BALANCECO


BALANCECO
c.
PRÉSIDENT DE L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2012-036

Décision et motifs rendus
le vendredi 3 mai 2013


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À un appel entendu le 9 avril 2013, en vertu de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l'Agence des services frontaliers du Canada le 19 juillet 2012 concernant une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

BALANCECO Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L'appel est rejeté.

Pasquale Michaele Saroli
Pasquale Michaele Saroli
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario)

Date de l'audience : le 9 avril 2013

Membre du Tribunal : Pasquale Michaele Saroli, membre présidant

Conseillers juridiques pour le Tribunal : Nick Covelli
Laura Little

Gestionnaire, Programmes et services du greffe : Michel Parent

Agent du greffe : Haley Raynor

PARTICIPANTS :

Appelante Conseillers/représentants
BalanceCo Christopher J. Cochlin
Andrew M. Lanouette
Mark A. Zekulin
David K. Wilson
Anna Turinov
Intimé Conseiller/représentant
Président de l'Agence des services frontaliers du Canada Paul Battin
Intervenante Conseillers/représentants
J Cheese Inc. Richard A. Wagner
Jessica Allen
Donald Kubesh

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

1. Le présent appel est interjeté par BalanceCo auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes1 à l'égard d'une décision rendue le 19 juillet 2012 par le président de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes de l'alinéa 60(4)b).

2. La décision confirmait une décision anticipée aux termes de l'alinéa 43.1(1)c) de la Loi selon laquelle des emballages contenant de la mozzarella râpée (enrobée de poudre de cellulose) et du pepperoni tranché importés par J Cheese Inc. (JCI)2 (les marchandises en cause) peuvent être classés dans le numéro tarifaire 1601.00.90 de l'annexe du Tarif des douanes3 à titre de préparations alimentaires. En conséquence d'un tel classement, les marchandises en cause ne sont pas assujetties aux contingents tarifaires (CT) canadiens sur les produits laitiers.

3. BalanceCo, une société à but non lucratif dont les membres sont les 10 offices provinciaux de mise en marché du lait, admet avoir demandé une décision anticipée afin de s'assurer que les CT seraient effectivement appliqués4. À cette fin, BalanceCo soutient que la mozzarella râpée doit être classée dans le numéro tarifaire 0406.90.61 à titre de « Mozzarella et du type Mozzarella » (dans les limites de l'engagement d'accès) et dans le numéro tarifaire 0406.90.62 (au-dessus de l'engagement d'accès), alors que le pepperoni tranché doit être classé dans le numéro tarifaire 1601.00.90 à titre d'autres « [s]aucisses, saucissons et produits similaires, de viande, d'abats ou de sang; préparations alimentaires à base de ces produits ».

4. Une question préliminaire se pose dans le présent appel, celle de savoir si le Tribunal a compétence pour connaître de l'affaire. Plus précisément, si la décision anticipée est invalide parce que BalanceCo n'est pas un demandeur admissible, la décision n'est pas susceptible de révision aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi ni ne peut faire l'objet d'une décision subséquente de l'ASFC aux termes du paragraphe 60(4). Dans ces circonstances, il n'y a pas de classement tarifaire valide que le Tribunal puisse réviser.

CONTEXTE DE LA PROCÉDURE

5. La question de compétence a été soulevée en premier par JCI5. Dans son intervention écrite, JCI soutient ce qui suit :

Le Tribunal doit rejeter l'appel au motif que BalanceCo n'est pas un importateur et ne peut par conséquent demander ou recevoir une décision douanière anticipée aux termes du Règlement sur les décisions anticipées en matière de classement tarifaire (D.O.R.S./2005-256). Par conséquent, le Tribunal n'est pas saisi d'une décision valide aux termes de la Loi sur les douanes et n'a donc aucune compétence relativement à cette cause [...]6.

[Traduction]

6. Le Tribunal a invité les parties à répondre à l'exposé de JCI et, dans l'intervalle, a décidé de scinder l'audience de l'appel, la séance du 9 avril 2013 étant consacrée à la question préliminaire de compétence7. L'audience sur le fond a été ajournée sine die.

7. Les parties ont déposé leur exposé entre les 25 et 27 mars 2013. Le 4 avril 2013, aux termes de l'article 6 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur8, le Tribunal a déterminé qu'il était juste et équitable d'accepter les autorités supplémentaires déposées en retard par JCI.

8. À l'audience, le Tribunal a autorisé BalanceCo à verser d'autres autorités au dossier, étant d'avis qu'elles étaient une réponse directe aux autorités supplémentaires déposées en retard par JCI9.

LE TRIBUNAL A-T-IL COMPÉTENCE POUR CONNAÎTRE DE LA QUESTION DE COMPÉTENCE SOULEVÉE PAR JCI?

9. BalanceCo soutient qu'en soulevant la question de compétence, JCI a) étend indûment les questions dont BalanceCo et l'ASFC ont saisi le Tribunal dans le présent appel et b) excède la portée des questions à l'égard desquelles il lui est permis d'intervenir10.

10. Il est admis que la question de compétence ne figure pas parmi les questions dont BalanceCo et l'ASFC ont saisi le Tribunal et qu'elle a été soulevée en premier par JCI dans son intervention. De plus, le Tribunal a accordé à JCI l'autorisation d'intervenir sur des questions de droit et d'interprétation juridique ayant trait au classement tarifaire des marchandises en cause, sans mention explicite de la question de compétence11.

11. Le Tribunal convient que les interventions doivent généralement se limiter à l'objet de l'appel et que les intervenants ne peuvent élargir les questions en litige dont est saisi le Tribunal ou en ajouter12. Cependant, cette limite de la portée des interventions porte sur les arguments juridiques et les prétentions factuelles relatives au fond d'un appel et ne peut s'étendre à la question primordiale de compétence consistant à déterminer si le Tribunal dispose du pouvoir légal nécessaire pour connaître de l'appel. Avant que le Tribunal ne puisse se pencher sur le fond d'un appel, il doit être convaincu qu'il dispose de la compétence nécessaire13 pour agir en application du paragraphe 67(1) de la Loi. D'ailleurs, un tribunal administratif peut rejeter un appel pour défaut de compétence en tout temps au cours de la procédure14, que ce soit sur requête d'une partie ou de sa propre initiative.

