1068827 ONTARIO INC. FAISANT AFFAIRE SOUS LE NOM DE GRACE MOTORS

Décisions


1068827 ONTARIO INC. FAISANT AFFAIRE SOUS LE NOM DE GRACE MOTORS
c.
MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-2007-024

Décision et motifs rendus
le vendredi 11 septembre 2008


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 3 juillet 2008, aux termes de l’article 81.19 de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, c. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 25 octobre 2007 concernant un avis d’opposition signifié aux termes de l’article 81.17 de la Loi sur la taxe d’accise.

ENTRE

 

1068827 ONTARIO INC. FAISANT AFFAIRE SOUS LE NOM DE GRACE MOTORS

Appelante

ET

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Diane Vincent
Diane Vincent
Membre

Pasquale Michaele Saroli
Pasquale Michaele Saroli
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 3 juillet 2008

   

Membres du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

 

Diane Vincent, membre

 

Pasquale Michaele Saroli, membre

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Jidé Afolabi

   

Gestionnaire, Bureau du greffe :

Gillian Burnett

   

Agent du greffe :

Stéphanie Doré

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseiller/représentant

   

1068827 Ontario Inc. faisant affaire sous le nom de Grace Motors

John Vink

   

Intimé

Conseiller/représentant

   

Ministre du Revenu national

Sharon Johnston

TÉMOIN :

John Vink
Président
1068827 Ontario Inc. faisant affaire sous le nom de Grace Motors

 

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté aux termes de l’article 81.19 de la Loi sur la taxe d’accise 1 à l’égard d’une décision rendue par le ministre du Revenu national (le ministre) le 27 octobre 2007 aux termes de l’article 81.17 de la Loi.

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si la taxe d’accise est imposable sur des véhicules d’occasion munis de climatiseurs qui sont importés au Canada, comme l’a soutenu le ministre, ou si la taxe d’accise est limitée aux importations de véhicules neufs munis de climatiseurs, comme l’a soutenu 1068827 Ontario Inc. faisant affaire sous le nom de Grace Motors (Grace Motors). Une décision en faveur de l’allégation de Grace Motors lui accorderait un droit de remboursement de la taxe d’accise imposée par le ministre et payée par elle aux termes de l’article 23 et de l’annexe I de la Loi pour la période allant du 1er avril 2005 jusqu’au 30 avril 2006.

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

3. Suite à l’importation des marchandises en cause et à l’imposition de la taxe d’accise par le ministre, Grace Motors a demandé un remboursement le 1er avril 2007. Grace Motors a indiqué que les marchandises en cause consistaient en des véhicules d’occasion auxquels la taxe d’accise imposée ne s’applique pas contrairement aux véhicules neufs auxquels la taxe d’accise imposée s’appliquerait.

4. Dans un avis de détermination daté du 27 avril 2007, le ministre a rejeté la demande. Le 9 mai 2007, Grace Motors a déposé un avis d’opposition à l’égard de l’avis de détermination. Le 25 octobre 2007, le ministre a rejeté l’opposition de Grace Motors et a confirmé la détermination du 27 avril 2007. Le 14 janvier 2008, Grace Motors a interjeté appel auprès du Tribunal.

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

5. Le ministre a affirmé la pertinence du paragraphe 23(1) de la Loi, ainsi que de l’article 7 de l’annexe I, en ce qui concerne les faits du présent appel. Ces dispositions prévoient ce qui suit :

23. (1) Sous réserve des paragraphes (6) à (8), lorsque les marchandises énumérées à l’annexe I sont importées au Canada, ou y sont fabriquées ou produites, puis livrées à leur acheteur, il est imposé, prélevé et perçu, outre les autres droits et taxes exigibles en vertu de la présente loi ou de toute autre loi, une taxe d’accise sur ces marchandises, calculée selon le taux applicable figurant à l’article concerné de cette annexe. Lorsqu’il est précisé que ce taux est un pourcentage, il est appliqué à la valeur à l’acquitté ou au prix de vente, selon le cas.

7. Les climatiseurs conçus pour être installés dans les automobiles, les familiales, les fourgonnettes ou les camions, qu’ils soient :

a) ou bien distincts;

b) ou bien inclus à titre d’équipement installé en permanence dans ces véhicules au moment de la vente ou de l’importation par le fabricant ou l’importateur, selon le cas, cent dollars. [...]

6. Ainsi, le paragraphe 23(1) de la Loi précise que, lorsque les marchandises énumérées à l’annexe I sont soit importées soit fabriquées ou produites au Canada, une taxe d’accise est imposée, prélevée et perçue selon le taux figurant dans l’annexe. Le taux applicable à des climatiseurs pour véhicules figurant à l’article 7 de l’annexe est de 100 $.

