BEVEL EDGE GLASSWORKS LTD.

Décisions


BEVEL EDGE GLASSWORKS LTD.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no 3040

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 27 janvier 1992

Appel no 3040

EU ÉGARD À un appel entendu le 24 octobre 1991 aux termes de l'article 51.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1970), ch. E-13, dans sa version modifiée;

ET EU ÉGARD À un avis de décision rendu par le ministre du Revenu national le 18 février 1988 relativement à un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 51.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

BEVEL EDGE GLASSWORKS LTD.Appelante

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONALIntimé

L'appel est admis. Les miroirs de toilette pour salles de bain, coupés en fonction de dimensions précises et collés sur des murs de façon permanente, sont des matériaux pour murs aux termes de l'article 18 de la partie I de l'annexe V de la Loi sur la taxe d'accise.


W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre présidant

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





Le présent appel est interjeté d'une décision du ministre du Revenu national ayant pour effet de maintenir une cotisation datant du 17mars1987, aux termes de l'article51.19 (maintenant 81.19) de la Loi sur la taxe d'accise. L'objet du litige consiste à déterminer si les miroirs ou les plaques de miroir, coupés en fonction de dimensions précises et collés sur des murs dans un bâtiment, sont admissibles au taux de taxe de vente réduit en tant que marchandises énumérées à l'article18 de la partieI de l'annexe V de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : L'appel est admis. Les miroirs de toilette pour salles de bain, coupés en fonction de dimensions précises et collés sur des murs de façon permanente, sont des matériaux pour murs et des marchandises assujetties au taux de taxe de vente réduit. Il n'y a rien dans l'article18 de la partieI de l'annexe V qui soit de nature à faire établir une distinction entre un miroir couvrant la totalité d'un mur et un miroir couvrant toute la hauteur et toute la largeur d'un mur, malgré qu'il ne couvre que la partie du mur allant du plafond à la bordure supérieure du meuble-lavabo.

Lieu de l'audience : Calgary (Alberta) Date de l'audience : Le 24 octobre 1991 Date de la décision : Le 27 janvier 1992
Membres du Tribunal : W. Roy Hines, membre présidant Sidney A. Fraleigh, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Avocat pour le Tribunal : Gilles B. Legault
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : H. George McKenzie, pour l'appelante Howard Baker, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté d'une décision du ministre du Revenu national (le Ministre), ayant pour effet de maintenir une cotisation datant du 17 mars 1987, aux termes de l'article 51.19 (maintenant 81.19) de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi). Une cotisation au montant de 12 081,19 $ avait été établie pour la période allant du 1er mars 1985 au 30 septembre 1986 à l'égard de l'appelante, un fabricant de verre biseauté et de miroir, titulaire de licence.

Le 12 juin 1987, l'appelante s'est opposée en partie à cette détermination au motif que les miroirs coupés en fonction de dimensions précises et collés sur des murs deviennent des éléments définitifs d'un bâtiment et, par conséquent, devraient être admissibles à un taux de taxe de vente inférieur à titre de matériaux de construction.

Le 18 février 1988, le Ministre a rejeté l'opposition parce qu'il interprétait les termes «matériaux... pour murs» de l'article 18 de la partie I de l'annexe V de la Loi en y incluant les marchandises et matériaux communément vendus et utilisés dans la construction ou l'érection de murs. L'appelante s'est opposée à cette décision le 15 août 1988.

La question en litige consiste à déterminer si les miroirs ou les plaques de miroir, coupés en fonction de dimensions précises et collés sur des murs dans un bâtiment, sont admissibles au taux de taxe de vente inférieur prévu par le paragraphe 27(1.1) de la Loi en tant que marchandises énumérées à l'article 18 de la partie I de l'annexe V de ladite loi.

L'article 18 de la partie I de l'annexe V se lit comme suit :

18. Panneaux de plâtre, carton de fibre, panneaux muraux, papier à construction, papier peint et matériaux pour plafonds, pour murs, comme isolants ou à des fins acoustiques, à l'exclusion de la moquette.

M. Maurice Malka, président de Bevel Edge Glassworks Ltd., a comparu en tant que témoin pour l'appelante. M. Malka a décrit un certain nombre de miroirs reproduits sur les pièces A-1 à A-5 qui peuvent être utilisés dans différents lieux d'une résidence (salle de bain, chambre à coucher, pourtour d'un foyer, etc.) en précisant que sa société fabrique toutes ces marchandises, qu'elles sont généralement fabriquées en fonction de paramètres précis et qu'elles sont définitivement fixées sur un mur au moyen d'un agent collant, en l'occurrence, du mastic. Le témoin a déclaré que les marchandises ne sont pas produites avant d'avoir été vendues, qu'il arrive qu'elles couvrent un mur entier, ou qu'elles ne consistent qu'en un miroir de toilette dans une salle de bain. Dans tous les cas, le miroir, une fois installé, ne peut être enlevé sans être brisé.

