1211863 ONTARIO INC. S/N A & T LEASING

Décisions


1211863 ONTARIO INC. S/N A & T LEASING
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-2000-021

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mercredi 1er août 2001

Appel no AP-2000-021

EU ÉGARD À un appel entendu le 16 janvier 2001 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, c. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

1211863 ONTARIO INC. S/N A & T LEASING Appelante

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est admis en partie.



Richard Lafontaine

Richard Lafontaine
Membre présidant

Pierre Gosselin

Pierre Gosselin
Membre

Patricia M. Close

Patricia M. Close
Membre


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire
 
 

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise (la Loi) à l'égard d'une demande de remboursement de la taxe d'accise portant sur des climatiseurs installés dans des automobiles. Le 23 mars 2000, le ministre du Revenu national a rendu un nombre de décisions en vertu de l'article 68.1 de la Loi dans lesquelles il rejetait la demande de remboursement de la taxe d'accise de l'appelante, imposée sur des climatiseurs installés dans des automobiles exportées. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelante a droit à un remboursement de la taxe d'accise en vertu de l'article 68.1 de la Loi, laquelle taxe est imposée sur des climatiseurs installés dans des automobiles exportées.

DÉCISION : L'appel est admis en partie. Selon le Tribunal, pour être remboursable en vertu de l'article 68.1 de la Loi, la taxe d'accise doit d'abord être exigible, c'est-à-dire que les automobiles doivent être équipées de climatiseurs. Une fois qu'il est établi qu'elle est exigible, la taxe d'accise est réputée incluse dans le prix de vente, en vertu de l'article 154 de la Loi; par voie de conséquence, lorsque les automobiles sont vendues, la taxe est réputée payée. Il faut de plus que les automobiles soient exportées et qu'elles soient neuves. En l'espèce, l'intimé admet que ces deux dernières conditions sont satisfaites. En l'occurrence, il suffit donc pour l'appelante de démontrer que les automobiles sont équipées de climatiseurs pour établir que la taxe d'accise a été payée et de démontrer que les automobiles ont été achetées par l'exportateur. Le Tribunal est d'avis que les factures des concessionnaires, seules ou avec l'aide des factures du fabricant, qui indiquent qu'une taxe d'accise est incluse dans le prix de l'automobile ou qui mentionnent que l'automobile est équipée d'un climatiseur, suffisent à prime abord pour établir que la taxe d'accise est exigible dans ces cas précis. Le Tribunal accepte aussi que la taxe sur les produits et services sur la taxe d'accise a été remboursée à l'appelante et que c'est là une indication que les automobiles ont été achetées par elle et que la taxe d'accise a été payée par l'exportateur dans le cas qui nous occupe. Le Tribunal conclut donc que, dans tous les cas où les factures des concessionnaires, seules ou avec l'aide des factures du fabricant, indiquent expressément que la taxe d'accise est incluse dans le prix de vente ou que les automobiles sont équipées de climatiseurs, l'appelante a droit au remboursement de la taxe d'accise.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 16 janvier 2001

Date de la décision :

Le 1er août 2001

   

Membres du Tribunal :

Richard Lafontaine, membre présidant

 

Pierre Gosselin, membre

 

Patricia M. Close, membre

   

Conseiller pour le Tribunal :

Michèle Hurteau

   

Greffiers :

Susanne Grimes

 

Margaret Fisher

   

Ont comparu :

Denis Péloquin, pour l'appelante

 

Marie Crowley, pour l'intimé

 
 

MOTIFS DE LA DÉCISION

INTRODUCTION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise 1 à l'égard d'une demande de remboursement de la taxe d'accise portant sur les climatiseurs installés dans des automobiles. Le 23 mars 2000, le ministre du Revenu national (le Ministre) a rendu un nombre de décisions en vertu de l'article 68.1 de la Loi dans lesquelles il rejetait la demande de remboursement de la taxe d'accise de l'appelante, imposée sur des climatiseurs installés dans des automobiles exportées, pour les motifs que l'appelante n'avait pas établi que la taxe avait été payée conformément à l'article 23 de la Loi et à l'article 7 du Règlement général sur les taxes de vente et d'accise 2 . Le 23 juin 2000, l'appelante a interjeté appel des décisions du Ministre. Bien que les parties admettent que l'appel a été interjeté auprès du Tribunal avec deux jours de retard, l'intimé ne s'est pas opposé à ce que l'appel soit entendu.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelante a droit à un remboursement de la taxe d'accise en vertu de l'article 68.1 de la Loi, laquelle taxe est imposée sur des climatiseurs installés dans des automobiles exportées.

