LA SOCIÉTÉ CANADIAN TIRE LIMITÉE

Décisions


LA SOCIÉTÉ CANADIAN TIRE LIMITÉE
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2006-038

Décision et motifs rendus
le vendredi 2 novembre 2007


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À un appel entendu le 16 mai 2007 en vertu du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 18 septembre 2006 concernant une demande de réexamen d’une décision anticipée aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

 

LA SOCIÉTÉ CANADIAN TIRE LIMITÉE

Appelante

ET

 

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est admis.

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre présidant

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 16 mai 2007

   

Membres du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

 

Zdenek Kvarda, membre

 

Ellen Fry, membre

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Georges Bujold

   

Agent de la recherche :

Jo-Anne Smith

   

Agent du greffe :

Marija Renic

   

Ont comparu :

Michael Sherbo, pour l’appelante

 

Agnieszka Zagorska, pour l’intimé

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté par La Société Canadian Tire Limitée (Canadian Tire) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard d’une décision portant sur une demande de réexamen d’une décision anticipée rendue le 18 septembre 2006 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si des ensembles de pistolets à décaper MastercraftMD, produit no 54-6500-6 (les marchandises en cause), sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8516.79.90 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre d’autres appareils électrothermiques pour usages domestiques, comme l’a déterminé l’ASFC, ou s’ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 8467.29.90 à titre d’autres outils pneumatiques, hydrauliques ou à moteur (électrique ou non électrique) incorporé, pour emploi à la main, comme l’a soutenu Canadian Tire. Subsidiairement, si le Tribunal détermine que les marchandises en cause constituent des appareils électrothermiques, mais pour usages non domestiques, l’ASFC suggère qu’elles soient classées dans le numéro tarifaire 8419.89.90 à titre d’autres appareils et dispositifs, même chauffés électriquement (à l’exclusion des fours et autres appareils du no 85.14), pour le traitement de matières par des opérations impliquant un changement de température telles que le chauffage, autres que les appareils domestiques.

3. Les marchandises en cause sont vendues dans les magasins Canadian Tire. Selon les éléments de preuve, un ensemble est composé d’un pistolet à air chaud, de quatre déflecteurs d’air, d’un manche de grattoir, de trois grattoirs interchangeables pour divers usages et d’un étui moulé. Le pistolet à air chaud est un appareil tubulaire muni d’une poignée. Dans le tube, un ventilateur à moteur électrique souffle de l’air sur une résistance chauffée et le pousse dans un déflecteur situé à l’extrémité du pistolet. Le pistolet à air chaud peut générer des températures allant de 250 à 450 degrés Celsius. Le pistolet à air chaud a de nombreuses applications, notamment les suivantes : le séchage ou l’enlèvement de peinture et de vernis, le soudage de joints de plomberie, l’enlèvement d’autocollants et d’ornements autoadhésifs, le dégel de tuyaux métalliques gelés et le pliage de tuyaux de plastique.

4. Le 28 mars 2006, l’ASFC a rendu une décision anticipée classant les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 8516.79.90. Le 29 mai 2006, Canadian Tire a demandé le réexamen de cette décision aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi. Le 18 septembre 2006, l’ASFC a confirmé sa décision antérieure selon laquelle les marchandises en cause étaient correctement classées dans le numéro tarifaire 8516.79.90 à titre d’autres appareils électrothermiques pour usages domestiques.

5. Le 8 novembre 2006, Canadian Tire a interjeté appel de cette décision auprès du Tribunal. Dans un exposé conjoint des faits déposé auprès du Tribunal le 8 mai 2007, Canadian Tire et l’ASFC ont convenu des faits suivants relativement aux marchandises en cause :

• Les marchandises sont électrothermiques et électromécaniques.

• Les marchandises sont à commande mécanique au sens attribué à ce terme dans la note supplémentaire de la section XVI du Tarif des douanes.

6. La nomenclature du Tarif des douanes qui, selon Canadian Tire, doit s’appliquer aux marchandises en cause prévoit ce qui suit :

[...]

84.67 Outils pneumatiques, hydrauliques ou à moteur (électrique ou non électrique) incorporé, pour emploi à la main.

[...]

-À moteur électrique incorporé :

[...]

8467.29 - -Autres

[...]