12. Le caractère primordial de la question de compétence est souligné dans Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick15, où la Cour suprême du Canada a énoncé ce qui suit :

Les décideurs administratifs exercent leurs pouvoirs dans le cadre de régimes législatifs qui sont eux-mêmes délimités. Ils ne peuvent exercer de pouvoirs qui ne leur sont pas expressément conférés. S'ils agissent sans autorisation légale, ils portent atteinte au principe de la primauté du droit16.

13. En bref, le Tribunal ne peut s'arroger de compétences que sa législation habilitante ne lui attribue pas. La Cour suprême du Canada a affirmé ce qui suit : « L'interprétation de ces pouvoirs doit être juste, sinon les actes seront tenus pour ultra vires ou assimilés à un refus injustifié d'exercer sa compétence [...]17. »

14. En ce qui concerne l'affirmation de BalanceCo selon laquelle l'intervention de JCI excède la portée des questions à l'égard desquelles JCI est autorisée à intervenir, le Tribunal, dans sa délimitation des paramètres applicables aux interventions admissibles de JCI, a affirmé ce qui suit18 :

[...] le Tribunal est d'avis qu'il est approprié de limiter l'intervention de JCI en ce qui concerne les questions de fait aux seuls renseignements pertinents dont JCI a connaissance directe et portant sur le caractère similaire des marchandises en cause par rapport à celles qui sont importées par JCI et sont l'objet de la décision douanière [anticipée] mentionnée dans son avis d'intervention; une question qui influe directement sur le poids qui sera ultimement accordé par le Tribunal aux exposés de JCI.

Quant aux questions de droit et d'interprétation juridique, dans la mesure où :

a. les marchandises importées par JCI qui sont l'objet de la décision douanière [anticipée] sont identiques ou similaires par rapport aux marchandises en cause;

b. le classement tarifaire est de par sa nature une question mixte de fait et de droit (voir p. ex. ASFC c. Decolin inc., 2006 CAF 417 (CanLII), para. 41), le classement adéquat des marchandises en cause se faisant par l'application des dispositions du Tarif des douanes aux marchandises en cause telles que décrites dans les faits lors de leur présentation pour importation au Canada (voir p. ex. Deputy M.N.R.C.E. v. MacMillan & Bloedel (Alberni) Ltd., [1965] R.C.S. 366, et Tiffany Woodworth c. Président de l'Agence des services frontaliers du Canada (11 septembre 2007), AP-2006-035 (TCCE) au para. 21);

c. le classement tarifaire des marchandises en cause dans le présent appel pourrait éventuellement influer sur le classement tarifaire des importations futures de marchandises identiques ou similaires par JCI.

JCI sera autorisée à présenter des exposés sur l'interprétation juridique du Tarif des douanes, y compris sur la manière dont les dispositions pertinentes du Tarif des douanes ont été interprétées aux fins du classement tarifaire des importation par JCI de marchandises prétendument identiques ou similaires et la question de savoir si cette interprétation est pertinente au classement tarifaire des marchandises en cause dans le présent appel.

[Traduction]

15. Les paramètres établis par le Tribunal circonscrivent de par leur libellé l'intervention de JCI aux questions de droit et d'interprétation juridique ayant trait au classement tarifaire des marchandises en cause. Pour les raisons déjà mentionnées, cependant, ces limites relatives au fond de l'appel ne peuvent s'appliquer à la question primordiale de la compétence en vertu du paragraphe 67(1) de la Loi.

16. BalanceCo soutient que, dans le contexte de l'espèce, la question de compétence ne doit pas être dissociée de l'analyse du fond de l'appel lui-même19. Cependant, si le Tribunal conclut, à titre préliminaire (c'est-à-dire avant de se pencher sur les questions de fond de l'appel) qu'il n'a pas compétence pour connaître de l'appel, BalanceCo n'a pas droit à une audience sur le fond20.

17. Au vu de l'analyse qui précède, le Tribunal conclut qu'il peut se pencher sur la question de compétence soulevée par JCI dans le présent appel.

QUEL EST LE FONDEMENT DE LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL?

18. Étant une création législative, les pouvoirs généraux du Tribunal proviennent de sa loi habilitante, la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur21, qui prévoit ce qui suit :

16. Le Tribunal a pour mission :

[...]

c) de connaître de tout appel pouvant y être interjeté en vertu de toute autre loi fédérale ou de ses règlements et des questions connexes [...].

[Nos italiques]

19. Le paragraphe 67(1) de la Loi prévoit expressément un recours au Tribunal à l'encontre de décisions de l'ASFC conformément au paragraphe 60(4) relativement à une demande aux termes du paragraphe 60(2) en révision d'une décision anticipée :

67.(1) Toute personne qui s'estime lésée par une décision du président rendue conformément aux articles 60 ou 61 peut en interjeter appel devant le Tribunal canadien du commerce extérieur en déposant par écrit un avis d'appel auprès du président et du secrétaire de ce Tribunal dans les quatre-vingt-dix jours suivant la notification de l'avis de décision.

[Nos italiques]

20. À cet égard, l'article 60 de la Loi prévoit la révision de décisions anticipées, l'ASFC ayant le pouvoir de confirmer, de modifier ou d'annuler la décision :

60.(1) [...].

(2) Toute personne qui a reçu une décision anticipée prise en application de l'article 43.1 peut, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la notification de la décision anticipée, en demander la révision.

(3) La demande prévue au présent article est présentée au président en la forme et selon les modalités réglementaires et avec les renseignements réglementaires.

(4) Sur réception de la demande prévue au présent article, le président procède sans délai à l'une des interventions suivantes :

[...]

b) la confirmation, la modification ou l'annulation de la décision anticipée;

[...]

(5) Le président donne avis au demandeur, sans délai, de la décision qu'il a prise en application du paragraphe (4), motifs à l'appui.