Les articles pertinents de la Loi sont les suivants :

23. (1) Sous réserve des paragraphes (6) à (8.3) et 23.2 (6), lorsque les marchandises énumérées aux annexes I et II sont importées au Canada, ou y sont fabriquées ou produites, puis livrées à leur acheteur, il est imposé, prélevé et perçu, outre les autres droits et taxes exigibles en vertu de la présente loi ou de toute autre loi, une taxe d'accise sur ces marchandises, suivant le taux applicable figurant à l'article concerné de l'annexe pertinente, calculée, lorsqu'il est précisé qu'il s'agit d'un pourcentage, d'après la valeur à l'acquitté ou le prix de vente, selon le cas.
(2) Lorsque les marchandises sont importées, la taxe d'accise prévue par le paragraphe (1) est payé conformément à la Loi sur les douanes, et lorsque les marchandises sont de fabrication ou de provenance canadienne et vendues au Canada, cette taxe d'accise est exigible du fabricant ou du producteur au moment de la livraison de ces marchandises à leur acheteur.
68.1 (1) Lorsque la taxe prévue par la présente loi a été payée sur des marchandises qu'une personne a exportées du Canada en conformité avec les règlements pris par le ministre, un montant égal à cette taxe est, sous réserve des autres dispositions de la présente partie, payé à la personne si elle en fait la demande dans les deux ans suivant l'exportation des marchandises.
(2) Le paragraphe (1) ne s'applique pas :

a) aux taxes imposées par la partie III sur les produits du tabac énumérés à l'annexe II;
b) à la taxe imposée par la partie V.1.

L'article 154 se lit comme suit :

154. Pour l'application de la présente partie, la contrepartie de la fourniture d'un bien ou d'un service comprend les frais, droits ou taxes (sauf ceux visés par règlement, et la taxe imposée en vertu de la présente partie, qui sont payables par l'acquéreur relativement à la fourniture) imposés par une loi fédérale ou provinciale relativement à la fourniture, à la production, à l'importation, à la consommation ou à l'utilisation du bien ou du service, qui sont payables par l'acquéreur ou sont payable ou percevables par le fournisseur.

L'article 7 du Règlement se lit comme suit :

7. Lorsque des marchandises à l'égard desquelles la taxe de vente ou la taxe d'accise a été payée en vertu de la Loi sont exportées sans avoir été utilisées au Canada, les taxes ainsi payées peuvent être remboursées ou être déduites des taxes qui deviendront payables, si,

a) dans le cas de marchandises nationales, la preuve du paiement de la taxe lors de l'achat des marchandises, ou
b) dans le cas de marchandises importées au Canada, la preuve du paiement de la taxe lors de l'importation des marchandises, sous la forme d'une copie quittancée de la déclaration d'importation originale,

est conservée dans les dossiers de l'exportateur aux fins d'examen par les agents du ministère, et si l'on peut établir, à la satisfaction du ministre, que les marchandises ont été exportées du Canada.

L'annexe I de la Loi, qui vise les marchandises assujetties à la taxe en vertu de la partie III, prévoit à l'article 7 que les climatiseurs conçus pour les automobiles, les familiales, les fourgonnettes ou les camions seront assujettis à une taxe d'accise de 100 $, s'ils sont inclus à titre d'équipement installé en permanence dans ces véhicules au moment de la vente ou de l'importation par le fabricant ou l'importateur, selon le cas.

