SIMMS SIGAL & CIE LTÉE

Décisions


SIMMS SIGAL & CIE LTÉE
v.
LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA
Appel no AP-2001-016


TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 27 mai 2003

Appel no AP-2001-016

EU ÉGARD À un appel entendu le 2 décembre 2002 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada le 21 juin 2001 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

SIMMS SIGAL & CIE LTÉE Appelante

ET

LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est admis.

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre présidant

Richard Lafontaine
Richard Lafontaine
Membre

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre

Michel P. Granger
Michel P. Granger
Secrétaire

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada concernant la valeur en douane de marchandises importées par Simms Sigal & Cie ltée (Simms Sigal) entre le 1er janvier et le 31 décembre 1998. Simms Sigal est un importateur et distributeur au Canada de vêtements pour dames produits par une société située aux États-Unis. Selon la méthode d'appréciation de la valeur transactionnelle, dans le cas d'une vente de marchandises pour exportation au Canada, la valeur en douane est le prix payé ou à payer pour les marchandises. En vertu d'un accord de distribution passé avec le vendeur situé aux États-Unis, Simms Sigal avait des droits portant sur la distribution exclusive au Canada et sur l'utilisation de noms commerciaux, de marques de commerce et de services. En contrepartie, Simms Sigal convenait de verser des frais de distribution, calculés en pourcentage du chiffre d'affaires net. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les frais de distribution font partie du prix payé ou à payer pour les marchandises et font de ce fait partie de la valeur en douane des marchandises ou, subsidiairement, s'ils sont passibles de droits de douane en tant que partie du produit de la revente des marchandises qui revient au vendeur.

DÉCISION : L'appel est admis. Les frais de distribution ne font pas partie du « prix payé ou à payer » pour les marchandises, ledit prix s'entendant de « la somme de tous les versements effectués ou à effectuer par l'acheteur directement ou indirectement au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises ». Les éléments de preuve indiquent que le prix payé par Simms Sigal pour les marchandises importées inclut tous les montants versés en paiement des marchandises. Les frais de distribution ne sont pas des versements effectués en paiement des marchandises, puisqu'ils se rapportent à des droits et services qui représentent une valeur pour Simms Sigal et qui sont séparés du prix d'achat des marchandises. Dans le même ordre d'idées, les frais de distribution ne doivent pas être ajoutés à la valeur transactionnelle des marchandises en vertu du sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi sur les douanes. Le fait que les frais de distribution sont calculés en pourcentage du chiffre d'affaires net ne signifie pas que le vendeur a le droit de recevoir toute partie du produit de la revente des marchandises en tant que paiement desdites marchandises.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 2 décembre 2002

Date de la décision :

Le 27 mai 2003

   

Membres du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

 

Richard Lafontaine, membre

 

Ellen Fry, membre

   

Conseiller pour le Tribunal :

John Dodsworth

   

Greffier :

Anne Turcotte

   

Ont comparu :

Richard S. Gottlieb, pour l'appelante

 

Louis Sébastien, pour l'intimé

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes 1 à l'égard d'une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (le commissaire), le 21 juin 2001, qui a eu pour effet de confirmer une cotisation de droits de douane pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1998. Le commissaire a déterminé que les paiements effectués par Simms Sigal & Cie ltée (Simms Sigal) à Anne Klein & Company (Anne Klein) en vertu d'un accord de distribution (l'Accord) étaient des « versements effectués ou à effectuer par l'acheteur directement ou indirectement au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises ». Par conséquent, le commissaire a déterminé que les paiements faisaient partie de la valeur transactionnelle des marchandises aux fins de la détermination de leur valeur en douane, étant donné qu'ils constituaient une partie du prix payé ou à payer pour les marchandises en cas de vente des marchandises pour exportation au Canada.

Les dispositions pertinentes de la Loi sont les suivantes :

45.(1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article et aux articles 46 à 55,

« prix payé ou à payer » En cas de vente de marchandises pour exportation au Canada, la somme de tous les versements effectués ou à effectuer par l'acheteur directement ou indirectement au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises.