7. Le paragraphe 23(2) de la Loi poursuit en précisant le moment où la taxe d’accise sur de telles marchandises doit être acquittée et qui doit l’acquitter. La disposition prévoit ce qui suit :

(2) Lorsque les marchandises sont importées, la taxe d’accise prévue par le paragraphe (1) est payée conformément à la Loi sur les douanes, et lorsque les marchandises sont de fabrication ou de provenance canadienne et vendues au Canada, cette taxe d’accise est exigible du fabricant ou du producteur au moment de la livraison de ces marchandises à leur acheteur.

8. Ainsi, dans les cas où de telles marchandises sont importées, la taxe d’accise est payée, conformément aux dispositions de la Loi sur les douanes 2 , au moment de l’importation par l’importateur, le propriétaire ou toute autre personne passible de droits3 . Dans les cas où de telles marchandises sont fabriquées ou produites au Canada, la taxe d’accise est payée par le fabricant ou le producteur au moment de la livraison des marchandises à l’acheteur.

9. La Loi autorise certaines exemptions du paiement de la taxe d’accise imposée aux termes du paragraphe 23(1) de la Loi. Les paragraphes 23(6) à 23(8) donnent les circonstances générales où les marchandises énumérées à l’annexe I peuvent être soit importées soit fabriquées ou produites au Canada sans qu’elles ne soient assujetties à la taxe d’accise. En particulier, aux termes du paragraphe 23(6), la taxe d’accise n’est pas exigible dans le cas de marchandises achetées ou importées par un marchand en gros titulaire d’une licence dans le but de les revendre; aux termes du paragraphe 23(7), la taxe d’accise n’est pas exigible dans le cas de marchandises achetées ou importées par un fabricant titulaire d’une licence qui sont utilisées dans la fabrication de marchandises assujetties à la taxe et dans le cas de véhicules neufs vendus à un fabricant titulaire d’une licence qui vend en gros; aux termes du paragraphe 23(8), la taxe d’accise n’est pas exigible dans divers autres cas, notamment quand les marchandises achetées ou importées sont destinées à être revendues à une boutique hors taxe, à être exposées ou à un usage personnel s’il s’agit de tabac.

10. En plus des exemptions décrites ci-dessus, l’article 8 de l’annexe I de la Loi exclut l’imposition de la taxe d’accise qui normalement s’appliquerait dans certains cas aux termes de l’article 7 de l’annexe I. Ainsi, la taxe d’accise n’est pas imposée, prélevée et perçue si le véhicule importé ou fabriqué muni d’un climatiseur est une ambulance ou un corbillard, s’il est vendu dans des conditions qui feraient de la vente une fourniture détaxée conformément aux termes des dispositions de la Loi concernant la taxe sur les produits et services ou s’il est destiné à être utilisé par un service diplomatique.

11. En résumé, les paragraphes 23(1) et 23(2) de la Loi prévoient une taxe d’accise et indiquent le moment où celle-ci doit être payée et quelle partie y est assujettie, tandis que les paragraphes 23(6) à 23(8) et l’article 8 de l’annexe I précisent les exemptions et les exclusions du paiement de la taxe. L’article 7 de l’annexe I fixe à 100 $ la taxe d’accise qui s’applique aux climatiseurs conçus pour être installés dans des véhicules.

12. Grace Motors a fait valoir la pertinence du paragraphe 2(4.1) de la Loi en ce qui concerne les faits du présent appel. Cette disposition prévoit ce qui suit :

(4.1) Pour l’application de la présente loi, le fabricant ou producteur, au sens de l’alinéa g) de la définition de ce terme au paragraphe (1), à l’exception d’un membre d’une catégorie de petits fabricants ou producteurs exemptée, par règlement d’application du paragraphe 54(2), de l’obligation de demander une licence en vertu du paragraphe 54(1), qui importe au Canada des véhicules automobiles neufs conçus pour servir sur les routes, ou leur châssis, est réputé en être le fabricant ou producteur au Canada, et non leur importateur; les véhicules ou les châssis sont réputés être des marchandises fabriquées ou produites au Canada et non des marchandises importées.

13. L’alinéa g) de la définition du terme « fabricant ou producteur » du paragraphe 2(1) de la Loi comprend « toute personne qui importe au Canada des véhicules automobiles neufs conçus pour servir sur les routes, ou leur châssis ». Bref, le paragraphe 2(4.1) fait fonction d’une disposition déterminative qui permet à une certaine catégorie d’importateurs de véhicules neufs d’être considérés comme des fabricants ou des producteurs au Canada et aux marchandises qu’ils importent d’être considérées comme ayant été fabriquées ou produites au Canada.

PLAIDOIRIE

14. Grace Motors a soutenu que, dans le cas de véhicules, l’assujettissement à la taxe d’accise prévue aux paragraphes 23(1) et 23(2) de la Loi se limite aux importations de véhicules neufs munis de climatiseurs aux termes du paragraphe 2(4.1). À cet égard, Grace Motors a fait valoir qu’aux termes du paragraphe 2(4.1), les importateurs de véhicules neufs, qui sont considérés comme des fabricants ou des producteurs canadiens, sont la catégorie de personnes assujetties au paiement de la taxe d’accise, excluant ainsi les importateurs de véhicules d’occasion.

