THE GEO. CLUTHÉ MANUFACTURING COMPANY LIMITED

Décisions


THE GEO. CLUTHÉ MANUFACTURING COMPANY LIMITED
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no 3031

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 5 juin 1989

Appel no 3031

EU ÉGARD À un appel entendu le 16 mars 1989, en vertu de l'article 51.21 de la Loi sur la taxe d'accise, S.R.C. 1970, ch. E-13 (la Loi) dans sa forme modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision du ministre du Revenu national rendue le 22 avril 1988 en vertu du paragraphe 51.1(5) de la Loi.

ENTRE

THE GEO. CLUTHÉ MANUFACTURING

COMPANY LIMITED Appelante

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté et le Tribunal déclare qu'au cours de la période du 1er décembre 1983 au 31 décembre 1987, le prix de vente au détail demandé par Cluthé Sales (Waterloo) Ltd. pour les produits fabriqués par The Geo. Cluthé Manufacturing Company Limited doit être le prix de vente utilisé pour le calcul de la taxe de vente fédérale à payer par The Geo. Cluthé Manufacturing Company Limited.


John C. Coleman ______ John C. Coleman Membre présidant

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





Loi sur la taxe d'accise - Taxe de vente - Déterminer si la taxe de vente prélevée auprès de The Geo. Cluthé Manufacturing Company Limited doit être calculée sur le prix auquel l'appelante fournit les marchandises au détaillant associé [Cluthé Sales (Waterloo) Ltd.] ou sur le prix auquel ce dernier vend les marchandises de l'appelante au public.

DÉCISION : Le fabricant qui a interjeté appel et le détaillant associé constituent une seule entité économique ou commerciale selon laquelle l'appelante fabrique les articles de quincaillerie que vend le détaillant. Le prix de vente au détail des articles de quincaillerie doit être le montant qui sert au calcul de la taxe de vente à payer par l'appelante. Appel rejeté.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 16 mars 1989 Date de la décision : Le 5 juin 1989
Membres du jury : John C. Coleman, membre présidant Sidney A. Fraleigh, membre W. Roy Hines, membre
Avocat du Tribunal : Clifford Sosnow
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : R. Fortune pour l'appelante J. Fitzgerald pour l'intimé
Jurisprudence : Solliciteur général du Canada c. Coleman Products Co. [1929] 1 D.L.R. 658; Canada Rice Mills Ltd. c. le Roi [1939] 3 D.L.R. 577; Colgate-Palmolive-Peet Co. Ltd. c. le Roi [1933] R.C.S. 131; TWC Furniture Limited c. le ministre du Revenu national (appel n o 2880); Vanguard Coatings and Chemicals Ltd. c. le ministre du Revenu national [1987] 1 C.F. 367; [1988] 1 T.S.T. 2025.
Lois citées: Loi sur la taxe d'accise, S.R.C. 1970, ch. E-13 - articles 27, 34, 51.21; Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, S.C. 1988, ch. 56 - paragraphe 54(2) et article 60.





RÉSUMÉ

L'appelante, The Geo. Cluthé Manufacturing Company Limited (ci-après appelée Cluthé Manufacturing), est un fabricant d'outils, d'articles de quincaillerie en matière plastique et de moulages par injection fabriqués sur commande. Cluthé Manufacturing est un fabricant muni d'une licence en vertu de l'article 31 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi).

George Cluthé détient la majorité (50,5 p. 100) des actions ordinaires de Cluthé Manufacturing. Richard Cluthé, William Cluthé et Gerald Cluthé, trois fils de George Cluthé, ont chacun 16,5 p. 100 du reste des actions ordinaires de la compagnie.

Cluthé Sales (Waterloo) Ltd. (ci-après appelé Cluthé Sales) est le détaillant de la compagnie qui vend les marchandises produites par l'appelante. George Cluthé détient la totalité des actions ordinaires de Cluthé Sales.

George Cluthé et ses trois fils participent à la gestion et aux opérations courantes des deux sociétés : George est directeur exécutif de Cluthé Manufacturing et de Cluthé Sales, Gerald est directeur administratif, William est préposé aux coûts et à la cote des prix, et Richard est ajusteur-outilleur.

