ACTIVE MARBLE & TILE LTD.

Décisions


ACTIVE MARBLE & TILE LTD.
v.
LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA
Appel no AP-2001-017


TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le jeudi 13 juin 2002

Appel no AP-2001-017

EU ÉGARD À un appel entendu le 11 février 2002 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada le 4 mai 2001 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 63(3) de l'ancienne Loi sur les douanes et du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes actuelle.

ENTRE

ACTIVE MARBLE & TILE LTD. Appelante

ET

LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est rejeté.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Michel P. Granger
Michel P. Granger
Secrétaire

 

 

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les carreaux de marbre et de granit importés par l'appelante le 21 août 1997 et le 24 juin 1998 sont correctement classés dans le numéro tarifaire 6802.91.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [...] Autres : [...] Marbre, travertin et albâtre » et le numéro tarifaire 6802.93.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [...] Autres : [...] Granit », comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 6802.21.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [...] Autres pierres de taille ou de construction et ouvrages en ces pierres, simplement taillés ou sciés et à surface plane ou unie : [...] Marbre, travertin et albâtre » et le numéro tarifaire 6802.23.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [...] Autres pierres de taille ou de construction et ouvrages en ces pierres, simplement taillés ou sciés et à surface plane ou unie : [...] Granit », comme l'a soutenu l'appelante.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Les carreaux de granit et de marbre en cause ne sont pas « simplement taillés ou sciés ». Il ressort clairement des éléments de preuve que les bords des carreaux sont taillés et sciés et font l'objet d'une autre ouvraison, de biseautage. Les carreaux en cause sont correctement classés dans les numéros tarifaires 6802.91.00 et 6802.93.00, puisqu'ils sont plus que « simplement taillés ou sciés », et ne peuvent donc pas être classés dans les numéros tarifaires 6802.21.00 et 6802.23.00.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 11 février 2002

Date de la décision :

Le 13 juin 2002

   

Membre du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

   

Conseiller pour le Tribunal :

Lynne M. Soublière

   

Greffier :

Margaret Fisher

   

Ont comparu :

Michael A. Sherbo, pour l'appelante

 

Derek Rasmussen, pour l'intimé

 

 

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes 1 à l'égard d'une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les carreaux de marbre et de granit importés par l'appelante le 21 août 1997 et le 24 juin 1998 sont correctement classés dans le numéro tarifaire 6802.91.00 de l'annexe I du Tarif des douanes 2 à titre de « Pierres de taille ou de construction [...] Autres : [...] Marbre, travertin et albâtre » et le numéro tarifaire 6802.93.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [...] Autres : [...] Granit », comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 6802.21.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [...] Autres pierres de taille ou de construction et ouvrages en ces pierres, simplement taillés ou sciés et à surface plane ou unie : [...] Marbre, travertin et albâtre » et le numéro tarifaire 6802.23.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [...] Autres pierres de taille ou de construction et ouvrages en ces pierres, simplement taillés ou sciés et à surface plane ou unie : [...] Granit », comme l'a soutenu l'appelante.

Le 27 novembre 1998, l'intimé a déterminé, aux termes du paragraphe 60(3) de l'ancienne Loi3 et du paragraphe 59(1) de la Loi actuelle, que les carreaux en cause étaient correctement classés dans les numéros tarifaires 6802.91.00 et 6802.93.00. Le 4 mai 2001, l'intimé a de nouveau déterminé, aux termes du paragraphe 63(3) de l'ancienne Loi et du paragraphe 60(4) de la Loi actuelle, que les carreaux en cause étaient correctement classés dans les numéros tarifaires 6802.91.00 et 6802.93.00. Il a été interjeté appel, auprès du Tribunal, de la décision définitive susmentionnée de l'intimé, au moyen d'un avis d'appel daté du 17 juillet 2001.

La nomenclature tarifaire pertinente prévoit ce qui suit :

68.02 Pierres de taille ou de construction (autres que l'ardoise) travaillées et ouvrages en ces pierres, à l'exclusion de ceux du no 68.01; cubes, dés et articles similaires pour mosaïques, en pierres naturelles (y compris l'ardoise), même sur support; granulés, éclats et poudres de pierres naturelles (y compris l'ardoise), colorés artificiellement.

