CARL DEFRANCE

Décisions


CARL DEFRANCE
c.
COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA
Appel no AP-2003-014

Décision et motifs rendus
le jeudi 9 septembre 2004


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 30 mars 2004 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada le 6 mai 2003, concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 60 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

 

CARL DEFRANCE

Appelant

ET

 

LE COMMISSAIRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est rejeté.

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre présidant

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 30 mars 2004

   

Membre du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

   

Conseillers pour le Tribunal :

Dominique Laporte

 

Nick Covelli

   

Greffier :

Anne Turcotte

   

Parties :

Carl DeFrance, pour l'appelant

 

Tatiana Sandler, pour l'intimé

Adresser toutes les communications à :

Le secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : (613) 993-3595
Télécopieur : (613) 990-2439
Courriel :

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Le présent appel est interjeté aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l'égard d'une décision rendue par le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) rendue le 6 mai 2003 aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'article en cause est correctement classé dans le numéro tarifaire 9898.00.00 de l'annexe du Tarif des douanes2 à titre de dispositif prohibé, comme l'a déterminé l'ADRC.

3. Le numéro tarifaire 9898.00.00 se lit en partie ainsi :

9898.00.00 Armes à feu, armes prohibées, armes à autorisation restreinte, dispositifs prohibés, munitions prohibées et éléments ou pièces conçus exclusivement pour être utilisés dans la fabrication ou l'assemblage d'armes automatiques, désignés comme « marchandises prohibées » au présent numéro tarifaire.

Pour l'application du présent numéro tarifaire,

(b) « arme à autorisation restreinte », « arme à feu à autorisation restreinte », « arme à feu prohibée », « arme automatique », « arme prohibée », « dispositif prohibé », « munitions prohibées » et « permis » s'entendent au sens du paragraphe 84(1) du Code criminel.

4. Le paragraphe 84(1) du Code criminel3 prévoit que l'expression « dispositif prohibé » comprend, entre autres, une réplique, dont la définition est la suivante :

« réplique » Tout objet, qui n'est pas une arme à feu, conçu de façon à en avoir l'apparence exacte - ou à la reproduire le plus fidèlement possible - ou auquel on a voulu donner cette apparence. La présente définition exclut tout objet conçu de façon à avoir l'apparence exacte d'une arme à feu historique - ou à la reproduire le plus fidèlement possible - ou auquel on a voulu donner cette apparence.

5. L'article 2 du Code criminel définit « arme à feu » comme il suit :

« arme à feu » Toute arme susceptible, grâce à un canon qui permet de tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile, d'infliger des lésions corporelles graves ou la mort à une personne, y compris une carcasse ou une boîte de culasse d'une telle arme ainsi que toute chose pouvant être modifiée pour être utilisée comme telle.

6. Le paragraphe 84(1) du Code criminel définit "arme à feu historique" ainsi :

« arme à feu historique » Toute arme à feu fabriquée avant 1898 qui n'a pas été conçue ni modifiée pour l'utilisation de munitions à percussion annulaire ou centrale ou toute arme à feu désignée comme telle par règlement.

PREUVE

7. M. Carl DeFrance a tenté d'importer l'article en cause par la poste. L'ADRC a jugé que l'article était une « réplique » et l'a retenu à titre de dispositif prohibé lors de son entrée au Canada le 7 avril 2003. Il a par la suite remis un avis de retenue à M. DeFrance. Ce dernier a demandé un réexamen du classement du pistolet dans le numéro tarifaire 9898.00.00 aux termes du paragraphe 60(1) de la Loi. L'ADRC a rejeté cette demande le 6 mai 2003.

8. M. DeFrance a déposé un avis d'appel auprès du Tribunal le 23 juin 2003, soit dans le délai de 90 jours prévu à l'article 67 de la Loi.

9. Le Tribunal a décidé de tenir une audience sur la foi d'exposés écrits aux termes de l'article 25 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 4 .

