JOCKEY CANADA COMPANY


JOCKEY CANADA COMPANY
c.
PRÉSIDENT DE L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2011-008

Décision rendue
le jeudi 20 décembre 2012

Motifs rendus
le vendredi 4 janvier 2013


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À un appel entendu les 7, 8 et 9 décembre 2011, en vertu paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À 12 décisions rendues par le président de l'Agence des services frontaliers du Canada le 17 février 2011, concernant une demande de révisions aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

JOCKEY CANADA COMPANY Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L'appel est rejeté.

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

L'exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario)

Dates de l'audience : les 7, 8 et 9 décembre 2011

Membre du Tribunal : Jason W. Downey, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Georges Bujold

Gestionnaire, Programmes et services du greffe : Michel Parent

Agent du greffe : Julie Lescom

Agent de soutien du greffe : Haley Raynor

PARTICIPANTS :

Appelante Conseillers/représentants
Jockey Canada Company Richard A. Wagner
Stephen J. Nattrass
Intimé Conseiller/représentant
Président de l'Agence des services frontaliers du Canada John L. Syme

TÉMOINS :

Steven Tolensky
Président
Jockey Canada Company

Merle Haarbauer
Superviseuse des importations
Jockey International, Inc.

Anne Arbas
Vice-présidente et contrôleuse chargée des affaires fiscales mondiales
Jockey International, Inc.

Gavin Hales
Économiste principal
Agence du revenu du Canada

Byron Fitzgerald
Gestionnaire, Division des litiges
Agence des services frontaliers du Canada

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté par Jockey Canada Company (JCC) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes1 à l'égard de décisions rendues le 17 février 2011 par le président de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4), concernant la valeur en douane de certains vêtements, principalement des sous-vêtements de divers styles pour hommes et pour femmes, importés par JCC entre le 15 mars 2005 et le 31 décembre 2008 (les marchandises en cause).

2. La question centrale dans le présent appel consiste à déterminer si la valeur en douane des marchandises en cause a été correctement révisée par l'ASFC au terme d'une vérification qu'elle a effectuée conformément aux dispositions pertinentes de la Loi, ou si la valeur en douane est plutôt celle déclarée par JCC au moment de l'importation, comme le soutient JCC.

3. Si le Tribunal conclut que la valeur en douane des marchandises en cause qu'a déclarée JCC était erronée, comme l'a déterminé l'ASFC, JCC demande au Tribunal d'examiner deux questions subsidiaires, à savoir 1) si JCC avait des « motifs de croire », avant mars 2009, que la valeur en douane qu'elle a déclarée à l'égard des marchandises en cause était erronée2 et 2) si le Tribunal doit ordonner qu'aucun droit de douane additionnel ni aucune taxe additionnelle ne soit perçu sur le sous-ensemble de marchandises en cause ayant été importé pendant une période de 19 mois au cours de laquelle la vérification a été suspendue en raison de l'inaction avouée de la part de l'ASFC.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE ET DÉCISIONS PERTINENTES DE L'ASFC

4. Le 18 avril 2005, l'ASFC a informé JCC qu'elle effectuerait une vérification afin de déterminer si la valeur en douane déclarée par JCC pour les marchandises en cause avait été correctement calculée, conformément aux exigences de la Loi. L'ASFC a indiqué qu'elle utiliserait cinq transactions d'importation comme échantillon représentatif aux fins de sa vérification initiale et a demandé à JCC de lui fournir la documentation à l'appui de ces transactions, notamment des bons de commande, des factures commerciales et des preuves de paiement3.

5. Le 18 mai 2005, un représentant de la société mère de JCC, Jockey International, Inc. (JII), a répondu à la lettre initiale de l'ASFC au nom de JCC4.

6. Le 2 mars 2006, après avoir examiné la réponse de JII, l'ASFC a indiqué qu'un échantillon additionnel de 26 transactions d'importation ayant eu lieu en 2005 avait été choisi aux fins d'une vérification sur place à Kenosha (Wisconsin), où JII conserve les livres et registres de JCC. L'ASFC a indiqué que ses vérificateurs pourraient effectuer cette vérification sur place au cours de la semaine du 15 mai 2006. Dans cette lettre, l'ASFC a également demandé qu'on lui fournisse des documents et des renseignements additionnels relativement aux transactions pertinentes5.

7. Du 15 mai au 19 mai 2006, une équipe de fonctionnaires de l'ASFC a effectué une vérification sur place de la valeur en douane des marchandises en cause au siège social de JII. Pendant cette période, ils ont vérifié les livres et registres de JCC, y compris son grand livre général, ses dossiers bancaires et ses déclarations de revenu. Ils ont également interrogé plusieurs membres du personnel de JII.

8. Le 13 juin 2006, l'ASFC a demandé des renseignements et des documents additionnels en soulignant que des renseignements nécessaires pour terminer la vérification n'avaient pas encore été fournis6. Le 27 juillet 2006, JII a fourni une réponse au nom de JCC7.

9. Le 9 janvier 2007, l'ASFC a de nouveau demandé des renseignements et des documents additionnels, dont certains avaient déjà été demandés mais fournis seulement qu'en partie, selon l'ASFC8. Le 26 février 2007, JII a fourni des explications et des documents additionnels à l'ASFC9.

10. Environ 20 mois plus tard, l'ASFC a fourni les résultats de sa vérification et ses conclusions à JII dans une lettre datée du 20 octobre 2008, ainsi que son rapport de vérification concernant les transactions d'importation de JCC en 200510. Dans cette lettre, l'ASFC a conclu que les déclarations de JCC de la valeur en douane des marchandises importées de l'Asie, du Honduras, du Costa Rica et de la Jamaïque en 2005 étaient erronées. L'ASFC a également conclu que JCC avait des « motifs de croire » qu'il en était ainsi depuis 2005.

11. L'ASFC a également demandé à JCC de corriger elle-même ses déclarations de la valeur en douane pour toutes les importations en provenance des endroits susmentionnés pour les exercices 2005, 2006, 2007 et 2008. JII a également été informée que cette « lettre d'instructions » constituait une décision nationale des douanes exécutoire à l'égard de JCC, à moins d'être annulée par écrit par l'ASFC11.

12. Dans sa décision, l'ASFC a conclu que la valeur en douane des marchandises fabriquées au Honduras, au Costa Rica et en Jamaïque importées par JCC (les marchandises caribéennes) devait être évaluée en fonction de leur valeur transactionnelle, conformément aux conditions énoncées à l'article 48 de la Loi, puisqu'elle a conclu que JCC achetait ces marchandises de JII dans le cadre d'une vente pour exportation au Canada aux termes d'une convention intersociétés. Au moment de l'importation, JCC a plutôt déclaré que la valeur en douane des marchandises caribéennes était leur valeur reconstituée évaluée conformément à l'article 52.

13. En ce qui concerne les marchandises fabriquées en Asie importées par JCC (les marchandises asiatiques), l'ASFC a conclu que la méthode d'appréciation fondée sur la valeur transactionnelle s'appliquait également. En fait, au moment de l'importation, JCC a utilisé cette méthode pour déterminer la valeur en douane des marchandises asiatiques. Toutefois, l'ASFC a conclu que la vente pour exportation au Canada était une vente entre JII et JCC, aux termes d'une convention intersociétés, et non une vente entre divers vendeurs asiatiques, qui ne sont pas des personnes qui lui sont liées, et JCC, comme JCC l'avait indiqué dans sa déclaration en détail des marchandises.

14. Le 21 novembre 2008, JCC a demandé à l'ASFC d'annuler sa décision nationale des douanes du 20 octobre 2008. JCC soutenait que la manière dont la vérification avait été effectuée, la durée de celle-ci et les conclusions étaient injustes et non conformes aux pratiques et aux normes de l'ASFC. JCC soutenait, entre autres, que ce n'est que lorsqu'elle a reçu la lettre d'instructions du 20 octobre 2008 qu'elle a eu des « motifs de croire » que la valeur en douane qu'elle avait déclarée pour les marchandises en cause était erronée. JCC soutenait de plus que l'exigence de corriger elle-même toutes les entrées depuis le 1er janvier 2005 n'était pas légale en vertu de la Loi. JCC soutenait également que la lettre d'instructions et le rapport de vérification contenaient des erreurs sur les faits et des omissions. Pour ces motifs, JCC soutenait qu'elle ne devait être tenue de corriger que ses déclarations de la valeur en douane subséquentes, soit à compter du 20 octobre 200812.

15. Le 3 mars 2009, l'ASFC a répondu à la demande de JCC et l'a informée que la décision du 20 octobre 2008 ne serait pas annulée, car celle-ci était jugée correcte. Dans sa lettre, l'ASFC a reconnu qu'il y avait eu une période d'inactivité de 19 mois pendant la vérification (entre mars 2007 et septembre 2008) et que, par conséquent, elle était disposée à renoncer à tous les intérêts dus par JCC pour cette période13.

16. L'ASFC a également expliqué sa politique sur l'établissement d'une nouvelle cotisation à la suite d'une vérification après le dédouanement. Entre autres, elle a indiqué que sa décision d'exiger que JCC corrige elle-même ses déclarations de la valeur en douane pour les marchandises en cause pendant la période de vérification (2005) et les années subséquentes (2006 à 2008) n'était pas fondée sur sa conclusion que JCC avait des « motifs de croire » que ses déclarations étaient erronées en 2005. À cet égard, elle a déclaré ce qui suit : « Même s'il avait été déterminé que JCC n'avait pas de “motifs de croire” que ses déclarations de la valeur en douane étaient erronées pendant toute cette période, elle aurait été tenue d'apporter des corrections à l'égard de la période comptable précédant la période de vérification, de la période de vérification et de toutes les importations subséquentes [...] »14 [traduction]. Selon l'ASFC, cette politique sur l'établissement d'une nouvelle cotisation est conforme aux dispositions de la Loi. Enfin, l'ASFC a réitéré ses instructions à JCC de corriger elle-même ses déclarations de la valeur en douane pour les marchandises en cause, et ce, conformément à un calendrier déterminé.

17. Le 12 mars 2009, l'ASFC a rendu deux décisions sous forme de relevés détaillés de rajustement (RDR), le premier à l'égard des marchandises caribéennes et le second à l'égard des marchandises asiatiques, aux termes du paragraphe 59(1) de la Loi, afin de réviser la valeur en douane des marchandises importées par JCC de l'Asie, du Honduras, du Costa Rica et de la Jamaïque au cours de la période du 15 mars au 31 mars 200515. Ces décisions sont fondées sur la décision du 20 octobre 2008, puisqu'elles renvoient expressément au numéro de dossier de l'ASFC pour cette décision. Il s'ensuit que la valeur en douane des marchandises importées des endroits susmentionnés pendant cette période a été augmentée de façon marquée comparativement à la valeur déclarée par JCC au moment de l'importation.

18. Le 31 mars 2009, conformément au calendrier indiqué dans la lettre de l'ASFC datée du 3 mars 2009, JCC a déposé des corrections, aux termes du paragraphe 32.2(2) de la Loi, à ses déclarations de la valeur en douane pour les marchandises caribéennes et asiatiques importées pendant le reste de la période de vérification, soit du 1er avril au 31 décembre 200516.

19. Le 2 avril 2009, JCC a déposé une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale dans laquelle elle demandait l'annulation de la décision de l'ASFC datée du 3 mars 2009, particulièrement en ce qui a trait à la conclusion que JCC avait des « motifs de croire », en 2005, que sa méthode d'évaluation était erronée.

20. Entre avril et juillet 2009, JCC a déposé des corrections additionnelles à ses déclarations de la valeur en douane pour ses importations de marchandises caribéennes et asiatiques de 2006 à 2008, conformément au calendrier indiqué dans la lettre de l'ASFC datée du 3 mars 200917. Aux termes du paragraphe 32.2(3) de la Loi, toutes les corrections apportées par JCC à ses déclarations de la valeur en douane ont été assimilées à des révisions aux termes de l'alinéa 59(1)a).

21. JCC a ensuite déposé auprès de l'ASFC 12 demandes de réexamen de ces révisions aux termes du paragraphe 60(1) de la Loi. La date précise de chacune de ces demandes n'est pas connue, car elles n'ont pas été déposées auprès du Tribunal, mais aucun élément de preuve n'indique qu'elles n'ont pas été faites dans les délais prescrits par la Loi. Selon l'ASFC, ces demandes ont été déposées entre juin et novembre 200918.

22. Le 13 avril 2010, la Cour fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire de JCC au motif qu'elle n'avait pas compétence pour entendre l'affaire19.

23. Le 26 janvier 2011, l'ASFC a rendu sa décision provisoire concernant les demandes de JCC de réexamen de la valeur en douane des marchandises en cause. L'ASFC a avisé JCC qu'elle rejetait toutes ses demandes et lui a donné les motifs de cette décision20.

24. En ce qui concerne les marchandises caribéennes, l'ASFC a conclu qu'une vente à l'exportation avait eu lieu entre JII (le vendeur) et JCC (l'acheteur au Canada) aux termes d'une convention intersociétés à un prix de transfert équivalant au prix de gros canadien moins 35 p. 100. Selon l'ASFC, cette vente entre parties liées établissait le prix payé ou à payer pour les marchandises caribéennes conformément à la méthode fondée sur la valeur transactionnelle prévue à l'article 48 de la Loi. Par conséquent, l'ASFC a indiqué qu'il n'était pas approprié d'utiliser la méthode fondée sur la valeur reconstituée pour évaluer la valeur en douane des marchandises caribéennes, car il y avait une valeur transactionnelle et que, en vertu de la Loi, les autres méthodes d'évaluation ne pouvaient être utilisées que dans la mesure où la méthode fondée sur la valeur transactionnelle n'était pas applicable. L'ASFC a rejeté l'argument de JCC selon lequel les marchandises caribéennes avaient été achetées de sociétés étrangères liées situées au Honduras, au Costa Rica et en Jamaïque, et non de JII.

25. En ce qui concerne les marchandises asiatiques, l'ASFC a conclu que la méthode fondée sur la valeur transactionnelle aux termes de l'article 48 de la Loi s'appliquait également, puisqu'il y avait eu une vente pour exportation au Canada entre JII et JCC. L'ASFC a rejeté l'argument de JCC selon lequel elle avait acheté les marchandises asiatiques de divers fournisseurs asiatiques non liés. Selon l'ASFC, après avoir examiné la teneur des transactions, il appert que la vente pour exportation pertinente a eu lieu entre JCC et JII, étant donné les faits suivants : 1) il n'y avait aucune preuve de factures de fournisseurs asiatiques indépendants ni de leurs valeurs correspondantes dans le grand livre général et les livres comptables de JCC; 2) les fournisseurs asiatiques ont été payés par JII à même le compte bancaire de JII; 3) JII a ensuite vendu les marchandises à JCC à un prix de transfert intersociétés équivalant au prix de gros canadien moins 35 p. 100, aux termes d'une convention intersociétés et d'une étude du prix de transfert; 4) JCC a acheté toutes les marchandises importées de JII à ce prix de transfert convenu, tel qu'il appert des entrées dans le grand livre général de JCC; 5) il n'y avait aucun autre prix payé consigné dans les livres comptables de JCC. En substance, l'ASFC a déterminé qu'au moment de l'importation, JCC a erronément déclaré le prix d'achat de JII au lieu du prix qu'elle a payé pour les marchandises asiatiques au moment de leur revente par JII.

26. En ce qui concerne la question de savoir à quel moment JCC avait des « motifs de croire » que ses déclarations de la valeur en douane pour les marchandises en cause étaient erronées, l'ASFC a conclu que JCC avait des « motifs de croire » que ses déclarations étaient erronées depuis le 1er janvier 2005, en raison des dispositions législatives évidentes et transparentes énoncées dans un document de politique de l'ASFC, le Mémorandum D11-6-6. Enfin, l'ASFC a indiqué qu'il n'y avait aucune disposition législative qui prévoyait la renonciation aux droits de douane légalement exigibles aux termes du paragraphe 32.2(2) de la Loi.

27. Le 17 février 2011, l'ASFC a rendu 12 décisions concernant les demandes de JCC aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi. Dans ses décisions définitives, l'ASFC a confirmé sa décision provisoire concernant la valeur en douane des marchandises en cause et sa conclusion que JCC avait des « motifs de croire », depuis le 1er janvier 2005, que la valeur en douane déclarée au moment de l'importation était erronée21.

28. Le 16 mai 2011, JCC a interjeté appel des décisions définitives de l'ASFC auprès du Tribunal aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi.

29. Le Tribunal a tenu une audience publique à Ottawa (Ontario) les 7, 8 et 9 décembre 2011.

30. JCC a fait entendre M. Steven Tolensky, président de JCC, Mme Merle Haarbauer, superviseuse des importations chez JII, et Mme Anne Arbas, vice-présidente et contrôleuse chargée des affaires fiscales mondiales chez JII, à titre de témoins. L'ASFC a fait entendre M. Byron Fitzgerald, gestionnaire à la Division des litiges de l'ASFC, et M. Gavin Hales, économiste principal à l'Agence du revenu du Canada, à titre de témoins.

31. Le Tribunal a reconnu à M. Hales le titre d'expert dans le domaine de l'établissement des prix de transfert du point de vue fiscal. Après avoir pris en considération les observations des parties sur cette question lors de l'audience, le Tribunal a conclu, en appliquant le critère établi dans R. c. Mohan22, que M. Hales possédait une formation et une expérience suffisantes pour être reconnu à titre d'expert dans le domaine proposé par l'ASFC. En outre, le Tribunal a conclu que le seul fait que M. Hales soit employé par une autre agence gouvernementale fédérale n'était pas suffisant pour l'empêcher de fournir une preuve d'expert au nom de l'ASFC pour des motifs de partialité ou d'absence d'indépendance23.

TRANSACTIONS D'IMPORTATION EN CAUSE

32. Comme mentionné ci-dessus, le présent appel concerne la valeur en douane de divers vêtements fabriqués en Asie et dans la région des Caraïbes qui ont été importés par JCC entre 2005 et 2008. Les marchandises asiatiques ont été fabriquées par des sociétés non liées à JCC, alors que les marchandises caribéennes ont été fabriquées par des sociétés liées, soit d'autres sociétés affiliées de JII situées au Honduras, en Jamaïque et au Costa Rica.

33. Les parties ne s'entendent pas sur les principales questions de droit et de fait concernant les transactions d'importation en cause. Les questions en litige comprennent la détermination de la transaction ayant constitué une vente pour exportation au Canada, l'identification du fournisseur ayant vendu les marchandises en cause à JCC et le prix effectivement payé par JCC à titre d'acheteur des marchandises. Le Tribunal abordera ces questions en litige dans son analyse ci-dessous.

34. Avant d'aborder les questions en litige, il importe de résumer la séquence des événements ayant mené à l'importation des marchandises en cause.

35. Les éléments de preuve indiquent que JCC est un importateur et un distributeur de vêtements et d'accessoires de vêtements de marque Jockey au Canada. JCC a été constituée en personne morale en 1996 à titre de filiale en propriété exclusive de JII, dans le but de mettre en marché et de distribuer lesdits vêtements de marque Jockey au Canada.

36. Dans la structure typique de toutes les transactions visées par le présent appel, JCC prévoit ses besoins pour une période de mise en marché donnée et envoie ensuite ces prévisions à JII24.

37. Pour ce qui est des marchandises asiatiques, JII transmet ensuite des bons de commande à divers fournisseurs asiatiques pour répondre aux besoins de JCC. JII achète également des marchandises de ces mêmes fournisseurs pour son propre compte.

38. Les commandes de marchandises pour JCC destinées au marché canadien contiennent des numéros de style propres au Canada, qui diffèrent des numéros de style des marchandises destinées à la vente aux États-Unis qui sont achetées par JII pour son propre compte, même si elles peuvent provenir des mêmes fournisseurs25.

39. Les fournisseurs asiatiques produisent ensuite les marchandises, les préparent en vue de leur expédition et les livrent à un port pour être expédiées directement au Canada. Lorsque les marchandises sont prêtes à être expédiées, les fournisseurs asiatiques produisent une facture pour JCC et fournissent une copie à JII26.

40. Les marchandises asiatiques sont ensuite expédiées directement au Canada, habituellement à Vancouver (Colombie-Britannique), où elles sont transportées par train pour être livrées à l'entrepôt de JCC qui est situé à London (Ontario). JCC est l'importateur attitré et paie tous les droits et taxes applicables.