-Autres pierres de taille ou de construction et ouvrages en ces pierres, simplement taillés ou sciés et à surface plane ou unie :

6802.21.00 --Marbre, travertin et albâtre

6802.23.00 --Granit

-Autres :

6802.91.00 --Marbre, travertin et albâtre

6802.93.00 --Granit

PREUVE

Les marchandises en cause se composent de 15 types différents de carreaux, faits de marbre ou de granit, mesurant 12 po sur 12 po, et dont une des faces est lisse et unie. Tous les carreaux en cause ont une épaisseur de 3/8 po, sauf dans le cas de deux types de carreaux de granit, dont l'épaisseur est de 1/2 po. Les carreaux susmentionnés ont été importés le 21 août 1997 et le 24 juin 1998, et l'appelante demande le reclassement de la totalité des 15 types de carreaux. Aux fins de l'audience, l'appelante a déposé trois carreaux comme pièces auprès du Tribunal, deux d'entre eux ayant été mentionnés dans la preuve orale : la pièce A-1 est un carreau de marbre et la pièce A-2 est un carreau de granit.

M. Marcel Golemme, directeur général de Active Marble & Tile Ltd., a témoigné au nom de l'appelante. Il a dit travailler dans le secteur du marbre et des carreaux depuis 1989 et que cette activité constituait une entreprise familiale depuis 1966. M. Golemme n'a pas comparu à titre de témoin expert, mais les éléments de preuve qu'il a produits ont indiqué qu'il avait une expérience considérable de ce secteur.

Selon M. Golemme, des 15 différents types de carreaux qui ont été importés, seul le type de carreaux de marbre déposé en tant que pièce A-1 faisait partie de l'expédition initialement importée au Canada. Il a précisé que les 14 autres types avaient été vendus depuis lors. L'appelante n'a plus de ces types de carreaux en stock et n'a donc pas pu obtenir d'échantillons aux fins de l'audience. M. Golemme a témoigné avoir vu les 14 différents types de carreaux de marbre et de granit importés et il a déclaré que, sauf en ce qui a trait à leur couleur ou à la formation de la pierre, le traitement et l'aspect des carreaux étaient les mêmes que ceux des carreaux déposés comme pièces auprès du Tribunal. Il a aussi témoigné que les divers carreaux de marbre importés présentaient les mêmes caractéristiques que ceux de la pièce A-1 et que les carreaux de granit importés présentaient les mêmes caractéristiques que ceux de la pièce A-2. M. Golemme a aussi expliqué que la seule différence entre les carreaux de granit était l'épaisseur de deux types de carreaux qui est de 1/2 po plutôt que l'épaisseur normale de 3/8 po, comme le montraient les factures de l'appelante déposées par l'intimé.

Dans son témoignage, M. Golemme a décrit le procédé de fabrication de carreaux. Il a expliqué que les pierres de granit et de marbre étaient extraites de la carrière et taillées en blocs de petites et de grandes dimensions. Il a ajouté que seuls les plus petits blocs sont utilisés comme matériaux dans la fabrication de carreaux et que ces petits blocs sont alors taillés en tranches légèrement plus épaisses qu'un carreau véritable. Les tranches de marbre ou de granit sont ensuite polies ou rectifiées. M. Golemme a expliqué que le procédé de rectification était semblable au procédé de polissage, mais que son résultat final est un carreau fini satin ou patiné, par opposition à l'aspect brillant des carreaux en cause. Il a précisé qu'un carreau est soit poli soit rectifié, mais pas les deux. Il a expliqué que le procédé de polissage des carreaux de marbre n'est pas le même que celui des carreaux de granit, parce que le granit est plus dense que le marbre et exige davantage du point de vue de la coupe et du polissage. M. Golemme a indiqué que, même si le granit peut exiger un traitement plus poussé, les mêmes procédés de polissage et de rectification sont appliqués à ces deux types de pierres.

Après le polissage ou la rectification, les bords des carreaux sont coupés aux dimensions (longueur et largeur) d'un carreau standard : 12 po sur 12 po. M. Golemme a précisé que les carreaux sont mesurés pour vérifier que leur dimension est effectivement de 12 po sur 12 po et non simplement une approximation de ces valeurs.

M. Golemme a ensuite expliqué que le procédé final est le biseautage, ou chanfreinage, des quatre bords du carreau. Il a expliqué que le biseautage est un procédé de meulage pour nettoyer la coupe du carreau et donner à l'arrête des quatre bords latéraux de ce dernier une formation en onglet, et en enlever ainsi le tranchant du contour. M. Golemme a déclaré que tous les carreaux en cause présentent des bords biseautés.