8467.29.90 - - -Autres

[...]

7. La nomenclature qui, selon l’ASFC, s’applique aux marchandises en cause prévoit ce qui suit :

[...]

85.16 Chauffe-eau et thermoplongeurs électriques; appareils électriques pour le chauffage des locaux, du sol ou pour usages similaires; appareils électrothermiques pour la coiffure (sèche-cheveux, appareils à friser, chauffe-fers à friser, par exemple) ou pour sécher les mains; fers à repasser électriques, autres appareils électrothermiques pour usages domestiques; résistances chauffantes, autres que celles du no 85.45.

[...]

-Autres appareils électrothermiques :

[...]

8516.79 - -Autres

[...]

8516.79.90 - - -Autres

[...]

8. La nomenclature pour le classement subsidiaire proposé par l’ASFC prévoit ce qui suit :

[...]

84.19 Appareils et dispositifs, même chauffés électriquement (à l’exclusion des fours et autres appareils du no 85.14), pour le traitement de matières par des opérations impliquant un changement de température telles que le chauffage, la cuisson, la torréfaction, la distillation, la rectification, la stérilisation, la pasteurisation, l’étuvage, le séchage, l’évaporation, la vaporisation, la condensation ou le refroidissement, autres que les appareils domestiques; chauffe-eau non électriques, à chauffage instantané ou à accumulation.

[...]

-Autres appareils et dispositifs :

[...]

8419.89 - -Autres

[...]

8419.89.90 - - -Autres

ANALYSE

9. Aux fins du présent appel, le Tribunal doit suivre les articles 10 et 11 du Tarif des douanes. L’article 10 prévoit que le classement de marchandises importées doit être déterminé conformément aux Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé 3 et aux Règles canadiennes 4 . L’article 11 prévoit qu’il faut tenir compte, dans l’interprétation des positions et des sous-positions de l’annexe, du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 5 et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 6 .

10. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade. Si le classement de marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il doit être tenu compte de la Règle 2 et ainsi de suite, jusqu’à ce que le classement soit établi.

11. Les Règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position. La Règle 6 des Règles générales rend ces règles applicables au classement au niveau de la sous-position. De même, les Règles canadiennes rendent les Règles 1 à 5 des Règles générales applicables au classement au niveau du numéro tarifaire.

12. La Règle 1 des Règles générales prévoit ce qui suit :

1. Le libellé des titres de Sections, de Chapitres ou de Sous-Chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes.

13. Les Règles 3 a) et b) des Règles générales prévoient ce qui suit :

3. Lorsque des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la Règle 2 b) ou dans tout autre cas, le classement s’opère comme suit :

a) La position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d’une portée plus générale. Toutefois, lorsque deux ou plusieurs positions se rapportent chacune à une partie seulement des matières constituant un produit mélangé ou un article composite ou à une partie seulement des articles dans le cas de marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, ces positions sont à considérer, au regard de ce produit ou de cet article, comme également spécifiques même si l’une d’elles en donne par ailleurs une description plus précise ou plus complète.

b) Les produits mélangés, les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l’assemblage d’articles différents et les marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, dont le classement ne peut être effectué en application de la Règle 3 a), sont classés d’après la matière ou l’article qui leur confère leur caractère essentiel lorsqu’il est possible d’opérer cette détermination.

14. Les parties conviennent que les marchandises en cause comportent plusieurs composantes présentées pour la vente au détail comme un ensemble. L’ASFC a prétendu que, selon la Règle 3 b) des Règles générales, elles doivent être classées d’après la composante qui confère à l’ensemble son caractère essentiel. L’ASFC a soutenu que cette composante est le pistolet à air chaud. Canadian Tire a convenu que les marchandises en cause doivent être classées comme s’il s’agissait du pistolet à air chaud7 .

15. Le Tribunal considère que les marchandises en cause sont des « ensembles » et qu’elles sont donc présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail sous forme d’« ensembles ». Selon la Règle 3 b) des Règles générales, de telles marchandises doivent être classées comme s’il s’agissait de la composante qui confère aux ensembles leur caractère essentiel lorsqu’elles ne peuvent être classées selon la Règle 3 a). Étant donné que les marchandises en cause contiennent un certain nombre d’articles portant leur propre classement dans deux ou plusieurs positions qui doivent être considérées aussi spécifiques en vertu de la Règle 3 a), le Tribunal ne peut les classer en fonction de la Règle 3 a). Par conséquent, elles doivent être classées en fonction de la Règle 3 b), qui oblige le Tribunal à se pencher sur le classement de l’article ou de la composante qui confère aux ensembles leur caractère essentiel.

