S.C. JOHNSON ET FILS, LIMITÉE

Décisions


S.C. JOHNSON ET FILS, LIMITÉE
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2005-015

Décision et motifs rendus
le mercredi 19 juillet 2006


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 25 janvier 2006 aux termes de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 11 avril 2005 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

 

S.C. JOHNSON ET FILS, LIMITÉE

Appelante

ET

 

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Meriel V. M. Bradford
Meriel V. M. Bradford
Membre

Elaine Feldman
Elaine Feldman
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 25 janvier 2006

   

Membres du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

 

Meriel V. M. Bradford, membre

 

Elaine Feldman, membre

   

Conseiller pour le Tribunal :

Philippe Cellard

   

Agent du greffe :

Valérie Cannavino

   

Ont comparu :

Mark N. Sills et Brian R. Staples, pour l’appelante

 

Andrew Gibbs et Yannick Landry, pour l’intimé

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Le présent appel est interjeté aux termes de l’article 67 de la Loi sur les douanes 1 à l’égard d’une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) le 11 avril 2005 aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

2. Toutes les marchandises en cause sont des désodorisants branchés, qui utilisent l’électricité pour chauffer des parfums et les diffuser et ainsi désodoriser un local. Elles sont composées des deux éléments suivants, emballés ensemble pour la vente au détail : un élément chauffant électrique et une cartouche de parfum. Certains éléments chauffants électriques sont assortis d’un ventilateur, d’une veilleuse ou d’une prise de courant supplémentaire ou deux permettant de brancher d’autres dispositifs électriques. Le parfum se présente sous forme d’huile ou de gel. Le consommateur insère la cartouche de parfum dans l’élément chauffant électrique. Lorsque la cartouche de parfum est épuisée, le consommateur peut acheter des cartouches de rechange et les insérer dans l’élément chauffant. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 8516.79.90 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre d’autres appareils électrothermiques pour usages domestiques, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 3307.49.00 à titre d’autres désodorisants de locaux, préparés, comme l’a soutenu S.C. Johnson et Fils, Limitée (S.C. Johnson).

3. La nomenclature pertinente du Tarif des douanes se lit ainsi :

[...]

33.07 Préparations pour le prérasage, le rasage ou l’après-rasage, désodorisants corporels, préparations pour bains, dépilatoires, autres produits de parfumerie ou de toilette préparés et autres préparations cosmétiques, non dénommés ni compris ailleurs, désodorisants de locaux, préparés, même non parfumés, ayant ou non des propriétés désinfectantes.

[...]

-Préparations pour parfumer ou pour désodoriser les locaux, y compris les préparations odoriférantes pour cérémonies religieuses :

[...]

3307.49.00 --Autres

[...]

85.16 Chauffe-eau et thermoplongeurs électriques; appareils électriques pour le chauffage des locaux, du sol ou pour usages similaires; appareils électrothermiques pour la coiffure (sèche-cheveux, appareils à friser, chauffe-fers à friser, par exemple) ou pour sécher les mains; fers à repasser électriques; autres appareils électrothermiques pour usages domestiques; résistances chauffantes, autres que celles du no 85.45.

[...]

-Autres appareils électrothermiques :

8516.79 --Autres

[...]

8516.79.90 ---Autres

[...]

4. La Note 2 de la section VI prévoit ce qui suit :

Sous réserve des dispositions de la Note 1 ci-dessus, tout produit qui, en raison, soit de sa présentation sous forme de doses, soit de son conditionnement pour la vente au détail, relève de l’un des nos 30.04, 30.05, 30.06, 32.12, 33.03, 33.04, 33.05, 33.06, 33.07, 35.06, 37.07 ou 38.08, devra être classé sous cette position et non pas dans une autre position de la Nomenclature.

5. Les extraits suivants des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 3 sont également pertinents dans le présent appel :

Notes explicatives de la position no 33.07

[...]

2) Les désodorisants de locaux, préparés, même non parfumés, ayant ou non des propriétés désinfectantes.

Les désodorisants de locaux préparés consistent essentiellement en substances (méthacrylate de lauryle, par exemple) qui agissent par voie chimique sur les odeurs à éliminer ou autres substances destinées à absorber physiquement les odeurs par les forces de Van der Waal, par exemple. Sous leur conditionnement de vente au détail, ces préparations sont généralement présentées en récipients aérosols.

