GROUPE CABICO INC.

Décisions


GROUPE CABICO INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2006-004

Décision et motifs rendus
le mercredi 21 novembre 2007


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 5 décembre 2006 en vertu du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 30 janvier 2006 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

 

GROUPE CABICO INC.

Appelante

ET

 

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est admis.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

James A. Ogilvy
James A. Ogilvy
Membre

Meriel V. M. Bradford
Meriel V. M. Bradford
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 5 décembre 2006

   

Membres du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

 

James A. Ogilvy, membre

 

Meriel V. M. Bradford, membre

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Marie-France Dagenais

   

Agent de la recherche :

Jo-Anne Smith

   

Agent du greffe :

Valérie Cannavino

   

Ont comparu :

Marco Ouellet, pour l’appelante

 

Andrew Gibbs, pour l’intimé

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard de décisions rendues le 30 janvier 2006 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si des glissières à galets à montage par la face inférieure (les marchandises en cause) doivent être classées dans le numéro tarifaire 8482.80.90 de l’annexe du Tarif des douanes 2 , comme l’a soutenu Groupe Cabico Inc. (Cabico), ou si elles sont correctement classées dans le numéro tarifaire 8302.42.00, comme l’a déterminé l’ASFC.

3. Des objets représentatifs des marchandises en cause ont été déposés comme pièces auprès du Tribunal.

4. Les marchandises en cause sont des coulisses de tiroir. Comme l’ont décrit les parties et comme l’indiquent les objets déposés comme pièces, les patiences, les glissières ou les bandes de roulement (glissières) sont faites de métaux communs, tandis que les mécanismes internes — galets et logements de galets — sont faits de plastique. Chaque coulisse est conçue de manière à ce que les glissières puissent bouger en parallèle. Les galets en plastique, tenus en place par des logements de galets en plastique, séparent les glissières, maintiennent une distance constante entre elles, portent une charge et facilitent le mouvement des glissières l’une par rapport à l’autre.

5. Les marchandises en cause ont été importées en septembre 2003 et en septembre 2004.

6. La nomenclature pertinente du Tarif des douanes prévoit ce qui suit :

[...]

83.02 Garnitures, ferrures et articles similaires en métaux communs pour meubles, portes, escaliers, fenêtres, persiennes, carrosseries, articles de sellerie, malles, coffres, coffrets ou autres ouvrages de l’espèce; patères, porte-chapeaux, supports et articles similaires, en métaux communs; roulettes avec monture en métaux communs; ferme-portes automatiques en métaux communs.

[...]

-Autres garnitures, ferrures et articles similaires :

[...]

8302.42.00 - -Autres, pour meubles

[...]

84.82 Roulements à billes, à galets, à rouleaux ou à aiguilles.

[...]

8482.80 -Autres, y compris les roulements combinés

[...]

7. M. Marco Robert, vice-président du développement des affaires chez Cuisine Cabico, une division du Groupe Cabico Inc., a démontré, à l’aide d’un meuble en bois à trois tiroirs construit expressément pour l’audience3 , le fonctionnement des marchandises en cause et leur principal objectif, qui est selon lui de faciliter le mouvement de va-et-vient des tiroirs. Il a affirmé que le terme « ferrures » n’est pas utilisé dans l’industrie pour décrire les marchandises en cause mais pour faire référence à des pièces utilisées dans l’assemblage de meubles. M. George Rothschild, coordonnateur du département de l’ébénisterie au Algonquin College, a témoigné au nom de l’ASFC. Le Tribunal l’a qualifié d’expert en conception de meubles. Il a affirmé que, dans l’industrie, les marchandises en cause sont appelées coulisses, glissières ou bandes de roulement, faisant partie de la catégorie plus vaste des « ferrures », et servent à réduire la friction et à faire entrer et sortir les tiroirs de la boîte d’un meuble, par exemple. Il a ajouté que le terme « coulisse à roulement à billes » sert généralement à décrire le mécanisme utilisé dans la coulisse elle-même, mais non les marchandises en cause.