[Nos italiques]

21. Le paragraphe 67(3) de la Loi prévoit que, lors d'un appel prévu par le paragraphe 67(1), le Tribunal « [...] peut statuer [...] selon la nature de l'espèce, par ordonnance, constatation ou déclaration [...] ».

22. Le Tribunal a déclaré dans le passé que, compte tenu du paragraphe 67(3) de la Loi et de l'article 16 de la Loi sur le TCCE, il est clair que le Parlement voulait accorder au Tribunal de larges pouvoirs d'appel22. Sur cette base, le Tribunal a conclu dans Grodan que les pouvoirs que lui accorde l'article 67 de la Loi ne sont pas limités aux étroites questions de fond du classement tarifaire, de l'origine ou de la valeur en douane23. Plus précisément, le Tribunal était d'avis qu'il « [...] a le pouvoir, en vertu de l'article 67 de la Loi, de statuer non seulement sur le bien-fondé d'une décision rendue aux termes de l'article 60, mais également sur la validité de celle-ci » puisque « [...] le bien-fondé et la validité vont de pair »24.

23. La Cour d'appel fédérale a confirmé que les pouvoirs du Tribunal en vertu de l'article 67 de la Loi ne se limitent pas aux questions liées au fond d'un appel mais s'étendent aussi aux questions de compétence, comme la validité d'une décision rendue par l'ASFC en application de l'article 6025.

24. Par conséquent, le Tribunal conclut qu'une décision valide de l'ASFC en vertu du paragraphe 60(4) de la Loi relativement à une décision anticipée éventuelle en vertu du paragraphe 43.1(1) est une condition sine qua non de l'exercice de la compétence du Tribunal dans les appels de telles décisions en application du paragraphe 67(1).

LA DÉCISION ANTICIPÉE EST-ELLE VALIDE?

Dispositions législatives26

25. L'alinéa 43.1(1)c) de la Loi limite l'habilité à demander une décision anticipée sur le classement tarifaire de marchandises aux membres d'une catégorie réglementaire de personnes :

43.1(1) L'agent chargé par le président, individuellement ou au titre de son appartenance à une catégorie d'agents, de l'application du présent article est tenu, sur demande d'un membre d'une catégorie réglementaire présentée dans le délai réglementaire, [...] de rendre, avant l'importation de marchandises, une décision anticipée :

[...]

csur le classement tarifaire des marchandises.

[Nos italiques]

26. L'article 2 du Règlement sur les décisions anticipées en matière de classement tarifaire27 prescrit à son tour les catégories de personnes pouvant présenter une demande de décision anticipée. Il confirme aussi que les « marchandises » mentionnées au paragraphe 43.1(1) de la Loi sont les marchandises que le demandeur se propose d'importer :

2. Peuvent présenter une demande de décision anticipée à l'égard de marchandises à importer les membres des catégories suivantes :

ales importateurs de marchandises au Canada;

b) les personnes autorisées en vertu de l'alinéa 32(6)a) ou du paragraphe 32(7) de la Loi à faire la déclaration en détail ou provisoire de marchandises;

c) les exportateurs ou les producteurs des marchandises qui se trouvent à l'étranger.

[Nos italiques]

27. Selon le sens ordinaire des termes employés au paragraphe 43.1(1) de la Loi, une décision anticipée ayant trait au classement tarifaire de marchandises est invalide si le demandeur n'est pas membre de l'une des catégories de personnes prescrites à l'article 2 du Règlement.

28. BalanceCo convient qu'elle n'est pas membre des catégories de personnes mentionnées aux alinéas 2b) et c) du Règlement. En l'espèce, la question de compétence, en substance, est celle de savoir si BalanceCo tombe dans la catégorie de personnes « importateurs de marchandises au Canada » prévue à l'alinéa 2a).

29. Comme BalanceCo est dûment constituée en vertu de la partie II de la Loi sur les corporations canadiennes28, « Corporations sans capital-actions », et qu'elle a son domicile au Canada29, l'exigence « au Canada » de l'alinéa 2a) du Règlement est clairement respecté. La question que doit trancher le Tribunal peut donc se réduire encore à celle de savoir si BalanceCo est un « importateur de marchandises » au sens de l'alinéa 2a) du Règlement.

Position des parties

30. JCI soutient que pour être reconnue comme « importateur » au sens de l'article 2 du Règlement, une personne doit être réellement un importateur, ou à tout le moins prévoir être un importateur, des marchandises qui font l'objet de la décision anticipée. À cet égard, elle soutient que BalanceCo n'est ni l'un ni l'autre et qu'elle ne peut donc pas être reconnue comme un « importateur », selon le sens voulu du terme employé à l'alinéa 2a) du Règlement30. Au contraire, et cela est reconnu par BalanceCo31, la demande de décision anticipée a été présentée dans le but de s'assurer que les CT canadiens seraient appliqués aux importations de fromage32. Selon JCI, la décision anticipée prétendument accordée à BalanceCo en vertu du paragraphe 43.1(1) de la Loi est, par conséquent, entaché de nullité juridique et ne peut donc faire l'objet d'un appel auprès de l'ASFC en vertu du paragraphe 60(2) de la Loi. Comme il n'y a pas d'appel valide en vertu du paragraphe 60(2) de la Loi, il n'y a pas de décision valide pouvant faire l'objet d'un appel auprès du Tribunal en application de l'article 67 de la Loi33.

31. À l'audience, JCI a également soutenu que la demande de décision anticipée de BalanceCo n'avait pas été présentée avant l'importation des marchandises, contrairement à ce qu'exigent le paragraphe 43.1(1) de la Loi et l'article 3 du Règlement34. À cet égard, JCI a mentionné avoir importé les marchandises en cause près de deux mois avant la demande de BalanceCo.

32. BalanceCo réplique qu'une demande de décision anticipée de classement tarifaire à des fins d'application des CT, ainsi que la révision subséquente de la décision et des conclusions lors d'un appel devant le Tribunal, est totalement légitime étant donné que l'application des CT repose entièrement sur le classement adéquat des produits importés35.

