autres types se situent entre les deux [57] . Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de chevauchement entre les différents types de SRUD. Comme le montrent les éléments de preuve, dans certains cas, les SRUD avec des recouvrements en tissu de qualité supérieure peuvent être plus chers que les SRUD en cuir [58] . Par ailleurs, il y a vraisemblablement peu, voire très peu, de différences de prix entre certains types de « cuir », comme le cuir reconstitué, et les « tissus », comme le cuir synthétique.

[68] En ce qui concerne la substituabilité, le Tribunal accepte que, du point de vue du consommateur, les SRUD et les SRUDST sont généralement interchangeables, selon d’autres facteurs comme la qualité et le prix, sous réserve que le consommateur n’ait pas définitivement décidé d’acheter un type de SRUD plutôt qu’un autre [59] . Les éléments de preuve indiquent que les détaillants présentent les SRUDST aux côtés des SRUD afin d’offrir aux consommateurs une variété d’options [60] . Ils indiquent également que, devant ces options, certains consommateurs peuvent facilement changer d’idées [61] . Si plus de la moitié des répondants au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs ont mentionné qu’ils (ou leurs clients) ne considéraient pas les SRUD et les SRUDST comme interchangeables [62] , le Tribunal est d’avis que ces réponses signifient que, lorsque le détaillant ou le client a décidé définitivement d’acheter un type de SRUD plutôt qu’un autre, ces sièges ne sont plus interchangeables. Néanmoins, cette situation ne signifie pas que les SRUD et les SRUDST ne sont pas interchangeables à un certain point du processus décisionnel.

[69] Eu égard aux considérations qui précèdent, le Tribunal conclut que les SRUDST de production nationale sont des marchandises similaires aux marchandises en cause, puisqu’ils partagent avec eux des caractéristiques physiques et de marché, ont la même utilisation finale et se livrent généralement concurrence sur le marché canadien. Par conséquent, pour les fins de son analyse de dommage, le Tribunal tiendra compte de l’incidence des marchandises en cause sur la branche de production nationale qui produit des SRUD répondant à la définition du produit et des SRUDST.

[70] En ce qui concerne les observations de RHI, le Tribunal ne convient pas qu’il était prématuré pour lui de rendre une décision définitive à l’égard des « marchandises similaires » à une étape précédente des procédures, avant d’avoir accès à l’« ensemble du dossier de preuves », comme le soutient RHI. Au début de la présente enquête, le Tribunal a invité les parties intéressées à déposer des observations à l’avance, accompagnées d’éléments de preuve à l’appui, sur la question des marchandises similaires, puisque celle-ci avait été soulevée par les parties pendant l’enquête préliminaire de dommage ainsi que pendant le processus de consultation relatif aux questionnaires du Tribunal. Puisqu’il s’agit d’une question fondamentale qui peut avoir une incidence importante sur le rapport d’enquête du Tribunal et sur les observations des parties à l’égard de la question de dommage, il était avantageux pour tous que l’affaire soit réglée tôt. Le Tribunal a reçu de nombreux éléments de preuve, observations et déclarations de témoins portant sur cette question. Il a également préparé des résumés public et protégé des réponses au questionnaire à l’intention des acheteurs portant précisément sur la question des marchandises similaires. Dans ces circonstances, le Tribunal ne voit pas en quoi sa décision sur les marchandises similaires était prématurée.

[71] En ce qui a trait à l’assertion de RHI voulant que la portée des marchandises similaires soit élargie pour inclure les sièges pour usage commercial, le Tribunal n’était pas persuadé, selon les éléments de preuve versés au dossier pendant l’enquête préliminaire de dommage, que cette question méritait d’être étudiée davantage dans le cadre de l’enquête de dommage. Aucun élément au dossier de la présente enquête ne laisse croire au Tribunal que les sièges pour usage commercial livrent directement une concurrence à grande échelle aux SRUD.

Catégories de marchandises

[72] Comme il est indiqué ci-dessus, dans son enquête préliminaire de dommage, le Tribunal a conclu que les divers types de SRUD qui entrent dans la portée de la définition du produit représentent un continuum de marchandises similaires qui constituent une seule catégorie de marchandises. Le Tribunal a rendu cette décision après avoir demandé aux parties d’aborder la question des catégories de marchandises dans leurs observations et après avoir tenu une téléconférence avec les parties intéressées pour poser des questions et recueillir des éléments de preuve à cet égard [63] .

[73] Néanmoins, Wayfair soutient dans la présente enquête qu’il y a plusieurs catégories de marchandises, telles que les canapés, fauteuils, causeuses, canapés-lits, lits de repos, futons, ottomans, tabourets et sièges de cinéma maison. Le Tribunal conclut toutefois que Wayfair n’a pas présenté de nouveaux éléments de preuve qui sèment le doute sur sa décision rendue pendant l’enquête préliminaire de dommage selon laquelle il n’y a qu’une seule catégorie de marchandises.

[74] Compte tenu de sa décision d’élargir la définition des marchandises similaires pour y inclure les SRUDST de production nationale au motif que ces marchandises ont des caractéristiques physiques et de marché communes avec les SRUD répondant à la définition du produit, le Tribunal peut uniquement conclure que les SRUDST de production nationale font partie du même continuum de marchandises similaires qui constituent une seule catégorie de marchandises. Le Tribunal mènera donc son analyse en tenant compte que les SRUD de production nationale répondant à la définition du produit et les SRUDST de production nationale constituent des « marchandises similaires » aux marchandises en cause et qu’il n’y a qu’une seule catégorie de marchandises.

BRANCHE DE PRODUCTION NATIONALE

[75] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit la « branche de production nationale » de la façon suivante :

[...] l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. Peut toutefois en être exclu le producteur national qui est lié à un exportateur ou à un importateur de marchandises sous-évaluées ou subventionnées, ou qui est lui-même un importateur de telles marchandises.

[76] Le Tribunal doit donc décider si un dommage a été causé, ou s’il y a menace de dommage, à l’ensemble des producteurs nationaux de marchandises similaires ou aux producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. La décision d’évaluer ou non le dommage à la branche de production nationale dans son ensemble ou à une proportion majeure de celle-ci est à la discrétion du Tribunal et se rapporte aux faits qui surviennent au cours de l’enquête, y compris la présence de différences structurelles et comportementales entre les producteurs et l’accessibilité des éléments de preuve [64] . Si l’expression « proportion majeure » n’est pas définie dans la LMSI ni dans l’Accord antidumping et l’ASCM de l’OMC, on lui a donné le sens de « proportion importante ou considérable, et pas forcément d’une majorité » [65] .

[77] Dans son enquête préliminaire de dommage, le Tribunal a conclu, en se fondant sur les éléments de preuve au dossier à ce moment, que Palliser constituait plus de 20 p. 100, en valeur, de la production totale de marchandises similaires de la branche de production nationale et que, puisque la branche de production était très fragmentée et semblait comprendre de nombreux petits producteurs, ceci était suffisant pour être considéré comme une proportion majeure à cette étape des procédures [66] . Bien entendu, le Tribunal avait conclu, dans son enquête préliminaire de dommage, que la portée des marchandises similaires de production nationale était coextensive avec celle des marchandises en cause.

[78] Après avoir maintenant déterminé à l’étape de l’enquête que l’application stricte du principe de la portée coextensive énoncé dans certaines décisions antérieures n’est pas bien fondée en droit et que ce principe ne devait pas s’appliquer à la présente cause, et ayant pris la décision d’élargir la définition des marchandises similaires pour y inclure les SRUDST de production nationale, il convient maintenant de se pencher à nouveau sur la composition de la branche de production nationale.

[79] Dans le cadre de la présente enquête, le Tribunal a envoyé des questionnaires à 58 producteurs nationaux de marchandises similaires connus et potentiels [67] . Le Tribunal a recouru à plusieurs sources d’information pour identifier les principaux producteurs nationaux de SRUD répondant à la définition du produit et de SRUDST, notamment les renseignements figurant au dossier du Tribunal dans le cadre de son enquête préliminaire de dommage, des renseignements reçus des parties pendant le processus de consultation relatif aux questionnaires du Tribunal, les résultats d’un mini-sondage mené avant l’ouverture de la présente enquête, des renseignements figurant au dossier administratif de l’ASFC ainsi que des commentaires de producteurs nationaux [68] .

[80] Le Tribunal a reçu des réponses à son questionnaire à l’intention des producteurs de 24 producteurs nationaux de marchandises similaires, dont 21 ont fourni des informations qui pouvaient être intégrées au rapport d’enquête [69] , notamment sur leur production de marchandises similaires. Bien que seulement 14 producteurs nationaux aient fourni leurs résultats financiers pour les ventes nationales et que 13 aient fourni des données sur les autres indicateurs de rendement, ces producteurs représentaient bien au-delà de 80 p. 100, selon le volume, de la production collective de marchandises similaires par ces 21 répondants pendant la période visée par l’enquête [70] .

[81] Le 1er juillet 2021, le CCCD a demandé au Tribunal d’assigner à comparaître les autres producteurs nationaux figurant dans la liste d’envoi initiale, et autant d’autres producteurs que le personnel du Secrétariat du Tribunal pourrait identifier, ou de rendre des ordonnances pour les contraindre à fournir minimalement au Tribunal leurs volumes de production et leurs états des résultats pour les ventes issues de la production nationale pendant la période visée par l’enquête. Il fait valoir que, puisque seulement une fraction (36 p. 100) des producteurs nationaux sondés par le Tribunal a adéquatement répondu au questionnaire, les données que le Tribunal a reçues ne rendent pas compte avec exactitude de la production de marchandises similaires au Canada et sont par conséquent insuffisantes pour permettre au Tribunal de mener son analyse de dommage [71] . Il ajoute que les 58 producteurs nationaux connus et potentiels qui figurent dans la liste d’envoi du Tribunal sont probablement déjà sous-représentatifs de la totalité des producteurs canadiens de marchandises similaires, puisque, comme l’indiquait la plainte de Palliser, Statistique Canada répertorie 157 entreprises sous le code 337121 du Système de classification des industries de l’Amérique du Nord (SCIAN), lequel couvre la « fabrication de meubles de maison rembourrés » [72] .

[82] Le CCCD admet que la taille de bon nombre des producteurs nationaux restants est relativement petite, mais il soutient qu’il reste à le confirmer en recueillant à tout le moins auprès d’eux les données sur le volume de production, lesquelles sont nécessaires selon lui pour déterminer si les producteurs nationaux qui établissent qu’ils ont subi un dommage ou sont menacés de dommage représentent une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires.

[83] Le 5 juillet 2021, le Tribunal a rejeté la demande du CCCD [73] , indiquant, comme il est mentionné ci-dessus, qu’il avait recouru à plusieurs sources d’informations pour identifier les principaux producteurs nationaux de marchandises similaires et s’assurer qu’ils avaient été sondés au cours de l’enquête. Le Tribunal a alors mentionné qu’il était convaincu que tous les principaux producteurs nationaux de marchandises similaires avaient répondu au questionnaire. Il a ajouté que, comme la branche de production nationale est très fragmentée dans ce cas et que les ressources du Tribunal ne sont pas illimitées, il n’était ni réalisable dans la pratique ni nécessaire de prendre des mesures pour obtenir des réponses de chacun des producteurs nationaux potentiels.

[84] Malgré sa décision de rejeter la demande du CCCD, le Tribunal a mentionné que, si le CCCD, ou toute autre partie, étaient en possession d’informations indiquant que les principaux producteurs nationaux de marchandises similaires n’avaient pas été sondés ou n’avaient pas répondu au questionnaire du Tribunal, il était invité à les soumettre au Tribunal sans délai. Il a ajouté que toutes les parties qui s’opposent à des conclusions de dommage étaient libres d’inclure dans leurs observations sur la question du dommage tout argument quant à savoir si les producteurs nationaux qui ont répondu au questionnaire du Tribunal représentent une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires et s’ils doivent par conséquent constituer la « branche de production nationale » pour les fins de l’analyse de dommage du Tribunal.

[85] Dans leur mémoire déposé le 2 juillet 2021, les producteurs nationaux participants font valoir que, en 2020, la valeur des ventes nettes de marchandises similaires réalisées par les producteurs nationaux auprès desquels le Tribunal a obtenu des informations représentait plus de la moitié de l’ensemble des ventes de marchandises fabriquées au Canada sous le code 337121 du SCIAN, lesquelles totalisaient 512 millions de dollars [74] . Ils soulignent toutefois que, puisque ce code comprend les « établissements dont l’activité principale consiste à fabriquer des meubles de maison rembourrés » [75] , elle englobe probablement des productions accessoires ou des activités qui ne relèvent pas de la production de marchandises similaires. Ils soutiennent donc que les producteurs nationaux qui ont répondu au questionnaire du Tribunal en l’espèce dépassent le seuil de proportion majeure en vertu de la LMSI.

[86] Dans son mémoire, le CCCD reprend ses observations antérieures sur la question, ajoutant que la définition de « proportion majeure » de la « branche de production nationale » est propre à chaque producteur de telle sorte que, dans l’évaluation du dommage sur cette base, le Tribunal doit établir si la production totale de marchandises similaires par les producteurs nationaux qui subissent individuellement un dommage attribuable au dumping et au subventionnement des marchandises en cause constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. Il fait valoir que l’évaluation du dommage et du lien de causalité au cas par cas est d’autant plus cruciale dans la présente cause, puisque certains producteurs nationaux n’ont apparemment pas subi de dommage attribuable au dumping et au subventionnement des marchandises en cause.

[87] Le CCCD soutient en outre que, si les producteurs nationaux dont les données sont incluses dans les tableaux 82 et 83 du rapport d’enquête du Tribunal ont généré, en 2020, des ventes intérieures et à l’exportation combinées de marchandises similaires de production nationale qui représentent à peine plus de la moitié des 512 millions de dollars signalés pour l’ensemble des ventes de marchandises fabriquées sous le code 337121 du SCIAN, il demeure que 43 p. 100 de la production nationale n’est pas prise en compte dans les données du rapport d’enquête. En réponse à l’invitation du Tribunal contenue dans sa lettre du 5 juillet 2021, le CCCD fait remarquer qu’il sait qu’au moins deux producteurs nationaux principaux n’ont pas répondu au questionnaire du Tribunal et que cela ne représente qu’un exemple anecdotique d’un détaillant [76] .

[88] Enfin, le CCCD soutient qu’on ne peut présumer que les producteurs nationaux qui n’ont pas répondu au questionnaire du Tribunal ont subi un dommage, car, en vertu de l’article 3.1 de l’Accord antidumping de l’OMC, la détermination de l’existence d’un dommage doit se fonder sur des éléments de preuve positifs. Il ajoute que, même si les réponses reçues des producteurs nationaux autres que Palliser, Jaymar et Brentwood Classics Ltd. (Brentwood) indiquent de mauvais résultats financiers, ces producteurs n’ont pas fourni d’éléments de preuve positifs du lien de causalité entre leurs résultats et la concurrence des prix des importations visées.

[89] Dans leur mémoire en réponse, les producteurs nationaux participants, citant la décision de l’Organe d’appel de l’OMC dans CE – Éléments de fixation, font valoir que la définition de « branche de production nationale » permet de fonder une analyse du dommage sur une proportion majeure, qui reflète la branche de production nationale dans son ensemble [77] . Ils soutiennent qu’il n’existe aucune présomption indiquant que les producteurs nationaux non inclus dans la proportion majeure ont subi ou non un dommage puisque la proportion majeure est considérée comme étant représentative de la branche de production nationale dans son ensemble.

[90] Les producteurs nationaux participants soutiennent également que les producteurs nationaux qui représentent la proportion majeure doivent être évalués collectivement et que, même si la compréhension de la situation de chaque producteur peut être pertinente, en particulier pour l’analyse du lien de causalité par le Tribunal, il n’est pas nécessaire de déterminer la mesure dans laquelle chaque producteur a individuellement subi un dommage. Ils ajoutent que l’analyse de dommage de la proportion majeure doit être objective et que, par conséquent, elle ne peut favoriser les éléments les plus faibles ou les plus forts de la branche de production nationale.

[91] Personne ne conteste que la définition de « branche de production nationale » prévue au paragraphe 2(1) de la LMSI offre au Tribunal le pouvoir discrétionnaire d’évaluer le dommage pour la branche de production nationale dans son ensemble ou pour une proportion majeure de celle‑ci et que, dans les circonstances particulières de la présente enquête, l’absence de réponse au questionnaire d’un nombre important de producteurs nationaux potentiels signifie que le Tribunal est tenu de déterminer si la production totale de marchandises similaires par les producteurs nationaux qui ont répondu au questionnaire et fourni des informations constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires.

[92] Il faut identifier les principaux producteurs nationaux de marchandises similaires et veiller à ce qu’ils soient sondés. Prenant en considération que la branche de production canadienne de SRUD est très fragmentée et compte de nombreux petits producteurs, le Tribunal est d’avis que ses efforts étaient appropriés dans les circonstances. En effet, dans CE – Éléments de fixation, l’Organe d’appel reconnaît qu’il peut être difficile d’obtenir des renseignements concernant les producteurs nationaux dans des situations du marché particulières, telles qu’une branche de production fragmentée avec de nombreux producteurs et que l’utilisation d’une « proportion majeure » dans ces cas particuliers « ménage à l’autorité chargée de l’enquête une certaine flexibilité pour définir la branche de production nationale en fonction de ce qui est raisonnable et possible en pratique [78] » [nos italiques]. Outre son inutilité, l’émission d’assignations ou d’ordonnances de production à des dizaines, voire plus, de producteurs nationaux potentiels qui sont probablement de petite taille n’aurait indubitablement pas été raisonnable et possible en pratique, compte tenu des ressources limitées du Tribunal et du délai serré prévu par la loi dans lequel il doit terminer son enquête [79] .

[93] Au vu des éléments de preuve versés au dossier, le Tribunal est convaincu que la production totale de marchandises similaires par les producteurs nationaux qui ont répondu au questionnaire et fourni des informations constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. Cette conviction est attestée par le fait que, pour 2020, les 14 producteurs nationaux qui ont communiqué leurs résultats financiers rapportent un total de 291,9 millions de dollars de ventes intérieures et à l’exportation de marchandises similaires, ce qui représente 57 p. 100 de toutes les ventes de marchandises fabriquées au Canada sous le code 337121 du SCIAN, lesquelles totalisaient 512,8 millions de dollars [80] . Pour toute la période visée par l’enquête, ce chiffre représente en moyenne 54 p. 100.

[94] Le Tribunal a aussi calculé la valeur totale des ventes intérieures et à l’exportation de marchandises similaires des 21 producteurs qui ont répondu au questionnaire et fourni des informations. Il a observé qu’elles représentent environ 65 p. 100 de la valeur totale de toutes les ventes de marchandises fabriquées au Canada sous le code 337121 du SCIAN en 2020 et une moyenne de 61 p. 100 pour toute la période visée par l’enquête [81] . Ces chiffres signifient que, selon le tableau du rapport d’enquête qui est consulté, les producteurs nationaux dont les données figurent dans les tableaux ont vraisemblablement représenté, en moyenne, de 54 à 61 p. 100, en valeur, des ventes totales de marchandises similaires de production nationale pendant la période visée par l’enquête.

[95] Le Tribunal reconnaît que l’utilisation de la valeur totale de toutes les ventes de marchandises fabriquées au Canada sous le code 337121 du SCIAN comme approximation indirecte de la production collective nationale des marchandises similaires n’apporte pas le même degré de certitude que l’utilisation des véritables volumes ou valeurs de production de tous les producteurs nationaux. Cependant, ce n’est pas la première fois que le Tribunal utilise d’autres méthodes pour établir la production collective nationale des marchandises similaires et conclut qu’il est approprié de faire de même en l’espèce [82] . De plus, comme les producteurs nationaux participants l’indiquent, il est possible que le code 337121 du SCIAN ait une portée trop vaste puisqu’il semble couvrir des marchandises qui ne sont pas des marchandises similaires aux marchandises en cause [83] . Il est ainsi possible de déduire que les parts de la production collective nationale détenues par les répondants au questionnaire, comme calculées ci-dessus, sont probablement sous-estimées. Dans l’ensemble, le Tribunal considère que la valeur totale de toutes les ventes de marchandises fabriquées au Canada sous le code 337121 du SCIAN constitue une estimation suffisamment fiable pour établir la composition de la branche de production nationale dans la présente enquête.

[96] Comme mentionné précédemment, on a donné à l’expression « proportion majeure » le sens de proportion importante ou considérable, et pas forcément d’une majorité. En effet, des groupes spéciaux de l’OMC ont déjà conclu qu’un pourcentage de la production collective nationale inférieur à 50 p. 100 était suffisant pour constituer une proportion majeure [84] . Plus important encore, dans CE – Éléments de fixation, l’Organe d’appel n’exclut pas la possibilité que, dans le cas d’une branche de production fragmentée avec de nombreux producteurs, comme en l’espèce, une proportion de seulement 27 p. 100 de la production collective nationale puisse constituer une proportion majeure [85] .

[97] La considération de cette expression en contexte appuie également la conclusion selon laquelle la proportion majeure ne vise pas à établir une exigence de « majorité ». L’expression apparaît dans le paragraphe 2(1) de la LMSI à titre de solution de rechange à l’« ensemble » des producteurs nationaux. La définition reflète la réalité de bon nombre d’enquêtes, dans le cadre desquelles il n’est pas possible d’obtenir les informations demandées de tous les producteurs nationaux de marchandises similaires et confirme qu’une enquête et des conclusions de dommage ne sauraient être invalidées uniquement parce que le Tribunal n’a pas été en mesure d’obtenir les informations de la totalité des producteurs en question. La LMSI et les accords de l’OMC n’établissent pas de seuil numérique de ce qui constitue une proportion « majeure » de la production nationale; celle-ci varie au cas par cas.

[98] Bien que le CCCD semble indiquer que le pourcentage de la production nationale pris en compte dans les données contenues dans le rapport d’enquête est trop faible, il n’a cité au Tribunal aucune jurisprudence qui soutienne la proposition selon laquelle les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires représente plus de la moitié de la production collective nationale estimée des marchandises similaires ne puissent être considérés comme représentant une proportion majeure de cette production. Le CCCD soutient en outre que, puisque seuls 21 des 58 producteurs nationaux connus et potentiels sondés par le Tribunal ont adéquatement répondu au questionnaire, les données reçues par le Tribunal ne représentent pas avec exactitude la production de marchandises similaires au Canada. Néanmoins, le Tribunal est d’avis que cet argument n’est pas convaincant, puisque la « proportion majeure » est établie en fonction de la production (volume ou valeur) et non du nombre de producteurs.

[99] Compte tenu de l’analyse qui précède, le Tribunal conclut que les producteurs nationaux qui ont répondu au questionnaire du Tribunal et dont les informations sont contenues dans le rapport d’enquête constituent la branche de production nationale pour les fins de la présente enquête. Puisque leur production reflète substantiellement la production collective nationale des marchandises similaires [86] , la question de savoir si les producteurs nationaux qui n’ont pas répondu au questionnaire du Tribunal ont subi un dommage n’est pas pertinente.

[100] Le Tribunal n’a pas non plus été convaincu par l’argument du CCCD selon lequel la production totale de marchandises similaires par les producteurs nationaux qui ont individuellement subi un dommage doive constituer une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires.

[101] Aucune disposition de la LMSI ou des accords de l’OMC ne laisse croire que, après que la branche de production nationale est définie à l’aide de l’une des deux méthodes (l’« ensemble » des producteurs nationaux ou une « proportion majeure » de ceux-ci), les producteurs faisant partie de cette branche de production nationale qui ont individuellement subi un dommage doivent également représenter une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires. Un tel cas viderait de sens le libellé du paragraphe 2(1), puisqu’il n’y aurait aucun motif de définir, en tant qu’étape préliminaire, la branche de production nationale à l’aide de l’une des deux méthodes proposées. La définition de « branche de production nationale » contraindrait alors simplement, comme formalité unique, à ce que les producteurs nationaux jugés comme ayant subi individuellement un dommage représentent une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires.

[102] Dans la mesure où, comme en l’espèce, le sous-ensemble défini de la branche de production nationale est significatif ou assez important pour représenter l’ensemble des producteurs nationaux, et à défaut d’éléments de preuve convaincants voulant que les données agrégées sur le rendement des producteurs qui représentent une proportion majeure de la production collective nationale de marchandises similaires ne montrent qu’un seul côté de la médaille [87] , la LMSI envisage que l’incidence des marchandises en cause sur la branche de production nationale ainsi définie soit évaluée collectivement. En d’autres mots, le dommage doit être évalué en fonction du rendement des producteurs nationaux qui représentent une proportion majeure de la production collective nationale, considérés dans leur ensemble.

[103] Par conséquent, le Tribunal effectuera son analyse de dommage en évaluant, de façon collective, les producteurs nationaux qui composent la branche de production nationale. Toutefois, il n’est pas exclu que la situation liée à un producteur individuel soit pertinente, et que celle-ci sera prise en compte par le Tribunal dans le cadre de son évaluation d’autres facteurs (soit la causalité) et le caractère sensible du dommage.

CUMUL

[104] Le paragraphe 42(3) de la LMSI exige que le Tribunal évalue les effets cumulatifs du dumping ou du subventionnement des marchandises importées au Canada en provenance de plus d’un des pays visés s’il est convaincu 1) que la marge de dumping ou le montant de subvention relativement aux importations de marchandises de chacun de ces pays n’est pas minimal et que le volume des importations de chacun de ces pays n’est pas négligeable, et 2) qu’une telle évaluation est indiquée compte tenu des conditions de concurrence entre les marchandises de n’importe quel de ces pays et les marchandises de n’importe quel autre de ces pays ou les marchandises similaires de production nationale.

Caractère minimal et caractère négligeable

[105] Le paragraphe 2(1) de la LMSI prévoit que le mot « minimale », dans le cas de la marge de dumping, s’entend d’une marge inférieure à 2 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises et que, dans le cas du montant de subvention, il s’entend d’un montant inférieur à 1 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises. Ce paragraphe prévoit aussi que le mot « négligeable » est un qualificatif applicable à un volume qui est inférieur à un volume représentant 3 p. 100 de la totalité des marchandises répondant à la définition du produit et provenant de tous les pays, qui sont dédouanées au Canada. Toutefois, pour ce qui est de pays en développement tel que le Vietnam [88] , le paragraphe 42(4) de la LMSI et l’alinéa 12 de l’article 27 de l’ASMC de l’OMC ont pour effet, pour les fins de l’analyse cumulative du Tribunal, de relever à 2 p. 100 le seuil relatif au montant de subvention minimal et à 4 p. 100 le seuil relatif au volume négligeable de marchandises subventionnées.

[106] L’ASFC signalait, parallèlement à ses décisions définitives de dumping et de subventionnement, des marges de dumping à l’échelle du pays de 135,4 p. 100 pour la Chine et de 171,2 p. 100 pour le Vietnam, et des montants de subvention à l’échelle du pays de 12,7 p. 100 pour la Chine et de 4,7 p. 100 pour le Vietnam [89] . Ces marges et montants dépassent les seuils indiqués précédemment; ils ne sont donc pas « minimaux ».

[107] Pour déterminer si le volume de marchandises sous-évaluées ou subventionnées provenant d’un pays est négligeable, le Tribunal examine habituellement le volume des importations au cours de la période visée par l’enquête de l’ASFC [90] , laquelle, en l’espèce, s’est étendue sur 18 mois, du 1er juin 2019 au 30 novembre 2020. Le Tribunal fait remarquer que, dans ce cas, la valeur des importations, plutôt que le volume, a été utilisée pour son évaluation [91] . Pendant la période de l’enquête de l’ASFC, la valeur des marchandises sous-évaluées et celle des marchandises subventionnées de chacun des pays visés, comme en fait état l’ASFC dans ses décisions définitives, étaient supérieures à 3 p. 100 (ou à 4 p. 100 dans le cas de la valeur des marchandises subventionnées en provenance du Vietnam) de la valeur totale de toutes les importations répondant à la définition du produit; elles n’étaient donc pas « négligeables » [92] .

Conditions de concurrence

[108] Ayant déterminé que les marges de dumping et les montants de subvention n’étaient pas minimaux et que la valeur des marchandises sous-évaluées et subventionnées n’était pas négligeable, le Tribunal établira maintenant s’il est approprié d’évaluer les effets cumulatifs du dumping et les effets cumulatifs du subventionnement des marchandises en cause en provenance de Chine et du Vietnam, en tenant compte des conditions de concurrence entre les marchandises de chacun de ces pays et/ou entre ces marchandises et les marchandises similaires de production nationale.

[109] Les facteurs dont tient généralement compte le Tribunal dans l’évaluation des conditions de concurrence entre les marchandises en cause et les marchandises similaires comprennent l’interchangeabilité, la qualité, les prix, les circuits de distribution, les modes de transport, le moment des arrivées et la répartition géographique. Le Tribunal peut également tenir compte d’autres facteurs pour décider si les exportations d’un pays donné devraient entrer dans le cumul et reconnaît qu’aucun facteur ne peut, à lui seul, être déterminant [93] .

[110] Dans son enquête préliminaire de dommage, le Tribunal a conclu que les éléments de preuve dont il disposait à cette étape-là de la procédure indiquaient, de façon raisonnable, que les conditions de concurrence entre les marchandises en cause et entre les marchandises en cause et les marchandises similaires étaient semblables [94] .

[111] Aucune des parties s’opposant aux conclusions de dommage n’a présenté d’élément de preuve ni d’observation sur la question du cumul dans la présente enquête. De leur côté, les producteurs nationaux participants soutiennent qu’il est approprié d’évaluer les effets cumulatifs compte tenu des informations contenues dans le rapport d’enquête du Tribunal, qui, selon eux, indique que les marchandises similaires de production nationale et les marchandises en cause en provenance de Chine et du Vietnam se livrent concurrence à l’échelle des clients, sont substituables les unes aux autres, sont vendues par le truchement des mêmes circuits de distribution et sont influencées par des facteurs hors prix comparables.

[112] Le Tribunal convient, à l’instar des producteurs nationaux participants, que les conditions de concurrence en l’espèce appuient l’évaluation des effets cumulatifs des marchandises en cause en provenance de Chine et du Vietnam. Les informations contenues dans le rapport d’enquête confirment que les distributeurs et les détaillants canadiens ont acheté des marchandises en cause en provenance de Chine et du Vietnam, ainsi que des marchandises similaires de production nationale, pendant toute la période visée par l’enquête, et qu’ils les considèrent généralement comme interchangeables [95] . En règle générale, les acheteurs considéraient que les marchandises en cause et les marchandises similaires étaient comparables en ce qui a trait à la qualité et à leur capacité à satisfaire aux spécifications techniques, et que les marchandises en cause étaient comparables entre elles quant au prix net [96] .

[113] Les marchandises en cause sont expédiées au Canada à l’aide du même mode de transport (fret maritime) et, même si les délais de livraison sont en moyenne plus longs que ceux des marchandises similaires de production nationale [97] , la différence n’est pas suffisamment grande pour prévenir la concurrence entre elles, comme le montre la présence des deux types de marchandises sur le marché en même temps et la concurrence entre elles. Enfin, les éléments de preuve indiquent que les marchandises similaires de production nationale et les marchandises importées répondant à la définition du produit étaient vendues sur les mêmes marchés géographiques au Canada, et à peu près dans la même proportion relative, pendant la période visée par l’enquête [98] .

[114] Compte tenu de l’analyse qui précède, le Tribunal est convaincu que l’évaluation des effets cumulatifs du dumping et des effets cumulatifs du subventionnement des marchandises en cause en provenance de Chine et du Vietnam est appropriée dans les circonstances.

CUMUL CROISÉ

[115] Comme susmentionné, puisque l’ASFC a conclu que la grande majorité des marchandises en cause avaient fait l’objet de dumping et de subventionnement, le Tribunal doit décider s’il évaluera les effets cumulatifs du dumping et du subventionnement de ces marchandises (c.-à-d. s’il effectuera un cumul croisé.)

[116] Aucune disposition législative ne traite directement du cumul croisé. Toutefois, comme indiqué dans des affaires antérieures, les effets du dumping et du subventionnement des mêmes marchandises provenant d’un pays donné se manifestent par un seul ensemble d’effets dommageables sur les prix, et il peut se révéler impossible d’isoler les effets causés par le dumping de ceux qui sont causés par le subventionnement [99] . En fait, les effets sont si étroitement enchevêtrés qu’il peut se révéler impossible d’en attribuer une proportion précise au dumping et une autre au subventionnement.

[117] Étant donné ce qui précède, et eu égard au fait qu’aucune partie n’a déposé d’observations à l’encontre d’un cumul croisé en l’espèce, le Tribunal suivra sa pratique habituelle qui consiste à évaluer les effets cumulatifs du dumping et du subventionnement des marchandises en cause.