L'appelante demande au Tribunal de statuer que la taxe de vente payée sur les articles qu'elle fabrique soit prélevée en conformité avec l'article 34 [2] de la Loi, sur le juste prix des marchandises qu'elle affirme avoir vendues à Cluthé Sales. L'intimé demande au Tribunal de déclarer qu'il n'y a pas eu vente entre Cluthé Manufacturing et Cluthé Sales parce que les deux sociétés sont en réalité une seule et même entité économique et commerciale. Ainsi la taxe de vente payable serait calculée sur le prix de vente au détail auquel Cluthé Sales vend les articles de Cluthé Manufacturing au public.

L'appel est interjeté en conformité avec l'article 51.21 [3] de la Loi à partir d'un avis de détermination (no SWO 37713) du ministre du Revenu national (le Ministre) en date du 22 avril 1988, stipulant qu'aucun remboursement de la taxe de vente fédérale n'est payable à l'appelante pour la période allant du 1er décembre 1983 au 31 décembre 1987. Le remboursement demandé est de 369 500 $. La demande de remboursement a été présentée le 27 janvier 1988.

L'appel n'est pas admis. Les deux compagnies sont en fait une seule entité commerciale. Il n'y a pas eu de ventes entre Cluthé Manufacturing et Cluthé Sales. Cette dernière agit uniquement d'intermédiaire entre Cluthé Manufacturing et ses clients. Ainsi, le prix auquel le public achète de Cluthé Sales les articles fabriquées par Cluthé Manufacturing est le prix qui doit servir au calcul de la taxe de vente.

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

Les dispositions législatives pertinentes, selon le libellé en vigueur pour la période en question, sont les suivantes :

27.(1) [4] Est imposée, prélevée et perçue une taxe de consommation ou de vente au taux spécifié au paragraphe(1.1) sur le prix de vente ou sur la quantité vendue de toutes marchandises

a) produites ou fabriquées au Canada,

(i) payable, dans tout cas autre que celui mentionné au sous-alinéa (ii) ou (iii), par le producteur ou fabricant à l'époque où les marchandises sont livrées à l'acheteur ou à l'époque où la propriété des marchandises est tansmise, en choisissant celle de ces dates qui est antérieure à l'autre,

...

34. Lorsque des marchandises frappées de taxe en vertu de la présente Partie ou de la PartieIII sont vendues à un prix qui, de l'avis du Ministre, est inférieur au prix raisonnable sur lequel la taxe devrait être imposée, le Ministre a le pouvoir de fixer le prix raisonnable, et le contribuable doit acquitter la taxe sur le prix ainsi fixé. S.R., c. 100, art.37.

L'appel a initialement été interjeté auprès de la Commission du tarif. Toutefois, en vertu du paragraphe 54(2) et de l'article 60 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [5] , il a été confié et mené à terme par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal).

FAITS

M. Gerald Cluthé et M. Robert Fortune, expert-conseil en matière de taxe de vente qui s'est présenté comme témoin et mandataire de l'appelante lors de l'audience, ont présenté le témoignage suivant en faveur de cette dernière en précisant que Cluthé Sales et Cluthé Manufacturing sont deux compagnies indépendantes engagées dans des transactions commerciales :

1. Factures (pièce A-21) avec en-tête «Cluthé Sales (Waterloo) Ltd.» que Cluthé Sales utilise pour envoyer à ses clients des marchandises produites par Cluthé Manufacturing.

2. Un connaissement (pièce A-8) concernant les marchandises produites par Cluthé Manufacturing et expédiées à un client de Cluthé Sales qui indique que l'expéditeur est Cluthé Sales et le client est le destinataire.

Ainsi, lorsqu'un client commande à Cluthé Sales des marchandises produites par Cluthé Manufacturing, Cluthé Sales livre les marchandises et facture le client. Le paiement de marchandises est établi à l'ordre de Cluthé Sales.

3. Une série de documents dont l'en-tête indique «Cluthé Sales (Waterloo) Ltd. Makers of Plastic Products.», dont le but est de prouver que Cluthé Sales agit en son propre nom, c'est-à-dire comme société indépendante lorsqu'elle mène ses transactions commerciales. Il s'agit d'un contrat entre Cluthé Sales et une autre compagnie (pièce A-1), qui indique que la compagnie doit agir en tant que représentant exclusif de Cluthé Sales dans une région donnée; d'un formulaire utilisé par Cluthé Sales pour prendre les commandes (pièce A-2); et d'un formulaire de Cluthé Sales pour coter les prix à des clients éventuels (pièce A-3). Un quatrième document, un bon de commande, indique que Cluthé Sales est le vendeur (pièce A-7).