33. BalanceCo ajoute que son admissibilité à demander une décision anticipée de classement tarifaire des marchandises en cause repose clairement sur son appartenance à la catégorie de personnes « les importateurs de marchandises au Canada » prévue à l'alinéa 2a) du Règlement36. Plus précisément, BalanceCo soutient que tout particulier ou entité juridique habilité à agir comme importateur de marchandises au Canada peut demander et obtenir une décision anticipée de classement tarifaire de marchandises aux termes de l'alinéa 43.1(1)c) de la Loi et aux termes du Règlement, et que l'article 2 du Règlement ne rend nullement l'acceptation de demandes de décisions anticipées conditionnelle à la preuve d'importation antérieure des marchandises en cause ou d'autres marchandises ni à l'intention d'importer les marchandises sous réserve de la demande de décision anticipée37. Plus particulièrement, BalanceCo soutient qu'elle est un importateur parce qu'elle est une entité juridique « établie à des fins d'activités d'importation » [traduction], à savoir celle d'assurer l'intégrité du système des CT canadiens38, et que ses statuts l'autorisent à agir comme importateur de marchandises au Canada39.

34. Pour sa part, l'ASFC soutient que toute l'argumentation de JCI se fonde sur une interprétation étroite du terme « importateur », qui est contraire à l'esprit et à l'objet des dispositions sur les décisions anticipées de l'article 43.1 de la Loi et de celles du Règlement. L'ASFC ajoute que la Loi d'interprétation40 et les principes modernes d'interprétation des lois tels qu'adoptés par la Cour suprême du Canada dans Bell ExpressVu Limited Partnership c. Rex41 exigent que le Tribunal donne une interprétation large à ce terme afin de ne pas frustrer l'intention du Parlement42. À cet égard, l'ASFC affirme que le fondement du régime de décisions anticipées est de permettre aux personnes intéressées à importer des marchandises au Canada (y compris les importateurs futurs ou éventuels) de connaître le classement tarifaire et le taux de droits associé qui s'appliquera à l'importation43. L'ASFC ajoute que, d'un point de vue pratique, l'intention du demandeur n'est pas pertinente parce que les agents des douanes ne disposent d'aucun moyen réaliste de vérifier si le demandeur a l'intention d'importer les marchandises44.

35. En réplique, JCI admet que le programme de décisions anticipées vise également à être utile aux importateurs prospectifs de marchandises en les informant au préalable du traitement tarifaire qui s'appliquera aux marchandises qu'ils se proposent d'importer. Par conséquent, un « importateur » est un importateur établi ou un importateur potentiel des marchandises qu'il se propose d'importer faisant l'objet d'une demande de décision anticipée. JCI soutient que, d'une façon ou d'une autre, BalanceCo n'est pas un « importateur » parce qu'aucun élément de preuve n'indique que celle-ci a des activités d'importation et que — de son propre aveu — elle n'a aucunement l'intention d'importer les marchandises en cause45. JCI soutient que, par conséquent, BalanceCo n'a pas demandé la décision anticipée afin d'importer éventuellement les marchandises en cause, mais plutôt afin d'en restreindre l'importation46.

Analyse

Méthode correcte d'interprétation des lois

36. Une série de décisions de la Cour suprême du Canada établit clairement que la méthode correcte d'interprétation des lois est la méthode contextuelle moderne selon laquelle :

[...] il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur47.

[Nos italiques]

37. Dans 65302 British Columbia Ltd. c. Canada48, la Cour suprême du Canada, bien que confirmant la méthode contextuelle moderne de l'interprétation des lois, a fait remarquer ce qui suit : « [...] notre Cour a aussi souvent fait preuve de circonspection dans l'emploi de moyens d'interprétation des lois permettant de s'écarter d'un libellé clair et non ambigu49. »

38. La Cour suprême du Canada, dans Hypothèques Trustco Canada c. Canada50, a apporté d'autres éclaircissements sur l'interaction entre le principe du sens ordinaire, le contexte et l'objet dans l'application de la méthode contextuelle moderne de l'interprétation des lois :

Il est depuis longtemps établi en matière d'interprétation des lois qu'« il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur » : voir 65302 British Columbia Ltd. c. Canada, 1999 [...] [1999] 3 R.C.S. 804, par. 50. L'interprétation d'une disposition législative doit être fondée sur une analyse textuelle, contextuelle et téléologique destinée à dégager un sens qui s'harmonise avec la Loi dans son ensemble. Lorsque le libellé d'une disposition est précis et non équivoque, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d'interprétation. Par contre, lorsque les mots utilisés peuvent avoir plus d'un sens raisonnable, leur sens ordinaire joue un rôle moins important. L'incidence relative du sens ordinaire, du contexte et de l'objet sur le processus d'interprétation peut varier, mais les tribunaux doivent, dans tous les cas, chercher à interpréter les dispositions d'une loi comme formant un tout51.

[Nos italiques]

39. Enfin, plus récemment, l'interaction entre le sens ordinaire et l'objet a été exprimée de façon succincte dans Celgene Corp. c. Canada (Procureur général)52, dans laquelle la juge Abella, au nom de la Cour suprême du Canada, a affirmé ce qui suit : « S'il est clair, le libellé prévaut; sinon, il cède la pas à l'interprétation qui convient le mieux à l'objet prédominant de la loi53. »

Sens grammatical et ordinaire

40. Le terme « importateur » n'est pas défini dans la Loi ni dans le Règlement. Conformément à la règle moderne d'interprétation des lois, le Tribunal tentera en premier de donner un sens à ce terme au regard de sa signification grammaticale et ordinaire.

41. Comme le fait remarquer JCI54, les définitions du mot « importateur » de dictionnaires reconnus renvoient aux personnes réellement actives dans l'importation. Le Dictionary of Canadian Law, par exemple, définit le terme « importer » (importateur) comme suit : « personne engagée dans l'activité d'importer des marchandises au Canada »55 [traduction]. Le Shorter Oxford English Dictionary le définit comme suit : « personne ou chose qui importe quelque chose, notamment un commerçant qui importe des marchandises d'autres pays »56 [traduction]. Enfin, le Webster's Third New International Dictionary définit ce terme comme suit : « celui qui importe, notamment celui dont l'entreprise est l'importation et la vente de marchandises à partir d'un pays étranger »57 [traduction]. Par conséquent, il semble qu'il faut au moins qu'un « importateur » soit quelqu'un d'actif dans les activités d'importation58.