10. L'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) (autrefois l'ADRC) a déposé le pistolet en cause comme pièce, et le Tribunal a eu l'occasion de l'examiner.

11. L'ASFC a déposé un rapport de l'expertise préparé par M. Gilbert Desjardins du laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale de la province de Québec. M. DeFrance n'a pas contesté les qualités de M. Desjardins à titre d'expert en balistique. Selon le rapport d'expert de M. Desjardins, le pistolet en cause est une réplique.

PLAIDOIRIE

12. M. DeFrance a soutenu que le pistolet en cause est un jouet.

13. L'ASFC a soumis que le pistolet en cause est une réplique. Selon l'ASFC, le pistolet en cause a été conçu pour reproduire le plus fidèlement possible une carabine Colt M4A1, laquelle est une arme à feu prohibée.

DÉCISION

14. Pour décider si le pistolet en cause est classé correctement dans le numéro tarifaire 9898.00.00, le Tribunal doit déterminer s'il satisfait à la définition de "réplique" aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel. Pour que le pistolet en cause satisfasse à cette définition, il doit remplir trois conditions : 1) il doit être un objet conçu de façon à avoir l'apparence exacte d'une arme à feu, ou la reproduire le plus fidèlement possible, ou auquel on a voulu donner cette apparence; 2) il ne doit pas être une arme à feu; 3) il ne doit pas être un objet conçu de façon à avoir l'apparence exacte d'une arme à feu historique, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou auquel on a voulu donner cette apparence.

15. Le rapport de M. Desjardins indique que le pistolet en cause « est une reproduction fidèle de la carabine de marque Colt de modèle M4A1 Carbine en calibre .223 Rem (5,56X45 mm) ». En effet, l'acte de vente décrit le pistolet en cause comme une «carabine  M4A1» (« M4A1 Carbine »). L'ASFC a déposé des éléments de preuve non contestés selon lesquels une carabine Colt M4A1 peut tirer des balles et est capable d'infliger des lésions corporelles graves ou la mort à une personne. Aux termes de la définition d'« arme à feu » à l'article 2 du Code criminel, le Tribunal est convaincu que le pistolet en cause remplit la première condition de la définition de « réplique », c.-à-d. il est conçu de façon à avoir l'apparence exacte d'une arme à feu, ou la reproduire le plus fidèlement possible, ou on a voulu lui donner cette apparence.

16. Le rapport précise également que l'énergie produite lorsqu'un projectile est tiré en se servant du pistolet en cause « n'est pas suffisante pour risquer de causer des blessures graves ou la mort ». Compte tenu de la définition d'« arme à feu » à l'article 2 du Code criminel, le Tribunal est convaincu que la deuxième condition de la définition « réplique » est remplie, c.-à-d. le pistolet en cause n'est pas une arme à feu.

17. L'ASFC a soutenu que le pistolet en cause a l'apparence d'une carabine Colt M4A1 fabriquée après 1898 et ne relève donc pas de la définition d'« arme à feu historique » au paragraphe 84(1) du Code criminel. M. DeFrance n'a pas contesté cet argument. En réalité, l'aspect du pistolet en cause donne à penser qu'il a été conçu de façon à reproduire le plus fidèlement possible l'apparence d'une arme à feu moderne. Par conséquent, le Tribunal est convaincu que la troisième condition de la définition de « réplique » est remplie, c.-à-d. le pistolet en cause n'a pas été conçu de façon à avoir l'apparence exacte d'une arme à feu historique, ou à la reproduire le plus fidèlement possible, ou on n'a pas voulu lui donner cette apparence.

18. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal détermine que le pistolet en cause relève de la définition de « réplique » aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel. Étant donné qu'une réplique est incluse dans la définition de « dispositif prohibé » du paragraphe 84(1), le Tribunal est d'avis que le pistolet en cause est classé correctement dans le numéro tarifaire 9898.00.00.

19. Par conséquent, l'appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.) c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . L.R.C. 1985, c. C-46.

4 . D.O.R.S./91-499.