QUESTION PRÉLIMINAIRE

Le 22 décembre 2000 et le 10 janvier 2001, l'appelante a demandé à déposer des documents à titre confidentiel pour les motifs suivants : elle n'a pas à divulguer ses coûts d'achat ou sa marge bénéficiaire brute ni l'identité de ses fournisseurs; la divulgation causerait un préjudice tant à l'appelante qu'à ses fournisseurs, compte tenu des pratiques commerciales restrictives des fabricants. Le 12 janvier 2001, le Tribunal a accepté le dépôt des documents à titre confidentiel, mais il ne s'est pas prononcé sur la teneur confidentielle des documents. Le Tribunal a informé les parties que, à l'ouverture de l'audience, il demanderait d'autres précisions sur les motifs pour lesquels les documents devaient être considérés comme confidentiels. Entre-temps, les documents ont été traités de façon confidentielle.

À l'audience, l'appelante a expliqué que les documents étaient des documents commerciaux qui déterminaient les coûts d'achats de l'appelante et que cette dernière faisait compétition aux fabricants d'automobiles sur leur propre marché d'exportation. Permettre que ces renseignements deviennent publics risquait d'entraîner des recours en dommages contre l'appelante par les fabricants et de causer un préjudice à l'appelante. En réponse à une question du Tribunal concernant les renseignements qui pourraient causer un préjudice à l'appelante, l'appelante a cité, à titre d'exemples, le numéro de série de l'automobile, le prix d'achat et le nom du fournisseur.

L'intimé était d'avis que seuls certains renseignements tels que le numéro de série de l'automobile et le prix de vente pouvaient faire l'objet de confidentialité et que le reste de la facture pouvait demeurer au dossier public. L'intimé a également admis que certains de ces renseignements se retrouvaient dans les formulaires N-15 qui, eux, avaient été versés au dossier public par l'intimé le 18 juillet 2000 et le 10 janvier 2001.

Le Tribunal a décidé que les documents déposés par l'appelante conservaient leur désignation confidentielle et que l'appelante devait produire une version non confidentielle des documents en excluant le numéro de série des automobiles, le prix d'achat, le nom du fournisseur, le numéro de la facture, le numéro de la taxe sur les produits et services (TPS) du vendeur et le numéro du fournisseur. De plus, le Tribunal a décidé que les documents déposés par l'intimé étaient également désignés confidentiels. L'intimé devait également produire une version non confidentielle des documents en excluant les mêmes renseignements que l'appelante.

PREUVE

L'appelante a appelé M. Andrew Pilsworth, secrétaire de la compagnie appelante, comme témoin. M. Pilsworth a expliqué que l'appelante achète des automobiles neuves de concessionnaires canadiens pour ensuite les exporter vers les États-Unis, l'Europe, le Japon et ailleurs dans le monde. Il a expliqué que, si les automobiles sont disponibles au Canada à un prix inférieur et l'appelante peut les offrir à des clients dans d'autres pays ou marchés à un prix moindre que celui du fabricant dans ces pays ou marchés, l'appelante peut alors réaliser des profits. M. Pilsworth a également expliqué comment il obtenait son prix à partir du prix suggéré par le fabricant, soit le prix que le concessionnaire pouvait facturer pour l'automobile, moins un prix d'escompte. Selon lui, le fabricant envoie, dans certains cas, une facture au concessionnaire; cependant, dans la plupart des cas, compte tenu de l'entente de franchise entre le fabricant et le concessionnaire, les automobiles ne sont pas destinées à l'exportation et les fabricants préfèrent ne pas faire circuler leurs factures sur lesquelles se trouve le prix de leurs automobiles. Certains fabricants tels que General Motors, Ford et Chrysler ont des systèmes qui permettent aux concessionnaires d'avoir accès aux factures et de les imprimer au besoin. Selon M. Pilsworth, ce n'est pas le cas pour Toyota, Lexus, Honda, BMW et la majorité des concessionnaires d'automobiles japonaises et européennes.