42. Cependant, comme l'a expliqué le juge Jackett, s'exprimant au nom de la Cour de l'Échiquier du Canada dans Her Majesty the Queen v. The Singer Manufacturing Company59 : « Les termes “exportateur” et “importateur” ne sont pas une création du droit; il s'agit de termes qui acquièrent le sens qu'ils ont lorsqu'ils sont employés dans un contexte [particulier] [...] »60 [traduction]. La décision dans Celgene, sur laquelle se fonde BalanceCo, appuie également l'application d'une interprétation contextuelle et téléologique du terme « importateur » à l'alinéa 2a) du Règlement61.

43. D'ailleurs, les parties conviennent que le sens du mot « importateur » employé à l'article 2 du Règlement est plus large que la définition étroite du dictionnaire. JCI, pour sa part, concède, comme mentionné plus haut, que le mot « importateur » employé à l'article 2 ne se limite pas aux importateurs établis mais comprend également les importateurs potentiels tels que ceux qui importent pour la première fois62.

44. Comme la signification du terme « importateur » n'est ni précise ni non équivoque, le Tribunal, en l'interprétant, doit tenir compte du contexte de son emploi comme il se reflète dans l'économie, l'intention et l'objet de la législation.

45. Ayant déjà étudié l'économie de la législation, le Tribunal se penchera sur son intention et son objet.

Intention et objet

46. Le Tribunal est d'accord avec l'assertion de l'ASFC selon laquelle, compte tenu des points variés et divers auxquels s'applique la Loi, le Tribunal, dans la définition de l'objet, doit se restreindre à la portion de la législation portant sur l'application du programme de décisions anticipées :

Dans [Bell ExpressVu], la Cour suprême a fait remarquer le fait que les mots, comme les gens, prennent leur couleur de leur environnement. L'ASFC est d'avis que l'environnement pertinent n'est pas la Loi sur les douanes dans son entier parce que, comme nous le savons, c'est une loi bien détaillée. C'est presque l'équivalent, je dirais, de la Loi de l'impôt sur le revenu, et certains articles diffèrent complètement d'autres articles à certains égards. Notre position est que la couleur et l'environnement devant être appliqués à un importateur se trouvent à l'article 43.1. L'objet global de cet article est de permettre aux importateurs de demander une décision anticipée avant l'importation d'un produit au Canada63.

[Nos italiques, traduction]

47. Si l'on étudie d'abord l'intention du Parlement, il n'est pas contesté que l'expression « est tenu » employée au paragraphe 43.1(1) de la Loi ordonne que soient rendues des décisions anticipées en faveur de tout demandeur admissible et qu'aucune discrétion législative n'a été accordée à l'ASFC à cet égard.

48. Il n'est également pas contesté que le renvoi à des catégories réglementaires de personnes au paragraphe 43.1(1) de la Loi témoigne de l'intention claire du Parlement de limiter le nombre de personnes admissibles aux décisions anticipées64. Une telle limitation peut, bien sûr, découler de l'application d'une interprétation contextuelle plus étroite que ce qui aurait été le cas par ailleurs aux catégories individuelles de personnes énumérées à l'article 2 du Règlement, et/ou de l'omission complète de certaines catégories de personnes de cette énumération65.

49. BalanceCo admet que « [...] la définition de catégorie vise à imposer certaines limites [...] »66 [traduction], ajoutant que « [...] le coeur de la question est la détermination de l'étendue ce ces limites [...] »67 [traduction], qui, à son avis, ne sont « [...] pas grand-chose [...] »68 [traduction] parce que « [...] c'est un terme large, et cela est intentionnel [...] »69 [traduction].

50. Quant à la question de l'objet, le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation70 (REIR), publié conjointement au Règlement, prévoit ce qui suit :

Le nouveau règlement offre un certain degré de certitude aux importateurs, exportateurs, producteurs ou personnes autorisés à déclarer des marchandises avant leur importation. [...] L'accessibilité des décisions anticipées s'avère d'une importance capitale pour les négociants, surtout ceux à la tête de petites ou de moyennes entreprises. Elles fournissent un certain degré de certitude et de constance quant au traitement que recevra une marchandise particulière aux Douanes une fois que l'importation a eu lieu. De plus, dans un marché compétitif, elles fournissent à l'avance une connaissance du traitement que recevra une marchandise particulière [lors de l'importation] [...]. Le règlement aide l'ASFC à offrir un service plus efficace aux importateurs de marchandises au Canada.

[Nos italiques]

51. Selon le REIR, l'objet du programme de décisions anticipées est d'offrir un certain degré de certitude aux importateurs, aux exportateurs, aux producteurs ou aux personnes autorisées à déclarer des marchandises avant leur importation71. Cela vise clairement, entre autres72, à permettre aux importateurs de prendre une décision informée d'aller ou non de l'avant avec l'importation de marchandises qu'ils se proposent d'importer mais qui ne se sont pas forcément déjà engagés à le faire. L'objet déclaré de la législation apporte un éclairage utile à l'interprétation de l'article 2 du Règlement. Plus particulièrement, il indique la notion d'intention, résumée dans l'expression « [...] marchandises à importer [...] ». De plus, comme cette expression figure dans l'introduction de l'article 2, elle doit être interprétée comme modifiant chacune des catégories de personnes subséquentes, y compris la catégorie décrite à l'alinéa 2a), de manière à ce que les « importateurs de marchandises au Canada » se limitent aux personnes qui ont l'intention d'importer les marchandises, ce qui exclut les importateurs « hypothétiques ».

52. Par ailleurs, le Tribunal constate que le Mémorandum D11-11-373 prévoit ce qui suit :

16. Il n'y a pas lieu de rendre une décision anticipée dans les situations suivantes :

[...]

e) lorsque la demande est de nature hypothétique;

[...]

