ROSEMOUNT INSTRUMENTS LIMITED

Décisions


ROSEMOUNT INSTRUMENTS LIMITED
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
Appel no 2874

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 24 février 1992

Appel no 2874

EU ÉGARD À un appel entendu le 22 octobre 1991, en vertu de l'article 47 de la Loi sur les douanes, S.R.C. (1970), ch. C-40;

ET EU ÉGARD À une nouvelle détermination effectuée par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise le 31 juillet 1987 relativement à une demande de nouvelle détermination faite en vertu du paragraphe 46(3) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

ROSEMOUNT INSTRUMENTS LIMITEDAppelante

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL

POUR LES DOUANES ET L'ACCISEIntimé

L'appel est admis. Les modules détecteurs en cause sont plus correctement classés dans le numéro tarifaire 44532-1 comme pièces achevées d'instruments et d'appareils électriques de précision.


Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire intérimaire





Le présent appel a été interjeté en vertu de l'article 47 de l'ancienne Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise. L'appelante demande que les modules détecteurs qu'elle importe soient classés dans le numéro tarifaire44532-1 comme pièces de transmetteurs de pression différentielle.

DÉCISION  : L'appel est admis. Même si le Tribunal est persuadé que les modules détecteurs serviront éventuellement à la transduction, il est d'avis que ceux-ci sont plus correctement classés comme pièces achevées d'un transmetteur de pression et qu'ils devraient donc être classés dans le numéro tarifaire44532-1 à titre de pièces achevées d'instruments ou d'appareils électriques de précision.

Lieu de l'audience : Calgary (Alberta) Date de l'audience : Le 22 octobre 1991 Date de la décision : Le 24 février 1992
Membres du Tribunal : Sidney A. Fraleigh, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Greffier : Janet Rumball
Avocat pour le Tribunal : Gilles B. Legault
Ont comparu : Matt Ages, pour l'appelante Linda J. Wall, pour l'intimé
Jurisprudence : EEV Canada Limited c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise, Tribunal canadien du commerce extérieur, appel n o 2372, le 25 septembre 1991.





Le présent appel est interjeté en vertu de l'article 47 de l'ancienne Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (le Sous-ministre). Entre janvier et mars 1986, l'appelante a importé, à plusieurs reprises au Canada, des transmetteurs de pression différentielle, modèles 1151 et 1152, ainsi que des pièces et modules détecteurs, fabriqués par la société Rosemount Inc. (Minnesota). Les marchandises ont d'abord été classées dans le numéro tarifaire 44532-1 du Tarif des douanes [2] comme indicateurs de température et de pression, et leurs pièces. Par suite d'une nouvelle détermination effectuée par un appréciateur fédéral des douanes, une partie des marchandises a été classée dans le numéro tarifaire 44532-2 comme transducteurs. L'appelante a alors demandé qu'une autre nouvelle détermination soit effectuée par le Sous-ministre, en vertu du paragraphe 46(3) de la Loi. Cette nouvelle détermination, effectuée par Mlle C. Kennedy au nom du Sous-ministre, a classé les marchandises de la façon suivante :

les transmetteurs de pression différentielle, modèles 1151 et 1152, et leurs pièces ont été classés dans le numéro tarifaire 44532-1 comme indicateurs de température et de pression, et leurs pièces;

les modules détecteurs, modèles 1151 et 1152, remplis de silicone ou de fluorolube ont été classés dans le numéro tarifaire 44532-2 comme transducteurs.

Dans son appel, l'appelante demande au Tribunal que les modules détecteurs soient classés dans le numéro tarifaire 44532-1 comme pièces de transmetteurs de pression différentielle.

À l'appui de sa demande que les modules détecteurs sont des pièces du transmetteur de pression, l'appelante a fait témoigner M. Roger Frick, lequel travaille pour elle et détient le brevet des transmetteurs de pression différentielle, modèle 1151. Le témoin a expliqué que le transmetteur de pression sert notamment à mesurer le débit dans les conduites, le niveau dans les réservoirs et divers autres types de pression dans des établissement industriels comme les raffineries, les centrales électriques, etc. M. Frick a indiqué que l'appareil contient un module détecteur, lequel renferme une cellule delta, qui, il l'a admis, est un transducteur. Il a ajouté que, dans l'industrie, le module détecteur n'est pas désigné par le terme transducteur ou considéré comme tel, mais que la cellule delta l'est. Il a aussi précisé que, en fait, la cellule delta n'est utile aux clients de l'appelante que lorsqu'elle est intégrée au module détecteur. Elle n'est plus alors un transducteur, mais un élément du module détecteur, qui est lui-même une pièce du transmetteur de pression. De plus, l'appelante vend des modules détecteurs et non des transducteurs comme pièces de rechange pour les transmetteurs de pression différentielle.

