ALRICH CUSTOM CABINETS LTD.

Décisions


ALRICH CUSTOM CABINETS LTD.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel n° 3078

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 8 septembre 1992

Appel n° 3078

EU ÉGARD À un appel entendu le 2 avril 1992 en vertu de l'article 51.19 de la Loi sur la taxe d'accise, S.R.C. (1970), ch. E-13, dans sa version modifiée;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le ministre du Revenu national le 22 juillet 1988 relativement à des avis d'opposition signifiés en vertu de l'article 51.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

ALRICH CUSTOM CABINETS LTD.Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONALIntimé

L'appel est rejeté.


Kathleen E. Macmillan ______ Kathleen E. Macmillan Membre présidant

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





La question, dans le présent appel, consiste à déterminer si une partie de la taxe de vente payée, aux termes du paragraphe 27(1) de la Loi sur la taxe d'accise, sur des armoires de cuisine fabriquées et vendues par l'appelant, est remboursable aux termes de l'article 44 de la Loi sur la taxe d'accise, attendu que l'appelant soutient avoir commis une erreur dans l'établissement de son obligation fiscale et veut utiliser rétroactivement une valeur déterminée autorisée par le ministère du Revenu national.

DÉCISION : L'appel est rejeté.

Lieu de l'audience : Vancouver (Colombie-Britannique) Date de l'audience : Le 2 avril 1992 Date de la décision : Le 8 septembre 1992
Membres du Tribunal : Kathleen E. Macmillan, membre présidant Sidney A. Fraleigh, membre W. Roy Hines, membre
Avocat pour le Tribunal : Robert Desjardins
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Vincent A. Heitzman, pour l'appelant John B. Edmond, pour l'intimé





Le 30 septembre 1987, l'appelant a déposé des demandes de remboursement de la taxe de vente payée pendant les périodes allant du 1er avril au 31 décembre 1985, du 1er janvier au 31 décembre 1986 et du 1er janvier au 28 février 1987, pour la raison qu'il avait payé de la taxe en trop, «ayant utilisé une base de calcul antérieure». Des avis de détermination rejetant les demandes ont été publiés le 23 octobre 1987. Des avis d'opposition datés du 25 janvier 1988 ont été signifiés par l'appelant. Dans des avis de décision datés du 22 juillet 1988, l'intimé a confirmé les déterminations.

La question, dans le présent appel, consiste à déterminer si une partie de la taxe de vente payée, aux termes du paragraphe 27(1) de la Loi sur la taxe d'accise [1](la Loi), sur des armoires de cuisine fabriquées et vendues par l'appelant, est remboursable aux termes de l'article 44 de la Loi, attendu que l'appelant soutient avoir commis une erreur dans l'établissement de son obligation fiscale et veut utiliser rétroactivement une valeur déterminée autorisée par le ministère du Revenu national (Revenu Canada).

L'appelant, qui est en affaires depuis les années 1950, est un fabricant d'armoires de cuisine qui vend de 1 à 1,5 million de dollars de marchandises par an. Comme l'avocat de l'appelant l'a indiqué à l'audience, l'appelant fabrique, livre et installe des armoires de cuisine faites sur commande. Ses clients sont des entrepreneurs et des propriétaires. En avril 1987, un agent de Revenu Canada a visité l'appelant et a examiné ses activités. À cette occasion, il semble que l'agent ait informé l'appelant du fait qu'il pouvait se prévaloir d'un escompte supplémentaire conformément à la valeur déterminée établie par Revenu Canada pour l'industrie des armoires de cuisine. L'appelant s'est alors prévalu de cet escompte et a déposé les demandes de remboursement susmentionnées relativement à la taxe de vente payée en trop. Revenu Canada, conformément au Mémorandum de l'Accise ET 202 (le Mémorandum), a adopté la position selon laquelle la valeur déterminée ne pouvait pas être appliquée rétroactivement.

L'avocat de l'appelant a plaidé que, puisque les autres fabricants d'armoires de cuisine ont utilisé la méthode de la valeur déterminée pendant les périodes visées par les demandes de remboursement, son client devait avoir droit aux mêmes avantages, même s'il n'était pas au courant, à l'époque, de l'existence de l'escompte. L'avocat a soutenu qu'il s'agissait d'une question d'équité. Il a également soutenu que la cause Allan G. Cook Limited c. Le ministre du Revenu national [2] constituait un précédent applicable en l'espèce. À cet égard, il a fait valoir que l'appelant était un fabricant de marchandises à son usage propre. Conformément à l'alinéa 28(1)d) de la Loi, chaque fois que des marchandises sont fabriquées au Canada dans des circonstances telles qu'il devient difficile d'en établir la valeur imposable, parce que «ces marchandises sont à l'usage du fabricant ou du producteur et non à vendre», le ministre du Revenu national (le Ministre) peut en fixer la valeur imposable, et toutes ces opérations sont considérées comme des ventes.

