LES ENTREPÔTS COSTCO


LES ENTREPÔTS COSTCO
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2008-031

Décision et motifs rendus
le mercredi 20 janvier 2010


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 17 novembre 2009, aux termes de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 19 décembre 2008, concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

 

LES ENTREPÔTS COSTCO

Appelante

ET

 

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est admis.

Stephen A. Leach
Stephen A. Leach
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 17 novembre 2009

   

Membre du Tribunal :

Stephen A. Leach, membre présidant

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Nick Covelli

   

Directeur de la recherche :

Randy Heggart

   

Agent de la recherche :

Denise Bergeron

   

Gestionnaire, Bureau du greffe :

Michel Parent

   

Agent du greffe :

Lindsay Wright

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseiller/représentant

   

Les entrepôts Costco

Michael Sherbo

   

Intimé

Conseiller/représentant

   

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Lorne Ptack

TÉMOIN :

Kevin Heasley
Copropriétaire et technicien
Ek’s Repair

 

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté par Les entrepôts Costco (Costco) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard d’une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), datée du 19 décembre 2008, concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4).

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si des articles importés par Costco sous le nom « sommier/tabouret roulant 3 en 1 avec plateau » (les marchandises en cause) sont correctement classés dans le numéro tarifaire 9403.20.00 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre d’autres meubles en métal, comme l’a déterminé l’ASFC, ou doivent être classés dans le numéro tarifaire 9401.71.90 à titre d’autres sièges rembourrés, avec bâtis en métal ou, à titre de solution de rechange, dans le numéro tarifaire 8716.80.10 à titre d’autres véhicules non automobiles pour le transport de personnes, comme le soutient Costco.

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

3. Le 27 novembre 2007, l’ASFC rendait une décision anticipée aux termes de l’alinéa 43.1(1)c) de la Loi concernant le classement tarifaire des marchandises en cause. L’ASFC concluait que les marchandises en cause étaient correctement classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00.

4. Le 11 décembre 2007, Costco demandait que l’ASFC réexamine la décision anticipée, soutenant que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 9401.71.90 ou, à titre de solution de rechange, dans le numéro tarifaire 8716.80.10 aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi.

5. Le 19 décembre 2008, l’ASFC rendait une décision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi, confirmant le classement des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 9403.20.00.

6. Le 9 mars 2009, Costco déposait un appel auprès du Tribunal aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi.

7. Le Tribunal tenait une audience publique à Ottawa (Ontario) le 17 novembre 2009.

8. M. Kevin Heasley, copropriétaire et technicien, Ek’s Repair, témoignait au nom de Costco.

MARCHANDISES EN CAUSE

9. Les marchandises en cause, l’article no 131951, sont faites de bâtis en métal, rembourrées en cuir et munies de roulettes et de plateaux. Ces marchandises à plusieurs fonctions peuvent être transformées en tabourets roulants avec plateaux, tabourets de style sommiers roulants et en sommiers roulants.

10. Costco n’a fourni aucune pièce.

11. L’ASFC a déposé un « sommier/tabouret roulant 3 en 1 avec plateau » comme pièce.

ANALYSE

Cadre législatif

12. Dans le cadre des appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi concernant les questions de classement tarifaire, le Tribunal détermine le classement tarifaire approprié des marchandises en cause conformément aux règles d’interprétation prescrites.

13. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conçue pour se conformer au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises élaboré par l’Organisation mondiale des douanes3 . L’annexe est divisée en sections et en chapitres, et chaque chapitre contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires. Les sections et chapitres peuvent comprendre des notes concernant leur interprétation. Les articles 10 et 11 du Tarif des douanes prescrivent la méthode que le Tribunal doit appliquer pour l’interprétation de l’annexe afin de déterminer le classement tarifaire approprié.

14. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « [...] le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[4] et les Règles canadiennes[5] énoncées à l’annexe. »

15. Aux fins du présent appel, le Tribunal doit suivre l’article 10 du Tarif des douanes, qui prévoit que le classement des marchandises importées doit être déterminé conformément aux Règles générales et aux Règles canadiennes.

16. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade, de sorte que si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il faut alors tenir compte de la Règle 2, et ainsi de suite6 . Le classement commence donc par l’application de la Règle 1, qui prévoit ce qui suit : « [...] le classement [est] déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes. »

17. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « Pour l’interprétation des positions et sous-positions, il est tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[7] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[8] et de leurs modifications, publiés par le Conseil de coopération douanière (Organisation mondiale des douanes). » Par conséquent, contrairement aux notes de sections et de chapitres, les Notes explicatives n’ont pas force exécutoire pour le Tribunal dans son classement des marchandises importées. Toutefois, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il faut respecter ces notes, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire, puisqu’elles servent de guide d’interprétation aux fins du classement tarifaire au Canada9 .

18. Après que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle les marchandises doivent être classées, l’étape suivante consiste à déterminer la sous-position et le numéro tarifaire appropriés, par application de la Règle 6 des Règles générales dans le cas de la sous-position et des Règles canadiennes dans le cas du numéro tarifaire.

Classement tarifaire en cause

19. Aux fins du présent appel, la nomenclature pertinente du Tarif des douanes prévoit ce qui suit :

Section XVII

MATÉRIEL DE TRANSPORT

[...]

Chapitre 87

VOITURES AUTOMOBILES, TRACTEURS, CYCLES ET AUTRES VÉHICULES TERRESTRES, LEURS PARTIES ET ACCESSOIRES

[...]

87.16 Remorques et semi-remorques pour tous véhicules; autres véhicules non automobiles; leurs parties.

[...]

8716.80 -Autres véhicules

8716.80.10 - - -Pour le transport de personnes

[...]

Section XX

MARCHANDISES ET PRODUITS DIVERS

Chapitre 94

MEUBLES; MOBILIER MÉDICO-CHIRURGICAL; ARTICLES DE LITERIE ET SIMILAIRES; APPAREILS D’ÉCLAIRAGE NON DÉNOMMÉS NI COMPRIS AILLEURS; LAMPES-RÉCLAMES, ENSEIGNES LUMINEUSES, PLAQUES INDICATRICES LUMINEUSES ET ARTICLES SIMILAIRES; CONSTRUCTIONS PRÉFABRIQUÉES

[...]

94.01 Sièges (à l’exclusion de ceux du no 94.02), même transformables en lits, et leurs parties.

[...]

-Autres sièges, avec bâti en métal :

9401.71 - -Rembourrés

[...]

9401.71.90 - - -Autres

[...]

94.03 Autres meubles et leurs parties.

[...]

9403.20.00 -Autres meubles en métal

Classement des marchandises en cause

20. Afin de déterminer le classement tarifaire approprié des marchandises en cause, le Tribunal doit d’abord déterminer si les notes de section ou de chapitre de l’annexe du Tarif des douanes exigent que les marchandises en cause soient classées dans une position particulière conformément à la Règle 1 des Règles générales.

21. Les deux parties conviennent que les marchandises en cause peuvent être utilisées comme sièges rembourrés, avec bâtis en métal et comme véhicules non automobiles pour le transport de personnes10 .

22. L’ASFC soutient que les marchandises en cause peuvent être classées seulement dans la position no 94.03. Selon l’ASFC, les marchandises en cause sont visées par la définition de « sièges » dans la position no 94.01 et par la définition d’« autres meubles » dans la position no 94.03, et qu’elles correspondent aussi à la description de véhicules « non automobiles » dans la position no 87.16. L’ASFC prétend que chaque position décrit une fonction des marchandises en cause et qu’aucune fonction à elle seule n’est plus spécifique que les autres, conformément à la Règle 3 a) des Règles générales. L’ASFC ajoute qu’aucune fonction à elle seule ne définit la caractéristique essentielle des marchandises en cause conformément à la Règle 3 b). Par conséquent, l’ASFC affirme que le classement approprié des marchandises en cause, conformément à la Règle 3 c), est la position qui tombe en dernier dans l’ordre numérique, c’est-à-dire la position no 94.0311 .