Les produits tels que le charbon actif, conditionnés pour la vente au détail en tant que désodorisants pour réfrigérateurs, automobiles, etc., relèvent également de la présente position.

[...]

Notes explicatives de la Note 2 de la section VI

La Note 2 de la Section dispose que les produits (autres que ceux repris aux nos 28.43 à 28.46), qui, en raison, soit de leur présentation sous forme de doses, soit de leur conditionnement pour la vente au détail, relèvent de l’une des positions nos 30.04, 30.05, 30.06, 32.12, 33.03, 33.04, 33.05, 33.06, 33.07, 35.06, 37.07 ou 38.08, doivent être classés dans cette position, même s’ils sont susceptibles de répondre aux spécifications d’autres positions de la Nomenclature. Ainsi, par exemple, le soufre conditionné pour la vente au détail à des fins thérapeutiques, est classé au no 30.04, et non aux nos 25.03 ou 28.02, de même que la dextrine conditionnée pour la vente au détail comme colle est classée au no 35.06, et non au no 35.05.

[...]

Notes explicatives de la position no 85.16

[...]

(E) AUTRES APPREILS ÉLECTROTHERMIQUES POUR USAGES DOMESTIQUES

On entend par là les appareils normalement utilisés dans les ménages. Certains d’entre eux (chauffe-eau, appareils pour le chauffage des locaux, sèche-cheveux et fers à repasser, par exemple) ont été examinés ci-dessus avec les appareils industriels correspondants. Parmi les autres, on peut citer :

[...]

19) Les brûle-parfum et appareils chauffants pour diffuser les insecticides.

[...]

QUESTION PRÉLIMINAIRE

6. Le 29 septembre 2005, l’ASFC a demandé au Tribunal de rejeter l’appel au motif qu’il n’avait pas été déposé dans le délai prévu.

7. L’ASFC a soutenu que sa décision avait été communiquée à S.C. Johnson dans des relevés détaillés de rajustement (RDR) datés du 29 mars 2005 et que le dépôt de l’appel par S.C. Johnson le 6 juillet 2005 n’avait pas été fait dans le délai de 90 jours prévu au paragraphe 67(1) de la Loi. Elle a prétendu que les RDR étaient les documents pertinents aux fins du calcul du délai de 90 jours prévu pour le dépôt d’un appel, et non pas sa lettre datée du 11 avril 2005 qu’elle avait envoyée à S.C. Johnson. Elle a souligné que l’avant-dernier paragraphe de la lettre du 11 avril 2005 était, pour l’essentiel, une copie de sa décision du 29 mars 2005 et a prétendu que cette lettre n’était qu’un suivi de la décision rendue le 29 mars 2005.

8. Le 30 septembre 2005, S.C. Johnson a répondu à la demande de l’ASFC. Elle a soutenu que le document pertinent aux fins du calcul du délai de 90 jours prévu pour le dépôt d’un appel était la lettre du 11 avril 2005 et que l’appel avait donc été déposé dans le délai prévu. Elle a soutenu que toute ambiguïté quant à la date pertinente utilisée pour calculer le délai prévu pour le dépôt de l’appel devait être tranchée en sa faveur.

9. Le 3 novembre 2005, le Tribunal a rejeté la demande de l’ASFC et a fait savoir qu’il énoncerait les motifs du rejet dans son exposé des motifs de sa décision sur le classement. Lesdits motifs sont les suivants.

10. S.C. Johnson a déposé son appel le 6 juillet 2005. Pour respecter le délai prévu, l’appel devait être déposé dans les 90 jours suivant la décision de l’ASFC. Le 29 mars 2005, l’ASFC a rendu les RDR concernant la question de classement visée dans le présent appel. Le 11 avril 2005, l’ASFC a envoyé une lettre à S.C. Johnson intitulée « Suivi des relevés détaillés de rajustement » [traduction] concernant la même question. Chacun des documents indique que S.C. Johnson dispose de 90 jours à compter de la date du document pour interjeter appel. Si les RDR représentent la décision faisant l’objet de l’appel, S.C. Johnson a déposé son appel 9 jours après la fin du délai prévu. Si la lettre du 11 avril 2005 représente la décision faisant l’objet dudit appel, S.C. Johnson a interjeté appel dans le délai prévu.