16. Il ressort de la preuve que le pistolet à air chaud joue le rôle le plus important relativement à l’usage des marchandises en cause. Les autres articles de l’ensemble n’en sont que des accessoires. Les utilisateurs achètent les marchandises en cause pour générer de la chaleur pour différentes applications, et c’est le pistolet à air chaud qui en constitue la caractéristique de base8 . À la lumière de ce qui précède, le Tribunal convient que c’est le pistolet à air chaud qui confère à l’ensemble son caractère essentiel et, en fonction de la Règle 3 b) des Règles générales, classera les marchandises en cause comme s’il s’agissait du pistolet à air chaud.

17. Canadian Tire a soutenu qu’en vertu de la Règle 1 des Règles générales, il convient de classer le pistolet à air chaud dans le numéro tarifaire 8467.29.90. Se fondant aussi sur la Règle 1, l’ASFC a prétendu que le pistolet à air chaud est un appareil électrothermique pour usages domestiques, de sorte qu’il faut le classer dans le numéro tarifaire 8516.79.90. Subsidiairement, si le Tribunal détermine que le pistolet à air chaud peut aussi être classé dans la position no 84.67, l’ASFC a soutenu qu’en fonction de la Règle 3 b), le pistolet à air chaud doit encore être classé dans la position no 85.16 parce que c’est la propriété électrothermique du pistolet à air chaud qui lui confère son caractère essentiel. En deuxième argument subsidiaire, si le Tribunal détermine que les marchandises en cause constituent des appareils électrothermiques, mais pour usages non domestiques, l’ASFC a prétendu que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 84.19.

18. Le Tribunal déterminera d’abord si les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 84.67. Dans la mesure où elles le peuvent, le Tribunal examinera la question de savoir si elles peuvent aussi être classées à première vue dans la position no 85.16. Si nécessaire, le Tribunal se penchera ensuite sur les arguments subsidiaires de l’ASFC.

Position no 84.67

19. Selon la Règle 1 des Règles générales, le classement doit être déterminé d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres pertinentes. Dans l’interprétation des termes des positions, l’article 11 du Tarif des douanes oblige le Tribunal à tenir compte des Notes explicatives. Canadian Tire prétend que les termes de la position no 84.67 contiennent trois conditions qui doivent être respectées pour que les marchandises en cause soient classées dans cette position, à savoir : (i) les marchandises doivent être des « outils »; (ii) les marchandises doivent être « pour emploi à la main »; (iii) les marchandises doivent être « pneumatiques, hydrauliques ou à moteur (électronique ou non électrique) incorporé ».

20. Le Tribunal souligne qu’il n’existe aucune Note de Section ou de Chapitre pertinente. Pour cette raison, le Tribunal est d’avis que les marchandises peuvent à première vue être classées dans la position no 84.67 dans la mesure où elles respectent ces conditions, compte tenu des Notes explicatives pertinentes. Par conséquent, le Tribunal doit déterminer si le pistolet à air chaud satisfait aux trois conditions énoncées à la position no 84.67.

21. En ce qui a trait à la première condition, la preuve présentée indique clairement que les marchandises en cause sont des outils. Premièrement, les marchandises en cause sont commercialisées et vendues par Canadian Tire comme des « outils », comme l’indiquent les documents relatifs au produit et à la commercialisation déposés auprès du Tribunal. Le manuel du produit, qui contient les instructions de fonctionnement et de sécurité pour les marchandises en cause, réfère constamment aux marchandises en cause comme des « outils »9 . Deuxièmement, à l’audience, le témoin de Canadian Tire et le témoin de l’ASFC ont décrit les marchandises en cause comme des outils10 . Enfin, même si l’ASFC a prétendu qu’un outil à main peut être un appareil, elle n’a pas contesté la qualification d’outil attribuée par Canadian Tire aux marchandises en cause. Il est donc clair que les marchandises en cause sont des outils au sens des termes de la position no 84.67.