4. Des états financiers (de Cluthé Manufacturing et de Cluthé Sales pour les années 1983-1987 inclusivement) qui veulent démontrer l'existence de ventes entre Cluthé Manufacturing et Cluthé Sales. Selon ces documents, les recettes de Cluthé Manufacturing pour les marchandises «vendues» à Cluthé Sales sont identiques au coût des marchandises «achetées» par Cluthé Sales de Cluthé Manufacturing (pièces A-11 à A-20).

Tout au long du contre-interrogatoire des témoins de l'appelante et de l'examen des éléments de preuve du témoin de l'intimé, soit M. Michael Chivas, vérificateur principal de la taxe de vente à Revenu Canada, le plaidoyer suivant a été présenté à l'appui de la position de l'intimé selon laquelle Cluthé Sales et Cluthé Manufacturing constituent une seule entreprise commerciale :

1. Les installations de fabrication, de livraison et d'entreposage des stocks se trouvent dans le même bâtiment que les deux entreprises. Les locaux de Cluthé Sales et de Cluthé Manufacturing ne sont pas séparés par des cloisons réelles. Les deux compagnies ont la même adresse et le même numéro de téléphone.

2. L'ensemble de l'actif des deux compagnies (incluant le matériel, les marchandises en stock, l'immeuble, etc.) est réparti dans les locaux communs et assuré au nom de Cluthé Manufacturing. La déclaration de responsabilité sur la police d'assurance (pièce B-3) indique Business Conducted by Insured: Mfg., Sale & Distribution of Plastic & Associated Products (Opérations de l'assuré : fabrication, vente et distribution d'articles en matière plastique et autres) [traduction].

3. Cluthé Manufacturing et Cluthé Sales partagent la responsabilité du paiement des salaires de George, Gerald et William Cluthé. Les feuillets T4 et T4A remis aux employés de Cluthé Sales et de Cluthé Manufacturing indiquent que Cluthé Manufacturing est le payeur. Cette dernière présente les résumés des T4 et T4A pour la rémunération payée aux employés des deux sociétés (pièce B-4).

4. Les fournisseurs des marchandises commandées par Cluthé Manufacturing sont payés indifféremment par chèques de Cluthé Manufacturing ou de Cluthé Sales (pièce B-5).

5. Un protocole d'entente existe entre Cluthé Sales et Cluthé Manufacturing (pièce B-1) en vertu duquel Cluthé Sales est le distributeur et l'agent des ventes exclusifs des produits de Cluthé Manufacturing. De même, selon les états financiers, Cluthé Sales agit comme distributeur et vendeur exclusifs de la gamme complète des produits de Cluthé Manufacturing.

6. Les états financiers de Cluthé Sales sont les seuls à porter la mention «comptes débiteurs». Cluthé Manufacturing ne tient pas de tels comptes à l'égard des marchandises «vendues» à Cluthé Sales. Par contre, seuls les états financiers de Cluthé Manufacturing font état d'un «inventaire». Cluthé Sales ne garde pas d'inventaire des marchandises «achetées» de Cluthé Manufacturing.

7. Cluthé Manufacturing a un prêt remboursable sur demande avec la Banque de Nouvelle-Écosse. Les comptes débiteurs de Cluthé Sales et l'inventaire de Cluthé Manufacturing servent de garantie au prêt.

8. Il n'existe pas de facture ni de documents internes pour indiquer qu'il y a eu vente entre les deux compagnies parce que le transfert de propriété entre les deux se fait uniquement au moment du transfert de propriété à un client de Cluthé Sales.

9. Au moment de la «vente» d'un article particulier par Cluthé Manufacturing à Cluthé Sales, le prix de vente de l'article n'est pas connu. Le prix de vente des articles vendus par Cluthé Manufacturing à Cluthé Sales est déterminé à la fin de chaque exercice en déduisant des recettes de Cluthé Sales, établies d'après les ventes au public, les frais d'exploitation engagés par Cluthé Sales pour effectuer ces ventes.