L'intimé a fait appel à un témoin expert, M. Karan Kaler, un professeur agrégé en génie électrique à l'University of Calgary. M. Kaler a expliqué que le coeur du transmetteur de pression est l'élément détecteur et que le coeur de ce dernier est la cellule delta, qui est un transducteur de pression. En fait, avec ce transmetteur de pression, la détection s'effectue par transduction, laquelle permet de convertir une forme d'énergie en une autre. Les détecteurs et les transducteurs sont d'ailleurs différents. En effet, au sens large, les détecteurs comprennent une vaste gamme d'éléments détecteurs, et les transducteurs en sont une sous-classification. Tous les transducteurs sont des détecteurs, mais les détecteurs ne sont pas tous des transducteurs. Par exemple, un manomètre est un détecteur et non un transducteur, vu qu'il ne mesure la pression que de façon mécanique et ne convertit pas une forme d'énergie en une autre. Par contre, a précisé le témoin, dans le transmetteur de pression différentielle, les transducteurs servent à convertir la pression, une quantité mécanique, en capacité, une quantité électrique. L'appareil est doté de deux plaques conductrices séparées par un diélectrique, tel que l'huile. Lorsque la pression varie, l'espace entre les plaques conductrices change, permettant ainsi au détecteur de détecter la variation de la capacité, qui est la propriété d'emmagasiner de l'électricité. Selon le témoin, le détecteur est donc un élément clé de la détection de la variation de pression. Lors du contre-interrogatoire, M. Kaler a aussi reconnu que lorsque le module détecteur est intégré au transmetteur de pression, il peut être considéré comme une pièce de cet appareil.

En se fondant sur le témoignage de ce témoin, l'intimé soutient que les modules détecteurs en cause sont des transducteurs pour les raisons suivantes : ils convertissent une forme d'énergie en une autre, soit l'énergie hydraulique en énergie électrique; ils sont définis dans les dictionnaires d'électronique comme étant des dispositifs servant à transformer une forme d'énergie en une autre; ils sont davantage décrits comme transducteurs dans le numéro tarifaire 44532-2 que comme pièces d'instruments et d'appareils électriques de précision, ce qui annule la disposition générale contenue dans le numéro tarifaire 44532-1; et, enfin, ils sont en fait des transducteurs.

Le Tribunal est d'accord avec l'intimé lorsqu'il affirme que des marchandises décrites avec précision dans le numéro tarifaire 44532-2 ne peuvent être classées dans la disposition générale du numéro tarifaire 44532-1 lorsqu'elles sont en fait des transducteurs. Toutefois, il y a suffisamment d'éléments de preuve dans cette cause pour appuyer la position de l'appelante, à savoir que les modules détecteurs en question sont plutôt des pièces de transmetteurs de pression, qui sont des «Instruments et appareils électriques de précision... » aux termes de la disposition générale du numéro tarifaire 44532-1. En fait, les modules détecteurs sont liés aux transmetteurs de pression qui, selon les deux témoins, ne pourraient accomplir leur fonction sans ces pièces.

L'avocate de l'intimé a demandé au Tribunal d'appliquer les mêmes principes que ceux qu'il a appliqués dans la cause EEV Canada Limited c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [3] . Dans cette cause, le Tribunal a rejeté l'argument selon lequel l'ajout de composantes essentielles au fonctionnement d'une marchandise (une rondelle de thyristor) privait celle-ci de sa propriété initiale. Établissant un parallèle avec cette cause, l'avocate soutient que le module détecteur est lui-même un transducteur car, incorporant la cellule delta et lui permettant d'accomplir sa fonction de transducteur, il ne la prive pas de sa propriété initiale. En fait, le Tribunal devait déterminer si un thyristor utilisé dans un appareil électrique servant à souder devait être classé dans le numéro tarifaire 44621-1 comme «Appareils à souder électriques, n.d.... », ou dans le numéro 44544-1 comme «Transistors et autres dispositifs à semi-conducteurs... ». De l'avis du Tribunal, le fait qu'il était question de semi-conducteurs dans un des numéros tarifaires et que les deux parties ont convenu que les thyristors étaient des semi-conducteurs a constitué la base de la décision EEV Canada Limited, à savoir que les thyristors étaient classés plus correctement dans le numéro tarifaire 44544-1 à titre de semi-conducteurs.

La présente cause est fort différente. Premièrement, elle porte sur deux numéros tarifaires qui doivent être traités ensemble. Deuxièmement, contrairement aux thyristors dans la décision EEV Canada Limited, il est expressément fait mention des transducteurs dans le numéro tarifaire 44532-2. Par conséquent, le Tribunal ne classera les modules détecteurs dans ce numéro tarifaire que s'il conclut que ceux-ci sont en fait des transducteurs. Cela étant dit, après une lecture minutieuse du numéro tarifaire 44532-2, on ne peut que constater que la grande majorité des articles ci-mentionnés, sinon tous, servent à accomplir une fonction qui résulte en une certaine forme de mesure ou d'analyse visuelle. En d'autres mots, toutes les marchandises qui y sont énumérées peuvent avoir une fonction propre. Compte tenu de la teneur des numéros tarifaires 44532-1 et 44532-2 ainsi que des preuves présentées, le Tribunal constate que les cellules delta ne sont pas conçues ni prévues pour accomplir quelque fonction que ce soit tant qu'elles n'ont pas été intégrées aux modules détecteurs, lesquels sont spécialement conçus pour le transmetteur de pression. Même si le Tribunal est persuadé que les modules détecteurs serviront éventuellement à la transduction, il est d'avis que ceux-ci seraient plus correctement classés comme pièces achevées d'un transmetteur de pression et qu'ils devraient donc être classés dans le numéro tarifaire 44532-1 à titre de pièces achevées d'instruments ou d'appareils électriques de précision.

L'appel est admis.


[ Table des matières]

1. S.R.C. (1970), ch. C-40, dans sa version modifiée.

2. S.R.C. (1970), ch. C-41, dans sa version modifiée.

3. Tribunal canadien du commerce extérieur, appel n o 2372, le 25 septembre 1991.


Publication initiale : le 5 août 1997