47.(1) La valeur en douane des marchandises est déterminée d'après leur valeur transactionnelle dans les conditions prévues à l'article 48.

48.(1) Sous réserve des paragraphes (6) et (7), la valeur en douane des marchandises est leur valeur transactionnelle si elles sont vendues pour exportation au Canada à un acheteur au Canada, si le prix payé ou à payer est déterminable et si les conditions suivantes sont réunies :

(4) Dans le cas d'une vente de marchandises pour exportation au Canada, la valeur transactionnelle est le prix payé ou à payer, ajusté conformément au paragraphe (5).

(5) Dans le cas d'une vente de marchandises pour exportation au Canada, le prix payé ou à payer est ajusté :

a) par addition, dans la mesure où ils n'y ont pas déjà été inclus, des montants représentant :

(iv) les redevances et les droits de licence relatifs aux marchandises, y compris les paiements afférents aux brevets d'invention, marques de commerce et droits d'auteur, que l'acheteur est tenu d'acquitter directement ou indirectement en tant que condition de la vente des marchandises pour exportation au Canada, à l'exclusion des frais afférents au droit de reproduction de ces marchandises au Canada,

(v) la valeur de toute partie du produit de toute revente, cession ou utilisation ultérieure par l'acheteur des marchandises, qui revient ou doit revenir, directement ou indirectement, au vendeur.

PREUVE

Le témoin de Simms Sigal était le président de cette dernière, M. Leslie Thomas Simms. Simms Sigal est une société qui importe et distribue au Canada des vêtements pour dames produits par Anne Klein. Simms Sigal et Anne Klein ne sont pas des sociétés liées.

M. Simms a témoigné au sujet des dispositions de l'Accord passé entre Simms Sigal et Anne Klein. Il a indiqué que, en plus du libellé de l'Accord, les parties considéraient comme faisant partie de l'Accord plusieurs ententes non écrites. Aux termes de l'Accord, Simms Sigal avait le droit exclusif de distribuer des gammes spécifiques de vêtements produits par Anne Klein2 . Elle avait aussi le droit d'amener ses clients canadiens aux salons de présentation d'Anne Klein à New York et certains droits limités afférents au nom commercial et à la marque de commerce Anne Klein. De plus, conformément à l'Accord, Simms Sigal recevait des services d'Anne Klein, que Simms Sigal a décrits comme étant des échantillons, des salons de présentation, des modèles, des aliments aux salons de présentation, des imprimés et du matériel de promotion des ventes, ainsi que des services afférents aux appels téléphoniques, à la télécopie et à la photocopie à ses installations de New York. Anne Klein acceptait aussi de livrer des renseignements stratégiques, de l'information sur les tendances et des études de marché, de la formation du personnel et des conférences pratiques sur la vente, des listes de séries, les services de sa direction commerciale internationale, des visites d'une équipe de couturiers au Canada, du matériel publicitaire, un approvisionnement en accessoires de magasin, des annonces nationales dans les revues des États-Unis et d'autres services divers.

En contrepartie, Simms Sigal versait des frais de distribution, qui étaient calculés en pourcentage de son chiffre d'affaires net au Canada. Le « chiffre d'affaires net » s'entend, au sens de l'Accord, de la somme des montants facturés pour toutes les marchandises expédiées par le distributeur, moins les remboursements pour les marchandises endommagées ou défectueuses. Les frais de distribution étaient versés trimestriellement et ne figuraient pas sur la facture commerciale au moment de l'importation des marchandises. L'Accord précisait aussi que Simms Sigal devait verser un montant minimum au poste des frais de distribution. M. Simms a témoigné que les frais de distribution étaient séparés du prix d'achat des marchandises.

