PANASONIC CANADA INC.

Décisions


PANASONIC CANADA INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2005-035

Décision et motifs rendus
le vendredi 19 octobre 2007


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 31 octobre 2006, en vertu du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada, le 12 septembre 2005, concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

 

PANASONIC CANADA INC.

Appelante

ET

 

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre présidant

Meriel V. M. Bradford
Meriel V. M. Bradford
Membre

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 31 octobre 2006

   

Membres du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

 

Meriel V. M. Bradford, membre

 

Serge Fréchette, membre

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Reagan Walker

   

Agent principal de la recherche :

Jo-Anne Smith

   

Agent du greffe :

Valérie Cannavino

   

Ont comparu :

Michael A. Sherbo et Andrew T. Simkins, pour l’appelante

 

Derek Rasmussen, pour l’intimé

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard de décisions rendues le 12 septembre 2005 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

2. L’appel porte sur les modèles nos WJ-HD200, WJ-HD220, WJ-HD316 et WJ-HD500 d’enregistreurs numériques sur disque Panasonic (les marchandises en cause), qui sont une combinaison de multiplexeurs vidéo et d’enregistreurs sur disque dur de différentes dimensions.

3. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 8521.90.90 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre d’autres appareils d’enregistrement ou de reproduction vidéophoniques, même incorporant un récepteur de signaux vidéophoniques, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8525.10.00 à titre d’appareils d’émission, même incorporant un appareil de réception, comme l’a soutenu Panasonic Canada Inc. (Panasonic).

4. Panasonic a importé les marchandises en cause dans le cadre de quatre opérations distinctes entre le 4 novembre 2003 et le 27 août 2004.

5. La nomenclature pertinente du Tarif des douanes qui était en vigueur lorsque les marchandises en cause ont été importées prévoit ce qui suit :

[...]

85.21 Appareils d’enregistrement ou de reproduction vidéophoniques, même incorporant un récepteur de signaux vidéophoniques.

[...]

8521.90 -Autres

[...]

8521.90.90 - - -Autres

85.25 Appareils d’émission pour la radiotéléphonie, la radiotélégraphie, la radiodiffusion ou la télévision, même incorporant un appareil de réception ou un appareil d’enregistrement ou de reproduction du son; caméras de télévision; appareils de prise de vues fixes vidéo et autres caméscopes; appareils photographiques numériques.

8525.10.00 Appareils d’émission

ÉLÉMENTS DE PREUVE

6. Panasonic a déclaré que les marchandises en cause sont conçues de manière à recevoir plusieurs signaux vidéophoniques, à numériser les images entrantes et à les coder par numéro de caméra, et ensuite à combiner les signaux vidéophoniques et à les transmettre par un seul canal. Une fois numérisées et codées par numéro de caméra, les images peuvent être visualisées sur un moniteur, enregistrées sur le disque dur ou transmises à un autre appareil de sortie3 .

7. Au nom de Panasonic, M. Michael Reynolds, gestionnaire de produits, service de la diffusion des produits de sécurité et des systèmes de sécurité, chez Panasonic, a affirmé que les marchandises en cause ne sont pas vendues au détail, mais seulement à des professionnels de la sécurité et à des intégrateurs4 . M. Reynolds a expliqué le mode de fonctionnement de l’appareillage au moyen d’une pièce qui consistait en un système type ou de base à petite échelle. La pièce était composée d’une des marchandises en cause, de deux caméras et d’un moniteur. Il a expliqué que, dans le cadre d’une application type, une personne est assise à un bureau, regarde le moniteur et examine les images provenant de plusieurs caméras réparties dans un bureau ou un immeuble. À tout moment, la personne peut décider de regarder différentes configurations d’images sur plusieurs écrans ou un seul endroit, de même que d’allumer ou d’éteindre la fonction d’enregistrement. M. Reynolds a également expliqué que, dans le numéro de modèle, « WJ » représente l’usine où le produit a été fabriqué et « HD » signifie « disque dur ».

8. Au nom de l’ASFC, M. Tony Mungham, gestionnaire, Section des systèmes électroniques et informatiques, Direction des services scientifiques et de laboratoire, à l’ASFC, a été appelé à témoigner. M. Mungham a fourni une description du multiplexage et de l’enregistrement numérique. Il a déclaré que le multiplexage consiste en la capacité de permettre que plusieurs signaux soient combinés en un seul parcours de signal et que l’enregistrement numérique est l’acte qui consiste à transcrire l’information dans un domaine numérique. Il a expliqué que l’enregistrement numérique et la surveillance vidéo avaient permis aux préposés de visionner des images claires et d’enregistrer à maintes reprises sans dégradation du support. M. Mungham a décrit le lien entre le multiplexeur et l’enregistreur. Il a déclaré que le multiplexeur combine les signaux des caméras de manière à ce que l’enregistreur puisse enregistrer les images. Il a expliqué qu’un disque dur a une largeur de bande finie ou une fréquence d’images finie à laquelle il peut enregistrer. Par conséquent, il faut faire un compromis. Le multiplexeur permet un compromis à cause de la possibilité de modifier la largeur de bande de façon contrôlée. Dans le type de système vidéo en cause, lors de l’enregistrement, le multiplexeur peut prendre, par exemple, trois images par seconde avec chaque caméra et les envoyer sur le disque dur. Au besoin, comme lorsqu’un mouvement est détecté dans un secteur, la fréquence d’images peut être augmentée pour une caméra donnée et diminuée pour d’autres5 .