41. JCC assume les risques de pertes et de dommages pour les marchandises asiatiques pendant leur expédition. À cet égard, selon les éléments de preuve, JCC est responsable des marchandises dès qu'elles sont chargées à bord d'un navire à un port en Asie et paie pour les assurer pendant leur transport vers le Canada27.

42. JII paie les factures produites par les fournisseurs asiatiques. JII retire ensuite périodiquement des montants forfaitaires du compte bancaire de JCC, qui ne correspondent pas nécessairement aux factures comptabilisées des fournisseurs asiatiques, mais l'on soutient que JCC paie ultimement les marchandises asiatiques par l'entremise de ces transferts28. Il appert que JII a le pouvoir d'effectuer de tels transferts du compte bancaire de JCC.

43. La valeur en douane déclarée par JCC pour ces importations de marchandises asiatiques est le prix indiqué sur chacune des factures produites par les fournisseurs asiatiques.

44. Dans les livres et registres comptables de JCC, cependant, ces achats de marchandises asiatiques ne sont pas consignés à ce prix. Ils sont plutôt consignés à un prix de vente qui est prévu dans une convention de vente et de distribution entre JII et JCC29.

45. Aux termes de l'alinéa 5(b) de la convention de vente et de distribution, le prix des marchandises vendues par JII à JCC « est en dollars américains au prix de gros moins vingt-cinq pour cent (25 %) » [traduction]. Cette disposition a subséquemment été modifiée comme suit : « prix de gros moins un escompte usuel fondé sur les escomptes accordés par [JII] à d'autres distributeurs sur des facteurs de marché »30 [traduction]. Ainsi, dans les livres et registres de JCC, tous les achats de marchandises asiatiques ont été consignés au prix de transfert intersociétés entre JII et JCC, qui était en vigueur pendant la période visée. Il semble qu'à un moment donné, ce prix de transfert a été modifié pour correspondre au prix de gros canadien de JCC moins 35 p. 100 (en dollars américains)31.

46. À l'audience, JCC a soutenu que le prix de transfert intersociétés prévu dans la convention de vente et de distribution, telle que modifiée, était en fait le coût de gros de JII moins 35 p. 100. Les témoins de JCC ont également déclaré que, selon eux, le prix de vente prévu dans la convention de vente et de distribution renvoie au coût de gros de JII. Cette explication n'est toutefois pas crédible car, dans les livres et registres de JCC, tous les achats ont été consignés au prix de gros canadien moins 35 p. 100.

47. Étant donné que JCC reconnaît le fait que tous ses achats ont été consignés dans ses livres et registres au prix de vente prévu dans la convention de vente et de distribution, peu importe le pays d'origine des marchandises, le Tribunal conclut que, pendant la période visée, ce prix de transfert intersociétés était, dans les faits, le prix de gros canadien de JCC moins 35 p. 100. Par exemple, pour les sous-vêtements vendus par JCC au Canada à un montant équivalant à 10,00 $ US, JCC payait le prix de 6,50 $ US à JII. Selon le Tribunal, il s'agit d'une interprétation raisonnable de la disposition pertinente de la convention de vente et de distribution.

48. Le processus utilisé par JCC pour acheter les marchandises caribéennes est très similaire. Ces marchandises sont fabriquées par trois sociétés qui sont des filiales de JII, soit Jockey de Honduras, S.A. (Jockey Honduras), Jockey International (Jamaica) Ltd. (Jockey Jamaïque) et Confecciones Jinete, S.A. (Jockey Costa Rica). Ces sociétés effectuent les opérations de coupe et de couture. Habituellement, le tissu est expédié des États-Unis aux installations de ces sociétés où l'assemblage des produits finis est effectué32.

49. La structure typique de ces transactions est également similaire. JCC envoie les prévisions de ses besoins à JII et JII expédie ensuite un bon de commande aux sociétés susmentionnées qui assemblent les marchandises caribéennes. Les marchandises caribéennes sont ensuite expédiées au Canada soit sous caution en passant par Miami (Floride), soit directement à un port canadien. JCC est l'importateur attitré des marchandises caribéennes33.

50. Des factures commerciales sont remises à JCC pour les marchandises caribéennes. Toutefois, les entrées dans les livres et registres de JCC ne reflètent pas les montants facturés par les usines caribéennes. Dans les livres et registres de JCC, tous les achats de marchandises caribéennes sont plutôt consignés à la même valeur que celles qui sont déjà indiquées pour les marchandises asiatiques, soit le prix de transfert intersociétés pour la vente des marchandises entre JII et JCC, qui est prévu dans la convention de vente et de distribution (c'est-à-dire le prix de gros canadien moins 35 p. 100 pendant la période visée)34.

51. La valeur en douane déclarée par JCC pour ses importations de marchandises caribéennes est une estimation de JCC de leur valeur reconstituée, qui est fondée sur le coût standard des marchandises caribéennes, y compris le profit. Selon JCC, les factures des fournisseurs caribéens reflètent effectivement la valeur reconstituée des marchandises caribéennes, qui a été déclarée à l'ASFC au moment de l'importation35.

52. Le paiement des marchandises caribéennes est compensé au moyen de débits et de crédits dans les comptes intersociétés. Bien qu'il n'y ait aucun élément de preuve de paiements directs entre JCC et les fournisseurs caribéens de ces marchandises, il semble que les retraits susmentionnés du compte bancaire de JCC, effectués de manière périodique par JII, couvrent également le paiement des marchandises caribéennes36. Ces retraits ne correspondent pas à des montants qui figurent sur les factures, mais seraient, encore une fois, des montants forfaitaires transférés du compte bancaire de JCC par JII pour son propre compte.

CADRE LÉGISLATIF

53. En vertu de la Loi, pour imposer des droits de douane sur des marchandises importées, une valeur doit d'abord être attribuée aux marchandises. L'article 46 de la Loi stipule que la valeur en douane doit être déterminée conformément aux articles 47 à 55.

54. L'article 47 de la Loi prévoit ce qui suit :

47. (1) The value for duty of goods shall be appraised on the basis of the transaction value of the goods in accordance with the conditions set out in section 48.

(2) Where the value for duty of goods is not appraised in accordance with subsection (1), it shall be appraised on the basis of the first of the following values, considered in the order set out herein, that can be determined in respect of the goods and that can, under sections 49 to 52, be the basis on which the value for duty of the goods is appraised:

(a) the transaction value of identical goods that meets the requirements set out in section 49;

(b) the transaction value of similar goods that meets the requirements set out in section 50;

(c) the deductive value of the goods; and

(d) the computed value of the goods.

(3) Notwithstanding subsection (2), on the written request of the importer of any goods being appraised made prior to the commencement of the appraisal of those goods, the order of consideration of the values referred to in paragraphs (2)(c) and (d) shall be reversed.

47. (1) La valeur en douane des marchandises est déterminée d'après leur valeur transactionnelle dans les conditions prévues à l'article 48.

(2) Lorsque la valeur en douane des marchandises n'est pas déterminée par application du paragraphe (1), elle l'est d'après les valeurs suivantes qui peuvent constituer la base de l'appréciation par l'application des articles 49 à 52, prises dans l'ordre où elles s'appliquent :

a) la valeur transactionnelle de marchandises identiques répondant aux exigences visées à l'article 49;

b) la valeur transactionnelle de marchandises semblables répondant aux exigences visées à l'article 50;

c) la valeur de référence des marchandises;

d) la valeur reconstituée des marchandises.

(3) Par dérogation au paragraphe (2), à la demande écrite de l'importateur des marchandises à apprécier présentée avant le début de l'appréciation, l'ordre d'applicabilité des valeurs visées aux alinéas (2)c) et d) est inversé.

55. L'article 48 de la Loi prévoit ce qui suit :

48. (1) Subject to subsections (6) and (7), the value for duty of goods is the transaction value of the goods if the goods are sold for export to Canada to a purchaser in Canada and the price paid or payable for the goods can be determined and if

. . .

(d) the purchaser and the vendor of the goods are not related to each other at the time the goods are sold for export or, where the purchaser and the vendor are related to each other at that time,

(i) their relationship did not influence the price paid or payable for the goods, or

(ii) the importer of the goods demonstrates that the transaction value of the goods meets the requirement set out in subsection (3).

. . .

(4) The transaction value of goods shall be determined by ascertaining the price paid or payable for the goods when the goods are sold for export to Canada and adjusting the price paid or payable in accordance with subsection (5).

(5) The price paid or payable in the sale of goods for export to Canada shall be adjusted

. . .

(c) by disregarding any rebate of, or other decrease in, the price paid or payable for the goods that is effected after the goods are imported.

48. (1) Sous réserve des paragraphes (6) et (7), la valeur en douane des marchandises est leur valeur transactionnelle si elles sont vendues pour exportation au Canada à un acheteur au Canada, si le prix payé ou à payer est déterminable et si les conditions suivantes sont réunies :

[...]

d) l'acheteur et le vendeur ne sont pas liés au moment de la vente des marchandises pour exportation ou, s'ils le sont :

(i) ou bien le lien qui les unit n'a pas influé sur le prix payé ou à payer,

(ii) ou bien l'importateur démontre que la valeur transactionnelle des marchandises à apprécier répond aux exigences visées au paragraphe (3).

[...]

(4) Dans le cas d'une vente de marchandises pour exportation au Canada, la valeur transactionnelle est le prix payé ou à payer, ajusté conformément au paragraphe (5).

(5) Dans le cas d'une vente de marchandises pour exportation au Canada, le prix payé ou à payer est ajusté :

[...]

c) compte non tenu des remises ou réductions du prix payé ou à payer effectuées après l'importation des marchandises.

56. En résumé, l'article 47 de la Loi prévoit que la première base d'évaluation de la valeur en douane est la « valeur transactionnelle » des marchandises importées. Le paragraphe 48(1) confirme qu'il s'agit du point de départ de l'évaluation aux termes de la Loi; il est clair que la valeur en douane doit être appréciée selon cette méthode d'évaluation, sous réserve des conditions prévues à l'article 48.

57. Ce n'est que lorsque la valeur en douane des marchandises importées ne peut être déterminée d'après leur valeur transactionnelle qu'une autre base d'appréciation peut être utilisée. Lorsqu'il est nécessaire d'avoir recours à une autre méthode d'évaluation, l'ordre de priorité stipulé au paragraphe 47(2) de la Loi doit être suivi, sous réserve, toutefois, du droit d'un importateur de choisir entre la valeur de référence et la valeur reconstituée, à certaines conditions.

58. L'article 48 de la Loi énonce les conditions d'évaluation de la valeur en douane des marchandises importées selon la méthode fondée sur la valeur transactionnelle. Cette méthode se fonde principalement sur la valeur attribuée aux marchandises par un vendeur ou un acheteur dans le cadre d'une transaction d'exportation. Elle correspond au « prix payé ou à payer » pour les marchandises, c'est-à-dire le prix de vente dans le cadre d'une transaction d'exportation lorsque celui-ci peut être déterminé37. Dans certains cas, ce prix peut être ajusté à la hausse ou à la baisse pour tenir compte de certains frais. Si le vendeur et l'acheteur sont des personnes liées, la valeur transactionnelle ne peut être utilisée que s'il est démontré que le lien entre les parties à la transaction n'a pas influé sur le prix.

59. La question principale dans le présent appel concerne l'appréciation de la valeur en douane des marchandises en cause. Afin de déterminer si la valeur en douane des marchandises en cause a été correctement déterminée par l'ASFC dans les décisions visées par le présent appel, le Tribunal devra appliquer ces dispositions en tenant compte des faits entourant les transactions d'importation en cause et des éléments de preuve qui lui ont été présentés.

60. De plus, étant donné les arguments subsidiaires formulés par JCC, d'autres aspects du régime de la Loi portant sur la détermination et le recouvrement des droits à l'importation, notamment sur l'étendue de l'obligation d'un importateur de corriger lui-même ses déclarations de la valeur en douane, sur le pouvoir de l'ASFC de réviser la valeur en douane des marchandises importées sur la base d'une vérification et sur la durée de la période à l'égard de laquelle l'ASFC peut exiger qu'un importateur paie des droits de douane additionnels en se fondant sur ses conclusions suite à une vérification, sont également pertinents dans le cadre du présent appel.

61. Ces éléments du régime législatif seront examinés en détails, lorsqu'il y aura lieu de le faire, dans le cadre de l'analyse du Tribunal.

ANALYSE

62. Le principal argument de JCC dans le cadre du présent appel est celui selon lequel la valeur en douane qu'elle a déclarée pour les marchandises asiatiques et caribéennes était, en tout temps, la valeur appropriée évaluée conformément aux dispositions pertinentes de la Loi.

63. À titre subsidiaire, si le Tribunal conclut que la valeur en douane déclarée par JCC pour certaines des marchandises en cause ou pour l'ensemble de celles-ci était erronée, JCC soutient qu'elle n'avait aucun « motif de croire » que ses déclarations étaient erronées jusqu'en mars 2009.

64. À titre subsidiaire encore, JCC demande au Tribunal d'ordonner qu'elle n'ait aucun droit ni aucune taxe à payer en raison de la période de 19 mois pendant laquelle la vérification était inactive, au motif que ce délai est inéquitable et a causé un préjudice financier à JCC.

65. Le Tribunal examinera d'abord la question de savoir si, comme le soutient JCC, l'ASFC a eu tort de réviser la valeur en douane des marchandises asiatiques. Il examinera ensuite le bien-fondé de la décision de l'ASFC concernant la valeur en douane des marchandises caribéennes. Enfin, si cela est nécessaire, le Tribunal abordera les arguments subsidiaires de JCC.

Question préliminaire : fardeau de la preuve

66. Pour statuer sur le présent appel, le Tribunal doit tenir compte des exigences de l'article 152 de la Loi, qui régit l'attribution de la charge de la preuve dans toute procédure engagée sous le régime de la Loi en matière d'importation ou d'exportation de marchandises. Le présent appel est clairement une procédure engagée sous le régime de la Loi en matière d'importation de marchandises.

67. Le paragraphe 152(1) de la Loi prévoit que la charge de prouver l'importation incombe à Sa Majesté et, par conséquent, à l'ASFC. Dans le présent appel, les parties conviennent que les marchandises en cause ont été importées. Les éléments de preuve non contestés établissent clairement ce fait. Par conséquent, il n'y a aucun doute que l'ASFC s'est acquittée de ce fardeau.

68. Le paragraphe 152(3) de la Loi prévoit que pour toute question relative, notamment, au paiement des droits afférents aux marchandises ou à l'observation de toute disposition de la Loi, la charge de la preuve incombe, non à Sa Majesté, mais à l'autre partie à la procédure. Le fait que l'appelant ait la charge de prouver qu'il a satisfait aux exigences de la Loi dans le cadre d'appels interjetés aux termes de l'article 67 a récemment été reconfirmé par la Cour d'appel fédérale38.

69. Dans Miner, la Cour a indiqué qu'une partie appelante ne satisfera pas au fardeau de preuve qui lui incombe si la preuve est « non concluante » quant aux exigences de la loi39. De façon similaire, dans Les Produits Laitiers Advidia Inc. c. Commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada et Producteurs laitiers du Canada40, le Tribunal a affirmé que « [l]a partie sur qui repose le fardeau de la preuve échouera si, une fois toute la preuve produite, le juge des faits entretient un doute véritable sur l'effet de cette preuve ».

70. Par conséquent, JCC a le fardeau de prouver que ses déclarations de la valeur en douane pour les marchandises en cause sont conformes aux dispositions pertinentes de la Loi ou, inversement, que la valeur en douane des marchandises en cause n'a pas été déterminée conformément aux dispositions de la Loi par l'ASFC.

71. Ainsi, l'essentiel de la question dans le présent appel consiste à déterminer si JCC s'est acquittée de son fardeau de prouver que sa propre appréciation de la valeur en douane des marchandises en cause est conforme aux articles 47 à 55 de la Loi. Par conséquent, le Tribunal détermina si JCC a fourni des éléments de preuve suffisants se décharger de son fardeau de prouver que la valeur en douane qu'elle a déclarée pour les marchandises asiatiques et caribéennes était, en tout temps, la valeur appropriée, compte tenu des exigences de la Loi.

Valeur en douane des marchandises asiatiques

72. Les parties conviennent que la valeur en douane des marchandises asiatiques doit être déterminée d'après leur valeur transactionnelle conformément à l'article 48 de la Loi. L'essentiel du litige entre les parties repose dans leurs opinions contradictoires sur l'application des conditions prévues au paragraphe 48(1) aux faits du présent appel. Plus particulièrement, les parties ne s'entendent pas sur la question de savoir quelle vente constitue une vente pour exportation au Canada ni sur le prix payé ou à payer par JCC pour les marchandises asiatiques. Pour statuer en l'espèce, il est nécessaire d'examiner les positions respectives des parties et les éléments de preuve sur lesquels elles s'appuient.

Position des parties

73. JCC soutient que les conditions prévues au paragraphe 48(1) de la Loi pour l'appréciation de la valeur en douane selon la méthode fondée sur la valeur transactionnelle sont satisfaites. Selon JCC, les marchandises asiatiques ont été vendues pour exportation par chacun des fournisseurs asiatiques à titre de vendeur/exportateur d'un pays asiatique. JCC est un acheteur canadien. Le prix payé ou à payer pour les marchandises est déterminable puisqu'il est indiqué sur les factures produites par les fournisseurs asiatiques indépendants, qui sont payées par JCC par l'entremise de JII. Enfin, les fournisseurs asiatiques ne sont pas liés à JCC.

74. Les arguments de JCC ont trait à l'existence d'une vente pour exportation entre les fournisseurs asiatiques et JCC. Elle soutient qu'il est bien établi que la vente pour exportation pertinente est la vente par laquelle le titre est transféré à l'importateur, qui est la partie qui détient le titre au moment où les marchandises sont introduites au Canada. En appliquant ce critère juridique aux faits ayant trait aux transactions d'importation des marchandises asiatiques, JCC soutient que les points suivants démontrent que la vente pour exportation pertinente était une vente entre chacun des fournisseurs asiatiques et elle-même :

  • JII a envoyé des bons de commande distincts aux fournisseurs asiatiques pour les achats de JCC de marchandises asiatiques dont les styles sont exclusifs au Canada41;
  • les factures des fournisseurs asiatiques sont destinées à JCC, ou pour le compte de JCC, et non pour celui de JII42;
  • JCC acquiert le titre relatif aux marchandises directement de chaque fournisseur asiatique au moment de l'expédition et assume tous les risques de pertes et de dommages après le transfert du titre43;
  • JCC paie chacune des factures des fournisseurs asiatiques par l'entremise de JII, ce qu'elle a fait à l'occasion, avant avril 2006, au moyen d'une lettre de crédit établie pour le compte de JCC44, ou, plus souvent et exclusivement après avril 2006, JII paie les factures au nom de JCC et obtient un remboursement de ces paiements à même les fonds du compte bancaire de JCC;
  • les marchandises asiatiques sont expédiées directement au Canada et JCC acquiert le titre relatif aux marchandises à partir du port d'exportation jusqu'à leur importation au Canada.

75. JCC soutient de plus qu'il n'y a aucun élément de preuve qui appuie la position de l'ASFC selon laquelle la vente pour exportation a lieu de JII à JCC. Elle soutient que JII n'a jamais acquis le titre relatif aux marchandises asiatiques et, par conséquent, ne pouvait vendre à JCC des marchandises qui ne lui appartenaient pas.

76. JCC soutient que, contrairement à ce que l'ASFC a déclaré dans ses décisions, l'objet de la convention de vente et de distribution était de régir la vente par JII à JCC de marchandises provenant des États-Unis. Selon JCC, l'entente ne s'applique pas aux achats de marchandises asiatiques de JCC.

77. En ce qui concerne le fait que, dans les livres et registres comptables, c'est le prix de vente de JII, prévu dans la convention de vente et de distribution, qui est utilisé comme valeur pour ses achats de marchandises asiatiques (c'est-à-dire le coût de JCC pour les marchandises asiatiques), JCC soutient que l'ASFC n'a pas tenu compte du fait que ses livres et registres ne sont établis qu'à des fins internes et de conformité fiscale.