22. En ce qui a trait à la deuxième condition, c’est-à-dire que les outils doivent être « pour emploi à la main », le Tribunal souligne que, selon les Notes explicatives de la position no 84.67, « […] cette position a trait seulement aux engins de l’espèce pour emploi à la main […] ». Il ressort manifestement de la preuve documentaire que les pistolets à air chaud comme les marchandises en cause sont des outils pour emploi à la main. Par exemple, le mémoire de l’intimé11 comprend la photo d’un pistolet à air chaud utilisé par une personne, cette photo indiquant clairement que de telles marchandises sont tenues avec la main au moyen d’une poignée lors de leur utilisation. Le Tribunal estime que tous les travaux pour lesquels le pistolet à air chaud peut être utilisé et qui sont décrits dans les documents relatifs au produit sont effectués lorsque l’utilisateur le tient dans la main. De plus, les deux témoins ont déclaré qu’un pistolet à air chaud est un outil à main, étant donné qu’il est conçu pour être tenu à la main12 . Pour ce motif, il est clair que le pistolet à air chaud est un outil « pour emploi à la main ».

23. Selon la troisième condition, les marchandises en cause doivent être « pneumatiques, hydrauliques ou à moteur (électrique ou non électrique) incorporé ». À la lumière de la preuve documentaire, les marchandises en cause ne sont ni pneumatiques ni hydrauliques, mais contiennent un moteur. Le pistolet à air chaud est muni d’un ventilateur poussant la chaleur produite par la résistance à la zone de travail, et le ventilateur est actionné par un moteur électrique. C’est ce qu’ont aussi confirmé les deux témoins13 . Il est donc clair que le pistolet à air chaud est muni d’un « moteur électrique incorporé ».

24. Le Tribunal accepte l’argument de Canadian Tire selon lequel, en fonction des termes de la position, des Notes de Sections ou de Chapitres et des Notes explicatives, il n’existe aucune restriction ou condition se rattachant à l’utilisation finale des outils à main (c’est-à-dire usage domestique par rapport à usage commercial) qui les empêchent d’être classés dans la position no 84.67. Cela signifie que la position no 84.67 peut englober les outils pouvant être ou étant utilisés à des fins commerciales et domestiques.

25. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 84.67.

Position no 85.16

26. Étant donné que le Tribunal a déterminé que les marchandises en cause peuvent être classées à première vue dans la position no 84.67, il s’agit maintenant de savoir si elles peuvent aussi être classées à première vue dans la position no 85.16. Dans la mesure où elles le peuvent, le classement devra être effectué en fonction de la Règle 3 des Règles générales.

27. Se fondant sur la Règle 1 des Règles générales, les Notes explicatives et les caractéristiques du pistolet à air chaud des marchandises en cause, l’ASFC a soutenu qu’il s’agissait d’appareils électrothermiques pour usages domestiques qui doivent être classés dans la position no 85.16. L’ASFC a ajouté qu’aux termes de l’article 11 du Tarif des douanes, il faut tenir compte du paragraphe 3) de la section A des Notes explicatives du Chapitre 85, qui décrit ainsi les articles visés par le Chapitre :

3) Des machines et appareils dont le fonctionnement repose sur les propriétés ou les effets de l’électricité – [...] propriétés calorifuges [...] –, tels que les appareils des nos [...] 85.11 à 85.18 [...]

28. L’ASFC a également renvoyé à la section A des Notes explicatives du Chapitre 84, qui prévoit ce qui suit :

Sous réserve des dispositions des Considérations générales de la Section XVI, le présent Chapitre couvre l’ensemble des machines, appareils, engins et leurs parties qui ne sont pas repris plus spécifiquement au Chapitre 85 […]

[Nos italiques]

29. Le Tribunal devra se pencher sur la question de savoir si la position no 85.16 décrit les marchandises en cause plus spécifiquement que la position no 84.67 seulement s’il établit d’abord que les marchandises peuvent être classées dans la position no 85.16. Selon les termes de la position no 85.16, pour que les marchandises en cause soient classées dans cette position, le pistolet à air chaud doit respecter trois conditions, à savoir qu’il doit être (i) électrothermique, (ii) un appareil et (iii) pour usages domestiques.