M. Pilsworth a également témoigné que l'appelante fait parfois appel à des mandataires pour acheter les automobiles des concessionnaires. Il a expliqué que cette façon de procéder protégeait tant l'appelante que le concessionnaire contre les représailles de la part du fabricant et permettait à l'appelante de rester en affaires.

M. Pilsworth a témoigné que l'appelante s'était fait rembourser la TPS pour les quelque 250 automobiles exportées. Selon lui, puisque les automobiles avaient été exportées du Canada et qu'elles n'avaient jamais été utilisées au Canada, l'appelante avait le droit de présenter une demande de remboursement, ce qu'elle a fait. La même chose s'est produite en ce qui a trait à la taxe de vente provinciale. Pour ce qui est du paiement de la taxe d'accise sur les climatiseurs, M. Pilsworth a indiqué que l'appelante avait payé la taxe d'accise et que le montant de la taxe sur les climatiseurs était inscrit sur la facture du concessionnaire. Il a appris que d'autres compagnies qui exportaient des automobiles neuves avaient réclamé la taxe d'accise sur les climatiseurs et obtenu un remboursement. Il s'est alors informé auprès de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) sur la manière de procéder. Selon M. Pilsworth, l'ADRC lui aurait fourni des renseignements contradictoires. Dans un premier temps, il a témoigné qu'un employé de l'ADRC lui avait indiqué que la facture d'achat, la facture de vente et une déclaration sommaire du pays d'exportation suffisaient comme preuve. Il a en effet remis ces documents à l'ADRC. M. Pilsworth voulait savoir quels documents il devait soumettre avec la demande de remboursement de la taxe d'accise. Selon lui, il appert qu'il n'y avait pas de politique uniforme à l'ADRC et que les bureaux exigeaient des documents différents pour le remboursement de la taxe d'accise. En fin de compte, il a témoigné que le remboursement de la taxe d'accise pour les 250 automobiles avait été refusé à l'appelante.

En contre-interrogatoire, M. Pilsworth a indiqué que la facture du concessionnaire comprend le 100 $ de taxe d'accise dans le prix de vente de l'automobile qui est facturé à l'acheteur. Il a avoué que la facture de vente du concessionnaire n'indique pas que le fabricant a payé le 100 $ de taxe d'accise pour les climatiseurs à la Couronne. De plus, en passant les factures en revue, M. Pilsworth a reconnu que certaines d'entre elles indiquaient que l'automobile n'avait pas de climatiseur et que le 100 $ n'était donc pas inscrit sur la facture. Dans certains cas, la facture indiquait seulement que l'automobile était équipée d'options standards du fabricant. Selon lui, ce renseignement, en plus du modèle et du numéro de l'automobile, démontre que l'automobile est équipée d'un climatiseur. En réponse à l'intimé, M. Pilsworth a admis ne pas avoir demandé aux fabricants de certifier que la taxe d'accise avait été payée sur les automobiles en cause, et ce, pour les raisons susmentionnées. De plus, les concessionnaires ne veulent pas donner une copie de la facture du fabricant même lorsqu'ils y ont accès, puisque ces factures divulguent le prix d'achat de l'automobile, renseignement qui est confidentiel.

L'intimé a appelé M. Gary Gizzie, vérificateur auprès de l'ADRC, comme témoin, en raison de sa connaissance de l'industrie de l'automobile. Il a expliqué que son rôle est de s'assurer que la taxe d'accise a été payée et que l'automobile a été exportée sans avoir été utilisée avant l'exportation, conformément à la Loi et aux règlements applicables. À l'occasion de sa visite chez l'appelante, il a vérifié les documents de cette dernière, soit le formulaire N-15, la facture de vente, la facture du concessionnaire et les documents d'exportation. M. Gizzie a témoigné ne pas avoir vu de factures du fabricant. Selon lui, la taxe d'accise ne peut être payée que par le fabricant au moment de la vente des automobiles. En outre, il a examiné les documents, y compris la facture du concessionnaire, ainsi que le paragraphe 23(2) et l'article 68.1 de la Loi; il en est venu à la conclusion que ces factures ne prouvaient pas que la taxe d'accise avait été payée par le fabricant. M. Gizzie a également conclu que l'exportateur devait fournir des documents qui indiquaient que la taxe d'accise avait été payée. Dans le cas présent, l'appelante n'avait pas conservé cette documentation comme il se devait aux termes de l'article 7 du Règlement. Selon M. Gizzie, il incombe à l'exportateur de vérifier si la taxe d'accise a bien été payée. M. Gizzie a témoigné que l'ADRC peut vérifier si la taxe d'accise a été payée par le fabricant; cependant, cette vérification est difficile à effectuer et peut être longue et encombrante, compte tenu du fait qu'il faut faire un renvoi au numéro de l'automobile et au fabricant, en se fondant sur le formulaire N-15.