78. À cet égard, JCC soutient que, peu importe le prix effectivement payé pour les marchandises ou leur source, tous ses achats ont été consignés à la même valeur dans ses livres et registres, conformément à une convention comptable utilisée pour déterminer le coût de toutes les marchandises qu'elle achète. Elle affirme de plus que l'intention des parties n'a jamais été que le prix prévu dans la convention de vente et de distribution soit utilisé comme prix de transfert à des fins de valeur en douane, mais plutôt uniquement comme valeur uniformisée attribuée à toutes ses marchandises en stock, qui est utilisée principalement pour les fins de ses obligations au titre de l'impôt sur le revenu. Ainsi, JCC soutient que le prix de gros canadien moins 35 p. 100 ne reflète pas le prix d'achat réel payé par JCC pour les marchandises asiatiques. JCC soutient toutefois que le prix réel payé figurant sur les factures des fournisseurs asiatiques a été utilisé pour établir des états de résultat utilisés par JCC afin de contrôler son rendement financier45.

79. JCC a également expliqué que le prix de vente prévu dans la convention de vente et de distribution n'est pas un prix définitif, car elle est assujettie à des obligations relatives au prix de transfert en vertu des lois canadienne et américaine sur l'impôt sur le revenu46. Pour satisfaire à ces obligations, JCC indique qu'elle apporte habituellement des ajustements, en fin d'exercice, au coût des marchandises vendues consigné dans ses livres et registres comptables, conformément à une méthode reconnue pour établir un prix de transfert qui soit acceptable d'un point de vue fiscal pour ses achats de marchandises auprès d'une partie liée.

80. En appliquant cette méthode, connue sous le nom de méthode transactionnelle de la marge nette (MTMN)47, les bénéfices d'exploitation de JCC doivent, pour chaque exercice, se situer à l'intérieur d'un certain pourcentage de ses ventes totales. Pour atteindre le niveau approprié de bénéfices à des fins fiscales, le coût de toutes les marchandises achetées par JCC pour revente est consigné, dans ses livres et registres comptables, à la même valeur uniformisée, soit le prix de vente prévu dans la convention de vente et de distribution. Si le bénéfice réalisé par JCC au cours d'un exercice donné se situe dans une tranche acceptable du niveau de rentabilité de sociétés comparables établi au moyen de la MTMN, il n'est pas nécessaire d'ajuster le coût des marchandises vendues consigné dans ses livres et registres. Toutefois, si le bénéfice réalisé est trop élevé ou trop faible pour un exercice donné (c'est-à-dire à l'extérieur de la tranche de pourcentages acceptable de ses ventes totales), JCC doit ajuster à la hausse ou à la baisse le coût qu'elle a attribué aux marchandises qu'elle a achetées pour revente, de sorte que le bénéfice qu'elle déclare à l'Agence du revenu du Canada se situe dans la tranche de marges de profits acceptable établie au moyen de la MTMN.

81. Pour les motifs susmentionnés, JCC a soutenu à l'audience que le prix de gros canadien moins 35 p. 100 consigné dans ses livres et registres ne peut être utilisé comme valeur transactionnelle des marchandises asiatiques aux termes de l'article 48 de la Loi, car il s'agit d'un prix de transfert à des fins d'impôt sur le revenu, et non à des fins douanières, et qu'il peut y avoir des écarts entre la valeur des marchandises à des fins douanières et les prix de transfert à des fins d'impôt sur le revenu.

82. De toute façon, JCC soutient de plus que, puisque le prix prévu dans la convention de vente et de distribution ne représente pas le prix final, il ne peut être utilisé comme valeur transactionnelle des marchandises asiatiques. Selon JCC, l'article 48 de la Loi exige que le prix payé ou à payer pour les marchandises soit déterminé au moment de l'entrée, c'est-à-dire lorsque les marchandises sont vendues pour exportation. Puisque le prix de gros canadien moins 35 p. 100 est généralement ajusté ou modifié à la fin de l'exercice pour des raisons fiscales, JCC soutient qu'il ne constitue pas un prix payé ou à payer pour les marchandises qui est déterminable au moment de l'entrée.

83. Pour sa part, l'ASFC soutient que JCC n'a pas satisfait au fardeau de prouver que les marchandises asiatiques lui ont été vendues par des fournisseurs asiatiques et que le prix qu'elle a effectivement payé pour les marchandises asiatiques est le prix indiqué sur les factures produites par les fournisseurs asiatiques. L'ASFC soutient de plus que les éléments de preuve indiquent que JCC a acheté les marchandises asiatiques de JII aux termes d'une convention de vente et de distribution et au prix prévu dans cette entente (c'est-à-dire le prix de gros canadien de JCC moins 35 p. 100).

84. À cet égard, l'ASFC soutient qu'aux termes de la convention de vente et de distribution, JCC a accepté d'acheter des « marchandises » de JII. L'ASFC souligne que le mot « marchandises » est défini dans l'entente comme comprenant la vente de marchandises ayant été fabriquées pour JII par des tiers, y compris des fournisseurs situés en Asie48. L'ASFC renvoie également au témoignage de M. Tolensky, qui a confirmé que, à sa face même, la convention de vente et de distribution n'indique pas que son application se limite à la vente par JII de marchandises fabriquées aux États-Unis49. L'ASFC soutient qu'il n'y a aucun fondement juridique permettant de faire dire au texte de la convention quelque chose qu'il ne dit pas au moyen de témoignages ou d'autres éléments de preuve extrinsèques.

85. L'ASFC soutient de plus que la position de JCC repose sur l'argument erroné selon lequel le Tribunal doit faire fi du contenu des livres et registres comptables de JCC aux fins d'évaluation de la valeur en douane et accepter que ceux-ci ne reflètent pas la réalité commerciale.

86. L'ASFC soutient que, sur le plan juridique, JCC doit, pendant six ans, conserver tous les documents ayant trait, entre autres, au « coût et [à] la valeur des marchandises commerciales » et au « paiement effectué à l'égard [des] marchandises » qu'elle a importées50. À cet égard, elle soutient que rien dans les livres et registres de JCC ne démontre que JCC a acheté les marchandises asiatiques de divers fournisseurs asiatiques ni que JCC a payé le prix indiqué sur les factures produites par les fournisseurs asiatiques pour les marchandises asiatiques.

87. Au contraire, l'ASFC soutient que la vérification des livres et registres de JCC effectuée par ses fonctionnaires révèle que toutes les transactions d'importation des marchandises asiatiques ont été consignées dans les registres de JCC comme une vente par JII au prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100.

88. En outre, l'ASFC soutient que les observations de JCC donnent la fausse impression que JII paie les factures produites par les fournisseurs asiatiques au nom de JCC et qu'elle retire ensuite simplement le même montant du compte bancaire de JCC pour se rembourser. En fait, l'ASFC soutient que sa vérification révèle que, bien qu'il soit vrai que JII retire des montants du compte bancaire de JCC pour payer les marchandises, ces montants correspondent aux achats de marchandises asiatiques par JCC au prix de gros canadien moins 35 p. 100, et non au montant facturé par les fournisseurs asiatiques et payé à ceux-ci, ce qui représente une importante majoration du prix indiqué sur les factures produites par ces fournisseurs.

89. En résumé, l'ASFC soutient que les éléments de preuve démontrent que la vente pour exportation est effectivement entre JII, à titre de vendeur, et JCC, à titre d'acheteur des marchandises asiatiques. Elle soutient que ce qui s'est réellement produit, dans tous les cas, est que JII a acheté les marchandises de fournisseurs asiatiques au prix indiqué sur les factures et les a ensuite revendues à JCC à un prix différent (et presque toujours plus élevé), soit le prix prévu dans la convention de vente et de distribution (prix de gros canadien de JCC moins 35 p. 100). Selon l'ASFC, la preuve que les transactions d'importation des marchandises asiatiques se déroulaient ainsi peut être retracée dans les registres, le compte bancaire, l'état des résultats et les déclarations de revenu des sociétés pour l'exercice 2005 de JCC51.

90. L'ASFC soutient qu'aucun document n'indique que JCC a effectivement acheté les marchandises asiatiques de fournisseurs asiatiques ou qu'elle a payé, directement ou indirectement, à ces fournisseurs les montants indiqués sur leurs factures. Par conséquent, l'ASFC soutient que ces montants ne peuvent être utilisés comme base d'évaluation des marchandises en cause aux termes de l'article 48 de la Loi.

91. Puisque, selon l'ASFC, la vente pour exportation pertinente est une vente entre JII et JCC à un prix pouvant être déterminé (c'est-à-dire le prix de gros canadien moins 35 p. 100), elle a correctement déterminé la valeur en douane des marchandises asiatiques en recourant à la méthode fondée sur la valeur transactionnelle dans les décisions visées par le présent appel.

92. En ce qui concerne le fait que JII et JCC sont des personnes liées, l'ASFC soutient que leur lien n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour les marchandises et que les exigences de l'alinéa 48(1)d)(i) sont, par conséquent, satisfaites. À cet égard, elle soutient qu'elle accepte généralement, comme valeur transactionnelle des marchandises vendues entre parties liées, un prix payé ou à payer qui est dérivé d'une méthode pour établir le prix de transfert fondée sur le principe de pleine concurrence. L'ASFC souligne que l'établissement d'un prix de transfert intersociétés fondé sur le prix de gros moins un pourcentage est très répandu et que, en l'espèce, le prix de gros moins 35 p. 100 est dérivé de l'application de la MTMN, qui est l'une des méthodes recommandées par l'OCDE pour l'établissement d'un prix de transfert conforme au principe de pleine concurrence.

Évaluation du Tribunal

93. Le paragraphe 48(1) de la Loi prévoit que les trois conditions suivantes doivent être satisfaites avant que la valeur transactionnelle puisse être utilisée pour apprécier la valeur en douane :

  • il doit s'agir d'une vente pour exportation;
  • il doit y avoir un acheteur au Canada;
  • le prix payé ou à payer doit être déterminable52.

94. En outre, lorsque le vendeur et l'acheteur des marchandises sont des parties liées, l'alinéa 48(1)d) prévoit que la valeur transactionnelle ne peut être utilisée qui si leur lien n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour les marchandises. Dans le présent appel, il n'y a aucun doute que l'importation des marchandises asiatiques par JCC impliquait une vente pour exportation à un acheteur au Canada, c'est-à-dire JCC. Toutefois, la question est de savoir si les marchandises asiatiques ont été vendues pour exportation à JCC par des fournisseurs asiatiques non liées ou par sa société mère, JII.

95. Dans Canada (Sous-ministre du Revenu national) c. Mattel Canada Inc., la Cour suprême du Canada a statué qu'« [a]ux fins de détermination de la valeur en douane de marchandises pour l'application de l'art. 48 de la Loi sur les douanes, la vente pour exportation pertinente est celle qui a pour effet de transférer à l'importateur le titre relatif aux marchandises. L'importateur est la partie qui détient ce titre au moment où les marchandises sont introduites au Canada53. » Par conséquent, le Tribunal doit déterminer si les éléments de preuve sont suffisants pour établir que le titre relatif aux marchandises asiatiques est passé directement des fournisseurs asiatiques à JCC avant leur importation au Canada, comme le soutient JCC.

96. Après avoir soigneusement examiné tous les éléments de preuve qui lui ont été présentés, le Tribunal conclut que JCC n'a pas réussi à démontrer qu'elle a acheté les marchandises asiatiques de fournisseurs asiatiques et, plus particulièrement, que le prix qu'elle a effectivement payé ou qui était à payer par elle pour les marchandises asiatiques est le prix indiqué sur les factures produites par les fournisseurs asiatiques. Le Tribunal est d'avis que la preuve prépondérante indique plutôt que la vente pour exportation est une vente entre JII, à titre de vendeur, et JCC, à titre d'acheteur.

– Convention de vente et de distribution

97. En 1996, JII et JCC ont conclu une convention de vente et de distribution aux termes de laquelle JII a accepté de vendre, et JCC a accepté d'acheter, des « marchandises » qui sont définies au sens large et comprennent les marchandises asiatiques.

98. Contrairement à l'argument de JCC, cette convention n'est pas seulement une convention de distribution. Comme l'a fait remarquer le juge Mandamin dans Jockey Canada Company Limited c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), « [l]a convention de vente prévoyait que JII vendrait à JCC des vêtements portant les marques Jockey, fabriqués par JII et pour elle [...] et pour lesquels JCC paierait un prix déterminé à JII » [nos italiques]54.

99. Par conséquent, à prime abord, la convention de vente et de distribution englobe la vente à JCC de marchandises qui ont été fabriquées pour JII par des fournisseurs tiers, nonobstant leur pays d'origine.

100. Cette convention ne contient aucune disposition qui restreigne la portée de celle-ci aux marchandises fabriquées par JII ou pour elle aux États-Unis. En effet, le juge Mandamin, dans Jockey, a également souligné ce qui suit : « Quelque temps avant 2005, JCC s'est mise également à importer des marchandises de JII qui étaient fabriquées en Asie » [nos italiques]55.

101. Malgré le libellé clair et sans équivoque de la convention de vente et de distribution, JCC s'appuie sur le témoignage oral de M. Tolensky lors de l'audience pour soutenir que celle-ci ne doit pas s'appliquer à la vente de marchandises fabriquées en Asie. M. Tolensky a déclaré qu'au moment où la convention de vente et de distribution a été rédigée, l'intention des parties était qu'elle ne devait s'appliquer qu'aux marchandises fabriquées aux États-Unis, ce qui n'est pas expressément mentionné dans ladite convention.

102. En substance, JCC demande au Tribunal d'interpréter la convention comme voulant dire « les marchandises fabriquées par JII et pour JII aux États-Unis ». Selon JCC, cela est logique, car les marchandises en provenance des États-Unis étaient le principal type de marchandises que JCC achetait en 199656.

103. Toutefois, lorsqu'une transaction est consignée par écrit dans une convention entre deux parties, les éléments de preuve extrinsèques sont, en général, irrecevables pour contredire ou modifier les termes du document ou pour y a ajouter ou en supprimer des éléments. Cela est particulièrement vrai lorsque la transaction a lieu entre deux sociétés averties.

104. En fait, un examen de la jurisprudence portant sur l'admissibilité d'éléments de preuve extrinsèques dans le contexte de l'interprétation d'un document contractuel révèle que, s'il ne décèle aucune ambiguïté dans le document à l'examen, un tribunal ne peut tenir compte d'éléments de preuve extrinsèques et que, même lorsqu'il y a une ambiguïté, les éléments de preuve portant uniquement sur l'intention subjective d'une partie sont irrecevables57.

105. Dans le présent appel, le Tribunal conclut qu'il n'y a pas d'ambiguïté dans la convention de vente et de distribution conclue entre JII et JCC. Il est clair que l'intention des parties était de conclure une convention applicable à la vente à JCC de marchandises fabriquées par des tiers pour JII, nonobstant le pays d'origine de ces marchandises. Par conséquent, le témoignage de M. Tolensky selon lequel l'intention réelle des parties était différente au moment de la rédaction et de la signature de la convention est irrecevable. L'outil le plus important pour déterminer l'intention des parties au moment de la conclusion du contrat est présent dans le libellé même de la convention.

106. De toute façon, le Tribunal conclut que le témoignage de M. Tolensky sur cette question n'est pas convaincant. À cet égard, sa déclaration selon laquelle la convention de vente et de distribution ne régit que la vente par JII de marchandises en provenance des États-Unis n'est corroborée par aucun autre employé de JII ayant témoigné à l'audience. Ces employés ne savaient que très peu de choses concernant la convention et ne pouvaient fournir d'éléments de preuve sur l'intention de JII lorsqu'elle a conclu cette convention.

107. Mme Haarbauer a déclaré que, bien que la convention de vente et de distribution ne lui soit pas familière, selon sa compréhension, JII a convenu de vendre, aux termes de cette convention, des produits de marque Jockey à JCC58. Elle n'a pas déclaré que la convention ne s'appliquait qu'aux marchandises en provenance des États-Unis.

108. En ce qui concerne Mme Arbas, elle a déclaré ne pas avoir participé à la formulation de la convention, sauf de suggérer ce que devait être le prix de transfert59. En résumé, ces témoins ne pouvaient fournir d'éléments de preuve à l'appui de l'argument selon lequel la convention ne vise que la vente de marchandises fabriquées par JII et pour elle aux États-Unis. Pour ce motif, le témoignage de M. Tolensky concernant la portée de la convention de vente et de distribution ne fait que refléter son opinion ou son interprétation, tout au plus, et pas nécessairement celle de JII.

109. En outre, d'autres déclarations de M. Tolensky laissent planer un doute quant à la fiabilité de son témoignage concernant la portée et le sens de la convention de vente et de distribution. Par exemple, il n'était « pas sûr » [traduction] si la convention de vente et de distribution était un contrat ayant force obligatoire entre JII et JCC, malgré le fait qu'il ait signé la convention au nom de JCC et l'inclusion de dispositions claires à cet effet dans le libellé même de la convention60.

110. M. Tolensky a également déclaré que certaines dispositions de la convention ne s'appliquaient pas entre parties liées, alors que d'autres étaient susceptibles d'exécution par JII61. Il a admis que plusieurs clauses de la convention, autres que les dispositions régissant la vente de marchandises par JII à JCC, s'appliquaient aux marchandises fabriquées à l'extérieur des États-Unis, y compris les marchandises asiatiques, distribuées par JCC62.

111. Le Tribunal est d'avis qu'on ne peut simplement choisir parmi les clauses celles qui sont exécutoires et faire fi des autres lorsque cela nous convient. Pour ces motifs, l'argument ultime de JCC selon lequel les incohérences dans le témoignage de M. Tolensky peuvent s'expliquer par le fait que la convention de vente et de distribution est essentiellement un document type conclu par JII avec de nombreux distributeurs du monde entier, et que les parties n'ont jamais eu l'intention de la respecter rigoureusement en raison du fait qu'elles sont liées, n'est pas convaincant.

112. En fait, le terme « marchandises » est défini à l'alinéa 1(b) de la convention de vente et de distribution; cette définition, comme mentionné précédemment, comprend les marchandises asiatiques et, plus précisément, toutes les marchandises de marque Jockey fabriquées par JII et pour elle. Cette définition s'applique à l'ensemble de la convention et il n'y a aucun fondement juridique permettant de conclure que certaines dispositions de la convention ne s'appliquent qu'à un sous-ensemble de ces marchandises (c'est-à-dire aux marchandises fabriquées aux États-Unis), alors que d'autres pourraient s'appliquer à toutes les marchandises fabriquées par JII et pour elle, nonobstant leur pays d'origine.

113. Le contexte qu'établissent les autres dispositions de la convention dans lesquelles le terme « marchandises » est utilisé et qui, comme il a été admis, s'appliquent aux marchandises asiatiques appuie également la conclusion du Tribunal selon laquelle l'article 5 de la convention de vente et de distribution, qui régit la vente par JII à JCC de « marchandises », selon la définition de ce terme à l'alinéa 1(b), vise la vente de marchandises fabriquées pour JII en Asie.

114. De plus, il importe de souligner que les éléments de preuve indiquent que depuis 1996, au moins trois amendements ont été apportés à la convention de vente et de distribution. Si l'intention des parties avait été de rendre l'article 5 applicable seulement à la vente de marchandises fabriquées par JII et pour elle aux États-Unis, elles auraient pu modifier cette disposition en conséquence dans le cadre de ces amendements. Le fait qu'elles ne l'ont pas fait laisse entendre qu'elles n'ont jamais eu l'intention de restreindre la portée de l'article 5 à la vente de marchandises fabriquées aux États-Unis.

115. Les amendements qui ont été apportés démontrent également que, bien que JII et JCC soient des parties liées, elles ont jugé nécessaire de formaliser par écrit certaines révisions de leurs droits et obligations aux termes de la convention de vente et de distribution. Cela indique que, contrairement à l'opinion de M. Tolensky, JII et JCC sont bien conscientes que toutes les dispositions de la convention sont exécutoires et que des amendements formels sont nécessaires pour modifier la convention ou rendre inapplicable toute disposition de celle-ci.

116. Pour ces motifs, le Tribunal convient avec l'ASFC que les marchandises asiatiques ont été vendues par JII à JCC aux termes de la convention de vente et de distribution.

– Éléments de preuve insuffisants pour démontrer que le titre relatif aux marchandises asiatiques a été transféré directement des fournisseurs asiatiques à JCC

117. L'argument de JCC selon lequel le titre relatif aux marchandises asiatiques a été transféré directement des fournisseurs asiatiques à JCC avant leur importation au Canada est incompatible avec les dispositions de la convention de vente et de distribution. La convention ne prévoit pas que JCC a le droit d'acheter des marchandises de marque Jockey de fournisseurs indépendants. Comme mentionné ci-dessus, la convention de vente et de distribution prévoit plutôt que les marchandises devant être vendues à JCC et distribuées ensuite au Canada comme marchandises de marque Jockey sont des marchandises devant être fabriquées par JII et pour elle.

