GLOBAL TRADING CORPORATION

Décisions


GLOBAL TRADING CORPORATION
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel n° 3026

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 15 août 1989

Appel n° 3026

EU ÉGARD À une demande entendue le 20 avril 1989 en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, ch. E-15, dans sa forme modifiée (la Loi);

ET EU ÉGARD À deux avis de décision du ministre du Revenu national datés du 26 avril 1988 concernant un avis d'opposition déposé conformément à l'article 81.17 de la Loi.

ENTRE

GLOBAL TRADING CORPORATIONAppelante

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONALIntimé

L'appel est rejeté et le Tribunal déclare que les fourgonnettes Sport Van 1987 et Suburban 1988 de GM, visées par les avis de l'intimé portant les numéros 70995RE et 70994RE, ont été utilisées au Canada avant d'être exportées; elles ne sont donc pas admissibles à l'exemption de taxe de vente fédérale prévue à l'article 7 du Règlement général sur les taxes de vente et d'accise, C.R.C., vol. VI, ch. 594.


Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre présidant

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Kathleen Macmillan ______ Kathleen Macmillan Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





Loi sur la taxe d'accise - Taxe de vente - Déterminer si deux fourgonnettes, une Sport Van et une Suburban vendues comme démonstrateurs et dont l'odomètre indique environ 4000km, ont été utilisées au Canada avant d'être exportées.

DÉCISION  : L'appel est rejeté. Les marchandises ont été utilisées au Canada avant d'être exportées. Elles ne satisfont pas aux exigences de la Loi et ne sont pas exemptées de la taxe de vente.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 20 avril 1989 Date de la décision : Le 15 août 1989
Jury : Sidney A. Fraleigh, membre présidant W. Roy Hines, membre Kathleen Macmillan, membre
Avocat du Tribunal : Lyne Letarte
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Katherine Tsetsos, pour l'appelante Michèle Joubert, pour l'intimé
Lois et règlements cités : Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, ch. E-15, articles 81.17 et 81.19; Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, S.C. 1988, ch. 56, article 60; Règlement général sur les taxes de vente et d'accise, C.R.C., vol. VI, ch. 594, article 7.





RÉSUMÉ

L'appelante, Global Trading Corporation, a acheté de Plaza Chevrolet Oldsmobile Cadillac Inc. (Plaza) deux fourgonnettes, une Sport Van 1987 et une Suburban 1988 fabriquées par General Motors du Canada Limitée (GM), la facture de chacune portant la mention «démonstrateur». L'odomètre de chacun des véhicules affichait un nombre de kilomètres. L'appelante a exporté ces véhicules en passant par les États-Unis et a demandé le remboursement de la taxe de vente, ce qui lui a été refusé parce que les véhicules avaient été utilisés au Canada.

L'appelante a déclaré devant le Tribunal que l'industrie automobile considère les démonstrateurs comme des véhicules neufs parce que la garantie propre aux véhicules neufs offerte par GM couvre la voiture au moment où elle est vendue. L'appelante estime donc être admissible au remboursement de la taxe de vente à l'exportation.

Les dispositions législatives pertinentes stipulent clairement que la taxe payée peut être remboursée si les marchandises n'ont pas été utilisées au Canada. L'application stricte de ces dispositions rendrait certaines marchandises carrément inadmissibles au remboursement de la taxe de vente après leur exportation (par exemple, une voiture doit parcourir une certaine distance pour quitter la chaîne de montage). Le Tribunal est d'avis qu'il n'était pas de l'intention du Parlement que la loi soit appliquée aussi sévèrement et serait donc disposé à admettre une demande de remboursement de la taxe payée sur les marchandises dont «l'utilisation» au Canada est requise aux fins d'exportation.

