ANTO BOZIC

Décisions


ANTO BOZIC
v.
LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA
Appel no AP-2001-089


TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 29 octobre 2002

Appel no AP-2001-089

EU ÉGARD À un appel entendu le 16 septembre 2002 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada le 21 novembre 2001 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

ANTO BOZIC Appelant

ET

LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est rejeté.



Zdenek Kvarda

Zdenek Kvarda
Membre présidant


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire

 

 

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si un couteau à lame automatique est correctement classé à titre d'arme prohibée dans le numéro tarifaire 9898.00.00 et, en tant que tel, s'il est interdit de l'importer au Canada aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel et du paragraphe 136(1) du Tarif des douanes.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Un couteau à lame automatique est correctement classé à titre d'arme prohibée dans le numéro tarifaire 9898.00.00 et, en tant que tel, il est interdit de l'importer aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel et du paragraphe 136(1) du Tarif des douanes.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 16 septembre 2002

Date de la décision :

Le 29 octobre 2002

   

Membre du Tribunal :

Zdenek Kvarda, membre présidant

   

Conseiller pour le Tribunal :

Lynne M. Soublière

   

Greffier :

Anne Turcotte

   

Ont comparu :

Marko Bozic, pour l'appelant

 

John Unrau, pour l'intimé

 

 

MOTIFS DE LA DÉCISION

INTRODUCTION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes 1 à l'égard d'une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si un couteau à lame automatique (le couteau en cause) est correctement classé à titre d'arme prohibée dans le numéro tarifaire 9898.00.00 de l'annexe du Tarif des douanes 2 et, en tant que tel, s'il est interdit de l'importer aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel 3 et du paragraphe 136(1) du Tarif des douanes.

Le 14 juillet 2001, l'intimé a retenu le couteau en cause au moment où l'appelant est entré au Canada. Le 18 août 2001, l'intimé a avisé l'appelant que le couteau en cause était une arme prohibée et que son importation au Canada était interdite aux termes du Tarif des douanes. L'appelant a interjeté appel de cette décision. Le 21 novembre 2001, l'intimé a déterminé, aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi, que le couteau en cause était correctement classé à titre d'arme prohibée dans le numéro tarifaire 9898.00.00. La décision de l'intimé a été portée en appel devant le Tribunal le 20 février 2002.

La nomenclature tarifaire pertinente prévoit ce qui suit :

9898.00.00 Armes à feu, armes prohibées, armes à autorisation restreinte, dispositifs prohibés, munitions prohibées et éléments ou pièces conçus exclusivement pour être utilisés dans la fabrication ou l'assemblage d'armes automatiques, désignés comme « marchandises prohibées » au présent numéro tarifaire, sauf :

a) les marchandises prohibées importées :

(i) soit par un fonctionnaire public dans le cadre de ses fonctions,

(ii) soit par un particulier pour le compte et sous les ordres d'une force policière, des Forces canadiennes, des forces étrangères présentes au Canada ou d'un ministère fédéral ou provincial;

b) les marchandises prohibées importées par une entreprise titulaire d'un permis l'autorisant à acquérir et à posséder de telles marchandises, ou les marchandises prohibées expédiées en transit à travers le Canada par une entreprise qui n'exerce pas d'activités au Canada;

c) les marchandises prohibées ou catégories de marchandises prohibées qui, conformément aux règlements pris par le gouverneur en conseil, sont exemptées des dispositions du présent numéro tarifaire;

d) les armes qui, conformément au paragraphe 84(3) du Code criminel, sont réputées ne pas être des armes à feu;

e) les armes à feu, autres que les armes à feu à autorisation restreinte et les armes à feu prohibées, importées :

(i) soit par un non-résident,

(ii) soit par un particulier qui est titulaire d'un permis d'acquisition et de possession d'une telle arme, qui est résident canadien et qui a acquis une telle arme à l'étranger,

(iii) soit par un particulier qui est résident canadien et qui n'a pas acquis une telle arme à l'étranger;

f) les armes à feu à autorisation restreinte importées :

(i) soit par un non-résident qui est titulaire d'une autorisation de transport,

(ii) soit par un particulier qui est titulaire d'un permis d'acquisition et de possession d'une telle arme et d'une autorisation de transport, qui est résident canadien et qui a acquis une telle arme à l'étranger,