11. Dans sa lettre du 11 avril 2005 à S.C. Johnson, l’ASFC a écrit ce qui suit : « La présente vous avise que j’ai rendu une décision définitive à l’appui de ma décision provisoire datée du 21 janvier 2005 » [traduction]. De plus, dans un courriel envoyé à S.C. Johnson le 12 avril 2005, l’ASFC a indiqué ce qui suit : « Pour préciser certains points, j’ai envoyé une lettre (décision) ainsi qu’un nouveau numéro de SRT pour remplacer celle qui avait été délivrée par le bureau de London en octobre expliquant ma position » [traduction]. Selon le Tribunal, la lettre dont il est fait mention dans le courriel du 12 avril 2005 ne peut être que la lettre datée du 11 avril 2005. Une fois encore, le 18 avril 2005, dans une lettre intitulée « Correction d’une erreur typographique dans la lettre de décision du 11 avril 2005 » [traduction], l’ASFC a fait référence à la lettre du 11 avril 2005 comme étant « la lettre communiquant la décision définitive » [traduction]. Compte tenu de ces éléments de preuve, le Tribunal conclut que la lettre du 11 avril 2005, et non pas les RDR du 29 mars 2005, représente la décision définitive de l’ASFC. Par conséquent, le Tribunal conclut que la lettre du 11 avril 2005 constitue la décision qui fait l’objet du présent appel et que l’appel a été déposé dans le délai de 90 jours prévu au paragraphe 67(1) de la Loi.

PREUVE

12. La présente section constitue un résumé de certains éléments clés des témoignages présentés à l’audience. Outre les témoignages, la preuve présentée par les parties comprenait aussi des documents et des pièces.

13. S.C. Johnson a convoqué un témoin, Mme Maxine Byerlay, gestionnaire, Conformité en commerce international, chez S.C. Johnson. Mme Byerlay a fait savoir que S.C. Johnson ne vend jamais l’élément chauffant électrique sans la cartouche de parfum. Elle a déclaré dans son témoignage que S.C. Johnson vend des cartouches de rechange séparément. Elle a ajouté que S.C. Johnson importe davantage de cartouches de rechange que d’ensembles constitués d’un élément chauffant électrique et d’une cartouche de parfum. Elle a précisé que, pour les marchandises en cause, la valeur de l’élément chauffant électrique est à peu près la même que celle de la cartouche de parfum. Elle a affirmé que la durée de vie moyenne de l’élément chauffant électrique était de deux ans et que celle d’une cartouche de parfum était d’un à deux mois. Elle a aussi fait savoir que les prises supplémentaires et les veilleuses comprises dans certaines des marchandises en cause étaient ajoutées pour des raisons de commodité pour le consommateur.

14. L’ASFC a convoqué un témoin, M. Wendell Ward, chef, Section de l’instrumentation et des services analytiques, ASFC. M. Ward a décrit le fonctionnement des éléments chauffants électriques qui faisaient partie des ensembles déposés comme pièces par l’ASFC. Il a indiqué que, lorsque les éléments chauffants électriques sont branchés dans une prise électrique, ils produisent de la chaleur, ce qui diffuse le parfum dans le local.

PLAIDOIRIE

15. La présente section donne un aperçu de certains éléments clés des arguments des parties. Il ne s’agit pas d’un exposé exhaustif des arguments présentés par les parties dans leurs mémoires ou à l’audience.

16. S.C. Johnson a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 33.07 par application de la Note 2 de la section VI. Elle a aussi fait référence aux Notes explicatives de la position no 33.07 qui mentionnent l’emballage de certains produits et indiquent que les désodorisants et désinfectants de locaux préparés sont généralement présentés en récipients aérosols. Elle a soutenu que l’emballage des marchandises en cause se situe à l’étape technologique qui suit logiquement l’emballage de ses produits sous forme de récipients aérosols. D’après S.C. Johnson, le dispositif électrique qu’elle utilise pour ses produits constitue une partie intégrante de l’emballage de désodorisant de local pour le produit lorsqu’il est conditionné pour la vente. Elle a aussi souligné que sa stratégie de commercialisation et de distribution des marchandises en cause cible uniquement la promotion des désodorisants. Des caractéristiques électriques, comme des prises électriques, ont été ajoutées à certains modèles uniquement pour des raisons de commodité pour l’utilisateur.