30. Dans l’exposé conjoint des faits déposé auprès du Tribunal, les parties ont convenu que les marchandises en cause sont électrothermiques. Par conséquent, le Tribunal estime que le pistolet à air chaud peut être qualifié d’électrothermique au sens de la position no 85.16.

31. Les parties ne s’entendaient pas sur les deux autres conditions. Quant à la condition de savoir si le pistolet à air chaud est un appareil, l’ASFC s’est fondée sur la définition des termes « appliance » (appareil) et « device » (dispositif) figurant dans le Canadian Oxford Dictionary et a prétendu que ces définitions « donnent à penser » que le pistolet à air chaud est un appareil14 . À l’audience, l’ASFC a fait valoir que la définition d’appareil est très vague et générale et qu’un appareil peut être un outil à main, comme c’est le cas du pistolet à air chaud.

32. Toutefois, lorsqu’on leur a posé des questions précises, les témoins des deux parties ont qualifié les marchandises en cause d’outils à main et ne les considéraient pas comme des appareils15 . Le Tribunal est d’avis que cela indique que le terme « appareil » n’est généralement pas utilisé relativement au pistolet à air chaud.

33. Le Tribunal fait également observer que les Notes explicatives de la position no 85.16 n’appuient pas l’argument de l’ASFC selon lequel un outil à main comme le pistolet à air chaud est un appareil. Même si la liste des marchandises visées par la section E, « Autres appareils électrothermiques pour usages domestiques », n’est fournie qu’à titre d’exemple et n’est pas exhaustive, il n’en demeure pas moins que la liste n’inclut aucun outil ni aucune marchandise qui semble être pour emploi à la main. Aucune des marchandises énumérées n’est semblable au pistolet à air chaud.

34. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal ne considère pas que les marchandises en cause sont des appareils, de sorte qu’il conclut qu’elles ne peuvent être classées dans la position no 85.16.

35. Le Tribunal est également d’avis que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 85.16 au motif qu’elles ne sont pas pour usages domestiques. Sur cette question, le Tribunal a déjà décidé que, pour que des marchandises soient considérées « pour usages domestiques », elles doivent « surtout servir pour des usages domestiques ou en tant qu’articles de ménage16  ».

36. L’ASFC a prétendu que le pistolet à air chaud est pour usages domestiques en raison de sa garantie et de sa conception. En particulier, l’ASFC a souligné que le manuel du produit pour l’ensemble de pistolet à décaper indique que l’outil n’est pas garanti à des fins industrielles et commerciales et que les garanties relatives aux pistolets à air chaud d’autres fabricants ne contiennent aucune exclusion semblable. Selon l’ASFC, cela démontre que les marchandises en cause ne sont pas attrayantes à des fins commerciales et industrielles. Étant donné que l’exclusion de garantie paraît décourager leur achat à des fins commerciales, l’ASFC a soutenu que les marchandises en cause sont pour usages domestiques.

37. Toutefois, le témoin de Canadian Tire a déclaré qu’il utilise les marchandises en cause dans son entreprise de construction, c’est-à-dire à des fins commerciales plutôt que domestiques. Le fait qu’une telle utilisation annule la garantie ne semblait pas préoccuper le témoin, qui prévoyait jeter les marchandises si elles cessaient de fonctionner vu leur faible valeur monétaire. Le témoin de l’ASFC semblait attacher beaucoup d’importance à la garantie, ayant choisi un pistolet à air chaud plus coûteux qui était garanti pour usage commercial. La preuve a démontré que, pour certains pistolets à air chaud, la durée de la garantie varie selon leur usage, domestique ou commercial.

38. Par conséquent, la preuve relative à la question de la garantie n’est pas claire. Les marchandises en cause ne font l’objet d’aucune garantie pour usage commercial et, même si d’autres marchandises apparemment semblables comportent des garanties, celles-ci couvrent des périodes plus courtes. De toute manière, la preuve indique que les marchandises en cause sont souvent utilisées à des fins commerciales, de sorte qu’elles ne sont pas principalement pour usages domestiques. Étant donné que la preuve n’établit pas que les marchandises en cause servent surtout pour des usages domestiques ou en tant qu’articles de ménage, le Tribunal n’est pas convaincu que les marchandises sont « pour usages domestiques » au sens de la position no 85.16.