ANALYSE DE DOMMAGE

[118] Le paragraphe 37.1(1) du Règlement sur les mesures spéciales d’importation [100] prévoit que, pour déterminer si le dumping et le subventionnement ont causé un dommage sensible à la branche de production nationale, le Tribunal doit tenir compte du volume des marchandises sous-évaluées et subventionnées, de leur effet sur le prix des marchandises similaires sur le marché national et de leur incidence sur la situation de la branche de production nationale. Le paragraphe 37.1(3) exige également que le Tribunal détermine s’il existe un lien de causalité entre le dumping et le subventionnement des marchandises et le dommage, selon les facteurs énumérés au paragraphe 37.1(1), et si des facteurs autres que le dumping et le subventionnement des marchandises ont causé un dommage.

[119] Avant de procéder à l’analyse de dommage, le Tribunal présentera un survol du marché canadien des SRUD afin de situer le contexte de son analyse, laquelle, dans la présente enquête, est axée sur l’importance du prix dans la décision d’achat et au lien de causalité. Le Tribunal abordera également la question des allégations selon lesquelles la branche de production nationale subissait déjà un dommage au début de la période visée par l’enquête.

Survol du marché canadien des SRUD

[120] Selon les producteurs nationaux participants, les importations en provenance de la Chine et du Vietnam ont considérablement contribué à la baisse marquée de la production canadienne de marchandises similaires, laquelle a commencé après l’accession de la Chine à l’OMC en 2001. En 2002, les ventes de marchandises fabriquées au Canada sous le code 337121 du SCIAN ont atteint environ 1,67 milliard de dollars (en dollars indexés de 2020) [101] . En 2020, ce chiffre avait baissé, pour s’établir à 512,8 millions, une chute de près de 70 p. 100. Cependant, en 2007, les ventes totales avaient déjà reculé de plus de 50 p. 100, en valeur, par rapport à 2002. Bien que la branche de production nationale ait connu une croissance modeste de 2011 à 2017, cette remontée a pris fin en 2018, les ventes totales ayant alors diminué de plus de 25 p. 100, et baissé encore en 2019 et en 2020. M. Art DeFehr, président exécutif de Palliser, a souligné le déclin global de la branche de production nationale en mentionnant que les trois foires habituelles du meuble qui se tenaient à Montréal, à Toronto et dans l’Ouest canadien avaient disparu il y a plusieurs années [102] .

[121] Comme exposé ci-dessus, la branche de production nationale est très fragmentée; elle compte une poignée de grands producteurs nationaux et peut-être des dizaines de petits producteurs. Pendant la période visée par l’enquête, les producteurs nationaux importants étaient Palliser, Elran, Dynasty Furniture Manufacturing Inc. (Dynasty) et Decor-Rest Furniture Ltd [103] .

[122] La composition du marché canadien des SRUD a considérablement changé pendant la période visée par l’enquête. En 2017, les ventes de toutes les importations répondant à la définition du produit représentaient un peu plus de la moitié du marché total [104] . En 2020, cette part atteignait les deux tiers du marché total. Selon M. DeFehr, en règle générale, les producteurs chinois et vietnamiens reçoivent des commandes à volume élevé, et les marchandises sont produites en série dans certains modèles, couleurs et recouvrements standard, à très bas prix cibles [105] . Cette situation a poussé bon nombre de producteurs canadiens à abandonner le marché du volume pour se spécialiser dans des produits de luxe et de qualité supérieure, et à se tourner vers les produits sur mesure plutôt que de fabriquer des produits standard [106] .

[123] Les données contenues dans le rapport d’enquête indiquent que la majorité des ventes de marchandises similaires de production nationale et d’importations de SRUD répondant à la définition du produit sont effectuées directement auprès des détaillants, bon nombre de grands détaillants étant eux-mêmes importateurs de marchandises en cause [107] . Le pouvoir d’achat au Canada relativement aux SRUD réside avec un petit nombre de grands détaillants, en particulier Leon’s et The Brick, qui exercent une mainmise importante sur le marché intérieur et qui, dans les faits, déterminent les prix [108] . Certains détaillants cherchent également à accroître leur emprise sur les produits qu’ils vendent et les marges qu’ils font en intervenant davantage dans la conception du produit, en demandant des exclusivités ou en mettant en place des chaînes d’approvisionnement directes pour la fabrication de SRUD sous leurs marques maison [109] . Si de nombreux facteurs entrent en jeu dans les décisions d’achat de SRUD, le prix constitue un facteur clé (voir ci-dessous pour un exposé détaillé sur l’importance du prix).

[124] Bon nombre de détaillants adoptent la stratégie du « bon, mieux, meilleur » en ce qui concerne le prix des produits. D’un point de vue terminologique, ces termes équivalent à « bas de gamme, moyen de gamme et haut de gamme » [110] . Les marchandises de la catégorie « bon », offertes à prix cible d’entrée, servent à attirer les consommateurs en magasin, alors que les catégories « mieux » et « meilleur » comprennent des meubles de premier choix dont la qualité, les caractéristiques et le prix cible augmentent progressivement [111] . Les prix des marchandises de la catégorie « bon » sont utilisés comme points de référence de la valeur pour l’établissement des prix des marchandises dans les deux autres catégories [112] . À ce titre, les bas prix de la catégorie « bon » font diminuer les prix des catégories « mieux » et « meilleur ».

[125] Les grands détaillants doivent offrir un assortiment complet de SRUD (stationnaires en tissu, stationnaires en cuir, mobiles) de chacune des catégories ou de chacun des segments de marché et de tous les prix cibles pour satisfaire à un large éventail de demandes des consommateurs [113] . En ce qui concerne les fournisseurs, Palliser, Brentwood, Jaymar et la plupart des autres producteurs nationaux relèvent en gros des catégories « mieux » et « meilleur », mais d’autres, comme Dynasty, répondent à la catégorie « bon » [114] . Il y a des importations de marchandises en cause dans les trois catégories [115] . Les marchandises de production nationale et les produits importés se livrent concurrence pour obtenir une place dans la salle d’exposition des détaillants et ainsi accroître leurs ventes [116] . Selon les éléments de preuve, un chevauchement concurrentiel manifeste existe entre les marchandises en cause et les marchandises similaires dans toutes les catégories.

[126] La montée du commerce électronique au détail constitue un changement important ayant eu lieu pendant la période visée par l’enquête. Selon une étude publiée par Statistique Canada, la proportion des ventes en ligne des « magasins de meubles et d’accessoires de maison » est passée de 2,2 p. 100 des ventes totales en 2016 à 6,6 p. 100 en 2019, puis a fait un bond pour s’établir à 16,4 p. 100 pendant la période allant de janvier à mai 2020, à la suite de la pandémie de COVID‑19 [117] . Dans le cadre de leur stratégie de commerce électronique, les fabricants peuvent envisager de vendre leurs produits directement aux consommateurs sur leur propre site Web (ventes directes aux consommateurs) ou par l’intermédiaire d’un fournisseur de services de commerce électronique (« places de marché »), comme Wayfair ou Amazon [118] . Ils peuvent aussi compter sur les détaillants qui ont leur propre plate-forme de commerce en ligne ou travailler directement avec des détaillants pour mettre sur pied une plate-forme centralisée [119] . Les détaillants qui ont des magasins physiques et en ligne doivent livrer concurrence aux géants du commerce électronique, comme Wayfair et Amazon, qui peuvent offrir un assortiment illimité de marchandises qui se livrent concurrence en ce qui a trait au style et au prix [120] .

[127] Enfin, la pandémie de COVID-19 a touché la plupart des commerces en 2020 (la dernière année de la période visée par l’enquête), en particulier à partir de la fin mars, alors que des mesures restrictives ont été imposées par les gouvernements du Canada et d’ailleurs dans le monde. Cette situation se constate sur le marché canadien des SRUD, qui a diminué de 5 p. 100 en 2020, après deux années de croissance relativement solide [121] .

Présence de dommage au début de la période visée par l’enquête

[128] Les producteurs nationaux participants font valoir que la Chine et le Vietnam ont grandement contribué au long déclin constant de la production de marchandises similaires, lequel a commencé au début des années 2000, comme exposé précédemment. Selon eux, la loi n’exige pas que la première année de la période visée par l’enquête soit considérée comme le point de référence pour évaluer le dommage au cours des années subséquentes. Ils soutiennent que, en l’espèce, la branche de production nationale a commencé à perdre d’importantes parts de marché et à subir des effets négatifs sur les prix avant 2017 et, à ce titre, 2017 ne devrait pas être considérée comme le point de départ avant lequel il n’y avait pas de dommage. Ils ajoutent que, bien que la branche de production nationale aurait pu chercher à obtenir une protection il y a des années, ou aurait dû le faire, ce fait n’invalide pas le dommage que les marchandises en cause ont causé pendant la période visée par l’enquête.

[129] Le CCCD soutient qu’aucun élément de preuve n’indique que les marchandises importées avant la période visée par l’enquête ont fait l’objet de dumping ou de subventionnement et qu’il n’y a pas d’allégation selon laquelle le dumping ou le subventionnement a causé un dommage. Il fait valoir que le dommage causé par la poursuite des tendances qui étaient déjà présentes sur le marché n’est pas un dommage causé par les marchandises en cause.

[130] Ashley et Violino soutiennent que, bien qu’il ne soit pas nécessairement fatal à la cause d’une branche de production nationale d’avoir déjà subi un dommage avant la période visée par l’enquête, le Tribunal a déjà affirmé que des conclusions de dommage devaient « être fondée[s] sur les effets dommageables qui se cristallisent (c.-à-d. qui se manifestent) au cours de la période visée par l’enquête ». [122]

[131] De leur côté, RHI, Wayfair et HTL font valoir que les observations portant sur le dommage allégué subi par la branche de production nationale avant la période visée par l’enquête ne sont pas pertinentes pour la présente enquête et ne peuvent être prises en considération par le Tribunal dans son analyse de dommage. Elles soutiennent également que, comme le Tribunal l’a conclu dans Contreplaqués décoratifs, il peut uniquement tenir compte de l’incidence des importations visées qui se sont produites pendant la période visée par l’enquête.

[132] Dans Contreplaqués décoratifs, le Tribunal s’est penché sur le même argument que celui qui est avancé par les producteurs nationaux participants. Il a alors convenu que la loi n’exigeait pas explicitement que le dommage eût débuté ou empiré durant la période visée par l’enquête pour que la branche de production nationale puisse se prévaloir de la protection de la LMSI, et que la branche de production nationale pouvait, en théorie, déjà subir un dommage au début de la période visée par l’enquête. Toutefois, le Tribunal a conclu qu’il n’était pas en mesure d’établir si ce dommage était sensible et s’il avait été causé par le dumping et le subventionnement des marchandises en cause, car il ne disposait pas de données portant sur la période précédant celle visée par l’enquête et que l’ASFC n’avait rendu aucune décision selon laquelle les importations visées avaient fait l’objet de dumping ou de subventionnement durant cette période [123] .

[133] Les producteurs nationaux participants sont actuellement dans la même impasse. Le Tribunal n’a pas recueilli de données ni ne dispose d’informations au dossier sur les volumes et les prix des marchandises en cause et des marchandises similaires, ni sur la situation de la branche de production nationale avant la période visée par l’enquête [124] . L’ASFC n’a rendu aucune décision selon laquelle les marchandises en cause ont fait l’objet de dumping ou de subventionnement durant cette période. Ainsi, le Tribunal n’est pas en mesure d’établir que la branche de production nationale a subi un dommage avant la période visée par l’enquête, que ce dommage était toujours présent au début de la période visée par l’enquête, et que le dommage a été causé par le dumping ou le subventionnement des marchandises en cause, en soi.

[134] Par conséquent, comme dans le cas de Contreplaqués décoratifs [125] , le Tribunal déterminera si le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage à la branche de production nationale en examinant les changements dans le volume des marchandises, leur effet sur le prix des marchandises similaires et leur incidence sur la situation de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête, à savoir, en l’espèce, pendant la période de quatre années allant du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2020.

Volume des importations de marchandises sous-évaluées et subventionnées

[135] Aux termes de l’alinéa 37.1(1)a) du Règlement, le Tribunal doit prendre en compte le volume des marchandises sous‑évaluées ou subventionnées et, plus précisément, doit déterminer s’il y a eu une augmentation marquée du volume, soit en quantité absolue, soit par rapport à la production ou à la consommation de marchandises similaires.

[136] En quantité absolue, le volume des importations visées a augmenté année après année pendant la période visée par l’enquête. En effet, elles ont crû de 36 p. 100 en 2018, de 21 p. 100 en 2019 et de 1 p. 100 en 2020 [126] . Bien que le taux de croissance a sensiblement ralenti pendant la période visée par l’enquête, le volume d’importations visées a néanmoins fait un bond de 66 p. 100 au total pendant la période [127] . À titre de comparaison, le marché canadien total n’a augmenté que de 10 p. 100 pendant la même période, ce chiffre étant tiré vers le bas par une baisse de 5 p. 100 sur le marché en 2020 [128] .

[137] La part des importations totales répondant à la définition du produit que représentent les marchandises en cause a augmenté pendant la période visée par l’enquête, passant de 67 p. 100 en 2017 à 78 p. 100 en 2020, soit une hausse de 11 points de pourcentage [129] . Cette augmentation a eu lieu aux dépens des importations non visées en provenance des États-Unis, dont la part des importations totales est passée de 31 p. 100 à 20 p. 100 pendant la même période. La part des importations totales détenue par les importations non visées en provenance d’autres pays était négligeable pendant toute la période visée par l’enquête. Les marchandises en cause représentaient donc, de loin, la source d’importation au Canada la plus importante pendant toute la période visée par l’enquête.

[138] Relativement à la production nationale, le volume des importations visées a plus que doublé pendant la période visée par l’enquête, passant d’une proportion de 65 p. 100 en 2017 à 144 p. 100 en 2020 [130] . Relativement aux ventes intérieures de la production nationale, le volume des importations visées a aussi plus que doublé pendant la période visée par l’enquête, passant d’une proportion de 74 p. 100 en 2017 à 165 p. 100 en 2020. Le Tribunal fait remarquer que le taux de croissance dans les deux mesures des importations relatives a également ralenti pendant la période visée par l’enquête, mais est néanmoins demeuré important tout au cours de celle-ci, y compris en 2020.

[139] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que, au cours de la période visée par l’enquête, le volume des importations visées a considérablement augmenté, tant en quantité absolue que relative.

Effet des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur les prix

[140] Aux termes de l’alinéa 37.1(1)b) du Règlement, le Tribunal doit tenir compte de l’effet des marchandises sous-évaluées ou subventionnées sur le prix des marchandises similaires et, plus particulièrement, doit déterminer si les marchandises sous-évaluées ont mené, de façon marquée, soit à la sous-cotation ou à la baisse du prix des marchandises similaires, soit à la compression du prix des marchandises similaires en empêchant les augmentations de prix qui, par ailleurs, se seraient vraisemblablement produites pour ces marchandises. À cet égard, le Tribunal fait une distinction entre l’effet des marchandises sous-évaluées ou subventionnées sur les prix et les effets sur les prix qui découlent d’autres facteurs.

[141] Cependant, avant d’aborder l’effet des marchandises sous-évaluées et subventionnées sur le prix des marchandises similaires, le Tribunal doit d’abord déterminer l’importance relative du prix dans les décisions d’achat de SRUD et répondre aux arguments soulevés par les parties opposées à l’égard de la fiabilité et de la force probante des données sur les prix unitaires contenues dans le rapport d’enquête du Tribunal.

Importance du prix dans les décisions d’achat

[142] Contrairement aux causes portant sur des produits de base qui sont entièrement interchangeables et se livrent concurrence sur le marché presque complètement en fonction du prix, l’espèce porte sur les SRUD, un produit de consommation pour lequel des facteurs autres que le prix peuvent avoir une incidence sur les décisions d’achat. Même s’il a été conclu précédemment que les SRUDST et les SRUD de production nationale répondant à la définition du produit étaient similaires aux marchandises en cause parce que leur utilisation et leurs autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause et qu’ils se livrent généralement concurrence sur le marché canadien, le Tribunal n’a pas encore déterminé la mesure dans laquelle cette concurrence s’effectue en fonction du prix. Puisque, dans les circonstances de l’espèce, c’est en définitive la sous-cotation des prix des marchandises sous-évaluées et subventionnées qui a peut-être entraîné le dommage causé au rendement global de la branche de production nationale, il est indispensable d’établir l’importance relative du prix dans les décisions d’achat de SRUD. Il s’ensuit que, si le prix n’est pas un facteur important pour les acheteurs de SRUD, le dumping et le subventionnement des marchandises en cause seraient difficilement une cause de dommage sensible.

[143] Les producteurs nationaux participants soutiennent que le marché de détail des marchandises similaires et des marchandises en cause est concurrentiel relativement aux prix, ce que montre très clairement le matériel publicitaire des plus grands détaillants canadiens, qui garantissent essentiellement les prix les plus bas. Ils font remarquer que les acheteurs reconnaissent l’importance du prix, puisque 9 des 32 répondants au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs ont indiqué que le prix net le plus bas constituait un facteur très important dans les décisions d’achat et que 19 répondants ont répondu qu’il s’agissait d’un facteur assez important [131] . Les producteurs nationaux participants font valoir que, même si d’autres facteurs (c.-à-d. des facteurs autres que le prix) sont plus fréquemment considérés comme très importants, les réponses des acheteurs indiquent que ces facteurs ne sont pas un élément significatif de choix entre les marchandises similaires et les marchandises en cause, ce qui fait du prix le facteur le plus important dans les décisions d’achat.

[144] Les parties opposées considèrent en règle générale le prix comme un facteur moins important dans les décisions d’achat. Par exemple, IKEA soutient que, selon les réponses au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs, les facteurs autres que le prix sont les plus importants dans les décisions d’achat. Wayfair fait remarquer que la grande majorité des répondants au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs ont indiqué que les produits les moins dispendieux ne remportaient jamais ou seulement parfois les contrats ou les ventes [132] . Le CCCD ajoute que, si les produits n’ont pas à être identiques pour que la comparaison des prix puisse être effectuée, il est essentiel de prendre en compte les facteurs autres que le prix.

[145] Le Tribunal est d’avis que les éléments de preuve au dossier appuient la conclusion que le prix est un facteur clé dans les décisions d’achat de SRUD. La majorité des répondants au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs ont indiqué que le prix net le plus bas constituait un facteur très important ou assez important dans les décisions d’achat et que les produits les moins dispendieux remportaient toujours, généralement ou parfois les contrats ou les ventes [133] . Même si la majorité des répondants ont aussi indiqué que d’autres facteurs, comme la qualité du produit, la fiabilité du fournisseur et l’apparence du produit, étaient plus importants que le prix dans les décisions d’achat et constituaient des raisons pour ne pas acheter les produits les moins chers, les répondants considéraient généralement les marchandises similaires et les marchandises en cause comme comparables en ce qui a trait à ces facteurs [134] .

[146] Assurément, dans le cas de certains facteurs, les marchandises similaires ou les marchandises en cause étaient perçues comme ayant un avantage distinct sur l’autre. Par exemple, une majorité de répondants ont indiqué que la Chine et le Vietnam avaient un avantage en ce qui concerne l’étendue de la gamme de produits, mais que le Canada en avait un relativement aux frais de livraison et au service après-vente ou garanties [135] . Tout compte fait, selon l’interprétation du Tribunal, les réponses au questionnaire à l’intention des acheteurs appuient l’avis que le prix constitue généralement un facteur très important dans les décisions d’achat, si les autres facteurs comme la qualité et l’apparence du produit sont comparables, ou que certains avantages dont bénéficient soit les marchandises similaires ou les marchandises en cause sont compensés par les avantages dont bénéficient les autres marchandises.

[147] La position selon laquelle le prix est un facteur clé dans les décisions d’achat est étayée par le fait que bon nombre de détaillants se définissent par une proposition de valeur particulière qui consiste à offrir d’excellents prix et qui constitue un élément moteur de leur façon de mener leurs affaires, que ce soit la mise en marché ou les stratégies d’approvisionnement. Par exemple, Struc-Tube explique sur son site Web que sa mission est d’offrir à ses clients « la gamme de meubles et d’accessoires modernes la plus incroyable, au meilleur prix possible » [traduction] et Léon affirme qu’il « continue de vendre des meubles [...] de marques connues au prix le plus bas garanti » [136] [traduction]. Par ailleurs, The Brick indique que sa devise est « [c]hez Brick, nous nous dévouons afin qu’il y ait plus d’économies pour vous [137] » [traduction]. Les détaillants font également la promotion des bas prix des marchandises à prix cible d’entrée, ou des articles soldés, dans les médias imprimés, à la télévision ou en ligne [138] . Pour respecter leurs promesses et satisfaire aux attentes afférentes des clients relativement au prix, les détaillants sont tenus d’acheter des SRUD auprès de leurs fournisseurs au plus bas prix possible.

[148] Bon nombre de témoins des détaillants ont corroboré cette situation, déclarant que l’industrie était effectivement sensible au prix. M. Matthew Fischel, vice-président de Struc-Tube, a confirmé que le prix de détail et les attentes des clients relativement au prix étaient au centre des décisions de Stuc-Tube en matière d’approvisionnement [139] . M. Blake reconnaît que, pour The Brick, dans la comparaison entre des marchandises similaires et des marchandises en cause de même qualité, le prix est sans aucun doute un facteur important [140] . Pour sa part, M. Shaun Dufresne, directeur principal de la mise en marché chez Dufresne, a expliqué que Dufresne fonctionnait à rebours, soit qu’elle partait des attentes des clients quant aux prix cibles de détail pour s’approvisionner en marchandises qui lui permettent de couvrir ses marges d’exploitation [141] . Les parties opposées soutiennent que ce sont les consommateurs qui dictent les prix sur le marché par leurs attentes et que, par conséquent, les détaillants n’ont d’autre choix que d’être sensibles au prix.

[149] En particulier, le CCCD fait valoir que la pression sur les prix ne provient pas des importations, mais bien des consommateurs. Selon lui, le prix que les consommateurs sont disposés à accepter est le plafond qui détermine le prix auquel les SRUD peuvent être acquis du fabricant et c’est ce plafond, et non les marchandises en cause en soi, qui entraîne des effets négatifs sur les prix. Cependant, le Tribunal est d’avis que les raisons pour lesquelles le prix peut être un facteur important dans les décisions d’achat des détaillants ne sont pas pertinentes pour les fins de son analyse de dommage. Dès qu’il est déterminé que le prix est un facteur clé dans les décisions d’achat, comme il est clairement sous-entendu, voire expressément reconnu, par le CCCD dans son argument et ses éléments de preuve, il peut être présumé que les marchandises sous-évaluées ou subventionnées à bas prix entraîneront probablement des pertes de ventes et/ou des réductions de prix pour la branche de production nationale.

[150] En fait, le Tribunal a déjà affirmé qu’il n’avait pas, aux termes de l’article 42 de la LMSI, le pouvoir de refuser à une branche de production nationale la protection à laquelle elle a droit en vertu de la Loi au motif que des producteurs en aval ou d’autres consommateurs doivent acheter des marchandises sous-évaluées et subventionnées pour être concurrentiels sur les marchés des produits en aval [142] . Par conséquent, tout argument selon lequel les prétendues « pressions sur les prix » ou prix « plafond » subies par les détaillants viennent des consommateurs ou des utilisateurs en aval n’est pas pertinent. Ce qui importe est que, d’après les éléments de preuve, les tendances concurrentielles sur le marché de détail obligent les grands détaillants à être très sensibles au prix. Bref, le fait que les détaillants doivent acquérir des marchandises sous-évaluées ou subventionnées pour pouvoir les vendre aux consommateurs ou être concurrentielles sur le marché de détail parce que « les consommateurs canadiens ne tolèrent pas de payer plus cher que ce qu’ils croient que l’article vaut » [traduction] ou qu’ils « votent avec leur portefeuille » [143] [traduction] confirme que, en règle générale, les décisions d’achat des détaillants sont en grande partie motivées par le prix.

[151] En outre, des éléments de preuve des producteurs nationaux attestent que le prix est l’une des principales préoccupations soulevées par les grands détaillants dans les négociations [144] . Le Tribunal a entendu des témoignages indiquant que, pour un produit donné dont ils ont besoin pour combler un manque dans leur assortiment, les détaillants remettront au fournisseur une liste de spécifications et une cible de prix que celui-ci devra respecter pour conclure une vente [145] . Par conséquent, tout compte fait, cette situation entraîne une concurrence entre les fournisseurs nationaux et étrangers en fonction du prix pour des produits de qualité semblable aux caractéristiques comparables.

[152] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que le prix est un facteur clé dans les décisions d’achat de SRUD et que les marchandises sous-évaluées et subventionnées vendues à un prix inférieur à celui des marchandises similaires de production nationale auront des effets négatifs sur le prix des marchandises similaires.

Fiabilité et valeur probante des données sur les prix unitaires contenues dans le rapport d’enquête

[153] Le rapport d’enquête du Tribunal contient des données sur les prix unitaires des importations, les ventes totales sur le marché national, les ventes par niveau commercial (distributeurs/grossistes/groupes d’achat et détaillants), les ventes de 11 produits de référence et les ventes aux clients communs [146] .

[154] Le CCCD soutient que, du point de vue de la preuve, l’examen des données agrégées sur les prix unitaires n’est pas fiable ni probant, car il est impossible de présumer que les achats d’importations et les ventes de la production nationale pendant la période visée par l’enquête reflétaient la même combinaison de produits. Il ajoute que, même au sein d’une catégorie de produits de référence, il n’y a pas de distinction entre les articles qui possèdent des caractéristiques ou une qualité très variées (qualité du cuir, mécanisme d’inclinaison manuel ou motorisé, etc.). Le CCCD fait donc valoir que le Tribunal ne peut présumer que les ensembles de données relatifs aux produits de référence permettent d’effectuer de justes comparaisons des prix ni que les écarts de prix entre les marchandises similaires et les marchandises en cause sont attribuables au dumping ou au subventionnement plutôt qu’à des différences inhérentes dans les caractéristiques du produit sous-jacent.

[155] Wayfair et HTL soutiennent qu’il n’est pas possible de se fier aux comparaisons de prix pour déterminer s’il y a des effets sur les prix, puisque les producteurs nationaux participants se concentrent principalement sur des produits sur mesure, ce qui entraîne une différence inhérente de prix par rapport aux importations visées, qui sont des produits standard. Elles font valoir que, comme dans Contreplaqués décoratifs, il n’y a vraisemblablement pas de concurrence, car les marchandises similaires et les marchandises en cause répondent à différents besoins du marché.

[156] De même, IKEA soutient que les producteurs nationaux ont réorienté leur production pour se tourner vers les produits mobiles en cuir, plus coûteux, ce qui fausse les données sur les prix unitaires et crée l’impression erronée qu’il y a une différence de prix importante entre les marchandises similaires et les marchandises en cause. Elle ajoute que le Tribunal n’a donc aucun « élément de preuve positif » [traduction] objectif et vérifiable pour conclure à un dommage.

[157] Les producteurs nationaux participants conviennent que la valeur probante des données agrégées sur les prix unitaires moyens est limitée dans le cadre de la présente enquête. Ils soutiennent néanmoins que les données sur les prix unitaires colligées sur les ventes de produits de référence sont particulièrement probantes, puisqu’elles suppriment des comparaisons la variabilité imputable à la combinaison des produits en tenant compte du type de siège (fauteuil ou canapé, par exemple), du type de recouvrement (cuir ou tissu) et de la mobilité ou de la stationnarité du siège. Ils ajoutent que le fondement général des informations contenues dans le rapport d’enquête et l’uniformité interne des données démontrent la fiabilité et la valeur probante du rapport d’enquête en tant que partie du dossier devant le Tribunal.

[158] Dans le cadre de son enquête, le Tribunal a recueilli des informations sur les prix liées aux ventes de SRUD auprès d’un grand nombre de producteurs nationaux et d’importateurs. Ces informations ont été compilées dans le rapport d’enquête. Contrairement à l’avis exprimé par IKEA, le Tribunal estime que ces données constituent des éléments de preuve positifs, objectifs et vérifiables lui permettant de tirer des conclusions. La question est de déterminer le poids à accorder à ces éléments de preuve, compte tenu des circonstances particulières de l’espèce.

[159] Le Tribunal reconnaît que l’étendue de la définition du produit en l’espèce a entraîné d’inévitables problèmes relatifs à la combinaison des produits, ce qui indique que le Tribunal devrait accorder un poids moindre au résultat des comparaisons entre les prix de vente des marchandises similaires et ceux des marchandises en cause obtenu à l’aide des données agrégées sur les prix unitaires moyens. Cependant, pour un certain nombre de raisons, le Tribunal est d’avis que le résultat des comparaisons obtenu à l’aide des données sur les prix unitaires liées aux ventes de produits de référence doit être jugé suffisamment probant pour les fins de la détermination de l’effet des marchandises en cause sur les prix.

[160] D’abord, bien qu’il y ait certainement des questions concernant la combinaison des produits liés aux 11 produits de référence retenus par le Tribunal, cette situation ne signifie pas que les données sur les prix unitaires de ces produits de référence doivent être entièrement écartées. Le Tribunal recueille fréquemment des informations sur la vente de produits de référence dans ses enquêtes de dommage, et il est rare que ces informations ne soulèvent pas de préoccupations. Il n’est pas nécessaire que, au sein de chacune des catégories de produits de référence, la combinaison des produits pour les marchandises en cause soit identique à celle des marchandises similaires pour que les données sur les prix unitaires constituent des éléments de preuve positifs.

[161] En l’espèce, le Tribunal a pris des mesures pour veiller à ce que les produits définis comme des produits de référence soient suffisamment semblables pour que chacun livre concurrence aux autres sur le marché et que la différence de prix demeure informative malgré la variété des caractéristiques particulières des produits. Il a sélectionné les produits de référence en fonction du type de siège (fauteuil, canapé ou causeuse), du type de recouvrement (cuir ou tissu) et de la mobilité ou de la stationnarité du siège [147] . Ce faisant, il a tenu compte des différences les plus significatives et pertinentes entre les caractéristiques physiques des marchandises en cause et celles des marchandises similaires. Selon le Tribunal, ces mesures sont suffisantes pour satisfaire à son obligation d’assurer la comparabilité des prix dans l’analyse de l’effet des marchandises en cause sur les prix.

[162] D’autres éléments de preuve indiquent que, même s’il ne s’agit pas de produits identiques, les données recueillies sur les prix unitaires des produits de référence sont probantes, ne sous-estiment pas le prix des marchandises en cause par rapport à celui des marchandises similaires ni ne donnent lieu à une comparaison de prix injuste. Si bon nombre de producteurs nationaux se concentrent apparemment sur les produits de luxe et sur mesure, d’autres (au moins l’un d’eux ayant répondu au questionnaire du Tribunal à l’intention des producteurs) semblent vendre des produits qui relèvent de la catégorie des marchandises à prix cible d’entrée ou « bon » [148] . Les produits sur mesure ne sont pas intrinsèquement différents des produits standard, même s’ils tendent, au Canada, à relever des catégories « mieux » et « meilleur », alors que les produits standard répondent aux trois catégories [149] . Comme il est mentionné précédemment, les importations de marchandises en cause relèvent des catégories « bon », « mieux » et « meilleur ». De plus, certaines caractéristiques de produits, comme les mécanismes d’inclinaison, qui peuvent être manuels ou motorisés, tendent naturellement à s’équilibrer au sein de vastes ensembles de données. D’autres caractéristiques, comme les porte-gobelets et les chargeurs USB [150] , ont sans doute très peu d’effet sur les prix de vente.

[163] Par ailleurs, le Tribunal fait remarquer que ses conclusions dans Contreplaqués décoratifs, à savoir que les marchandises en cause et les marchandises similaires ne se livraient pas directement concurrence, se fondaient en partie sur le fait que, si les données sur les prix montraient que les marchandises en cause avaient entraîné une sous-cotation constante et marquée des prix à tous les niveaux tout au long de la période visée par l’enquête, cette situation n’était pas à l’origine d’une perte de parts de marché pour la branche de production nationale au profit des marchandises en cause [151] . Ce n’est manifestement pas le cas en l’espèce. Comme il sera exposé ultérieurement, la branche de production nationale a effectivement perdu des parts de marché importantes au profit des marchandises en cause pendant la période visée par l’enquête. Même si ce facteur n’est pas déterminant, il réduit considérablement la probabilité que les marchandises similaires et les marchandises en cause ne se livrent pas directement concurrence, du moins, à l’échelle des produits de référence.

[164] Enfin, et surtout, le Tribunal est d’avis que la sous-cotation constante et marquée des prix entraînée par les marchandises en cause observée relativement à tous les produits de référence, laquelle sera analysée en détail ci-dessous, indique que les données sur les prix unitaires sont fiables et qu’il est donc possible de leur accorder plus de poids que ce que soutiennent les parties opposées. Bien qu’il y a probablement des anomalies dans les ensembles de données et qu’il y a effectivement des variations quant aux caractéristiques des produits, le Tribunal conclut que l’omniprésence et l’ampleur de la sous-cotation des prix observée sont probantes en soi. Elles servent également en quelque sorte à valider les résultats des comparaisons de prix obtenus à l’aide des données agrégées sur les prix unitaires moyens, lesquels montrent aussi une sous-cotation marquée des prix entraînée par les marchandises en cause, même si les données sur les prix unitaires des marchandises similaires de production nationale comprennent les ventes de SRUDST, généralement meilleur marché, ce qui n’est pas le cas des données sur les prix unitaires des marchandises en cause [152] .

