LES PÉTROLES J. & G. GAUTHIER INC.

Décisions


LES PÉTROLES J. & G. GAUTHIER INC.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no 2970

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 17 mars 1992

Appel no2970

EU ÉGARD À un appel entendu le 20 janvier 1992 en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 10 décembre 1987, concernant un avis d'opposition signifié conformément à l'article 81.15 de la Loisur la taxe d'accise.

ENTRE

LES PÉTROLES J. & G. GAUTHIER INC.Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONALIntimé

L'appel est rejeté. L'appelant étant réputé être le fabricant des marchandises aux termes de l'alinéa 2(1)e), il est responsable du paiement de la taxe de vente conformément au sous-alinéa 27(1)a)(i) de la Loi sur la taxe d'accise.


John C. Coleman ______ John C. Coleman Membre présidant

Michèle Blouin ______ Michèle Blouin Membre

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





L'appelant n'a pas versé la taxe de vente lors de la vente subséquente de produits pétroliers obtenus auprès d'un revendeur non muni de licence. Ce dernier avait indiqué sur ses factures que les taxes de vente et d'accise fédérales étaient incluses dans le prix de vente. Puisque l'appelant n'a avancé aucun moyen à l'encontre de la partie de la cotisation ayant trait à la taxe d'accise, la seule question en litige consiste à déterminer si, malgré la mention «toutes taxes fédérales incluses», l'appelant est tenu de payer la taxe de vente en vertu de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Il n'y a pas eu double imposition en l'espèce. D'autre part, puisque l'appelant est réputé être le fabricant des marchandises selon l'alinéa2(1)e), il est responsable du paiement de la taxe conformément au sous-alinéa27(1)a)(i) de la Loi sur la taxe d'accise.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 20 janvier 1992 Date de la décision : Le 17 mars 1992
Membres du Tribunal : John C. Coleman, membre présidant Michèle Blouin, membre Desmond Hallissey, membre
Avocat pour le Tribunal : Gilles B. Legault
Greffier : Dyna Côté
Ont comparu : Gaston Gauthier, pour l'appelant Alain Lafontaine, pour l'intimé





Il s'agit en l'espèce d'un appel interjeté en vertu de l'article 51.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi).

Le 19 août 1987, l'appelant a reçu une cotisation au montant de 110 447,95 $ à titre de taxes, de pénalités et d'intérêts pour la période s'étendant du 1er octobre 1983 au 28 février 1987. Un avis d'opposition signifié le 26 août 1986 a été par la suite accepté en partie, le ministre du Revenu national (le Ministre) accordant à l'appelant un rajustement de 8 111,03 $. Toutefois, un solde totalisant 102 479,48 $ demeurait payable du fait que l'appelant n'avait versé aucune taxe lors de la vente subséquente de produits pétroliers obtenus auprès d'un revendeur non muni de licence. Ce dernier avait indiqué sur ses factures que les taxes fédérales de vente et d'accise étaient comprises dans son prix de vente. Selon le Ministre, cette mention sur les factures ne modifiait en rien les obligations fiscales de l'appelant prévues par la Loi. Le 9 février 1988, l'appelant portait la décision du Ministre en appel devant le Tribunal.

Le Tribunal note tout d'abord que l'appelant n'a avancé aucun moyen à l'égard de la partie de la cotisation ayant trait à la taxe d'accise. Conséquemment, la seule question en litige consiste à déterminer si l'appelant est tenu de payer la taxe de vente, et ce, même si les factures des achats pour lesquels cette taxe lui est réclamée portaient la mention «toutes taxes fédérales incluses».

Le sous-alinéa 27(1)a)(i) de la Loi [2] se lit comme suit :

27. (1) Est imposée, prélevée et perçue une taxe de consommation ou de vente de neufpour cent sur le prix de vente de toutes marchandises,

a) produites ou fabriquées au Canada,

(i) payable, dans tout cas autre que celui mentionné au sous-alinéa (ii) ou (iii), par le producteur ou fabricant à l'époque où les marchandises sont livrées à l'acheteur ou à l'époque où la propriété des marchandises est transmise, en choisissant celle de ces dates qui est antérieure à l'autre,

Lors de l'audience, l'appelant n'a fait entendre aucun témoin. Après avoir souligné que l'appelant avait payé la taxe à son fournisseur, l'avocat de l'appelant a prétendu que la Loi n'empêche pas les transactions du type de celles qui sont intervenues et que l'appelant était donc libre de payer la taxe lors des achats en question. L'avocat a plaidé également que l'appelant ne peut être assujetti à une double imposition et, qu'en l'absence d'un texte clair, il ne peut être cotisé en vertu de la Loi. L'avocat a aussi tiré argument du libellé du paragraphe 27(3) de la Loi [3] et a opposé à l'intimé que la taxe était payable par le fournisseur plutôt que par l'appelant.