(iii) soit par un particulier qui est résident canadien, qui est titulaire d'une autorisation de transport et qui n'a pas acquis une telle arme à l'étranger;

g) les armes à feu prohibées importées par un particulier qui est résident canadien, qui est titulaire d'une autorisation de transport et qui n'a pas acquis une telle arme à l'étranger;

h) les armes, les munitions, le matériel ou les armements de guerre, les fournitures de l'armée, de la marine ou de l'aviation, ni tout ce qui est susceptible d'être transformé en de tels articles ou peut servir à leur fabrication, importés sous le couvert d'un permis délivré en vertu de l'article 8 de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation;

i) les armes, les fournitures militaires, les munitions de guerre ou les autres biens admissibles d'après les nos tarifaires 9810.00.00 ou 9811.00.00;

j) les armes, les fournitures militaires, les munitions de guerre ou toute catégorie de ces articles, exemptés des dispositions du présent numéro tarifaire conformément aux règlements pris par le gouverneur en conseil.

Pour l'application du présent numéro tarifaire :

a) « arme » et « arme à feu » s'entendent au sens de l'article 2 du Code criminel;

b) « arme à autorisation restreinte », « arme à feu à autorisation restreinte », « arme à feu prohibée », « arme automatique », « arme prohibée », « dispositif prohibé », « munitions prohibées » et « permis » s'entendent au sens du paragraphe 84(1) du Code criminel.

c) « fonctionnaire public » s'entend au sens du paragraphe 117.07(2) du Code criminel;

d) « autorisation de transport », « entreprise », « non-résident » et « transporteur » s'entendent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les armes à feu;

e) « forces étrangères présentes au Canada » s'entend au sens de l'article 2 de la Loi sur les forces étrangères au Canada.

Le paragraphe 84(1) du Code criminel se lit notamment ainsi :

84. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie et aux paragraphes 491(1), 515(4.1) et (4.11) et 810(3.1) et (3.11).

« arme prohibée »

a) Couteau dont la lame s'ouvre automatiquement par gravité ou force centrifuge ou par pression manuelle sur un bouton, un ressort ou autre dispositif incorporé ou attaché au manche; b) toute arme -- qui n'est pas une arme à feu -- désignée comme telle par règlement.

L'article 136 du Tarif des douanes se lit ainsi :

136. (1) L'importation des marchandises des nos tarifaires 9897.00.00, 9898.00.00 ou 9899.00.00 est interdite.

(2) Le paragraphe 10(1) ne s'applique pas aux marchandises visées au paragraphe (1).

PREUVE

Mme Rosemary Copeland-Jones, de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, a prêté serment à titre de témoin et a déposé le couteau en cause comme pièce4 . Elle a démontré au Tribunal comment le couteau en cause fonctionnait et, plus précisément, comment la lame s'ouvrait lorsqu'une pression était exercée sur le bouton qui se trouve sur le manche du couteau. Elle a aussi démontré comment fermer la lame en la dégageant de sa position de blocage.

ARGUMENTATION

L'appelant n'a pas demandé que le couteau en cause soit classé dans un autre numéro tarifaire; il a demandé plutôt que le couteau lui soit retourné.

L'appelant a soutenu qu'il n'avait jamais eu de casier judiciaire et qu'il avait toujours été un membre actif au sein de la communauté et de sa paroisse. En outre, il a soutenu qu'il se servait du couteau en cause pour ouvrir des enveloppes ou les attaches qu'il utilisait pour tirer les fermetures à glissière de ses valises. L'appelant a expliqué qu'il voulait ravoir le couteau en cause pour des raisons sentimentales. Il a expliqué que ledit couteau appartenait à son oncle qui habitait en Bosnie et que ce dernier le lui avait donné en 1991.

L'appelant a déclaré que le couteau en cause avait été confisqué par les autorités aéroportuaires à Vienne. Il a expliqué qu'il revenait de vacances estivales en Croatie. L'appelant a affirmé que les autorités aéroportuaires à Vienne lui avaient dit que le couteau en cause lui serait retourné à son arrivée à Toronto (Ontario). En outre, il a soutenu que, à son arrivée à Toronto, le couteau en cause ne lui avait pas été retourné.