PLAIDOIRIES

Panasonic

9. Panasonic a soutenu que les marchandises en cause sont des produits combinés, de sorte qu’ils sont régis par la Note 3 de la Section XVI de l’annexe du Tarif des douanes, qui prévoit ce qui suit :

Sauf dispositions contraires, les combinaisons de machines d’espèces différentes destinées à fonctionner ensemble et ne constituant qu’un seul corps, ainsi que les machines conçues pour assurer deux ou plusieurs fonctions différentes, alternatives ou complémentaires, sont classées suivant la fonction principale qui caractérise l’ensemble.

[Nos italiques]

10. Panasonic a soutenu que les enregistreurs vidéophoniques sont des machines combinées composées d’un multiplexeur et d’un enregistreur vidéophonique. Il y a un certain nombre d’autres éléments contenus dans ces boîtes, mais il s’agit d’éléments de l’une ou l’autre des machines.

11. Panasonic a soutenu que la fonction principale est exercée par le multiplexeur, étant donné qu’il reçoit les signaux, les traite et les transmet à l’enregistreur et/ou au moniteur. Le multiplexeur fonctionne également en marche arrière, permettant la récupération de signaux enregistrés précis. Le fait que le multiplexeur soit toujours en mode de fonctionnement et que l’enregistreur ne fonctionne que sur demande appuie cette prétention. Le multiplexeur et l’enregistreur utilisés sont fonction du nombre de ports d’entrée que l’utilisateur désire avoir. Les marchandises en cause offrent 8 canaux (modèles WJ-HD200 et WJ-HD220) ou 16 canaux (modèles WJ-HD316 et WJ-HD500).

ASFC

12. Le principal argument de l’ASFC voulait que, si la Note 3 de la Section XVI s’applique, la fonction d’enregistrement constitue la principale fonction. Cet argument est fondé sur la conception des marchandises en cause et sur l’importance attribuée à la fonction d’enregistrement par Panasonic dans sa propre documentation publicitaire.

13. L’ASFC a aussi soutenu que la Règle 1 des Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé 6 suffit, étant donné que les marchandises sont clairement étiquetées « enregistreurs vidéophoniques » dans les documents de vente et de service, de sorte qu’elles peuvent être classées dans la position no 85.21 sans qu’il soit nécessaire de recourir à la Note 3 de la Section XVI. Cette opinion est appuyée par la partie (VI) des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 7 , qui prévoit ce qui suit :

[...]

Le recours à la Note 3 de la Section XVI n’est pas nécessaire lorsque la combinaison de machines est couverte comme telle par une position distincte, ce qui est le cas, par exemple, de certains groupes pour le conditionnement de l’air (no 84.15).

[...]

ANALYSE

14. En vertu de l’article 10 du Tarif des douanes, le Tribunal doit classer les marchandises conformément aux Règles générales et aux Règles canadiennes 8 . De plus, aux termes de l’article 11 du Tarif des douanes, le Tribunal doit tenir compte des Notes explicatives pour l’interprétation des positions et des sous-positions de l’annexe du Tarif des douanes.

15. Les Règles générales sont structurées en cascade. Si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il doit alors être tenu compte de la Règle 2. Si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 2, il doit alors être tenu compte de la Règle 3, et ainsi de suite en ordre numérique de la liste des Règles générales.

16. La Règle 1 des Règles générales prévoit ce qui suit :

Le libellé des titres de Sections, de Chapitres ou de Sous-Chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes.

17. Les positions concurrentes en l’espèce sont les suivantes :

85.21 Appareils d’enregistrement ou de reproduction vidéophoniques, même incorporant un récepteur de signaux vidéophoniques.

85.25 Appareils d’émission pour la radiotéléphonie, la radiotélégraphie, la radiodiffusion ou la télévision, même incorporant un appareil de réception ou un appareil d’enregistrement ou de reproduction du son; caméras de télévision; appareils de prise de vues fixes vidéo et autres caméscopes; appareils photographiques numériques.

18. Le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées conformément à la Règle 1 des Règles générales. L’ASFC a soutenu qu’aux termes de cette règle, les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 8521.90.90 à titre d’autres appareils d’enregistrement ou de reproduction vidéophoniques. Par contre, Panasonic a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 8525.10.00 à titre d’appareils d’émission.