[165] Pour les motifs indiqués ci-dessus, le Tribunal considère que les données sur les prix unitaires relativement aux ventes de produits de référence sont fiables et probantes, et que les données agrégées sur les prix unitaires moyens, même si elles ne sont pas aussi fiables, méritent tout de même d’être prises en considération.

Sous-cotation des prix

[166] Pour déterminer la mesure dans laquelle les marchandises en cause ont mené à une sous-cotation des prix des marchandises similaires, le Tribunal doit d’abord établir le niveau auquel la comparaison doit être effectuée et s’il faut prendre en compte une majoration du prix national.

[167] Comme il a été mentionné antérieurement, la majorité des ventes de marchandises similaires de production nationale et d’importations de SRUD répondant à la définition du produit sont effectuées directement auprès des détaillants, bon nombre de grands détaillants étant eux-mêmes importateurs de marchandises en cause. Puisqu’une certaine proportion des ventes de marchandises similaires de la branche de production nationale est réalisée auprès de distributeurs [153] et de détaillants qui importent des marchandises en cause, le Tribunal pourrait effectuer la comparaison à l’aide des prix d’achat des importations (c.-à-d. les prix auxquels les marchandises en cause sont achetées auprès des exportateurs ou des producteurs étrangers). Cependant, cette comparaison ne tiendrait pas compte des marges et, par conséquent, des prix supérieurs des marchandises en cause vendues par les distributeurs aux détaillants qui ne sont pas des importateurs, auxquels la branche de production nationale vend également des marchandises. Si le Tribunal effectue plutôt la comparaison à l’aide des prix de vente des importations (c.-à-d. les prix auxquels les marchandises en cause sont vendues sur le marché intérieur après l’importation), cette comparaison ne tiendrait pas compte des prix inférieurs des marchandises en cause achetées par les distributeurs auprès des exportateurs ou des producteurs étrangers [154] . Le Tribunal est d’avis que, dans ces circonstances, il est préférable d’utiliser les prix de vente des importations, puisque cette démarche est plus prudente et moins susceptible de surestimer le niveau de sous-cotation des prix.

[168] Au sujet de la majoration du prix national, 21 des 30 répondants au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs ont indiqué qu’ils étaient disposés à payer plus cher pour acheter des produits fabriqués au Canada [155] . La majoration moyenne payée par les répondants qui ont fourni une estimation s’établissait à 19 p. 100. Les producteurs nationaux participants ne contestent pas ce montant, mais M. DeFehr affirme que les grands détaillants, qui représentent la majorité du marché, visent généralement à vendre au plus bas prix et ne sont habituellement pas disposés à payer plus cher [156] . Cependant, à l’audience, plusieurs témoins des grands détaillants ont déclaré qu’ils avaient déjà payé plus cher pour des produits nationaux, la majoration fluctuant d’un détaillant à l’autre [157] . Selon ces témoignages, et s’il est pris en compte que près du tiers des répondants au questionnaire du Tribunal à l’intention des acheteurs ont indiqué qu’ils n’étaient pas disposés à payer une majoration, le Tribunal conclut qu’une majoration du prix national de 10 à 15 p. 100 est appropriée et raisonnable dans les circonstances.

[169] Les données concernant les prix de vente moyens indiquent que, à l’échelle agrégée, les marchandises en cause ont mené à une sous-cotation du prix des marchandises similaires de production nationale pendant toute la période visée par l’enquête allant de 28 à 32 p. 100, exprimée en pourcentage des prix de vente des marchandises similaires [158] . Ce niveau de sous-cotation dépasse la majoration du prix national susmentionnée. Les importations non visées en provenance des États-Unis ont également entraîné une sous-cotation du prix des marchandises similaires de production nationale pendant toute la période visée par l’enquête, mais à des niveaux moindres, le niveau de sous-cotation allant de 1 à 11 p. 100. Les importations non visées en provenance d’autres pays étaient toujours plus chères que les marchandises similaires de production nationale. Par conséquent, les marchandises en cause avaient le prix le plus bas sur le marché chaque année de la période visée par l’enquête [159] .

[170] Si l’on observe les prix de vente moyens des deux niveaux commerciaux, les marchandises en cause ont aussi mené à une sous-cotation des prix des marchandises similaires de production nationale chaque année de la période visée par l’enquête [160] . En ce qui concerne les ventes aux détaillants, la sous-cotation allait de 25 à 29 p. 100 et, dans le cas des ventes aux distributeurs, elle était considérablement plus élevée; elle excédait donc la majoration du prix national dans les deux cas. Le Tribunal fait remarquer que les ventes totales aux détaillants ont représenté de 93 à 96 p. 100 du marché apparent pendant la période visée par l’enquête [161] .

[171] Comme il a été exposé précédemment, le Tribunal a recueilli des données trimestrielles sur 11 produits de référence achetés et/ou vendus en 2019 et en 2020 (soit les huit derniers trimestres de la période visée par l’enquête). Il a également recueilli des données trimestrielles sur trois produits de référence qui ne couvraient que les ventes intérieures de SRUDST de production nationale pendant la même période. Ces données, qui couvrent une proportion majeure des ventes totales déclarées de la production nationale et des importations pendant la période [162] , révèlent une sous-cotation des prix marquée et généralisée entraînée par les marchandises en cause. Le Tribunal fait remarquer que, compte tenu des volumes extrêmement faibles des ventes de marchandises de production nationale et des importations visées pour le produit de référence no 11 [163] , il n’a pas été possible d’effectuer des comparaisons significatives pour ce produit.

[172] Il a été possible d’effectuer des comparaisons trimestrielles entre les ventes de marchandises en cause et les ventes de marchandises de production nationales dans 80 cas (chacun des 10 produits de référence restants, pour huit trimestres). Dans tous les cas, les marchandises en cause menaient à une sous‑cotation du prix des marchandises similaires de production nationale et, dans 78 des 80 cas, le niveau de sous-cotation des prix était supérieur à 15 p. 100 (la fourchette supérieure de la majoration du prix national), et généralement beaucoup plus élevé [164] .

[173] Dans 16 des 80 cas mentionnés ci-dessus, les importations non visées en provenance des États-Unis et/ou d’autres pays menaient à une sous-cotation du prix des marchandises similaires de production nationale à un niveau supérieur à celui des marchandises en cause [165] . Cependant, dans presque tous les 16 cas, les volumes de ventes des importations non visées étaient d’une ampleur infiniment moindre que celle des volumes de ventes des importations visées [166] .

[174] En ce qui concerne les trois produits de référence nationaux pour les SRUDST (fauteuil, canapé et causeuse), une comparaison avec les trois produits de référence en tissu équivalents inclinables (produits de référence nos 1, 4 et 8) révèle que les marchandises en cause menaient à une sous-cotation des marchandises similaires de production nationale dans 24 cas (soit pour chacun des trois ensembles de produits comparés, pendant les huit trimestres) [167] . Dans tous ces cas, le niveau de sous-cotation des prix était marqué et dépassait facilement la majoration du prix national. En d’autres mots, les marchandises en cause mobiles avec recouvrement en tissu ont entraîné une sous-cotation constante et marquée des prix des marchandises similaires stationnaires avec recouvrement en tissu équivalentes, même si la fonctionnalité de mouvement fait augmenter les coûts de production [168] . Le Tribunal fait remarquer que les prix des marchandises en cause stationnaires avec recouvrement en cuir étaient, en moyenne, plus élevés que ceux des marchandises similaires stationnaires avec recouvrement en tissu équivalentes [169] . Cependant, étant donné le choix, certains consommateurs pourraient être disposés à payer une prime modeste pour acheter des marchandises en cause stationnaires en cuir plutôt que des SRUDST de production nationale. Cette situation est corroborée par les éléments de preuve de Mme Diana Sisto, directrice artistique de Brentwood, selon laquelle le prix des marchandises en cause mobiles ou en cuir, ou les deux, peut en effet être plus bas que le prix des SRUDST chez Brentwood et que, dans tous les cas, les consommateurs sont disposés à payer un peu plus cher pour un article en cuir ou avec des fonctions mobiles [170] .

[175] Pour ce qui est des ventes aux clients communs, le Tribunal observe que les marchandises en cause entraînent une sous-cotation marquée des prix dans la plupart des cas lorsque les comparaisons sont possibles [171] . Cependant, étant donné le volume très faible des ventes de la production nationale et/ou des importations visées pour presque tous les clients [172] , et à défaut de distinction entre les types ou les catégories de produits vendus, le Tribunal considère que ces comparaisons ne sont pas fiables et ne leur accorde ainsi très peu de poids.

[176] Enfin, Palliser et Brentwood avancent au total 22 allégations de dommage concernant des clients précis, principalement de réduction des volumes de vente ou de perte de ventes au profit des marchandises en cause [173] . Elles indiquent que les ventes ont été perdues ou les volumes, réduits, car elles n’étaient pas en mesure de livrer concurrence à des prix injustement bas qui, selon les informations qu’elles fournissent, semblent de la même fourchette que le niveau de sous-cotation des prix établi à l’aide des données sur les prix unitaires contenues dans le rapport d’enquête du Tribunal.

[177] IKEA et RHI soutiennent que les éléments de preuve présentés par Palliser à l’appui de ses allégations de dommage semblent avoir été préparés après les faits, pour les fins de la présente enquête, et que, à ce titre, ils ne sont pas crédibles ni fiables pour établir une relation de cause à effet entre les importations visées et les pertes de ventes ou les réductions de volumes alléguées. IKEA ajoute que les éléments de preuve présentés comportent de nombreuses lacunes, car ils omettent bon nombre de détails importants sur les clients et les transactions.

[178] De même, Ashley et Violino font valoir que le Tribunal ne devrait pas accorder beaucoup de poids aux allégations de Palliser, car elles sont floues et omettent des détails essentiels, notamment la question de savoir si les produits offerts ont été mis en marché avec d’autres produits de SRUD et, dans certains cas, s’ils étaient rembourrés en tissu ou en cuir. Elles soutiennent en outre que les allégations contre elles sont tout simplement erronées, puisque ni Ashley ni Violino n’ont vendu les produits allégués aux clients en question, que les produits allégués sous-tendent une comparaison qui équivaut à une comparaison « entre des pommes et des oranges » ou que les allégations sont impossibles à réfuter, car elles ne fournissent pas suffisamment d’informations [174] .

[179] De son côté, HTL soutient qu’aucune des allégations avancées contre elle n’est valide, car elle n’a réalisé aucune vente à aucun des clients nommés pendant la période visée par l’enquête et, dans certains cas, n’a conclu aucune vente [175] .

[180] Les producteurs nationaux participants répondent que les affirmations qui visent à discréditer les allégations de dommage concernant des clients précis de Palliser sont erronées, puisque Palliser mène une vaste stratégie d’engagement avec ses clients de détail qui lui procure des renseignements commerciaux fiables et crédibles. Ils ont également fourni des informations publiques, soumis des observations et présenté un témoignage qui, selon eux, réfutent les affirmations d’Ashley et de Violino selon lesquelles les allégations de Palliser sont fausses ou qu’elles renferment des comparaisons inappropriées ou des informations insuffisantes [176] . Selon eux, les allégations de Palliser constituent des éléments de preuve probants du dommage entraîné par les importations visées.

[181] Le Tribunal a reconnu antérieurement que les allégations de dommage concernant des clients précis étaient nécessairement le résultat de renseignements commerciaux recueillis par des producteurs nationaux qui n’avaient pas toujours accès à des sources d’information primaires et que, à ce titre, il ne serait pas raisonnable d’exiger une exactitude parfaite [177] . Cependant, en l’espèce, il est vrai que les allégations de Palliser sont bien loin de satisfaire à ce critère. En effet, les allégations et les éléments de preuve présentés à l’appui ont été systématiquement remis en question pendant l’audience par certaines des parties qui ont répondu aux allégations avancées contre elles [178] . Même si des doutes ont été soulevés au sujet de certaines de ces remises en question [179] , dans l’ensemble, elles semblent bien discréditer un certain nombre des allégations.

[182] Cela dit, le Tribunal fait remarquer que les lacunes contenues dans les allégations de dommage concernant des clients précis de Palliser ne sont pas nécessairement le résultat de la faiblesse de ses techniques de collecte de données ni d’une démarche peu minutieuse dans l’ensemble de l’initiative. Le témoignage de M. Jim Hunt, vice-président des ventes de Palliser, a jeté un peu de lumière sur les difficultés avec lesquelles Palliser a dû composer pour recueillir les informations et en arriver aux estimations sur lesquelles les allégations se fondent [180] . Le Tribunal conclut que le témoignage de M. Hunt à cet égard est crédible.

[183] Le Tribunal est d’avis que ces difficultés montrent qu’il peut être ardu d’avancer des allégations de dommage concernant des clients précis dans le contexte d’enquête sur des marchandises qui ne sont pas des produits de base. L’avocat des producteurs nationaux participants l’a reconnu, faisant remarquer qu’il avait été beaucoup plus complexe de réunir des allégations sur des SRUD que sur des produits de base en acier et admettant franchement qu’il ne s’agissait pas du volet le plus solide de leur cause [181] .

[184] Le CCCD fait remarquer que le fait que les SRUD ne sont pas des produits de base signifie qu’il n’y a pas de concurrence directe entre chacun des articles, et qu’il y a plutôt une évaluation distincte de la proposition de valeur pour chaque produit [182] . Le Tribunal en convient. En effet, il n’a pas réussi à recueillir d’information propre à un modèle pour des produits comparables à l’aide de son questionnaire à l’intention des acheteurs (soit des informations semblables à ce qui est fourni dans le cadre des allégations de dommage concernant des clients précis des producteurs nationaux), certains détaillants ayant indiqué que ce type de comparaison ne représentait pas la façon dont ils acquéraient des SRUD [183] . Cela ne veut pas dire que le prix n’a pas d’importance dans les décisions d’achat. Au contraire, comme le Tribunal l’a déjà conclu, le prix est un facteur clé des décisions d’achat. Cependant, il est d’avis que, en définitive, le prix est un facteur pour les détaillants dans leur choix du fournisseur auquel ils effectueront des achats pour combler un manque dans leur assortiment, et pas nécessairement lorsqu’ils comparent deux modèles précis qui possèdent les mêmes caractéristiques. Dans ces circonstances, il est compréhensible que Palliser n’ait pas satisfait aux critères normalement attendus dans le cas d’allégations déposées dans des enquêtes portant sur des produits de base.

[185] Le Tribunal fait remarquer que, au-delà des détails et les informations propres à un modèle fournis par Palliser dans le cadre de ses allégations de dommage concernant des clients précis, il a entendu des témoignages crédibles selon lesquels Palliser et Brentwood ont perdu des ventes au profit des marchandises en cause auprès de certains clients précis en raison du prix [184] . Par conséquent, si le Tribunal n’accorde pas beaucoup de poids aux allégations de Palliser, il ne les écarte pas complètement non plus. Celles-ci appuient, dans une certaine mesure, la sous-cotation des prix déjà montrée par les données sur les prix unitaires dans le rapport d’enquête du Tribunal, en particulier les données sur les prix unitaires liées à la vente de produits de référence, et sont compatibles avec cette sous-cotation. À tout le moins, elles ne remettent pas en question la validité de ces données. En outre, si les éléments de preuve des parties opposées jettent un doute sur l’exactitude de certains éléments des allégations de dommage concernant des clients précis de Palliser, le Tribunal conclut que ces éléments de preuve ne réfutent pas ceux des producteurs nationaux indiquant que les grands détaillants s’attendent à ce qu’ils s’arriment aux bas prix des marchandises en cause pour des SRUD comparables ou offrent une proposition de valeur semblable [185] .

[186] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ont entraîné une sous-cotation constante et marquée du prix des marchandises similaires pendant la période visée par l’enquête.

Baisse des prix

[187] Les prix de vente moyens des marchandises similaires de production nationale ont augmenté de 4 p. 100 en 2018 et de 6 p. 100 en 2019, puis ont reculé de 2 p. 100 en 2020 [186] . Pendant l’ensemble de la période visée par l’enquête, les prix intérieurs ont diminué de 8 p. 100 [187] . En revanche, les prix de vente moyens des marchandises en cause ont augmenté chaque année, pour une croissance totale de 11 p. 100 pendant l’ensemble de la période visée par l’enquête.

[188] En ce qui a trait aux ventes aux détaillants, lesquelles représentent la majorité des ventes de la branche de production nationale, la variation des prix des marchandises similaires a été presque identique à celle indiquée ci-dessus; les prix ont augmenté de 3 p. 100 en 2018 et de 6 p. 100 en 2019, puis ont reculé de 2 p. 100 en 2020 [188] . En ce qui a trait aux ventes aux distributeurs, les prix ont augmenté de 5 p. 100 en 2018, de 7 p. 100 en 2019 et de 1 p. 100 en 2020 [189] .

[189] Les données sur les prix des produits de référence confirment cette tendance générale à la hausse. Même si les prix de vente intérieurs moyens pour les 14 produits de référence ont fluctué d’un trimestre à l’autre, les prix ont augmenté au cours de la période de deux ans pour laquelle des données ont été recueillies, du moins lorsqu’ils sont comparés de bout en bout (soit du premier trimestre de 2019 au quatrième trimestre de 2020) [190] .

[190] Dans l’ensemble, le Tribunal conclut que les prix des marchandises similaires de production nationale ont généralement augmenté au cours de la période visée par l’enquête et que, si les prix ont baissé à l’échelle agrégée en 2020, cette diminution n’était en aucun cas significative. Le Tribunal conclut donc que les marchandises en cause n’ont pas fait baisser les prix des marchandises similaires de façon marquée pendant la période visée par l’enquête.

Compression des prix

[191] Pour déterminer si les marchandises en cause ont mené à la compression des prix des marchandises similaires de production nationale, le Tribunal compare habituellement le coût unitaire moyen des marchandises vendues ou le coût unitaire moyen des marchandises fabriquées par la branche de production nationale avec le prix unitaire de vente moyen de la branche de production nationale sur le marché intérieur afin de déterminer si la branche de production nationale a été en mesure d’augmenter ses prix de vente en phase avec la hausse de ses coûts [191] .

[192] Le coût unitaire des marchandises vendues sur le marché intérieur par la branche de production nationale a augmenté de 7 p. 100 en 2018 et de 4 p. 100 en 2019, avant de reculer de 2 p. 100 en 2020 [192] . Les prix unitaires de vente moyens des producteurs nationaux ayant soumis leur coût unitaire des marchandises vendues ont augmenté de 4 p. 100 en 2018 et en 2019, avant de reculer de 1 p. 100 en 2020. Par conséquent, 2018 est la seule année pendant laquelle la hausse du coût unitaire des marchandises vendues n’a pas été suivie par une hausse équivalente des prix de vente sur le marché intérieur [193] . Cette compression des prix, que le Tribunal ne peut qualifier de marquée, a entraîné une diminution de deux points de pourcentage de la marge bénéficiaire brute de la branche de production nationale en 2018. Les marges sont demeurées inchangées en 2019 et en 2020.

[193] Les producteurs nationaux participants soutiennent que la compression des prix au sens du Règlement ne se limite pas à la compression des prix « classique », qui se traduit par une incapacité à augmenter ses prix de vente lorsque confrontée à une hausse de ses coûts, mais englobe toutes les situations où des augmentations de prix « par ailleurs se seraient vraisemblablement produites ». Ils affirment que les prix intérieurs étaient déjà compressés au début de la période visée par l’enquête et que, sans les marchandises en cause à bas prix, la branche de production nationale aurait pu hausser ses prix pour obtenir un rendement des ventes plus viable et l’aurait fait.

[194] Bien que le Tribunal convienne que la compression des prix, telle qu’elle est décrite à l’alinéa 37.1(1)b) du Règlement, ne se limite pas aux situations où la hausse des coûts ne peut être suivie par une hausse équivalente des prix de vente, les producteurs nationaux participants n’ont pas présenté d’élément de preuve quant au niveau de revenu net que la branche de production nationale générait avant la période visée par l’enquête, ou aurait dû générer au-dessus du niveau qu’elle générait au début de la période visée par l’enquête. Comme il est indiqué ci-dessus, le Tribunal n’a pas recueilli d’informations sur les volumes et les prix des marchandises en cause et des marchandises similaires ni sur la situation de la branche de production nationale avant la période visée par l’enquête. Il n’est donc pas en mesure d’établir si les prix de vente intérieurs ont été comprimés de la façon dont les producteurs nationaux participants l’allèguent.

[195] Le Tribunal conclut donc que les marchandises en cause n’ont pas entraîné une compression marquée des prix des marchandises similaires pendant la période visée par l’enquête.

Conclusion

[196] Le Tribunal conclut que les marchandises en cause ont mené à une sous-cotation marquée des prix des marchandises similaires de production nationale pendant la période visée par l’enquête, mais qu’elles n’ont pas entraîné une baisse ni une compression marquée de ces prix.

Incidence sur la branche de production nationale

[197] Aux termes de l’alinéa 37.1(1)c) du Règlement, le Tribunal doit tenir compte de l’incidence des marchandises sous-évaluées ou subventionnées sur la situation de la branche de production nationale et, plus particulièrement, de tous les facteurs et indices économiques pertinents influant sur cette situation [194] . Cette incidence doit être distinguée de l’incidence des autres facteurs sur la branche de production nationale [195] . Aux termes de l’alinéa 37.1(3)a) du Règlement, le Tribunal doit déterminer s’il existe un lien de causalité entre le dumping ou le subventionnement des marchandises et le dommage ou la menace de dommage en fonction du volume des marchandises sous-évaluées et subventionnées, de leur effet sur les prix des marchandises similaires et de leur incidence sur la branche de production nationale.

Ventes et parts de marché

[198] Le volume du marché canadien total a augmenté de 8 p. 100 en 2018 et de 7 p. 100 en 2019, avant de reculer de 5 p. 100 en 2020, pour une hausse totale de 10 p. 100 pendant la période visée par l’enquête [196] . Le rendement de la branche de production nationale a été inférieur par rapport au marché, puisque les ventes intérieures de la production nationale ont diminué de 13 p. 100 en 2018, de 5 p. 100 en 2019 puis de 10 p. 100 en 2020, pour une baisse totale de 26 p. 100 au cours de la période visée par l’enquête. À titre comparatif, les ventes de marchandises en cause ont fait un bond de 67 p. 100 pendant la période visée par l’enquête.

[199] Le sous-rendement de la branche de production nationale se reflète indéniablement dans sa part de marché, qui est passée de 48 p. 100 en 2017 à 32 p. 100 en 2020, une baisse de 16 points de pourcentage, ou le tiers de la part de marché qu’elle détenait au début de la période visée par l’enquête [197] . Le Tribunal fait remarquer que le taux de décroissance de la part de marché de la branche de production nationale a ralenti au cours de la période visée par l’enquête, car elle a reculé de 9 points de pourcentage en 2018, de 4 points de pourcentage en 2019, puis de 2 points de pourcentage en 2020 [198] .

[200] Inversement, la part de marché des marchandises en cause est passée de 35 p. 100 en 2017 à 53 p. 100 en 2020, un bond de 18 points de pourcentage [199] . Les marchandises en cause ont donc saisi l’intégralité de la part de marché perdue par la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête. À l’instar de la tendance montrée par la baisse de la part de marché de la branche de production nationale, la hausse de la part de marché détenue par les marchandises en cause a aussi ralenti au cours de la période visée par l’enquête : elle a augmenté de 9 points de pourcentage en 2018, de 5 points de pourcentage en 2019, puis de 4 points de pourcentage en 2020 [200] . Par conséquent, les marchandises en cause ont acquis des parts de marché au même rythme que la branche de production nationale en a perdu au cours de la période visée par l’enquête, ce qui indique une forte corrélation entre les deux. La part de marché des importations non visées est demeurée relativement stable, ayant diminué de deux points de pourcentage au cours de la période visée par l’enquête.

[201] Wayfair soutient que, à l’instar des volumes d’importation, le taux de croissance de la part de marché des marchandises en cause a diminué de façon constante au cours de la période visée par l’enquête, ce qui donne à penser que l’incidence sur la branche de production nationale qui en découle est en régression.

[202] Le Tribunal est d’avis que cela n’a pas d’effet important sur l’espèce, puisque la perte de parts de marché par la branche de production nationale au cours de l’ensemble de la période visée par l’enquête est marquée. De plus, même si une proportion plus grande des parts de marché de la branche de production nationale a été perdue en 2018 et en 2019, la branche de production nationale a néanmoins continué de perdre des parts de marché en 2020.

[203] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les éléments de preuve montrent que la branche de production nationale a perdu des ventes et des parts de marché significatives au profit des marchandises en cause pendant toute la période visée par l’enquête.

Rendement financier

[204] Comme le Tribunal a conclu que les marchandises en cause avaient entraîné une sous‑cotation marquée du prix des marchandises similaires de production nationale, mais qu’elles n’avaient pas entraîné de baisse ni de compression marquée de ces prix, l’incidence de la sous‑cotation des prix s’est principalement limitée à des effets sur les volumes, ce qui a donné lieu, comme il a été indiqué précédemment, à une perte substantielle de ventes et de parts de marché pour la branche de production nationale au profit des marchandises en cause pendant toute la période visée par l’enquête [201] . Cela est admis par les producteurs nationaux participants, qui soutiennent que, puisque la branche de production nationale avait déjà des marges très réduites au début de la période visée par l’enquête, il a été difficile pour elle de réduire davantage ses prix ou d’absorber les hausses de coûts, ce qui a mené à la perte de ventes et de parts de marché [202] . Ces effets sur les volumes, et l’absence d’effets sur les prix sous forme de baisse ou compression des prix, s’observent facilement lorsque l’on examine le rendement financier de la branche de production nationale en ce qui a trait aux ventes intérieures.

[205] La marge bénéficiaire brute unitaire de la branche de production nationale est passée de 116 $ par pièce en 2017 à 111 $ par pièce en 2018, puis elle a légèrement augmenté en 2019, pour atteindre 112 $ par pièce, niveau auquel elle est restée en 2020 [203] . La baisse de 4 p. 100 de la marge bénéficiaire brute unitaire en 2018 est probablement attribuable à la compression des prix, que le Tribunal n’a pas qualifiée de marquée. Et même si le Tribunal a conclu à une faible baisse des prix en 2020, celle-ci n’a pas eu d’effet sur la marge bénéficiaire brute unitaire de la branche de production nationale, puisque le coût unitaire moyen des marchandises vendues a connu une diminution encore plus importante cette année-là. Par conséquent, les marchandises en cause ont eu peu d’effets sur la marge bénéficiaire brute unitaire de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête.

[206] En revanche, les revenus nets unitaires de la branche de production nationale sont passés de 29 $ par pièce en 2017 à 5 $ par pièce en 2020. Ce recul est attribuable à une hausse considérable des frais généraux, de vente et d’administration, et des charges financières, unitaires au cours de la période visée par l’enquête. Au total, ces frais et charges ont augmenté de 23 p. 100 au cours de la période visée par l’enquête, alors que la valeur des ventes nettes et le coût unitaire moyen des marchandises vendues n’ont augmenté respectivement que de 7 et de 10 p. 100 pendant cette période. Puisque, en règle générale, les frais généraux, de vente et d’administration, et les charges financières, ne varient pas de façon directement proportionnelle aux revenus, une perte de volume de ventes n’entraîne pas nécessairement une réduction, ou une aussi grande réduction, de ces dépenses, qui augmentent donc sur une base unitaire. Par conséquent, la perte de volume de ventes de la branche de production nationale dans ce cas pourrait expliquer la chute des revenus nets unitaires. Cependant, étant donné les nombreux facteurs qui influent sur les frais généraux, de vente et d’administration, et sur les charges financières, le Tribunal examinera le rendement de la branche de production nationale à l’échelle de la marge bénéficiaire brute [204] .

[207] Sur une base agrégée, la marge bénéficiaire brute de la branche de production nationale est passée de 71,2 millions de dollars en 2017 à 59,2 millions en 2018, à 57,1 millions en 2019 et enfin à 50,6 millions en 2020, pour une baisse totale de 29 p. 100 au cours de la période visée par l’enquête, laquelle est largement attribuable à la diminution de 26 p. 100 du volume des ventes nettes que la branche de production nationale a connues pendant cette période. Le Tribunal considère que cette détérioration du rendement financier de la branche de production nationale est significative, en particulier si l’on tient compte du fait que la baisse des marges bénéficiaires brutes entraîne une réduction éventuelle des revenus nets.

[208] Le CCCD fait remarquer que, dans Téléviseurs couleurs, le fait que la majorité des pertes financières avait été signalée par un seul producteur était un facteur ayant mené le prédécesseur du Tribunal à conclure à une absence de dommage [205] . Il affirme que, en l’espèce, la faiblesse du rendement financier de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête est majoritairement ou uniquement attribuable à Palliser. À l’appui de son allégation, le CCCD a déposé un tableau qui illustre les coûts, la marge bénéficiaire brute et les revenus nets de Palliser en tant que pourcentage de ses recettes de vente, et compare ces données avec celles de la branche de production nationale, en incluant et en excluant Palliser [206] . Il soutient que, si l’on retranche les données financières de Palliser, la baisse du rendement financier de la branche de production nationale n’est pas sensible.

[209] Les producteurs nationaux participants répondent que, même si le rendement financier de Palliser était entièrement soustrait du rendement financier de la branche de production nationale, il y aurait tout de même dommage, sous la forme d’une réduction du volume des ventes, des recettes et de la rentabilité. Ils ajoutent que l’analyse du CCCD qui ne tient pas compte de Palliser au sein de la branche de production nationale est trompeuse, car elle ne présente que les pourcentages des recettes, sans tenir compte du fait que les ventes des producteurs nationaux, même en excluant celles de Palliser, se sont considérablement affaiblies malgré la croissance du marché. Ils font remarquer que, si Palliser a tenté de maintenir ses ventes (à savoir, le volume) aux dépens de ses marges (à savoir, les prix), les données indiquent que le reste de la branche de production nationale a plutôt tenté de maintenir ses marges et de sacrifier ses ventes.

[210] Le Tribunal conclut que les éléments de preuve au dossier n’étayent pas l’allégation du CCCD selon laquelle la faiblesse du rendement financier de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête est majoritairement ou uniquement attribuable à Palliser. Comme le font remarquer les producteurs nationaux participants, l’analyse du CCCD est trompeuse, car elle présente la marge bénéficiaire brute et les revenus nets en tant que pourcentage des recettes de ventes (soit la valeur des ventes nettes). Cette façon de présenter les informations fait ressortir les variations relatives des coûts et des marges, ce qui illustre fondamentalement les effets sur les prix engendrés par les marchandises en cause. En d’autres mots, en cas de baisse ou de compression des prix, cela a pour effet d’entraîner un resserrement des prix et des coûts, ce qui cause une diminution des marges exprimées en pourcentage de la valeur des ventes nettes. Cependant, si les données sont uniquement présentées de cette façon, nous n’obtenons pas un portrait complet de la situation, puisque l’effet des pertes de ventes sur les marges agrégées, c.-à-d. les effets sur le volume engendrés par les marchandises en cause en raison de la sous‑cotation des prix, n’est pas pris en compte [207] .

[211] Le Tribunal a déjà indiqué ci-dessus que les effets de la sous-cotation des prix en l’espèce s’étaient principalement limités aux effets sur le volume et que les marchandises en cause avaient eu peu d’incidence sur la marge bénéficiaire brute unitaire de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête [208] . Il en découle logiquement que, si le Tribunal a déjà conclu que les marchandises en cause avaient eu peu d’effets sur les prix relativement au rendement financier de la branche de production nationale lorsque Palliser est inclus, le fait qu’il y ait encore moins d’effets sur les prix lorsque Palliser est retranché ne prouve rien [209] .

[212] Comme il est mentionné précédemment, à l’échelle agrégée, la marge bénéficiaire brute de la branche de production nationale a diminué de 29 p. 100 au cours de la période visée par l’enquête, et le volume des ventes nettes, de 26 p. 100 [210] . Les éléments de preuve au dossier montrent que, même lorsque l’on ne tient pas compte de Palliser, la marge bénéficiaire brute et le volume des ventes nettes de la branche de production nationale ont connu une baisse marquée au cours de la période visée par l’enquête [211] . En fait, les producteurs nationaux autres que Palliser représentaient ce que le Tribunal considère comme une proportion majeure de la diminution de la marge bénéficiaire brute et du volume des ventes nettes qu’a connue la branche de production nationale. Quoi qu’il en soit, le Tribunal a déjà affirmé qu’il mènerait son analyse de dommage en évaluant collectivement les producteurs nationaux qui constituent la branche de production nationale, mais qu’il tiendrait compte des circonstances particulières de certains producteurs dans le cadre de son évaluation des autres facteurs et du caractère sensible du dommage. Il ne fait aucun doute que les producteurs nationaux qui constituent la branche de production nationale ont, collectivement, connu une détérioration marquée de leur rendement financier en ce qui a trait aux ventes intérieures.

