BILL RAMPTON

Décisions


BILL RAMPTON
c.
COMMISSAIRE DE L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA
Appel no AP-2002-003

Décision et motifs rendus
le mercredi 12 juillet 2006


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 7 juin 2006 aux termes vertu du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada le 21 février 2002 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

 

BILL RAMPTON

Appelant

ET

 

LE COMMISSAIRE DE L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre présidant

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 7 juin 2006

   

Membre du Tribunal :

Zdenek Kvarda, membre présidant

   

Gestionnaire de la recherche :

Paul R. Berlinguette

   

Conseiller pour le Tribunal :

Eric Wildhaber

   

Agent du greffe :

Stéphanie Doré

   

Parties :

Bill Rampton, pour l’appelant

 

Lynn Marchildon, pour l’intimé

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Le présent appel est interjeté aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard d’une décision du commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) (maintenant le président de l’Agence des services frontaliers du Canada [ASFC]) le 21 février 2002 aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l’ADRC a correctement classé les revolvers en cause dans le numéro tarifaire 9898.00.00 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre dispositifs prohibés. Les revolvers en cause sont deux revolvers à six coups « western » identiques.

3. Le Tribunal a décidé de tenir une audience sur pièces en vertu des articles 25 et 25.1 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 . Un avis à cet effet a été publié dans la Gazette du Canada du 20 mai 20064 .

4. Le paragraphe 136(1) du Tarif des douanes prévoit ce qui suit :

The importation of goods of tariff item No. 9897.00.00, 9898.00.00 or 9899.00.00 is prohibited.

L’importation des marchandises des nos tarifaires 9897.00.00, 9898.00.00 ou 9899.00.00 est interdite.

5. Le numéro tarifaire 9898.00.00 prévoit ce qui suit :

Armes à feu, armes prohibées, armes à autorisation restreinte, dispositifs prohibés, munitions prohibées et éléments ou pièces conçus exclusivement pour être utilisés dans la fabrication ou l’assemblage d’armes automatiques, désignés comme « marchandises prohibées » au présent numéro tarifaire, [...]

[...]

Pour l’application du présent numéro tarifaire :

b) « arme à autorisation restreinte », « arme à feu à autorisation restreinte », « arme à feu prohibée », « arme automatique », « arme prohibée », « dispositif prohibé », « munitions prohibées » et « permis » s’entendent au sens du paragraphe 84(1) du Code criminel [...]

6. Le paragraphe 84(1) du Code criminel 5 prévoit qu’un « dispositif prohibé » comprend, entre autres, une réplique, laquelle est définie ainsi :

“replica firearm” means any device that is designed or intended to exactly resemble, or to resemble with near precision, a firearm, and that itself is not a firearm, but does not include any such device that is designed or intended to exactly resemble, or to resemble with near precision, an antique firearm.

« réplique » Tout objet, qui n’est pas une arme à feu, conçu de façon à en avoir l’apparence exacte — ou à la reproduire le plus fidèlement possible — ou auquel on a voulu donner cette apparence. La présente définition exclut tout objet conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu historique — ou à la reproduire le plus fidèlement possible — ou auquel on a voulu donner cette apparence.

7. L’article 2 du Code criminel définit « arme à feu » ainsi :

“firearm” means a barrelled weapon from which any shot, bullet or other projectile can be discharged and that is capable of causing serious bodily injury or death to a person, and includes any frame or receiver of such a barrelled weapon and anything that can be adapted for use as a firearm.

« arme à feu » Toute arme susceptible, grâce à un canon qui permet de tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile, d’infliger des lésions corporelles graves ou la mort à une personne, y compris une carcasse ou une boîte de culasse d’une telle arme ainsi que toute chose pouvant être modifiée pour être utilisée comme telle.

8. Le paragraphe 84(1) du Code criminel définit « arme à feu historique » ainsi :

“antique firearm” means

(a) any firearm manufactured before 1898 that was not designed to discharge rim-fire or centre-fire ammunition and that has not been redesigned to discharge such ammunition, or

(b) any firearm that is prescribed to be an antique firearm.

« arme à feu historique » Toute arme à feu fabriquée avant 1898 qui n’a pas été conçue ni modifiée pour l’utilisation de munitions à percussion annulaire ou centrale ou toute arme à feu désignée comme telle par règlement.

PREUVE

9. M. Bill Rampton a tenté d’importer les revolvers en cause par la poste. Ils sont tous deux plaqués nickel, leur poignée est en bois dur et la longueur de leur canon est d’environ 7 pouces.

10. L’ASFC a déposé les deux revolvers en cause à titre de pièces, et le Tribunal les a examinés. Le Tribunal a aussi examiné les armes à feu réelles dont les revolvers en cause sont censés avoir l’apparence, que l’ASFC a fournies à titre de pièces.

11. L’ASFC a déposé un rapport d’expert préparé par M. Dean B. Dahlstrom du Service des laboratoires judiciaires de la Gendarmerie royale du Canada. Les titres et qualités de M. Dahlstrom en tant qu’expert en matière d’armes n’ont pas été contestés par Mr. Rampton. Le Tribunal a reconnu à M. Dahlstrom le titre d’expert en matière d’armes prohibées.

PLAIDOIRIE

12. M. Rampton a soutenu que les lois canadiennes avaient été modifiées entre le moment de l’achat et le moment de l’importation des revolvers en cause, la modification ayant eu pour effet d’en faire des armes prohibées. Il a soutenu que les revolvers en cause « ne sont pas réservés aux collectionneurs ou aux costumes reproduisant les vêtements portés dans l’Ouest après la guerre de Sécession »6 [traduction].