M. Simms a témoigné que Simms Sigal n'était pas tenue de signer l'Accord en tant que condition de l'achat de vêtements Anne Klein. Il a été déclaré devant le Tribunal qu'il était entendu, advenant le cas où Anne Klein ne pouvait pas fournir un service précis à un certain moment, que Simms Sigal n'était pas tenue de payer les frais de distribution. Il a aussi été dit au Tribunal que, aux États-Unis, Anne Klein vend directement aux détaillants, et non par l'intermédiaire d'un distributeur comme elle le fait au Canada. M. Simms a déclaré que le prix des marchandises que doit payer Simms Sigal est un prix réduit par rapport au prix payé par les détaillants situés aux États-Unis, en vue de lui permettre de réaliser une marge bénéficiaire lorsqu'elle vend aux détaillants canadiens.

Selon M. Simms, Simms Sigal n'est pas assujettie à des contraintes dans la revente des vêtements, si ce n'est qu'elle doit vendre aux détaillants qui projettent l'image qu'Anne Klein souhaite projeter de son produit. Anne Klein n'a de mainmise ni sur la commercialisation ni sur l'établissement des prix au Canada.

M. Simms a témoigné que la disposition de l'Accord, selon laquelle Simms Sigal devait verser un montant minimum au poste de frais de distribution, avait pour objet de garantir qu'Anne Klein passait un accord avec un distributeur qui assurerait effectivement la promotion, la vente et le service du produit au Canada. L'Accord reconnaissait aussi que son fondement reposait sur le principe que les parties exécuteraient leurs obligations au mieux de leurs possibilités. À cet égard, il était entendu que la capacité de Simms Sigal de vendre des marchandises importées dépendait de l'attrait commercial des vêtements Anne Klein. Si les vêtements Anne Klein ne se vendaient pas bien sur d'autres marchés, Anne Klein n'appliquerait pas nécessairement les dispositions portant sur le chiffre d'affaires minimum prévues dans l'Accord. De plus, M. Simms a témoigné au sujet d'un cas où Simms Sigal n'avait pas versé le plein montant des frais de distribution, Anne Klein ayant dans ce cas omis de fournir les services prévus dans l'Accord.

M. Simms a témoigné que, à son avis, le droit exclusif de distribuer les vêtements Anne Klein constituait la partie la plus importante de l'Accord. Ce droit permettait à Simms Sigal de normaliser les prix et les services dans l'ensemble du pays et empêchait la sous-cotation des prix et des services par des distributeurs canadiens plus faibles, ce qui aurait pu se produire en l'absence d'un tel accord.

Il a été dit devant le Tribunal que les services que fournissait Anne Klein à Simms Sigal conformément à l'Accord étaient essentiels eu égard à la capacité de Simms Sigal d'atteindre un seuil raisonnable de ventes au Canada. Simms Sigal avait besoin de tels services, fournis ou non par Anne Klein. M. Simms a témoigné que la valeur estimative en dollars fournie pour chacun des services fournis par Anne Klein, comme l'indiquait le mémoire de Simms Sigal, est fondée sur son expérience personnelle au sein de l'industrie.

M. Simms a témoigné qu'Anne Klein, et non Simms Sigal, fournissait aux fabricants les croquis et les travaux d'esthétique industrielle afférents aux marchandises et que leur valeur était incluse dans le prix des marchandises. Il a aussi témoigné qu'Anne Klein facturait séparément certains coûts à Simms Sigal, en plus des frais de distribution, par exemple, le coût d'achat d'échantillons supplémentaires de vêtements. M. Simms a témoigné que, même s'ils étaient rapportés en tant que redevances dans les états financiers de Simms Sigal, d'un point de vue comptable, les frais de distribution étaient considérés comme une dépense de commercialisation, et non une partie du coût des marchandises vendues.

PLAIDOIRIE

Selon Simms Sigal, la question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si le prix de vente, tel qu'il a été établi par les parties par application d'une formule, reflète la totalité de la valeur en douane ou si une partie ou la totalité des frais de distribution doit être ajoutée au prix de vente.