[Nos italiques]

Étant donné que le paragraphe 43.1(1) de la Loi n'attribue aucune discrétion à l'ASFC, laquelle doit émettre une décision anticipée sur réception d'une demande provenant d'un membre d'une catégorie réglementaire de personnes, la position de l'ASFC selon laquelle elle peut rejeter les « demandes de nature hypothétique » semble dériver d'une interprétation de l'article 2 plus étroite que celle qu'elle a adoptée dans le cadre de la présente procédure.

53. L'absence dans le REIR de toute mention de l'expérience antérieure d'importations, combinée à la reconnaissance explicite de l'importance particulière du programme pour les petites et moyennes entreprises, suggère que le programme a pour objet d'offrir aux importateurs établis et aux importateurs éventuels se proposant d'importer pour la première fois un degré de certitude et de prévisibilité à l'égard du traitement d'une marchandise particulière (les marchandises sur lesquelles porte la décision anticipée) au moment de l'importation, un point qui n'est pas contesté.

54. Enfin, la mention « [...] dans un marché compétitif, elles fournissent à l'avance une connaissance du traitement que recevra une marchandise particulière [...] » est conforme à la pratique de rendre de telles décisions à la fois en faveur des importateurs établis et des importateurs éventuels se proposant d'importer pour la première fois, mais qui ne sont pas nécessairement prêts à s'y engager avant de recevoir la décision anticipée de traitement tarifaire des marchandises à importer, qui déterminera l'opportunité de l'importation dans un marché compétitif74.

55. Par conséquent, le Tribunal est d'avis qu'un demandeur, soit à titre d'importateur établi ou à titre d'importateur éventuel se proposant d'importer pour la première fois, qui n'entend pas importer les marchandises « à importer » dans sa demande de décision anticipée ne peut être considéré comme un « importateur » au sens de ce terme dans le contexte de son emploi à l'alinéa 2a) du Règlement.

Conclusion

56. En l'espèce, les éléments de preuve indiquent clairement qu'au moment de sa demande, BalanceCo n'était nullement intéressée à importer les marchandises qui faisaient l'objet de sa demande de décision anticipée75 et que sa demande était motivée par des considérations étrangères à l'objet de la législation76. En fait, et comme l'a correctement fait remarquer JCI, BalanceCo n'a pas demandé la décision anticipée pour faciliter l'importation proposée des marchandises en cause, mais plutôt pour en restreindre l'importation77. Par conséquent, BalanceCo ne peut être considérée comme un « importateur » selon n'importe quel sens raisonnable que l'on puisse donner à ce terme.

57. Ayant examiné la signification du terme « importateur » en appliquant la méthode d'interprétation contextuelle moderne, le Tribunal conclut que le sens de ce mot tel qu'il est employé à l'alinéa 2a) du Règlement est nécessairement plus large que les définitions ordinaires du dictionnaire ne le suggèrent. Toutefois, le Tribunal ne peut être d'accord avec l'assertion de BalanceCo selon laquelle il n'y a rien dans le Règlement qui restreigne ou qualifie d'une autre manière la portée de l'expression « importateurs de marchandises au Canada » employée à l'alinéa 2a) du Règlement de manière à empêcher de recourir aux décisions anticipées dans le but de faire appliquer les CT ou à toute autre fin78. Notamment, le Tribunal tient compte de l'intention législative explicite de limiter l'admissibilité aux décisions anticipées et de l'objet législatif du programme de décisions anticipées consistant à aider les personnes intéressées à importer (et non à leur nuire) en leur offrant un certain degré de certitude et de prévisibilité quant au traitement de marchandises données par les Douanes lors de leur importation au Canada.

58. Bien que le Tribunal soit d'accord avec l'affirmation de BalanceCo selon laquelle « [t]out particulier ou entité juridique habilité à agir comme importateur de marchandises au Canada peut demander et obtenir une décision anticipée de classement tarifaire de marchandises aux termes de l'alinéa 43.1(1)c) de la Loi sur les douanes et aux termes du Règlement sur les décisions anticipées »79 [traduction], cela est conditionnel, pour les motifs déjà exposés, à ce que ledit particulier ou ladite entité juridique entende réellement importer les marchandises sur lesquelles porte la demande de décision anticipée80.

59. Le Tribunal comprend les inquiétudes de l'ASFC sur le plan de l'application pratique. Cependant, bien que la qualité d'importateur de marchandises d'un demandeur puisse être présumée, une telle présomption ne peut valoir dans les cas rares et uniques, comme l'espèce, où il y a des éléments de preuve clairs et convaincants du contraire. Dans de tels cas, dans lesquels le demandeur induit l'ASFC en erreur quant à l'objectif de la demande de décision anticipée, lequel est totalement étranger à toute intention d'importer les marchandises faisant l'objet de la demande, le demandeur doit accepter qu'il court le risque que la décision soit infirmée dans une procédure subséquente.

60. Bien que le Tribunal préfère disposer des appels sur le fond, il ne peut agir sans compétence. À cet égard, étant donné que BalanceCo n'était pas un demandeur admissible à une décision anticipée, la décision résultante rendue en vertu du paragraphe 43.1(1) de la Loi est invalide, ce qui frappe à son tour de nullité la décision prétendument rendue par l'ASFC aux termes du paragraphe 60(4). Par conséquent, le Tribunal conclut qu'il n'a pas compétence pour connaître de l'appel.

DÉCISION

61. Par conséquent, l'appel est rejeté au motif d'absence de compétence.


1 . L.R.C. 1985, (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . JCI, l'intervenante dans le présent appel, est un importateur et distributeur canadien de produits alimentaires (dont des produits laitiers), qui a conçu les marchandises en cause conjointement avec un client particulier et à son intention (Pizza Pizza, la plus grande chaîne canadienne de pizzerias comptant 690 points de vente) et a conclu ce qu'elle décrit comme un arrangement avec une société américaine afin de produire les marchandises en cause exclusivement pour JCI, une assertion qui n'a pas été contredite. Voir pièce du Tribunal AP-2012-036-18A aux para. 6, 12.

3 . L.C. 1997, c. 36.

4 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-04A au para. 5; pièce du Tribunal AP-2012-036-29A, onglet 3 au para. 2; Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 91, 156.