39. En résumé, conformément à la Règle 1 des Règles générales, le Tribunal conclut que la position no 84.67 décrit les marchandises en cause, alors que tel n’est pas le cas de la position no 85.16. La position no 85.16 ne peut donc pas décrire les marchandises plus spécifiquement que la position no 84.67, comme l’a prétendu l’ASFC.

40. À la lumière de sa conclusion que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 85.16, le Tribunal conclut qu’elles ne sont pas correctement classées dans le numéro tarifaire 8516.79.90, comme l’a déterminé l’ASFC.

41. En ce qui concerne le classement subsidiaire de l’ASFC, c’est-à-dire le numéro tarifaire 8419.89.90, le Tribunal souligne que l’ASFC a prétendu qu’il ne s’appliquerait que si le Tribunal établissait que les marchandises en cause sont des appareils électrothermiques, mais pour usages non domestiques. Le Tribunal ayant conclu que les marchandises en cause ne sont pas des appareils, il n’a pas à examiner l’argument subsidiaire de l’ASFC. De toute manière, le Tribunal ne voit pas comment des outils à main comme les marchandises en cause pourraient être considérés comme des « appareils » ou des « dispositifs » au sens des termes de la position no 84.1917 .

Classement au niveau du numéro tarifaire

42. Ayant établi, conformément à la Règle 1 des Règles générales, que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 84.67, le Tribunal doit maintenant déterminer la sous-position et le numéro tarifaire indiqués. Sur cette question, se fondant sur les termes des sous-positions et des numéros tarifaires pertinents énumérés dans l’annexe du Tarif des douanes, Canadian Tire a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 8467.29.90. En vertu de la Règle 6 des Règles générales et de la Règle 1 des Règles canadiennes, le Tribunal convient que les marchandises doivent être classées dans la sous-position no 8467.29 et dans le numéro tarifaire 8467.29.90 respectivement. La sous-position no 8467.29 comprend les outils à moteur électrique incorporé « autres » que certaines « perceuses » et « scies ». La sous-position no 8467.29 est subdivisée en deux numéros tarifaires, à savoir le numéro tarifaire 8467.29.10, qui vise certaines « sableuses à angles » et « meules à angles », et le numéro tarifaire 8467.29.90, qui vise les « autres » outils. Les marchandises en cause relèvent du numéro tarifaire 8467.29.90, étant donné qu’elles ne sont ni des « sableuses à angles » ni des « meules à angles ».

DÉCISION

43. Compte tenu de ce qui précède, l’appel est admis. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 8467.29.90, à titre d’autres outils à moteur électrique incorporé pour emploi à la main.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . Supra note 2, annexe [Règles générales].

4 . Supra note 2, annexe.

5 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003.

6 . Organisation mondiale des douanes, 4e éd., Bruxelles, 2007 [Notes explicatives].

7 . Transcription de l’audience publique, 16 mai 2007, à la p. 87.

8 . Ibid. aux pp. 10-12, 26.

9 . Pièce du Tribunal AP-2006-038-4A, onglet 1; Transcription de l’audience publique, 16 mai 2007, aux pp. 7-8.

10 . Transcription de l’audience publique, 16 mai 2007, aux pp. 8, 34.

11 . Onglet 10.

12 . Transcription de l’audience publique, 16 mai 2007, aux pp. 9, 34.

13 . Ibid. aux pp. 9-10, 32-34.

14 . Deuxième éd., s.v. « appliance » : « an electrical or gas-powered device or piece of equipment used for a specific task, esp. for domestic tasks such as washing dishes etc. » (dispositif ou pièce d’équipement fonctionnant à l’électricité ou au gaz utilisé pour une tâche particulière, notamment pour les tâches domestiques comme le lavage de vaisselle, etc.).

15 . Transcription de l’audience publique, 16 mai 2007, aux pp. 8, 34, 43-44.

16 . Alliance Ro-Na Home Inc. c. Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (25 mai 2004), AP-2003-020 (TCCE), à la p. 2.

17 . À l’audience, le témoin de l’ASFC a déclaré qu’il ne qualifierait pas le pistolet à air chaud d’appareil de chauffage électrique (Transcription de l’audience publique, 16 mai 2007, à la p. 44).