Quant à l'intimé, l'essentiel de son argumentation repose sur la définition du mot «fabricant» à l'alinéa 2(1)e) de la Loi. En vertu de cette disposition, l'appelant est présumé être un fabricant au sens de la Loi parce qu'il ne vend pas d'essence directement aux consommateurs. L'appelant est donc responsable de la taxe comme le prévoit le sous-alinéa 27(1)a)(i) de la Loi qui, tout en imposant la taxe de vente, stipule qu'elle est payable par le fabricant au moment où les marchandises sont livrées à l'acheteur. Selon l'avocat de l'intimé, le paragraphe 27(3) ne s'applique pas en l'espèce compte tenu, entre autres choses, que l'appelant est réputé être le fabricant en vertu de l'alinéa 2(1)e) de la Loi.

L'intimé a aussi prétendu qu'il n'y a pas eu double imposition, que les transactions entre l'appelant et son revendeur sont de nature privée, donc étrangères à l'application de la Loi et, enfin, que l'appelant ne peut invoquer sa propre turpitude.

Le Tribunal ne peut que donner raison à l'intimé. L'appelant n'a fait entendre aucun témoin et n'a pas démontré en quoi la cotisation serait mal fondée. Qui plus est, il n'y a aucun élément de preuve quant à la double imposition alléguée par l'appelant. Enfin, contrairement à ce qu'il a prétendu, les dispositions de la Loi sur lesquelles s'appuie la cotisation sont claires et sans équivoque : l'appelant est présumé être le fabricant des produits selon la définition de «fabricant» à l'alinéa 2(1)e), et la taxe de vente est payable par le fabricant au moment de la vente en vertu du sous-alinéa 27(1)a)(i).

Quant au paragraphe 27(3) de la Loi, le Tribunal est d'avis qu'il doit se lire avec le paragraphe 27(2) [4] . Ce dernier prévoit que la taxe de vente n'est pas payable lors de certaines transactions entre personnes assujetties à la Loi, par exemple un fabricant, un producteur et un importateur. Par contre, le paragraphe 27(3) vient rétablir l'assujettissement à la Loi lorsqu'un tiers acquiert, de ces personnes ou contre elles, le droit de vendre des marchandises. On peut penser que ce paragraphe vise la disposition de biens par des créanciers d'un producteur ou fabricant ou, comme le soutient l'intimé, par un syndic lors de la faillite d'une de ces personnes. Le tiers qui vendra ainsi les marchandises se verra assujetti au paiement de la taxe de vente. Ce mécanisme n'a donc rien à voir avec les transactions ayant eu cours entre l'appelant et son fournisseur. Dès lors, le Tribunal voit mal comment l'appelant peut l'invoquer à l'encontre du texte clair du sous-alinéa 27(1)a)(i) pour maintenir que seul son fournisseur est responsable de la taxe que l'appelant dit lui avoir payée. Cette taxe, d'ailleurs, l'appelant ne l'a jamais versée au sens de la Loi. Les transactions entre l'appelant et son fournisseur étant étrangères à la Loi, la mention «toutes taxes fédérales incluses» ne peut en effet constituer un moyen recevable pour en contrer l'application. Il est permis d'imaginer les conséquences vis-à-vis des obligations fiscales imposées par la Loi si tout un chacun, parmi les contribuables, opposait au Ministre des transactions de nature privée semblables à celles ayant eu cours en l'espèce.

Pour ces raisons, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. S.R.C. (1970), ch. E-13, maintenant l'article 81.19, L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée.

2. Maintenant le sous-alinéa 50(1)a)(i), L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée.

3. Maintenant le paragraphe 50(6), L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée.

4. Maintenant le paragraphe 50(5), L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée.


Publication initiale : le 8 août 1997