19. La Note 3 de la Section XVI, qui inclut le Chapitre 85, prévoit ce qui suit : « Sauf dispositions contraires, les combinaisons de machines d’espèces différentes destinées à fonctionner ensemble et ne constituant qu’un seul corps, ainsi que les machines conçues pour assurer deux ou plusieurs fonctions différentes, alternatives ou complémentaires, sont classées suivant la fonction principale qui caractérise l’ensemble. »

20. De l’avis du Tribunal, chacune des marchandises en cause est une machine combinée. Les fonctions de multiplexage et d’enregistrement existent séparément et les appareils sont disponibles sur le marché en tant que machines autonomes. Les marchandises en cause offrent une solution au besoin de visionner et d’enregistrer simultanément plusieurs transmissions sans avoir à défrayer le coût associé à plusieurs moniteurs et enregistreurs. Les multiplexeurs sont disponibles sur le marché sans enregistreur intégré. Dans un tel cas, l’utilisateur possède déjà un appareil d’enregistrement, ou le système de sécurité compte toujours du personnel, et l’utilisateur ne désire pas enregistrer les images. Les enregistreurs sont aussi disponibles sans multiplexeur, mais ils ne peuvent enregistrer plusieurs transmissions sans multiplexeur. Dans un tel cas, chaque transmission d’une caméra nécessiterait son propre enregistreur. L’avantage des marchandises en cause réside dans le fait qu’elles offrent une alternative non coûteuse à l’utilisation d’un enregistreur pour chaque transmission.

21. En ce qui a trait au sens des termes « principal » et « fonction », le Tribunal renvoie aux définitions du dictionnaire. La définition que donne le Canadian Oxford Dictionary, 2e éd., pour le terme « principal » (principal) est « premier en rang ou en importance, fondamental, essentiel, majeur » [traduction]. Le dictionnaire définit le terme « function » (fonction) comme « un mode d’action ou d’activité par lequel une chose remplit son rôle » [traduction].

22. Même si, comme il a été mentionné, chacune des deux fonctions peut être exécutée séparément par un multiplexeur et un enregistreur indépendants, l’avantage manifeste offert par les marchandises en cause réside dans leur capacité d’exécuter les deux fonctions, à faible coût, au moyen d’une machine combinée. Le multiplexeur est essentiel pour le traitement et le visionnement de plusieurs signaux, mais le Tribunal est d’avis que la fonction d’enregistrement est la plus importante. Il est vrai que cette machine combinée va au-delà d’une simple machine d’enregistrement, étant donné qu’elle rend possible l’enregistrement, le stockage et la récupération d’information tirée de plusieurs transmissions vidéo. Néanmoins, la machine demeure principalement destinée à l’enregistrement et au stockage d’information et, dans ce sens, la « fonction principale » de la machine combinée demeure l’« enregistrement » de l’information de plusieurs sources.

23. Cette conclusion s’appuie en outre sur le témoignage de M. Reynolds, qui a indiqué que si le principal objectif consistait à visionner ou à regarder des images en direct, il ne serait pas nécessaire d’acheter l’une des marchandises en cause9 .

24. De plus, dans sa documentation publicitaire, Panasonic elle-même reconnaît que la fonction d’enregistrement est celle qui distingue cette machine combinée du simple multiplexeur. Dans ses documents de marketing, c’est la fonction en question qui est mise en évidence.

DÉCISION

25. À la lumière de ce qui précède et conformément à la Note 3 de la Section XVI, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 85.21 à titre d’appareils d’enregistrement ou de reproduction vidéophoniques, même incorporant un récepteur de signaux vidéophoniques. Les éléments de preuve indiquent que les marchandises en cause consistent en des enregistreurs sur disque par opposition à des enregistreurs sur bande magnétique. Elles doivent donc être classées dans la sous-position no 8521.90 à titre d’appareils d’enregistrement ou de reproduction vidéophoniques, même incorporant un récepteur de signaux vidéophoniques, autres. Les éléments de preuve indiquent également que les marchandises en cause sont des enregistreurs sur disque par opposition à des lecteurs de vidéodisque au laser, de sorte que, conformément à la Règle 1 des Règles canadiennes, elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8521.90.90 à titre d’appareils d’enregistrement ou de reproduction vidéophoniques, même incorporant un récepteur de signaux vidéophoniques, autres, autres.

26. Par conséquent, l’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . Mémoire de l’appelante, art. 22.

4 . Transcription de l’audience publique, 31 octobre 2006, à la p. 10.

5 . Ibid. aux pp109-111.

6 . Supra note 2, annexe [Règles générales].

7 . Organisation mondiale des douanes, 3e éd., Bruxelles, 2002 [Notes explicatives].

8 . Supra note 2, annexe.

9 . Transcription de l’audience publique, 31 octobre 2006, à la p. 72.