L'appel n'est pas admis. De toute évidence, l'utilisation au Canada des marchandises en cause dépasse cette exception, comme en témoigne la lecture des odomètres.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

Les dispositions pertinentes de la Loi sur la taxe d'accise [1] sont les suivantes :

68.1 Lorsque la taxe a été payée en vertu de la présente loi sur des marchandises et que, conformément aux règlements pris par le ministre, une personne a exporté les marchandises, un montant égal à celui de cette taxe doit, sous réserve des autres dispositions de la présente partie, être payé à cette personne, si elle en fait la demande dans les deux ans suivant l'exportation de ces marchandises. Les dispositions pertinentes du Règlement général sur les taxes de vente et d'accise [2] (le Règlement) sont les suivantes :

7. Where goods on which sales tax or excise tax has been paid under the Act are exported without having been used in Canada, a refund of the taxes so paid or a deduction from future taxes payable may be granted,

(a) if evidence of payment of the tax on the purchase of the goods, in the case of domestic goods, or

(b) if evidence of payment of the tax on the importation of the goods in the form of a receipted copy of the original import entry, in the case of goods imported into Canada

is maintained on file by the exporter for examination by officers of the Department and evidence satisfactory to the Minister is produced to establish that the goods have been exported from Canada.

(emphasis added)

7. Lorsque des marchandises à l'égard desquelles la taxe de vente ou la taxe d'accise a été payée en vertu de la Loi sont exportées sans avoir été utilisées au Canada, les taxes ainsi payées peuvent être remboursées ou être déduites des taxes qui deviendront payables, si,

a) dans le cas de marchandises nationales, la preuve du paiement de la taxe lors de l'achat des marchandises, ou

b) dans le cas de marchandises importées au Canada, la preuve du paiement de la taxe lors de l'importation des marchandises, sous la forme d'une copie quittancée de la déclaration d'importation originale,

est conservée dans les dossiers de l'exportateur aux fins d'examen par les agents du ministère, et si l'on peut établir, à la satisfaction du Ministre, que les marchandises ont été exportées du Canada.

(soulignement ajouté)

LES FAITS

Le présent appel est interjeté en vertu de l'article 81.19 de la Loi et s'appuie sur deux avis de décision de l'intimé datés du 26 avril 1988 et confirmant les avis de décision MTL 32821 du 18 décembre 1987 et MTL 33131 du 5 février 1988. Le Ministre a rejeté les demandes de remboursement parce que les marchandises exportées sont des véhicules «démonstrateurs» qui n'ont pas été vendus à l'état neuf. Les marchandises en cause ayant été utilisées au Canada avant d'être exportées, ne satisfont pas aux exigences de la Loi et du Règlement relatives au remboursement de la taxe de vente.

La décision de l'intimé a fait l'objet d'un appel auprès de la Commission du tarif le 21 juin 1988, avant l'entrée en vigueur de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [3] . Le Tribunal a entendu l'appel en application de l'article 60 de ladite loi.

L'appelante sollicitait une décision à l'effet que les marchandises en cause, une Sport Van 1987 et une Suburban 1988 fabriquées par GM et exportées d'abord aux États-Unis puis en Norvège, sont admissibles à une exonération de la taxe de vente conformément à l'article 7 du Règlement.

Plaza, un concessionnaire, a acheté les marchandises en cause de GM à l'état neuf en juillet et octobre 1987 et les a vendues à l'appelante en octobre et novembre de la même année. Le contrat de vente de chaque véhicule portait la mention «démonstrateur»; l'odomètre de la Sport Van indiquait 4 200 kilomètres et celui de la Suburban 3 926 kilomètres.

Le président de l'appelante a témoigné au sujet de l'utilisation des marchandises par Plaza et du sens que l'industrie automobile donne aux mots «neuf» et «démonstrateur». Les véhicules étaient conduits par des cadres, employés de Plaza. Le témoin a ajouté qu'il n'a eu droit à aucun rabais parce que les véhicules étaient des démonstrateurs, que l'industrie les considère comme des véhicules neufs et qu'ils étaient couverts par la garantie des véhicules neufs offerte par GM.

Le témoin a déclaré qu'il n'a pas utilisé les marchandises en cause. Trois à neuf jours après avoir acheté les véhicules, l'appelante les a fait conduire directement à la frontière américaine afin qu'ils soient chargés à bord d'un navire à destination de l'Europe. Le trajet entre la place d'affaires de l'appelante et le poste frontière a ajouté environ 70 kilomètres à l'odomètre de chaque véhicule.

LA QUESTION EN LITIGE

La question en litige est de déterminer si les deux véhicules ont été utilisés au Canada avant d'être exportés.