17. S.C. Johnson a soutenu que, si le Tribunal concluait que les marchandises en cause peuvent être classées à la fois dans la position no 33.07 à titre de désodorisants et dans la position no 85.16 à titre d’appareils électrothermiques, la première position devrait prévaloir. À l’appui de son argument, S.C. Johnson a soutenu que, peu importe le mécanisme utilisé pour diffuser le désodorisant, la matière ou le composant qui confère aux marchandises en cause leur caractère essentiel est la cartouche de parfum. Elle a prétendu que, en l’absence de la cartouche de parfum, le consommateur n’achèterait pas les marchandises en cause. Elle a aussi fait valoir que l’élément chauffant électrique ne comporte aucune pièce remplaçable.

18. S.C. Johnson a fait référence à la décision que le Tribunal a rendue dans Confiserie Regal Inc. c. Sous-M.R.N. 4 concernant le classement de distributeurs de bonbons, où le Tribunal avait classé un distributeur de bonbons contenant des bonbons comme un jouet plutôt qu’à titre de sucreries, parce qu’il était utilisé comme un jouet avant et après que les bonbons soient mangés. Elle a soutenu que, contrairement à la situation pour les distributeurs de bonbons dans Regal, le système électrique de diffusion n’est pas l’élément le plus important et ne transforme pas le caractère essentiel des marchandises en cause de celui de désodorisants en celui de diffuseurs électriques distincts.

19. L’ASFC a soutenu que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 85.16 à titre d’appareils électrothermiques pour usages domestiques. Elle a fait référence à Regal et soutenu que, étant donné l’introduction du courant électrique, le caractère essentiel des marchandises en cause est transformé par rapport à celui des marchandises qui les ont précédées, les bocaux d’argile du type pot-pourri et les contenants aérosols.

20. L’ASFC a fait référence aux Notes explicatives de la Note 2 de la section VI, qui donne des exemples d’application de la note. Elle a soutenu que, même si la note peut s’appliquer au classement de la cartouche de parfum lorsqu’elle est importée séparément, la note ne s’applique pas au classement des ensembles composés de l’élément chauffant électrique et de la cartouche de parfum qui constituent les marchandises en cause. Elle a soutenu que la Note 2 ne s’applique pas à l’exclusion de toutes les autres notes.

21. L’ASFC a soutenu que les éléments de preuve présentés par M. Ward ont établi que les marchandises en cause étaient des appareils électriques domestiques dont le fonctionnement dépend des propriétés ou effets de l’électricité qui chauffe les cartouches de parfum. D’après l’ASFC, et conformément à la Règle 1 des Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé 5 , les éléments de preuve appuient le classement des marchandises en cause dans la position no 85.16.

22. L’ASFC a soutenu que la Règle 3 b) des Règles générales appuie également le classement des marchandises en cause dans la position no 85.16. Elle a prétendu que la caractéristique dominante de l’élément chauffant électrique est qu’il dépend du courant électrique pour chauffer la cartouche de parfum. L’ASFC a ajouté que, lorsque l’élément chauffant électrique et la cartouche de parfum sont conditionnés pour la vente au détail sous forme d’assortiment, c’est l’élément chauffant électrique qui confère à l’ensemble son caractère essentiel, et non pas la cartouche de parfum.

23. Enfin, l’ASFC a soutenu que, si la Règle 3 b) des Règles générales ne permet pas de classer les marchandises en cause, ces dernières devraient être classées en conformité avec la Règle 3 c). L’ASFC a prétendu que, puisque la Règle 3 c) exige que les marchandises soient classées dans la position placée la dernière par ordre de numérotation parmi celles susceptibles d’être prises en considération, elle appuie également le classement des marchandises en cause dans la position no 85.16.