En réponse à une question du Tribunal sur ce qu'est un « carreau simplement taillé », M. Golemme a indiqué qu'un « carreau simplement taillé » est un carreau qui est simplement taillé en deux, sans autre ouvraison. Il a de plus précisé que, à son avis, les carreaux de marbre et de granit en cause n'avaient rien de simple et que, lorsqu'un carreau était taillé, poli, que les bords en étaient biseautés et qu'il était préparé pour une utilisation spécifique, ledit carreau n'était pas simplement taillé. En réponse à une question à savoir si le carreau de marbre déposé comme pièce A-1 était simplement taillé, M. Golemme a dit que tel n'était pas le cas. Il a aussi expliqué que l'appelante n'exécutait aucun travail sur les carreaux avant de les vendre et que les carreaux étaient vendus en l'état, sauf évidemment lorsqu'on taillait un carreau pour l'adapter à l'emplacement particulier où on voulait le poser.

En réponse à une autre question du Tribunal, M. Golemme a décrit ce que pouvait être une dalle ou plaque de marbre ou de granit grossièrement taillée. Il a expliqué qu'un bloc de marbre ou de granit était taillé en tranches, un peu comme un pain, ce qui donnait des plaques de marbre ou de granit. M. Golemme a ajouté qu'une des faces de ces plaques était ensuite polie, mais qu'aucune ouvraison n'était faite sur leurs bords, qui demeuraient en leur état original. La meilleure façon de décrire ces bords, selon M. Golemme, était de les décrire comme étant des bords grossièrement sciés.

PLAIDOIRIE

L'appelante a soutenu que les deux parties étaient d'accord que les carreaux en cause devaient être classés dans la position no 68.02. Elle a en outre soutenu qu'ils devaient être classés dans la deuxième sous-position de la position no 68.02 (« Autres pierres de taille ou de construction et ouvrages en ces pierres, simplement taillés ou sciés et à surface plane ou unie »). L'appelante a soutenu que les carreaux en cause sont simplement taillés ou sciés et que leur classement le mieux indiqué est le classement dans la sous-position susmentionnée et, plus précisément, dans les numéros tarifaires 6802.21.00 et 6802.23.00.

Dans ses observations orales, l'appelante a passé en revue les termes de la position no 68.02 et des sous-positions et a renvoyé le Tribunal aux définitions des expressions « ouvrages en ces pierres », « simplement taillés » et « travaillés ». Elle a affirmé que, puisque l'expression « à surface plane ou unie » ne soulevait pas de litige entre les parties, elle n'en traiterait pas particulièrement dans sa plaidoirie.

L'appelante a d'abord renvoyé à la définition du mot « ouvrage » (article). Elle a affirmé que le sens ordinaire du mot « article » est « un produit fini ou semi-fini qui n'est pas considéré comme une matière ou un matériel »4 . L'appelante a aussi invoqué les Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 5 de la position no 68.02, qui renvoient aux « ouvrages tels que plaques, dalles, carreaux » pour appuyer son argument selon lequel les carreaux en cause étaient des « ouvrages », comme le prescrit la deuxième sous-position de la position no 68.02.

L'appelante a ensuite expliqué ce que signifiait, à son avis, l'expression « simplement taillés » à la deuxième sous-position de la position no 68.02. Elle a invoqué le témoignage de M. Golemme et affirmé que l'opinion de ce dernier était une opinion valable dans le contexte du secteur d'activité, mais que c'était le sens de l'expression « simplement taillés », comme le prévoient les Notes explicatives, qui faisait l'objet du litige en l'espèce.

L'appelante a renvoyé à une définition de dictionnaire du mot « simplement », selon laquelle ce mot signifie « d'une manière simple et sans ornement »6 [traduction]. Selon l'appelante, une taille simple et sans ornement est celle qui donne un carreau découpé de forme carrée ou rectangulaire. L'appelante a donné des exemples de locutions similaires tirées du tarif contenant l'expression « simplement découpés de forme carrée ou rectangulaire ». Elle a renvoyé à la Note 7 des Notes explicatives du Chapitre 59 et à la Note 9 des Notes explicatives du Chapitre 40 dans laquelle un produit est décrit par l'expression « simplement découpés de forme carrée ou rectangulaire ». S'appuyant sur les renvois susmentionnés, l'appelante a soutenu que l'expression « simplement taillés » signifie découpés de forme carrée ou rectangulaire. Elle a aussi soutenu que le sens de l'expression « simplement taillés » devait être le même partout dans le Tarif des douanes. L'appelante a donc conclu que l'expression « simplement taillés » à la deuxième sous-position de la position no 68.02 devait aussi signifier « simplement découpés de forme carrée ou rectangulaire ». Elle a aussi soutenu que les procédés du type polissage ou biseautage n'étaient pas pertinents dans la définition d'un carreau simplement taillé.