En passant certaines factures en revue, M. Gizzie a témoigné que, bien que la facture du fabricant versée au dossier n'indique pas que la taxe d'accise avait été payée à la Couronne, l'ADRC l'acceptait comme preuve de paiement par le fabricant. Cependant, le seul moyen que l'ADRC a de savoir si la taxe d'accise a été payée est de communiquer avec le fabricant lui-même. En l'espèce, la facture du fabricant indique qu'une taxe a été prélevée; cependant, selon M. Gizzie, il ne s'agit pas d'une taxe mais bien d'une récupération des coûts. Pour cette raison, la facture du concessionnaire, qui inclut la somme de 100 $ sur les climatiseurs, ne prouve pas que la taxe a été payée à la Couronne, mais plutôt qu'il s'agit d'une récupération des coûts par le concessionnaire.

M. Gizzie a témoigné qu'un autre exportateur automobile a pu obtenir une facture de Toyota. En contre-interrogatoire, il a admis que la facture de Toyota dont il avait été question avait été obtenue à la suite d'une vérification. Il a de plus admis qu'il était difficile pour l'ADRC de vérifier si le fabricant avait payé la taxe d'accise à la Couronne. En l'espèce, l'appelante a demandé comment l'ADRC peut s'attendre à ce que l'exportateur obtienne cette information si l'ADRC elle-même éprouve de la difficulté à l'obtenir. M. Gizzie a répondu que l'acheteur, soit l'appelante, doit obtenir l'information conformément à la Loi et aux règlements applicables. D'ailleurs, il y avait déjà au dossier certaines factures du fabricant.

En réponse aux questions du Tribunal, M. Gizzie a témoigné que la taxe d'accise n'est due que par le fabricant, au moment de sa vente de l'automobile.

POSITION DES PARTIES

L'appelante prétend que, avec l'instauration du régime de la TPS, et particulièrement de l'article 154 de la Loi, toutes les taxes qui existent relativement à un produit et qui sont en amont du paiement de la TPS sont incluses dans le prix sur lequel la TPS est facturée. En bout de ligne, c'est le consommateur qui paie l'ensemble des taxes qui s'appliquent à un produit.

Selon l'appelante, la preuve que la taxe d'accise a été payée découle du fait même que la TPS a été remboursée. L'appelante prétend que l'intimé admet dans son mémoire que les automobiles en cause étaient équipées de climatiseurs, et en remettant la TPS à l'appelante, il se trouve à reconnaître avoir reçu le 100 $ de taxe d'accise puisqu'il remet 7 $, soit la TPS, perçus sur la taxe d'accise.