Simms Sigal a soutenu que les éléments de preuve montrent clairement la manière dont le prix de vente est déterminé et le fait que ledit prix de vente n'est pas assujetti à toute modification découlant de l'Accord ou autrement. Le prix de la facture reflète totalement et exclusivement la valeur transactionnelle. Selon Simms Sigal, aucun élément de preuve n'appuie la position du commissaire selon laquelle les frais de distribution font partie du prix des marchandises et doivent donc être ajoutés au prix payé ou à payer des marchandises. Simms Sigal a renvoyé au témoignage de M. Simms selon lequel elle considérait les frais de distribution comme séparés du prix qu'elle payait et que les frais de distribution, que son comptable appelait des redevances, étaient traités en tant que dépense de commercialisation et non en tant qu'élément du coût des marchandises vendues.

Simms Sigal a fait observer que, conformément aux dispositions de l'Accord, le paiement est désigné comme frais de distribution et versé en contrepartie des droits de distribution, qui comprennent le droit de se servir du nom commercial et de la marque de commerce. Par conséquent, le paiement versé conformément à l'Accord est séparé du prix payé pour les marchandises. Simms Sigal a soutenu que, de ce fait, les frais de distribution versés conformément à l'Accord ne doivent pas faire partie du « prix payé ou à payer » aux fins de la détermination de la valeur en douane des marchandises qu'elle importe.

Selon Simms Sigal, si le Tribunal détermine que les montants en cause doivent être inclus dans le prix des marchandises, alors la méthode de la valeur transactionnelle ne peut s'appliquer. Pour appliquer cette méthode, la valeur transactionnelle doit être déterminable au moment de l'importation. Étant donné que le montant des frais de distribution est fondé sur les volumes futurs des importations, Simms Sigal a soutenu que la valeur transactionnelle ne peut être déterminée au moment de l'importation. Elle a donc soutenu que l'appréciation doit être retournée au commissaire aux fins de la détermination de la valeur en douane par application d'une autre des méthodes d'appréciation de la valeur en douane.

Selon le commissaire, les frais versés conformément à l'Accord doivent faire partie du « prix payé ou à payer » pour les marchandises, puisqu'ils constituent un versement effectué par Simms Sigal « directement [...] au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises ». Le commissaire a ajouté que la définition de l'expression « prix payé ou à payer », dans la Loi, a pour objet de garantir que tous les versements effectués par un acheteur à un vendeur ou à son profit sont inclus dans la valeur transactionnelle. Invoquant le Mémorandum D13-4-3 3 , il a soutenu que tous les versements qu'un acheteur effectue au vendeur ou à son profit sont compris dans la valeur transactionnelle même lorsqu'ils ne sont pas inclus dans le prix inscrit sur la facture commerciale ou le contrat visant les marchandises importées.

Le commissaire a soutenu que les services fournis par Anne Klein visaient à promouvoir sa propre activité commerciale. Il s'agissait de services déjà rendus, puisqu'ils étaient surtout fournis à New York relativement aux propres clients de détail d'Anne Klein, et n'entraînaient pour elle aucun coût supplémentaire lié à Simms Sigal. De plus, le commissaire a soutenu que les droits de distribution accordés à Simms Sigal et les services à dispenser prévus dans l'Accord étaient nécessaires à l'activité commerciale d'Anne Klein au Canada. En l'absence de l'Accord désignant Simms Sigal comme distributeur canadien, il faudrait qu'Anne Klein fournisse les services directement aux détaillants et récupère ses coûts à même le prix des marchandises au moment de leur vente au Canada.

Selon le commissaire, Simms Sigal n'aurait pas pu acheter les marchandises importées d'Anne Klein sans l'Accord et, par conséquent, le versement des frais est une condition de vente qui ne peut être séparée de l'accord visant l'achat des marchandises. Le commissaire a soutenu que les services et les droits prévus dans l'Accord rehaussent les possibilités de vente de Simms Sigal. S'il n'avait pas été prévu dans l'Accord que des frais de distribution devaient être versés, le commissaire allègue qu'ils auraient été inclus dans le prix payé ou à payer au moment de l'importation des marchandises. Il a invoqué la décision que le Tribunal a rendue dans les appels nos  AP-89-151 et AP-89-1654 qui, selon lui, confirme la proposition selon laquelle le paiement d'une « redevance globale » est une condition de la vente des marchandises pour leur exportation au Canada. Dans l'affaire susmentionnée, le Tribunal a conclu que, sans un accord et l'obligation afférente de verser des frais, Polygram Inc. n'aurait pas pu acheter les marchandises importées.