L'appelante a affirmé que le mot « travaillées » dans le libellé de la position no 68.02 indique un produit qui a été poli et que, si le produit n'a pas été « travaillé », il serait classé dans le Chapitre 25. L'appelante a aussi soutenu que le carreau devait avoir été « travaillé » et donc poli pour être classé dans la position no 68.02. À l'appui de son argument, l'appelante a renvoyé à la décision du Tribunal dans Importation/Exportation Y&Y c. S-MRNDA 7 , une affaire dans laquelle les marchandises en question étaient des plaques de marbre rectangulaires mesurant 5 pi sur 7 pi sur 3/4 po qui avaient été polies et au sujet desquelles le Tribunal a statué qu'elles devaient être classées dans le numéro tarifaire 6802.21.00. L'appelante a établi une distinction entre les marchandises en question dans Y&Y et les marchandises en cause. Elle a précisé que, dans les deux cas susmentionnés, il s'agissait des marchandises découpées de forme carrée ou rectangulaire et polies, mais que seules les marchandises en cause présentent des bords biseautés. Elle a aussi fait mention de la décision de l'administration douanière des États-Unis8 dans laquelle des plaques de marbre ont été classées à titre de plaques et non de carreaux du fait que lesdites plaques n'avaient pas fait l'objet d'autre ouvraison, comme le biseautage. Elle a soutenu que cette décision de l'administration douanière des États-Unis ne s'appliquait pas au Canada et qu'elle contredisait la décision du Tribunal dans Y&Y.

L'intimé a soutenu que l'appelante doit assumer le fardeau de la preuve que la détermination de classement de l'intimé est erronée. Il a invoqué la décision du Tribunal dans Unicare Medical Products c. S-MRNDA 9 , dans laquelle les appels ont été rejetés au motif que l'appelante ne s'est pas acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombait. L'intimé a aussi soutenu que l'appelante doit s'acquitter de ce fardeau en soumettant au Tribunal les éléments de preuve requis pour montrer que le classement des marchandises en cause était erroné. Il a renvoyé à la déclaration de M. Golemme selon laquelle ce dernier n'était pas d'avis que les carreaux déposés comme pièces étaient simplement taillés et a soutenu que, d'après les éléments de preuve, les carreaux en cause ne pouvaient donc pas être classés comme l'a soutenu l'appelante. L'intimé a aussi traité de la décision que le Tribunal a rendue dans Loan To Tran c. S-MRNDA 10 , où l'appel a été rejeté au motif que l'appelante n'avait pas déposé auprès du Tribunal un exemple des marchandises en question et où le Tribunal a statué que les éléments de preuve produits étaient insuffisants.

L'intimé a soutenu que les carreaux en cause sont correctement classés dans la deuxième sous-position de la position no 68.02. Il a soutenu que les carreaux doivent être classés dans cette sous-position parce qu'ils ne sont pas simplement taillés ou sciés, étant donné qu'ils sont découpés à une dimension très précise, que leurs bords sont biseautés, qu'il sont polis, et qu'ils sont taillés ou sciés pour donner un produit final précis, prêt à la vente. L'intimé a établi une distinction entre les carreaux en cause, qui sont taillés ou sciés pour donner des produits finals précis, et les plaques de marbre et de granit dans Y&Y, qui étaient simplement ou grossièrement sciés, et dont une des surfaces planes était polie. Il a invoqué la déclaration du Tribunal dans Y&Y selon laquelle « [s]i les marchandises avaient été importées après avoir été taillées aux fins des différentes utilisations susmentionnées, le Tribunal n'aurait pas eu de difficulté à les classer dans le numéro tarifaire 6802.91.00, car elles n'auraient pas simplement été taillées ou sciées, mais, plutôt, taillées ou sciées en produits finis précis »11 . L'intimé a en outre renvoyé au témoignage de M. Golemme selon lequel il était très important que le carreau soit taillé aux dimensions exactes. L'intimé a ajouté que M. Golemme avait expliqué que tous les carreaux présentent des bords biseautés, que le biseautage est une étape de finition et que l'appelante ne procédait à aucune autre ouvraison sur les carreaux avant leur vente aux clients. Il a soutenu que les éléments de preuve produits par M. Golemme corroborent donc son affirmation selon laquelle le biseautage des bords est une opération qui donne plus que des carreaux « simplement taillés ou sciés ». Puisque les carreaux sont taillés ou sciés en produits finis précis et qu'ils sont prêts à la vente, ils ne peuvent être classés à titre de carreaux « simplement taillés ou sciés ».