10. Le produit intégral de la vente des articles de Cluthé Manufacturing est déposé dans le compte de la compagnie après que Cluthé Sales a déduit les montants représentant les frais de vente (par exemple, les commissions, la publicité, etc.) (pièce B-2).

QUESTION EN LITIGE

La question en litige consiste à déterminer si la taxe de vente à payer par l'appelante sur les articles qu'elle fabrique est fixée d'après l'article 34 de la Loi, et donc sur le juste prix des articles qui ont supposément été vendus par Cluthé Manufacturing à Cluthé Sales ou sur le prix au détail auquel Cluthé Sales vend les articles de Cluthé Manufacturing au public.

L'avocat de l'appelante a soutenu que Cluthé Manufacturing et Cluthé Sales sont deux compagnies indépendantes l'une de l'autre : Cluthé Manufacturing fabrique un produit et Cluthé Sales vend un produit. Selon les états financiers vérifiés, il y a effectivement eu vente entre les deux compagnies. Même si les deux sociétés partagent les mêmes locaux et une partie du personnel, il s'agit simplement d'une façon de réduire les frais administratifs.

Il a ajouté qu'en raison des ventes entre les deux sociétés, le Ministre doit, au moment de déterminer le montant sur lequel Cluthé Manufacturing doit payer la taxe, utiliser un juste prix de vente en vertu de l'article 34 de la Loi. Ce prix doit être obtenu à partir des critères établis dans la cause de Vanguard Coatings and Chemicals Ltd. c. le ministre du Revenu national [6] , qui explique les diverses données que doit envisager le Ministre pour déterminer un juste prix en vertu de l'article 34 de la Loi.

Selon l'avocat de l'intimé, l'article 34 de la Loi s'applique uniquement s'il y a eu vente de marchandises. L'appellante n'a pas prouvé l'existence d'une telle transaction entre Cluthé Manufacturing et Cluthé Sales. Les deux sociétés constituent une seule entité commerciale qui partage les mêmes ressources financières et les mêmes ressources de gestion. Les chiffres paraissant dans les états financiers qui tendent à prouver les ventes entre les deux compagnies ne sont que des écritures comptables.

En conséquence, l'avocat de l'intimé a déclaré que la taxe de vente payable par Cluthé Manufacturing doit être calculée sur le prix auquel Cluthé Sales vend les articles au public. Pour justifier cette position, l'avocat s'est reporté à l'appel no 2880, TWC Furniture Ltd. c. le ministre du Revenu national interjeté auprès de la Commission du tarif et aux causes Canada Rice Mills Ltd. c. le Roi [7] ; Colgate-Palmolive-Peet Co. Ltd. c. le Roi [8] ; et le Solliciteur général du Canada c. Coleman Products Co. [9]

DÉCISION

En vertu de l'article 27 de la Loi, la taxe de vente fédérale est payable sur le prix de vente des marchandises taxables produites ou fabriquées au Canada. Comme critère essentiel de l'imposition de la taxe de vente, il doit y avoir vente entre le fabricant ou le producteur et l'acheteur. Pour l'application de l'article 34 de la Loi, deux conditions doivent être remplies : 1) il doit y avoir vente de marchandises taxables et 2) la vente doit se faire à un prix que le Ministre considère inférieur au juste prix sur lequel la taxe de vente devrait être imposée.

Le Tribunal conclut qu'il n'y a pas eu vente entre Cluthé Sales et Cluthé Manufacturing.

Par conséquent, il n'est pas nécessaire de s'attarder à savoir si les ventes ont eu lieu à un juste prix.

En 1933, dans la cause de Colgate-Palmolive-Peet ci-dessus portant sur l'existence d'une vente entre une compagnie de fabrication et une compagnie de distribution, le juge Cannon de la Cour suprême du Canada a déclaré à la page 139 que selon le principe général qui régit tout contrat, pour qu'une vente ait lieu, il est évident qu'il doit y avoir deux parties susceptibles de donner librement, leur consentement mutuel. Même si Cluthé Manufacturing et Cluthé Sales sont deux entités légales distinctes, le Tribunal considère qu'elles ne sont pas, au moment de déterminer s'il y a eu vente entre elles, deux parties capables de donner librement leur consentement mutuel. Toujours selon le juge Cannon (page 140), bien que les deux compagnies soient des entités légales distinctes, elles sont en fait, pour toute fin pratique, fusionnées.