Subsidiairement, le commissaire a soutenu que les frais de distribution versés par Simms Sigal à Anne Klein représentent la valeur du produit d'une revente ultérieure des marchandises et doivent donc s'ajouter au « prix payé ou à payer » en vertu du sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi. Il a ajouté que la partie des frais de distribution se rapportant aux croquis et aux travaux d'esthétique industrielle est passible de droits en vertu de la division 48(5)a)(iii)(D).

DÉCISION

Aux termes de l'article 46 de la Loi, la valeur en douane des marchandises importées est déterminée conformément aux articles 47 à 55. Le paragraphe 47(1) prévoit que la valeur en douane des marchandises est déterminée d'après leur valeur transactionnelle dans les conditions prévues à l'article 48. Le paragraphe 48(4) prévoit ce qui suit: « Dans le cas d'une vente de marchandises pour exportation au Canada, la valeur transactionnelle est le prix payé ou à payer, ajusté conformément au paragraphe (5) ». L'article 45 définit le « prix payé ou à payer » ainsi : « En cas de vente de marchandises pour exportation au Canada, la somme de tous les versements effectués ou à effectuer par l'acheteur directement ou indirectement au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises. »

Selon le Tribunal, les frais de distribution versés par Simms Sigal à Anne Klein conformément à l'Accord ne font pas partie de la valeur transactionnelle, puisqu'ils ne représentent pas un versement effectué en paiement des marchandises achetées par Simms Sigal. Le Tribunal n'accueille pas la proposition avancée par le commissaire selon laquelle tous les versements qu'un acheteur effectue au vendeur ou à son profit sont compris dans la valeur transactionnelle. La définition de l'expression « prix payé ou à payer » que donne la Loi exprime clairement que seuls les versements effectués en paiement des marchandises sont inclus. Bien que le sens de l'expression « en paiement des » soit très large, le Tribunal est d'avis que, étant donné le contexte qui se rapporte à la vente des marchandises pour exportation, il ne s'étend pas aux frais de distribution versés à Anne Klein en contrepartie de droits de distribution exclusive ou de services.

Selon le Tribunal, les frais de distribution ne sont pas versés en paiement des marchandises, puisqu'ils constituent un paiement de droits de distribution exclusive au Canada et de services, et non un paiement se rapportant à l'achat des marchandises. Les droits et services fournis conformément à l'Accord ont une importante valeur eu égard à l'activité commerciale de Simms Sigal au Canada. Notamment, les droits de distribution exclusive procuraient à Simms Sigal un avantage considérable dans son activité commerciale au Canada, puisqu'ils lui permettaient de normaliser les prix et services et empêchaient la sous-cotation des prix par des distributeurs canadiens plus faibles. De même, les services fournis à Simms Sigal par Anne Klein en vertu de l'Accord constituaient un appui considérable en faveur de la capacité de Simms Sigal d'atteindre un seuil raisonnable de vente au Canada. Le fait que certains des services dispensés par Anne Klein conformément à l'Accord l'ont été à l'extérieur du Canada par le fabricant des marchandises ne modifie pas cet état des choses.