5 . La décision du Tribunal d'accorder l'autorisation d'intervenir a été rendue en réponse à l'avis d'intervention de JCI daté du 7 décembre 2012.

6 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-18A au para. 5(i).

7 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-27.

8 . D.O.R.S./91-499.

9 . Bien que JCI ne se soit pas opposée au dépôt d'autorités supplémentaires par BalanceCo au début de l'audience, l'ASFC a exprimé des réserves relativement au manque de temps dont elle disposait pour étudier ces autorités. Le Tribunal a accordé aux parties une pause prolongée pour dîner afin qu'elles puissent étudier les documents et a déclaré que si l'ASFC avait toujours des réserves relativement aux autorités supplémentaires après l'argumentation de BalanceCo, le Tribunal accorderait un ajournement jusqu'au lendemain afin de permettre à l'ASFC de pleinement préparer sa cause. Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 74-75. Toutefois, l'ASFC n'a pas demandé d'ajournement et a présenté ses observations tout de suite après l'argumentation de BalanceCo.

10 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-25B au para. 2(a).

11 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-11.

12 . R. c. Morgentaler, [1993] 1 R.C.S. 462 aux para. 1-2; pièce du Tribunal AP-2012-036-25D, onglet 11.

13 . Dans Canada (Procureur général) c. TeleZone Inc., [2010] 3 R.C.S. 585, au para. 44, la Cour suprême du Canada a conclu à l'unanimité que le terme « compétence » désigne simplement « [...] l'ensemble des attributions qui permettent à un tribunal judiciaire ou administratif de rendre des ordonnances ou jugements susceptibles d'exécution » [nos italiques].

14 . Newman's Valve Limited (10 octobre 1997), AP-96-121 [Newman's Valve] à la p. 4.

15 . [2008] 1 R.C.S. 190.

16 . Ibid. at para. 29.

17 . Ibid. au para. 59.

18 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-11.

19 . Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, à la p. 84.

20 . Newman's Valve à la p. 5.

21 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

22 . Grodan Inc. c. Président de l'Agence des services frontaliers du Canada (1er juin 2012), AP-2011-031 (TCCE) [Grodan] aux para. 29-31. Voir aussi Walker Exhausts Division of Tenneco Canada Inc. (6 juillet 1994), AP-93-063 (TCCE) à la p. 4.

23 . Dans Grodan au para. 30, le Tribunal a relevé le contraste entre le libellé du paragraphe 67(3) de la Loi et le libellé plus étroit du paragraphe 60(4), qui énonce que lorsque l'ASFC reçoit une demande de révision ou de réexamen aux termes du paragraphe 60(1), elle doit procéder à « [...] a) la révision ou le réexamen de l'origine, du classement tarifaire ou de la valeur en douane [...] ».

24 . Grodan au para. 33. Cela dit, au para. 32, le Tribunal a constaté que l'article 67 de la Loi n'a pas pour effet de lui donner la compétence de statuer sur toutes les questions de droit soulevées dans le cadre de tout appel dont il est saisi; par exemple, elle ne s'étend pas aux questions d'administration et d'application de la loi.

25 . Fritz Marketing Inc. c. Canada, [2009] 4 R.C.F. 314 aux para. 10, 36. Voir aussi Canada (Agence des services frontaliers) c. C.B. Powell Limited, 2010 CAF 61 (CanLII) aux para. 33, 48-49.

26 . À des fins de clarté, le terme « législation » est employé pour renvoyer à la fois à la Loi (en ce qui a trait au programme de décisions anticipées) et au Règlement sur les décisions anticipées en matière de classement tarifaire adopté sous son autorité, qui ensemble établissent le programme de décisions anticipées.

27 . D.O.R.S./2005-256 [Règlement].

28 . L.R.C. 1970, c. C-32.

29 . Le paragraphe 24(1) de la Loi sur les corporations canadiennes prévoit ce qui suit : « La compagnie est tenue de toujours avoir un siège à l'endroit au Canada que prévoient les lettres patentes ou les dispositions de la présente Partie, lequel siège est le domicile de la compagnie au Canada; et elle peut établir ailleurs, à l'intérieur ou hors du Canada, les autres bureaux et agences qu'elle juge utiles » [nos italiques]. Bien que le paragraphe 24(1) soit dans la partie 1, « Compagnies par actions », cette disposition s'applique aussi à la partie II, « Corporations sans capital-actions », par l'effet de l'alinéa 157(1)c), lequel prévoit ce qui suit : « 157.(1) Les dispositions suivantes de la Partie I s'appliquent aux corporations auxquelles la présente Partie est applicable, savoir : [...] c) les articles 21 à 24 [...] » [nos italiques]. À cet égard, le dossier indique que le siège social de BalanceCo se situe à Ottawa (Ontario). Pièce du Tribunal AP-2012-036-18A, onglet C.

30 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-18A au para. 32.

31 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-04A au para. 5.

32 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-18A au para. 31.

33 . Ibid. au para. 34.

34 . Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 8, 58-60.

35 . Ibid. à la p. 102.

36 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-25B au para. 11.

37 . Ibid. au para.13.

38 . Ibid. au para. 18; Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 89-90, 155-156.

39 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-25B, onglet B; Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 89-91.

40 . L.R.C. 1985, c. I-21.

41 . [2002] 2 R.C.S. 559 [Bell ExpressVu].

42 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-28A aux para. 13, 14.

43 . Ibid. aux para. 6, 10.

44 . Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, à la p. 174.

45 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-18A au para. 31; Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 51-53.

46 . Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 52, 53.

47 . Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, au para. 21.

48 . [1999] 3 R.C.S. 804.

49 . Ibid. au para. 51.

50 . [2005] R.C.S. 601 [Hypothèques Trustco Canada].

51 . Hypothèques Trustco Canada au para. 10.

52 . [2011] 1 R.C.S. 3 [Celgene].

53 . Ibid. au para. 21.

54 . Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, à la p. 36.

55 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-30A, onglet 10.

56 . Cinquième éd., s.v. « importer ».

57 . S.v. « importer ».