[213] Relativement aux ventes à l’exportation, le rendement financier de la branche de production nationale est nettement meilleur. Si la marge bénéficiaire brute unitaire a diminué de 2017 à 2020, sa marge bénéficiaire brute totale a au contraire légèrement augmenté au cours de la même période [212] . Le déclin de la première semble le résultat de la légère compression des prix qui a eu lieu au cours de la période visée par l’enquête, alors que la hausse de la deuxième est attribuable à une hausse du volume des ventes nettes, qui a plus que compensé la réduction de la marge bénéficiaire brute unitaire. Le Tribunal fait remarquer que les marges bénéficiaires brutes unitaires de la branche de production nationale pour ce qui est de ses ventes à l’exportation ont été beaucoup plus élevées que pour ce qui est de ses ventes intérieures pendant toute la période visée par l’enquête [213] .

Autres indicateurs de rendement

[214] Les volumes de production de la branche de production nationale destinée aux ventes intérieures ont diminué de 12 p. 100 en 2018, de 6 p. 100 en 2019 et de 10 p. 100 en 2020, pour un recul total de 26 p. 100 au cours de la période visée par l’enquête [214] . Ce déclin total correspond exactement à celui observé ci-dessus pour les ventes intérieures de la production nationale. De son côté, la production totale de la branche de production nationale a diminué de 24 p. 100 au cours de la période visée par l’enquête, alors que la production destinée aux ventes à l’exportation a grimpé en 2018 et en 2019, mais a diminué en 2020 pour revenir aux niveaux de 2017.

[215] Les taux d’utilisation de la capacité pour la production destinée aux ventes intérieures ont diminué de 13 points de pourcentage au cours de la période visée par l’enquête, alors que la capacité pratique des usines est demeurée relativement stable pendant la même période, à l’exception d’une hausse de 2 p. 100 en 2019 [215] . La capacité excédentaire a été élevée pendant toute la période visée par l’enquête.

[216] Le CCCD fait valoir qu’il convient de regarder d’un œil critique les chiffres sur l’utilisation de la capacité contenus dans le rapport d’enquête, en raison de l’expérience que les détaillants ont vécue à répétition pendant la période visée par l’enquête, à savoir que les producteurs nationaux ont été incapables dans les faits de respecter les délais d’approvisionnement promis. Il fait remarquer que cette incapacité est peut-être liée aux pénuries de matières premières ou de main-d’œuvre plutôt qu’à une faiblesse de la capacité pratique des usines.

[217] RHI soutient que bon nombre des producteurs nationaux qui ont fourni au Tribunal des chiffres sur l’utilisation de la capacité n’avaient pas expliqué la façon dont la capacité pratique de l’usine avait été calculée, ce qui était demandé dans le questionnaire à l’intention des producteurs.

[218] Le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels les taux d’utilisation de la capacité fournis en réponse au questionnaire du Tribunal se fondent sur un rythme de production de sept jours par semaine, 365 jours par année, et qu’ils sont par conséquent théoriques plutôt que réels [216] . Le Tribunal n’est donc pas disposé à se fonder sur les taux d’utilisation de la capacité signalés dans le rapport d’enquête à titre d’indication de la capacité exacte ou excédentaire réelle de la branche de production nationale. Cela dit, sans égard à la façon dont la capacité pratique des usines a été calculée par les répondants au questionnaire, la baisse de 13 points de pourcentage du taux d’utilisation de la capacité de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête demeure représentative de la diminution réelle de ses volumes de production. La question de savoir si des facteurs autres que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause, comme la pénurie de matières premières et de main-d’œuvre, sont les causes de l’incapacité de la branche de production nationale à maintenir ses volumes de production et ses taux d’utilisation de la capacité aux niveaux de 2017 pendant toute la période visée par l’enquête, ni même les faire croître pour suivre la croissance observée sur le marché canadien des SRUD en 2018 et en 2019, sera abordée ci-après.

[219] Si l’on se penche maintenant sur les indicateurs liés à l’emploi direct, le nombre d’employés de la branche de production nationale a augmenté de 1 p. 100 en 2018 puis en 2019, avant de reculer de 2 p. 100 en 2020, pour en fait revenir aux niveaux de 2017 [217] . Des éléments de preuve au dossier indiquent que certains producteurs nationaux ont reçu des subventions salariales liées à la COVID en 2020, ce qui explique probablement pourquoi le nombre d’employés n’a pas diminué davantage. Cependant, les heures travaillées et les salaires versés ont diminué en 2018, ont légèrement augmenté en 2019, puis ont reculé davantage en 2020, pour une réduction nette au cours de la période visée par l’enquête. Cette situation indique que, en moyenne, chaque employé a généralement travaillé moins d’heures en 2020 qu’en 2017. Dans l’ensemble, la productivité exprimée en unités par heure travaillée a aussi diminué au cours de la période visée par l’enquête.

[220] Les stocks détenus par les producteurs nationaux ont fait un bond substantiel au cours de la période visée par l’enquête, bien que, en termes absolus, ils représentent toujours une proportion relativement faible des volumes de production totaux annuels de la branche de production nationale [218] . Après avoir augmenté en 2018, les investissements réalisés par la branche de production nationale ont chuté en 2019 et en 2020.

[221] Enfin, quelques producteurs nationaux affirment que la présence accrue de marchandises en cause sur le marché canadien a eu des effets négatifs sur leur rendement du capital investi, leurs liquidités, leur croissance, leur capacité de réunir des fonds et/ou leurs projets de développement de la production pendant la période visée par l’enquête [219] .

Importance de la marge de dumping et du montant de subvention

[222] L’ASFC a calculé des marges de dumping pour les exportateurs chinois et vietnamiens allant de 9,3 à 188,0 p. 100 et des montants de subvention pour les exportateurs à l’égard desquels il n’y avait pas lieu de clore l’enquête de subventionnement allant de 1,1 à 81,1 p. 100 [220] . Le Tribunal fait remarquer que ces marges de dumping et montants de subvention sont d’une importance considérable. Si ce facteur étaye de manière générale la thèse selon laquelle les marchandises en cause ont eu des effets négatifs sur la branche de production nationale, le Tribunal n’est pas d’avis que ces marges de dumping et montants de subvention représentent nécessairement le niveau des effets dommageables causés par les prix réels des marchandises en cause au Canada pendant la période visée par l’enquête. Par conséquent, le Tribunal a accordé un poids moindre à ce facteur dans son analyse de dommage.

Conclusion

[223] Sur le fondement des facteurs susmentionnés, le Tribunal conclut que la branche de production nationale a subi un dommage pendant toute la période visée par l’enquête sous forme de perte de ventes et de parts de marché, ce qui a à son tour eu des effets négatifs sur la production nationale, la rentabilité et, dans une moindre mesure, l’emploi, les stocks et les investissements.

Autres facteurs et causalité

[224] Comme il a été mentionné précédemment, l’alinéa 37.1(3)a) du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer s’il existe un lien de causalité entre le dumping ou le subventionnement des marchandises et le dommage en fonction du volume des marchandises en cause, de leur effet sur les prix et de leur incidence sur la branche de production nationale. Pour ce faire, le Tribunal doit établir la distinction entre l’incidence des marchandises en cause et l’incidence des autres facteurs sur la situation de la branche de production nationale [221] . En d’autres mots, le Tribunal doit décider si les marchandises en cause, en soi, ont causé un dommage à la branche de production nationale. Le Tribunal ne peut présumer que la simple présence et disponibilité des marchandises en cause sur le marché canadien ont causé un dommage sensible à la branche de production nationale [222] .

[225] Cependant, l’analyse qui précède des effets des marchandises en cause sur la situation de la branche de production nationale révèle plus qu’une corrélation entre la présence accrue des marchandises en cause et le dommage subi par la branche de production nationale pendant la période visée par l’enquête. Cette analyse indique une relation de cause à effet entre les marchandises en cause et le dommage. Le Tribunal doit donc maintenant poursuivre son analyse en évaluant si des facteurs autres que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont également causé un dommage à la branche de production nationale au cours de cette période et, le cas échéant, dans quelle mesure. La question est de savoir si, malgré les pertes subies par la branche de production nationale pouvant être attribuables à d’autres facteurs, le dumping et le subventionnement des marchandises en cause demeurent une cause de dommage sensible [223] .

[226] Les parties opposées ont soulevé un éventail de facteurs autres que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause qui auraient, selon leurs allégations, causé tout dommage que Palliser et la branche de production nationale pourraient avoir subi au cours de la période visée par l’enquête. En fait, les parties opposées ont véritablement adopté une approche fourre-tout et « mis le paquet » quant à la question des autres facteurs. Si le Tribunal est conscient que cette situation est probablement fonction du grand nombre de parties qui s’opposent en l’espèce et de l’hétérogénéité de leurs expériences en tant qu’acheteurs sur le marché canadien, le nombre d’autres facteurs soulevé n’a, en soi, aucune incidence sur l’analyse de causalité du Tribunal. Le Tribunal ne doit prendre en considération que les facteurs qui, selon les éléments de preuve, ont causé un dommage à la branche de production nationale pendant la période visée par l’enquête.

[227] Au sujet de ce dernier point, le Tribunal fait remarquer que, tout comme la branche de production nationale peut, en théorie, déjà subir un dommage en raison des marchandises en cause au début de la période visée par l’enquête, elle peut aussi subir un dommage attribuable à d’autres facteurs. Comme le Tribunal l’a affirmé ci-dessus, il n’est pas en mesure d’établir si la branche de production nationale avait subi un dommage avant la période visée par l’enquête, parce qu’il n’a pas recueilli de données et qu’il n’y a pas d’informations au dossier relativement aux volumes et aux prix des marchandises en cause et des marchandises similaires, ni à la situation de la branche de production nationale, pendant cette période. À défaut de telles informations, le Tribunal est également incapable de déterminer l’incidence, le cas échéant, d’autres facteurs sur la situation de la branche de production nationale avant la période visée par l’enquête. Par conséquent, le Tribunal doit asseoir son évaluation des autres facteurs sur les mêmes fondements que son analyse de dommage, qu’il a effectuée en tenant compte des variations du volume de marchandises, de leur effet sur les prix des marchandises similaires et de leur incidence sur la branche de production nationale pendant la période visée par l’enquête.

[228] Cette question a été traitée par le groupe spécial de l’OMC dans UE – Biodiesel qui, dans son évaluation de l’allégation de l’Argentine selon laquelle l’Union européenne avait indûment conclu que l’absence d’intégration verticale de la branche de production nationale et son absence d’accès aux matières premières ne constituaient pas une cause de dommage, a déclaré ce qui suit :

[...] Le concept de dommage envisagé par l’article 3 [de l’Accord antidumping de l’OMC] se rapporte à l’évolution négative de la situation de la branche de production nationale. L’article 3 n’est pas censé traiter des différences entre la structure de la branche de production nationale et celle du Membre exportateur. En fait, il ressort clairement du texte de l’article 3.5 et de la liste indicative qu’il dresse de ces "autres facteurs" – lesquels ont tous trait à l’évolution de la situation de la branche de production nationale – que l’autorité n’est pas tenue de procéder à une analyse aux fins de la non-imputation en ce qui concerne les caractéristiques inhérentes à la branche de production nationale qui sont demeurées inchangées pendant la période considérée par l’autorité chargée de l’enquête aux fins de son analyse du dommage. [224]

[Note de bas de page omise, italiques et caractères gras dans l’original]

[229] Le Tribunal a examiné minutieusement tous les autres facteurs qui auraient, selon les allégations des parties opposées, causé un dommage à la branche de production nationale. Cependant, le Tribunal observe en définitive qu’un nombre significatif de ces facteurs était lié à des caractéristiques inhérentes à la branche de production nationale ou à des circonstances antérieures à la période visée par l’enquête qui n’ont pas changé pendant cette période et qui, par conséquent, n’ont pas pu causer le dommage qui s’est manifesté pendant la période visée par l’enquête [225] . Ces facteurs sont les suivants [226] :

· Comme la branche de production nationale est extrêmement fragmentée, la capacité de production de producteurs nationaux individuels est limitée et ceux-ci ne peuvent faire d’économies d’échelle, ce qui empêche toute possibilité d’approvisionner de grands détaillants canadiens sur le marché de masse.

· Les producteurs nationaux ont décidé de se concentrer sur le segment haut de gamme et sur mesure du marché.

· Les producteurs nationaux n’ont pas réussi à satisfaire les besoins de détaillants en ce qui a trait à l’innovation et à l’exclusivité des designs.

· La gamme des modèles de SRUD que les producteurs nationaux sont en mesure d’offrir est limitée, ce qui les empêche d’approvisionner des marques de détail axées sur le design.

· Les producteurs nationaux ne sont pas efficaces par rapport aux coûts, car ils doivent importer la majorité de leurs matériaux et ne possèdent pas l’infrastructure nécessaire pour fabriquer des produits de façon concurrentielle au Canada (absence d’intégration verticale).

· Les producteurs nationaux ne possèdent pas les capacités et les compétences techniques particulières qu’il faut pour fabriquer certains produits complexes.

· Les producteurs nationaux ne possèdent pas de certification environnementale particulière, comme celle du Forest Stewardship Council (FSC).

· En décidant d’établir des activités de fabrication de SRUD au Mexique il y a près de 20 ans, Palliser a abandonné le marché canadien de SRUD bas de gamme à la production étrangère.

· Les producteurs nationaux refusent de vendre à certains détaillants, comme Costco, en raison de préoccupations liées à leurs relations existantes avec d’autres clients.

· Les producteurs nationaux n’ont jamais sollicité certains détaillants, comme IKEA, et ne souhaitent pas assurer leur approvisionnement.

· Certains détaillants ne peuvent s’approvisionner auprès de producteurs nationaux pour des raisons contractuelles ou parce qu’ils ont décidé d’acquérir des SRUD à l’échelle mondiale pour des motifs comme l’uniformité de la marque et l’efficacité de la chaîne d’approvisionnement.

[230] Les autres facteurs qui, de l’avis du Tribunal, méritaient d’être étudiés davantage sont abordés ci-dessous.

Importations non visées

[231] Les producteurs nationaux participants reconnaissent que les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam ont vraisemblablement causé un dommage à la branche de production nationale, dans une certaine mesure, pendant la période visée par l’enquête. Cependant, ils soutiennent que les marchandises en cause ont vraisemblablement eu une incidence plus importante puisqu’elles représentent une plus grande part du marché élargi des SRUD (à savoir le marché qui comprend les ventes de SRUDST importés de toutes sources). Ils font également valoir qu’il y a une substituabilité à la baisse entre les SRUD répondant à la définition du produit et les SRUDST, ce qui signifie que les marchandises en cause ont directement causé un dommage aux producteurs nationaux de SRUD répondant à la définition du produit et aux producteurs nationaux de SRUDST, alors que les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam n’ont vraisemblablement causé de dommage qu’aux producteurs nationaux de SRUDST.

[232] Les producteurs nationaux participants proposent de répartir le dommage entre les marchandises en cause et les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam en observant leur croissance relative, en valeur, au cours de la période visée par l’enquête. Pour ce faire, ils ont utilisé les parts du marché élargi détenues par les marchandises en cause et par les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam au début de la période visée par l’enquête et les ont gardées constantes en 2018, en 2019 et en 2020 [227] . Cette analyse a permis aux producteurs nationaux participants de calculer les volumes de ventes annuels des marchandises en cause et des importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam selon un scénario hypothétique dans lequel ni l’un ni l’autre n’auraient acquis de parts de marché aux dépens de la branche de production nationale. La différence entre les volumes hypothétiques et les volumes historiques réels sont les volumes des ventes perdues par la branche de production nationale, que les producteurs nationaux participants ont ensuite multipliés par les valeurs unitaires des SRUD répondant à la définition du produit et des SRUDST de la branche de production nationale pour obtenir la valeur totale de ventes perdues. À l’aide de cette méthodologie, les producteurs nationaux participants estiment que, de 2018 à 2020, de 70 à 75 p. 100 de la valeur totale des ventes perdues était attribuable aux marchandises en cause.

[233] IKEA soutient que les producteurs nationaux participants font une distinction injustifiée entre les SRUDST de la Chine et du Vietnam et les SRUDST de tout autre pays. Elle fait valoir que, puisque ceux-ci doivent tous être traités comme des produits faisant l’objet d’un commerce loyal, il n’y a aucun motif d’exclure les données sur les SRUDST en provenance des États-Unis et des autres pays, en particulier quand ces données montrent que les SRUDST de ces sources ont fait un bond important pendant la période visée par l’enquête.

[234] Dans le même ordre d’idées, le CCCD fait valoir que les éléments de preuve au dossier montrent qu’il y a un nombre substantiel d’importations de SRUD répondant à la définition du produit en provenance de pays non visés et d’importations de SRUDST de pays autres que la Chine et le Vietnam. Il ajoute que ces importations livrent concurrence aux marchandises en cause en ce qui a trait aux prix.

[235] Le Tribunal est d’avis que les données du rapport d’enquête indiquent que les importations non visées et les importations de SRUDST en provenance de pays autres que la Chine et le Vietnam n’auraient pu raisonnablement causer un dommage à la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête. Les ventes d’importations non visées en provenance des États-Unis ont baissé au cours de la période visée par l’enquête et, si les ventes d’importations non visées en provenance d’autres pays ont augmenté, ce n’est pas le cas de leur part de marché [228] . Les prix de toutes les importations non visées étaient en outre considérablement plus élevés que ceux des marchandises en cause à l’échelle agrégée [229] . Par ailleurs, même si les ventes de SRUDST importés des États-Unis et d’autres pays ont augmenté au cours de la période visée par l’enquête, la hausse des ventes des importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam a représenté la vaste majorité de l’accroissement total des ventes d’importations de SRUDST de toutes les sources [230] . La part du marché élargi détenue par les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam a augmenté au cours de la période visée par l’enquête, alors que celles détenues par les SRUDST importés des États-Unis et d’autres pays sont essentiellement demeurées stables. En outre, le prix des importations de SRUDST de la Chine était plus bas que celui de toutes les autres importations de SRUDST, et le prix des importations de SRUDST du Vietnam était en majorité plus faible que celui des importations de SRUDST des États‑Unis [231] .

[236] Conformément à l’analyse qui précède, le Tribunal est convaincu que, hormis les marchandises en cause, seules les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam ont causé un dommage perceptible à la branche de production nationale pendant la période visée par l’enquête. En ce qui concerne la tentative d’estimer la proportion du dommage subi par la branche de production nationale devant être attribuée aux marchandises en cause et aux importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam, le Tribunal est d’avis que la démarche des producteurs nationaux participants décrite précédemment est raisonnable dans les circonstances [232] . Comme le soutiennent les producteurs nationaux participants, il y a substituabilité à la baisse entre les SRUD répondant à la définition du produit et les SRUDST, de telle manière que les marchandises en cause ont vraisemblablement causé un dommage aux producteurs nationaux de SRUD répondant à la définition du produit et aux producteurs nationaux de SRUDST, alors que les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam n’ont probablement causé de dommage qu’aux producteurs nationaux de SRUDST [233] .

[237] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut qu’il est approprié d’estimer que jusqu’à 25 p. 100 du dommage subi par la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête peut être attribuable aux importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam.

Montée du commerce en ligne

[238] Le CCCD soutient que, parallèlement à l’essor du commerce en ligne, les consommateurs exigent maintenant une vaste gamme de choix de produits aux prix les plus bas, s’attendent à ce qu’ils soient disponibles sans délai, et veulent que la livraison soit pratique et peu coûteuse. Il fait valoir que ces tendances ont accru les pressions sur les prix pour tous les produits de détail, y compris les meubles.

[239] Wayfair fait remarquer que tous les producteurs nationaux participants dont le site Web n’est pas transactionnel ont perdu des parts de marché pendant la période visée par l’enquête. Elle soutient que, comme Palliser, Elran et Jaymar n’ont pas réussi à élaborer ou à mettre en œuvre une stratégie cohérente de commerce électronique, elles n’ont pas su tirer parti de la croissance des ventes en ligne, ce qui a sensiblement contribué à leur perte de parts de marché et à leur baisse des ventes.

[240] De même, RHI fait valoir que la branche de production nationale n’a pas su s’adapter avec succès au passage au commerce électronique et que cela ne peut être attribué aux marchandises en cause.

[241] Les producteurs nationaux participants répondent que, même si les consommateurs veulent des bas prix, ce n’est pas un droit puisque les attentes de bas prix ne justifient pas le dumping et le subventionnement. Ils soutiennent que, en s’approvisionnant de produits sous-évalués et subventionnés, et en faisant la promotion et en les vendant, les grands détaillants ont créé et renforcé les attentes des consommateurs à l’égard des bas prix dommageables.

[242] Les producteurs nationaux participants font valoir que le manque de circuits de vente en ligne ne peut expliquer les gains de parts de marché des marchandises en cause aux dépens des marchandises de production nationale, puisque aucun élément de preuve ne montre que les exportateurs de marchandises en cause ont leurs propres circuits de commerce en ligne. Ils font remarquer que, en fait, les plus grands producteurs chinois et vietnamiens de SRUD sont tous des fabricants qui vendent en gros à des détaillants canadiens, tout comme les producteurs nationaux.

[243] En outre, les producteurs nationaux participants font remarquer que les parties opposées ont adopté des positions contradictoires puisque Wayfair reproche aux producteurs nationaux de ne pas exploiter leurs propres circuits de commerce en ligne, alors que les détaillants représentés par le CCCD indiquent qu’ils laisseraient tomber des producteurs nationaux comme Palliser si ceux-ci mettaient en place des stratégies de commerce électronique qui leur livreraient concurrence.

[244] En ce qui concerne les attentes des consommateurs quant aux bas prix, le Tribunal a déjà indiqué ci-dessus que les raisons pour lesquelles les prix peuvent constituer un facteur important dans les décisions d’achat des détaillants n’étaient pas pertinentes pour les fins de son analyse de dommage. À ce titre, le Tribunal convient que les consommateurs ne sont pas en droit de bénéficier de bas prix. Leurs attentes à ce chapitre, sans égard à la façon dont elles sont apparues, n’excusent pas le dumping et le subventionnement dommageables des marchandises en cause [234] .

[245] Le Tribunal n’est pas persuadé que l’absence de circuits de vente en ligne de la branche de production nationale ou son défaut de s’adapter à l’essor du commerce électronique ont contribué au dommage subi par la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête. Comme il a été mentionné ci-dessus, la majorité des marchandises similaires de production nationale et des importations de SRUD répondant à la définition du produit sont vendues directement aux détaillants, bon nombre d’entre eux important eux-mêmes des marchandises en cause. Par conséquent, les producteurs nationaux livrent directement concurrence aux exportateurs ou aux producteurs étrangers pour réaliser des ventes auprès de ces détaillants, qui peuvent être des fournisseurs de services de commerce électronique, comme Wayfair et Amazon, ou des détaillants traditionnels qui vendent aussi leurs produits en ligne aux consommateurs [235] . Malgré l’absence d’élément de preuve indiquant que ces exportateurs ou producteurs étrangers ont leurs propres circuits de commerce en ligne, les ventes de marchandises en cause ont néanmoins augmenté de 67 p. 100 au cours de la période visée par l’enquête et leur part de marché a augmenté de 18 points de pourcentage, aux dépens des marchandises similaires de production nationale [236] . Cette situation donne à penser que, contrairement aux allégations des parties opposées, l’absence de circuits de vente en ligne ne semble pas avoir joué un rôle important dans la faiblesse du rendement de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête.

[246] Le Tribunal fait remarquer que, même si les producteurs nationaux avaient pu faire croître leurs ventes par le truchement de circuits de commerce électronique en développant et en mettant en œuvre en amont différentes stratégies de commerce en ligne [237] , ils auraient aussi pu ce faisant perdre des ventes à des détaillants qui ne souhaitent pas livrer une concurrence directe avec leurs fournisseurs [238] . Les producteurs nationaux participants ne risqueraient pas leurs activités principales pour gagner un faible pourcentage de ventes directes en ligne.

[247] De plus, certains éléments de preuve indiquent qu’il est généralement plus difficile de vendre des SRUD en ligne, puisque certains consommateurs préfèrent pouvoir toucher, sentir et essayer le produit en magasin avant de décider d’effectuer un achat [239] . Si les consommateurs vont de plus en plus en ligne pour effectuer des recherches sur des produits et comparer les modèles et les prix, reste que les données indiquent que, pendant la période visée par l’enquête, une vaste proportion d’entre eux préférait quand même se rendre dans un magasin physique pour effectuer l’achat final [240] .

[248] À ce titre, même s’il est prévu que le commerce en ligne poursuivra sans doute sa croissance rapide au cours des prochaines années, ce qui pourrait modifier fondamentalement le fonctionnement de la branche de production, le Tribunal est d’avis que l’absence de circuits de vente en ligne de la branche de production nationale ou le défaut de cette dernière de mettre en place des stratégies de commerce électronique efficaces ne constituent pas une cause du dommage qu’elle a subi au cours de la période visée par l’enquête.

Changements dans la composition du marché de détail

[249] Le CCCD fait valoir que, dans les dernières années, un certain nombre de détaillants de meubles ont fait faillite ou fermé leurs portes, ce qui a donné lieu à une redistribution des modèles d’achat de SRUD à l’échelle des magasins à grande surface et à des pressions à la baisse sur les prix de détail. L’exemple le plus notable est la disparition de Sears Canada Inc. (Sears), qui a fermé tous ses magasins au début de 2018.

[250] Le CCCD et bon nombre des autres parties opposées soutiennent que, puisque Sears était l’un des clients les plus importants de Palliser, à qui elle a vendu un nombre significatif de SRUD de 2015 à 2017, la perte de ce client a eu une incidence marquée sur le rendement financier de Palliser pendant la période visée par l’enquête.

[251] Les producteurs nationaux participants font valoir que la fermeture de Sears n’a pas éliminé la demande de SRUD du marché, puisque la demande à laquelle répondait Sears s’est redistribuée entre d’autres détaillants à la fermeture de la chaîne. Ils ajoutent que Palliser était donc en position de continuer à servir cette demande en vendant ses produits à ces autres détaillants, mais que les volumes accrus de marchandises en cause à bas prix lui ont vraisemblablement ravi ces ventes.

[252] Le Tribunal conclut que, même sans la présence des marchandises en cause sur le marché, Palliser n’aurait vraisemblablement pas été en mesure de récupérer toutes les ventes perdues à la suite de la perte du client Sears en vendant aux détaillants qui ont, en définitive, bénéficié de la disparition de la chaîne. Par conséquent, la perte du client a eu des effets indéniables sur les ventes et le rendement financier de Palliser pendant la période visée par l’enquête. Cela dit, les parties opposées ont exagéré ces effets en se fondant sur les ventes totales de Palliser à Sears de 2015 à 2017 [241] , indiquées par M. DeFehr, pour faire des présomptions erronées sur la distribution de ces ventes.

[253] Les éléments de preuve au dossier montrent que la grande majorité des ventes de Palliser à Sears pendant ces trois années ont été réalisées au cours des deux premières années [242] . Ainsi, la diminution de la valeur des ventes nettes de Palliser de 2017 à 2018, la seule comparaison d’une année à l’autre qui chevauche la période visée par l’enquête du Tribunal, était beaucoup plus faible que ce que les parties opposées ont indiqué et ne représente pas la totalité de la diminution de la valeur des ventes nettes de Palliser pendant cette période d’un an [243] .

[254] Dans son mémoire, le CCCD fait référence à la fermeture d’autres détaillants de meubles au cours des dernières années, mais le point central de ses arguments et de ses éléments de preuve est la faillite de Sears. Par conséquent, le Tribunal n’est pas en mesure de conclure que les autres changements dans la composition du secteur du détail ont eu l’effet de redistribuer la demande d’une façon qui a eu une incidence négative importante sur le rendement général de la branche de production nationale.

[255] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut qu’une partie du dommage subi par Palliser en 2017-2018 est attribuable à la perte du client Sears. Cependant, comme le Tribunal le fait remarquer ci-dessus, même en ne tenant pas compte de Palliser, le rendement financier de la branche de production nationale a grandement reculé au cours de la période visée par l’enquête.

Échec des relations avec des clients principaux

[256] Le CCCD fait valoir que les relations interpersonnelles et les mauvaises décisions d’affaires des producteurs nationaux ont mené à l’échec de leurs relations avec certains clients principaux. En particulier, il mentionne l’expérience de Palliser avec Leon’s comme exemple d’une relation s’étant mal terminée en raison de problèmes tels que les normes de qualité, le non-respect des délais de livraison promis et la décision unilatérale de Palliser de mettre fin à son programme de sièges rembourrés sur mesure avec Leon’s [244] . Selon le CCCD, la décision de Palliser a entraîné une perte du volume de ventes qui ne peut être attribué aux marchandises en cause. Il ajoute que, lorsque les nouvelles au sujet du programme de Leon’s ont circulé sur le marché, les relations de Palliser avec d’autres clients en ont été affectées.

[257] Les producteurs nationaux participants répondent que le point de discorde insurmontable entre Palliser et Leon’s était les prix. Ils soutiennent que, en raison des attentes de Leon’s à l’égard de bas prix qui découlaient de la disponibilité des importations visées, il était devenu intenable pour Palliser de continuer de vendre ses produits à Leon’s. Ils ajoutent qu’il ne s’agissait pas d’une relation mutuellement bénéfique ni même respectueuse que Palliser souhaitait poursuivre.

[258] La relation entre Palliser et Leon’s remonte aux années 1970, mais, selon Leon’s, elle est devenue acrimonieuse à la fin des années 1990 et au début des années 2000 à la suite d’un différend contractuel [245] . Selon Palliser, la relation a pris fin vers le milieu des années 2000, puisque ses prix n’étaient plus concurrentiels par rapport à ceux des importations chinoises [246] . En 2017, M. Mark Wiltshire, un nouveau vice-président de Palliser qui avait déjà travaillé chez Leon’s, a réussi à réconcilier les deux entreprises, qui ont par la suite signé un accord de fournisseur sur un nouveau programme de SRUD sur mesure. En vertu de ce programme, le client pouvait choisir parmi une sélection de matériaux de couverture et de cadres, et Palliser devait livrer le produit dans les 30 jours [247] . En février 2020, Palliser a avisé Leon’s qu’elle mettrait fin au programme à compter de mai 2020 [248] .

[259] Palliser affirme qu’elle a mis fin au programme parce que Leon’s n’acceptait pas de renégocier ou de rajuster les prix que M. Wiltshire avait offerts à Leon’s pour conclure l’accord, prix que Palliser jugeait désormais trop bas pour être viables [249] . De son côté, Leon’s considérait les tentatives de renégociation des modalités de l’accord de Palliser comme opportunistes, puisque Leon’s obtenait un certain succès et avait investi fortement dans le déploiement du programme [250] . M. Graeme Leon, président de la Division des meubles de Leon’s, a également témoigné que, après la résiliation du programme par Palliser, Leon’s a mis sur pied des programmes sur mesure avec d’autres producteurs nationaux afin de pouvoir livrer à ses clients des SRUD sur mesure en 30 jours, car la livraison des importations prend trop de temps [251] .

[260] Selon les éléments de preuve au dossier, le Tribunal conclut que les attentes de Leon’s à l’égard de bas prix qui découlaient de la disponibilité des importations visées bon marché ont empêché Palliser de hausser ses prix et qu’il est devenu intenable pour elle de continuer de vendre ses produits à Leon’s. Les éléments de preuve indiquent que Palliser a cherché à obtenir une hausse de prix auprès de Leon’s et voulait retirer du marché son cadre de SRUD à prix cible d’entrée, mais que Leon’s était d’avis que ce produit était essentiel à son assortiment et croyait qu’il serait en désavantage concurrentiel sans lui [252] . Le Tribunal en comprend que Leon’s devait avoir des prix concurrentiels par rapport aux autres détaillants qui ont accès aux marchandises en cause à ce prix d’entrée. Le Tribunal conclut qu’il s’agit probablement de la principale raison pour laquelle Leon’s a conclu un accord avec Palliser en fonction de prix qui se sont ensuite révélés trop faibles pour être soutenables [253] . Les éléments de preuve étayent bien que les prix attendus par Leon’s étaient trop faibles pour être soutenables [254] . Par ailleurs, si M. Leon a témoigné que Leon’s avait mis sur pied des programmes sur mesure avec d’autres producteurs nationaux, les éléments de preuve indiquent que le vide laissé par Palliser a peut-être été comblé en partie par des importations visées [255] .