ANALYSE

24. Les divers classements tarifaires sont indiqués dans l’annexe du Tarif des douanes. L’annexe est divisée en sections et en chapitres, ayant chacun ses propres notes, suivis d’une liste de marchandises classées dans des positions et sous-positions et dans des numéros tarifaires individuels. Le Tarif des douanes comporte ses propres règles d’interprétation de l’annexe, que l’on trouve aux articles 10 et 11. L’article 10 du Tarif des douanes indique au Tribunal que le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire doit être effectué en conformité avec les Règles générales et avec les Règles canadiennes 6 . L’article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l’interprétation des positions et des sous-positions de l’annexe, il doit être tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 7 et des Notes explicatives.

25. Les Règles générales, dont il est question à l’article 10 du Tarif des douanes, émanent de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises. Elles sont structurées en cascade. Si le classement de marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il doit alors être tenu compte de la Règle 2, et ainsi de suite. La Règle 1 prévoit ce qui suit :

Le libellé des titres de Sections, de Chapitres ou de Sous-Chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les [règles suivantes].

26. Aux termes de la disposition susmentionnée, le Tribunal doit suivre plusieurs étapes avant d’arriver au classement indiqué des marchandises qui font l’objet d’un appel. Il doit d’abord examiner l’annexe pour déterminer si les marchandises peuvent à première vue être classées d’après les termes d’un numéro tarifaire; deuxièmement, il doit examiner les notes de chapitre ou de section; troisièmement, il doit examiner les Avis de classement et les Notes explicatives pour y trouver des indications supplémentaires quant au classement indiqué.

27. Si la démarche ci-dessus mène au classement des marchandises dans une, et uniquement une, position, l’étape suivante consiste à trouver la sous-position et le numéro tarifaire indiqués des marchandises importées. Si la démarche mène à un classement dans plus d’une position, il faut alors appliquer les autres règles générales en séquence, jusqu’à ce qu’on trouve la position la mieux indiquée. Au besoin, la même démarche est reprise au niveau de la sous-position et du numéro tarifaire, dans ce dernier cas par application des Règles canadiennes.

28. Comme il a déjà été indiqué, la lettre du 11 avril 2005 constitue la décision faisant l’objet de l’appel. Les marchandises en cause sont énumérées selon le code universel des produits dans le corps de la lettre. Mme Byerlay a témoigné que les marchandises en cause étaient pareilles aux pièces A-1, A-3 et A-9 déposées par S.C. Johnson, à l’exception de l’emballage et des parfums. Elle a aussi témoigné qu’aucun des éléments chauffants électriques compris dans les marchandises en cause n’était assorti d’une veilleuse. Au contraire, M. Ward a témoigné que les marchandises en cause qui lui ont été confiées aux fins d’analyse comprenaient des marchandises dont les éléments chauffants électriques étaient assortis de veilleuses. Le Tribunal fait observer que S.C. Johnson et l’ASFC ont toutes deux produit comme pièces des marchandises dont les éléments chauffants électriques étaient assortis de veilleuses et de ventilateurs. S.C. Johnson et l’ASFC ont également mentionné de telles marchandises dans leurs observations écrites et orales. Compte tenu des éléments de preuve mis à sa disposition, le Tribunal conclut que les marchandises en cause comprennent des marchandises dont les éléments chauffants électriques sont assortis de veilleuses et de ventilateurs.

29. Il est évident, grâce à l’information qui se trouve sur l’emballage des pièces déposées en preuve dans le présent appel et au témoignage, que la cartouche de parfum comprise dans les marchandises en cause, qu’elle contienne de l’huile ou du gel, agit sur les odeurs comme l’envisagent les Notes explicatives de la position no 33.07. Il est donc clair que la cartouche de parfum, si on la considère indépendamment de l’élément électrique, pourrait être classée dans la position no 33.07. Les deux parties sont d’accord sur ce fait.

30. Il est également manifeste que l’élément chauffant électrique, lorsqu’il est considéré séparément, peut être classé dans la position no 85.16 à titre d’appareil électrothermique pour usages domestiques. L’élément chauffant électrique transforme l’électricité en chaleur et, donc, est un « dispositif » ou « appareil » « électrothermique ». Selon l’emballage des pièces et les témoignages, l’élément chauffant électrique est « normalement utilisé dans les ménages ». De plus, il ressort des éléments de preuve que les éléments chauffants électriques constituent un « brûle-parfum », une des marchandises expressément nommées dans les Notes explicatives de la position no 85.16 comme étant comprises dans cette position. Les deux parties s’entendent pour dire que l’élément électrique, considéré seul, pourrait être classé dans la position no 85.16.

