ROBERT KOY

Décisions


ROBERT KOY
c.
COMMISSAIRE DE L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA
Appel no AP-2002-014

Décision et motifs rendus
le mercredi 12 juillet 2006


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 6 juin 2006 aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada le 26 avril 2002 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

 

ROBERT KOY

Appelant

ET

 

LE COMMISSAIRE DE L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre présidant

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 7 juin 2006

   

Membre du Tribunal :

Zdenek Kvarda, membre présidant

   

Gestionnaire de la recherche :

Paul R. Berlinguette

   

Conseiller pour le Tribunal :

Eric Wildhaber

   

Agent du greffe :

Stéphanie Doré

   

Parties :

Robert Koy, pour l’appelant

 

Michael Roach et John Unrau, pour l’intimé

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Le présent appel est interjeté aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard d’une décision du commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) (maintenant le président de l’Agence des services frontaliers du Canada [ASFC]) le 26 avril 2002 aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l’ADRC a correctement classé le pistolet en cause dans le numéro tarifaire 9898.00.00 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre de dispositif prohibé. Le pistolet en cause est un pistolet airsoft, modèle Samurai Edge Kai C/S.E.-03 Barry Burton, fabriqué par Tokyo Marui, du Japon.

3. Le Tribunal a décidé de tenir une audience sur pièces en vertu des articles 25 et 25.1 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 . Un avis à cet effet a été publié dans la Gazette du Canada du 20 mai 20064 .

4. Le paragraphe 136(1) du Tarif des douanes prévoit ce qui suit :

The importation of goods of tariff item No. 9897.00.00, 9898.00.00 or 9899.00.00 is prohibited.

L’importation des marchandises des nos tarifaires 9897.00.00, 9898.00.00 ou 9899.00.00 est interdite.

5. Le numéro tarifaire 9898.00.00 prévoit ce qui suit :

Armes à feu, armes prohibées, armes à autorisation restreinte, dispositifs prohibés, munitions prohibées et éléments ou pièces conçus exclusivement pour être utilisés dans la fabrication ou l’assemblage d’armes automatiques, désignés comme « marchandises prohibées » au présent numéro tarifaire, [...]

[...]

Pour l’application du présent numéro tarifaire :

b) « arme à autorisation restreinte », « arme à feu à autorisation restreinte », « arme à feu prohibée », « arme automatique », « arme prohibée », « dispositif prohibé », « munitions prohibées » et « permis » s’entendent au sens du paragraphe 84(1) du Code criminel [...]

6. Le paragraphe 84(1) du Code criminel 5 prévoit qu’un « dispositif prohibé » comprend, entre autres, une réplique, laquelle est définie ainsi :

“replica firearm” means any device that is designed or intended to exactly resemble, or to resemble with near precision, a firearm, and that itself is not a firearm, but does not include any such device that is designed or intended to exactly resemble, or to resemble with near precision, an antique firearm.

« réplique » Tout objet, qui n’est pas une arme à feu, conçu de façon à en avoir l’apparence exacte — ou à la reproduire le plus fidèlement possible — ou auquel on a voulu donner cette apparence. La présente définition exclut tout objet conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu historique — ou à la reproduire le plus fidèlement possible — ou auquel on a voulu donner cette apparence.

7. L’article 2 du Code criminel définit « arme à feu » ainsi :

“firearm” means a barrelled weapon from which any shot, bullet or other projectile can be discharged and that is capable of causing serious bodily injury or death to a person, and includes any frame or receiver of such a barrelled weapon and anything that can be adapted for use as a firearm.

« arme à feu » Toute arme susceptible, grâce à un canon qui permet de tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile, d’infliger des lésions corporelles graves ou la mort à une personne, y compris une carcasse ou une boîte de culasse d’une telle arme ainsi que toute chose pouvant être modifiée pour être utilisée comme telle.

8. Le paragraphe 84(1) du Code criminel définit « arme à feu historique » ainsi :

“antique firearm” means

(a) any firearm manufactured before 1898 that was not designed to discharge rim-fire or centre-fire ammunition and that has not been redesigned to discharge such ammunition, or

(b) any firearm that is prescribed to be an antique firearm.

« arme à feu historique » Toute arme à feu fabriquée avant 1898 qui n’a pas été conçue ni modifiée pour l’utilisation de munitions à percussion annulaire ou centrale ou toute arme à feu désignée comme telle par règlement.

PREUVE

9. M. Robert Koy a tenté d’importer le pistolet en cause par la poste. Il s’agit d’un pistolet semi-automatique à gaz, grandeur nature, doté d’une rallonge de chargeur et d’un compensateur de bouche, qui tire des balles BB en plastique. Il est également doté d’un rail de montage sous le canon.

10. L’ASFC a déposé le pistolet en cause à titre d’objet déposé comme pièce, et le Tribunal l’a examiné. Le Tribunal a aussi examiné l’arme à feu réelle dont le pistolet en cause est censé avoir l’apparence, que l’ASFC a fournie à titre d’objet déposé comme pièce.