23. Costco soutient que les marchandises en cause sont visées par les termes du numéro tarifaire 9401.71.90 à titre d’autres sièges rembourrés, avec bâtis en métal, conformément à la Règle 1 des Règles générales. Costco ajoute que la position no 94.01 couvre tous les sièges et que les marchandises en cause ne sont pas exclues de la position. Les marchandises en cause sont commercialisées et vendues en tant que sièges. Les marchandises en cause ne peuvent pas être classées dans la position no 94.03 à titre d’autres meubles puisqu’elles sont déjà visées dans la position no 94.01 et que la position no 94.03 vise expressément les meubles non visés par les positions antérieures. À titre de solution de rechange, Costco fait valoir que les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 87.16 à titre de véhicules dirigés à la main puisqu’on les utilise pour transporter des personnes d’un endroit à l’autre en les poussant avec les mains et les pieds12 .

24. Le Tribunal a entendu la déposition de M. Heasley, qui a témoigné au nom de Costco. M. Heasley explique au Tribunal la façon dont il utilise un article similaire aux marchandises en cause, quotidiennement, pour se déplacer autour d’un véhicule, pour effectuer des travaux de carrosserie ou d’autres réparations à long terme sur le côté d’une voiture. M. Heasley affirme que les marchandises en cause se trouvent dans tous les garages et qu’elles fournissent de la mobilité et du confort. Elles sont rembourrées, ont un appui-tête et sont munies de roulettes et de plateaux servant à porter des petites pièces et des outils. M. Heasley déclare qu’il utilise quotidiennement les marchandises en cause, généralement dans la position sommier, quoiqu’il utilise aussi les deux autres modes, siège et tabouret, presque aussi souvent13 .

25. Afin de déterminer légalement le classement approprié des marchandises en cause, le Tribunal a examiné la Règle 1 des Règles générales par renvoi aux termes des positions et aux notes de section ou de chapitre pertinentes.

26. Le Tribunal a examiné les Notes explicatives suivantes :

SECTION XVII

MATÉRIEL DE TRANSPORT

[...]

CHAPITRE 87

VOITURES AUTOMOBILES, TRACTEURS, CYCLES ET AUTRES VÉHICULES TERRESTRES, LEURS PARTIES ET ACCESSOIRES

[...]

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

[...] le présent Chapitre comprend l’ensemble des véhicules terrestres. On y range donc :

[...]

7) Les remorques et semi-remorques pour tous véhicules et autres véhicules non automobiles conçus soit pour être remorqués par d’autres véhicules, soit pour être tirés ou poussés à la main, soit pour être traînés par des animaux (n° 87.16).

[...]

87.16 - Remorques et semi-remorques pour tous véhicules; autres véhicules non automobiles; leurs parties.

[...]

8716.80 – Autres véhicules

[...]

À l’exception des véhicules visés dans les positions précédentes, cette position comprend un ensemble de véhicules non automobiles à une ou plusieurs roues pour le transport des personnes ou des marchandises.

[...]

B) Les véhicules dirigés à la main ou poussés à l’aide du pied.

On peut citer comme appartenant à ce groupe :

1) Les chariots de manutention de tous types, y compris ceux spécialisés pour certaines industries (industries textiles, industries céramiques, laiteries, etc.).

27. Les deux parties conviennent que les marchandises en cause peuvent être classées à titre de véhicules conformément aux Notes explicatives de la position no 87.16.

28. Costco fonde aussi son exposé sur la définition que donne le dictionnaire du terme « vehicle » (véhicule) : « Moyen de porter ou de transporter quelque chose »14 [traduction].

29. L’ASFC convient que les utilisateurs des marchandises en cause peuvent manœuvrer en les poussant avec les mains ou les pieds et peuvent passer d’une place à l’autre, conformément aux Notes explicatives de la position no 87.16 pour les véhicules non automobiles15 .

30. Le Tribunal est d’accord avec les deux parties et estime que les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 87.16 à titre d’autres véhicules non automobiles pour le transport de personnes.