L'intimé a aussi renvoyé à la décision de l'administration douanière des États-Unis dont l'appelante a fait mention. Tout en reconnaissant que le Tribunal n'est pas lié par cette décision, il a soutenu que ladite décision éclairait toutefois la question, étant donné qu'elle avait abordé la question du biseautage des carreaux.

En réponse à l'argument de l'appelante selon lequel l'expression « simplement taillés » signifiait découpés de forme carrée ou rectangulaire, l'intimé a soutenu que la forme carrée ou rectangulaire des carreaux n'est pas un critère déterminant dans la question de savoir s'ils sont « simplement taillés ou sciés ». Selon l'intimé, le critère déterminant est le fait que les carreaux sont des produits finis, prêts à la vente, et qu'ils sont expressément taillés à des dimensions déterminées de 12 po sur 12 po et biseautés au moment de leur importation.

DÉCISION

L'article 10 du Tarif des douanes prévoit que le classement de marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué en conformité avec les Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé 12 . L'article 11 prévoit notamment que, pour l'interprétation des positions et des sous-positions, il est tenu compte des Notes explicatives.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les carreaux de marbre et de granit importés par l'appelante sont correctement classés dans le numéro tarifaire 6802.91.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [. . .] Autres [. . .] Marbre, travertin et albâtre » et dans le numéro tarifaire 6802.93.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [. . .] Autres [. . .] Granit », comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 6802.21.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [. . .] Autres pierres de taille ou de construction et ouvrages en ces pierres, simplement taillés ou sciés et à surface plane ou unie [. . .] Marbre, travertin et albâtre » et dans le numéro tarifaire 6802.23.00 à titre de « Pierres de taille ou de construction [. . .] Autres pierres de taille ou de construction et ouvrages en ces pierres, simplement taillés ou sciés et à surface plane ou unie [. . .] Granit », comme l'a soutenu l'appelante. Pour déterminer le classement des carreaux en cause, le Tribunal doit décider s'ils sont « simplement taillés ou sciés ».

Dans le cadre de l'audience, les carreaux de marbre et de granit déposés comme pièces ont soulevé une discussion entre les parties, étant donné que seuls les carreaux de marbre déposés à titre de pièce A-1 faisaient partie de l'expédition originale importée au Canada et font l'objet du présent appel. Toutefois, le Tribunal accepte le témoignage de M. Golemme selon lequel ce dernier a personnellement vu tous les 15 types de carreaux et les caractéristiques physiques et les techniques de traitement desdits carreaux sont les mêmes que celles qui se rapportent aux carreaux de marbre et de granit déposés auprès du Tribunal comme pièces A-1 et A-2.

La sous-position proposée par l'appelante renvoie à deux procédés distincts d'ouvraison d'un carreau : en premier lieu, le travail fait sur les bords taillés des carreaux (« simplement taillés ou sciés »), qui, en l'espèce, est le biseautage, et, en deuxième lieu, le travail fait sur les faces des carreaux (« surface plane ou unie »), comme le polissage ou la rectification. En l'espèce, le litige ne porte pas sur l'effet que peut avoir sur le classement tarifaire le travail effectué sur la surface du carreau. La seule question en litige consiste à déterminer si le travail effectué sur les bords taillés des carreaux en fait des carreaux « simplement taillés ou sciés ». Étant donné que la position no 68.02 et sa deuxième sous-position ne comportent pas d'éléments qui pourraient guider l'interprétation de l'expression « simplement taillés ou sciés », le Tribunal doit s'appuyer sur d'autres sources pour éclairer sa décision.