En plus de la cause Colgate-Palmolive-Peet précitée, le Tribunal croit que les autres cas mentionnés par l'avocat de l'intimé démontrent aussi que lorsque les circonstances le permettent, des entités légales distinctes peuvent être traitées comme des éléments intégrés d'une entreprise commerciale lorsqu'il s'agit de déterminer à quel moment se produit une vente aux fins du prélèvement de la taxe de vente.

Dans le cas présent, les preuves démontrant que Cluthé Sales et Cluthé Manufacturing sont effectivement une seule et même société sont nombreuses : elles partagent les mêmes locaux, le même numéro de téléphone et la même adresse; Cluthé Manufacturing prépare les feuillets T4 et T4A pour les employés des deux compagnies; Cluthé Manufacturing assure l'actif des deux sociétés (d'ailleurs selon la description donnée, la firme s'occupe de la fabrication, de la vente et de la distribution); si Cluthé Manufacturing achète les fournitures, Cluthé Sales paie souvent la facture; seulement Cluthé Manufacturing conserve des marchandises en inventaire et seulement Cluthé Sales garde des comptes créditeurs à l'égard de la vente des marchandises; enfin, les documents utilisés par Cluthé Sales pour coter les prix, prendre les commandes et désigner les agents de distribution des gammes de produits de Cluthé Sales indiquent que cette dernière est un fabricant d'articles en matières plastiques.

La manière dont les marchandises sont supposément «vendues» par Cluthé Manufacturing à Cluthé Sales est un autre facteur qui permet de déterminer que les deux sociétés sont effectivement la même entité légale et qu'il n'y a pas eu vente entre les deux. L'appelante a admis que la propriété des articles n'est pas transférée de Cluthé Manufacturing à Cluthé Sales tant et aussi longtemps que la propriété des marchandises n'est pas transférée à un client de Cluthé Sales. Ainsi, Cluthé Sales doit d'abord vendre le produit fabriqué avant que l'on considère qu'elle a acheté le produit de Cluthé Manufacturing. Ensuite, au moment où la supposée vente entre les deux sociétés a eu lieu, ni l'une ni l'autre ne connaît le prix de vente de l'article acheté par Cluthé Sales. Il faut attendre la fin de l'exercice pour calculer les recettes totales de Cluthé Sales suite à la vente des articles de Cluthé Manufacturing au public, ainsi que les dépenses d'exploitation totales pour la vente des articles en question. Le prix auquel Cluthé Manufacturing «vend» ses produits à Cluthé Sales dépend donc des recettes et

des dépenses d'exploitation de cette dernière. Enfin, les recettes nettes de Cluthé Sales pour les articles produits par Cluthé Manufacturing sont transférées au compte bancaire de Cluthé Manufacturing.

Pris isolément, chacun des facteurs cités plus hauts ne serait pas décisif. Toutefois, considérés dans leur ensemble, ils convainquent le Tribunal qu'aux fins du prélèvement de la taxe de vente Cluthé Manufacturing et Cluthé Sales constituent une seule et même entité commerciale. Cluthé Sales n'achète pas les produits de Cluthé Manufacturing. Comme elle est l'unique débouché commercial des articles de Cluthé Manufacturing, le Tribunal considère Cluthé Sales comme un lien entre Cluthé Manufacturing et ses clients qui achètent les produits en question.

CONCLUSION

Comme la taxe de vente est prélevée sur le prix de vente des marchandises, le Tribunal considère que le prix de vente demandé par Cluthé Sales à ses clients pour les articles fabriqués par Cluthé Manufacturing est le montant sur lequel la taxe de vente doit être calculé.

L'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. S.R.C 1970, ch. E-13; maintenant L.R.C. 1985, ch. E-15, art. 54.

2. Ibid., art. 58.

3. Ibid., art. 81.21.

4. Ibid., par. 50(1).

5. S.C. 1988, ch. 56.

6. [1987] 1 C.F. 367 (F.C.T.D.; confirmé en partie [1988] 1 T.S.T. 2025 [A.C.F.]).

7. [1939] 3 D.L.R. 577 (P.C.).

8. [1933] R.C.S. 131.

9. [1929] 1 D.L.R. 658 (C.S. de l'Ontario).


Publication initiale : le 15 août 1997