31. Il s’ensuit que, lorsque l’élément chauffant électrique et la cartouche de parfum sont conditionnés en un ensemble pour la vente au détail, cet ensemble peut être classé à la fois dans la position no 85.16 et dans la position no 33.07. La Règle 3 des Règles générales renseigne sur la façon de procéder au classement dans un tel cas. La Règle 3 a) prévoit que lorsque deux ou plusieurs positions se rapportent chacune à une partie seulement des articles dans le cas de marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, ces positions sont à considérer, au regard de ce produit ou de cet article, comme également spécifiques. Les Notes explicatives de la Règle 3 a) prévoient que, dans ce cas, le classement des articles sera déterminé par application de la Règle 3 b) ou 3 c).

32. La Règle 3 b) des Règles générales prévoit que les marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail sont classées d’après la matière ou l’article qui leur confère leur caractère essentiel. Les Notes explicatives de la Règle 3 b) prévoient que, pour l’application de cette règle, l’expression « présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail » signifie les marchandises qui sont : a) composées d’au moins deux articles différents qui, à première vue, peuvent être classés dans des positions différentes; b) composées de produits ou d’articles présentés ensemble pour la satisfaction d’un besoin spécifique ou l’exercice d’une activité déterminée; c) conditionnées de façon à pouvoir être vendues directement aux utilisateurs sans réemballage. Selon le Tribunal, les marchandises en cause sont des marchandises à considérer comme présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, puisqu’elles sont composées de deux articles différents qui, à première vue, peuvent être classés dans des positions différentes, comme il a déjà été indiqué. Les deux articles ou éléments composants sont conditionnés ensemble pour la satisfaction d’un besoin spécifique ou l’exercice d’une activité déterminée, c.-à-d. désodoriser un local, et sont emballés ensemble de la façon sous laquelle les consommateurs les achèteraient.

33. Les Notes explicatives de la Règle 3 b) des Règles générales prévoient de plus ce qui suit : « [...] Le facteur qui détermine le caractère essentiel varie suivant le genre de marchandises. Il peut, par exemple, ressortir de la nature de la matière constitutive ou des articles qui les composent, de leur volume, leur quantité, leur poids ou leur valeur, de l’importance d’une des matières constitutives en vue de l’utilisation des marchandises [...] »

34. Les pièces déposées auprès du Tribunal indiquent que le volume de l’élément chauffant électrique est supérieur à celui de la cartouche de parfum. Quand au poids, aucun élément de preuve n’a été déposé à cet égard. Pour ce qui est des valeurs relatives de la cartouche de parfum et de l’élément chauffant électrique, Mme Byerlay a fait savoir que ces valeurs étaient à peu près les mêmes.

35. En ce qui a trait aux rôles des éléments constitutifs, il ressort des éléments de preuve que l’élément chauffant électrique dure environ deux ans, tandis que la cartouche de parfum dure environ un ou deux mois8 . Mme Byerlay a déclaré qu’un consommateur qui achète un ensemble constitué d’un élément chauffant électrique et d’une cartouche de parfum achète habituellement des cartouches de rechange pour l’élément chauffant électrique lorsque le parfum est utilisé, plutôt que d’acheter un nouvel ensemble composé d’un élément chauffant électrique et d’une cartouche de parfum. Le Tribunal est d’avis, étant donné que le parfum est épuisé et que la cartouche de parfum est remplacée, que ladite cartouche de parfum a un rôle secondaire par rapport à celui de l’élément chauffant électrique.