118. En d'autres termes, la convention de vente et de distribution prévoit que JII peut acheter des marchandises fabriquées pour elle auprès de fournisseurs indépendants et revendre ensuite ces marchandises à titre de vendeur et de propriétaire de la marque Jockey. Aucun élément de preuve n'indique que JCC a le droit de demander à des fabricants indépendants de fabriquer des marchandises de marque Jockey pour elle.

119. De toute façon, pour que le Tribunal accepte l'argument de JCC selon lequel le titre relatif aux marchandises asiatiques lui a été transféré directement des fournisseurs asiatiques, des éléments de preuve convaincants selon lesquels JCC a conclu des ententes d'achat et de vente avec ces fournisseurs et qu'elle a payé le prix indiqué sur leurs factures devaient être fournis. Comme le soutient l'ASFC, en l'absence de paiement d'un prix convenu entre un acheteur et un vendeur, il n'y a pas de vente63.

120. Les éléments de preuve sont insuffisants pour démontrer que JCC a conclu des contrats d'achat visant les marchandises asiatiques avec des fournisseurs asiatiques et qu'elle a effectivement payé leurs factures.

121. Les bons de commande des marchandises asiatiques ont été envoyés par JII et sont les bons de commande de JII, comme en témoigne clairement l'inscription « Émis par Jockey International, Inc. » [traduction] qui figure sur les documents. Les bons de commande n'indiquent pas que JCC est l'acheteur des marchandises, mais simplement que les marchandises doivent être livrées à ses locaux situés à London (Ontario), tel qu'il appert de l'inscription « Expédier à » [traduction] qui figure sur chaque bon de commande. Par conséquent, les bons de commande démontrent seulement que JCC y figure comme destinataire et non comme l'acheteur des marchandises asiatiques.

122. Tous les autres renseignements figurant sur les bons de commande sont compatibles avec la position selon laquelle ils énoncent les modalités et conditions de transaction entre JII et divers fournisseurs asiatiques. Par exemple, on y fait mention du « Guide de Jockey à l'intention des fournisseurs » [traduction] et du fait que « Jockey n'acceptera pas de marchandises de second choix » [traduction]. Les mentions de « Jockey » dans ce contexte doivent être interprétées comme signifiant JII, et non JCC, surtout compte tenu du fait que les bons de commande sont signés par un représentant de JII64. Pour ces motifs, le Tribunal ne peut accepter l'argument de JCC selon lequel les bons de commande sont des bons de commandes ou des documents de JCC qui énoncent les modalités et conditions de transaction entre elle et les fournisseurs asiatiques.

123. Par conséquent, le Tribunal n'est pas convaincu que les bons de commande ont été simplement acheminés par l'entremise de JII pour des fins de commodité administrative. Les éléments de preuve indiquent plutôt que JII a acheté les marchandises asiatiques, les a payées et, par conséquent, a brièvement assumé la responsabilité qu'un acheteur assume normalement avant de les revendre à JCC.

124. JCC n'a pas déposé d'éléments de preuve convaincants démontrant que JII a simplement transféré le coût des marchandises asiatiques à JCC et que JCC a effectivement payé les montants facturés pour les marchandises par les fournisseurs asiatiques. Cela discrédite entièrement la position selon laquelle JII a simplement commandé les marchandises asiatiques pour le compte de JCC à titre de services rendus aux termes d'une convention en vertu de laquelle JCC a nommé JII pour s'acquitter de certaines fonctions administratives (la convention de gestion)65.

125. À cet égard, bien que les factures des fournisseurs asiatiques aient effectivement été envoyées à JCC, ce qui suggère que JCC était l'acheteur, les éléments de preuve prépondérants indiquent que JII, et non JCC, payait ces factures dans presque tous les cas, voire dans tous les cas. JCC n'a pas fourni de documentation convaincante rendant compte du lien entre les factures asiatiques et les montants ultimement retirés par JII du compte bancaire de JCC, ce qui aurait pu convaincre le Tribunal du contraire.

126. Les seuls éléments de preuve indiquant que JCC aurait payé directement les fournisseurs asiatiques dans certains cas portent sur deux transactions qui ont eu lieu entre 2005 et 2006, dans le cadre desquelles JCC a prétendument payé le montant indiqué sur la facture au moyen d'une lettre de crédit établie pour elle par JII66. Sauf ces transactions, tous les transferts de JCC à JII ne présente que peu de liens, voire aucun, avec les montants effectivement payés par JII au nom de JCC (c'est-à-dire les factures); ils sont plutôt indiqués comme des montants forfaitaires transférés lorsque l'argent était disponible. Tout au plus, il s'agit là de mauvaises pratiques comptables et d'une traçabilité encore pire.

127. Le Tribunal conclut que les éléments de preuve concernant deux transactions sont insuffisants pour démontrer que JCC a payé les fournisseurs asiatiques.

128. Mme Haarbauer a déclaré que le numéro de compte figurant sur l'avis de paiement de la banque ayant émis la lettre de crédit correspondait à l'un des comptes bancaires de JCC67. Pour ce motif, JCC soutient que ce document démontre qu'elle a payé les marchandises asiatiques à même les fonds de l'un de ses propres comptes bancaires. Toutefois, un autre relevé de cette même banque indique qu'un compte différent a été débité par elle pour cette somme. Cet « avis de paiement » [traduction] a été envoyé par la banque à JII et fait référence à un numéro de compte différent, qui pourrait appartenir à JII68.

129. Mme Haarbauer a également déclaré que ces comptes détenus dans une banque américaine étaient gérés par JII69. Par conséquent, ce témoignage n'indique pas clairement que l'argent utilisé pour payer les marchandises vendues dans le cadre de ces deux transactions provenait effectivement de l'un des comptes bancaires de JCC et, même si tel était le cas, qui avait le contrôle de ce compte.

130. Le Tribunal constate également que, bien que l'ASFC ait demandé à JCC de fournir une preuve de paiement pour les transactions pertinentes ainsi qu'une liste de ses comptes, registres et relevés bancaires pour l'exercice 2005, ces documents bancaires ou des documents similaires n'ont pas été fournis à l'ASFC au cours de la vérification70. Le fait qu'on s'appuie pour la première fois sur certains éléments de preuve de ce type dans le cadre du présent appel diminue leur valeur probante, car l'ASFC n'a jamais eu l'occasion de les examiner. Le Tribunal constate de plus qu'aucun élément de preuve convaincant n'a été fourni pour démontrer que tel compte a été utilisé pour payer telle facture. Par ailleurs, aucun document n'a été fourni concernant l'identité de la personne chargée de la gestion de ces comptes ni sur l'identité du réel détenteur principal de ces comptes. Le Tribunal n'a obtenu aucune explication claire quant aux questions de savoir qui a fourni les lettres de crédit pour JCC, qui a garanti ces lettres de crédit et quel compte a été utilisé. Les éléments de preuve sont parsemés de nombreux instruments financiers différents, mais très peu d'explications ont été données pour faire le lien entre ces instruments et la responsabilité réelle de JCC.

131. Pour ces motifs, le Tribunal ne peut accorder que peu de poids à ces relevés bancaires.

132. De toute façon, Mme Haarbauer a déclaré que, jusqu'en 2006, seule une « petite quantité » [traduction] des marchandises asiatiques a été payée au moyen d'une lettre de crédit71. Puisque les marchandises asiatiques ont été importées entre 2005 et 2008 et que, selon les propres admissions de JCC, les lettres de crédit n'étaient plus utilisées pour payer les fournisseurs après avril 2006, le Tribunal doit conclure que, pour la vaste majorité des cas, ces éléments de preuve, qui ont été déposés supposément pour démontrer que JCC aurait payé directement les fournisseurs asiatiques, n'ont aucune valeur probante.

133. Après 2006, il n'y a aucun doute que le paiement des factures produites par les fournisseurs asiatiques a été fait par voie électronique par JII, et non par JCC. Pour ces prétendues transactions « de compte courant », il n'y a aucun élément de preuve indiquant que JCC a payé directement, à quelque moment que ce soit, les fournisseurs asiatiques.

134. En fait, les éléments de preuve documentaires déposés par JCC concernant ces transactions et au sujet desquelles les témoins de JCC ont été interrogés à l'audience ne contiennent aucune preuve de paiement de factures par JCC. Par conséquent, JCC n'a fourni aucun élément de preuve relatif aux montants qu'elle a prétendument payés pour les marchandises asiatiques ni concernant la date de tels paiements pour les transactions qu'elle a décrites comme des achats « de compte courant ».

135. Bien que Mme Haarbauer ait déclaré que, selon elle, JII a transféré les fonds par virement bancaire aux fournisseurs asiatiques au nom de JCC, elle n'a pu fournir d'éléments de preuve à l'appui de la position de JCC selon laquelle elle aurait ensuite remboursé ces sommes à JII et, ainsi, aurait ultimement payé les montants facturés par les fournisseurs asiatiques. En ce qui concerne les sommes d'argent retirées périodiquement du compte bancaire de JCC pour supposément couvrir les coûts des marchandises asiatiques, elle a déclaré que, normalement, elle ne voyait pas les relevés de ces retraits et que, à sa connaissance, ces retraits ne correspondaient jamais à un montant de facture précis, car ils couvraient autant le coût des produits finis que le coût des autres services rendus par JII. En contre-interrogatoire, elle a déclaré qu'elle ne savait pas si JCC disposait d'une « preuve de paiement de Jockey Canada à Jockey U.S. » [traduction] et a reconnu qu'elle ne pouvait fournir aucun élément de preuve à cet égard72.

136. De même, M. Tolensky a déclaré qu'il ignorait les montants exacts ayant été retirés du compte bancaire de JCC et ne pouvait fournir aucun élément de preuve quant à la question de savoir si ces montants correspondaient aux montants figurant sur les factures de marchandises asiatiques produites par les fournisseurs asiatiques. Il a déclaré que d'autres frais payables à JII par JCC étaient inclus dans le retrait effectué par JII du compte bancaire de JCC. Il a également déclaré qu'il ne pouvait répondre à aucune question portant en particulier sur le paiement par JCC des marchandises achetées par elle73.

137. Les livres et registres de JCC ne contiennent aucune information indiquant que JCC devait, à quelque moment que ce soit, des sommes d'argent à un fournisseur asiatique ni qu'elle aurait payé à des fournisseurs asiatiques les montants indiqués sur leurs factures. Les seuls comptes créditeurs pour produits finis figurant dans les livres et registres de JCC étaient payables à JII et ne reflètent pas le montant des factures pertinentes des fournisseurs.

138. De plus, des éléments de preuve non contestés indiquent que JII, et non JCC, a payé les factures produites par les fournisseurs asiatiques à même ses propres fonds74. JCC a également reconnu que JII a reçu une copie des factures, même s'il est indiqué qu'elles sont pour le compte de JCC.

139. Le Tribunal constate de plus qu'il n'y a aucun élément de preuve indiquant que JCC avait une quelconque obligation envers les fournisseurs asiatiques à l'égard du paiement des factures produites par ces fabricants ni que ces derniers s'attendaient à ce que JCC effectue les paiements. Dans ces circonstances, le fait que les fournisseurs asiatiques n'ont pas produit de facture séparée pour JII et le fait que JII n'a pas facturé JCC en retour pour les marchandises asiatiques ne convainquent pas le Tribunal, en soi, que JII n'a pas acquis le titre relatif aux marchandises avant que celui-ci ne soit transféré à JCC.

140. Le Tribunal est d'avis que, vu l'absence d'éléments de preuve indiquant que JCC a effectivement payé, directement ou indirectement, aux fournisseurs asiatiques le prix indiqué sur leurs factures, on ne peut raisonnablement conclure que ces factures reflètent les modalités de transaction entre chaque fournisseur asiatique, à titre de vendeur, et JCC, à titre d'acheteur.

141. En ce qui concerne l'argument de JCC selon lequel 1) le fait que JCC ait assumé tous les risques de pertes et de dommages des marchandises asiatiques immédiatement après qu'elles aient été chargées sur le navire au port d'expédition en Asie, 2) le fait qu'elle ait payé les frais de transport et d'assurance et les droits de douanes relatifs aux marchandises asiatiques et 3) le fait qu'elle a acquis le titre relatif aux marchandises asiatiques au moment où elles ont été importées au Canada indiquent qu'elle a acquis le titre directement de chaque fournisseur asiatique au moment de l'expédition, le Tribunal conclut que ces faits sont également insuffisants pour démontrer l'existence d'un contrat de vente de marchandises entre les fournisseurs asiatiques et JCC, étant donné les faits en l'espèce.

142. Dans Mattel, les marchandises en cause étaient fabriquées par des fabricants indépendants situés à Hong Kong, elles étaient expédiées directement de ces fabricants à la société canadienne faisant partie du groupe de sociétés de Mattel, Mattel Canada Inc. (Mattel Canada), et Mattel Canada assurait les marchandises importées. Mattel Canada assumait les risques relatifs aux marchandises à compter de leur expédition. Nonobstant ces faits, la Cour suprême du Canada a conclu que la société mère américaine (Mattel Inc.) de Mattel Canada avait acquis le titre relatif aux marchandises avant que le titre ne soit transféré à Mattel Canada.

143. De même, dans le présent appel, les faits sur lesquels s'appuie JCC ne sont pas concluants pour ce qui est de l'existence d'une vente entre les fournisseurs asiatiques et JCC. Le facteur déterminant est plutôt le fait qu'il n'y a pas d'éléments de preuve suffisants indiquant que JCC a acheté les marchandises asiatiques directement des fournisseurs asiatiques, au prix indiqué sur leurs factures, et que les éléments de preuve indiquent plutôt que le titre relatif aux marchandises asiatiques a été transféré à la société mère américaine de JCC, JII, avant que les marchandises soient revendues à JCC.

144. JCC a également déposé un état de résultat afin de démontrer que le prix qu'elle a effectivement payé pour les marchandises asiatiques était le montant indiqué sur chacune des factures commerciales, majoré des frais de transport et des droits de douane75. Toutefois, le Tribunal ne peut conclure, sur la foi de ce document, que le prix effectivement payé par JCC pour les marchandises asiatiques est le montant indiqué sur chacune des factures commerciales, majoré des frais de transport et des droits de douane. En effet, ce document est un état de résultat consolidé produit par JII. En outre, cet état de résultat ne contient pas de renseignements précis sur les achats de marchandises asiatiques ni sur le coût de telles marchandises pour JCC.

145. Le Tribunal ne peut déterminer le prix réel payé par JCC pour les marchandises asiatiques sur la foi de ces éléments de preuve. Comme le soutient l'ASFC, un état de résultat consolidé se trouvant dans les livres et registres de JII, qui peut refléter le coût rendu de la société mère, à des fins d'analyse de la rentabilité des ventes aux clients canadiens par l'entremise de sa filiale canadienne n'a pas nécessairement de rapport avec le prix effectivement payé par JCC pour les marchandises. De plus, le Tribunal constate que des éléments de preuve indiquent que cet état de résultat reflète le coût des marchandises vendues de JII, et non celui de JCC76.

146. Le Tribunal souligne également le fait que M. Fitzgerald a déclaré que ce document n'a pas été fourni à l'ASFC au moment de la vérification. Le Tribunal considère que cela diminue le poids devant être accordé à ce document dans le cadre du présent appel, car l'ASFC a demandé à JCC à plusieurs reprises au cours de la vérification de fournir des éléments de preuve indiquant qu'elle avait payé les montants indiqués sur les factures des fournisseurs asiatiques pour acheter les marchandises asiatiques; l'ASFC n'a pris connaissance de ce document que dans le cadre du présent appel. Le fait que ce document n'ait pas été fourni plus tôt mine l'affirmation de JCC selon laquelle il reflète le prix d'achat réel payé par JCC pour les marchandises asiatiques.

147. Par conséquent, le Tribunal ne peut conclure, sur la foi des éléments de preuve déposés par JCC, qu'il y avait effectivement des contrats entre JCC et les divers fournisseurs asiatiques visant l'achat des marchandises asiatiques et que JCC a acquis le titre relatif aux marchandises directement de ces fournisseurs. Autrement dit, JCC ne s'est pas acquitté de son fardeau de prouver l'existence d'une vente pour exportation entre les fournisseurs asiatiques et JCC. Tout compte fait, les éléments de preuve appuient la position de l'ASFC selon laquelle il y avait deux contrats de vente, le premier entre JII et les fournisseurs asiatiques et le deuxième entre JII et JCC.

– Éléments de preuve selon lesquels JII a pris le titre relatifs aux marchandises asiatiques, puis les a revendues à JCC

148. JCC soutient qu'aucun élément de preuve versé au dossier n'indique que JII a pris, à un moment donné, le titre relatif aux marchandises asiatiques; le Tribunal est en désaccord.

149. Dans les faits, les éléments de preuve déposés par l'ASFC dans le cadre du présent appel sont conformes à l'opinion selon laquelle JII a acquis un droit de propriété sur les marchandises asiatiques pour ensuite les revendre à JCC. Ces éléments de preuve appuient donc la conclusion du Tribunal selon laquelle la vente pour exportation a été effectuée de JII à JCC.

150. À cet égard, M. Fitzgerald a produit des éléments de preuve incontestés selon lesquels JII a facturé à JCC pour les marchandises asiatiques un montant équivalant au prix de gros canadien moins 35 p. 100, et les livres internes de JCC ne contiennent aucun dossier ou document qui laisserait entendre qu'elle a payé, directement ou indirectement, aux fournisseurs situés en Asie les montants indiqués sur les factures qu'elle a déposées dans le cadre du présent appel. En fait, aucun élément de preuve n'indique que le montant payé pour ces marchandises est autre chose que le prix de gros canadien moins 35 p. 100.

151. M. Fitzgerald a expliqué qu'une société ne peut avoir qu'une seule série de livres comptables et ne peut consigner les transactions d'importation qu'à la valeur payée pour les marchandises importées. Chacune des transactions que l'ASFC a vérifiées, y compris les transactions pour l'acquisition des marchandises asiatiques, a été consignée par JCC au coût correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100 à titre de somme à payer à JII.

152. Compte tenu des éléments de preuve présentés par M. Fitzgerald, le Tribunal conclut que JII n'a pas assumé un rôle de facilitateur ou d'intermédiaire consistant simplement à acheter les marchandises asiatiques au nom de JCC pour ensuite transmettre leur coût à celle-ci. Au contraire, les éléments de preuve produits par M. Fitzgerald, qui découlent d'une analyse approfondie des livres et registres de JCC ainsi que de renseignements limités tirés des livres et registres de JII que cette dernière a accepté de divulguer au cours de la vérification, suggèrent fortement que JII a acheté les marchandises asiatiques pour son propre compte, puis les a revendues à JCC77.