31. Le Tribunal analyse ensuite les Notes explicatives suivantes :

SECTION XX

MARCHANDISES ET PRODUITS DIVERS

CHAPITRE 94

MEUBLES; MOBILIER MÉDICO-CHIRURGICAL; ARTICLES DE LITERIE ET SIMILAIRES; APPAREILS D’ÉCLAIRAGE NON DÉNOMMÉS NI COMPRIS AILLEURS; LAMPES-RÉCLAMES, ENSEIGNES LUMINEUSES, PLAQUES INDICATRICES LUMINEUSES ET ARTICLES SIMILAIRES; CONSTRUCTIONS PRÉFABRIQUÉES

[...]

2.- Les articles (autres que les parties) visés dans les nos 94.01 à 94.03 doivent être conçus pour se poser sur le sol.

[...]

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

Le présent Chapitre englobe [...] :

1) L’ensemble des meubles, ainsi que leurs parties (nos 94.01 à 94.03).

[...]

Au sens du présent Chapitre, on entend par meubles ou mobilier :

A) Les divers objets mobiles, non compris dans des positions plus spécifiques de la Nomenclature qui sont conçus pour se poser sur le sol [...] et qui servent [...] un but principalement utilitaire [...].

[...]

Entrent dans les nos 94.01 à 94.03 les articles d’ameublement en toutes matières : bois, osier, bambou, rotin, matières plastiques, métaux communs, verre, cuir, pierre, céramique, etc., même rembourrés ou gainés, [...] montés sur roulettes, etc.

[...]

94.01 - Sièges (à l’exclusion de ceux du no 94.02), même transformables en lits, et leurs parties (+).

[...]

- Autres sièges, avec bâti en métal :

9401.71 -- Rembourrés

[...]

La présente position couvre, sous réserve des exclusions ci-après, l’ensemble des sièges (y compris ceux pour véhicules, répondant aux conditions de la Note 2 du présent Chapitre) et notamment :

Les chaises (y compris les chaises transformables en escabeaux), les chaises et sièges d’enfants (y compris les sièges spéciaux pour automobiles), les chaises longues (même celles pour malades, comportant des résistances chauffantes), les transatlantiques, les pliants, les tabourets (y compris ceux pour pianos, pour dessinateurs, dactylos, etc.), les bancs et banquettes, les tabourets-poufs, les bergères, les canapés, les fauteuils, les divans, sofas, ottomanes et sièges similaires.

32. Costco soutient que, selon les documents descriptifs, les illustrations, les instructions et les documents d’assemblage, les marchandises en cause sont vendues et commercialisées à titre de sièges, plus particulièrement à titre de tabourets de style sommier roulant et de tabourets roulants.

33. Costco fait valoir que selon les Notes explicatives de la position no 94.01, tous les sièges sont prévus dans cette position, y compris les sièges à double usage, comme les sièges transformables en lits. Par conséquent, Costco soutient que les marchandises en cause peuvent être classées à première vue à titre de sièges dans la position no 94.0116 .

34. L’ASFC affirme que les marchandises en cause sont visées par la définition de « meubles » dans les Notes explicatives au chapitre 94. Toutefois, l’ASFC déclare que les marchandises en cause sont une combinaison d’un sommier d’automobile et d’un siège avec plateau et que même si ceux-ci sont prévus au chapitre 94, l’ASFC ne soutient pas leur classement dans la position no 94.01.

35. Le Tribunal est d’accord avec la position susmentionnée de Costco et conclut donc que les marchandises en cause peuvent aussi être classées dans la position no 94.01 à titre d’autres sièges rembourrés avec bâtis en métal.

36. Les Notes explicatives de la position no 94.03 prévoient ce qui suit :

94.03 - Autres meubles et leurs parties.

[...]

9403.20 - Autres meubles en métal

[...]

Parmi les meubles de cette position [...] sont groupés [...] les articles non repris dans les positions précédentes [et] leurs parties [...].

37. L’ASFC prétend que la fonction de sommier des marchandises en cause est visée dans la position no 94.03 puisque aucun autre meuble ne décrit les marchandises en cause.