[261] En ce qui concerne la détérioration des relations de Palliser avec d’autres clients, les éléments de preuve indiquent que Dufresne, apprenant les modalités préférentielles de livraison et de prix accordées à Leon’s, a également demandé à Palliser une réduction de prix afin que les prix soient équivalents à ceux offerts à Leon’s [256] . Cependant, comme il a conclu que les bas prix offerts à Leon’s par Palliser ont été influencés par les importations visées à bon marché, le Tribunal conclut également que la réduction de prix que Palliser a offerte à Dufresne pour conserver ses ventes et sa relation avec elle a aussi été indirectement le résultat des importations visées.

[262] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que le volume des ventes perdues par Palliser à la suite de l’échec de sa relation avec Leon’s et toute réduction de prix offerte à Dufresne sont attribuables aux marchandises en cause.

COVID-19 et contraintes d’approvisionnement

[263] Les parties opposées soulèvent, en plus de la pandémie de COVID-19 en soi, certains autres facteurs dont les effets semblent avoir été exacerbés par l’apparition de la pandémie. En raison de leur interdépendance et de leur survenue pendant la même période (à savoir, en 2020), le Tribunal a abordé ces facteurs dans leur ensemble.

[264] Le CCCD fait valoir que la pandémie de COVID-19 a fait bondir la demande de SRUD, ce qui ne s’est toutefois pas traduit par une hausse des ventes en raison de contraintes d’approvisionnement attribuables à la fermeture forcée de fabricants et de détaillants, au Canada et à l’étranger, à la pénurie de matériaux et à la diminution de la disponibilité du transport. Il ajoute que certains producteurs nationaux, y compris Palliser, ont des difficultés depuis des années à respecter les délais de livraison promis à leurs clients, mais que cette situation a été exacerbée par la pandémie.

[265] Wayfair soutient que les éléments de preuve établissent que la pandémie de COVID-19 a eu un effet de distorsion sur les données générées pour 2020 et que tout dommage subi pendant cette année doit être attribué à la pandémie. Elle fait aussi remarquer que le délai de livraison moyen des producteurs nationaux est plus long que celui des importations en provenance des États-Unis et seulement un peu plus court que celui des importations non visées d’autres pays.

[266] RHI fait remarquer que la vaste majorité des producteurs nationaux qui ont répondu au questionnaire du Tribunal à l’intention des producteurs ont indiqué que la pandémie de COVID-19 avait eu des effets négatifs sur la production. Elle ajoute que ces effets ne sont pas uniquement liés aux confinements décrétés par les gouvernements, mais également à d’autres facteurs.

[267] Les producteurs nationaux participants soutiennent que, malgré un léger recul sur le marché total en 2020, les volumes de marchandises en cause ont continué d’augmenter et de ravir des parts de marché à la branche de production nationale, ce qui indique que la pandémie de COVID-19 n’a probablement pas été un facteur important dans le rendement de la branche de production nationale en 2020. Ils ajoutent que, même si le Tribunal écartait les données de 2020, les hausses les plus importantes des marchandises en cause et les baisses les plus marquées du rendement de la branche de production nationale ont eu lieu de 2017 à 2019. En ce qui concerne les délais de livraison, les producteurs nationaux participants font valoir que, sauf pendant la pandémie et à l’exception d’un retard anormalement long pendant la première moitié de 2019, les délais de livraison de Palliser étaient respectables.

[268] Il est indéniable que la pandémie de COVID-19 a eu des effets négatifs sur les producteurs nationaux. Les réponses au questionnaire du Tribunal à l’intention des producteurs confirment que les producteurs nationaux ont été touchés à bien des égards, y compris par la fermeture forcée de leurs établissements de fabrication (jusqu’à deux mois dans certains cas), les problèmes de rétention des employés et d’absentéisme après la réouverture, la réduction de la productivité, l’accès réduit aux matières premières et les retards de transport. Pendant l’audience, le Tribunal a entendu des témoins des producteurs nationaux mentionner la mesure dans laquelle ils ont été touchés par la pandémie et la façon dont cette situation avait nui à leur faculté à utiliser efficacement leurs capacités et à maintenir les délais de livraison [257] . Des témoins des détaillants ont aussi confirmé que ces derniers avaient généralement de la difficulté à s’approvisionner auprès de producteurs nationaux en raison de la pandémie [258] .

[269] En ce qui concerne précisément les délais de livraison, si les éléments de preuve exposés ci-dessus montrent clairement qu’ils se sont détériorés dans la foulée de la pandémie de COVID-19, les éléments de preuve au dossier indiquent également qu’ils étaient généralement acceptables avant la pandémie, lorsque la production nationale et les volumes de ventes étaient supérieurs [259] . En fait, les données contenues dans le rapport d’enquête du Tribunal montrent que les délais de livraison moyens des marchandises de production nationale sont d’un à deux mois plus courts que ceux des importations visées [260] . En ce qui concerne les données présentées par le CCCD relativement aux délais de livraison moyens que Dufresne et Leon’s ont connus dans les dernières années, le Tribunal est d’avis qu’elles montrent principalement que les délais ne sont devenus réellement problématiques qu’après le début de la pandémie [261] .

[270] Comme le montrent les éléments de preuve mentionnés ci-dessus, les producteurs nationaux ont été indéniablement touchés par la pandémie de COVID-19. Cependant, la pandémie n’a pas seulement eu des répercussions sur les producteurs au Canada. Elle a aussi eu une incidence sur les producteurs du reste du monde, y compris en Asie. Le Tribunal a par ailleurs entendu des témoignages précisant que les détaillants avaient également eu des difficultés à s’approvisionner en produits de SRUD auprès d’autres pays pendant cette période [262] . Globalement, le Tribunal conclut qu’il n’y a pas d’élément de preuve solide selon lequel la situation dans laquelle se trouvaient les producteurs nationaux n’a pas été vécue aussi par les producteurs étrangers et les exportateurs.

[271] Le Tribunal ajoute que, si la pandémie de COVID-19 avait eu des conséquences disproportionnées sur les producteurs nationaux, les tendances observées dans les données tirées du rapport d’enquête y auraient fait écho. Comme exposé ci-dessus, le taux de décroissance de la part de marché de la branche de production nationale a ralenti au cours de la période visée par l’enquête. Si ce taux avait augmenté en 2020, le Tribunal aurait peut-être été enclin à considérer qu’une partie du dommage devrait être attribué à la pandémie. Toutefois, en l’espèce, les données indiquent que les tendances observées antérieurement se sont simplement poursuivies en 2020, la pandémie ayant probablement touché, en général, les producteurs nationaux et étrangers dans la même mesure.

[272] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal est d’avis qu’aucun motif ne l’empêche d’attribuer le dommage subi par la branche de production nationale en 2020 au dumping et au subventionnement des marchandises en cause.

Divers autres facteurs

[273] Ashley et Violino soutiennent qu’aucun élément de preuve n’indique que la branche de production nationale se soit retirée du segment des produits standard à volume élevé pendant la période visée par l’enquête, le segment qui, selon eux, a connu une croissance pendant cette période. Elles font valoir que, contrairement aux affirmations des producteurs nationaux participants, les marchandises en cause n’ont pas pénétré les segments plus haut de gamme du marché dans lesquels la branche de production nationale mène ses activités.

[274] De l’avis du Tribunal, cet argument n’est pas convaincant. Comme il est indiqué ci-dessus, il y a un chevauchement concurrentiel manifeste entre les marchandises en cause et les marchandises similaires dans toutes les catégories ou à tous les prix cibles (bon, mieux, meilleur).

[275] Wayfair fait valoir que l’examen des réponses au questionnaire à l’intention des producteurs indique que les activités commerciales des producteurs nationaux ne sont pas efficaces, que ceux-ci prennent de mauvaises décisions d’affaires, ou les deux.

[276] Le Tribunal est d’avis que les chiffres auxquels Wayfair renvoie sont probablement le résultat de situations anormales qu’il faudrait examiner de manière plus approfondie pour les comprendre entièrement. Quoi qu’il en soit, le Tribunal conclut qu’il est très improbable qu’elles aient eu une incidence véritable sur la situation de la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête.

[277] Le CCCD soutient que des éléments de preuve au dossier montrent qu’une partie des volumes de ventes des producteurs nationaux a été perdue au profit d’autres producteurs nationaux.

[278] Bien que la concurrence au sein de la branche de production nationale puisse mener à une baisse et à une compression des prix lorsque les producteurs nationaux se livrent concurrence en diminuant leurs prix, le Tribunal a déjà déterminé que la branche de production nationale avait subi, au cours de la période visée par l’enquête, un dommage prenant principalement la forme de perte de ventes et de parts de marché, plutôt que d’effets sur les prix. Ainsi, en l’espèce, la concurrence au sein de la branche de production nationale ne modifierait pas la part de marché détenue par celle-ci relativement à celle détenue par les marchandises en cause.

[279] Le CCCD fait également valoir que de nombreux éléments de preuve montrent que les producteurs de SRUD partout dans le monde se sont butés à l’augmentation des coûts des matières premières et du fret pendant toute la période visée par l’enquête, ce qui est particulièrement problématique pour les producteurs nationaux qui, selon ses allégations, importent du cuir et des mécanismes de mouvement coûteux, ou alors des trousses formées de pièces de SRUD qui sont assemblées au Canada. IKEA a présenté des observations semblables.

[280] Le Tribunal conclut qu’il n’y a pas d’élément de preuve indiquant que l’augmentation des coûts des matières premières et du fret a eu une incidence disproportionnée sur les producteurs nationaux. En outre, le Tribunal a conclu ci-dessus que les prix de vente sur le marché intérieur n’avaient pas été baissés ni comprimés de façon marquée au cours de la période visée par l’enquête. En fait, les marges bénéficiaires brutes unitaires de la branche de production nationale sont demeurées relativement stables pendant toute la période visée par l’enquête, puisque le coût unitaire moyen des marchandises vendues a, en règle générale, évolué de concert avec les valeurs des ventes nettes [263] .

[281] Enfin, le CCCD soutient qu’il faut examiner le lien de causalité entreprise par entreprise, car chacun des producteurs a son histoire. Cela est juridiquement inexact. Comme mentionné précédemment, des conclusions de dommage doivent être rendues pour la branche de production nationale telle que définie, considérée dans son ensemble. Le Tribunal n’a pas l’obligation de tenir compte de la situation de chacun des producteurs pour déterminer si, individuellement, ils présentent des signes de dommage. Par conséquent, même si le Tribunal peut tenir compte des circonstances relatives à un sous-ensemble de la branche de production nationale ou d’un producteur précis dans son examen des autres facteurs, comme il l’a fait ci-dessus, il n’est pas tenu d’examiner la situation particulière de chaque producteur pour déterminer s’il y a causalité.

[282] L’argument du CCCD sous-entend que le Tribunal serait tenu, dans le cadre de son analyse du lien de causalité, de chercher, de sa propre initiative, d’autres facteurs qui auraient pu causer un dommage à des producteurs précis. Cependant, un groupe spécial de l’OMC a indiqué clairement que, en vertu de l’Accord antidumping de l’OMC, l’obligation des autorités chargées de l’enquête est la prise en considération des facteurs connus autres que les importations visées [264] . Bien que ces facteurs incluent ceux qui sont clairement soulevés par les parties intéressées au cours d’une enquête et qui sont réputés pertinents par le Tribunal, les autorités chargées de l’enquête ne sont nullement obligées de chercher à connaître et à examiner dans chaque cas, de leur propre initiative, les effets de tous les facteurs possibles, autres que les importations, qui pourraient causer un dommage à la branche de production nationale visée par l’enquête. Ainsi, on ne saurait interpréter la LMSI comme imposant un tel fardeau au Tribunal.

Conclusion

[283] Le Tribunal conclut que les éléments de preuve, dans leur ensemble, établissent que, si les importations de SRUDST en provenance de la Chine et du Vietnam, et la perte du client Sears par Palliser, ont causé un certain dommage à la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête, le dumping et le subventionnement des marchandises en cause, en soi, constituent une cause, voire la principale cause, du dommage subi par la branche de production nationale.

Caractère sensible

[284] Le Tribunal déterminera maintenant si le dommage causé par le dumping et le subventionnement des marchandises en cause est « sensible », tel que prévoit la définition de « dommage » au paragraphe 2(1) de la LMSI. Si la LMSI ne définit pas le terme « sensible », le Tribunal a jugé auparavant qu’il s’entend d’un dommage qui est plus que de minimis, mais qui n’est pas nécessairement grave [265] . En définitive, le Tribunal évalue le caractère sensible de tout dommage au cas par cas, en tenant compte de la portée (c.-à-d. de la gravité), du moment et de la durée du dommage [266] .

[285] En l’espèce, les éléments de preuve indiquent que la branche de production nationale a subi un dommage causé par le dumping et le subventionnement des marchandises en cause pendant toute la période visée par l’enquête, principalement sous la forme de perte de ventes, de baisse des parts de marché et de réduction des marges bénéficiaires brutes. Bien que le taux auquel le dommage s’est produit a diminué progressivement au cours de la période visée par l’enquête, la situation de la branche de production nationale était au plus mal à la fin de la période visée par l’enquête, qui coïncide avec la période visée par l’enquête de l’ASFC. Le Tribunal est donc convaincu que la portée, le moment et la durée du dommage en l’espèce sont tels que le dommage peut être considéré comme sensible.

[286] Comme le Tribunal a conclu que le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage à la branche de production nationale, il n’a pas besoin d’examiner la question de savoir si les marchandises en cause menacent de causer un dommage.

EXCLUSIONS

[287] Comme il a déjà été mentionné, le Tribunal a reçu un total de 67 demandes d’exclusion de produits de 14 parties : 1 de 2834342 Ontario Inc.; 1 de Arozzi North America Incorporated (Arozzi); 2 de Handy Button Machine Co. (dba Handy Living); 1 de Best Buy Canada Ltd. (Best Buy); 2 de DHP Furniture; 1 d’Expand Furniture Inc. (Expand Furniture); 13 d’Innovation Living Inc. (Innovation Living); 3 de Limitless-Calgary/Limitless-Canada (Limitless); 2 de Medical Breakthrough Massage Chairs LLC (MBMC); 13 de Moe’s Classic Rugs & Home Accessories Inc. (Moe’s); 1 de Pride Mobility Products Corporation (Pride Mobility); 9 de RHI; 3 de Wayfair; et 15 de Zhuhai Ido Furniture Co. Ltd. (Zhuhai Ido).

[288] Étant donné le grand nombre de demandes reçues en l’espèce et le délai très court dont dispose le Tribunal pour rendre ses conclusions et motifs, le Tribunal a avisé toutes les parties, le 5 juillet 2021, qu’il avait l’intention de traiter la question des demandes d’exclusion de produits dans le cadre d’une audience sur pièces seulement [267] . Ainsi, le Tribunal n’a pas prévu de temps pour traiter de cette question pendant l’audience.

[289] Dans le traitement des demandes d’exclusion de produits, le Tribunal présentera d’abord les principes généraux sur lesquels il s’est fondé pour déterminer s’il accordait ou non des exclusions de produits dans le contexte de la présente enquête. Le Tribunal abordera ensuite des demandes précises, qui ont été regroupées en différentes catégories : (1) les SRUD qui dépassent des prix cibles désignés; (2) les canapés-lits, lits de repos, divans-lits et futons; (3) les fauteuils de massage; (4) les fauteuils releveurs à usage médical; (5) les canapés et les fauteuils mobiles avec recouvrement en tissu; (6) les banquettes; (7) les ottomans; (8) les canapés et les fauteuils avec recouvrement en cuir; (9) les meubles prêts-à-assembler; (10) les fauteuils de jeu; et (11) les fauteuils berçants. Le Tribunal abordera enfin les demandes de Costco et de RHI en vue de rendre une décision, aux termes du paragraphe 43(1) de la LMSI, que ses conclusions ne s’appliquent pas aux marchandises importées par ou de ces deux entreprises [268] .

[290] Pour les motifs exposés ci-après, le Tribunal a décidé d’accorder des exclusions visant les fauteuils de massage, les fauteuils releveurs à usage médical et les fauteuils de jeu, tel qu’ils sont décrits à l’annexe 1 des conclusions, et de rejeter toutes les autres demandes.

Principes généraux

[291] La LMSI permet implicitement au Tribunal d’accorder des exclusions de la portée des conclusions [269] . Les exclusions constituent une mesure exceptionnelle que le Tribunal peut accorder à sa discrétion, c.-à-d. quand celui-ci est d’avis que de telles exclusions ne causeront pas un dommage à la branche de production nationale [270] . Le Tribunal a déjà indiqué, dans des décisions précédentes, que des exclusions ne sont accordées que dans des circonstances exceptionnelles [271] .

[292] En effet, la conclusion générale selon laquelle le dumping et le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage à la branche de production nationale signifie que l’importation de tous les produits répondant à la définition du produit est présumée dommageable. Au vu de cette conclusion, pour que des exclusions soient accordées, il est nécessaire de déposer des éléments de preuve convaincants, spécifiques à l’espèce, au sujet de l’effet non dommageable des importations de produits particuliers visés par la définition des marchandises en cause.

[293] Ultimement, le Tribunal doit être guidé par le principe fondamental selon lequel les exclusions ne devraient pas miner l’effet réparateur de ses conclusions. Cela signifie qu’il faut faire preuve de prudence avant d’accorder des exclusions. Le Tribunal ne peut ignorer que toute exclusion de la portée des conclusions risque d’inciter les importateurs à abandonner, dans une vaste mesure, les marchandises sous-évaluées et subventionnées visées par les conclusions au profit de marchandises substituables qui sont aussi sous-évaluées et subventionnées, mais qui bénéficient d’une exclusion.

Facteurs de dommage pertinents

[294] Afin de déterminer si l’octroi d’une exclusion causera un dommage à la branche de production nationale, le Tribunal tient compte de facteurs comme la question de savoir si la branche de production nationale fabrique des marchandises similaires aux marchandises en cause pour lesquelles l’exclusion est demandée, si elle est un fournisseur actif de ces marchandises similaires ou si elle a la capacité de les fabriquer [272] .

[295] En règle générale, le Tribunal rejette les demandes d’exclusion de produits si la branche de production nationale fabrique déjà les mêmes produits, même si cette production est limitée [273] . Cependant, ce facteur n’est pas pertinent en l’espèce puisque, comme il a été mentionné précédemment, la branche de production nationale ne produit pas de SRUD qui sont identiques aux marchandises en cause. Par conséquent, il est clair que la branche de production nationale ne fabrique pas de produits identiques à ceux pour lesquels les exclusions sont demandées.

[296] Le Tribunal doit ensuite examiner si la branche de production nationale fabrique actuellement des produits substituables ou concurrents aux produits faisant l’objet d’une demande d’exclusion. À ce chapitre, le Tribunal garde à l’esprit ses conclusions selon lesquelles les SRUD de production nationale répondant à la définition du produit et les SRUDST sont des marchandises similaires aux marchandises en cause et qu’il n’y a qu’une seule catégorie de marchandises. Globalement, ces conclusions sous-tendent que les marchandises en cause et les marchandises produites par la branche de production nationale ont des caractéristiques physiques et des utilisations finales semblables, répondent aux mêmes besoins des clients et, dans un sens général ou collectif, se livrent concurrence.

[297] Il s’agit du facteur le plus important dans le contexte de la présente enquête. Pour traiter les demandes, le Tribunal a essentiellement réalisé une analyse des marchandises similaires fondée sur les faits propres au cas particulier, à savoir une analyse qui est propre à chaque produit en question. Il a examiné les éléments de preuve précis au dossier concernant les caractéristiques physiques et les caractéristiques de marché (comme la qualité, le prix, le segment de marché et les utilisations finales) des produits et des produits « fabriqués au Canada » qui leur seraient, prétendument, substituables pour évaluer le niveau de concurrence entre eux.

[298] En définitive, le Tribunal conclut que, contrairement aux allégations des demandeurs, la plupart des produits pour lesquels des exclusions sont demandées ne sont pas des articles ou des produits-créneaux qui peuvent être utilisés pour des applications précises, qui répondent à des besoins particuliers ou uniques des clients, ou qui ne livreraient pas, par ailleurs, concurrence aux produits fabriqués par les producteurs nationaux sur le marché. Le point central d’un bon nombre de ces demandes est que les produits importés sont différents, meilleurs ou supérieurs aux marchandises de production nationale en ce qui a trait à la conception, à la qualité, aux matériaux qui les composent, ou autres. Bien que cela puisse être vrai, ce n’est pas suffisant pour que le Tribunal puisse conclure que l’exclusion de ces produits ne causera pas de dommage à la branche de production nationale. Cela n’a pas non plus pour effet de contrer le fait plus crucial que les producteurs nationaux fabriquent certains produits dans un volume suffisamment important qui livrent concurrence à ces produits importés sur le marché. De la perspective de l’acheteur ou de l’utilisateur final (le consommateur), il n’est pas sans importance que les produits importés, peut-être supérieurs, bénéficient d’un avantage indu relativement au prix en raison du dumping et du subventionnement des marchandises en cause. Il est raisonnable de conclure que cet avantage constitue un facteur important qui pourrait pousser un acheteur ou un utilisateur final à se procurer ces marchandises en cause plutôt que des marchandises similaires. L’objet des conclusions est de remédier à cette situation en uniformisant les règles du jeu.

[299] Tout compte fait, le Tribunal n’a pas été convaincu par les éléments de preuve déposés par la majorité des demandeurs selon lesquels il n’y a pas de SRUD de production nationale substituable aux produits pour lesquels des exclusions sont demandées ou interchangeables avec ceux-ci. Il ne s’agit donc pas d’une situation où des circonstances exceptionnelles justifient d’accorder de nombreuses exclusions [274] . Par conséquent, la démonstration, selon les faits de l’espèce, de la concurrence probable entre les SRUD de production nationale et les produits pour lesquels des exclusions sont demandées mène à la conclusion que le fait d’accorder la grande majorité des exclusions causerait vraisemblablement un dommage à la branche de production nationale et, donc, minerait l’effet réparateur des conclusions.

[300] À cet égard, le Tribunal fait remarquer que, dans sa confirmation d’une décision dans laquelle le Tribunal rejette des demandes d’exclusion dans le cadre d’une autre enquête menée aux termes de l’article 42 de la LMSI, la Cour d’appel fédérale a affirmé :

[...] La conclusion du tribunal selon laquelle la preuve indique que Globe est capable de produire des produits de substitution n’est pas contestée. Sur le fondement de ce seul fait, il était loisible au tribunal de rejeter les demandes d’exclusion d’Owen. Le rejet des demandes d’exclusion d’Owen n’était pas déraisonnable. [275]

[301] Dans la mesure où la capacité de fabriquer des marchandises de substitution est suffisante pour rejeter des demandes d’exclusion de produits, a fortiori, des éléments de preuve de la production réelle, à des niveaux qui ne sont pas négligeables, de produits nationaux de substitution constituent un fondement adéquat et convaincant pour rejeter une demande d’exclusion.

Fardeau de la preuve

[302] Il incombe au demandeur de démontrer que les importations des marchandises spécifiques pour lesquelles il demande l’exclusion ne sont pas dommageables pour la branche de production nationale [276] . Le demandeur a donc le fardeau de déposer des éléments de preuve à l’appui de sa demande. Toutefois, il incombe également aux producteurs nationaux de déposer des éléments de preuve pour réfuter les éléments de preuve déposés par le demandeur [277] . Ultimement, le Tribunal doit déterminer s’il exercera son pouvoir discrétionnaire d’accorder des exclusions de produits en se fondant sur son évaluation de l’ensemble des éléments de preuve au dossier [278] .

[303] C’est en gardant ces considérations primordiales à l’esprit que le Tribunal a examiné les demandes des parties.

Demandes d’exclusion de produits

SRUD dépassant des prix cibles désignés

[304] Le Tribunal a reçu huit demandes de RHI pour l’exclusion de produits vendus directement aux consommateurs avant l’importation et dont les prix dépassent divers prix cibles de détail nets (nets de toutes les ventes et remises), y compris les droits de douane, mais à l’exclusion des taxes et de tous les frais d’expédition et de livraison.

[305] RHI soutient que les produits pour lesquels elle demande des exclusions sont vendus sur le marché canadien à un prix cible de détail substantiellement plus élevé que celui des marchandises similaires de production nationale aux caractéristiques semblables. Elle ajoute que ses produits ne sont pas vendus par les mêmes circuits de distribution que les marchandises similaires (en gros), qu’ils sont vendus à faible volume à un créneau de clientèle précis à des prix très élevés et qu’ils sont expédiés en majorité à la suite de commandes spéciales ponctuelles dans des délais de livraison très longs.

[306] RHI fait en outre valoir que les éléments de preuve fournis par les producteurs nationaux participants indiquent que le prix des marchandises similaires de production nationale demeure bien en deçà des prix cibles au-dessus desquels des exclusions sont demandées. De plus, elle soutient que les producteurs nationaux participants n’ont pas tenu compte du fait que les demandes d’exclusion de RHI ne se fondent pas uniquement sur le dépassement des prix cibles désignés par les produits, mais qu’elles définissent également des caractéristiques précises des produits, y compris leur circuit de distribution. Enfin, RHI fait valoir qu’il était mal à propos et non fondé de la part des producteurs nationaux participants de laisser croire à ce que l’« indexation » des prix cibles désignés dans les demandes aurait dû être proposée.

[307] Les producteurs nationaux participants s’opposent aux demandes d’exclusion de produits de RHI pour deux raisons principales. D’abord, ils font valoir que, d’un point de vue conceptuel, il est intrinsèquement probable que l’exclusion de produits en fonction d’un prix cible cause un dommage, puisque le fait de permettre le dumping et le subventionnement de marchandises au-delà d’un certain prix impose un plafond sur les prix des producteurs nationaux. Ils soutiennent que, si des marchandises sous-évaluées et subventionnées pouvaient être librement vendues au-delà de certains prix cibles, la branche de production nationale ne pourrait vendre des produits plus haut de gamme à des prix cibles similaires ou plus chers, maintenant et pendant la période d’application des conclusions. À ce chapitre, ils font remarquer que RHI n’a pas proposé de mécanismes d’indexation des prix cibles désignés à l’inflation ni de rajustement pour tenir compte de nouvelles circonstances qui feraient croître les prix des marchandises de production nationale.

[308] Par ailleurs, les producteurs nationaux participants font valoir qu’ils vendent des produits à des prix de détail qui, au minimum, ne sont pas très loin des prix cibles des produits pour lesquels RHI demande des exclusions. Selon eux, les marchandises de production nationale sont substituables aux produits de RHI et les prix de détail de ces produits ne diffèrent pas de ceux de certaines marchandises de production nationale au point d’empêcher la concurrence entre eux.

[309] Il n’y a pas d’élément de preuve convaincant indiquant que les prix élevés que RHI a fixés pour ses produits reflètent des coûts de production élevés en raison de matériaux uniques, qui permettent une application unique ou des spécifications qui améliorent les caractéristiques des produits (comme la durabilité). Au contraire, les éléments de preuve indiquent que les prix élevés demandés par RHI sont attribuables à la valeur que les clients donnent à l’« expérience de magasinage » [traduction] de RHI, aux conseils et à la compétence de son personnel et au prestige lié à la possession de produits de marque RHI.

[310] Les éléments de preuve indiquent certes que les producteurs nationaux participants vendent des produits dont les prix de détail ne dépassent pas les prix cibles des produits pour lesquels RHI demande des exclusions, mais ils indiquent également que, dans certains cas, les différences sont relativement faibles [279] . Ainsi, si les exclusions demandées étaient accordées, les consommateurs pourraient, si les circonstances s’y prêtent, décider de passer d’un produit national à l’« expérience de magasinage » offerte par RHI, jugée supérieure, et ainsi causer un dommage à la branche de production nationale.

[311] Le Tribunal est également d’avis que, comme le font valoir les producteurs nationaux participants, les exclusions, si elles étaient accordées, imposeraient un plafond aux prix des producteurs nationaux et les empêcheraient, en fin de compte, de vendre des produits plus haut de gamme à des prix cibles similaires ou plus chers. Les effets d’un tel « plafond » seraient accrus par le fait que RHI n’a pas proposé de mécanismes d’indexation ni de rajustement des prix cibles désignés pendant la période d’application des conclusions [280] . Le Tribunal a affirmé antérieurement qu’il n’avait pas la compétence pour hausser le prix cible de l’exclusion dans un réexamen de ses conclusions [281] . Par conséquent, des doutes subsistent quant à savoir si des exclusions fondées sur des prix cibles qui, bien qu’ils puissent offrir un niveau de protection acceptable pour la branche de production nationale aujourd’hui, continueront d’en offrir un dans l’avenir alors que l’inflation fera inévitablement grimper les prix et érodera progressivement le niveau de protection. À ce titre, le Tribunal ne désire pas accorder une exclusion qui risque, faute de méthode d’indexation appropriée, d’inclure au fil du temps des marchandises qui livrent directement concurrence aux marchandises de production nationale et de miner l’effet réparateur de ses conclusions.

[312] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal rejette les huit demandes de RHI pour l’exclusion de produits dont les prix dépassent des prix cibles désignés.

Canapés-lits, lits de repos, divans-lits et futons

[313] Le Tribunal a reçu 33 demandes d’exclusion de cinq parties visant des canapés-lits, des lits de repos, des divans-lits et des futons : 2 demandes ont été reçues de DHP Furniture; 1 d’Expand Furniture; 1 de Handy Living; 12 d’Innovation Living; 2 de Moe’s; et 15 de Zhuhai Ido. Expand Furniture, Moe’s, Innovation Living et Zhuhai Ido ont demandé des exclusions de produits pour des canapés-lits. Innovation Living et Zhuhai Ido ont également demandé des exclusions pour des lits de repos et des divans-lits, respectivement. DHP Furniture a demandé des exclusions de produits pour des futons. Handy Living a demandé une exclusion de produit pour son canapé-lit « Convert-A-Couch ».

[314] Expand Furniture, Moe’s, Innovation Living et Zhuhai Ido font valoir que les produits pour lesquels elles ont demandé des exclusions se distinguent des marchandises de production nationale par des facteurs comme la fonction, la qualité, le style et la conception. Innovation Living et Zhuhai Ido soutiennent en outre que leurs produits se distinguent par le prix. Innovation Living fait valoir que les prix de détail suggérés de ses produits sont beaucoup plus élevés que ceux des marchandises de production nationale comparables et Zhuhai Ido soutient que les prix de détail suggérés de ses produits sont plus bas que ceux des marchandises de production nationale comparables.

[315] DHP Furniture soutient que les futons rembourrés ne sont pas considérés par la branche de production nationale et les consommateurs comme des produits de la même catégorie que les marchandises en cause parce qu’ils sont conçus pour les petites pièces, servent de surface de repos temporaires et ont un court cycle de vie, alors que les canapés-lits sont fréquemment utilisés dans les salles de séjour et les chambres d’invités autant comme canapé que comme lit de taille standard et ont un cycle de vie prévu plus long que celui des futons. Elle fait valoir en outre que, pendant l’enquête préliminaire de dommage du Tribunal, M. DeFehr a affirmé que les futons ne livraient pas concurrence à la gamme de produits de Palliser et qu’il consentait à leur exclusion. DHP Furniture soutient également que les différences de prix entre les futons et les divans-lits de production nationale sont tellement importantes qu’il ne peut être raisonnablement affirmé qu’un consommateur à la recherche d’un futon envisagerait l’achat d’un canapé-lit.

[316] Handy Living fait valoir que, à sa connaissance, la branche de production nationale ne fabrique pas de lit de taille réduite qui peut ensuite être transformé en sofa, comme son modèle Convert-A-Couch, un produit protégé par une marque de commerce. Elle ajoute que, puisque les producteurs nationaux participants ont classé le Convert-A-Couch dans la catégorie des canapés-lits, elle n’a pas été en mesure de répondre adéquatement, car les arguments portant sur les canapés-lits ne s’appliquent pas. Elle soutient en outre que les producteurs nationaux participants ne se sont pas acquittés de leur fardeau et que le Tribunal devrait par conséquent accorder une exclusion de produit au Convert‑A‑Couch.

[317] Les producteurs nationaux participants soutiennent que les canapés-lits représentent une catégorie de marchandises importante pour eux. Ils soutiennent que, si les demandeurs ont généralement tenté d’établir des distinctions entre les marchandises de production nationale et les produits pour lesquels ils ont demandé des exclusions, ils n’ont pas réussi à expliquer pourquoi ils n’étaient pas substituables. Les producteurs nationaux participants ajoutent que, même si les canapés-lits de production nationale ne possèdent pas tous les attributs des produits pour lesquels des exclusions sont demandées, ils satisfont, pour la plupart, aux mêmes besoins des clients.

[318] Le Tribunal conclut que, même s’ils ne sont pas identiques aux produits pour lesquels des exclusions sont demandées, les canapés-lits produits par la branche de production nationale satisfont en règle générale aux mêmes besoins des clients, puisqu’ils sont utilisés pour s’asseoir et pour dormir. Les canapés-lits fonctionnent peut-être différemment des divans-lits, des futons et du Convert-A-Couch de Handy Living, mais ils remplissent les mêmes fonctions de base. Le Tribunal considère donc que les canapés-lits de production nationale et tous les produits pour lesquels des exclusions sont demandées sont substituables.