36. S.C. Johnson a soutenu que, si ce n’était de la cartouche de parfum, le consommateur n’achèterait pas les marchandises en cause. Toutefois, le Tribunal est d’avis que les éléments de preuve ne corroborent pas nécessairement une telle affirmation. Étant donné la durée de vie sensiblement plus longue de l’élément chauffant électrique, un consommateur qui achète les marchandises en cause en viendra éventuellement à posséder un élément chauffant électrique, mais sans cartouche de parfum. S.C. Johnson répond aux besoins d’un tel consommateur en vendant des cartouches de rechange. De plus, les témoignages entendus par le Tribunal indiquent qu’il se vend sur le marché des cartouches de rechange du type générique qui conviennent aux éléments chauffants électriques vendus par S.C. Johnson. Le consommateur qui veut acheter une cartouche de rechange pourrait décider d’acheter un élément chauffant électrique et une cartouche de parfum séparément si ce choix lui est offert.

37. Le Tribunal est également d’avis que l’élément chauffant électrique joue un rôle clé dans le fonctionnement des marchandises en cause, puisque la chaleur qui se dégage de l’élément chauffant électrique est essentielle à la diffusion du parfum et à son efficacité. L’ajout d’un ventilateur dans certains modèles accroît l’efficacité de cette diffusion. Il s’agit là de caractéristiques importantes des marchandises en cause et elles représentent une évolution notable par rapport à la méthode classique du contenant aérosol qui ne pouvait diffuser qu’une seule dose de parfum à la fois.

38. Quant aux cartouches de parfum, le Tribunal reconnaît que le consommateur pourrait fonder sa décision d’acheter un modèle particulier des marchandises en cause sur le parfum qu’il préfère. Toutefois, la commercialisation des marchandises en cause confirme le rôle prédominant de l’élément chauffant électrique. Les marchandises s’appellent « Branchées », ce qui indique bien qu’elles sont branchées dans une prise électrique. D’autres caractéristiques électriques sont également mises en valeur (ventilateur, veilleuse, prise supplémentaire) dans la commercialisation du produit. Dans la plupart des cas, le nom du parfum figure en plus petits caractères que la description des caractéristiques électriques sur l’emballage des pièces déposées en l’espèce par les parties.

39. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que l’élément chauffant électrique confère aux marchandises en cause leur caractère essentiel.

40. Dans le présent appel, S.C. Johnson a prétendu que la Note 2 de la section VI prescrit le classement des marchandises en cause dans la position no 33.07 à titre de désodorisants de locaux, préparés. D’après la Note 2, les produits qui, en raison, soit de leur présentation sous forme de doses, soit de leur conditionnement pour la vente au détail, relèvent de la position no 33.07, doivent être classés dans cette position. Le Tribunal souscrit à l’interprétation de l’ASFC selon laquelle la Note 2 s’applique aux produits qui, en vrac, ne pourraient pas être classés dans l’une des positions énumérées dans la Note 2, mais en relèvent une fois conditionnés pour la vente au détail. Selon le Tribunal, il ne peut être dit que les marchandises en cause relèvent de la position no 33.07 en raison de leur conditionnement pour la vente au détail. En réalité, comme il a déjà été discuté, lorsqu’une cartouche de parfum n’est pas conditionnée pour la vente au détail avec l’élément chauffant électrique, mais est, plutôt, vendue sous forme de cartouche de rechange, elle peut déjà être classée dans la position no 33.07 à titre de désodorisant de locaux, préparé.

41. Par application de la Règle 3 b) des Règles générales et étant donné la conclusion du Tribunal selon laquelle l’unité chauffante électrique confère aux marchandises en cause leur caractère essentiel, les marchandises en cause doivent être classées d’après l’unité chauffante électrique, à savoir, dans la position no 85.16, et, plus précisément, dans le numéro tarifaire 8516.79.90 à titre d’appareils électrothermiques pour usages domestiques.

42. Pour les motifs qui précèdent, l’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . Conseil de coopération douanière, 2e éd., Bruxelles, 1996 [Notes explicatives].

4 . (25 juin 1999), AP-98-043, AP-98-044 et AP-98-051 (TCCE) [Regal].

5 . Supra, note 2, annexe [Règles générales].

6 . Supra, note 2, annexe.

7 . Conseil de coopération douanière, 2e éd., Bruxelles, 2003 [Avis de classement].

8 . Une telle situation est sensiblement la même que lorsqu’un consommateur achète une lampe dotée d’une ampoule électrique. La lampe durera habituellement beaucoup plus longtemps que l’ampoule.