L'avocat de l'appelante a soutenu que l'industrie automobile considère les démonstrateurs utilisés par les cadres d'un concessionnaire comme des véhicules neufs. Le Tribunal devrait donc faire de même à l'égard des marchandises en cause, et non les considérer comme des véhicules usagés, parce que les démonstrateurs bénéficient de la garantie des véhicules neufs de GM (20 000 kilomètres ou 12 mois). En outre, l'appelante a acheté les marchandises en cause précisément aux fins d'exportation et ne les a utilisées que pour les conduire à la frontière. Entre leur date de production et celle de leur acquisition par l'appelante aux fins d'exportation, les véhicules ont séjourné entre un et trois mois au Canada, délai qui ne peut être pris en considération à titre d'utilisation. Pour l'application des dispositions pertinentes du Règlement, l'interprétation des expressions «démonstrateur», «neuf» et «usagé» qu'en donne l'industrie automobile doit être retenue. Cette dernière n'établit pas de lien entre l'utilisation et l'affichage de l'odomètre. Le fait qu'un des cadres du concessionnaire conduise un démonstrateur pendant un à trois mois ne constitue pas une utilisation parce que le véhicule est vendu à l'état neuf et au prix d'un véhicule neuf. L'appel devrait être admis.

L'avocat de l'intimé a déclaré qu'il ne s'agit pas de décider si les marchandises en cause sont des automobiles usagées, mais bien si elles ont été utilisées au Canada. La version française de l'article 7 du Règlement renferme les mots «utilisées au Canada». Si le Parlement avait voulu employer cette expression au sens de «marchandises usagées», il aurait dû employer cette dernière formulation. Les éléments de preuve démontrent clairement que la Sport Van et la Suburban ont toutes deux été utilisées avant d'être exportées, leur odomètre affichant 4 200 et 3 926 kilomètres respectivement. Le fait que l'industrie automobile considère les marchandises en cause comme des démonstrateurs ou des automobiles usagées n'a rien à voir avec le présent litige. L'article 7 du Règlement assujettit le remboursement à un prérequis : les marchandises doivent être «exportées sans avoir été utilisées au Canada». Les éléments de preuve font état du contraire; l'appel devrait être rejeté.

DÉCISION

En vertu de l'article 68.1 de la Loi et de l'article 7 du Règlement, la taxe de vente payée peut faire l'objet d'un remboursement si les marchandises visées sont exportées sans avoir été utilisées au Canada.

S'il y avait lieu d'interpréter ces articles au pied de la lettre, toute utilisation des marchandises exportées empêcherait un exportateur de solliciter le remboursement des taxes de vente ou d'accise payées à leur égard. En outre, il suffirait que les particuliers exportant des véhicules à partir du Canada les conduisent jusqu'à une gare ou à tout autre point d'embarquement aux fins d'exportation pour se voir refuser un remboursement. Le Tribunal considère qu'une interprétation aussi rigoureuse de ces articles ne peut correspondre aux intentions du législateur.

Une décision contraire entraînerait l'exclusion de certaines catégories de marchandises, à l'égard desquelles la taxe a été acquittée, de l'exemption prévue à l'article 7 du Règlement. Elle dérogerait en outre au sens évident de l'article 68.1 de la Loi qui prévoit que toute marchandise, à l'égard de laquelle la taxe a été acquittée conformément à la Loi et qui est ensuite exportée en application du Règlement, bénéficie des dispositions de remboursement.

Ayant pris connaissance d'éléments de preuve selon lesquels l'utilisation des véhicules par les cadres du concessionnaire n'était pas liée à leur exportation, le Tribunal fait remarquer que l'article 7 du Règlement ne précise pas qui, de l'exportateur, du propriétaire, du fabricant ou du concessionnaire, est réputé avoir utilisé les marchandises en cause au Canada.

Compte tenu des éléments de preuve et des dispositions de l'article 7 du Règlement, le Tribunal déclare que les marchandises en cause, à savoir, une Sport Van 1987 et une Suburban 1988 fabriquées par GM, ont été utilisées au Canada avant leur exportation aux États-Unis.

CONCLUSION

Les marchandises ayant été utilisées au Canada ne satisfont pas aux exigences de la Loi.

L'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. 1985, ch. E-15, autrefois S.R.C. 1970, ch. E-13.

2. C.R.C., vol. VI, ch. 594.

3. S.C. 1988, ch. 56.


Publication initiale : le 15 août 1997