153. Compte tenu de ces éléments de preuve, comme le soutient l'ASFC, le Tribunal conclut ce qui suit :

  • JII consigne toutes ses ventes à JCC dans un grand livre général et dans un journal mensuel. Les écritures mensuelles du journal dressent la liste de toutes les marchandises achetées par JCC au cours d'un mois donné, y compris les marchandises asiatiques.
  • Le prix facturé à JCC pour l'ensemble des marchandises achetées qui figure dans ces registres correspond au prix de gros canadien moins 35 p. 100.
  • Les écritures mensuelles du journal, qui, en substance, représentent une facture mensuelle adressée à JCC par JII, indiquent également le coût standard acquitté par JII pour introduire ces marchandises en Amérique du Nord, coût qui comprend le prix qu'elle a payé aux fournisseurs asiatiques pour leurs marchandises.
  • À peu d'exceptions près, le coût standard acquitté par JII est inférieur au prix qu'elle a facturé à JCC pour les marchandises78.
  • À l'audience, Mme Arbas a confirmé que JII consigne chaque mois le coût des ventes dans les livres de JCC par l'entremise des écritures mensuelles du journal et que ces dernières reflètent le prix de gros canadien moins 35 p. 100 facturé à JCC. Elle a aussi déclaré que, sur ce document, la colonne intitulée « Coût standard américain » [traduction] représente le prix payé par JII pour les marchandises asiatiques et que les autres colonnes intitulées « Coût canadien » [traduction] et « Prix de gros canadien moins 35 p. 100 » [traduction] représentent le montant retiré périodiquement du compte bancaire de JCC au cours d'une année donnée79. Le Tribunal constate que ces éléments de preuve sont conformes à la position de l'ASFC selon laquelle JII a acheté les marchandises asiatiques auprès des fournisseurs asiatiques à un prix donné et les a ensuite transférées à JCC à un prix différent et, presque toujours, sensiblement majoré.
  • Tous les montants figurant sur les factures mensuelles pour l'ensemble des achats que JCC a effectués au prix de gros canadien moins 35 p. 100 sont totalisés, puis inscrits dans son grand livre général aux fins des stocks et des comptes créditeurs intersociétés. Cela signifie que JCC a évalué ses stocks au prix de gros canadien moins 35 p. 100 et a inscrit une somme à payer à JII reflétant ce prix80.
  • JCC a versé à JII le prix de gros canadien moins 35 p. 100 pour l'ensemble des marchandises qu'elle a importées, y compris les marchandises asiatiques. Tout compte fait, les éléments de preuve présentés par l'ASFC convainquent le Tribunal que les dossiers bancaires de JCC indiquent qu'elle a effectué des versements périodiques à JII afin de s'acquitter du prix à lui payer qui figure dans son grand livre des comptes créditeurs intersociétés, et non d'un autre prix comme celui indiqué sur les factures des fournisseurs asiatiques81.
  • Le coût des marchandises vendues dont JCC s'est servie pour préparer ses états financiers de fin d'exercice était fondé sur les marchandises asiatiques achetées auprès de JII au prix de gros canadien moins 35 p. 100. Des éléments de preuve indiquent que pour l'exercice 2005 JCC a redressé son coût total des ventes, qui comprend le coût des marchandises asiatiques, afin de respecter ses obligations en matière de prix de transfert aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le montant de ce redressement n'a aucun lien avec le montant réel payé par JII pour acquitter la facture des marchandises asiatiques; il découle plutôt des pratiques comptables et budgétaires intersociétés.
  • En dépit de ce redressement, il n'en demeure pas moins que c'est le prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100 qui est inclus dans le coût des marchandises vendues que JCC a déclaré à l'Agence du revenu du Canada afin de calculer son revenu net82. En d'autres termes, le coût des marchandises vendues que JCC a déclaré à l'Agence du revenu du Canada afin de déterminer ses impôts à payer était fondé sur ses achats de marchandises auprès de JII au prix de gros canadien moins 35 p. 100.

154. Le Tribunal est d'avis que le simple fait que le coût des marchandises asiatiques ait fait l'objet d'un redressement aux fins de l'impôt sur le revenu fournit des éléments de preuve incontestables selon lesquels les marchandises asiatiques ont été vendues à JCC par JII.

155. D'ailleurs, l'établissement des prix de transfert aux fins de l'impôt sur le revenu se rapporte à la détermination des prix auxquels les services, les biens corporels ou les biens incorporels peuvent être échangés entre parties liées ou apparentées dans le cadre d'opérations transfrontalières. En vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, l'Agence du revenu du Canada exige que, aux fins de l'impôt, les conditions convenues par des parties liées ou apparentées dans le cadre de leurs relations commerciales soient celles auxquelles on pourrait s'attendre si les parties n'avaient aucun lien entre elles83. La question des prix de transfert ne se pose pas dans le cadre des transactions entre parties qui ne sont pas liées ou apparentées.

156. Par conséquent, si JCC avait acheté les marchandises asiatiques auprès de fabricants tiers non liés situés en Asie, comme elle le soutient, le redressement du coût de ces marchandises (c'est-à-dire leur prix de transfert) aux fins de l'impôt sur le revenu n'aurait pas été nécessaire et n'aurait eu aucun fondement juridique. Cependant, par l'application de la MTMN, une des méthodes reconnues pour établir un prix de transfert acceptable, à la clôture de chaque exercice pertinent, JCC a redressé, à la hausse ou à la baisse, aux fins de l'impôt sur le revenu, le coût attribué à l'ensemble des marchandises qu'elle a achetées à l'étranger pour la revente, y compris les marchandises asiatiques. Ainsi, les bénéfices qu'elle a déclarés à l'Agence du revenu du Canada s'inscrivaient dans une fourchette de marges bénéficiaires jugée acceptable (c'est-à-dire conforme au principe de pleine concurrence).

157. À l'audience, M. Hales a expliqué qu'un redressement, aux fins de l'impôt sur le revenu, du prix de transfert se rapportant au coût unique des marchandises vendues signifie que toutes les transactions déclarées ont eu lieu entre des parties liées. Selon son témoignage d'expert, les sociétés n'incluent habituellement pas de redressement du coût des marchandises acquises auprès de parties non liées dans leur redressement du prix de transfert se rapportant au coût des marchandises vendues indiqué dans leur déclaration de revenus. Cela s'explique par le fait que les transactions entre des parties non liées ne soulèvent pas la question du prix de transfert84.

158. Compte tenu des éléments de preuve, le Tribunal conclut qu'aux fins de l'impôt sur le revenu, JCC a traité ses achats de marchandises asiatiques comme des achats de biens corporels auprès d'une partie liée. Le Tribunal est d'accord avec l'argument avancé par l'ASFC selon lequel la seule façon de comprendre le comportement et les déclarations de revenus de JCC est de conclure que les marchandises asiatiques lui ont effectivement été vendues par une partie liée, à savoir JII85.

159. Si, comme le soutient JCC, le prix de vente de JII (c'est-à-dire le prix de gros canadien moins 35 p. 100) a servi de facteur pour déterminer les obligations de JCC et de JII en matière de prix de transfert aux fins de l'impôt sur le revenu, JII doit donc être le vendeur des marchandises asiatiques. En deux mots, JCC et JII n'auraient eu aucune obligation à respecter en matière de prix de transfert si les marchandises asiatiques avaient été vendues à JCC par des fournisseurs non liés.

160. Le Tribunal relève également l'argument quelque peu particulier de JCC selon lequel, somme toute, il ne faut tenir aucun compte de ses livres et registres comptables aux fins de l'évaluation en douane puisque ce sont les documents internes d'une société fermée qui visent à respecter ses obligations en matière d'impôt sur le revenu. Le Tribunal conclut que cet argument n'est pas fondé. Pour l'admettre, le Tribunal devrait conclure que les livres et registres de JCC ne reflètent pas la réalité commerciale, ce qui n'est pas crédible.

161. Le fait que le prix de gros canadien moins 35 p. 100 figure partout dans les livres et registres de JCC à titre de prix d'achat des marchandises asiatiques doit signifier que ce montant n'était rien de moins que le coût réel de ces marchandises pour JCC.

162. À cet égard, M. Hales a déclaré qu'avant qu'une société redresse le coût des marchandises vendues afin de respecter ses obligations en matière de prix de transfert aux termes des lois fiscales pertinentes, elle n'évalue pas son coût en utilisant un prix théorique. Il affirme que le point de départ de l'analyse consiste à examiner les prix réels payés et les flux de financement réels entre les parties liées86. Cela laisse entendre que même si les données figurant dans les livres et registres de JCC sont surtout utilisées aux fins de l'impôt sur le revenu, elles sont utiles et pertinentes pour déterminer le prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques conformément à l'article 48 de la Loi.

163. Comme le fait valoir de manière convaincante l'ASFC, une autre conclusion équivaudrait à dire que JCC a produit des déclarations de revenus erronées. Cela signifierait que, dans le cas des marchandises asiatiques, le coût réel des marchandises vendues était considérablement inférieur à la valeur que JCC a déclarée à l'Agence du revenu du Canada, ce qui représenterait des déclarations erronées. Le Tribunal juge qu'il est plus crédible et raisonnable de conclure que les renseignements indiqués dans les livres et registres de JCC et déclarés à l'Agence du revenu du Canada reflètent son coût réel et le prix réel qu'elle a payé à sa société mère pour les marchandises asiatiques.

164. En résumé, les livres et registres de JCC fournissent suffisamment d'éléments de preuve pour appuyer une conclusion selon laquelle elle a reçu le titre relatifs aux marchandises de JII, et non de fournisseurs tiers situés en Asie.

– Le prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques est déterminable

165. Le Tribunal conclut que les éléments de preuve susmentionnés établissent non seulement qu'il y a eu vente pour exportation entre JII et JCC (l'acheteur au Canada), mais démontrent également que le prix réellement payé ou à payer par JCC au moment de la vente pour exportation des marchandises asiatiques correspondait, dans tous les cas, au prix de gros canadien moins 35 p. 100. Par conséquent, aux termes du paragraphe 48(1) de la Loi, le prix payé par JCC pour les marchandises asiatiques est déterminable.

166. JCC avance trois arguments contre l'utilisation du prix de gros canadien moins 35 p. 100 à titre de prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques, c'est-à-dire leur valeur transactionnelle aux termes du paragraphe 48(1) de la Loi.

167. Premièrement, elle allègue que le prix de gros canadien moins 35 p. 100 inscrit dans ses livres et registres ne peut être employé comme valeur transactionnelle des marchandises asiatiques aux termes de l'article 48 de la Loi puisqu'il s'agit d'un prix de transfert établi aux fins de l'impôt sur le revenu, et non de l'évaluation en douane.

168. Contrairement à l'argument de JCC, rien dans la Loi n'empêche un prix de transfert établi aux fins de l'impôt sur le revenu de constituer la valeur transactionnelle des marchandises aux fins de l'évaluation en douane. Bien qu'il soit vrai qu'un prix de transfert acceptable aux fins de l'impôt sur le revenu ne conviendra pas nécessairement aux fins de l'évaluation en douane et que, par conséquent, l'ASFC n'est pas tenue d'accepter un prix de transfert déclaré à l'Agence du revenu du Canada à titre de valeur transactionnelle des marchandises, les éléments de preuve indiquent que, dans le cas de marchandises importées auprès d'une partie liée, l'ASFC acceptera généralement un prix payé ou à payer obtenu au moyen d'une des méthodes d'établissement des prix de transfert indiquées dans les principes de l'OCDE, comme dans le cadre du présent appel87.

169. En fait, M. Fitzgerald a indiqué qu'en règle générale l'ASFC utilisera le prix de transfert établi aux fins de l'impôt sur le revenu en tant que point de départ pour déterminer le prix payé ou à payer pour les marchandises importées, c'est-à-dire leur valeur transactionnelle. En fonction de cette valeur, elle effectuera ensuite les ajustements, par additions ou soustractions, exigés aux termes de l'article 48 de la Loi et qui sont pertinents dans les circonstances88. Même si cela peut entraîner des différences dans les valeurs aux fins de l'évaluation en douane et de l'impôt sur le revenu, cela ne laisse aucunement entendre qu'un prix de transfert établi aux fins de l'impôt sur le revenu n'est pas acceptable aux fins de l'évaluation en douane.

170. Deuxièmement, JCC soutient que ce prix est fondé sur une méthode déductive et ne peut donc constituer le fondement d'une valeur transactionnelle aux termes du paragraphe 48(1) de la Loi. Toutefois, JCC ne cite aucun précédent qui laisserait entendre que le prix payé ou à payer pour les marchandises aux termes du paragraphe 48(1) ne peut être fondé sur une méthode déductive. Par conséquent, le Tribunal ne peut conclure que les dispositions de la Loi empêchent un prix déterminable selon une méthode déductive de constituer la valeur transactionnelle des marchandises importées. La condition pertinente prévue au paragraphe 48(1) consiste simplement à savoir si le prix payé ou à payer « est déterminable ». Dans la mesure où tous les versements effectués ou à effectuer par l'acheteur directement ou indirectement au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises, sont déterminables, comme dans le cadre du présent appel, le Tribunal conclut que cette condition est respectée.

171. Troisièmement, JCC renvoie à la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans Deputy, Canada (Minister of National Revenue), Customs and Excise c. Toyota Canada Inc.89 et soutient que le paragraphe 48(4) de la Loi exige que le prix payé ou à payer pour les marchandises importées soit déterminable au moment de leur introduction au Canada, c'est-à-dire au moment de leur entrée ou de leur importation.

172. Par conséquent, elle soutient que puisque le prix de gros canadien moins 35 p. 100 peut être redressé aux fins de l'impôt sur le revenu à la clôture de chaque exercice et peut donc être modifié, il ne peut représenter un prix final ou un prix déterminable au moment de la vente pour exportation au Canada des marchandises asiatiques.

173. De l'avis du Tribunal, JCC interprète incorrectement la décision de la Cour d'appel fédérale dans Toyota comme signifiant que, dans la mesure où le prix de transfert des marchandises vendues pour exportation peut être révisé ou modifié après l'importation, le prix payé ou à payer pour les marchandises importées n'est donc plus déterminable au moment de l'importation; ce n'est pas le cas.

174. Dans Toyota, l'importateur, Toyota Canada Inc. (TCI), avait déclaré un prix provisoire comme prix payé ou à payer pour les véhicules importés. TCI a négocié le prix d'achat final réel des véhicules après leur importation au Canada, dans certains cas deux mois après celle-ci. Pour refléter l'ajustement du prix provisoire à la suite de la négociation du prix final, TCI a demandé un réexamen de la valeur transactionnelle des véhicules importés. Dans les cas où TCI a demandé une réduction de la valeur transactionnelle afin de refléter un ajustement à la baisse du prix payé ou à payer déclaré initialement, le sous-ministre du Revenu national a décidé de ne tenir aucun compte de ces ajustements à la baisse pour déterminer la valeur transactionnelle, conformément à l'alinéa 48(5)c) de la Loi.

175. Le Tribunal a admis l'appel de TCI. De l'avis du Tribunal, le prix de vente final négocié reflétait le prix réel payé ou à payer par TCI pour les véhicules aux termes de l'article 48 de la Loi.

176. Bien que la Cour d'appel fédérale ait admis l'appel du sous-ministre et annulé la décision du Tribunal, ce faisant, elle n'a pas décidé que la méthode de la valeur transactionnelle ne s'appliquait plus en raison du fait que l'importateur négociait le prix d'achat final réel des véhicules importés après leur importation.

177. En admettant l'appel de TCI, la Cour d'appel fédérale a mentionné que le Tribunal avait omis de tenir compte des exigences temporelles prévues à l'article 48 de la Loi. Par conséquent, la Cour a renvoyé l'affaire au Tribunal afin qu'il détermine si les dispositions en matière de prix de l'entente entre TCI et l'exportateur permettaient de déterminer le prix payé ou à payer pour les marchandises au moment de l'importation.

178. À la nouvelle audience de l'appel aux termes du paragraphe 68(2) de la Loi, le Tribunal n'a toutefois pas examiné le bien-fondé de la question de savoir si la méthode d'établissement des prix de TCI permettait de déterminer le prix payé ou à payer pour les véhicules au moment de l'importation. Cela s'explique par le fait que les parties avaient informé le Tribunal qu'elles avaient convenu d'un règlement afférent à l'appel. Elles demandaient au Tribunal de rendre une décision pour entériner l'entente selon laquelle il était déclaré que l'appel interjeté par TCI devait être rejeté et que les décisions du sous-ministre du Revenu national devaient être maintenues. Sur consentement des parties, le Tribunal a donc rejeté l'appel90.

179. Cela signifie que ni la Cour d'appel fédérale ni le Tribunal n'a conclu que l'article 48 de la Loi ne s'appliquait pas aux faits en cause dans Toyota.

180. Par conséquent, la décision rendue dans Toyota n'appuie pas l'opinion selon laquelle, dans la mesure où le prix d'achat des marchandises importées peut changer après leur importation, leur valeur en douane ne peut plus constituer leur valeur transactionnelle et doit être appréciée au moyen d'une autre méthode d'appréciation, comme le prévoit le paragraphe 47(2) de la Loi.

181. Même lorsque le prix d'achat final réel ne peut être déterminé qu'après l'importation, la Cour d'appel fédérale n'a pas exclu la possibilité que le prix payé ou à payer pour les marchandises importées soit encore déterminable au moment de l'importation des marchandises.

182. Quoi qu'il en soit, le Tribunal conclut que les faits en cause dans le présent appel sont différents de ceux dans Toyota. Dans cette affaire, il était possible de soutenir que les parties à la vente pour exportation n'avaient pas conclu d'entente sur le prix final des véhicules importés au moment de leur vente pour exportation au Canada.

183. En revanche, dans le cadre du présent appel, les éléments de preuve indiquent que JII et JCC ont convenu d'un prix pour les marchandises asiatiques (c'est-à-dire le prix de gros canadien moins 35 p. 100) avant leur importation. Il est également évident que cette formule d'établissement des prix de transfert, qui prévoit des redressements possibles des prix après l'importation, avait été établie avant l'importation des marchandises. JII et JCC n'ont pas négocié ou renégocié le prix d'achat réel des marchandises asiatiques après leur importation au Canada. Le prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100 ne représente pas un prix théorique ou provisoire.

184. Le Tribunal conclut donc que les dispositions en matière de prix de la convention de vente et de distribution conclue entre JII et JCC permettaient de déterminer le prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques au moment de l'importation. En outre, comme indiqué précédemment, les éléments de preuve indiquent que JCC s'est toujours vu facturer par JII le prix de gros canadien moins 35 p. 100 pour les marchandises asiatiques, et qu'elle le lui a effectivement payé. Par conséquent, il ne peut être dit que le prix payé ou à payer par JCC pour les marchandises asiatiques n'était pas déterminable au moment de leur importation.

185. Pour ces motifs, selon les faits en cause dans le présent appel et conformément aux principes énoncés par la Cour d'appel fédérale dans Toyota, le Tribunal conclut que les dispositions en matière de prix de la convention conclue entre JII et JCC permettaient de déterminer le prix payé ou à payer pour les marchandises au moment de l'importation.

186. Le Tribunal constate également que, contrairement à l'argument avancé par JCC, le simple fait que le prix de transfert convenu ait été redressé après l'importation ne signifie pas que le prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques n'était pas déterminable au moment de l'importation. Qu'un tel redressement ait été effectué ou non, il n'en demeure pas moins qu'au moment de la vente pour exportation des marchandises asiatiques (c'est-à-dire au moment de l'importation), le prix payé ou à payer pour ces marchandises était toujours le prix de gros canadien de JCC moins 35 p. 100.

187. Sur le plan juridique, la Loi prévoit qu'un prix payé ou à payer pour des marchandises importées qui est déterminable au moment de leur entrée peut être modifié après leur importation sans avoir pour effet de rendre inapplicable l'article 48. En d'autres termes, le simple fait que le prix payé ou à payer pour les marchandises puisse être modifié après leur importation ne signifie pas nécessairement qu'il est indéterminable au moment de l'importation. Cela est clairement énoncé à l'alinéa 48(5)c), qui prévoit que le prix payé ou à payer doit être ajusté « compte non tenu des remises ou réductions du prix payé ou à payer effectuées après l'importation des marchandises ».

188. En raison de cette disposition, le prix payé ou à payer pour les marchandises au moment de leur vente pour exportation aux termes du paragraphe 48(4) de la Loi ne correspond pas nécessairement au prix final réel qu'un importateur paie en fin de compte. Autrement dit, si le prix payé ou à payer pour les marchandises lorsqu'elles sont vendues pour exportation est modifié après leur importation, la question pertinente est celle de déterminer si le prix payé ou à payer (c'est-à-dire la valeur transactionnelle des marchandises) doit être ajusté afin de refléter ces changements de prix ultérieurs à l'importation.

189. Sur cette question, le Tribunal constate que les éléments de preuve indiquent que l'ASFC n'a pas considéré les redressements à la baisse du prix de transfert que JCC a effectués à la clôture de l'exercice dans le but d'atteindre ses objectifs d'établissement du prix de transfert aux fins de l'impôt sur le revenu comme des remises ou réductions au sens de l'alinéa 48(5)c) de la Loi.

190. En fait, elle a tenu compte de ces redressements pour déterminer la valeur transactionnelle des marchandises en cause aux termes de l'article 48 de la Loi. Cela a eu pour effet de réduire le prix payé ou à payer et, par conséquent, la valeur en douane des marchandises asiatiques dans certains cas. À l'audience, M. Fitzgerald a expliqué que cette décision était conforme à la pratique normalisée de l'ASFC de permettre ce type de redressements de fin d'exercice, puisqu'ils influent sur la valeur qu'un vendeur et un acheteur accordent aux marchandises importées91.