Les éléments de preuve n'appuient pas la position du commissaire selon laquelle, sans l'Accord, Anne Klein devrait récupérer le coût des services à même le prix des marchandises. Le prix des marchandises a été établi séparément du coût des services, sous la forme d'une réduction en pourcentage par rapport au prix payé par les détaillants situés aux États-Unis. La réduction en pourcentage par rapport au prix de vente des mêmes marchandises aux détaillants des États-Unis a permis à Simms Sigal de réaliser sa marge bénéficiaire. Simms Sigal a produit des éléments de preuve crédibles sur la valeur des droits de distribution exclusive et des services qu'elle a obtenus; le Tribunal fait observer que M. Simms a témoigné que Simms Sigal était très satisfaite de la valeur reçue en contrepartie des frais de distribution prévus dans l'Accord. Les éléments de preuve n'indiquent pas que les frais de distribution représentaient autre chose que la valeur, pour Simms Sigal, des droits de distribution exclusive au Canada et des services.

Selon le Tribunal, l'affaire Polygram n'est pas utile au commissaire en l'espèce. Il est important de noter que, dans Polygram, le Tribunal examinait la question de savoir si la « redevance globale » était passible de droits à titre de redevance en vertu du sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi et que, par conséquent, le contexte de l'analyse du Tribunal est différent du contexte de l'espèce. En l'espèce, même si le versement de frais de distribution en contrepartie de l'utilisation du nom commercial et de la marque de commerce Anne Klein devait être considéré comme le versement de redevances ou de droits de licence, le Tribunal n'est pas convaincu qu'il s'agissait là d'une condition de la vente des marchandises pour exportation au Canada comme le prévoit le sous-alinéa 48(5)a)(iv).

En ce qui a trait à l'argument du commissaire selon lequel les frais de distribution sont passibles de droits conformément au sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi, le Tribunal est d'avis que les frais de distribution versés par Simms Sigal n'entrent pas dans la portée d'application dudit sous-alinéa, puisqu'ils s'appliquent à la valeur de toute partie du produit de toute revente par l'acheteur des marchandises, qui revient ou doit revenir, directement ou indirectement, au vendeur. Il est clair en l'espèce que, même si les frais de distribution versés à Anne Klein sont normalement calculés en fonction du chiffre d'affaires, cela ne signifie pas que le vendeur a le droit de recevoir une partie du produit de toute revente en tant que paiement des marchandises. Ce qui précède ressort clairement du fait que les frais peuvent être, et ont été, retenus lorsque Simms Sigal a estimé qu'Anne Klein ne s'était pas acquittée de ses obligations en conformité avec l'Accord. Comme il a déjà été indiqué, les éléments de preuve produits par Simms Sigal convainquent le Tribunal que la valeur des services et des droits de distribution exclusive visés par les frais de distribution se situe au-delà de la valeur d'achat des marchandises comme telles. Par conséquent, le Tribunal est d'avis que les frais de distribution sont distincts du prix payé ou à payer en paiement des marchandises et ne doivent pas être ajoutés au prix d'achat desdites marchandises conformément au sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi.

Le commissaire a présenté un argument supplémentaire selon lequel une partie des frais de distribution est passible de droits conformément à la division 48(5)a)(iii)(D) de la Loi. Toutefois, le Tribunal fait observer que, en vertu de cette division, la valeur de certaines marchandises et certains services, y compris les croquis et les travaux d'esthétique industrielle, est passible de droits sous réserve qu'ils soient « fournis directement ou indirectement par l'acheteur des marchandises, sans frais [...] lors de la production et de la vente pour exportation des marchandises importées » [soulignement ajouté]. Les éléments de preuve indiquent que Simms Sigal n'a pas fourni de croquis ni de travaux d'esthétique industrielle, sans frais ou autrement. Plutôt, Anne Klein a fourni des croquis et des travaux d'esthétique industrielle aux usines et a inclus leur valeur dans le prix des marchandises. Aucune partie des frais de distribution n'est donc passible de droits en vertu de cette division.

Par conséquent, l'appel est admis.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L'Accord prévoit certaines exceptions, de nature limitée, à l'exclusivité des droits de distribution de Simms Sigal.

3 . Agence des douanes et du revenu du Canada, « Valeur en douane : prix payé ou à payer (Loi sur les douanes, article 48) », (17 avril 2001).

4 . Polygram Inc. c. Sous-M.R.N. (7 mai 1992) (TCCE), [Polygram].