11. L’ASFC a déposé un rapport d’expert préparé par M. Kramer D. Powley du Service des laboratoires judiciaires de la Gendarmerie royale du Canada. Les titres et qualités de M. Powley en tant qu’expert en matière d’armes n’ont pas été contestés par M. Koy. Le Tribunal a reconnu à M. Powley le titre d’expert en matière d’armes prohibées.

PLAIDOIRIE

12. M. Koy a soutenu que le pistolet en cause n’est pas une réplique car il n’a pas l’apparence d’une arme à feu réelle originale quelconque (p. ex. le pistolet Colt 45 ou le pistolet militaire Beretta M9), mais est plutôt un pistolet airsoft original vendu en quantité très limitée. D’après M. Koy, il n’est donc pas interdit de l’importer au Canada. M. Koy a de plus prétendu qu’il n’est pas illégal d’importer au Canada des pistolets airsoft ou des répliques d’armes historiques.

13. L’ASFC a soutenu que le pistolet en cause est une réplique, puisqu’il est conçu de façon à reproduire le plus fidèlement possible l’apparence d’une arme à feu véritable, à savoir un pistolet semi-automatique de la série Beretta M9. Elle a soutenu que le pistolet en cause n’est pas une arme à feu ni une réplique d’une arme à feu historique.

DÉCISION

14. Pour décider si le pistolet en cause est correctement classé dans le numéro tarifaire 9898.00.00, le Tribunal doit déterminer s’il satisfait à la définition de « réplique » aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel. Pour que le pistolet en cause satisfasse à cette définition, il doit remplir trois conditions : 1) il doit être un objet conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auquel on a voulu donner cette apparence; 2) il ne doit pas être une arme à feu; 3) il ne doit pas être un objet conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu historique, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auquel on a voulu donner cette apparence.

15. L’ASFC a soutenu que, même si l’apparence du pistolet en cause est inspirée d’un modèle de pistolet utilisé par un personnage d’une série de fiction, l’arme à feu comme telle s’inspire des pistolets semi-automatiques de la série Beretta M9. À l’appui de sa position, elle a renvoyé à la publicité du fabricant, qui fait valoir les similitudes inhérentes entre le pistolet en cause et le pistolet militaire Beretta M92F. Selon l’examen du pistolet en cause et de l’arme à feu réelle originale dont son apparence est inspirée, effectué par le Tribunal, ledit pistolet est une reproduction fidèle des points de vue de la taille, de la forme et de l’apparence générale. De plus, le Tribunal fait observer que, dans son rapport, M. Powley indiquait que le pistolet airsoft est un dispositif conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu, ou à la reproduire le plus fidèlement possible. Le Tribunal est donc convaincu que le pistolet en cause satisfait à la première condition de la définition de « réplique », à savoir qu’il s’agit d’un objet conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auquel on a voulu donner cette apparence.

16. L’ASFC a soutenu que le pistolet en cause n’est pas une arme susceptible, grâce à un canon, de tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile et d’infliger des lésions corporelles graves ou la mort à une personne. À cet égard, le relevé détaillé de rajustement délivré par l’ADRC indiquait que la vitesse initiale du projectile tiré par le pistolet en cause est inférieure au seuil requis pour qu’il soit réputé être une arme à feu. Dans son rapport, M. Powley concluait également que le pistolet en cause n’est pas une arme à feu. Le Tribunal fait observer que M. Koy n’a pas contesté ce fait. À la lumière de la définition de l’expression « arme à feu » qui se trouve à l’article 2 du Code criminel, le Tribunal est convaincu que le pistolet en cause satisfait à la deuxième condition de la définition de « réplique », à savoir qu’il n’est pas une arme à feu.

17. L’ASFC a soutenu que les pistolets semi-automatiques de la série Beretta M9 ne sont pas réputés être des armes à feu historiques, car ils n’ont pas été fabriqués avant 1898, l’année avant laquelle une arme à feu doit avoir été fabriquée pour être réputée être une « arme à feu historique » au sens du Code criminel. Par conséquent, le pistolet en cause n’est pas un objet conçu de façon à avoir l’apparence d’une arme à feu historique, ou auquel on a voulu donner cette apparence; il est donc satisfait à la troisième condition de la définition de « réplique », à savoir que le pistolet en cause n’a pas été conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu historique, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auquel on a voulu donner cette apparence.

18. Par conséquent, le pistolet en cause satisfait aux trois conditions requises pour se conformer à la définition de « réplique » aux termes du Code criminel. Étant donné que le Code criminel prévoit qu’une « réplique » est un « dispositif prohibé », le Tribunal conclut que le pistolet en cause est correctement classé dans le numéro tarifaire 9898.00.00 et, à ce titre, son importation au Canada est interdite aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel et du paragraphe 136(1) du Tarif des douanes.

19. Pour les raisons qui précèdent, l’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . D.O.R.S./91-499.

4 . Gaz. C. 2006.I.1231.

5 . L.R.C. 1985, c. C-46.