13. L’ASFC a soutenu ce qui suit : 1) les revolvers en cause sont des répliques et leur importation au Canada est donc interdite; 2) aucune modification n’a été apportée aux dispositions législatives douanières ou au Code criminel pendant la période visée en l’espèce; 3) pour obtenir de telles marchandises à des fins telles que les reconstitutions historiques, les collectionneurs ou les entreprises doivent détenir un permis délivré par un registre provincial des armes à feu avant leur importation.

DÉCISION

14. Pour décider si les revolvers en cause sont correctement classés dans le numéro tarifaire 9898.00.00, le Tribunal doit déterminer s’ils satisfont à la définition de « réplique » aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel. Pour être réputé être une « réplique », un objet doit remplir trois conditions : 1) il doit être un objet conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auquel on a voulu donner cette apparence; 2) il ne doit pas être une arme à feu; 3) il ne doit pas être un objet conçu de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu historique, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auquel on a voulu donner cette apparence.

15. Dans son rapport, M. Dahlstrom indiquait que les revolvers en cause sont des objets conçus de façon à avoir l’apparence du revolver de l’armée Colt à simple action. Selon l’examen des revolvers en cause et de l’arme à feu réelle originale dont leur apparence est inspirée, effectué par le Tribunal, ces revolvers sont une reproduction fidèle des points de vue de la taille, de la forme et de l’apparence générale. La seule différence mineure se rapporte à la longueur du canon. Le Tribunal fait également observer que les coffrets renfermant les revolvers en cause portaient la mention « réplique », ce qui indique que ces marchandises ont été vendues en tant que répliques. Le Tribunal est donc convaincu que les revolvers en cause satisfont à la première condition de la définition de « réplique », à savoir qu’il s’agit d’objets conçus de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auxquels on a voulu donner cette apparence.

16. Le Tribunal est également d’avis que les revolvers en cause ne sont pas des armes à feu parce qu’elles ne sont pas conçues, en leur état actuel, pour tirer un projectile. À cet égard, il fait observer que le percuteur a été enlevé et qu’une extrémité du canon est partiellement obstruée. À la lumière de la définition de l’expression « arme à feu » qui se trouve à l’article 2 du Code criminel, le Tribunal est convaincu que les revolvers en cause satisfont à la deuxième condition de la définition de « réplique », à savoir qu’ils ne sont pas des armes à feu.

17. Quant à la troisième condition de la définition, M. Dahlstrom déclarait dans son rapport que les revolvers en cause « ont l’apparence à la fois du modèle historique et du modèle non historique du revolver de l’armée Colt à simple action »7 [traduction]. L’ASFC a soutenu que le revolver de l’armée Colt à simple action a commencé à être fabriqué avant 1898 et que sa fabrication s’est poursuivie jusque dans les années 1940 et après. Le Tribunal rappelle, comme l’a indiqué l’ASFC, qu’il a déjà conclu qu’un dispositif ayant l’apparence à la fois d’une arme à feu historique et d’une arme à feu non historique ne peut être réputé une réplique d’une « arme historique »8 . La même conclusion s’applique en l’espèce.

18. Ainsi qu’il a déjà indiqué, M. Rampton a également prétendu que les revolvers en cause satisfaisaient à la définition d’« arme à feu historique » au sens du Code criminel au moment de leur achat, à savoir des armes à feu fabriquées avant 1898 qui n’ont pas été conçues pour l’utilisation de munitions, mais que les dispositions législatives douanières avaient été modifiées entre le moment de leur achat et le moment de leur importation. À cet égard, le Tribunal fait observer qu’il ne semble pas y avoir eu de modifications pertinentes des dispositions législatives douanières ou du Code criminel pendant la période visée en l’espèce.

19. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal est convaincu qu’il est satisfait à la troisième condition de la définition de « réplique », à savoir que les revolvers en cause ne sont pas des objets qui ont été conçus de façon à avoir l’apparence exacte d’une arme à feu historique, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auxquels on a voulu donner cette apparence.

20. Dans son mémoire, M. Rampton a déclaré que « les répliques de ce type d’arme ne sont pas réservées aux collectionneurs ou aux costumes reproduisant les vêtements portés dans l’Ouest après la guerre de Sécession »9 [traduction]. À cet égard, le Tribunal fait observer qu’il est possible d’importer légalement au Canada des répliques sous réserve de certaines conditions. Il incombe à l’importateur d’obtenir le permis pertinent pour ce faire.

21. Par conséquent, étant donné que les revolvers en cause satisfont aux trois conditions qui en font des « réplique[s] » aux termes du Code criminel, le Tribunal conclut qu’ils sont des dispositifs prohibés. Il conclut donc que les revolvers en cause sont correctement classés dans le numéro tarifaire 9898.00.00 et, à ce titre, leur importation au Canada est interdite aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel et du paragraphe 136(1) du Tarif des douanes.

22. Pour les raisons qui précèdent, l’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . D.O.R.S./91-499.

4 . Gaz. C. 2006.I.1231.

5 . L.R.C. 1985, c. C-46.

6 . Pièce AP-2002-003-1.

7 . Rapport d’expert de l’intimé, onglet 1 à la p. 1.

8 . Voir Terry Thompson c. ADRC (14 janvier 2003), AP-2001-064 (TCCE).

9 . Pièce AP-2002-003-1.