[319] Pour ce qui est des prix, les éléments de preuve au dossier indiquent que ceux des canapés-lits de production nationale varient grandement, de manière qu’ils puissent être offerts à la vente à des prix cibles différents et donc livrer concurrence à la plupart des produits pour lesquels des exclusions sont demandées [282] . Même si certains produits, comme les futons, peuvent être moins chers que les canapés-lits de production nationale, à la suite des présentes conclusions, les différences de prix seront peut-être suffisamment réduites pour qu’un consommateur envisage d’acquérir un canapé-lit plutôt qu’un futon. Par conséquent, l’octroi d’une exclusion pour ce type de produits risque de miner l’effet réparateur de ses conclusions. Le fait que les volumes de vente de canapés-lits des producteurs nationaux aient été élevés en 2019 et en 2020 [283] met davantage en évidence le risque de dommage pour la branche de production nationale.

[320] En ce qui a trait à la mention par Handy Living que son Convert-A-Couch est un produit protégé par une marque de commerce [284] , le Tribunal fait remarquer qu’il est bien établi que le fait qu’un produit soit protégé par la propriété intellectuelle ne signifie pas que le Tribunal accordera automatiquement une exclusion [285] . En bref, le fait qu’un produit bénéficie d’une protection de la propriété intellectuelle peut signifier que la branche de production nationale n’est pas en mesure de fabriquer des marchandises identiques. Cette situation n’empêche toutefois pas la branche de production nationale de produire des produits substituables et concurrents, comme en l’espèce.

[321] Enfin, le Tribunal fait remarquer que, si M. DeFehr a consenti à l’exclusion des futons d’éventuelles conclusions pendant l’enquête préliminaire de dommage, le Tribunal a déterminé qu’il était prématuré d’accorder des exclusions à cette étape de la procédure [286] . Palliser et M. DeFehr étaient en droit de retirer leur consentement pendant la présente enquête de dommage. Comme mentionné ci‑dessus, le Tribunal est d’avis que les lits de repos, les divans-lits et les futons sont substituables aux canapés-lits de production nationale et leur livrent concurrence.

[322] Par conséquent, le Tribunal conclut que le fait d’accorder les exclusions demandées causerait un dommage à la branche de production nationale. Il rejette donc les demandes d’exclusion visant les canapés-lits, les lits de repos, les divans-lits et les futons.

Fauteuils de massage

[323] Le Tribunal a reçu cinq demandes d’exclusion de quatre parties visant les fauteuils de massage. Une demande a été reçue de 2834342 Ontario Inc., une de Best Buy, deux de MBMC et une de Wayfair.

[324] 2834342 Ontario Inc., Best Buy, MBMC et Wayfair font valoir que la branche de production nationale ne fabrique pas de produits substituables ou concurrents. Best Buy soutient que les fauteuils de massage ne sont pas destinés à des fins générales, puisqu’ils ne sont pas confortables pour s’asseoir pendant de longues périodes en raison des composantes mécaniques sous le recouvrement. 2834342 Ontario Inc., Best Buy, MBMC et Wayfair soutiennent en outre que les produits pour lesquels elles ont demandé des exclusions comprennent des caractéristiques plus poussées que des poches d’air ou des coussins chauffants et qu’il ne s’agit pas de « composantes mineures » [traduction].

[325] Best Buy fait en outre valoir que, même s’il est possible qu’un consommateur qui souhaite acheter un fauteuil inclinable opte finalement pour un modèle qui comporte des fonctions de massage et de chauffage de base à titre de valeur ajoutée, le consommateur qui veut acheter un fauteuil de massage comprend que cet équipement est encombrant et il privilégie la fonction plutôt que l’apparence. MBMC ajoute que l’importante majoration de prix des fauteuils de massage les distingue des fauteuils inclinables décrits par les producteurs nationaux participants.

[326] Les producteurs nationaux participants font valoir que la structure de base de tous les fauteuils de massage et de bien-être couverts par les demandes d’exclusion est un fauteuil inclinable et que tous les modèles ont des fonctions supplémentaires de massage et de chauffage. Ils soutiennent que les fauteuils inclinables représentent une part importante des SRUD produits au Canada et que des consommateurs pourraient choisir d’opter pour des fauteuils de massage qui font l’objet des demandes plutôt que des fauteuils inclinables de production nationale étant donné l’avantage indu dont ils bénéficient quant au prix. Ils ajoutent que la branche de production nationale fabrique également des fauteuils de massage et de bien-être substituables qui comportent des fonctions de massage et de chauffage.

[327] Le Tribunal est d’avis que les éléments de preuve fournis par les producteurs nationaux participants n’indiquent pas que la branche de production nationale produit des fauteuils de massage substituables ou concurrents. Les fauteuils de massage pour lesquels des exclusions sont demandées sont des fauteuils inclinables très spécialisés dont la principale fonction est d’offrir un massage corporel complet. De plus, leur apparence diffère tant de celle des fauteuils inclinables types qu’un consommateur n’envisagerait jamais de substituer l’un à l’autre [287] . Selon le Tribunal, les fonctionnalités de massage et de chauffage offertes pour certains des modèles de fauteuil d’Elran et les fonctionnalités de chauffage offertes pour les fauteuils inclinables « zéro gravité » de Palliser ne sont pas suffisantes pour livrer concurrence aux fauteuils de massage des demandeurs [288] . Par conséquent, le Tribunal conclut que le fait d’accorder les exclusions demandées ne causerait pas de dommage à la branche de production nationale.

[328] Le Tribunal accorde donc les exclusions visant les fauteuils de massage, tels que décrits à l’annexe 1 des conclusions.

Fauteuils releveurs à usage médical

[329] Le Tribunal a reçu une demande d’exclusion visant les fauteuils releveurs à usage médical de Pride Mobility.

[330] Pride Mobility soutient que, à sa connaissance, la branche de production nationale ne fabrique pas et n’est pas en mesure de fabriquer ou de fournir des fauteuils releveurs à usage médical, que ses fauteuils releveurs à usage médical sont distribués exclusivement par le truchement de fournisseurs d’équipement médical autorisés et qu’ils sont généralement recherchés par des patients sur indication de leur médecin ou d’autres fournisseurs de soins de santé agréés.

[331] Pride Mobility fait aussi valoir que, hormis le fait qu’il s’agit de sièges mobiles, les fauteuils de bien-être produits par les producteurs nationaux participants n’ont pas les mêmes caractéristiques physiques et de marché que ses fauteuils releveurs à usage médical. Elle soutient que ses fauteuils sont réglementés par Santé Canada en tant qu’instruments médicaux de classe I, ce qui signifie qu’ils sont conçus, fabriqués et testés spécifiquement pour des besoins de traitement, d’atténuation, de diagnostic ou de prévention d’une maladie ou d’un état physique. Elle ajoute que, pour respecter les normes internationales et conserver leur homologation à titre d’instruments médicaux, ses fauteuils releveurs à usage médical exigent des activités de conformité continues, la préparation en vue des inspections de Santé Canada, la participation à ces inspections et la surveillance post-commercialisation relative aux incidents indésirables.

[332] Les producteurs nationaux participants ont classé les fauteuils releveurs à usage médical de Pride Mobility dans la catégorie des chaises de bien-être, mais n’ont pas soumis d’observation portant précisément sur la demande d’exclusion de produit.

[333] Aucun élément de preuve au dossier n’indique que la branche de production nationale produit et vend des marchandises substituables et concurrentes. Le Tribunal fait remarquer que les producteurs nationaux participants ont bien soumis des documents publicitaires d’Elran qui contiennent des fauteuils dotés d’une fonction de soulèvement [289] . Cependant, ces documents semblent avoir été fournis en réponse aux demandes d’exclusion de fauteuils de massage (abordées ci-dessus) pour montrer que certains modèles de fauteuils d’Elran sont équipés de fonctions de massage et de chauffage [290] . Elran n’a pas participé de façon active à la procédure et n’a déposé aucun élément de preuve indiquant que les fauteuils releveurs décrits dans ses documents publicitaires sont effectivement vendus au Canada ou qu’ils ont obtenu les mêmes approbations réglementaires que les produits pour lesquels Pride Mobility demande des exclusions. Ainsi, le Tribunal conclut que le fait d’accorder l’exclusion demandée ne causerait pas de dommage à la branche de production nationale.

[334] Le Tribunal accorde donc à Pride Mobility l’exclusion demandée visant les fauteuils releveurs à usage médical, tels que décrits à l’annexe 1 des conclusions.

Canapés et fauteuils mobiles avec recouvrement en tissu

[335] Le Tribunal a reçu quatre demandes d’exclusion de deux parties visant les canapés et les fauteuils mobiles avec recouvrement en tissu : trois de Limitless et une de Moe’s.

[336] Limitless et Moe’s soutiennent que les produits pour lesquels elles ont demandé des exclusions sont uniques et que la branche de production nationale n’en produit pas. Limitless fait également valoir que ses produits se situent dans le créneau haut de gamme du marché et ne livrent pas concurrence aux marchandises de production nationale au niveau des prix.

[337] De leur côté, les producteurs nationaux participants soutiennent que les fauteuils mobiles avec recouvrement en tissu qui font l’objet des demandes s’apparentent à des fauteuils pivotants avec recouvrement en tissu, lesquels sont fondamentalement les mêmes que les fauteuils mobiles avec recouvrement en tissu fabriqués par la branche de production nationale. Ils font valoir en outre que le niveau de fermeté d’un canapé n’est pas, comme l’allègue Limitless, suffisant pour rendre un produit importé non substituable aux marchandises de production nationale.

[338] Le Tribunal est d’avis qu’aucun élément des produits pour lesquels des exclusions sont demandées n’est intrinsèquement unique de manière à les empêcher de livrer concurrence aux marchandises de production nationale. Si le style des marchandises de production nationale diffère parfois légèrement, il ne s’agit pas d’un fondement suffisant pour accorder une exclusion. Par ailleurs, à l’instar du raisonnement du Tribunal pour rejeter la demande de RHI d’exclure des produits sur la base de prix cibles, l’octroi d’une exclusion à Limitless au motif que le prix de ses produits est plus élevé empêcherait effectivement la branche de production nationale de livrer concurrence dans ce créneau haut de gamme du marché.

[339] Ainsi, le Tribunal conclut que le fait d’accorder les exclusions demandées causerait un dommage à la branche de production nationale. Le Tribunal rejette donc les demandes d’exclusion visant certains canapés et fauteuils mobiles avec recouvrement en tissu.

Banquettes

[340] Le Tribunal a reçu trois demandes d’exclusion de produits de deux parties visant des banquettes : deux de Moe’s et une de Wayfair.

[341] Moe’s soutient que les produits pour lesquels elle demande des exclusions sont uniques et ne sont pas produits par la branche de production nationale. De même, Wayfair fait valoir qu’elle estime que son produit ne livre pas concurrence aux marchandises fabriquées par la branche de production nationale. Wayfair soutient en outre que, puisque les producteurs nationaux participants n’ont été en mesure de nommer qu’un seul producteur national qui fabrique des banquettes intérieures et n’ont pas fourni d’élément de preuve indiquant qu’un autre producteur national était en mesure ou envisageait de fabriquer des banquettes intérieures, le fait d’accorder cette exclusion n’est pas susceptible de causer un dommage sensible à la branche de production nationale. Wayfair soutient également que le fait d’accorder cette exclusion de produit éviterait la confusion et un fardeau administratif inutile pour les importateurs et l’ASFC lorsqu’ils tentent de déterminer quelles banquettes intérieures relèvent de la portée des marchandises en cause puisque la définition du produit exclut les « chaises ou banquettes (avec ou sans bras) destinées à être utilisées dans la salle à manger [...]. ».

[342] Les producteurs nationaux participants font valoir qu’EQ3 produit et vend au Canada des banquettes qui sont substituables à celles visées par les demandes d’exclusion ci-dessus.

[343] Des éléments de preuve au dossier indiquent que la branche de production nationale fabrique et vend des produits qui sont substituables à ceux visés par les demandes d’exclusion de produits [291] . À ce titre, le Tribunal conclut que le fait d’accorder ces exclusions causerait un dommage à la branche de production nationale. Il fait également remarquer que la prévention de la confusion et d’un fardeau administratif inutile pour les importateurs et l’ASFC ne constitue pas un facteur pertinent pour déterminer si une exclusion de produit doit être accordée.

[344] Le Tribunal rejette donc les demandes d’exclusion visant certaines banquettes.

Ottomans

[345] Le Tribunal a reçu une demande d’exclusion d’Innovation Living visant des ottomans.

[346] Innovation Living soutient que les produits pour lesquels elle demande une exclusion se distinguent des marchandises de production nationale par leur apparence, leur taille, leur fonctionnalité, leurs prix cibles et le marché cible. À l’égard des prix, Innovation Living fait valoir que le prix de détail suggéré de ses ottomans est beaucoup plus élevé que celui de tout autre produit vendu au détail par les producteurs nationaux participants.

[347] Les producteurs nationaux participants soutiennent que Palliser et EQ3 produisent et vendent des ottomans qui sont substituables aux ottomans d’Innovation Living pour lesquels des exclusions sont demandées.

[348] Des éléments de preuve au dossier indiquent que la branche de production nationale produit et vend des produits qui sont substituables à ceux visés par la demande d’exclusion [292] . Par conséquent, le Tribunal conclut que le fait d’accorder cette exclusion causerait un dommage à la branche de production nationale. La demande d’exclusion visant certains ottomans est donc rejetée.

Canapés et fauteuils avec recouvrement en cuir

[349] Le Tribunal a reçu huit demandes d’exclusion de deux parties visant des canapés et des fauteuils en cuir : sept de Moe’s et une de RHI.

[350] Moe’s soutient que les produits pour lesquels elle demande des exclusions sont uniques et que la branche de production nationale n’en produit pas. RHI fait valoir que, à sa connaissance, aucun autre meuble en fourrure de mouton véritable n’est vendu sur le marché canadien et aucun producteur canadien ne fabrique ni n’envisage de fabriquer un produit comparable. RHI soutient également que ses produits en fourrure de mouton ne correspondent pas à la portée des marchandises en cause et ne devraient pas être considérés comme tels, car la fourrure de mouton est une peau garnie de laine, et non du cuir ou un tissu.

[351] Les producteurs nationaux participants font valoir que la branche de production nationale, y compris Palliser, produit et vend au Canada des fauteuils en cuir qui sont substituables aux marchandises pour lesquelles les exclusions sont demandées. Relativement à la demande d’exclusion de RHI visant sa collection YETI en fourrure de mouton, les producteurs nationaux participants soutiennent que la fourrure de mouton est une peau d’animal, donc un type particulier de recouvrement en cuir, et que des produits de ce genre sont substituables à d’autres types de fauteuils, de canapés, d’ottomans et de tabourets en cuir.

[352] Des éléments de preuve au dossier indiquent que la branche de production nationale produit et vend des produits qui sont substituables aux fauteuils et aux canapés en cuir pour lesquels Moe’s et RHI demandent des exclusions [293] . Bien que les produits de la collection YETI de RHI en fourrure de mouton peuvent avoir des caractéristiques physiques qui diffèrent de celles des marchandises de production nationale, le Tribunal est d’avis qu’ils remplissent la même fonction et répondent aux mêmes besoins des clients. Par conséquent, le Tribunal conclut que le fait d’accorder des exclusions de produits pour ces fauteuils et canapés causerait un dommage à la branche de production nationale.

[353] Quant à la question de savoir si les produits de la collection YETI de RHI en fourrure de mouton sont visés par la définition des marchandises en cause, il incombera en définitive à l’ASFC de la traiter à l’importation. Pour les fins de la demande d’exclusion de RHI, le Tribunal a traité ces produits comme des fauteuils et canapés en cuir visés.

[354] Le Tribunal rejette donc les demandes d’exclusion visant certains fauteuils et canapés en cuir.

Meubles prêts-à-assembler

[355] Le Tribunal a reçu une demande d’exclusion de Handy Living visant des sièges prêts-à-assembler qui ne sont pas assemblés au moment de l’importation et qui sont emballés en vue d’être expédiés par des services d’envoi de petits colis.

[356] Handy Living fait valoir que les sièges prêts-à-assembler ne sont pas interchangeables avec les sièges classiques fabriqués par la branche de production nationale puisqu’ils sont vendus par le truchement de circuits de distribution distincts et que leurs marchés cibles diffèrent. Elle soutient que les sièges prêts-à-assembler sont conçus pour être assemblés à la maison par le consommateur et qu’ils sont normalement fabriqués avec des matériaux plus légers afin que le produit soit suffisamment léger pour l’expédition par petits colis et sa vente par des détaillants en ligne.

[357] Handy Living soutient en outre que les producteurs nationaux participants n’ont soumis aucun élément de preuve de leur propre production de sièges prêts-à-assembler ou de marchandises de substitution. Elle fait valoir qu’aucune marchandise figurant dans les documents promotionnels de Palliser n’est conçue pour être expédiée par des entreprises offrant un service d’envoi de petits colis. De même, elle fait valoir que la réponse des producteurs nationaux participants semble indiquer qu’EQ3 vend en ligne des sièges prêts-à-assembler, mais qu’EQ3 ne fournit aucun élément de preuve pour démontrer que ses marchandises sont conçues pour être expédiées par service d’envoi de petits colis ni que ses marchandises sont vendues par un détaillant en ligne.

[358] Les producteurs nationaux participants soutiennent que Handy Living n’a pas expliqué en quoi un fauteuil vendu comme siège prêt-à-assembler, puis assemblé par un consommateur, n’est pas substituable à un fauteuil préassemblé de production nationale. Ils font également valoir que les ventes directes au consommateur réalisées en ligne sont similaires aux autres ventes de SRUD, telles que par l’intermédiaire de Wayfair ou du magasin en ligne d’EQ3. Ils soutiennent en outre qu’aucun élément de preuve ne montre en quoi le marché cible des sièges prêts-à-assembler se distingue entièrement de celui dans lequel les consommateurs font leurs achats en magasin ou auprès d’autres détaillants en ligne. Selon eux, les sièges prêts-à-assembler ne devraient pas être exclus comme une catégorie à part.

[359] Selon le Tribunal, les sièges prêts-à-assembler et les marchandises similaires de production nationale sont substituables et se livrent concurrence, puisque, lorsqu’ils sont assemblés, ces sièges possèdent les mêmes caractéristiques physiques et répondent aux mêmes besoins des clients. La façon dont les marchandises sont emballées ou livrées aux consommateurs devrait avoir peu d’incidence si les marchandises remplissent en définitive la même fonction et répondent aux mêmes besoins des clients. En fait, lorsque des marchandises non assemblées sont importées, elles sont traitées comme des produits finis pour les fins du classement tarifaire.

[360] Le Tribunal convient, à l’instar des producteurs nationaux participants, que les ventes directes aux consommateurs par l’intermédiaire de détaillants en ligne sont similaires aux ventes réalisées par Wayfair, Amazon ou le magasin en ligne d’EQ3. En outre, il n’y a aucun motif pour lequel les sièges prêts-à-assembler du type pour lesquels Handy Living demande une exclusion ne pourraient être vendus en magasin. Par ailleurs, le Tribunal craint que l’octroi d’une exclusion pour des sièges prêts-à-assembler pourrait entraîner des problèmes de contournement, en incitant les exportateurs de marchandises en cause de passer à la vente de marchandises non assemblées, ce qui minerait ainsi l’effet réparateur de ses conclusions.

[361] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que l’octroi d’une exclusion pour des sièges prêts-à-assembler causerait un dommage à la branche de production nationale. Le Tribunal rejette donc la demande d’exclusion de Handy Living visant des sièges prêts à monter.

Fauteuils de jeu

[362] Le Tribunal a reçu deux demandes d’exclusion de deux parties visant des fauteuils de jeu : une d’Arozzi et une de Wayfair.

[363] Arozzi soutient que les fauteuils de jeu ne sont pas similaires aux marchandises en cause et que la branche de production nationale n’en produit pas. Elle fait aussi valoir que les producteurs nationaux participants ont consenti à une exclusion de produit pour les fauteuils de jeu pendant l’enquête préliminaire de dommage, puis ont retiré ce consentement sans préavis au cours de la présente procédure.

[364] Wayfair soutient que les fauteuils de jeu ne livrent pas concurrence aux marchandises fabriquées par la branche de production nationale. Arrozi et Wayfair font valoir que les producteurs nationaux participants n’affirment pas qu’ils produisent des marchandises identiques ou substituables et n’ont pas déposé en preuve de documents promotionnels.

[365] Les producteurs nationaux participants soutiennent que, si les fauteuils de jeu sont des marchandises en cause, ils ne consentent pas aux exclusions telles qu’elles sont présentées, car elles sont trop vagues (Wayfair) ou incomplètes (Arozzi). Ils reconnaissent toutefois que, à l’heure actuelle, l’ASFC ne traite pas les fauteuils de jeu comme des marchandises en cause.

[366] Aucun élément de preuve ne montre que la branche de production nationale produit des fauteuils de jeu similaires à ceux pour lesquels Arozzi et Wayfair demandent des exclusions. En outre, aucun élément de preuve n’indique que les fauteuils de jeu livrent concurrence aux fauteuils SRUD traditionnels, puisque, généralement, ces derniers ne sont ni à hauteur ajustable ni utilisé de pair avec un bureau pour jouer à des jeux vidéo. Par conséquent, le Tribunal conclut que l’octroi d’une exclusion visant les fauteuils de jeu à hauteur ajustable pour utilisation de pair avec un bureau ne causerait pas de dommage à la branche de production nationale.

[367] Par conséquent, dans la mesure où les fauteuils de jeu sont traités comme des marchandises en cause par l’ASFC, ils seront exclus de l’application des conclusions du Tribunal. Le Tribunal accorde les exclusions de produits demandées par Arozzi et Wayfair, telles qu’énoncées à l’annexe 1 des conclusions.

Fauteuils berçants

[368] Le Tribunal a reçu une demande d’exclusion de Moe’s visant un fauteuil berçant.

[369] Moe’s fait valoir que le produit pour lequel elle demande une exclusion est unique et que la branche de production nationale n’en fabrique pas.

[370] Les producteurs nationaux participants font valoir qu’ils ne sont pas certains si le fauteuil berçant faisant l’objet de la demande d’exclusion de Moe’s est une marchandise en cause. Ils font remarquer que le mouvement de bascule de ce fauteuil berçant est facilité par des barres incurvées qui reposent sur le sol plutôt que par un « mécanisme » de mouvement. Ils font donc valoir que, si le fauteuil berçant est une marchandise en cause et qu’il fait l’objet d’une exclusion de produit clairement rédigée, ils consentiraient à l’exclusion, puisqu’ils ne fabriquent pas de produit substituable et concurrent.

[371] Des éléments de preuve au dossier indiquent qu’il y a production nationale de fauteuils berçants semblables au fauteuil berçant pour lequel Moe’s demande une exclusion [294] . Par conséquent, le Tribunal est d’avis que l’octroi de cette exclusion causerait un dommage à la branche de production nationale. La question de savoir si le fauteuil berçant de Moe’s est en fait une marchandise en cause sera tranchée par l’ASFC à l’importation.

[372] Le Tribunal rejette donc la demande d’exclusion de produit de Moe’s.

Demandes d’exclusion propres à une entreprise

Costco

[373] Costco a demandé que toutes ses importations de marchandises en cause soient exclues de toutes conclusions de dommage au motif que ces importations n’ont pas causé un dommage ni contribué au dommage subi par la branche de production nationale. Elle soutient que, en l’espèce, les éléments de preuve montrent sans équivoque que, même si elle a tout fait pour se procurer des marchandises de production nationale, les producteurs nationaux étaient incapables de l’approvisionner ou n’étaient pas intéressés. Costco fait remarquer que la portée d’une telle exclusion serait limitée, puisque les SRUD qu’elle importe ne sont vendus qu’à ses membres, en application de son modèle d’adhésion.

[374] En réponse aux critiques selon lesquelles la branche de production nationale n’a pas la capacité de production pour approvisionner les détaillants, les producteurs nationaux participants font valoir qu’ils ont une capacité considérable et inutilisée et que, quoi qu’il en soit, la branche de production nationale cherchant à obtenir une protection n’est pas tenue d’être en mesure de servir l’ensemble du marché.

[375] Les éléments de preuve au dossier indiquent que bon nombre de producteurs nationaux ont refusé d’approvisionner Costco pendant la pandémie de COVID-19, ce qui donne à penser qu’ils auraient autrement envisagé la possibilité de le faire [295] . Les éléments de preuve indiquent également qu’au moins un des producteurs nationaux a pour objectif d’approvisionner Costco. Avant la pandémie, des producteurs nationaux comme Palliser semblent s’être montrés réticents à approvisionner Costco en produits de marque, en raison de la politique de faibles marges du détaillant et de l’incidence négative sur leurs relations avec d’autres détaillants [296] . Cependant, Palliser semble être disposée à approvisionner Costco en produits à étiquette blanche (sans marque) [297] . L’octroi d’une exclusion propre à une entreprise à Costco obligerait Palliser ou d’autres producteurs nationaux à livrer concurrence à des SRUD faisant l’objet d’un commerce déloyal pour faire affaire avec Costco, ce qui causerait un dommage à la branche de production nationale et irait donc à l’encontre de l’objet de ses conclusions.

[376] De plus, même si les problèmes vécus par Costco relativement à l’acquisition de marchandises de production nationale n’étaient pas transitoires, le Tribunal est d’avis que l’octroi à Costco d’une exclusion propre à une entreprise en l’espèce lui accorderait un avantage indu par rapport aux autres détaillants auxquels elle livre concurrence. Comme il l’a exposé précédemment, le Tribunal accorde rarement des exclusions propres à une seule entreprise ou à un seul importateur afin d’éviter la création d’un avantage concurrentiel injuste ou d’un effet de distorsion sur le commerce [298] . L’espèce ne mérite pas d’exception.

[377] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal rejette la demande d’exclusion propre à une entreprise de Costco.

RHI

[378] RHI demande au Tribunal de rendre des conclusions d’absence de dommage à l’égard de ses exportations et de son offre de marchandises en cause provenant des États-Unis et expédiées vers le Canada [299] . Elle soutient que son modèle d’affaires est unique, qu’il n’y a pas de modèle comparable au Canada, que ses exportations ne sont pas dommageables et qu’elles ne causeront pas un dommage dans l’avenir. RHI répète aussi bon nombre des arguments avancés dans ses demandes d’exclusion de produits.

[379] Ayant refusé toutes les demandes d’exclusion de produits de RHI au motif que leur octroi causerait un dommage à la branche de production nationale, le Tribunal ne voit aucune raison de lui accorder une exclusion propre à une entreprise, laquelle aurait une portée encore plus vaste et risquerait de causer encore plus de dommage à la branche de production nationale. Par ailleurs, pour les raisons mentionnées ci-dessus relativement au rejet de la demande de Costco, l’octroi à RHI d’une exclusion propre à une entreprise lui accorderait un avantage indu par rapport à tout autre concurrent potentiel [300] .

[380] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal rejette la demande d’exclusion propre à une entreprise de RHI.

DEMANDE POUR QUE LE TRIBUNAL AVISE LE PRÉSIDENT DE L’ASFC

[381] Dans leur mémoire, les producteurs nationaux participants joignent une demande pour que le Tribunal avise le président de l’ASFC, conformément à l’article 46 de la LMSI, pour l’informer qu’il est d’avis que des éléments de preuve indiquent que les SRUDST originaires ou exportés de la Chine et du Vietnam ont été ou sont sous-évalués et subventionnés, et que les éléments de preuve indiquent de façon raisonnable que le dumping et le subventionnement ont causé un dommage ou menace de causer un dommage à la branche de production nationale.

[382] L’article 46 de la LMSI prévoit ce qui suit :

Si, au cours de l’enquête visée à l’article 42 au sujet du dumping ou du subventionnement de marchandises objet d’une décision provisoire prévue à la présente loi, le Tribunal est d’avis :

a) d’une part, que les éléments de preuve indiquent que des marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles qui font l’objet de la décision provisoire ont été ou sont sous-évaluées ou subventionnées;

b) d’autre part, que les éléments de preuve indiquent de façon raisonnable que le dumping ou le subventionnement visé à l’alinéa a) a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage,

il en avise le président par un écrit donnant la description des marchandises mentionnées en premier lieu à l’alinéa a).

[383] Par conséquent, pour justifier la notification du président de l’ASFC conformément à l’article 46 de la LMSI, les éléments de preuve de l’espèce doivent indiquer que : (1) les SRUDST sont des marchandises similaires aux marchandises en cause; (2) il y a eu ou il y a des importations de SRUDST au Canada; (3) les SRUDST importés ont été ou sont sous-évalués ou subventionnés; et (4) il y a une indication raisonnable que le dumping ou le subventionnement de ces marchandises a causé un dommage ou menace de causer un dommage.

[384] Puisque le Tribunal a déjà déterminé que les SRUDST étaient des marchandises similaires aux marchandises en cause et que le rapport d’enquête indique clairement qu’il y a eu des importations substantielles de SRUDST de la Chine et du Vietnam pendant la période visée par l’enquête, les deux premières conditions sont satisfaites. Toutefois, le Tribunal estime qu’il n’est pas nécessaire de prendre position relativement à la troisième condition puisqu’il est d’avis que la quatrième condition n’est pas satisfaite.

[385] Les producteurs nationaux participants font valoir que, si les marchandises en cause représentent une cause importante du dommage subi par la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête, les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam sont aussi, en soi, une cause de ce dommage. À l’aide des résultats de la démarche exposée ci-dessus dans la section sur les autres facteurs pour estimer la proportion du dommage subi par la branche de production nationale qui devrait être attribuée aux marchandises en cause et aux importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam, les producteurs nationaux participants soutiennent qu’environ 25 à 30 p. 100 du dommage subi par la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête a été causé par les importations de SRUDST [301] .

[386] Dans l’examen de la question des importations non visées dans le cadre de son analyse du lien de causalité, le Tribunal a conclu que la démarche des producteurs nationaux participants à cet égard était raisonnable et qu’il était ainsi approprié d’estimer que jusqu’à 25 p. 100 du dommage subi par la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête pouvait être attribuables aux importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam. Afin de satisfaire à la quatrième condition mentionnée ci-dessus pour justifier la notification du président de l’ASFC, le Tribunal doit être d’avis que les éléments de preuve indiquent de façon raisonnable que le dumping ou le subventionnement allégué des SRUDST de la Chine et du Vietnam a causé un « dommage », ce terme étant défini au paragraphe 2(1) de la LMSI comme un « dommage sensible causé à une branche de production nationale ».

[387] Le Tribunal est d’avis que 25 p. 100 du dommage qui a été subi par la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête n’est pas suffisant pour être considéré comme sensible dans les circonstances particulières de l’espèce. Comme l’admettent eux-mêmes les producteurs nationaux participants, les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam ont été moins dommageables à la branche de production nationale que les marchandises en cause. Le Tribunal en convient et ajoute que la différence, en ce qui a trait à la portée, entre les effets dommageables pouvant être attribués aux importations de SRUDST pendant la période visée par l’enquête et ceux qui peuvent être attribués aux marchandises en cause est en effet substantielle. Tout bien considéré, le Tribunal conclut que les éléments de preuve relatifs à la gravité du dommage causé par les importations de SRUDST sont insuffisants pour indiquer de façon raisonnable que ces importations ont causé un dommage sensible. Par ailleurs, à la lumière des effets dommageables beaucoup plus importants des marchandises en cause sur le rendement de la branche de production nationale qui se sont manifestés pendant la même période, le Tribunal n’est pas convaincu que, en soi, les importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam peuvent être considérées comme une cause réelle et substantielle de dommage.

[388] Les producteurs nationaux participants font valoir qu’il est uniquement nécessaire qu’il y ait « certains éléments de preuve », même s’il y a aussi des éléments de preuve contradictoires, et que le seuil d’indication raisonnable de dommage en vertu de l’article 46 de la LMSI est faible [302] .

[389] Les circonstances particulières de la présente enquête sont inhabituelles, car le Tribunal peut tirer parti de l’abondance d’informations qu’il a recueillies sur la production, l’importation et la vente de SRUDST au Canada. En d’autres mots, le Tribunal dispose, en l’espèce, d’éléments de preuve détaillés et exhaustifs sur la branche de production nationale qu’il n’aurait pas autrement eus dans les cas où il serait chargé de déterminer si les éléments de preuve indiquent de façon raisonnable la présence de dommage. Il s’ensuit que, si les éléments de preuve du type dont le Tribunal disposerait en définitive dans le contexte d’une enquête définitive de dommage n’étayent pas des conclusions de dommage, il n’y a pas de fondement pour que le Tribunal conclue que les mêmes informations indiquent de façon raisonnable la présence de dommage.