L'appelante soutient que, au moment d'une demande de remboursement en vertu de l'article 683 de la Loi, le gouvernement fédéral doit déterminer si les marchandises sont assujetties à une taxe d'accise; si elles ont été payées; si elles ont été exportées et si elles étaient neuves. Ce sont là les conditions prévues à l'article 7 du Règlement. Par conséquent, l'appelante conclut que, une fois ces conditions respectées, il y a présomption que la taxe d'accise a été payée. Selon la preuve et le témoignage de M. Pilsworth, l'appelante a acheté des automobiles neuves équipées de climatiseurs et elle s'est fait rembourser la TPS sur les 100 $ de taxe d'accise pour chaque automobile. De plus, l'appelante maintient que l'article 68 de la Loi stipule que la taxe d'accise doit avoir été payée. Quant à la preuve de paiement, l'appelante soutient qu'elle ne se trouve pas dans une situation où il lui est possible de demander au fabricant la preuve qu'elle a payé la taxe d'accise parce que le fabricant est un compétiteur. En outre, il n'est pas possible d'obtenir la facture du fabricant ou du concessionnaire puisque, d'une part, ce dernier n'est pas obligé de la lui fournir et, d'autre part, si l'appelante insiste trop, le concessionnaire pourrait refuser de lui vendre des automobiles destinées à l'exportation, compte tenu des ententes entre concessionnaires et fabricants.

L'appelante maintient qu'il faut lire l'article 68 de la Loi de concert avec l'article 7 du Règlement, lequel indique que la preuve du paiement de la taxe doit se faire lors de l'achat des marchandises et non au moment de la fabrication. En l'espèce, l'appelante prétend que c'est grâce à la facture du vendeur qu'elle peut faire la preuve du paiement de la taxe d'accise lors de l'achat d'automobiles. Selon l'appelante, la Loi prévoit que le prix de vente comprend toutes les taxes dues pour fins du calcul de la TPS.

L'appelante soutient qu'on ne peut pas prendre le concept de l'article 23 de la Loi et l'intégrer à celui de l'article 68. L'article 23 s'applique au début de la chaîne, tandis que l'article 68 et l'article 7 du Règlement s'appliquent à la fin de la chaîne, soit au moment où l'on se demande si les marchandises sont destinées à la consommation nationale. Selon l'appelante, quand les marchandises sont destinées à la consommation nationale, elles sont taxables. Par contre, lorsque les marchandises ne sont pas destinées à la consommation nationale, elles sont « détaxées », tant pour ce qui est de la TPS que pour toutes les autres taxes.

Enfin, l'appelante prétend que la TPS est une taxe d'accise et que l'article 154 de la Loi coiffe tout ce qui précède. En d'autres termes, l'appelante est d'avis que le régime de la TPS n'est pas une loi à part, mais fait partie de la Loi.

Pour sa part, l'intimé prétend que, pour avoir droit à un remboursement, l'appelante doit démontrer que les exigences de l'article 68.1 de la Loi sont satisfaites. La première exigence veut que la taxe imposée en vertu de la Loi ait été payée. Pour définir cette exigence, il faut se référer au paragraphe 23(2) de la Loi. L'appelante doit donc établir que le fabricant a payé la taxe d'accise au moment de la livraison des marchandises en cause. C'est un fardeau qui incombe à l'appelante et le fardeau a été codifié dans les règlements. En particulier, l'intimé signale au Tribunal que l'alinéa 7a) du Règlement stipule que la personne qui demande le remboursement doit établir que la taxe a été payée lors de l'achat des marchandises. De plus, la preuve de paiement de la taxe est fournie par le fabricant, qui l'a payée. Selon l'intimé, les taxes sont payées en vertu de la Loi et, dans le cas de marchandises qui sont fabriquées au Canada, par le fabricant. Dès qu'il y a une preuve de paiement de la taxe par le fabricant, l'exportateur a droit au remboursement.

Cette disposition existe en raison du fait qu'il est difficile pour l'ADRC de déterminer si la taxe a effectivement été payée par le fabricant. La déclaration qui est remplie et fournie par le fabricant parle seulement d'un montant global qui est ensuite impossible de retracer. Le seul moyen que l'ADRC a de déterminer si la taxe a été payée serait d'entreprendre une vérification des livres des fabricants, ce qui n'est pas vraiment réaliste, de soutenir l'intimé. Le législateur a donc imposé le fardeau à la personne qui demande le remboursement.