191. En règle générale, l'ASFC permet aux importateurs de corriger eux-mêmes leur déclaration de la valeur en douane à la clôture de l'exercice si, en raison du redressement du prix de transfert, ils se retrouvent à payer moins pour les marchandises importées qu'ils ont achetées auprès d'une partie liée que le prix de transfert qu'ils ont déclaré au moment de l'importation. M. Fitzgerald a également déclaré que l'ASFC s'attend à ce que les importateurs effectuent eux-mêmes des rajustements aux termes de l'article 32.2 de la Loi si, en raison du redressement du prix de transfert, ils se retrouvent à payer plus pour les marchandises achetées auprès d'une partie liée que le montant qu'ils ont déclaré au moment de l'importation.

192. Le Tribunal conclut que cette pratique est conforme aux exigences de l'article 48 de la Loi. D'ailleurs, les ajustements à la baisse du prix payé ou à payer pour les marchandises importées qui sont effectués après l'importation ne constituent pas nécessairement des remises sur le prix payé ou à payer pour les marchandises importées au sens de l'alinéa 48(5)c) de la Loi92.

193. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que, dans les circonstances en l'espèce, le redressement du prix de transfert effectué par JCC ne signifie pas que le prix de vente correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100 ne constitue pas le prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques vendues pour exportation ou ne peut plus être utilisé comme fondement pour établir la valeur transactionnelle des marchandises aux termes de l'article 48 de la Loi comme le soutient JCC.

194. Par conséquent, le Tribunal conclut qu'aucun fondement juridique ou factuel n'interfère avec la décision de l'ASFC d'utiliser le prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100 comme prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques vendues pour exportation et de permettre les ajustements appropriés de cette valeur transactionnelle conformément à sa politique, qui consiste à autoriser un redressement du prix de transfert lorsqu'il est effectué selon une méthode d'établissement du prix de transfert acceptée.

– Le lien qui unit JII et JCC n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour les marchandises

195. L'alinéa 48(1)d) de la Loi prévoit que lorsque l'acheteur et le vendeur des marchandises vendues pour exportation sont liés, la méthode de la valeur transactionnelle employée pour déterminer la valeur en douane des marchandises importées ne peut être utilisée que si le lien qui les unit n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour les marchandises. Étant donné que JII et JCC sont des personnes liées au sens du paragraphe 45(3) de la Loi, la valeur en douane des marchandises asiatiques ne peut être déterminée d'après leur valeur transactionnelle que si le Tribunal est convaincu que le lien qui les unit n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour ces marchandises.

196. En ce qui concerne cette question, le Tribunal constate que JCC n'a pas déposé d'exposé ou d'éléments de preuve afin de le convaincre, s'il est conclu que JII a vendu les marchandises asiatiques à JCC au prix de gros canadien moins 35 p. 100, que le fait que JII et JCC soient des parties liées a influé sur le prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques.

197. Autrement dit, JCC ne soutient pas que, pour ce motif, la valeur en douane des marchandises asiatiques ne peut être déterminée d'après leur valeur transactionnelle aux termes de l'article 48 de la Loi. Par conséquent, les allégations de l'ASFC selon lesquelles le lien qui unit JCC et JII n'a pas influé sur le prix que JCC a payé à JII pour les marchandises en cause, y compris les marchandises asiatiques, n'ont pas été réfutées.

198. Le Tribunal constate également que des éléments de preuve incontestés indiquent que JCC a acheté les marchandises asiatiques auprès de JII selon des conditions ayant pour objet l'application d'une des méthodes d'établissement du prix de transfert qui respecte le principe de pleine concurrence recommandé par l'OCDE, à savoir la MTMN. Il s'agit de l'une des méthodes reconnues pour déterminer le prix de transfert auquel on aurait raisonnablement pu s'attendre dans des circonstances semblables si le vendeur et l'acheteur n'avaient pas été liés.

199. Des éléments de preuve incontestés indiquent également que l'Agence du revenu du Canada juge acceptable la méthode d'établissement du prix de transfert employée par JII et par JCC, bien qu'elle prévoit la possibilité d'effectuer un redressement en fin d'exercice du prix de transfert afin de maintenir la rentabilité de JCC dans une fourchette de pourcentages appropriée. Cela indique que, du point de vue de l'impôt sur le revenu, le prix de transfert relatif à toutes les transactions de vente de biens corporels, y compris la vente des marchandises asiatiques, effectuées entre JII et JCC a été jugé comme le reflet de la situation qui aurait régné si les parties n'avaient pas été liées.

200. Comme indiqué précédemment, il ressort également des éléments de preuve que l'ASFC accepte généralement aux fins de l'évaluation en douane, aux termes de l'article 48 de la Loi, un prix payé ou à payer obtenu à partir d'une des méthodes recommandées par l'OCDE, comme en l'espèce. Tous ces faits tendent à démontrer que le lien qui unit JII et JCC n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour les marchandises.

201. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal admet les arguments de l'ASFC selon lesquels le lien qui unit JII et JCC n'a pas influé sur le prix que JCC a payé à JII pour les marchandises asiatiques et que les exigences de l'alinéa 48(1)d) de la Loi sont satisfaites93.

202. Pour tous les motifs susmentionnés, le Tribunal conclut que l'ASFC a correctement déterminé que la valeur en douane des marchandises asiatiques peut être appréciée selon la méthode de la valeur transactionnelle. Conformément aux conditions énoncées à l'article 48 de la Loi, le Tribunal conclut que 1) les marchandises asiatiques ont été vendues pour exportation à JCC par JII 2) à un prix déterminable et que 3) le lien qui unit JII et JCC n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour ces marchandises. Le Tribunal conclut également que la valeur en douane des marchandises asiatiques était fondée sur le prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100 indiqué à l'alinéa 5(b) de la convention de vente et de distribution, telle que modifiée par les parties.

Valeur en douane des marchandises caribéennes

203. Dans le cas des marchandises caribéennes, la méthode d'appréciation qu'il convient d'utiliser est une question contestée.

Position des parties

204. JCC soutient que les conditions énoncées à l'article 48 de la Loi ne sont pas satisfaites en ce qui a trait aux transactions d'achat des marchandises caribéennes. Elle affirme que la méthode de la valeur transactionnelle ne peut être employée puisque JCC a acheté les marchandises caribéennes auprès de parties liées (c'est-à-dire Jockey Honduras, Jockey Jamaica et Jockey Costa Rica) et que ce lien a influé sur le prix. Elle soutient également que le prix payé ou à payer ne peut être déterminé étant donné que ces achats sont réglés en débitant et en créditant plusieurs comptes intersociétés.

205. Par conséquent, JCC soutient que la valeur en douane des marchandises caribéennes doit être déterminée selon une autre méthode prévue dans la Loi. À cet égard, elle affirme que la valeur en douane ne peut être déterminée au moyen des deux premières bases secondaires de l'évaluation énoncées aux alinéas 47(2)a) et 47(2)b) de la Loi puisque les conditions d'utilisation de ces méthodes ne sont pas satisfaites. Selon JCC, les exigences de la méthode de la valeur reconstituée mentionnée à l'alinéa 47(2)d) et expliquée en détail à l'article 52 de la Loi sont satisfaites et les données pour vérifier la valeur en douane qu'elle a déclarée en se fondant sur cette méthode sont facilement accessibles.

206. JCC affirme également avoir utilisé la valeur reconstituée des marchandises caribéennes établie aux termes de l'article 52 de la Loi plutôt que leur valeur de référence déterminée aux termes de l'article 51, ce qui, selon elle, était permis dans les circonstances aux termes du paragraphe 47(3). Le paragraphe 47(3) prévoit que, nonobstant l'exigence selon laquelle les bases secondaires d'évaluation doivent être prises en considération dans l'ordre indiqué au paragraphe 47(2), « [...] à la demande écrite de l'importateur des marchandises à apprécier présentée avant le début de l'appréciation, l'ordre d'applicabilité des valeurs [de référence et reconstituées] est inversé ». JCC affirme avoir présenté une telle demande avant l'appréciation de la valeur en douane des marchandises caribéennes.

207. L'ASFC soutient que la méthode de la valeur transactionnelle s'applique à l'appréciation de la valeur en douane des marchandises caribéennes. Elle affirme que JCC n'a pas établi que les marchandises caribéennes lui ont effectivement été vendues pour exportation par ses sociétés soeurs situées au Honduras, en Jamaïque et au Costa Rica. Elle soutient qu'il ressort clairement des éléments de preuve que, tout comme les marchandises asiatiques, les marchandises caribéennes ont été vendues à JCC par JII au prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100.

208. L'ASFC renvoie aux renseignements consignés dans les livres comptables et les registres bancaires de JCC, qui, une fois de plus, révèlent qu'elle a payé à JII le prix de gros canadien moins 35 p. 100 pour les marchandises caribéennes et soutient que, compte tenu des exigences en matière de documents prévues à l'article 40 de la Loi, ces renseignements doivent refléter la réalité commerciale des transactions auxquelles JCC était partie. L'ASFC allègue que les documents internes de JCC ne contiennent aucun élément de preuve qui laisserait entendre que, en fait, elle a acheté les marchandises caribéennes auprès d'un autre vendeur que JII.

209. Pour les mêmes motifs que ceux invoqués relativement aux transactions d'achat des marchandises asiatiques, l'ASFC soutient que le lien qui unit JII et JCC n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour les marchandises caribéennes. Par conséquent, puisque toutes les conditions pertinentes prévues à l'article 48 de la Loi sont satisfaites, l'ASFC maintient avoir correctement déterminé la valeur en douane des marchandises caribéennes d'après leur valeur transactionnelle. Étant donné que la valeur en douane des marchandises caribéennes est déterminable selon la base principale de l'appréciation, l'ASFC soutient qu'il n'est pas nécessaire, dans les circonstances du présent appel, de tenir compte des bases secondaires de l'évaluation, y compris la valeur reconstituée des marchandises caribéennes.

Évaluation du Tribunal

210. Pour en appeler des décisions de l'ASFC concernant la valeur en douane des marchandises caribéennes et pour convaincre le Tribunal que cette valeur correspond à leur valeur reconstituée conformément à l'article 52 de la Loi, il incombe à JCC de prouver que ni la méthode de la valeur transactionnelle prévue à l'article 48 ni aucune des bases secondaires de l'évaluation mentionnées aux articles 49 à 51 ne s'applique. Pour les motifs suivants, le Tribunal conclut que JCC ne s'est pas acquittée de ce fardeau.

– Les éléments de preuve prépondérants indiquent que JCC a acheté les marchandises caribéennes auprès de JII

211. La position adoptée par JCC selon laquelle la valeur en douane des marchandises caribéennes ne peut être appréciée d'après leur valeur transactionnelle conformément à l'article 48 de la Loi est fondée sur l'allégation selon laquelle ces marchandises ont été vendues pour exportation par des personnes liées, à savoir d'autres filiales de JII situées dans la région des Caraïbes.

212. JCC est d'avis que le lien qui l'unit à ces sociétés affiliées a influé sur le prix d'achat. Cependant, des éléments de preuve convaincants versés au dossier indiquent que, dans les faits, tout comme les marchandises asiatiques, les marchandises caribéennes ont été vendues pour exportation à JCC par JII au prix de transfert convenu correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100.

213. D'ailleurs, aux fins de l'appréciation de la valeur en douane, les transactions d'achat des marchandises asiatiques et caribéennes sont identiques sur tous les points importants. Il n'existe aucune convention d'achat et de vente entre JCC et les fournisseurs liés situés au Honduras, en Jamaïque ou au Costa Rica. En revanche, la convention de vente et de distribution conclue entre JII et JCC prévoit clairement que JII vendrait à JCC des vêtements portant la marque Jockey, fabriqués par JII et pour elle, quel que soit leur pays d'origine, et pour lesquels JCC lui paierait un prix déterminé.

214. Le Tribunal a déjà conclu que les éléments de preuve présentés par JCC en vue de le convaincre que la convention de vente et de distribution ne s'applique qu'aux marchandises originaires des États-Unis que JII lui a vendues sont inadmissibles et ne sont pas particulièrement crédibles. Le Tribunal est d'avis que, tout compte fait, les éléments de preuve dont il est saisi indiquent que JII a vendu les marchandises caribéennes à JCC conformément aux conditions de la convention de vente et de distribution.

215. Dans Jockey, le juge Mandamin a conclu que, en fait, « quelque temps avant l'an 2000, JCC a commencé à acheter des marchandises de JII qui étaient fabriquées par ses filiales en Jamaïque, au Honduras et au Costa Rica. JCC payait JII pour ces marchandises caribéennes [...] » [nos italiques]94.

216. De surcroît, les renseignements présentés dans l'étude sur les prix de transfert menée par un cabinet comptable afin d'analyser les transactions effectuées entre JII et JCC appuient la conclusion selon laquelle la structure des activités de JII et des transactions d'importation des marchandises caribéennes est la suivante : les filiales de JII assemblent les marchandises dans la région des Caraïbes, puis les vendent à JII, qui les revend ensuite à JCC aux fins de la distribution au Canada95. À l'audience, Mme Arbas n'a pas présenté d'éléments de preuve convaincants du contraire96.

217. Au fond, aucun élément de preuve tangible n'indique que le titre relatif aux marchandises caribéennes a été transféré à JCC directement des fabricants caribéens. La plupart des factures commerciales que JCC a présentées relativement aux transactions d'achat des marchandises caribéennes indiquent simplement qu'elle en est le destinataire97. Ces renseignements ne suffisent pas à convaincre le Tribunal que les marchandises caribéennes ont été vendues à JCC par les fabricants caribéens.

218. En outre, JCC n'a déposé aucun élément de preuve concernant le paiement de ces factures. À l'audience, ses témoins n'ont pas abordé la question de la chaîne de paiement concernant les transactions d'achat des marchandises caribéennes. Comme indiqué précédemment, en l'absence de preuve de paiement d'un prix convenu entre l'acheteur et le vendeur, le Tribunal ne peut conclure qu'une convention d'achat et de vente a été conclue entre JCC et des fabricants à l'étranger.

219. En ce qui concerne les arguments avancés par JCC selon lesquels elle a assumé toutes les responsabilités liées aux risques de perte des marchandises caribéennes et de dommage à celles-ci pendant l'expédition et le transport au Canada, qu'elle a obtenu le titre relatif aux marchandises dès leur expédition à partir du port d'exportation et que JII a acheté les marchandises en son nom dans le cadre des services fournis en vertu de la convention de gestion, le Tribunal a déjà rejeté ces allégations lors de la détermination de la valeur en douane des marchandises asiatiques. La conclusion et le raisonnement sous-jacent du Tribunal à cet égard s'appliquent également aux transactions d'achat des marchandises caribéennes. Ces allégations et les éléments de preuve connexes sont tout aussi insuffisants pour établir que JCC a acheté les marchandises caribéennes directement auprès de fournisseurs situés au Honduras, en Jamaïque et au Costa Rica.

220. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal est également d'avis que l'état de résultat déposé par JCC afin, prétendument, d'établir que le coût rendu des marchandises caribéennes qu'elle a assumé correspondait à leur valeur reconstituée plus le fret et les droits ne suffit pas pour démontrer l'existence d'une vente entre JCC et les fabricants caribéens. Ce document ne fournit pas de renseignements précis sur les achats de marchandises caribéennes ou sur le coût de telles marchandises assumé par JCC.

221. Somme toute, JCC n'a pas fourni suffisamment d'éléments de preuve pour convaincre le Tribunal qu'elle a conclu des conventions d'achat et de vente des marchandises caribéennes avec les trois filiales de JII situées en Jamaïque, au Honduras et au Costa Rica et qu'elle a reçu directement de ces fournisseurs le titre relatif aux marchandises.

222. Tout compte fait, le Tribunal conclut que JCC n'a pas justifié son allégation selon laquelle l'ASFC a commis une erreur en concluant qu'il y a plutôt eu vente pour exportation entre JII (le vendeur) et JCC (l'acheteur au Canada) en vertu d'une convention intersociétés, à un prix de transfert correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100. Par conséquent, le Tribunal ne peut admettre l'argument de JCC selon lequel elle a acheté les marchandises caribéennes directement auprès de fournisseurs liés à l'étranger.

223. En outre, comme il l'a fait pour les transactions d'achat des marchandises asiatiques de JCC, M. Fitzgerald a présenté des éléments de preuve incontestés selon lesquels toutes les transactions d'achat des marchandises caribéennes ont été inscrites dans les livres et registres de JCC en tant que ventes de JII à JCC au prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 10098. Les éléments de preuve que M. Fitzgerald a fournis à l'audience et les éléments de preuve documentaire à l'appui de ses déclarations sont résumés à l'annexe A du mémoire de l'ASFC99.

224. Compte tenu de ces éléments de preuve, les conclusions du Tribunal indiquées aux paragraphes 152 et 153 ci-dessus s'appliquent également aux achats des marchandises caribéennes effectués par JCC.

225. En résumé :

  • JII facture JCC pour toutes les marchandises qu'elle a achetées au cours d'un mois donné, y compris les marchandises caribéennes. Comme indiqué précédemment, JII consigne toutes ses ventes à JCC dans un grand livre général et dans un journal mensuel. Pour chaque mois, les premières pages correspondent aux écritures du grand livre général et les pages suivantes sont les factures mensuelles à l'appui que JII fournit à JCC, qui énumèrent toutes les marchandises que JCC a achetées au cours d'un mois donné, y compris les marchandises caribéennes100.
  • Le prix facturé à JCC pour les marchandises caribéennes, indiqué dans ses livres comptables, y compris dans son grand livre général et dans son journal mensuel, est le prix de gros canadien moins 35 p. 100.
  • JCC a évalué la totalité de ses stocks, y compris ses stocks de marchandises caribéennes, au prix de gros canadien moins 35 p. 100 et a indiqué une somme reflétant ce prix à payer à JII. Les comptes relatifs aux stocks et les comptes créditeurs intersociétés de JCC en font état.
  • JCC a versé à JII le prix de gros canadien moins 35 p. 100 pour l'ensemble des marchandises qu'elle a importées, y compris les marchandises caribéennes, et non un autre prix comme celui indiqué sur les factures des fournisseurs caribéens. Tout compte fait, le Tribunal a été convaincu par les éléments de preuve présentés par M. Fitzgerald que les dossiers bancaires de JCC indiquent qu'elle a effectué des versements périodiques à JII afin de s'acquitter du prix à lui payer qui figure dans ses comptes créditeurs intersociétés, et non d'un autre prix comme celui indiqué sur les factures des fournisseurs caribéens101.
  • Le coût des marchandises vendues dont JCC s'est servie pour préparer ses états financiers de fin d'exercice était fondé sur les marchandises caribéennes achetées auprès de JII au prix de gros canadien moins 35 p. 100. Selon les éléments de preuve, pour l'exercice 2005, JCC a redressé son coût total des ventes, qui comprend le coût des marchandises caribéennes, afin de respecter ses obligations en matière de prix de transfert aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu.
  • En dépit du redressement du prix de transfert en fin d'exercice, c'est le prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100 payé pour les marchandises caribéennes qui est inclus dans le coût des marchandises vendues que JCC a déclaré à l'Agence du revenu du Canada aux fins du calcul de son revenu net102.

226. Ces éléments de preuve appuient également une conclusion selon laquelle le titre relatif aux marchandises caribéennes a été transféré à JII avant la revente de ces marchandises à JCC. En outre, cela confirme que JII a vendu les marchandises caribéennes à JCC conformément aux conditions de la convention de vente et de distribution telle que modifiée.

227. En moyenne, l'écart entre la valeur reconstituée présumée des marchandises caribéennes, soit la valeur que JCC a déclarée au moment de l'importation, et le prix facturé par JII indiqué dans les livres et registres de JCC était de 100 p. 100. Par conséquent, comme dans le cas des marchandises asiatiques, les déclarations de la valeur en douane produites par JCC attribuaient aux marchandises caribéennes une valeur considérablement inférieure au prix que sa société mère a facturé pour ces marchandises et qui, selon la prépondérance de la preuve, a été payé par JCC.

228. Dans le cas des marchandises caribéennes, les déclarations de revenus que JCC a présentées à l'Agence du revenu du Canada fournissent également des éléments de preuve convaincants selon lesquels les parties aux transactions pertinentes étaient en fait JII et JCC, et non JCC et les fournisseurs caribéens.