[390] Par conséquent, le Tribunal n’est pas en mesure de conclure que les éléments de preuve indiquent de façon raisonnable que le dumping et le subventionnement allégués de SRUDST de la Chine et du Vietnam ont causé un dommage à la branche de production nationale. Comme les producteurs nationaux participants n’ont présenté aucune observation ni déposé d’élément de preuve à l’appui de leur allégation selon laquelle le dumping et le subventionnement allégués de SRUDST de la Chine et du Vietnam menacent de causer un dommage à la branche de production nationale, le Tribunal n’est pas en mesure de se prononcer à cet égard.

[391] Le Tribunal rejette donc la demande présentée par les producteurs nationaux participants pour qu’il avise le président de l’ASFC en vertu de l’article des 46 de la LMSI.

DEMANDE D’OUVERTURE D’UNE ENQUÊTE D’INTÉRÊT PUBLIC

[392] Costco a demandé que, dans le cas où le Tribunal rendrait des conclusions de dommage et n’exclurait pas Costco de leur application, le Tribunal ouvre une enquête d’intérêt public en vertu de l’article 45 de la LMSI. Costco allègue simplement que l’application de droits substantiels rendra difficile, voire impossible, pour elle d’importer des SRUD pour satisfaire aux demandes de ses membres et limitera gravement sa capacité à livrer concurrence en matière de ventes de SRUD au Canada.

[393] Conformément au paragraphe 45(1) de la LMSI, si le Tribunal rend des conclusions de dommage ou de menace de dommage, il est tenu d’ouvrir, de sa propre initiative ou sur demande présentée par toute personne intéressée dans les délais prescrits et selon les modalités prescrites, une enquête d’intérêt public s’il est d’avis, en se fondant sur des motifs raisonnables, que l’assujettissement des marchandises en cause à des droits antidumping ou compensateurs ou au plein montant des droits prévus à ces articles serait ou pourrait être contraire à l’intérêt public. Le paragraphe 40.1(1) du Règlement prévoit que la demande d’ouverture d’une enquête d’intérêt public doit être présentée au Tribunal dans les 45 jours suivant la date à laquelle celui-ci rend des conclusions positives. Le paragraphe 40.1(2) contient la liste des renseignements à inclure et les facteurs à traiter dans la demande.

[394] La demande de Costco visant l’ouverture par le Tribunal d’une enquête d’intérêt public tient en deux paragraphes dans son mémoire. Ceux-ci ne contiennent aucun des renseignements, ni ne traitent d’aucun des facteurs, prévus au paragraphe 40.1(2) du Règlement. Par exemple, la demande ne contient pas de déclaration quant à l’intérêt public touché par l’assujettissement des marchandises en cause à des droits, comme le prévoit l’alinéa 40.1(2)b). Si Costco allègue en effet que l’imposition de droits rendrait difficile pour elle d’importer des SRUD et de livrer concurrence en matière de ventes de SRUD au Canada, elle n’explique pas en quoi les intérêts de la population en général, ou ceux d’un segment de cette population, seraient affectés. Comme le Tribunal l’a déjà énoncé, la prémisse fondamentale est que l’imposition de droits à la suite d’une enquête menée aux termes de l’article 42 de la LMSI est dans l’intérêt public [303] . Le Tribunal fait également remarquer que ses conclusions de dommage n’empêchent pas l’importation des marchandises en cause. Elles exigent simplement que celles-ci soient importées aux valeurs normales applicables calculées par l’ASFC et/ou que les droits applicables soient payés. À mesure que le marché s’adapte à la suite de l’imposition des droits, de nouveaux prix ou de nouveaux fournisseurs sont susceptibles d’apparaître pour tous les participants au marché [304] .

[395] Par conséquent, la demande de Costco est rejetée. Toutefois, Costco, ou toute autre personne intéressée à cet égard, peuvent toujours déposer une demande qui satisfait aux exigences prévues par le Règlement dans les 45 jours suivant le 2 septembre 2021, la date à laquelle les conclusions du Tribunal ont été rendues.

CONCLUSION

[396] Le Tribunal conclut, aux termes du paragraphe 43(1) de la LMSI, que le dumping des marchandises en cause, ainsi que le subventionnement des marchandises en cause (à l’exclusion des marchandises exportées au Canada par les exportateurs mentionnés au paragraphe 21 des présents motifs), ont causé un dommage à la branche de production nationale. Le Tribunal exclut de ses conclusions les produits décrits à l’annexe 1.

Cheryl Beckett

Cheryl Beckett
Membre présidant

Peter Burn

Peter Burn
Membre

Georges Bujold

Georges Bujold
Membre

 



[1] L.R.C., 1985, ch. S-15 [LMSI].

[2] Les producteurs nationaux suivants ont appuyé la plainte : Elran Furniture Ltd. (Elran), EQ3 Ltd. (EQ3), Fornirama Inc. et Jaymar Furniture Corp. (Jaymar). Voir la pièce PI-2020-007-02.01 aux p. 3242-3248.

[3] Certains sièges rembourrés pour usage domestique (19 février 2021), PI-2020-007 (TCCE) [SRUD PI]. Le membre Burn a exprimé sa dissidence à l’égard de l’opinion de la majorité du Tribunal.

[4] SRUD PI aux par. 22-23, note de bas de page 19.

[5] Pièce NQ-2021-002-01 aux p. 14-16.

[6] Des droits provisoires représentant la somme de la marge de dumping et du montant de subvention, estimés pour chaque exportateur, ont été imposés sur l’importation de marchandises en cause à partir de la date des décisions provisoires de l’ASFC. Les droits provisoires variaient de 20,65 p. 100 à 295,90 p. 100 quant aux marchandises en cause provenant de la Chine et de 17,44 p. 100 à 101,50 p. 100 quant aux marchandises en cause provenant du Vietnam. Voir la pièce NQ-2021-002-01 aux p. 11-12, 16-17.

[7] L’avis d’ouverture d’enquête a été publié sur le site Web du Tribunal et dans la Gazette du Canada (voir C. Gaz. 2021.I.2109).

[8] Le CCCD est une organisation de l’industrie qui représente les intérêts de détaillants canadiens. En l’espèce, le CCCD est soutenu par sept détaillants canadiens participants qui offrent des SRUD, notamment, The Brick Warehouse LP (The Brick), Crate & Barrel Canada Inc., The Dufresne Group, Inc. (Dufresne), Leon’s Furniture Limited (Leon’s), Mobilia Interiors Inc., Struc-Tube Ltd. (Struc-Tube) et Urban Barn Ltd.

[9] Pièce NQ-2021-002-39. Les marchandises similaires comprennent donc les SRUD de production nationale répondant à la définition du produit et les SRUDST de production nationale.

[10] Cette manière de procéder est conforme à la recommandation du Comité des pratiques antidumping de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) selon laquelle « la période de collecte de données aux fins d’enquêtes en matière de dommage devrait être d’au moins trois ans [...] ». Voir Recommandation concernant les périodes de collecte des données pour les enquêtes antidumping, G/ADP/6, 16 mai 2000, en ligne : <http://docsonline.wto.org>.

[11] Puisque le Tribunal avait transmis ses questionnaires au début de l’enquête (soit avant d’avoir décidé d’élargir la définition des marchandises similaires afin qu’elle englobe les SRUDST de production nationale), le questionnaire cherchait à recueillir des données sur les SRUD répondant à la définition du produit ainsi que sur les SRUDST, afin de tenir compte de cette possibilité.

[12] La version protégée du rapport d’enquête contenant des renseignements désignés comme confidentiels a été distribuée, avec le reste du dossier protégé, aux conseillers juridiques qui avaient signé l’acte de déclaration et d’engagement requis. Le personnel du Secrétariat du Tribunal avait déjà préparé des résumés public et protégé des réponses au questionnaire à l’intention des acheteurs touchant spécifiquement la question des marchandises similaires, et les avait transmises aux parties le 31 mai 2021, afin de leur permettre de se servir de ces renseignements pour préparer leurs observations sur cette question. Voir pièce NQ-2021-002-26; pièce NQ-2021-002-27 (protégée).

[13] Pièce NQ-2021-002-RFI-01; pièce NQ-2021-002-RFI-01A (protégée).

[14] Dodd’s Furniture and Mattress a déposé certains éléments de preuve le 15 juillet 2021, soit trois jours après la date limite prévue à cet effet. Toutefois, le Tribunal a permis que ces éléments soient versés au dossier (voir pièce NQ-2021-002-KK-01). Le Tribunal constate aussi qu’un certain nombre de sociétés qui avaient déposé un avis de participation n’ont pas déposé d’observations ou d’éléments de preuve, n’ont pas fait connaître leur point de vue, ou n’ont pas participé à l’enquête de quelque façon que ce soit.

[15] Pièce NQ-2021-002-42; pièce NQ-2021-002-43 (protégée).

[16] Pièce NQ-2021-002-04 aux p. 10-13.

[17] Le paragraphe 2(1) de la LMSI prévoit que le terme « minimale » s’entend, dans le cas du montant de subvention, d’un montant inférieur à 1 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises. Toutefois, l’article 41.2 de la LMSI et l’alinéa 10(a) de l’article 27 de l’Accord sur les Subventions et les Mesures Compensatoires (ASMC) de l’OMC, un montant de subvention accordé relativement à des marchandises provenant d’un pays en développement est considéré minimal aux fins de l’enquête de subventionnement de l’ASFC s’il est inférieur à 2 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises. Puisque ni l’ASMC ni la LMSI ne définissent un « pays en développement » ou ne donnent des conseils quant aux critères pouvant servir à définir un « pays en développement », la pratique administrative de l’ASFC est de se reporter à la liste des bénéficiaires de l’aide publique au développement, préparée par le Comité d’aide au développement de l’OCDE (liste du CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), en ligne à l’adresse <http://www.oecd.org/dac/stats/daclist.htm>, et de considérer qu’un pays est en développement si celui-ci figure dans la liste qui comprend les pays les moins avancés, les pays à faible revenu et les pays ou territoires à revenu intermédiaire tranche inférieure. Puisque le Vietnam figure dans la liste des pays ou territoires à revenu intermédiaire tranche inférieure en 2021, l’ASFC a accordé au Vietnam le statut de pays en développement pour les fins de son enquête de subventionnement. Voir la pièce NQ-2021-002-04A aux p. 235-236.

[18] Le paragraphe 2(1) de la LMSI prévoit que le terme « minimale » s’entend, dans le cas de la marge de dumping, d’une marge inférieure à 2 p. 100 du prix à l’exportation des marchandises.

[19] Pièce NQ-2021-002-04 aux p. 10-13.

[20] Pièce NQ-2021-002-04A à la p. 152.

[21] Pièce NQ-2021-002-04 aux p. 17-18, 26. Les marges de dumping sont exprimées selon un pourcentage du prix à l’exportation des marchandises.

[22] Pièce NQ-2021-002-04 aux p. 19-20. Les montants de subvention sont aussi exprimés selon un pourcentage du prix à l’exportation des marchandises.

[23] Pièce NQ-2021-002-04A à la p. 156.

[24] Voir Ibid. aux p. 156-161.

[25] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit « retard » comme « [l]e retard sensible de la mise en production d’une branche de production nationale ». Comme une branche de production nationale est déjà établie, le Tribunal n’aura pas besoin d’examiner la question du retard.

[26] Les marchandises en cause à l’égard desquelles l’ASFC a mis fin à son enquête de subventionnement (soit les marchandises en cause qui n’avaient pas fait l’objet de subventionnement ou pour lesquelles le montant de subvention était minimal) représentaient environ 20 p. 100 des importations totales de marchandises en cause au cours de la période visée par l’enquête de l’ASFC, ce qui signifie qu’environ 80 p. 100 de toutes les marchandises en cause ont été à la fois sous‑évaluées et subventionnées. Voir pièce NQ-2021-002-04 aux p. 27-29; pièce NQ-2021-002-07C (protégée) à la p. 1.

[27] Le Tribunal déterminera les effets du dumping et du subventionnement des marchandises en cause sur la branche de production nationale, pour chacun des pays ou pour les pays cumulés, selon le cas.

[28] Un dommage et une menace de dommage sont des conclusions distinctes; le Tribunal n’est pas tenu de rendre des conclusions de menace de dommage aux termes du paragraphe 43(1) de la LMSI à moins qu’il ne rende d’abord des conclusions d’absence de dommage.

[29] Si le Tribunal déterminait que la présente enquête vise plus d’une catégorie de marchandises, il devra effectuer des analyses de dommage distinctes et rendre une décision à l’égard de chacune de ces catégories. Voir Noury Chemical Corporation et Minerals & Chemicals Ltd. c. Pennwalt of Canada Ltd. et Le Tribunal antidumping, [1982] 2 C.F. 283 (C.F.).

[30] Voir, par exemple, Raccords de tuyauterie en cuivre (19 février 2007), NQ-2006-002 (TCCE) au par. 48.

[31] Extrusions d’aluminium (17 mars 2009), NQ-2008-003 (TCCE) [Extrusions d’aluminium] au par. 115; voir aussi Panneaux d’isolation thermique (11 avril 1997), NQ-96-003 (TCCE) à la p. 10.

[32] Ces parties ont déposé des observations et des éléments de preuve distincts. Bien que les « parties opposées » définies antérieurement n’aient pas toutes déposé des observations sur la question des marchandises similaires, pour les besoins de la présente section, le Tribunal fera néanmoins référence à l’ensemble des parties ayant déposé des observations comme étant les parties opposées.

[33] SRUD PI aux par. 22-23.

[34] Voir, par exemple, Modules muraux unitisés (12 novembre 2013), NQ-2013-002 (TCCE) [Modules muraux unitisés] au par. 34; Certains éléments d’acier de fabrication industrielle (25 mai 2017), NQ-2016-004 (TCCE) [EAFI] aux par. 45, 47; Plaques de plâtre (20 août 2018), PI-2018-003 (TCCE) [Plaques de plâtre] au par. 32; Feuilles d’acier résistant à la corrosion (16 novembre 2020), NQ-2019-002 (TCCE) [COR] au par. 45. Dans ces décisions, le Tribunal s’est reporté aux rapports suivants préparés par le groupe spécial de l’OMC : UE – Chaussures (Chine), WT/DS405/R [UE – Chaussures] aux par. 7.302-7.315; CE – Éléments de fixation en fer ou en acier (Chine), WT/DS397/R [EC – Éléments de fixation (Groupe spécial)] aux par. 7.258-7.278; É-U – Bois d’œuvre (Canada), WT/DS264/R [É-U – Bois d’œuvre] aux par. 7.139-7.158.

[35] Voir, par exemple, Caissons sans soudure en acier au carbone ou en acier allié pour puits de pétrole (10 mars 2008), NQ-2007-001 (TCCE) [Caissons sans soudure] aux par. 51-71; Fournitures tubulaires pour puis de pétrole (23 mars 2010), NQ-2009-004 (TCCE) [FTPP] aux par. 82-83. Le Tribunal a conservé la définition élargie des marchandises en cause dans les réexamens relatifs à l’expiration de ces conclusions. Voir Caissons sans soudure en acier au carbone ou en acier allié pour puits de pétrole et de gaz (28 novembre 2018), RR-2017-006 (TCCE) [Caissons sans soudure - réexamen] aux par. 24-32; Fournitures tubulaires pour puits de pétrole (10 décembre 2020), RR-2019-005 (TCCE) [FTPP - réexamen] aux par. 22-27.

[36] Caissons sans soudure au par. 58; Poivrons de serre (19 octobre 2010), NQ-2010-001 (TCCE) [Poivrons] à la note de bas de page 16; Tubes en acier pour pilotis (30 novembre 2012), NQ-2012-002 (TCCE) [Tubes pour pilotis] au par. 161.

[37] Sarco Canada Ltd. c. Canada (Tribunal antidumping), 1978 CarswellNat 76 (CAF) [Sarco].

[38] Par exemple, les producteurs nationaux participants indiquent que, dans Tubes pour pilotis, le Tribunal a conclu que les marchandises similaires se limitaient aux marchandises de production nationale qui étaient identiques aux marchandises en cause. Selon eux, le Tribunal a ensuite utilisé l’expression « portée coextensive » dans le cadre d’autres instances, y compris dans EAFI et dans Plaques de plâtre.

[39] Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 SCC 65, aux par. 129-131.

[40] Poivrons à la note de bas de page 16.

[41] Ils font directement référence à Caissons sans soudure, Caissons sans soudure - réexamen, FTPP, FTPP - réexamen et Certains produits plats de tôle d’acier au carbone laminés à chaud (31 mai 1993), NQ-92-008 (TCCE).

[42] Caissons sans soudure au par. 61.

[43] Entre autres, le CCCD a fait référence aux décisions du Tribunal dans Modules muraux unitisés, EAFI et Plaques de plâtre.

[44] Modules muraux unitisés au par. 34.

[45] Voir l’article 2.6 de l’Accord antidumping de l’OMC et la note de bas de page 46 à l’article 15.1 de l’ASCM de l’OMC. Ces accords utilisent les expressions « produit similaire » et « produit considéré » plutôt que « marchandises similaires » et « marchandises en cause ».

[46] Poivrons à la note de bas de page 16.

[47] Voir UE – Chaussures; CE – Pièces d’attache (Groupe spécial); É-U – Bois d’œuvre. Le Tribunal convient avec les parties opposées que les groupes spéciaux de l’OMC dans ces différends ont simplement indiqué que la portée des marchandises similaires était coextensive avec celle des marchandises en cause et qu’ils n’ont pas déclaré que la portée coextensive était obligatoire. Même si les producteurs nationaux participants soutiennent que la décision du groupe spécial de l’OMC dans É-U – Bois d’œuvre soutient l’application du principe de la portée coextensive, ils admettent que le principe ne s’applique que s’il y a des marchandises de production nationale identiques aux marchandises en cause. Il s’agit dans les faits d’une reconnaissance que le caractère coextensif découle d’une conclusion au sujet du caractère identique, mais qu’il ne peut contraindre une telle conclusion.

[48] Poivrons à la note de bas de page 16; Tubes pour pilotis au par. 161.

[49] Le Tribunal n’est pas d’avis que le mot « identique » devrait être interprété de manière à lui donner un sens que l’on ne peut raisonnablement lui prêter afin de concentrer l’analyse de dommage sur les produits et les producteurs qui sont susceptibles de subir un dommage direct en raison des marchandises en cause. L’élargissement de la portée des marchandises similaires ne doit pas être perçu comme une restriction de la capacité de la branche de production nationale à obtenir des conclusions de dommage, mais plutôt comme un reflet de la réalité commerciale du marché sur lequel le Tribunal fonde son enquête de dommage.

[50] Comme le Tribunal le fait remarquer dans Caissons sans soudure, à la note de bas de page 15, il y a une distinction entre la définition de marchandises similaires dans la perspective de dommage et à d’autres fins en vertu de la LMSI, comme la détermination de valeurs normales par l’ASFC en vertu de l’article 15. Conformément à cette disposition, les valeurs normales pour un exportateur donné sont déterminées en se référant aux prix de vente des marchandises similaires lorsqu’elles sont vendues par cet exportateur sur son propre marché intérieur. Puisque l’ASFC établit des valeurs normales pour des modèles individuels, il est évident que les marchandises similaires seront souvent identiques aux marchandises en cause (c.-à-d. les marchandises exportées), parce qu’elles sont en fait produites par la même entité. Il n’est pas exclu que l’impossibilité de définir des marchandises similaires de production nationale de cette façon indique que, sauf dans de rares cas, il ne puisse y avoir de marchandises de production nationale identiques aux marchandises en cause.

[51] RHI soutient effectivement qu’aucun produit canadien ne peut être considéré comme une « marchandise similaire » en raison de l’énorme variation des caractéristiques, des prix et des circuits de distribution des produits. Le Tribunal n’en est pas convaincu, car l’ensemble des éléments de preuve versés au dossier appuie la conclusion que l’utilisation et les autres caractéristiques des SRUD de production nationale qui répondent à la définition du produit sont très proches de celles des marchandises en cause et que les deux types de marchandises se livrent concurrence sur le marché canadien.

[52] En fait, la définition du produit englobe tous les SRUD, mobiles ou stationnaires, qu’ils soient avec recouvrement en cuir, tissu ou les deux, mais exclut expressément par la suite les SRUDST.

[53] Pièce NQ-2021-002-26, tableau 1.

[54] SRUD PI aux par. 32, 37.

[55] Pièce NQ-2021-002-04A aux p. 156, 159.

[56] Ibid. aux p. 158-159. Voir aussi Transcription de l’audience à huis clos aux p. 308-309.

[57] Pièce NQ-2021-002-29.01 (protégée) à la p. 29.

[58] Pièce NQ-2021-002-29.04 (protégée) aux p. 10-11.

[59] Voir la réponse de Costco à la pièce NQ-2021-002-26 à la p. 6.

[60] Pièce NQ-2021-002-28.04 aux p. 105, 126, 162; pièce NQ-2021-002-28.05 à la p. 19.

[61] Pièce NQ-2021-002-26 à la p. 11; pièce NQ-2021-002-28.04 à la p. 134.

[62] Pièce NQ-2021-002-26, tableau 2.

[63] SRUD PI au par. 28. Le Tribunal avait pour objectif de rendre possible la résolution rapide de cette question afin d’éventuellement simplifier toute enquête définitive de dommage en vertu de l’article 42 de la LMSI.

[64] Pâtes alimentaires séchées à base de blé (26 juillet 2018), NQ-2017-005 (TCCE) au par. 41; Essar Steel Algoma Inc. c. Jindal Steel and Power Limited, 2017 CAF 166 (CanLII) au par. 26. Voir aussi Contreplaqués décoratifs et autres contreplaqués non structuraux (19 février 2021), NQ-2020-002 (TCCE) [Contreplaqués décoratifs] au par. 47, où le Tribunal a déclaré qu’une enquête à laquelle les producteurs nationaux n’auraient pas tous participé est tout à fait admissible en vertu de la LMSI.

[66] SRUD PI au par. 45.

[67] Pièce NQ-2021-002-08.

[68] Pièce NQ-2021-002-06A à la p. 9.

[69] Ibid.

[70] Ibid., tableau 2; pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableau 18.

[71] Pièce NQ-2021-002-44.

[72] Voir pièce PI-2020-007-02.01 à la p. 3232.

[73] Pièce NQ-2021-002-45.

[74] Pièce NQ-2021-002-06A, tableaux 82, 83; pièce NQ-2021-002-A-03 à la p. 81.

[75] Pièce NQ-2021-002-A-03 aux p. 76-78.

[76] Pièce NQ-2021-002-D-13 (protégée) au par. 38.

[77] CE – Pièces d’attache au par. 412.

[78] Ibid. au par. 415.

[79] Voir Contreplaqués décoratifs au par. 46, où le Tribunal explique qu’il a rejeté une demande pour qu’il rende des ordonnances obligeant certains producteurs nationaux à répondre à un questionnaire à l’intention des producteurs puisqu’il ne croyait pas que l’absence de telles réponses limitait sa capacité à exécuter son mandat conféré par la loi, consistant à déterminer si le dumping et le subventionnement des marchandises en cause avaient causé un dommage ou menaçaient de causer un dommage à la « branche de production nationale ». C’est également le cas en l’espèce. Le Tribunal fait remarquer que 136 des 157 entreprises répertoriées par Statistique Canada sous le code 337121 du SCIAN comptent moins de 50 employés (voir pièce NQ-2021-002-44 à la p. 4). Pour remettre ces chiffres en perspective, parmi les répondants au questionnaire ayant fourni des données sur l’emploi, ceux qui comptent moins de 50 employés représentaient, en 2020, environ 1 p. 100, selon le volume, de la production nationale totale de marchandises similaires de tous les répondants.

[80] Pièce NQ-2021-002-06A, tableaux 82, 83; pièce NQ-2021-002-A-03 à la p. 81. Seulement 9 parmi les 14 producteurs nationaux ayant fourni leurs résultats financiers ont déclaré des ventes à l’exportation au cours de la période visée par l’enquête (voir pièce NQ-2021-002-06A, tableau 2).

[81] Le Tribunal a calculé la valeur totale des ventes intérieures de marchandises similaires des 21 producteurs nationaux en utilisant le volume et la valeur unitaire de la production nationale, telles qu’elles figurent dans le rapport d’enquête et en y ajoutant une estimation de la valeur des ventes intérieures des producteurs nationaux qui ont uniquement indiqué leurs volumes de production. Cette estimation a été obtenue en appliquant la valeur unitaire moyenne sur le marché intérieur à leurs volumes, pour calculer la valeur des ventes. La valeur totale des ventes à l’exportation de marchandises similaires des 21 producteurs nationaux a été calculée en utilisant la valeur des ventes à l’exportation, telle qu’elle figure dans le rapport d’enquête et en y ajoutant les données sur les ventes à l’exportation contenues dans les réponses au questionnaire des producteurs nationaux qui n’ont pas soumis leurs résultats financiers. Pièce NQ-2021-002-06A, tableaux 2, 83; pièce NQ-2021-002-06B, tableaux 23, 41; pièce NQ-2021-002-10.28 (protégée) à la p. 13; pièce NQ-2021-002-10.29B (protégée) à la p. 15; pièce NQ-2021-002-10.31 (protégée) aux p. 12, 15; pièce NQ-2021-002-10.11B (protégée) aux p. 15, 17; pièce NQ-2021-002-10.32 (protégée) aux p. 2-3; pièce NQ-2021-002-A-03 à la p. 81.

[82] Voir, par exemple, Modules et laminés photovoltaïques (25 mars 2021), RR-2020-001 (TCCE) au par. 46; Contreplaqués décoratifs au par. 81.

[83] Voir pièce NQ-2021-002-A-03 aux p. 76-78. Le code 337121 du SCIAN vise des marchandises telles que les « ressorts de fauteuils et de divans » et les « coussins à ressorts », qui ne sont clairement pas des SRUD qui répondent à la définition du produit ou des SRUDST.

[84] Voir Chine – Automobiles aux par. 7.221, 7.229, où le groupe spécial ne voyait pas comment les producteurs nationaux dont la production nationale au cours de la période visée par l’enquête se situait entre 33,54 et 54,15 p. 100 de la production collective nationale ne pourraient pas représenter une proportion majeure de cette production. Voir aussi Argentine Volaille au par. 7.342, le groupe spécial a conclu que les éléments de preuve au dossier n’indiquaient pas, selon les circonstances de ce cas, que 46 p. 100 de la production collective nationale ne constituait pas une proportion importante, sérieuse ou notable.

[85] CE – Pièces d’attache aux par. 415, 419, 422, 430.

[86] Ibid. au par. 412.

[87] Le CCCD soutient que les données contenues dans le rapport d’enquête du Tribunal surreprésentent probablement les éléments de la branche de production nationale au rendement le plus faible et négligent les résultats positifs d’autres éléments. Cependant, il n’étaye pas cette allégation. En effet, des éléments de preuve indiquent que certains producteurs nationaux ayant répondu au questionnaire ont eu un rendement relativement supérieur aux autres pendant la période visée par l’enquête. Cette situation donne fortement à penser que l’analyse, sous forme agrégée, du rendement des producteurs qui représentent une proportion majeure de la production collective nationale et qui ont soumis les informations demandées constitue un exercice objectif et impartial. Les éléments de preuve ne sont pas suffisants pour que le Tribunal puisse conclure qu’une telle analyse favoriserait les éléments les plus faibles ou les plus forts de la branche de production nationale.

[88] Le Tribunal adopte la même pratique administrative que l’ASFC, expliquée plus haut, soit de considérer qu’un pays est en développement s’il figure dans la liste des pays les moins avancés, des pays à faible revenu ou des pays ou territoires à revenu intermédiaire tranche inférieure, préparée par l’OCDE (liste du CAD). En 2021, le Vietnam y figure à titre de pays à revenu intermédiaire tranche inférieure.

[89] Pièce NQ-2021-002-04 aux p. 25-28. Les marges de dumping et les montants de subvention sont tous les deux exprimés sous forme de pourcentage du prix à l’exportation des marchandises.

[90] Voir, par exemple, Tôles fortes (5 février 2021), NQ-2020-001 (TCCE) [Tôles fortes] au par. 66; COR au par. 58; Acier laminé à froid (21 décembre 2018), NQ-2018-002 (TCCE) au par. 33. Cette façon de procéder est également conforme à la notification du Canada au Comité des pratiques antidumping de l’OMC selon laquelle il utilise habituellement dans ses déterminations le volume des importations de marchandises sous-évaluées pendant la période de collecte de données pour l’enquête de dumping, à savoir, la période visée par l’enquête de l’ASFC (voir Notification concernant la période utilisée pour déterminer si le volume des importations est négligeable au titre de l’Article 5.8 de l’Accord, G/ADP/N/100/CAN). Même s’il n’y a pas de notification parallèle au Comité des subventions et des mesures compensatoires de l’OMC en ce qui concerne l’évaluation du volume des importations de marchandises subventionnées, les pratiques du Tribunal à ce chapitre sont les mêmes que dans le cas du volume des importations de marchandises sous-évaluées.

[91] Dans ses décisions définitives, l’ASFC fait état de la valeur des importations des marchandises sous-évaluées et subventionnées, car l’information sur le volume des importations dans les documents douaniers était donnée dans différentes unités de mesure. Il n’était donc pas possible d’estimer le volume des importations pour toutes les marchandises en cause à l’aide de la même unité de mesure. Voir pièce NQ-2021-002-05 (protégée) aux p. 32, 34.

[92] Pièce NQ-2021-002-07C (protégée) à la p. 1.

[93] Feuilles d’acier résistant à la corrosion (21 février 2019), NQ-2018-004 (TCCE) au par. 45.

[94] SRUD PI au par. 51.

[95] Pièce NQ-2021-002-06A, tableaux 7-8, 10.

[96] Ibid., tableaux 11-13.

[97] Ibid., tableau 10.

[98] Ibid., tableau 90.

[99] Voir, par exemple, Modules muraux unitisés (3 juillet 2019), RR-2018-002 (TCCE) au par. 47; Tubes en acier pour pilotis (4 juillet 2018), RR-2017-003 (TCCE) au par. 42; Certains éléments d’acier de fabrication industrielle (25 mai 2017), NQ-2016-004 (TCCE) aux par. 72-73; Silicium métal (2 novembre 2017), NQ-2017-001 (TCCE) au par. 59.

[100] DORS/84-927 [Règlement].

[101] Pièce NQ-2021-002-A-03 à la p. 81. Voir aussi pièce NQ-2021-002-D-28 à la p. 9, où les valeurs de vente ajustées en fonction de l’inflation, calculées par le CCCD, étaient légèrement différentes de celles présentées par les producteurs nationaux participants.

[102] Pièce NQ-2021-002-A-05 au par. 5.

[103] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableau 18; pièce NQ-2021-002-D-22 au par. 17.

[104] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 25.

[105] Pièce NQ-2021-002-A-05 au par. 21.

[106] Ibid. au par. 38; pièce NQ-2021-002-A-09 aux par. 6, 18; Transcription de l’audience publique à la p. 51.

[107] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableau 35; pièce NQ-2021-002-06A, tableau 3.

[108] Pièce NQ-2021-002-A-05 aux par. 32-34; pièce NQ-2021-002-A-04 (protégée) à la p. 166; pièce NQ-2021-002-A-07 au par. 18.

[109] Transcription de l’audience publique aux p. 275-276, 312, 378, 397, 418, 432, 436-437; Transcription de l’audience à huis clos aux p. 209-211, 221, 233-234, 236.

[110] Transcription de l’audience publique à la p. 210.

[111] Pièce NQ-2021-002-D-22 au par. 12; pièce NQ-2021-002-D-12 au par. 21; pièce NQ-2021-002-D-18 au par. 7; Transcription de l’audience publique à la p. 336.

[112] Pièce NQ-2021-002-D-22 au par. 22.

[113] Pièce NQ-2021-002-D-14 aux par. 6-7; pièce NQ-2021-002-D-22 au par. 12; Transcription de l’audience publique à la p. 335.

[114] Transcription de l’audience publique aux p. 59, 134-135, 158, 166, 182, 189-190, 461-462; pièce NQ-2021-002-D-22 au par. 13; pièce NQ-2021-002-D-24 au par. 21.

[115] Pièce NQ-2021-002-FF-05 au par. 20; pièce NQ-2021-002-D-22 au par. 13; Transcription de l’audience publique aux p. 76, 247, 361, 526-527, 568; Transcription de l’audience à huis clos à la p. 257.

[116] Transcription de l’audience publique aux p. 29-33.

[117] Pièce NQ-2021-002-E-07 à la p. 9.

[118] Pièce NQ-2021-002-E-03 au par. 12.

[119] Transcription de l’audience publique aux p. 117, 122.

[120] Pièce NQ-2021-002-D-24 au par. 8.

[121] Pièce NQ-2021-002-06B, tableau 24.

[122] Transformateurs à liquide diélectrique (22 juin 2012), PI-2012-001 (TCCE) au par. 32.