Selon l'intimé, la meilleure preuve pour celui qui demande un remboursement est la déclaration du fabricant. Cependant, compte tenu des difficultés auxquelles peut faire face l'exportateur qui voudrait obtenir du fabricant une déclaration indiquant que la taxe a été payée, l'ADRC a tenté d'assouplir les exigences en acceptant la facture du fabricant comme preuve de paiement de la taxe. Techniquement, la facture n'indique pas que la taxe a été payée; cependant, c'est un document qui est fiable puisqu'il provient du contribuable. En bout de ligne, l'ADRC a toujours ses recours face à ce contribuable.

L'intimé plaide que, pour être admissible au remboursement de l'article 68.1 de la Loi, les trois conditions suivantes doivent être remplies :

la taxe d'accise doit avoir été payée à la Couronne;
le demandeur du remboursement doit être l'exportateur;
les automobiles exportées doivent être neuves et ne pas avoir été utilisées.

L'intimé admet que les deux dernières conditions ont été remplies. Quant à la première condition, l'intimé allègue qu'il n'y a pas de preuve suffisante pour établir que la taxe d'accise a été payée à la Couronne.

L'intimé prétend que les factures des concessionnaires ne sont pas une preuve adéquate pour satisfaire aux exigences du Règlement parce que, tout d'abord, la facture du concessionnaire n'est pas un document qui provient du contribuable; ensuite, certaines des factures ne mentionnent pas le 100 $ de taxe d'accise; enfin, selon la preuve déposée, certaines autres factures ne font pas mention de climatiseurs. Par conséquent, l'intimé soutient que la facture du concessionnaire n'est pas la meilleure preuve à soumettre pour satisfaire aux exigences de l'article 7 du Règlement.

De plus, l'intimé plaide que, conformément au paragraphe 98(1) de la Loi, quiconque fait une demande de remboursement en vertu de l'article 68.1 doit tenir des registres et livres de compte renfermant les renseignements qui permettent de déterminer le montant des taxes qui auraient dû être payées. Par conséquent, une des conditions préalables à l'obtention d'un remboursement aux termes de l'article 68.1 est que la taxe d'accise ait été payée à la Couronne.

Quant à l'argument de l'appelante selon lequel l'article 154 de la Loi aide à prouver que la taxe d'accise a été payée, l'intimée suggère qu'il faut l'examiner avec circonspection. Selon l'intimé, bien que la contrepartie soit inscrite sur la facture du concessionnaire, celle-ci n'indique pas ce qui est inclus. En d'autres termes, rien n'indique que la taxe d'accise est incluse dans la contrepartie. Il faut donc se rabattre sur la facture du fabricant qui inclut le montant de la taxe d'accise dans le prix de vente. Sans cette preuve, il est impossible de dire, en examinant la facture du concessionnaire, si la taxe d'accise a été payée.

En conclusion, l'intimé soutient que la preuve que la taxe a été payée n'a pas été faite et que les exigences de la Loi et des règlements applicables n'ont pas été satisfaites.

DÉCISION

Le Tribunal est d'avis que la taxe d'accise visée par le paragraphe 23(2) de la Loi est une taxe exigible du fabricant au moment de la livraison des marchandises à l'acheteur, alors que la taxe visée par l'article 68.1 est payée par l'exportateur. Autrement, pourquoi la taxe lui serait-elle remboursable? La preuve exigée par l'article 7 du Règlement doit être une preuve que la taxe a été payée en vertu de la Loi, qu'elle a été payée lors de l'achat des marchandises et que celles-ci ont été exportées sans avoir été utilisées au Canada.

En l'espèce, les éléments de preuve au dossier nous révèlent que l'appelante a produit des factures des concessionnaires qui tantôt sont appuyées par des factures du fabricant et qui tantôt ne le sont pas. De plus, certaines factures des concessionnaires ne révèlent pas qu'une taxe d'accise a été facturée ou que l'automobile était équipée d'un climatiseur.

Selon l'ADRC, seules les factures du fabricant servent à établir que la taxe d'accise a été payée. Une facture du concessionnaire indiquant que la taxe est due ne suffit pas selon elle, pas plus qu'une indication sur la facture que l'automobile est équipée d'un climatiseur.