15. À l’appui de son argument, Grace Motors a déposé une lettre datée du 9 juin 2008 que lui a expédiée l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) au sujet d’un remboursement concernant des véhicules d’occasion munis de climatiseurs importés par Grace Motors qui ne font pas l’objet de l’espèce. Grace Motors a interprété la lettre comme signifiant que le ministre était d’accord avec Grace Motors que la taxe d’accise n’est pas imposable dans le cas de véhicules d’occasion importés au Canada.

16. Grace Motors et le ministre étaient tous les deux d’accord que Grace Motors n’est pas un marchand en gros titulaire d’une licence et que, par conséquent, elle ne remplit pas les conditions requises pour bénéficier de l’exemption aux termes du paragraphe 23(6) de la Loi décrites ci-dessus. Ainsi, le paragraphe 2(4.1) est l’unique base sur laquelle s’appuie Grace Motors pour étayer son argumentation en l’espèce.

17. Le ministre a soutenu que le paragraphe 23(1) de la Loi, conjointement avec l’article 7 de l’annexe I, prévoit une taxe d’accise sur les climatiseurs installés dans des véhicules sans faire de distinction entre véhicules neufs ou d’occasion. À cet égard, le ministre a affirmé que « tout véhicule importé au Canada pour la première fois, muni d’un climatiseur, est assujetti à la taxe d’accise, que le véhicule soit neuf ou d’occasion4  » [traduction].

18. Le ministre a de plus soutenu que le paragraphe 23(2) de la Loi spécifie le moment auquel la taxe doit être acquittée ainsi que les parties qui y sont assujetties et que l’importateur figure explicitement parmi ceux-ci.

DÉCISION

19. L’unique question dans le présent appel consiste à déterminer si la taxe d’accise imposée par le ministre, en vertu de l’effet conjugué des paragraphes 23(1) et 23(2) de la Loi et de l’article 7 de l’annexe, est imposable sur des véhicules d’occasion munis de climatiseurs importés au Canada.

20. Le Tribunal est d’accord avec la façon dont le ministre interprète la loi et, sous ce rapport, a été incapable de trouver dans le libellé des dispositions législatives spécifiques ou dans leur contexte à l’appui de l’interprétation que des climatiseurs installés à bord de véhicules d’occasion sont exempts des obligations de la taxe d’accise. À cet égard, le Tribunal fait remarquer que les dispositions pertinentes ne font aucune distinction entre véhicules neufs et d’occasion et que Grace Mortors n’a pas soutenu que les exemptions ou exclusions, telles que résumées ci-dessus, s’appliquent en l’espèce. De plus, le paragraphe 23(2) de la Loi indique clairement que la taxe d’accise doit être payée « [...] conformément à la Loi sur les douanes [...] » par l’importateur, et la Loi sur les douanes spécifie que « [l]es marchandises importées sont passibles de droits à compter de leur importation [...] ».

21. Le Tribunal conclut que le paragraphe 2(4.1) de la Loi, étant une disposition qui considère une certaine catégorie d’importateurs de véhicules neufs comme des fabricants ou des producteurs au Canada et les marchandises qu’ils importent comme des marchandises fabriquées ou produites au Canada, ne fait que reporter l’imposition de la taxe d’accise du moment de l’importation au moment de la livraison à l’acheteur et, dans le contexte de la Loi, n’a pas l’effet de limiter l’application de la taxe uniquement aux climatiseurs installés à bord de véhicules neufs. À cet égard, les « véhicules neufs » sont clairement un sous-ensemble d’« automobiles » au sens général, et l’article 7 de l’annexe I prévoit que la taxe d’accise doit être acquittée sur les climatiseurs installés à bord d’automobiles.

22. Grace Motors a porté à l’attention du Tribunal une lettre qu’elle a déposée comme preuve, datée du 9 juin 2008, qui lui a été expédiée par l’ARC. Dans cette lettre, l’ARC approuve la demande de remboursement de Grace Motors ayant trait à la taxe d’accise acquittée sur des climatiseurs installés à bord d’automobiles d’occasion importées qui ne font pas l’objet de l’espèce. La position de l’ARC dans cette lettre semble en contradiction avec sa position en l’espèce. La responsabilité du Tribunal prévue par la loi est de déterminer si l’ARC a eu raison d’imposer une taxe d’accise sur les importations en cause. Bien qu’il ne soit pas indiqué pour le Tribunal de prendre en compte des décisions de l’ARC concernant des cas d’importation similaires pour en arriver à sa décision, le Tribunal fait remarquer que la lettre de l’ARC semble avoir induit Grace Motors à mal interpréter les complexités de la Loi.

23. Pour les motifs qui précèdent, l’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985, c. E-15 [Loi].

2 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1.

3 . À ce sujet, le paragraphe 17(1) de la Loi sur les douanes prévoit que « [l]es marchandises importées sont passibles de droits à compter de leur importation jusqu’à paiement ou suppression des droits » [nos italiques].

4 . Mémoire de l’intimé, para. 22.