L'avocat de l'intimé a d'abord fait remarquer que les documents pertinents publiés par Revenu Canada et portant sur l'existence de la valeur déterminée relative à l'industrie des armoires de cuisine, ont été portés à la connaissance du public et mis à la disposition de l'appelant avant que ce dernier n'apprenne l'existence de cette valeur déterminée. L'avocat a ajouté que la décision rendue dans l'affaire Cook n'était pas applicable en l'espèce, précisant que la valeur déterminée, dans cette décision, avait un fondement statutaire et qu'il ne fait pas de doute que les armoires fabriquées par l'appelant dans le cas présent sont des produits finis à vendre et non à l'usage du fabricant. L'avocat de l'intimé a conclu en établissant un parallèle rigoureux entre la présente cause et trois décisions inédites rendues récemment par le Tribunal, soit le 2 mars 1992, à savoir : Artec Design Inc. c. Le ministre du Revenu national (appel no AP-90-117), Seine River Cabinets Ltd. c. Le ministre du Revenu national (appel no AP-90-118) et Imperial Cabinet (1980) Co. Ltd. c. Le ministre du Revenu national (appel no AP-91-045).

Après avoir examiné le dossier et pris les arguments en considération, le Tribunal est d'avis que l'appel doit être rejeté.

L'appelant soutient pour l'essentiel qu'il est un fabricant de marchandises à son usage propre. À cet égard, l'avocat de l'appelant a prétendu s'appuyer sur la décision rendue par le Tribunal dans l'affaire Cook. Cependant, le Tribunal ne croit pas que la présente cause porte sur la question de savoir si l'appelant est un fabricant à son usage propre. De l'avis du Tribunal, les armoires de cuisine fabriquées par l'appelant pendant la période en question n'ont pas été faites à son usage propre. Le Tribunal est d'accord avec la thèse fondamentale de l'intimé selon laquelle l'appelant vend des armoires de cuisine et qu'il ne fait pas de doute que ces armoires sont des composants d'autres articles vendus ultérieurement par l'appelant. Nul n'a contesté que les armoires de cuisine vendues par l'appelant étaient des marchandises finies vendues comme telles aux entrepreneurs et aux propriétaires. Cette situation fait contraste avec celle qui se présentait dans l'affaire Cook, où l'asphalte produit par l'appelant, une société de construction de routes et un producteur de mélanges asphaltiques de pavage à son usage propre et à vendre, était, en fin de compte, utilisé par l'appelant dans l'exécution de ses contrats d'asphaltage. La situation serait différente si l'appelant était un entrepreneur qui fabriquait des armoires de cuisine à installer dans des maisons devant être vendues. Dans la cause The Queen v. Saracini et al. [3], la Cour de l'Échiquier du Canada a statué que ces armoires de cuisine n'étaient pas fabriquées pour être vendues à d'autres acheteurs, mais étaient consommées ou utilisées par le fabricant.

Dans son mémoire, l'appelant s'est référé spécifiquement à la Fiche de décision 3700/107-1 de Revenu Canada. Pour l'appelant, cela prouve que l'intimé, conformément à l'alinéa 28(1)d) de la Loi, a établi une valeur déterminée pour l'industrie des armoires de cuisine. Tel qu'indiqué ci-dessus, le Tribunal est d'avis que cet alinéa n'est d'aucune portée dans la présente cause. De plus, il est à souligner que la Fiche de décision 3700/107-1 est fondée explicitement sur le Mémorandum. Ce dernier, comme cela est indiqué dans les trois décisions du 2 mars 1992 mentionnées ci-dessus, interdit explicitement l'application rétroactive d'une valeur déterminée, et n'a pas de valeur statutaire ni réglementaire. Le Tribunal est d'avis que la valeur déterminée indiquée dans le Mémorandum est fondamentalement le reflet d'une politique purement administrative de Revenu Canada. En conséquence, la valeur déterminée pertinente dans la présente cause est sans fondement légal, et le Tribunal sortirait de ses compétences s'il faisait prévaloir son utilisation contre les dispositions de la Loi.

L'article 44 de la Loi prévoit que le Ministre rembourse au contribuable des sommes d'argent versées par erreur de fait ou de droit ou autrement lorsqu'il a été tenu compte des sommes d'argent à titre de taxes, de pénalités ou d'intérêts «en vertu de la présente Loi». Le Tribunal doit établir si le Ministre avait raison lorsqu'il a déterminé que les sommes d'argent n'ont pas été versées par erreur lorsqu'il en a été tenu compte à titre de taxes «en vertu de la présente Loi», quelle que soit la méthode utilisée par le contribuable pour calculer la taxe. Pendant les périodes visées par les demandes de remboursement, l'appelant a payé la taxe de vente sur le prix de vente conformément à la Loi. Il soutient avoir payé la taxe sur une base moins avantageuse que celle qui était offerte par une concession administrative de Revenu Canada, dont, a-t-il soutenu, il n'était pas au courant au moment où les taxes ont été remises. L'appelant a fait appel au Tribunal pour bénéficier de cette concession administrative. Le Tribunal considère que les sommes d'argent versées par l'appelant ont été versées conformément aux dispositions pertinentes de la Loi et qu'elles constituent des taxes versées «en vertu de la présente Loi».

L'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. S.R.C. (1970), ch. E-13, dans sa version modifiée.

2. Tribunal canadien du commerce extérieur, appel no 3074, le 29 août 1989; 2 T.C.T., à la p. 1167.

3. [1959] Ex. C.R, à la p. 63.


Publication initiale : le 15 août 1997