Le Tribunal a pris en considération les locutions similaires tirées du Tarif des douanes, produites par l'appelante à titre d'exemples, mais n'a pas jugé qu'elles étaient utiles, étant donné que ces locutions ont servi dans des contextes très différents du contexte propre à la position no 68.02. L'argument de l'appelante selon lequel l'expression « simplement taillés ou sciés » signifie découpés de forme carrée ou rectangulaire n'a pas non plus convaincu le Tribunal.

Le Tribunal accueille l'opinion de M. Golemme selon laquelle, du point de vue du secteur d'activité et d'après son expérience dans ledit secteur, les carreaux ne sont pas « simplement taillés ou sciés » s'ils ont fait l'objet d'une autre ouvraison après avoir été taillés et selon laquelle le biseautage est un type d'autre ouvraison. À la lumière d'une telle opinion, les carreaux en cause ne sont pas « simplement taillés ou sciés » étant donné que, après avoir été taillés, ils ont fait l'objet d'une autre ouvraison lorsqu'ils ont été biseautés. Le Tribunal fait observer que le point de vue de M. Golemme n'a pas été réfuté par d'autres éléments de preuve. En outre, une telle conclusion est compatible avec le sens ordinaire du mot « simply » (simplement), que donne le dictionnaire, à savoir « d'une manière ordinaire et sans ornements » [traduction].

La conclusion susmentionnée est également conforme au point de vue exprimé par le Tribunal dans Y&Y. Ainsi que l'a fait observer l'appelante, Y&Y traitait de la question de savoir si le polissage des plaques de pierre les rendrait inadmissibles au classement dans la deuxième sous-position de la position no 68.02. Dans cette affaire, le Tribunal a conclu que, si le travail effectué sur une des faces du carreau était du polissage, les plaques pouvaient quand même être classées dans la deuxième sous-position de la position no 68.02. Il convient aussi de prendre note que le Tribunal n'a pas commenté l'effet du biseautage sur le classement tarifaire dans Y&Y. De fait, dans le cadre du présent appel, M. Golemme a indiqué que, d'après la description des marchandises en question dans Y&Y, il semble que les plaques n'avaient pas fait l'objet d'un biseautage.

Le Tribunal a aussi fait une observation incidente dans Y&Y selon laquelle le classement dans le numéro tarifaire 6802.91.00 aurait été le classement indiqué si les pierres avaient été taillées ou sciées en produits finis précis. Le Tribunal n'est pas d'accord sur l'observation de l'intimé selon laquelle Y&Y a établi, à titre de critère complet, l'expression « taillées ou sciées en produits finis précis », aux fins de la détermination de la question de savoir si un carreau était classé dans la deuxième sous-position de la position no 68.02 sous l'angle de son caractère « simplement taillé ou scié ». Le Tribunal n'a pas examiné ce qui constituerait un critère complet à cette fin; il a simplement commenté l'effet, sur le classement tarifaire, de la prochaine étape vraisemblable dans le traitement de la pierre précise en question. Le Tribunal a alors simplement indiqué que, si ce type de pierre avait été taillé en un produit fini précis, cela aurait signifié qu'elle ne pouvait être classée dans la deuxième sous-position de la position no 68.02.

Bien que l'intimé et l'appelante aient tous deux invoqué la décision de l'administration douanière des États-Unis dans leurs observations orales, le Tribunal ne s'appuie pas sur ladite décision, étant donné qu'il n'y est pas lié.

Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal est d'avis que les carreaux en cause sont correctement classés dans les numéros tarifaires 6802.91.00 et 6802.93.00. Par conséquent, l'appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [ci-après Loi].

2 . L.R.C. 1985 (3e supp.), c. 41.

3 . La Loi a été modifiée en 1998; toutefois, les modifications n'ont pas eu d'incidence sur les numéros tarifaires en cause.

4 . Avis des douanes N-278, « Politique administrative Numéro tarifaire 9948.00.00 », ministère du Revenu national, 27 avril 1999 à la p. 2.

5 . Conseil de coopération douanière, 2éd., Bruxelles, 1996 [ci-après Notes explicatives].

6 . American Heritage Dictionary, 3éd., s.v. « simply » (simplement).

7 . (12 septembre 1991), AP-90-081 (TCCE) [ci-après Y&Y].

8 . (17 septembre 1992), HQ 951047 (USCS).

9 . (21 juin 1990), 2437, 2438, 2485, 2591, 2582 (TCCE).

10 . (7 août 1990), 2885 (TCCE).

11 . Supra, note 7 à la p. 3.

12 . Supra, note 2, annexe I.