[123] Contreplaqués décoratifs aux par. 99, 101. Le Tribunal a souligné que le paragraphe 3(1) et l’alinéa 42(1)a) de la LMSI prévoient qu’il doit être établi, à la lumière d’un examen objectif des éléments de preuve à l’appui, que le dumping et le subventionnement des marchandises ont causé un dommage.

[124] La pratique habituelle du Tribunal est de viser une période d’au moins trois ans pour son enquête de dommage. Pour les fins de la présente enquête, il a choisi une période de quatre ans pour s’assurer qu’il obtiendrait trois années complètes de données non touchées par la pandémie de COVID-19.

[125] Contreplaqués décoratifs au par. 103.

[126] Pièce NQ-2021-002-06B, tableau 20.

[127] Ibid., tableau 19.

[128] Ibid., tableaux 23-24.

[129] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 21.

[130] Ibid., tableau 22.

[131] Ibid., tableau 15.

[132] Ibid., tableau 14.

[133] Ibid., tableaux 14-15.

[134] Ibid., tableaux 11-12, 14-15.

[135] Ibid., tableaux 11-12.

[136] Pièce NQ-2021-002-A-03 aux p. 79-80. Voir aussi la pièce NQ-2021-002-J-02 aux par. 6-7.

[137] Pièce NQ-2021-002-A-03 à la p. 79. M. Gary Blake, directeur de la mise en marché chez The Brick, a expliqué que l’expression « plus d’économies pour vous » [traduction], qui fait partie de leur devise, signifie que The Brick offre à ses clients plus d’économies en termes de temps, de facilité et d’argent (voir Transcription de l’audience publique aux p. 318-319). Selon le Tribunal, les mots utilisés ne rendent pas clairement cette signification et le message capté par les clients est probablement celui selon lequel The Brick offre plus d’économies d’argent.

[138] Transcription de l’audience publique aux p. 40-41, 233-234.

[139] Pièce NQ-2021-002-D-24 au par. 13; Transcription de l’audience publique à la p. 420.

[140] Transcription de l’audience publique à la p. 322. Voir aussi la pièce NQ-2021-002-J-02 au par. 26, où M. Paul Bernard, directeur général des achats chez BMTC, indique que, même si le prix n’est pas le seul facteur considéré, les changements sur le marché ont créé une pression sur les prix.

[141] Pièce NQ-2021-002-D-22 au par. 11; Transcription de l’audience publique aux p. 336-337. Voir aussi pièce NQ‑2021‑002-D-14 au par. 13; Transcription de l’audience publique aux p. 249, 262-263.

[142] Silicium métal (19 novembre 2013), NQ-2013-003 (TCCE) [Silicium métal] au par. 64.

[143] Pièce NQ-2021-002-D-10 aux par. 74, 80.

[144] Pièce NQ-2021-002-A-09 aux par. 16, 19, 29; pièce NQ-2021-002-FF-05 au par. 19; Transcription de l’audience publique aux p. 112, 114, 172, 176; Transcription de l’audience à huis clos aux p. 142-143, 189.

[145] Pièce NQ-2021-002-D-22 au par. 20; Transcription de l’audience publique aux p. 34-36, 358-360.

[146] Voir la partie VII du rapport d’enquête du Tribunal (tableaux 39 à 81). Le Tribunal a aussi choisi trois produits de référence supplémentaires visant seulement les ventes intérieures de SRUDST (voir tableau 58).

[147] Pièce NQ-2021-002-06A à la p. 43. Le Tribunal a aussi choisi un canapé-lit et une causeuse canapé-lit. Ces produits de référence ne tenaient pas compte du type de recouvrement (c.-à-d. en cuir ou en tissus).

[148] Transcription de l’audience publique aux p. 135, 158.

[149] Ibid. aux p. 43-44, 180-190, 336, 367, 462.

[150] Transcription de l’argumentation publique à la p. 69.

[151] Contreplaqués décoratifs aux par. 130-131.

[152] Voir pièce NQ-2021-002-06A à la p. 6. Le Tribunal fait remarquer que, selon les réponses aux questionnaires, les ventes intérieures de SRUDST des producteurs nationaux représentaient bien au-delà de 50 p. 100 des ventes intérieures totales de marchandises similaires.

[153] Le terme « distributeurs » utilisé dans les présents motifs englobe les distributeurs, les grossistes et les groupes d’achat.

[154] Pour les fins du rapport d’enquête du Tribunal, les détaillants qui importent des SRUD répondant à la définition du produit sont réputés avoir un prix de vente à l’importation égal à leur prix d’achat à l’importation.

[155] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 10.

[156] Pièce NQ-2021-002-A-05 au par. 36.

[157] Transcription de l’audience publique aux p. 250, 365; Transcription de l’audience à huis clos aux p. 194, 235-236, 255-256, 349.

[158] Pièce NQ-2021-002-06B, tableau 41. L’ampleur de la sous-cotation est davantage mise en évidence du fait que le prix de vente des marchandises en cause était plus bas que le coût des marchandises vendues de la branche de production nationale pendant toute la période visée par l’enquête. Voir pièce NQ-2021-002-06A, tableau 82.

[159] Le Tribunal fait remarquer que BMTC a présenté des arguments distincts quant à l’effet sur le prix des marchandises en cause provenant de la Chine et du Vietnam. Quand le Tribunal est convaincu que l’évaluation des effets cumulatifs du dumping et du subventionnement des marchandises en cause provenant de plus d’un pays est appropriée, comme il en a été convaincu en l’espèce, il tient compte des volumes et des prix des marchandises en cause provenant de tous les pays visés de manière cumulative. Pour cette raison, Le Tribunal n’a pas pris en compte les arguments de BMTC à cet égard.

[160] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableau 43; pièce NQ-2021-002-07B (protégée), tableau 45.

[161] Pièce NQ-2021-002-06B, tableaux 23, 31.

[162] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 37.

[163] Ibid.; pièce NQ-2021-002-07A (protégée), annexe 11.

[164] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableau 60.

[165] Ibid.

[166] Ibid., annexes 1-10.

[167] Ibid., tableaux 47, 50, 54; pièce NQ-2021-002-6A, tableau 58.

[168] Pièce NQ-2021-002-A-05 au par. 23.

[169] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableaux 49, 52, 56; pièce NQ-2021-002-6A, tableau 58.

[171] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableaux 65-81.

[172] Ibid., annexes 13-29.

[173] Pièce NQ-2021-002-10.21A (protégée) aux p. 60-62; pièce NQ-2021-002-A-08 (protégée) aux par. 21-35, 39‑43; pièce NQ-2021-002-A-10 (protégée) aux par. 28-30. La majeure partie des allégations ont été faites par Palliser. Le Tribunal constate aussi que Palliser a fait 11 allégations relativement à la concurrence livrée aux importations de SRUDST, qui ne sont pas des marchandises en cause. L’alinéa 37.1(1)b) du Règlement prévoit que le Tribunal doit examiner les effets des marchandises sous-évaluées ou subventionnées (c.-à-d. les marchandises en cause) sur le prix de marchandises similaires. Le Tribunal n’a donc pas pris en compte ces allégations de Palliser.

[174] Pièce NQ-2021-002-T-04 aux par. 35-48; pièce NQ-2021-002-T-05 (protégée) aux par. 35-48.

[175] Pièce NQ-2021-002-R-03 aux par. 17-18; pièce NQ-2021-002-R-10 (protégée) aux p. 3-5.

[176] Pièce NQ-2021-002-A-11 aux par. 114-121; pièce NQ-2021-002-A-12 (protégée) aux par. 114-121; Transcription de l’audience publique aux p. 160-162.

[177] Barres d’armature pour béton (4 juin 2021), NQ-2020-004 (TCCE) au par. 79.

[178] Transcription de l’audience à huis clos aux p. 272-285, 315-325.

[179] Voir, par exemple, Ibid. aux p. 326-328, 338.

[180] Transcription de l’audience à huis clos aux p. 69-73, 77.

[181] Transcription de l’argumentation publique aux p. 25-26.

[182] Ibid. à la p. 67.

[183] Voir, par exemple, pièce NQ-2021-002-19.19 (protégée) à la p. 18; pièce NQ-2021-002-19.20 (protégée) à la p. 18; pièce NQ-2021-002-19.21 (protégée) à la p. 15.

[184] Voir, par exemple, Transcription de l’audience publique aux p. 34-36; Transcription de l’audience à huis clos aux p. 78-79, 151.

[185] Pièce NQ-2021-002-A-09 au par. 16. Voir aussi pièce NQ-2021-002-A-07 au par. 18, où M. Hunt affirme que les grands détaillants peuvent acheter des marchandises en cause dont la conception ressemble à celle des SRUD de production nationale pour une fraction du prix, ce qui a pour effet de créer un prix plafond que les producteurs nationaux ne peuvent dépasser sans risquer de réduire ou de perdre leur volume de ventes. À l’audience, M. Hunt a ajouté que les détaillants se servaient des prix des marchandises importées comme étalons pour mesurer l’offre de Palliser. Voir Transcription de l’audience publique à la p. 34. Mme Sisto a corroboré les éléments de preuve de Palliser voulant que les détaillants aient des attentes quant aux prix des producteurs nationaux, y compris ceux de Brentwood. Voir Transcription de l’audience publique à la p. 52. Selon l’ensemble des éléments de preuve, il est indéniable que cette attente est enracinée dans la possibilité d’acquérir des marchandises en cause comparables ou de valeur supérieure à bas prix. Ainsi, il est également indéniable que le prix des marchandises en cause mène généralement à une sous-cotation du prix des marchandises similaires et que les détaillants comparent les prix des produits nationaux aux prix concurrentiels des marchandises en cause dans leurs décisions d’achat.

[186] Pièce NQ-2021-002-06B, tableau 42.

[187] Ibid., tableau 41.

[188] Ibid., tableau 46.

[189] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 44.

[190] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableaux 47-58.

[191] Tôles lourdes au par. 118.

[192] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 82. Les changements du coût unitaire des marchandises fabriquées par la branche de production nationale étaient identiques une fois les montants arrondis.

[193] Le Tribunal constate qu’en 2019, l’augmentation du coût des marchandises vendues était effectivement supérieure d’un peu plus d’un demi-point de pourcentage par rapport à l’augmentation du prix de vente. Toutefois, une fois les montants arrondis, l’augmentation est la même.

[194] Les facteurs et les indices économiques comprennent (i) tout déclin réel ou potentiel dans la production, les ventes, la part de marché, les bénéfices, la productivité, le rendement sur capital investi ou l’utilisation de la capacité de la branche de production, (ii) toute incidence négative réelle ou potentielle sur les liquidités, les stocks, les emplois, les salaires, la croissance ou la capacité de financement, (ii.1) l’importance de la marge de dumping des marchandises ou du montant de subvention octroyé pour celles-ci (iii) dans le cas des produits agricoles qui sont subventionnés, y compris tout produit qui est un produit ou une marchandise agricole aux termes d’une loi fédérale ou provinciale, toute augmentation du fardeau subi par un programme de soutien gouvernemental.

[195] Aux termes de l’alinéa 37.1(3)b) du Règlement, le Tribunal doit examiner si des facteurs autres que le dumping ou le subventionnement des marchandises en cause ont causé un dommage. Les facteurs prescrits à cet égard sont (i) le volume et le prix des importations de marchandises similaires qui ne sont pas sous-évaluées ou subventionnées, (ii) la contraction de la demande pour les marchandises ou pour des marchandises similaires, (iii)tout changement des habitudes de consommation des marchandises ou des marchandises similaires, (iv) les pratiques commerciales restrictives des producteurs étrangers et nationaux, ainsi que la concurrence qu’ils se livrent, (v) les progrès technologiques, (vi) le rendement à l’exportation et la productivité de la branche de production nationale à l’égard de marchandises similaires, et (vii) tout autre facteur pertinent, compte tenu des circonstances.

[196] Pièce NQ-2021-002-06B, tableaux 23-24.

[197] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 25.

[198] Ibid., tableau 26. Puisque les montants ont été arrondis, ces diminutions en points de pourcentage ne correspondent pas à la diminution de 16 points de pourcentage susmentionnée.

[199] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 25.

[200] Ibid., tableau 26.

[201] Le Tribunal a déjà expliqué que ce n’est pas la sous-cotation des prix en soi qui cause un dommage mais plutôt les effets sur les volumes et les prix qui en résultent (voir Contreplaqués décoratifs au par. 131).

[202] Pièce NQ-2021-002-A-01 aux par. 58-59.

[203] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 82. Sauf indication contraire, toute discussion relative au rendement financier de la branche de production nationale dans la présente section des motifs du Tribunal est fondée sur les renseignements figurant au tableau 82 du rapport d’enquête.

[204] Selon Ashley et Violino, le niveau de l’absorption des frais généraux, de vente et d’administration, et des charges financières, dépend souvent de la production de marchandises non similaires par la branche de production nationale, de décisions commerciales et/ou d’environnements commerciaux non liés à la production de marchandises similaires de celle-ci, et de risques assumés avant la période visée par l’enquête et, pour ces raisons, le Tribunal a avantage à examiner le rendement de la branche de production nationale à l’échelle de la marge bénéficiaire brute (voir pièce NQ-2021-002-T-04 au par. 52). Le Tribunal est d’accord, de manière générale.

[205] Téléviseurs couleurs, CIT-13-85 [1986], T.C.I. No. 18 aux p. 9-10.

[206] Pièce NQ-2021-002-D-11 (protégée) au par. 167; pièce NQ-2021-002-D-29 (protégée) aux p. 3-4.

[207] Par exemple, une marge bénéficiaire brute de 20 p. 100 sur des recettes de ventes de 1 million de dollars est très différente d’une marge brute de 20 p. 100 sur des recettes de ventes de 10 millions de dollars. Dans les deux cas, la marge bénéficiaire brute est identique lorsqu’elle est exprimée en termes de pourcentage. Toutefois, lorsqu’elle est exprimée en dollars, l’écart est décuplé.

[208] La variation des marges bénéficiaires brutes exprimée à l’unité ou en part de pourcentage permet de saisir les effets sur les prix.

[209] Les producteurs nationaux participants indiquent que, même si Palliser a tenté de maintenir ses ventes aux dépens de ses marges, finalement il n’a pu conserver ni l’une ni l’autre. Voir pièce NQ-2021-002-A-11 au par. 95.

[210] La différence de trois points de pourcentage entre la baisse de la marge bénéficiaire brute de la branche de production nationale et la baisse de son volume des ventes nettes s’explique par une faible compression des prix attribuable aux marchandises en cause en 2018.

[211] Pièce NQ-2021-002-D-29 (protégée) à la p. 3. Le Tribunal a confirmé l’exactitude des données du CCCD sur les résultats financiers de la branche de production nationale sans Palliser.

[212] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 83.

[213] Les marges bénéficiaires brutes totales de la branche de production nationale sur ses ventes à l’exportation étaient inférieures aux marges sur ses ventes intérieures étant donné le volume des ventes nettes plus bas.

[214] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 88; pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableau 88.

[215] Ibid.

[216] Transcription de l’audience à huis clos aux p. 37, 106.

[217] Pièce NQ-2021-002-06A, tableaux 85-86.

[218] Ibid.

[219] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableau 91.

[220] Pièce NQ-2021-002-04 aux p. 17-20.

[221] Voir l’alinéa 37.1(3)b) du Règlement.

[222] Silicium métal au par. 109.

[223] Dans les mots de l’Organe d’appel de l’OMC, l’autorité chargée de l’enquête est tenue de déterminer si, compte tenu des effets des autres facteurs connus, les importations visées peuvent être considérées comme un cause « réelle et substantielle » du dommage subi par la branche de production nationale. Voir rapport de l’Organe d’appel, UE – Polyéthylène Téréphthalate (Pakistan), WT/DS486/AB/R au par. 5.226.

[224] Rapport du groupe spécial, UE – Biodiesel (Argentine), WT/DS473/R [UE – Biodiesel] au par. 7.522.

[225] Dans les cas où les parties opposées ont soulevé d’autres facteurs, mais qu’ils n’ont pas fourni de détails précis ni présenté d’éléments de preuve indiquant qu’il y avait eu un changement pendant la période visée par l’enquête, le Tribunal a présumé qu’un tel changement n’avait pas eu lieu. Le Tribunal fait remarquer que, même si un changement avait eu lieu relativement à certains des facteurs pendant la période visée par l’enquête, il ne serait pas d’avis que leur incidence sur la situation de la branche de production nationale est significative comparativement à celle des marchandises en cause.

[226] Le Tribunal fait remarquer que le CCCD convient que bon nombre des autres facteurs sont antérieurs à la période visée par l’enquête. Voir pièce NQ‑2021-002-D-10 au par. 90. Le Tribunal fait également remarquer que des éléments de preuve sur les déficiences alléguées de la branche de production nationale et de leur incidence sur sa situation globale ont été contestés. Par exemple, l’allégation selon laquelle la branche de production nationale est limitée en ce qui concerne l’esthétique de conception n’est pas très crédible, à la lumière des éléments de preuve indiquant que certains producteurs nationaux approvisionnent des détaillants comme Dufresne et JC Perreault, qui mettent l’accent sur le style. Tout compte fait, même en présumant que ces tendances négatives alléguées étaient présentes sur le marché avant la période visée par l’enquête, le Tribunal n’est pas convaincu que leur poursuite aurait contribué, de façon sensible, à la détérioration du rendement global de la branche de production nationale pendant la période visée par l’enquête.

[227] Les producteurs nationaux participants ont donné tous les détails de leur méthodologie et de leurs résultats dans leur mémoire. Ils ont aussi révisé leurs résultats afin de refléter les modifications apportées au rapport d’enquête au cours de l’enquête. Voir pièce NQ‑2021-002-A-01 aux par. 99-108; pièce NQ-2021-002-A-02 (protégée) aux par. 106-107; pièce NQ-2021-002-A-11 aux par. 36-37; pièce NQ-2021-002-A-12 (protégée) au par. 37.

[228] Pièce NQ-2021-002-06B, tableau 23; pièce NQ-2021-002-06A, tableau 25.

[229] Pièce NQ-2021-002-06B, tableau 41. Comme il a été mentionné précédemment, en ce qui concerne les produits de référence, les prix des importations non visées en provenance des États-Unis ou d’autres pays étaient inférieurs à ceux des marchandises en cause dans seulement le cinquième des cas où les comparaisons étaient possibles et, dans presque tous ces cas, les volumes des importations non visées étaient bien plus faibles que ceux des volumes des importations visées. Voir pièce NQ-2021-002-07A (protégée), tableau 60; pièce NQ-2021-002-07A (protégée), annexes 1-10.

[230] Pièce NQ-2021-002-07B (protégée), tableau 23.

[231] Ibid., tableau 41.

[232] Le Tribunal a effectué ses propres calculs en suivant la démarche des producteurs nationaux participants décrite ci-dessus et, même s’il est parvenu à des valeurs unitaires de SRUD de production nationale légèrement différentes, les résultats étaient substantiellement les mêmes.

[233] Comme il a été mentionné plus haut, les éléments de preuve présentés par Madame Sisto ont permis de corroborer ce fait; elle a indiqué que le prix des marchandises en cause mobiles et/ou en cuir peut en effet être inférieur à celui des SRUDST vendus par Brentwood. Voir pièce NQ-2021-002-A-09 au par. 15.

[234] Comme le Tribunal l’a déjà souligné, même lorsque des importations font simplement suivre les prix à la baisse du marché intérieur, elles ne sont pas autorisées à « franchir la ligne » pour devenir des marchandises sous-évaluées dommageables. Voir Produits plats de tôle en acier au carbone et en acier allié, laminés à chaud (2 juillet 1999), NQ-98-004 (TCCE) à la p. 32. La ligne est donc nettement franchie quand, comme c’est le cas en l’espèce, les marchandises en cause dominent le marché en matière de prix et contribuent grandement à former les attentes des clients pour ce qui est des bas prix.

[235] Les producteurs nationaux et les exportateurs sont donc tous les deux fournisseurs grossistes aux détaillants. Les producteurs nationaux livrent aussi concurrence directement aux exportateurs ou aux producteurs étrangers lorsqu’ils vendent aux distributeurs, qui à leur tour vendent aux détaillants.

[236] Pièce NQ-2021-002-06B, tableau 23; pièce NQ-2021-002-06A, tableau 25.

[237] Palliser a récemment embauché M. Steve Ambeau à titre d’agent de mise en marché principal dont l’un des rôles sera d’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie de commerce électronique. Voir pièce NQ-2021-002-P-01 à la p. 87; Transcription de l’audience publique aux p. 117-118, 122.

[238] Pièce NQ-2021-002-A-15 au par. 49; pièce NQ-202-002-D-20 au par. 32; Transcription de l’audience à huis clos à la p. 201.

[239] Transcription de l’audience publique aux p. 280-281, 303; pièce NQ-2021-002-A-15 au par. 48.

[240] Transcription de l’audience publique aux p. 377, 506-507; pièce NQ-2021-002-E-07 aux p. 7-10. Le Tribunal reconnaît qu’un nombre croissant de consommateurs ont fait des achats en ligne au cours de la période visée par l’enquête, surtout en 2020, étant donné la fermeture de magasins entraînée par la pandémie de COVID-19. Toutefois, les éléments de preuve indiquent que la plupart des achats de SRUD au cours de la période visée par l’enquête ont quand même été effectués en magasin.

[241] Pièce NQ-2021-002-A-06 (protégée) au par. 33.

[242] Voir PI-2020-007-03.01 (protégée) à la p. 225.

[243] Pièce NQ-2021-002-10.21A (protégée) aux p. 29, 40.

[244] Le CCCD a également soulevé la question de la relation de Palliser avec The Brick. Cependant, le Tribunal fait remarquer que, selon le CCCD, The Brick a cessé d’acheter des SRUD auprès de Palliser bien avant le début de la période visée par l’enquête. Puisque cette relation s’est terminée avant la période visée par l’enquête, il ne peut être affirmé que ceci était la cause de tout dommage subi par Palliser pendant la période visée par l’enquête.

[245] Pièce NQ-2021-002-D-14 aux par. 26-27.

[246] Pièce NQ-2021-002-A-15 aux par. 13-14.

[247] Ibid. aux par. 15-16; pièce NQ-2021-002-D-14 aux par. 28-29; Transcription de l’audience publique à la p. 222.

[248] Pièce NQ-2021-002-A-15 au par. 28; pièce NQ-2021-002-D-14 au par. 40.

[249] Pièce NQ-2021-002-A-15 aux par. 17, 21-24; pièce NQ-2021-002-A-16 (protégée) au par. 18; Transcription de l’audience à huis clos à la p. 28. M. Wiltshire a quitté Palliser en août 2019 (voir pièce NQ-2021-002-A-15 au par. 18).

[250] Pièce NQ-2021-002-D-14 aux par. 37, 43.

[251] Transcription de l’audience publique aux p. 238, 277.

[252] Pièce NQ-2021-002-D-15 aux par. 36, 38-39.

[253] Même si M. Leon et M. Brad Dawson, gestionnaire de la marchandise chez Leon’s, ont tous les deux affirmé que les importations en provenance d’Asie n’avaient nullement été mentionnées lorsque les parties ont négocié le programme ou que Palliser y a mis fin (voir pièce NQ-2021-002-D-14 au par. 40; Transcription de l’audience publique aux p. 225-226), le Tribunal ne conçoit pas que cela signifie qu’ils n’avaient pas d’attentes à l’égard de bas prix qui découlaient de la disponibilité des importations visées. Tout compte fait, le Tribunal accepte les éléments de preuve de M. DeFehr selon lesquels la disponibilité de larges volumes de marchandises en cause à prix déloyaux et la capacité à se tourner vers d’autres sources à faible prix ont permis à Leon’s de résister à la hausse des prix et, en définitive, ont fait qu’il est devenu intenable pour Palliser de continuer de vendre ses produits à Leon’s. Pièce NQ-2021-002-A-16 aux par. 19-29.

[254] Transcription de l’audience à huis clos aux p. 30-31, 141-142.

[255] Transcription de l’audience publique aux p. 239-240, 296.

[256] Pièce NQ-2021-002-D-23 aux par. 46-47; Transcription de l’audience publique aux p. 340-342.

[257] Transcription de l’audience publique aux p. 46, 53, 90-91, 184; Transcription de l’audience à huis clos aux p. 80, 107-108, 112-113, 149-151.

[258] Transcription de l’audience publique aux p. 240-241, 244, 304, 400; Transcription de l’audience à huis clos aux p. 348-349.

[259] Voir, par exemple, Transcription de l’audience publique aux p. 178-180, 400; Transcription de l’audience à huis clos à la p. 267.

[260] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 10.

[261] Pièce NQ-2021-002-D-23 (protégée) au par. 36; pièce NQ-2021-002-D-15 (protégée) au par. 24. Quant à Palliser en particulier, le Tribunal est d’avis que l’explication de M. DeFehr selon laquelle les délais étaient plus longs que d’habitude au cours de la première moitié de 2019 était adéquate. Voir pièce NQ-2021-002-RI-01A (protégée) à la p. 41; Transcription de l’audience à huis clos aux p. 64-65.

[262] Transcription de l’audience publique aux p. 240-241, 255, 296.

[263] Pièce NQ-2021-002-06A, tableau 82.

[264] Rapport du groupe spécial, Thaïlande – Profilés en fer ou en aciers non alliés et les poutres en H (Pologne), WT/DS122/R au par. 7.273.

[265] Résines ABS (15 octobre 1986), CIT-3-86; Modules muraux unitisés au par. 58.

[266] Barres d’armature pour béton (3 Mai 2017), NQ-2016-003 (TCCE) au par. 184. Voir aussi Certaines tôles d’acier au carbone laminées à chaud (27 octobre 1997), NQ-97-001 (TCCE) à la p. 15, où le Tribunal a laissé entendre que le concept de caractère sensible pouvait comporter des dimensions à la fois temporelles et quantitatives.

[267] Pièce NQ-2021-002-46.

[268] À l’audience, RHI a indiqué que cette demande particulière n’était pas une demande d’exclusion. Cependant, le Tribunal conclut que les demandes de RHI et de Costco à cet égard équivalent à des demandes d’exclusion propres à une entreprise ou à un importateur, ce que, en principe, le Tribunal a le pouvoir discrétionnaire d’accorder en vertu du paragraphe 43(1) de la LMSI. À cet égard, si, à strictement parler, ces demandes ne peuvent être considérées comme des demandes d’exclusion d’un produit précis, elles peuvent néanmoins être définies comme des demandes d’exclusion de certaines marchandises en cause de la portée des conclusions. Le Tribunal abordera donc ces demandes sur ce fondement.

[269] Hetex Garn A.G. c. Tribunal antidumping, [1978] 2 C.F. 507 (CAF); Sacilor Aciéries c. Le Tribunal antidumping (1985) 9 C.E.R. 210 (CA); Groupe spécial binational, Moteurs à induction originaires ou exportés des États-Unis d’Amérique (préjudice) (11 septembre 1991), CDA-90-1904-01; Groupe spécial binational, Certaines tôles d’acier laminées à froid originaires ou exportées des États-Unis d’Amérique (préjudice) (13 juillet 1994), CDA-93-1904-09.

[270] Voir, par exemple, Extrusions d’aluminium au par. 339; Fils en acier inoxydable (30 juillet 2004), NQ-2004-001 (TCCE) au par. 96.

[271] Extrusions d’aluminium au par. 337.

[272] Certaines pièces d’attache (6 janvier 2010), RR-2009-001 (TCCE) [Pièces d’attache] au par. 245.

[273] Voir, par exemple, Barres d’armature pour béton (12 janvier 2000), NQ-99-002 (TCCE) à la p. 30, ou le Tribunal a indiqué « qu’il n’y a aucune exigence dans la LMSI voulant que la branche de production réponde à la totalité des besoins du marché ».

[274] Pour les motifs exposés ci-dessous, le Tribunal est d’avis que le seuil élevé pour accorder des exclusions dans le contexte d’une enquête menée aux termes de l’article 42 de la LMSI est toutefois atteint dans le cas des produits qu’il a décidé d’exclure de la portée de ses conclusions. Ces produits sont très différents des produits qui forment l’essentiel des activités commerciales des producteurs nationaux participants. Le Tribunal est convaincu que les producteurs nationaux participants ne sont pas des fournisseurs actifs de produits qui satisfont à ces besoins particuliers des clients et n’entendent pas le devenir.

[275] Owen & Company Limited c. Globe Spring & Cushion Co. Ltd., 2010 CAF 288 au par. 14.

[276] Pièces d’attache au par. 243.

[277] Extrusions d’aluminium (17 mars 2014), RR-2013-003 (TCCE) au par. 194.

[278] Ibid. au par. 195.

[279] Pièce NQ-2021-002-48.01 (protégée) aux p. 10-12.

[280] Aux termes de la LMSI, les conclusions de dommage expirent cinq ans après la date à laquelle les conclusions ont été rendues, à moins qu’un réexamen relatif à l’expiration n’ait été entrepris par le Tribunal avant cette date. À la suite d’un réexamen relatif à l’expiration aux termes de l’article 76.03 de la LMSI, le Tribunal peut rendre une ordonnance prorogeant ses conclusions, lesquelles expirent ensuite après cinq ans. Le nombre de réexamens relatifs à l’expiration qu’il est possible d’entreprendre est infini et la période au cours de laquelle des conclusions peuvent demeurer en place l’est donc aussi.

[281] Voir Bicyclettes et cadres de bicyclettes (3 juillet 1997), RR-97-003 (TCCE) aux p. 6-7 (dissidence de la membre Close sur la question de la compétence du Tribunal pour reconsidérer les prix cibles lors de réexamens relatifs à l’expiration subséquents).

[282] Pièce NQ-2021-002-48.01 (protégée) aux p. 51-52; pièce NQ-2021-002-49.09 à la p. 16. Voir aussi pièce NQ‑2021-002-07A, tableau 53.

[283] Pièce NQ-2021-002-07A (protégée), annexes 7, 11.

[284] Pièce NQ-2021-002-40.05 aux p. 19-21.

[285] Voir, par exemple, Aluminium Extrusions d’aluminium aux par. 353-354; Pièces d’attache au par. 249.

[286] SRUD PI aux par. 24-25.

[287] Voir, par exemple, NQ-2021-002-49.02 à la p. 4. Les types de fauteuils de massage qui font l’objet des demandes d’exclusion de produits ont généralement une apparence qui ressemble celle d’un vaisseau spatial. Selon le Tribunal, un consommateur qui cherche un fauteuil destiné à des fins générales n’opterait pas pour ce type de fauteuils.

[288] Pièce NQ-2021-002-47.01 aux p. 155-164.

[289] Ibid. à la p. 164.

[290] Ibid. à la p. 74.

[291] Ibid. à la p. 103.

[292] Pièce NQ-2021-002-47.01 aux p. 98-102, 141-143; pièce NQ-2021-002-48.01 (protégée) aux p. 41, 43-44.

[293] Pièce NQ-2021-002-47.01 aux p. 112-140, 144-154.

[294] Pièce NQ-2021-002-10.11 (protégée) aux p. 55-57; pièce NQ-2021-002-F-04 (protégée) aux par. 76-77.

[295] Transcription de l’audience à huis clos aux p. 112-113, 348-349.

[296] Transcription de l’audience publique aux p. 167-168.

[297] Ibid. à la p. 184.

[298] Tubes de canalisation en acier au carbone et en acier allié (29 mars 2016), NQ-2015-002 (TCCE) au par. 251.

[299] RHI importe des marchandises en cause aux États-Unis et les exporte ensuite au Canada. Elles sont considérées des marchandises en cause puisqu’elles sont originaires des pays visés.

[300] Voir Transcription de l’audience publique à la p. 576.

[301] Dans leur mémoire, les producteurs nationaux participants soutiennent qu’environ 20 p. 100 du dommage subi par la branche de production nationale au cours de la période visée par l’enquête est attribuable aux importations de SRUDST de la Chine et du Vietnam. Toutefois, à la suite de la révision du rapport d’enquête par le Tribunal, les producteurs nationaux participants ont modifié ce chiffre pour le porter à une fourchette allant de 25 à 30 p. 100, mais uniquement dans leurs observations sur la question du lien de causalité. Le Tribunal présume que les producteurs nationaux participants visaient à modifier également leurs observations concernant leur demande au titre de l’article 46.

[302] Les producteurs nationaux participants ont fait référence à la décision de la Cour fédérale dans Ronald A. Chisholm Ltd. c. Deputy M.N.R.C.E. (1986), 11 CER 309 (FCTD) [en anglais seulement], ainsi qu’aux décisions du Tribunal dans Plaques de plâtre (4 janvier 2017), NQ-2016-002 (TCCE) et Barres rondes en acier inoxydable (4 septembre 1998), NQ-98-001 (TCCE).

[303] Barres d’armature pour béton (22 décembre 2015), PB-2014-001 (TCCE) [Barres d’armature] au par. 85.

[304] Barres d’armature au par. 33.

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