229. L'Agence du revenu du Canada exige d'un contribuable qu'il déclare, sur un formulaire distinct intitulé « feuillet T106 », ses transactions d'achat de biens corporels auprès de chaque non résidant avec lequel il est lié ou apparenté. JCC aurait donc à produire une telle déclaration si elle achetait les marchandises caribéennes directement auprès de Jockey Honduras, de Jockey Jamaica et de Jockey Costa Rica; elle devrait remplir un feuillet T106 distinct à l'égard de chacune de ces parties liées.

230. À l'audience, M. Hales a expliqué qu'un feuillet T106 distinct est obligatoire pour chaque partie liée avec laquelle un contribuable traite et, selon son opinion d'expert, si JCC achetait de façon indépendante des marchandises auprès de ses trois sociétés soeurs situées dans la région des Caraïbes, elle devait alors remplir un feuillet T106 distinct pour chacune de ces parties liées103.

231. Cependant, les éléments de preuve indiquent que pour 2005, l'année pour laquelle l'ASFC a vérifié les transactions d'importation, JCC n'a rempli qu'un feuillet T106, qui indique qu'elle a acheté des marchandises auprès d'une seule partie liée, à savoir JII104. Aucun renseignement versé au dossier n'indique que la situation a été différente en 2006, 2007 ou 2008. Cela porte fortement à croire que JCC a acheté, du moins en 2005 et, en l'absence d'éléments de preuve du contraire, vraisemblablement tout au long de la période pertinente, des biens corporels auprès d'une seule partie liée, à savoir sa société mère.

232. Une analyse approfondie de l'ensemble des transactions que JCC a effectuées en 2005 a, en fait, été présentée au Tribunal lors de l'audience. M. Fitzgerald a expliqué, de manière très détaillée et méthodique, comment il a réussi à retrouver les transactions d'achat des marchandises caribéennes effectuées par JCC dans ses livres et registres et à déterminer le coût de ces marchandises pour cette période donnée. D'ailleurs, la valeur obtenue à la suite de cet exercice est celle qui a, en fin de compte, été incluse dans la déclaration de revenus de JCC. Les éléments de preuve déposés par M. Fitzgerald confirment que les transactions d'importation effectuées pour le compte de JCC ont toutes transité par JII et qu'aucune d'entre elles n'a été effectuée directement avec les fournisseurs caribéens.

233. Une autre interprétation de ces éléments de preuve signifierait que, du moins en 2005, JCC aurait produit une déclaration de revenus erronée, ce dont le Tribunal doute. Compte tenu des faits qui précèdent, une conclusion plus raisonnable peut être tirée de ces éléments de preuve, c'est-à-dire que JCC a, en fait, acheté les marchandises caribéennes auprès de JII.

234. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises caribéennes, comme pour les marchandises asiatiques, ont été vendues pour exportation à JCC par JII au prix de transfert correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100.

– La valeur en douane des marchandises caribéennes peut être déterminée d'après la valeur transactionnelle conformément aux conditions énoncées à l'article 48 de la Loi

235. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que l'ASFC a correctement déterminé que la valeur en douane des marchandises caribéennes peut être déterminée au moyen de la méthode de la valeur transactionnelle, puisque toutes les conditions pertinentes pour l'application de l'article 48 de la Loi sont satisfaites.

236. À cet égard, selon l'analyse et les éléments de preuve qui précèdent, le Tribunal a déjà conclu que, conformément aux conditions énoncées à l'article 48 de la Loi, les marchandises caribéennes 1) ont été vendues pour exportation à JCC par JII 2) à un prix déterminable (c'est-à-dire au prix de gros canadien moins 35 p. 100).

237. JCC invoque les mêmes arguments que ceux qu'elle a avancés dans le cas des marchandises asiatiques contre l'utilisation du prix d'achat correspondant au prix de gros canadien moins 35 p. 100 comme prix payé ou à payer pour les marchandises caribéennes. Le Tribunal a déjà examiné ces arguments et déterminé qu'ils n'étaient pas convaincants. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut donc que le prix payé ou à payer pour les marchandises caribéennes était déterminable au moment de l'importation.

238. En ce qui concerne la question de savoir si le fait que JII et JCC soient des personnes liées rend inapplicable l'article 48 de la Loi quant à l'appréciation de la valeur en douane des marchandises caribéennes, le Tribunal a également déjà déterminé que le lien qui unit JII et JCC n'a pas influé sur le prix payé ou à payer pour les marchandises asiatiques. De l'avis du Tribunal, cette conclusion et le raisonnement sous-jacent s'appliquent, mutatis mutandis, aux transactions effectuées entre JII et JCC pour l'importation des marchandises caribéennes.

239. Aucun élément de preuve versé au dossier ne pourrait amener le Tribunal à une conclusion différente en ce qui a trait aux marchandises caribéennes. Une fois de plus, il importe de souligner que le prix de transfert convenu par JII et par JCC, que l'Agence du revenu du Canada a accepté, découle d'une méthode d'établissement des prix de transfert reconnue par l'OCDE comme respectant le principe de pleine concurrence. De plus, cette méthodologie s'applique à tous les achats de biens corporels effectués par JCC auprès de sa société mère, y compris les marchandises asiatiques et caribéennes.

240. Par conséquent, puisqu'il existe une valeur transactionnelle qui peut être déterminée et qui satisfait à l'exigence stipulée à l'alinéa 48(1)d) concernant les ventes pour exportation entre personnes liées, conformément aux exigences des articles 47 et 48 de la Loi, le Tribunal conclut que l'ASFC a correctement apprécié la valeur en douane des marchandises caribéennes en utilisant la base principale d'appréciation prévue par la Loi. Il n'est donc pas juridiquement approprié d'apprécier la valeur en douane des marchandises caribéennes selon une des autres méthodes secondaires d'évaluation prévues par la Loi, y compris celle de la valeur reconstituée des marchandises.

241. Pour ce motif, le Tribunal ne peut accepter l'argument de JCC selon lequel les exigences de la méthode de la valeur reconstituée prévue à l'alinéa 47(2)d) et décrite en détail à l'article 52 de la Loi sont pertinentes ou satisfaites dans le cas des marchandises caribéennes.

242. Bien qu'il n'ait pas à le faire pour disposer du présent appel, le Tribunal estime qu'il est approprié de faire remarquer que, même s'il avait conclu que la méthode de la valeur transactionnelle ne s'applique pas, il n'est pas convaincu que les exigences du paragraphe 47(3) de la Loi, lequel permet à un importateur, dans certaines circonstances, d'apprécier la valeur en douane des marchandises importées selon leur valeur reconstituée avant de tenir compte de leur valeur de référence conformément à l'article 51, sont satisfaites en l'espèce.

243. Nonobstant l'ordre en cascade prévu au paragraphe 47(2) de la Loi, le paragraphe 47(3) offre aux importateurs la possibilité de procéder à l'évaluation en ayant recours à la méthode de la valeur reconstituée, en inversant l'application des alinéas 47(2)c) et 47(2)d), lorsque certaines démarches préliminaires sont faites, y compris la présentation par l'importateur, avant le début de l'appréciation, d'une demande écrite concernant les marchandises à apprécier.

244. À cet égard, aucun élément de preuve documentaire n'indique que JCC a présenté avant le début de l'appréciation une demande écrite d'inverser l'ordre d'applicabilité des valeurs prévues aux alinéas 47(2)c) (valeur de référence) et 47(2)d) (valeur reconstituée).

245. Par conséquent, même si le Tribunal avait conclu à la viabilité juridique de l'argument de JCC selon lequel celle-ci pouvait choisir d'utiliser la méthode d'appréciation fondée sur la valeur reconstituée lorsque l'ASFC l'a avisée que ses déclarations de la valeur en douane feraient l'objet d'une révision, il n'en demeure pas moins qu'aucun élément de preuve probant n'indique que JCC a demandé par écrit à l'ASFC, avant l'appréciation des marchandises, que la méthode de la valeur reconstituée soit utilisée de préférence à la méthode de la valeur de référence.

246. Le Tribunal constate que la correspondance échangée par les parties pendant la vérification contient des renseignements indiquant que l'ASFC a demandé à JCC de lui communiquer sa demande écrite, conformément au paragraphe 47(3) de Loi, d'inverser l'ordre hiérarchique des méthodes d'évaluation selon la valeur de référence et la valeur reconstituée105. JCC n'a toutefois pas déposé auprès du Tribunal sa réponse complète à la lettre de l'ASFC à cet égard. Seules des lettres d'accompagnement ne faisant aucune mention de cette question ont été versées au dossier106. Par conséquent, le dossier ne contient aucun élément de preuve convaincant démontrant que JCC a fait la demande écrite prévue au paragraphe 47(3).

247. Étant donné ce qui précède, le Tribunal conclut que JCC n'a pas établi que les conditions prévues à l'article 48 de la Loi ne sont pas satisfaites relativement aux transactions visant l'achat des marchandises caribéennes et que la valeur en douane de ces marchandises devait être appréciée selon leur valeur reconstituée.

JCC avait-elle des « motifs de croire » en 2005 que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes?

248. À titre subsidiaire, JCC soutient qu'elle n'avait pas de « motifs de croire » en 2005 que ses déclarations de la valeur en douane visant ses importations des marchandises asiatiques et caribéennes étaient inexactes, comme le déclare l'ASFC dans ses décisions qui font l'objet du présent appel.

249. JCC soutient que le Tribunal a compétence pour entendre cette question des « motifs de croire » dans le cadre du présent appel.

250. Selon la position de JCC, celle-ci n'a eu de « motifs de croire » que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes qu'au moment où elle a reçu d'un agent autorisé de l'ASFC un avis définitif des conclusions de l'ASFC en ce sens.

251. D'après les faits du présent appel, JCC allègue que cela n'est survenu que le 3 mars 2009 (lorsque l'ASFC a confirmé que sa décision du 20 octobre 2008, rendue à l'issue de la vérification, ne serait pas annulée) ou au plus tôt le 20 octobre 2008, lorsque l'ASFC a communiqué à JII les résultats de sa vérification et ses conclusions, y compris son rapport de vérification de la valeur en douane, et a donné instruction à JCC de corriger elle-même ses déclarations de la valeur en douane pour les exercices 2005, 2006, 2007 et 2008.

252. L'ASFC soutient que le dispositif de sa décision du 20 octobre 2008 et sa lettre de directives à JCC ne contiennent aucune mention de la question des « motifs de croire ». L'ASFC fait valoir que cette question est évoquée à la fin de sa lettre visant à aviser JCC qu'elle envisageait de lui imposer une sanction administrative pécuniaire en raison du défaut de JCC de corriger elle-même ses déclarations de la valeur en douane en 2005, les vérificateurs ayant conclu que les entrées faites dans les livres et registres de JCC démontraient que JCC avait des « motifs de croire » dès 2005 que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes.

253. L'ASFC soutient également que la question de savoir si JCC avait des « motifs de croire », en 2005, que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes n'a absolument aucune influence sur la question de savoir si ces valeurs étaient exactes.

254. L'ASFC soutient que sa décision d'exiger que JCC corrige elle-même ses déclarations de la valeur en douane pour la période du 15 mars 2005 au 31 décembre 2008, laquelle a mené aux décisions rendues sous forme de RDR en application de l'alinéa 59(1)a) de la Loi puis, à la suite des demandes subséquentes de réexamen de JCC à l'ASFC aux termes de l'article 60, aux décisions qui font l'objet du présent appel, ne se fonde pas sur sa conclusion selon laquelle JCC avait de tels « motifs de croire » en 2005. L'ASFC soutient que sa décision d'exiger que JCC dépose des corrections à ses déclarations de la valeur en douane de 2005 à 2008 repose plutôt sur les conclusions substantives de sa vérification.

255. À cet égard, l'ASFC fait remarquer qu'en vertu de l'article 59 de la Loi, elle a le pouvoir de réviser la valeur en douane des marchandises importées dans les quatre années suivant la date à laquelle ces marchandises ont fait l'objet d'une déclaration en détail en se fondant, notamment, sur les résultats d'une vérification. Par exemple, cela signifie qu'en se fondant sur les résultats d'une vérification terminée le 2 janvier 2010, l'ASFC pourrait réviser la valeur en douane de marchandises importées au Canada au cours de la période de quatre ans s'échelonnant du 2 janvier 2006 au 1er janvier 2010.

256. De plus, l'ASFC fait valoir que la question des « motifs de croire » entre en jeu uniquement après qu'elle a déterminé qu'une déclaration donnée est inexacte. Cette question peut, dans certaines circonstances, être pertinente pour établir la date jusqu'à laquelle les corrections doivent remonter, mais en l'espèce, bien que les décisions qui font l'objet du présent appel mentionnent que JCC avait des « motifs de croire » dès 2005 que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes, ce fait n'a pas servi en l'espèce à déterminer la durée de la période de nouvelle cotisation des droits de douane puisque, aux termes du paragraphe 32.2(2) de la Loi, l'obligation des importateurs de corriger leurs déclarations concernant le classement tarifaire, la valeur en douane ou l'origine des marchandises importées prend fin quatre ans après que ces marchandises ont fait l'objet d'une déclaration en détail.

257. L'ASFC fait remarquer que, dans le présent appel, le fait que sa décision définitive, y compris ses instructions à JCC de corriger elle-même ses déclarations de la valeur en douane à la suite de la vérification, ait été communiquée à JCC seulement en mars 2009 signifie qu'elle pouvait uniquement exiger que JCC corrige ses déclarations de la valeur en douane des quatre années précédentes, soit à partir de mars 2005.

258. L'ASFC soutient que c'est précisément ce qu'elle a fait, conformément à l'exigence pertinente de la Loi. Par conséquent, l'ASFC a adopté la position selon laquelle la question de savoir si JCC avait ou non des « motifs de croire » en 2005 n'était pas pertinente pour déterminer si JCC était tenue de corriger elle-même ses déclarations de la valeur en douane en remontant jusqu'à mars 2005.

259. L'ASFC soutient également que la question des « motifs de croire » était pertinente pour déterminer si elle devait imposer une sanction pécuniaire aux termes de l'article 109 de la Loi. L'ASFC fait valoir que lorsqu'une sanction est imposée aux termes de l'article 109 en raison de l'omission d'un importateur de corriger ses déclarations alors qu'il avait des « motifs de croire » que ses déclarations étaient inexactes, l'importateur peut demander au ministre de réviser cette sanction aux termes de l'article 129.

260. Si le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile confirme la décision sur les « motifs de croire » ayant servi de fondement à l'imposition de la sanction, l'importateur peut ensuite en appeler de cette décision en intentant une action devant la Cour fédérale aux termes de l'article 135 de la Loi. Dans un tel cas, l'ASFC soutient qu'il appartient à la Cour fédérale, et non au Tribunal, de déterminer si l'importateur avait des « motifs de croire » que ses déclarations étaient inexactes.

261. Après avoir examiné les exposés des parties, le Tribunal conclut qu'il n'a pas à déterminer si JCC avait des « motifs de croire » que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes pour statuer en l'espèce. Par conséquent, le Tribunal ne se prononcera pas sur cette question.

262. Le Tribunal convient avec l'ASFC que la question de savoir si c'est en 2009 ou en 2005 que JCC a eu des « motifs de croire » n'a aucune incidence sur la question de savoir si l'ASFC a correctement révisé la valeur en douane des marchandises en cause, laquelle représente la question juridique de fond sur laquelle le Tribunal doit se prononcer dans le cadre du présent appel aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi.

263. De plus, pour les motifs qui suivent, il est manifeste que l'obligation de JCC de corriger elle-même ses déclarations de la valeur en douane de mars 2005 à décembre 2008 n'est pas fondée sur la mention de l'ASFC, dans ses décisions qui font l'objet du présent appel, selon laquelle JCC avait des « motifs de croire » en 2005 que la valeur en douane qu'elle avait déclarée était inexacte.

264. À cet égard, il est utile d'examiner les dispositions pertinentes de la Loi. Plus précisément, il importe de noter qu'un importateur de marchandises au Canada est tenu de déclarer l'importation en vertu de la partie II de la Loi. L'article 32 exige que l'importateur fasse une déclaration en détail des marchandises selon les modalités réglementaires et paie les droits afférents.

265. Le paragraphe 58(1) de la Loi confère à l'ASFC le pouvoir de déterminer la valeur en douane des marchandises importées. Cependant, si l'ASFC ne fait pas cette détermination, la valeur est considérée, en vertu du paragraphe 58(2), comme ayant été déterminée selon les énonciations formulées par l'importateur dans sa déclaration en détail des marchandises faite au titre de l'article 32. Ainsi, en l'absence d'une détermination initiale par l'ASFC de la valeur en douane des marchandises importées, la déclaration de l'importateur est assimilée à la détermination de l'ASFC.

266. C'est ce qui s'est produit en l'espèce. Au moment de l'importation des marchandises en cause, leur valeur en douane a été considérée comme ayant été déterminée par les déclarations de JCC en application du paragraphe 58(2) de la Loi.

267. En vertu du paragraphe 32.2(2) de la Loi, l'importateur qui a des « motifs de croire » que sa déclaration de la valeur en douane des marchandises importées est inexacte doit effectuer une correction dans le délai prescrit et payer tout manque à gagner ayant trait aux droits payables qui en résulte.

268. Le paragraphe 32.2(3) de la Loi prévoit que, pour l'application de la Loi, une telle correction est assimilée à une révision par l'ASFC prévue à l'alinéa 59(1)a). Selon le paragraphe 32.2(4), cette obligation légale d'effectuer des corrections prend fin quatre ans après la déclaration en détail des marchandises au titre de l'article 32.

269. Par conséquent, si un importateur a des « motifs de croire » que la valeur en douane des marchandises ayant fait l'objet d'une déclaration en détail le 15 mars 2005 est inexacte, son obligation d'effectuer une correction prend fin le 15 mars 2009; pour des marchandises ayant fait l'objet d'une déclaration en détail en janvier 2006, elle prend fin en janvier 2010; pour des marchandises ayant fait l'objet d'une déclaration en détail en janvier 2007, elle prend fin en janvier 2011, et ainsi de suite.

270. De plus, aux termes des articles 42, 42.01 et 42.1 de la Loi, l'ASFC peut, après l'importation, effectuer des vérifications des énonciations de l'importateur dans sa déclaration en détail des marchandises importées faite au titre de l'article 32. Les pouvoirs conférés à l'ASFC par l'article 42.01 comprennent le pouvoir de vérifier la valeur en douane des marchandises importées. À la suite de ces vérifications, l'ASFC peut « réviser » ou « réexaminer » tous les éléments pris en compte dans le calcul des droits payables, y compris la valeur en douane des marchandises importées.

271. Ce pouvoir de « réviser » ou de « réexaminer » est prévu à l'article 59 de la Loi. En vertu de l'alinéa 59(1)a), l'ASFC peut notamment réviser la valeur en douane des marchandises importées dans les quatre années suivant la date de la détermination initiale prévue à l'article 58 en se fondant sur les résultats de la vérification de la valeur en douane prévue à l'article 42.01.

272. Ainsi, lorsque la valeur en douane des marchandises importées est considérée, en application du paragraphe 58(2) de la Loi, comme ayant été déterminée par les énonciations d'un importateur au moment où les marchandises ont fait l'objet d'une déclaration en détail, par exemple le 15 mars 2005, les résultats d'une vérification de l'ASFC peuvent amener celle-ci à réviser la valeur en douane de telles marchandises dans les quatre années suivant le 15 mars 2005, soit jusqu'au 15 mars 2009. De façon similaire, pour des marchandises ayant fait l'objet d'une déclaration en détail en janvier 2006, le pouvoir de l'ASFC de réviser leur valeur en douane en vertu du paragraphe 59(1) prend fin en janvier 2010; pour des marchandises ayant fait l'objet d'une déclaration en détail en janvier 2007, il prend fin en janvier 2011, et ainsi de suite.

273. Étant donné ce qui précède, la valeur en douane déclarée par l'importateur au moment de l'importation peut changer ultérieurement dans deux situations : 1) lorsque l'importateur dépose une correction en application du paragraphe 32.2(2) de la Loi ou 2) lorsque l'ASFC révise la valeur en douane des marchandises importées en application du paragraphe 59(1). Ces deux situations se sont produites en l'espèce.