38. Le Tribunal est d’avis que la position no 94.03 ne s’applique pas aux marchandises en cause parce que cette position particulière vise les meubles non visés par les positions antérieures. Comme le Tribunal a déjà conclu que la position no 94.01 s’applique, il ne tient pas compte de la position no 94.03 dans son analyse.

39. Par conséquent, le Tribunal estime que les marchandises en cause peuvent être classées dans plus d’une position.

40. Étant donné que les marchandises en cause peuvent à première vue être classées dans deux positions, la Règle 3 a) des Règles générales doit s’appliquer. La première phrase de la Règle 3 a) prévoit que « [l]a position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d’une portée plus générale ».

41. L’ASFC soutient que les marchandises en cause possèdent deux fonctions : celle de meubles et celle de véhicules à déplacer sous un objet au moyen du sommier ou autour et le long des côtés d’un objet en position assise sur le tabouret roulant. L’ASFC croit qu’aucune de ces fonctions à elle seule n’est supérieure à l’autre et soutient donc que la Règle 3 c) des Règles générales doit être utilisée de manière à classer les marchandises en cause en dernier dans l’ordre numérique, à savoir dans la position no 94.03.

42. L’ASFC invoque à l’appui de sa position Calego International Inc. c. Sous-M.R.N. 17 , où le Tribunal a classé des articles en peluche selon la Règle 3 c) des Règles générales et a déclaré ce qui suit :

[...] le Tribunal est d’avis que les marchandises en cause sont à la fois des sacs à dos, comme elles peuvent servir à porter des objets, et des jouets, puisqu’elles sont divertissantes. Puisque la description dans chacune des positions visées ne précise que l’une de ces fonctions, le Tribunal est d’avis que les deux positions sont également descriptives aux fins de la Règle 3 a)18 .

43. L’ASFC ajoute que dans Zellers Inc. c. Sous-M.R.N. 19 , des étreinte-oreillers ont été classées selon la Règle 3 c) des Règles générales et que le Tribunal a déclaré ce qui suit :

Bien que l’analyse des éléments de preuve effectuée par le Tribunal porte ce dernier à conclure que les marchandises en cause correspondent davantage à un jouet qu’à un oreiller ou à un coussin, la description de l’un n’est pas plus spécifique ni plus précise que celle de l’autre. Tout compte fait, le Tribunal ne peut donc trancher cette affaire en appliquant la Règle 3 a) des Règles générales20 .

44. Costco invoque Praher Canada Products Ltd. c. Sous-M.R.N.D.A. 21 concernant diverses pièces de valve pour souligner la description spécifique des marchandises en cause. Plus précisément, le Tribunal, dans cette décision, déclare ce qui suit :

Le Tribunal est d’avis que le numéro tarifaire proposé par l’intimé aux fins du classement des articles de robinetterie primaires, soit celui des articles de robinetterie « Actionnés à la main », est plus spécifique que le numéro tarifaire résiduel « Autres » proposé par l’appelant. Par conséquent, conformément à la Règle 3 a) des Règles générales et à la Règle 1 des Règles canadiennes, le Tribunal conclut que les articles de robinetterie primaires peuvent être classés dans le numéro tarifaire 8481.80.9122 .

45. Le Tribunal est d’avis que même si les marchandises en cause ont plusieurs fonctions, elles sont plus précisément décrites dans la position no 94.01 à titre de sièges rembourrés, avec bâtis en métal, à d’autres usages. Le Tribunal ne trouve pas de Notes explicatives excluant les marchandises en cause de ce classement.

46. Le Tribunal a examiné le témoignage de M. Heasley selon lequel aucune position ni utilisation (s’asseoir, se déplacer, entreposer, s’étendre) ne prédomine puisque les mécaniciens ont une grande variété d’utilisations pour les marchandises en cause. Selon M. Heasley, les marchandises en cause sont appréciées par les mécaniciens en raison de leur confort (soutenir le dos tout en servant de tabourets, sièges ou sommiers roulants) et de leur mobilité (utiliser les roulettes pour passer facilement d’une place à l’autre autour ou en dessous d’un véhicule automobile)23 .