M. Azim S. Rajan, chef de l'unité de vérification du bureau de l'accise du district de Calgary, a comparu comme témoin pour l'intimé. M. Rajan était le vérificateur de l'accise chargé de l'examen des livres de l'appelante. En répondant aux questions des avocats des deux parties, M. Rajan a clairement établi que les miroirs en question dans le présent appel ne consistent qu'en ce qu'on appelle communément des miroirs de toilette pour salles de bain. C'est ainsi que le témoin a renvoyé à un dessin (pièce B-1 Diagramme avec dimensions - Salle de bain principale) fait par l'ancien président de l'appelante et qui illustre le type de miroirs en question. M. Rajan a déclaré que les miroirs muraux allant du plancher au plafond étaient considérés par Revenu Canada, Douanes et Accise (Revenu Canada) comme admissibles au taux de taxe inférieur, mais que les miroirs de toilette installés au-dessus d'un lavabo, même lorsqu'ils sont coupés sur mesure et collés définitivement, ne sont pas admissibles. À l'époque, la position de Revenu Canada a été confirmée en ce sens à M. Rajan par un agent d'interprétation fiscale.

À la suite du témoignage de M. Rajan, l'avocat de l'appelante a admis que les marchandises en question sont des miroirs coupés en fonction de dimensions précises et posés sur des murs de salle de bain, selon des paramètres spécifiés par les clients. Il a attiré l'attention du Tribunal sur la pièce A-2 «Photographies de miroirs dans des salles de bain» qui illustre le genre de travail auquel se livre actuellement l'appelante.

Dans cette cause, l'argumentation a tourné autour de la question de savoir si les marchandises en cause sont admissibles à titre de «panneaux muraux» ou de «matériaux pour murs», selon les termes de la disposition d'exemption. L'avocat de l'intimé a soutenu que la fonction des miroirs muraux relève de la décoration, de l'architecture ou de la stylique, alors que les miroirs de toilette sont de nature plus utilitaires. En outre, les miroirs de toilette sont un produit fini lorsqu'ils quittent l'usine de l'appelante et ne peuvent être, pour cette raison, considérés comme des «matériaux» au sens de la disposition d'exemption. L'avocat a soutenu, enfin, que l'appelante ne s'était pas acquittée de son fardeau de prouver que la cotisation était incorrecte.

L'avocat de l'appelante a adopté la position selon laquelle les miroirs en question peuvent être considérés soit comme des panneaux muraux, soit comme des matériaux pour murs. L'élément essentiel de cette position est que l'article 18 vise, dans son ensemble, les revêtements fixés définitivement aux murs plutôt que les composants qui entrent dans la construction d'un mur. En d'autres termes, l'avocat a soutenu que cette disposition s'applique d'abord et avant tout aux articles finis qui sont amenés en un certain lieu pour y être définitivement installés. L'avocat a constaté que puisqu'il n'y a pas de désaccord entre les parties quant au fait que les marchandises sont fixées définitivement aux murs, on peut avancer que Revenu Canada a établi, dans son traitement fiscal des miroirs, une distinction arbitraire entre les salles de bains et les autres lieux des résidences, ainsi qu'entre les miroirs qui recouvrent totalement les murs et ceux qui les recouvrent partiellement.

De l'avis du Tribunal, les éléments de preuve sont clairement favorables à la position de l'appelante. L'article 18 de la partie I de l'annexe V ne mentionne aucun type de miroir ni aucun endroit particulier à l'intérieur d'un ensemble architectural. Cet article vise une catégorie de marchandises faisant partie de l'ensemble général des matériaux de construction, catégorie qui comprend le papier peint, mais pas la moquette, deux articles qui ne sont généralement pas considérés comme des éléments fondamentaux de la construction d'un mur. Ainsi, à notre avis, cet article vise au moins un certain nombre de matériaux de revêtement mural. La position adoptée par Revenu Canada au sujet des miroirs muraux allant du plancher au plafond est de nature à confirmer cette conception. La question qui se pose alors est celle de savoir s'il y a quelque chose dans l'article 18 qui soit susceptible de faire établir un distinction entre un miroir couvrant la totalité d'un mur et un miroir couvrant toute la hauteur et toute la largeur d'un mur, malgré qu'il ne couvre que la partie du mur allant du plafond à la bordure supérieure du meuble-lavabo, comme l'illustre la pièce B-1. Compte tenu du fait que les deux types de miroirs sont installés de façon définitive et ne peuvent être enlevés sans dommage important, le Tribunal ne voit rien dans l'article 18 qui pourrait logiquement conduire à établir une distinction entre ces deux produits. Le Tribunal ne voit, non plus, aucun fondement à l'opinion selon laquelle une distinction pourrait être établie en fonction de l'emplacement du miroir dans un bâtiment ou du fait que sa destination relève de la décoration, de l'architecture ou de la stylique. De fait, il pourrait être soutenu qu'un miroir remplit toujours ces fonctions, quel que soit son emplacement dans un bâtiment.

En conséquence, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1970), ch. E-13, dans sa version modifiée.


Publication initiale : le 15 août 1997