En réponse à l'argument de l'intimé, l'appelant a convenu que l'importation du couteau en cause était illégale et allait à l'encontre du Code criminel. Cependant, il a soutenu qu'il ne savait pas cela au moment où il a introduit le couteau en cause au Canada, ni ne savait-il que ledit couteau était une arme prohibée. Il a en outre expliqué qu'il transportait le couteau en cause aux seules fins mentionnées ci-dessus.

En conclusion, l'appelant a affirmé qu'il n'avait pas l'intention d'utiliser le couteau en cause pour d'autres fins que celles mentionnées ci-dessus.

L'intimé a soutenu que le couteau en cause est correctement classé dans le numéro tarifaire 9898.00.00. Selon l'intimé, ledit couteau doit être classé dans ce numéro tarifaire parce qu'il entre dans la portée de la définition d'une arme prohibée au sens du Code criminel. Il a fait référence à l'alinéa 84(1)a) du Code criminel, qui donne la définition d'une arme prohibée. Il a fait ressortir la partie de la définition qui dit qu'une arme prohibée s'entend, notamment, d'un couteau dont la lame s'ouvre automatiquement « par pression manuelle sur un bouton, un ressort ou un autre dispositif incorporé ou attaché au manche ».

Selon l'intimé, dès que des marchandises entrent dans la portée de la définition d'« arme prohibée », aucune autre enquête n'est requise aux fins de classement. Il a prétendu que, dès qu'il est satisfait à cette exigence, le paragraphe 136(1) du Tarif des douanes s'applique et interdit l'importation de marchandises du numéro tarifaire 9898.00.00.

L'intimé a terminé son argumentation en soutenant que, étant donné que le couteau en cause est visé à l'article 84 du Code criminel, il ne peut être importé. Selon l'intimé, l'appel doit donc être rejeté.

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'article 10 du Tarif des douanes prévoit que le classement de marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué en conformité avec les Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé 5 .

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si le couteau en cause est correctement classé à titre d'arme prohibée dans le numéro tarifaire 9898.00.00 et, en tant que tel, s'il est interdit de l'importer aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel et du paragraphe 136(1) du Tarif des douanes.

L'appelant n'a pas demandé que le couteau en cause soit classé dans un autre numéro tarifaire; il a demandé plutôt que le couteau lui soit retourné. L'intimé, de son côté, a prétendu que le couteau en cause était correctement classé dans le numéro tarifaire 9898.00.00.

Le Tribunal estime que le couteau en cause est correctement classé dans le numéro tarifaire 9898.00.00. Il évoque la démonstration selon laquelle le couteau en cause est muni d'une lame qui s'ouvre automatiquement lorsqu'une pression manuelle est exercée sur le bouton qui se trouve sur le manche du couteau. De ce fait, le Tribunal estime que le couteau en cause entre dans la portée de la définition d'« arme prohibée », aux termes de l'alinéa 84(1)a) du Code criminel. Par conséquent, le Tribunal s'entend avec l'intimé pour dire que le couteau en cause est une arme prohibée, selon la définition du Code criminel.

En outre, selon le Tribunal, dès que des marchandises sont considérées comme des armes prohibées au sens du Code criminel, elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9898.00.00, qui vise de telles marchandises. En outre, aux termes du paragraphe 136(1) du Tarif des douanes, l'importation de marchandises du numéro tarifaire 9898.00.00 est interdite au Canada. Par conséquent, étant donné que le couteau en cause ne peut être classé que dans le numéro tarifaire 9898.00.00 et en conformité avec le paragraphe 136(1) du Tarif des douanes, le couteau en cause est une arme prohibée qui ne peut être importée au Canada.

Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal est d'avis que le couteau en cause est correctement classé à titre d'arme prohibée dans le numéro tarifaire 9898.00.00 et que, en tant que tel, il est interdit de l'importer au Canada aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel et du paragraphe 136(1) du Tarif des douanes. L'appel est donc rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [ci-après Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . L.R.C. 1985, c. C-46.

4 . Pièce B-1.

5 . Supra note 2, annexe.