58 . L'on peut soutenir que cela est appuyé par le choix du libellé « importateur de marchandises » plutôt que « importateur des marchandises », le premier suggérant quelqu'un d'actif dans le commerce d'importation en général et le second indiquant quelqu'un qui participe à l'importation réelle ou éventuelle de marchandises particulières.

59 . [1968] 1 R.C. de l'É. 129.

60 . Ibid. aux pp. 135-136.

61 . Dans Celgene, le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés avait demandé que Celgene Corp., un distributeur établi au New Jersey d'un produit pharmaceutique récemment breveté, donne des renseignements sur les prix remontant à la date à laquelle elle avait commencé à vendre le médicament aux Canadiens en 1995. Celgene Corp. avait refusé de donner tous les renseignements demandés, soutenant qu'en vertu des principes de droit commercial, le médicament était techniquement « vendu » au New Jersey et échappait donc à la portée du pouvoir d'enquête sur les prix accordé au Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés par la Loi sur les brevets, L.R.C. 1985, c. P-4. Le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés avait conclu que les ventes de Celgene Corp. à des Canadiens étaient des ventes « sur un marché canadien » et qu'elle relevait de sa compétence en matière d'enquête sur les prix et de ses pouvoirs de réparation connexes. La décision avait d'abord été infirmée lors du contrôle judiciaire, mais la Cour d'appel fédérale et la Cour suprême du Canada ont retenu l'interprétation qu'avait faite de son mandat le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés. Notamment, la Cour suprême du Canada a conclu que bien que des termes comme « vendu » puissent avoir un sens en droit commercial dans certains contextes législatifs, l'acceptation d'une définition technique de droit commercial dans le contexte du régime d'enquête sur le prix de la Loi sur les brevets irait à l'encontre du mandat de protection du consommateur du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés en l'empêchant de protéger les acheteurs canadiens de médicaments brevetés vendus à l'étranger.

62 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-18A au para. 31; Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 42, 43, 190.

63 . Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 169-170.

64 . La limitation d'admissibilité aux catégories réglementaires de personnes reflète le fait que l'émission d'une décision anticipée n'est pas un exercice simple. Comme le fait remarquer l'ASFC relativement au délai de 120 jours, « il faut assez de temps pour que l'ASFC prenne connaissance de la demande et l'étudie. Dans certains cas, des demandes de complément d'information sont présentées et dans d'autres cas, bien entendu, des échantillons sont nécessaires. Le calendrier est conçu de manière à disposer d'assez de temps pour pouvoir statuer sur la décision anticipée » [traduction]. Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, à la p. 179.

65 . Par exemple, lorsque l'alinéa 2c) du Règlement s'applique à des producteurs étrangers de marchandises soumises à une demande de décision anticipée, la catégorie de personnes formée des producteurs étrangers d'autres marchandises dont les installations de production pourraient être utilisées pour produire des marchandises soumises à la demande de décision anticipée est omise de l'article 2.

66 . Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, à la p. 125.

67 . Ibid.

68 . Ibid.

69 . Ibid. aux pp. 125-126.

70 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-25D, onglet 15.

71 . JCI accorde une grande importance au fait que, comme l'énonce le REIR, le programme de décisions anticipées vise à être utile aux importateurs en tant que « négociants ». Le Tribunal constate que les définitions acceptées de « trader » (négociant) comprennent ce qui suit : « celui qui a pour activité d'acheter des marchandises, des biens ou des produits pour les revendre à profit » [traduction] (Black's Law Dictionary, 6e éd., s.v. « trader »), et « personne qui gagne sa vie en achetant et en vendant pour réaliser un gain » [traduction] (Webster's Third New International Dictionary, s.v. « trader »). Néanmoins, le Tribunal est d'avis que le terme « négociants » a probablement été employé à des fins de commodité, dans l'intention d'englober toutes les catégories de personnes mentionnées à l'article 2 du Règlement. Par conséquent, il convient de ne pas donner à l'emploi de ce mot une signification indue.

72 . Une décision anticipée de classement tarifaire (et l'obligation résultante relative aux droits de douanes) peut également aider un importateur à établir le prix des marchandises pour leur revente, par exemple.

73 . « Décisions anticipées en matière de classement tarifaire » (23 avril 2010).

74 . Bien que le Tribunal soit d'accord avec BalanceCo que la décision de la Cour suprême du Canada dans Celgene est pertinente en l'espèce, dans la mesure où le Tribunal considère qu'il est approprié de tenir compte du contexte législatif et de l'objet de l'emploi du terme « importateur » à l'alinéa 2a) du Règlement, il fait remarquer toutefois que, contrairement à ce qui était le cas dans Celgene, la question n'est pas ici de déterminer si la définition du terme « importateur » exclut BalanceCo d'une certaine catégorie d'importateurs, mais consiste plutôt à déterminer si, lorsqu'elle a demandé une décision anticipée, BalanceCo pouvait être considérée comme un importateur selon n'importe lequel des sens correctement attribués à ce terme par l'alinéa 2a) du Règlement.

75 . Le dossier indique que les marchandises décrites dans la demande de décision anticipée de BalanceCo sont des marchandises importées par JCI (pièce du Tribunal AP-2012-036-04B, onglets C, I) et que les marchandises en cause ont été préparées pour JCI et importées par celle-ci. Pièce du Tribunal AP-2012-036-18A au para. 12.

76 . BalanceCo n'a pas hésité à réaffirmer lors de l'audience qu'elle « [...] a entrepris ce processus dans le but d'assurer l'intégrité du régime des CT » [traduction] et que « [c]e n'est pas quelque chose dont nous nous cachons » [traduction]. Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, à la p. 162.

77 . Transcription de l'audience publique, 9 avril 2013, aux pp. 52, 53.

78 . Ibid. à la p. 102.

79 . Pièce du Tribunal AP-2012-036-25B au para. 13.

80 . D'ailleurs, le libellé « importateur de marchandises au Canada » plutôt que, par exemple, « toute personne autorisée à importer », selon le modèle employé juste au-dessous, à l'alinéa 2b) du Règlement, dénote une certaine restriction de l'étendue de cette catégorie, qui rejoint l'inclusion de la notion d'intention d'importer dans la définition du terme « importateur ».