274. Comme le Tribunal l'a souligné dans son résumé des décisions pertinentes de l'ASFC, l'ASFC a émis le 12 mars 2009 deux RDR aux termes de l'alinéa 59(1)a) de la Loi afin de réviser la valeur en douane des marchandises en cause pour la période s'échelonnant du 15 au 31 mars 2005.

275. Ces décisions ont été rendues dans les quatre années suivant la date de la détermination initiale présumée de la valeur en douane des marchandises en cause et renvoient expressément à la décision de l'ASFC faisant suite à la vérification.

276. Le Tribunal conclut que la question de savoir si JCC avait des « motifs de croire » en 2005 que ses déclarations de la valeur en douane de 2005 étaient inexactes n'est pas pertinente aux fins de ces révisions en application du paragraphe 59(1) de la Loi. Comme la Loi le prévoit, l'ASFC a révisé la valeur en douane des marchandises en mars 2009 en remontant quatre ans en arrière, soit jusqu'en mars 2005, en se fondant sur les résultats de sa vérification.

277. Par la suite, comme l'exigeait l'ASFC dans sa lettre de décision du 3 mars 2009, JCC a déposé des corrections auprès de l'ASFC en application du paragraphe 32.2(2) de la Loi afin de modifier la valeur en douane qu'elle avait déclarée initialement pour le reste de la période de vérification (d'avril à décembre 2005).

278. Ces corrections ont été déposées le 31 mars 2009, soit dans les quatre années suivant la date à laquelle ces marchandises ont fait l'objet de déclarations en détail (qui devaient être faites entre avril et décembre 2005). Encore une fois, l'ASFC a exigé que JCC fasse ces corrections en s'appuyant sur les résultats de sa vérification et non pas parce que JCC avait des « motifs de croire », dès 2005, que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes.

279. La même conclusion s'applique aux corrections additionnelles déposées par JCC entre avril et juillet 2009 afin de rajuster la valeur en douane des marchandises en cause importées au cours des années 2006 à 2008, comme l'ASFC l'a sommé de le faire dans ses instructions du 3 mars 2009, qui étaient elles-mêmes fondées sur les résultats de la vérification.

280. Toutes les corrections déposées par JCC ont été faites après que l'ASFC ait formellement avisé JCC que la valeur en douane que celle-ci avait déclarée pour les marchandises asiatiques et caribéennes avaient été jugées inexactes d'après les résultats de la vérification et ont été déposées dans le délai de prescription de quatre ans prévu au paragraphe 32.2(4) de la Loi.

281. En résumé, même en présumant que ce n'est qu'en mars 2009 que JCC a eu des « motifs de croire » que la valeur en douane qu'elle avait déclarée relativement aux marchandises en cause au moment de leur importation était inexacte, l'ASFC était autorisée à réviser la valeur en douane des marchandises en cause ou à exiger que JCC corrige elle-même ses déclarations de la valeur en douane en remontant quatre ans en arrière à partir du 3 mars 2009, soit jusqu'au 3 mars 2005. Pour ce motif, peu importe que JCC ait eu ou non des « motifs de croire » que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes à une date antérieure, la décision de l'ASFC de réviser la valeur en douane des marchandises asiatiques et caribéennes importées par JCC entre le 15 mars 2005 et le 31 décembre 2008 ou d'exiger que JCC corrige cette valeur est conforme aux dispositions pertinentes de la Loi.

282. Le Tribunal constate également que M. Fitzgerald a témoigné à l'audience au sujet des politiques et des pratiques administratives de l'ASFC en matière de nouvelle cotisation et a expliqué qu'en l'espèce JCC était tenue de corriger elle-même ses déclarations uniquement à partir de la période de vérification (2005), comme le prévoit la Loi, à la condition que ces corrections soient faites dans le délai de quatre ans prévu à l'article 32.2 et à l'article 59 de la Loi.

283. M. Fitzgerald a indiqué dans son témoignage que la conclusion concernant la date à laquelle JCC a eu des « motifs de croire » que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes n'a pas eu d'incidence sur la détermination de l'ASFC concernant la période de vérification pertinente. Il a aussi déclaré que l'imposition de sanctions administratives pécuniaires à JCC est la seule raison pour laquelle l'ASFC a traité de la question des « motifs de croire » dans ses décisions107. Cet élément de preuve vient soutenir la conclusion du Tribunal selon laquelle la question des « motifs de croire » n'est pas pertinente pour déterminer le bien-fondé des décisions de l'ASFC concernant la valeur en douane exacte des marchandises en cause qui font l'objet du présent appel.

284. Par conséquent, le Tribunal conclut que les droits additionnels dus par JCC et perçus à la suite des révisions de la valeur en douane des marchandises en cause découlent des résultats de la vérification de l'ASFC et n'ont pas été imposés pour le motif que JCC avait des « motifs de croire », en 2005, que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes.

285. En ce qui concerne la sanction administrative pécuniaire imposée par l'ASFC le 23 juin 2009 en se fondant sur sa conclusion selon laquelle JCC avait des « motifs de croire », en 2005, que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes et en raison de l'omission de JCC de déposer des corrections auprès de l'ASFC au plus tard 90 jours après avoir eu de tels « motifs de croire »108, le Tribunal conclut qu'il n'est pas saisi de cette question.

286. Le Tribunal conclut également que la question de savoir si, dans les circonstances, l'ASFC pouvait imposer une sanction administrative pécuniaire à JCC dépasse sa compétence et constitue une question sur laquelle la Cour fédérale pourrait éventuellement se prononcer dans le cadre d'une action aux termes de l'article 135 de la Loi.

JCC devrait-elle payer des droits ou taxes en raison de la période d'inactivité de 19 mois de l'ASFC?

287. À titre subsidiaire encore, JCC soutient que le Tribunal doit à tout le moins ordonner, selon le principe de l'équité, que JCC n'a pas à payer de droits ou taxes additionnels en raison de l'inaction admise de l'ASFC pendant 19 mois, laquelle a entraîné des délais déraisonnables avant que la vérification soit terminée. Selon JCC, ces délais lui ont causé un grave préjudice financier.

288. JCC soutient que le Tribunal a le pouvoir de rendre une telle décision en vertu du pouvoir que lui confère le paragraphe 67(2) de la Loi de statuer selon la nature de l'espèce par ordonnance.

289. Le Tribunal constate que les éléments de preuve indiquent que l'ASFC a décidé de renoncer à réclamer des intérêts sur les droits payables par JCC en raison de sa période d'inactivité de 19 mois.

290. Le Tribunal ne peut accepter l'argument de JCC.

291. JCC n'a fourni aucun précédent jurisprudentiel à l'appui de sa position selon laquelle le Tribunal a le pouvoir en vertu du paragraphe 67(2) de la Loi d'ordonner que les droits dus sur les marchandises importées en application des dispositions pertinentes de la Loi ne soient pas payés ou qu'il y soit renoncé. Le Tribunal constate que JCC a même reconnu à l'audience qu'elle s'aventurait en territoire inexploré avec cette demande.

292. Le Tribunal a expliqué dans le passé qu'il n'est pas un tribunal d'équité et qu'il doit appliquer la loi telle qu'elle est rédigée, et que le fait que l'ASFC prenne ou non une mesure administrative ne peut pas changer la loi109.

293. Dans les circonstances du présent appel, le Tribunal a déjà déterminé que l'ASFC a correctement révisé la valeur en douane des marchandises en cause à la suite d'une vérification effectuée par elle conformément aux dispositions pertinentes de la Loi et que, de ce fait, JCC devait des droits additionnels qui ont été légalement perçus en application de la Loi.

294. Par conséquent, le Tribunal conclut qu'aucun fondement juridique ne justifie de rendre l'ordonnance demandée par JCC à cet égard.

CONCLUSION

295. Pour l'ensemble des motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que la valeur en douane des marchandises en cause déclarée par JCC était inexacte, comme l'a déterminé l'ASFC. Quant aux allégations subsidiaires de JCC, le Tribunal conclut qu'il n'est pas nécessaire de déterminer avec précision le moment où JCC a eu des « motifs de croire » que ses déclarations de la valeur en douane étaient inexactes pour statuer sur le présent appel et qu'aucun fondement juridique ne justifie d'ordonner qu'aucuns droits de douane additionnels ou autres taxes ne soient prélevés sur l'ensemble des marchandises en cause ayant été importées au cours de la période de 19 mois durant laquelle la vérification a été suspendue en raison de l'inaction admise de l'ASFC.

DÉCISION

296. L'appel est rejeté.


1 . L.R.C.1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . Dans ses décisions faisant l'objet du présent appel, l'ASFC a indiqué qu'elle croyait que JCC avait des « motifs de croire » que la valeur en douane déclarée à l'égard des marchandises en cause était erronée depuis le 1er janvier 2005. Pièces du Tribunal AP-2011-008-01A (protégée) et AP-2011-008-01B.

3 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03B, onglet A.

4 . Ibid., onglet B. Seule la lettre d'accompagnement sans les réponses aux questions posées par l'ASFC ni les pièces jointes a été déposée auprès du Tribunal.

5 . Ibid., onglet C.

6 . Ibid., onglet F.

7 . Ibid., onglet G. Seule la lettre d'accompagnement sans les pièces jointes a été déposée auprès du Tribunal.

8 . Ibid., onglet J.

9 . Ibid., onglet K. De nouveau, seule la lettre d'accompagnement sans les pièces jointes a été déposée auprès du Tribunal.

10 . Ibid., onglets P et Q.

11 . Ibid., onglet P à la p. 270.

12 . Ibid., onglet R.

13 . Ibid., onglet S.

14 . Ibid., onglet S à la p. 298.

15 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07A, onglet G.

16 . Ibid., onglet H.

17 . Sauf les corrections de JCC pour la période du 1er janvier au 30 juin 2006, ces corrections additionnelles n'ont pas été déposées auprès du Tribunal. Toutefois, il n'y a aucun doute que JCC s'est conformée à la décision du 20 octobre 2008 et à la lettre d'instructions du 3 mars 2009.

18 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07D à la p. 11.

19 . Jockey Canada Company Limited c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2010 CF 396 (CanLII) [Jockey]. Pièce du Tribunal AP-2011-008-03D, onglet 2.

20 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03A, onglet X.

21 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-01. Il est indiqué dans ces décisions que la justification circonstanciée des conclusions de l'ASFC a été donnée dans sa décision provisoire du 26 janvier 2011.

22 . [1994] 2 RCS 9.

23 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 282-288.

24 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03A, onglet D.

25 . Ibid. au para. 35.

26 . Ibid.

27 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 100-104, 108-109.

28 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03A au para. 38. Le Tribunal constate que les parties sont en désaccord quant aux sommes d'argent qui sont en fait retirées par JII et, comme il en sera question ci-dessous, à leur correspondance aux prix indiqués sur les factures produites par les fournisseurs asiatiques qui sont payées par JII.

29 . Ibid. au para. 40. Dans son mémoire, JCC désigne ce prix comme le « prix de vente de JII » [traduction], c'est-à-dire le prix des marchandises vendues par JII à JCC. Ibid. aux para. 13, 18.

30 . Ibid. au para. 13.

31 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03B, onglet J à la p. 249, onglet K à la p. 254.

32 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 140-141.

33 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03A au para. 43.

34 . Ibid. au para. 46.

35 . Ibid. aux para. 43-44; pièce du Tribunal AP-2011-008-03C, onglets P, Q et R.

36 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07E aux pp. 860-866.

37 . Conformément à l'article 45 de la Loi, l'expression « prix payé ou à payer » signifie « la somme de tous les versements effectués ou à effectuer par l'acheteur directement ou indirectement au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises ».

38 . Canada (Agence des services frontaliers) c. Miner, 2012 CAF 81 (CanLII) [Miner].

39 . Ibid. aux para. 20-21.

40 . (8 mars 2005), AP-2003-040 (TCCE) à la p. 3.

41 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03C, onglets G-1, H-1, I-1 et J-1.

42 . Ibid., onglets G-2, H-2, I-2 et J-2.

43 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 99-101, 104, 108-109.

44 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03C, onglets G-5, G-6, H-5 et H-6.

45 . Un exemple d'un tel état de résultat a été déposé par JCC. Ibid., onglet O.

46 . Des questions sur le prix de transfert sont soulevées dans le cas de transactions entre parties liées concernant la vente de marchandises d'un pays à l'autre, car les prix de vente dans de telles transactions peuvent diverger considérablement par rapport à ce que seraient les prix du marché dans des transactions entre parties non liées. Cela préoccupe les administrations fiscales de par le monde puisque le revenu des sociétés multinationales ou de leurs sociétés apparentées situées dans divers pays peut pour cette raison être insuffisamment taxé. À cause de cela, les administrations fiscales, y compris l'Agence du revenu du Canada, vérifient que les prix de transfert concernant les transactions entre parties liées reflètent ce qu'auraient été les prix si les parties n'étaient pas liées. Ce principe est connu sous le nom de principe de pleine concurrence. Pièce du Tribunal AP-2011-008-11A aux para. 10-35.

47 . La MTMN est l'une des cinq méthodes recommandées par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour établir qu'un prix de transfert entre parties liées satisfait au principe de pleine concurrence. Ibid. aux para. 41-49. Des études portant sur le prix de transfert effectuées par des cabinets d'expertise comptable ont recommandé à JCC d'utiliser la MTMN afin d'établir qu'elle respecte ses obligations en matière de prix de transfert aux termes des lois et règlements pertinents ayant trait à l'impôt sur le revenu. Pièce du Tribunal AP-2011-008-03C, onglet 3.

48 . Ibid., onglet 1 aux pp. 365-367.

49 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 51-53.

50 . Article 40 de la Loi et Règlement sur les documents relatifs à l'importation de marchandises, D.O.R.S. 86-1011.

51 . Les éléments de preuve déposés par l'ASFC à l'appui de sa conclusion sont résumés dans la pièce du Tribunal AP-2011-008-07E à l'annexe A, qui comprend des références précises à des extraits des registres internes de JCC qui ont été déposés comme pièces confidentielles dans le cadre du présent appel. À l'audience, M. Fitzgerald a fourni de vive voix des éléments de preuve concernant le fait que les paiements effectués par JCC à JII ne reflètent pas les montants qui figurent sur les factures présentées par JCC à l'appui de sa position en l'espèce. Transcription de l'audience publique, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 394-402; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 31-53.

52 . The Pampered Chef, Canada Corporation c. Président de l'Agence des services frontaliers du Canada (13 février 2008), AP-2006-048 (TCCE); Ferragamo U.S.A. Inc. c. Président de l'Agence des services frontaliers du Canada (2 mars 2007), AP-2005-053 (TCCE).

53 . [2001] 2 RCS 100 [Mattel] au para. 45.

54 . 2010 CF 396 (CanLII) [Jockey] au para. 6.

55 . Ibid. au para. 7.

56 . Transcription de l'audience publique, vol. 3, 9 décembre 2011, aux pp. 489-491; Ibid., vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 22-23, 51-53.

57 . Canada c. General Motors du Canada Limitée, 2008 CAF 142 (CanLII) et les autres causes dont il est fait référence.

58 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 153-154, 156-157.

59 . Ibid. aux pp. 193-194.

60 . Ibid. aux pp. 56-57.

61 . Ibid. aux pp. 45-49.

62 . Ibid. aux pp. 52-53.

63 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07D à la p. 802.

64 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03C, onglets G-1, H-1, I-1 et J-1.

65 . Ibid., onglet 2. En fait, il n'est mentionné nulle part dans la convention de gestion que JII est l'entité responsable des achats au nom de JCC ou qu'elle détient l'autorité expresse et inconditionnelle de lier JCC vis-à-vis de tierces parties.

66 . Ibid., onglets G-5, G-6, H-4 et H-5.

67 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, à la p. 105; pièce du Tribunal AP-2011-008-03C à la p. 515.

68 . Ibid. à la p. 516.

69 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 181-182.

70 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 3, 9 décembre 2011, aux pp. 70-71.

71 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, à la p. 164.

72 . Ibid. aux pp. 136, 164-166, 179-180.

73 . Ibid. aux pp. 66, 87-88.

74 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07B, onglet Q aux pp. 408-429; Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 127-129.

75 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03C à la p. 578.

76 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07E à la p. 857; Transcription de l'audience publique, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 405-407.

77 . Ibid. aux pp. 394-402; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 31-63.

78 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07C. Des exemples d'achat de marchandises asiatiques par JCC se trouvent à la page 498.

79 . Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 210, 216-219.

80 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07B aux pp. 463-464; pièce du Tribunal AP-2011-008-07B à la p. 455; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 34-36, 46-53.

81 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07D à la p. 820; Transcription de l'audience publique, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 393-399; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 45-58; ibid., vol. 3, 9 décembre 2011, aux pp. 89-91.

82 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07B aux pp. 191, 211; Transcription de l'audience publique, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 240-242; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 17-18.

83 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-11A, rapport d'expert de Gavin Hales.

84 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 297-304.

85 . Ibid., vol. 3, 9 décembre 2011, aux pp. 551-554.

86 . Ibid., vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 323-324.

87 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07D aux pp. 623-624, 636.

88 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 419-420.

89 . 1999 CanLII 8189 (CAF) [Toyota].

90 . Toyota Canada Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national (12 septembre 2000), AP-99-043 (TCCE). Dans son rejet de l'appel, le Tribunal a confirmé la décision du sous-ministre de ne pas tenir compte des remises ou des réductions de prix après l'importation des véhicules au Canada et, par conséquent, d'établir la valeur transactionnelle en se fondant sur le prix de vente provisoire.

91 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 3, 9 décembre 2011, aux pp. 109-113.

92 . Nordic Laboratories Inc. v. Deputy Minister of National Revenue, (1996) 113 F.T.R. 168 (FCTD); Quadra Chimie Ltée c. Le sous-ministre du Revenu national (26 juillet 1994), AP-93-260 (TCCE).

93 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07E aux pp. 846-849.

94 . Jockey au para. 7.

95 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03C (protégée) aux pp. 391-394.

96 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 8-11.

97 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03C (protégée), aux pp. 580, 583, 585. Dans certains cas, c'est JII, et non JCC, qui est indiquée comme l'acheteur ou le destinataire. À l'audience, Mme Haarbauer a affirmé que cela constituait des erreurs et que JII n'a pas pris la peine de discuter de cette question avec les exportateurs. Bien que rien ne repose là-dessus, le Tribunal trouve étrange que les documents déposés par JCC afin de soi-disant démontrer qu'elle a acheté les marchandises caribéennes directement à ses sociétés soeurs situées dans la région des Caraïbes jettent un doute quant à ses affirmations à cet égard.

98 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 3, 9 décembre 2011, aux pp. 79-99.

99 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07E (protégée) aux pp. 862-866.

100 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07C (protégée) aux pp. 657-665. À l'annexe A du mémoire de l'ASFC, une transaction portant sur des expéditions de marchandises provenant du Honduras est expliquée. À l'audience, M. Fitzgerald a fourni de vive voix des éléments de preuve sur la façon dont les modalités de cette transaction et d'autres transactions concernant l'importation de marchandises caribéennes ont été consignées dans les livres et registres de JCC. Transcription de l'audience à huis clos, vol. 3, 9 décembre 2011, aux pp. 79-95. Ces éléments de preuve incontestés corroborent les affirmations faites aux paragraphes 83-84 du mémoire confidentiel de l'ASFC (pièce du Tribunal AP-2011-008-07E [protégée]), selon lesquelles il n'y a aucun renseignement qui suggère que JCC ait acheté les marchandises caribéennes aux fournisseurs caribéens ou payé à ces fournisseurs les montants figurant sur les factures produites par ces fournisseurs.

101 . Transcription de l'audience à huis clos, vol. 3, 9 décembre 2011, aux pp. 90-99.

102 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07B aux pp. 191, 211.

103 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 305-307.

104 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-07B (protégée) aux pp. 216-217; Transcription de l'audience à huis clos, vol. 1, 7 décembre 2011, aux pp. 12-16.

105 . Pièce du Tribunal AP-2011-008-03B aux pp. 229-230.

106 . Ibid. aux pp. 232-235.

107 . Transcription de l'audience publique, vol. 2, 8 décembre 2011, aux pp. 387-391, 437-438, 458-460.

108 . Pièce du Tribunal AP-2008-007-07A aux pp. 59-63.

109 . Romain L. Klaasen c. Président de l'Agence des services frontaliers du Canada (18 octobre 2005), AP-2004-007 (TCCE); Wayne Ericksen c. Le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (3 janvier 2002), AP-2000-059 (TCCE).