ANALYSE

8. Aux fins du présent appel, le Tribunal doit tenir compte de l’article 10 du Tarif des douanes qui prévoit que le classement des marchandises importées est effectué en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé 4 et les Règles canadiennes 5 . La Règle 1 des Règles canadiennes prévoit que « [l]e classement des marchandises dans les numéros tarifaires d’une sous-position ou d’une position est déterminé [...] d’après les Règles générales [...] ». Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade. Si le classement des marchandises ne peut être déterminé par application de la Règle 1 des Règles générales, il doit alors être tenu compte de la Règle 2 des Règles générales et ainsi de suite jusqu’à ce que le classement soit effectué.

9. De plus, le Tribunal tient compte de l’article 11 du Tarif des douanes qui prévoit que, pour l’interprétation des positions et des sous-positions de l’annexe, il faut tenir compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 6 et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 7 .

10. Pour arriver à sa décision, le Tribunal doit d’abord déterminer si les notes de section ou de chapitre mentionnées à la Règle 1 des Règles générales exigent le classement des marchandises en cause dans une position particulière.

11. L’ASFC a soutenu que les marchandises en cause sont convenablement qualifiées de ferrures pour meubles, de sorte qu’elles sont correctement classées dans la position no 83.02 aux termes de la Règle 1 des Règles générales. Cabico a soutenu que, même s’il est vrai que les marchandises en cause contiennent des métaux communs, il ne s’agit pas de ferrures, de garnitures ou d’articles similaires. Cabico a ajouté qu’étant donné que la composante qui confère aux marchandises en cause leur caractère essentiel est le roulement à galets, elles doivent être classées dans la position no 84.82 à titre de roulements à billes.

12. La position no 83.02 traite de garnitures, ferrures et articles similaires en métaux communs. La partie pertinente de la note (B) des Notes explicatives de la section XV intitulée « Ouvrages composites en métaux communs », qui fournit des lignes directrices sur le classement des articles en métaux communs comportant des parties non métalliques, prévoit ce qui suit :

Aux termes de la Note 7 de la présente Section, les ouvrages en métaux communs composés de deux ou plusieurs métaux sont classés [...] avec l’ouvrage correspondant du métal prédominant en poids sur chacun des autres métaux. La même règle s’applique aux ouvrages comportant des parties non métalliques pour autant que par application des Règles générales interprétatives, ce soit le métal commun qui confère à l’ouvrage son caractère essentiel.

13. Par conséquent, le Tribunal est d’avis que, pour que la composante de métaux communs détermine le classement d’un ouvrage, elle doit remplir deux conditions : elle doit conférer aux marchandises leur caractère essentiel et être prédominante en poids.

14. Le Tribunal souligne que l’examen le plus rudimentaire de l’objet démantelé déposé comme pièce fait ressortir que les glissières, qui constituent la composante en métaux communs des marchandises en cause, prédominent en poids. Concernant la partie des marchandises en cause qui leur confère leur caractère essentiel, Cabico a soutenu que ce sont les roulements à billes qui leur confèrent leur caractère essentiel, qui consiste à permettre le mouvement de va-et-vient linéaire des tiroirs chargés. Comme Cabico l’a démontré au moyen d’un objet déposé comme pièce dans lequel les marchandises en cause étaient montées sur un tiroir qui a été ouvert et fermé lorsqu’il était vide et lorsqu’il était chargé, le Tribunal est d’avis que l’avantage principal des marchandises en cause réside dans le fait qu’elles réduisent la friction pour faciliter le mouvement du tiroir lorsqu’on l’ouvre et le ferme. Par conséquent, le Tribunal conclut que le caractère essentiel des marchandises découle de leur capacité de réduire la friction sous une charge. Les éléments de preuve indiquent que ce sont les galets en plastique, tenus en place par le logement en plastique, qui rendent possible cette réduction de friction. Le Tribunal estime que ce sont donc les galets en plastique et leur logement en plastique, non les métaux communs, qui confèrent aux marchandises leur caractère essentiel, même si les métaux communs prédominent en poids.

15. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 83.02.

16. Le Tribunal doit maintenant déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 84.82.

17. Cabico a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 8482.80.90 à titre d’autres roulements à billes, à galets, à rouleaux ou à aiguilles. Cabico les a aussi qualifiés de roulements à billes linéaires, ce qui désigne selon le Tribunal les marchandises dans leur ensemble, les galets dans leur logement supportant une charge et réduisant la friction et les glissières servant de rainures pour les roulements. L’ASFC a soutenu que les marchandises en cause sont expressément exclues du classement dans la section XVI, qui comprend le chapitre 84, en vertu de la note 1g) de la section XVI, étant donné qu’elles sont des « parties et fournitures d’emploi général » au sens de la note 2c) de la section XV, au motif qu’elles sont des « articles » au sens de la position no 83.02.

18. Le Tribunal souligne qu’étant donné que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 83.02, elles ne sont pas des « parties et fournitures d’emploi général » au sens de la note 2c) de la section XV, de sorte que les marchandises en cause peuvent être classées dans le chapitre 84.

19. Les Notes explicatives de la position no 84.82 prévoient que la position couvre ce qui suit :

Roulements à billes, à galets, à rouleaux ou à aiguilles

[...]

Conçus pour remplacer les coussinets lisses en vue de réduire les pertes d’énergie par frottement [...]

On distingue notamment :

[...]

B) Les roulements à galets ou à rouleaux de toutes formes [...], simples ou à double rangée.

[...]

[Nos italiques]

20. La nomenclature tarifaire ne contient aucune définition précise du terme « roulement ». Il n’y a aucune note de chapitre ou note explicative portant expressément sur ce terme. Comme dans les décisions antérieures, le Tribunal a donc examiné le sens ordinaire du terme tel qu’il figure dans les dictionnaires d’usage courant. Même si les diverses définitions du terme « roulement » trouvées dans les dictionnaires et les livres de référence et présentées par Cabico sont légèrement différentes les unes des autres, les notions de mouvement relatif, de charge et de réduction de friction se retrouvent dans toutes. Le Tribunal souligne que l’ASFC n’a fourni aucun élément de preuve pour contester les définitions présentées par Cabico.

21. Le Tribunal est d’avis que les marchandises en cause relèvent du large éventail de sens du terme « roulement » qui se trouve dans les définitions des dictionnaires, car les marchandises en cause permettent en effet un mouvement de va-et-vient linéaire plus facile des tiroirs, par rapport au meuble dans lequel ils se trouvent, en réduisant la friction lorsqu’ils sont chargés.

22. Étant donné la nature et les diverses applications des marchandises en cause, comme le démontre les éléments de preuve, le Tribunal accepte qu’elles agissent comme roulements. De plus, en raison de leur construction et de la direction du mouvement des glissières l’une par rapport à l’autre, le Tribunal est d’avis que les marchandises en cause sont mieux décrites comme roulements à billes linéaires.

DÉCISION

23. À la lumière des motifs qui précèdent et conformément à la Règle 1 des Règles générales, le Tribunal conclut que les marchandises en cause devraient être classées dans le numéro tarifaire 8482.80.90 à titre d’autres roulements à billes, à galets, à rouleaux ou à aiguilles.

24. Par conséquent, l’appel est admis.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . Transcription de l’audience publique, 5 décembre 2006, à la p. 32.

4 . Supra note 2, annexe [Règles générales].

5 . Supra note 2, annexe.

6 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003.

7 . Organisation mondiale des douanes, 3e éd., Bruxelles, 2002 [Notes explicatives].