47. Le Tribunal conclut que si les marchandises en cause sont utilisées également à titre de tabourets, de sièges et de sommiers roulants, comme le déclare M. Heasley, la description la plus précise des marchandises en cause est celle de sièges (deux des trois positions possibles des marchandises en cause se trouvent dans la position no 94.01), qui sont transformables en lits (sommiers roulants).

48. Dans Smith & Nephew Inc. c. Sous-M.R.N.D.A. 24 , le Tribunal a estimé qu’une « table d’opération » est plus spécifique que d’« autres » mobiliers pour la médecine ou la chirurgie et a déclaré ce qui suit :

Puisqu’il a été conclu que les lits d’accouchement paraissent devoir être classés dans deux ou plusieurs numéros tarifaires, comme le stipule la Règle 3 des Règles générales, la Règle 3 a) prévoit que la position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d’une portée plus générale. Le Tribunal estime qu’une « table d’opération » est plus spécifique que d’« autres » mobiliers pour la médecine ou la chirurgie25 .

49. Dans Laxus Products Ltd. c. Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada 26 , le Tribunal a conclu que le terme « autres chaussures » était plus précis que le terme « jouets » à l’égard des pantoufles pour enfants sous forme d’animaux et a déclaré ce qui suit :

Le Tribunal est d’avis que, bien que le terme « jouet » englobe une vaste gamme de marchandises, la portée du terme « chaussure » se limite aux marchandises portées au pied27 .

50. Par conséquent, aux termes de la Règle 3 a) des Règles générales, le Tribunal détermine que la description la plus spécifique des marchandises en cause se trouve dans la position no 94.01, « Sièges (à l’exclusion de ceux du no 94.02), même transformables en lits, et leurs parties » et que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 9401.71.90 à titre d’autres sièges rembourrés, avec bâtis en métal, pour d’autres usages.

DÉCISION

51. Compte tenu de ce qui précède, l’appel est admis.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi]

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . Le Canada est signataire de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

4 . L.C. 1997, c. 36, annexe [Règles générales].

5 . L.C. 1997, c. 36, annexe.

6 . Les Règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position (c.-à-d. à quatre chiffres). En vertu de la Règle 6 des Règles générales, les Règles 1 à 5 s’appliquent au classement au niveau de la sous-position (c.-à-d. à six chiffres). De la même façon, les Règles canadiennes rendent les Règles 1 à 5 des Règles générales applicables au classement au niveau du numéro tarifaire (c.-à-d. à huit chiffres).

7 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003.

8 . Organisation mondiale des douanes, 4e éd., Bruxelles, 2007 [Notes explicatives].

9 . Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII), aux para. 13, 17.

10 . Mémoire de l’appelante aux pp. 7, 12; mémoire de l’intimé à la p. 9.

11 . L’ASFC proposait initialement un autre classement pour les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 9401.71.10 à titre de sièges rembourrés munis de bâtis en métal pour usages domestiques mais a indiqué avant l’audience qu’elle ne désirait plus proposer un autre classement. Mémoire de l’intimé à la p. 21.

12 . Mémoire de l’appelante aux pp. 9, 12.

13 . Transcription de l’audience publique, 17 novembre 2009, aux pp. 8, 10, 13, 14.

14 . Mémoire de l’appelante au para. 49.

15 . Mémoire de l’intimé aux para. 43-45.

16 . Mémoire de l’appelante aux para. 20, 24-26.

17 . (29 mai 2000), AP-98-102 (TCCE).

18 . Ibid. à la p. 7.

19 . (29 juillet 1998), AP-97-057 (TCCE).

20 . Ibid. à la p. 11.

21 . (31 août 1993), AP-92-112 (TCCE).

22 . Ibid. à la p. 5.

23 . Transcription de l’audience publique, 17 novembre 2009, aux pp. 10, 14.

24 . (10 janvier 1994), AP-92-073 (TCCE).

25 . Ibid. à la p. 4.

26 . (11 janvier 2001), AP-99-117 (TCCE).

27 . Ibid. à la p. 5.