Le Tribunal a examiné le régime de la tenue des registres et livres de compte des articles 98 à 102 de la Loi. Il est d'avis que, en vertu du paragraphe 100(2) de la Loi, le Ministre a la discrétion de prescrire la forme que la documentation doit prendre. Mais encore faut-il que l'exercice de sa discrétion ne soit pas déraisonnable. En l'espèce, le Tribunal est convaincu qu'il n'est pas raisonnable d'exiger que l'exportateur fournisse des factures ou pièces justificatives du fabricant ou même que ces dernières lui soient fournies par les concessionnaires, compte tenu des restrictions qui sont imposées en matière d'exportation d'automobiles par les fabricants ou du souhait possible de la part des concessionnaires de ne pas divulguer leur marge de profit. De plus, M. Pilsworth a informé le Tribunal, et cette preuve n'a pas été contestée par l'intimé, que la TPS relative à ces mêmes ventes avait été remboursée à l'appelante en se fondant sur les factures des concessionnaires. Le Tribunal n'est pas convaincu qu'il faille avoir deux poids, deux mesures, pour administrer le remboursement de ces deux types de taxes qui font partie de la Loi. Si les factures des concessionnaires suffisent dans un cas, elles devraient, selon lui, suffire dans l'autre, et à plus forte raison quand il s'agit de la même loi.

Selon le Tribunal, pour être remboursable en vertu de l'article 68.1 de la Loi, la taxe d'accise doit d'abord être exigible, c'est-à-dire que les automobiles soient équipées de climatiseurs dans le cas qui nous occupe. Une fois qu'il est établi qu'elle est exigible, la taxe d'accise est réputée incluse dans le prix de vente, en vertu de l'article 154 de la Loi; par voie de conséquence, lorsque les marchandises sont vendues, la taxe est réputée payée. En outre, il faut que l'automobile soit exportée et qu'elle soit neuve. En l'espèce, l'intimé admet, au paragraphe 20 de son mémoire, que ces deux dernières conditions sont satisfaites. En l'occurrence, il suffit donc pour l'appelante de démontrer que les automobiles sont équipées de climatiseurs pour établir que la taxe d'accise a été payée et de démontrer que les automobiles ont été achetées par l'exportateur.

L'appelante prétend que l'intimé a admis dans son mémoire que toutes les automobiles en cause étaient équipées de climatiseurs. Là n'est pas l'avis du Tribunal. Durant son contre-interrogatoire et dans sa plaidoirie, l'intimé a laissé entendre que, dans certains cas, il n'y avait pas suffisamment de preuve à cet égard. Cependant, le Tribunal est d'avis que les factures des concessionnaires, seules ou avec l'aide des factures du fabricant, qui indiquent qu'une taxe d'accise est incluse dans le prix de l'automobile ou qui mentionnent que l'automobile est équipée d'un climatiseur, suffisent à prime abord pour établir que la taxe d'accise est exigible dans ces cas précis. L'intimé n'a soumis aucune preuve à l'effet contraire, ni n'a-t-il contesté les affirmations de l'appelante à cet égard.

Le Tribunal accepte aussi que la TPS sur la taxe d'accise a été remboursée à l'appelante et que c'est là une indication que les automobiles ont été achetées par elle et que la taxe d'accise a été payée par l'exportateur dans le cas qui nous occupe. Le Tribunal conclut donc que, dans tous les cas où les factures des concessionnaires, seules ou avec l'aide des factures du fabricant, indiquent expressément que la taxe d'accise est incluse dans le prix de vente ou que les automobiles sont équipées de climatiseurs, l'appelante a droit au remboursement de la taxe d'accise.

Par conséquent, pour les motifs qui précèdent, l'appel est admis en partie.


1 . L.R.C. 1985, c. E-15 [ci-après Loi].

2 . C.R.C., c. 594 [ci-après Règlement].

3 . Bien que l'appelante ait fait mention de l'article 68 de la Loi, elle faisait référence à l'article 68.1.


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Publication initiale : le 1 août 2001