IGLOO VIKSKI INC.


IGLOO VIKSKI INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2009-046

Décision rendue
le mercredi 16 janvier 2013

Motifs rendus
le vendredi 25 janvier 2013


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À un appel entendu le 20 septembre 2012, en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À 11 décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada entre le 14 mai et le 3 juin 2009, concernant des demandes de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

IGLOO VIKSKI INC. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Diane Vincent
Diane Vincent
Membre présidant

Eric Wildhaber
Eric Wildhaber
Secrétaire

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)

Date de l’audience : le 20 septembre 2012

Membre du Tribunal : Diane Vincent, membre présidant

Conseillers juridiques pour le Tribunal : Georges Bujold
Anja Grabundzija

Gestionnaire, Programmes et services du greffe : Michel Parent

Agent du greffe : Cheryl Unitt

Agent de soutien du greffe : Rosemary Hong

PARTICIPANTS :

Appelante Conseiller/représentant
Igloo Vikski Inc. Michael Kaylor
Intimé Conseiller/représentant
Président de l’Agence des services frontaliers du Canada Geneviève Lecours

TÉMOIN :

Christophe Charbault
Gestionnaire des marques – Sports d’équipe
Raymond Lanctôt Ltée

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Le présent appel a été interjeté par Igloo Vikski Inc. (Igloo Vikski) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes1 à l’égard de décisions rendues entre le 14 mai et le 3 juin 2009 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4).

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si cinq modèles de gants de sport conçus pour les gardiens de but de hockey sur glace (les marchandises en cause) sont correctement classés dans le numéro tarifaire 6216.00.00 de l’annexe du Tarif des douanes2 à titre de gants, mitaines et moufles, comme l’a déterminé l’ASFC, ou s’ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 3926.90.90 à titre d’autres ouvrages en matières plastiques et ouvrages en autres matières des positions nos 39.01 à 39.14, comme le soutient Igloo Vikski.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

3. Du 10 novembre 2003 au 20 décembre 2005, Igloo Vikski a importé les marchandises en cause sous le numéro tarifaire 6216.00.00 à titre de gants, mitaines et moufles.

4. Entre le 14 juin 2005 et le 31 octobre 2007, Igloo Vikski a présenté des demandes de remboursement des droits de douane aux termes de l’alinéa 74(1)e) de la Loi, soutenant que les marchandises en cause devaient être classées dans le numéro tarifaire 9506.99.90 à titre d’autres articles et matériel de sport. Entre le 10 décembre 2007 et le 8 janvier 2008, l’ASFC a rendu des décisions à la suite de révisions aux termes de l’alinéa 59(1)a), indiquant que les marchandises en cause ne pouvaient être classées dans le chapitre 95, comme le soutenait Igloo Vikski, et a donc rejeté les demandes de remboursement des droits de douane. L’ASFC a déterminé que quatre modèles des marchandises en cause demeureraient classés dans le numéro tarifaire 6216.00.00 et que deux autres modèles seraient classés dans le numéro tarifaire 3926.20.92 à titre de moufles (mitaines) ou gants non jetables.

5. Le 15 février 2008, Igloo Vikski a présenté des demandes de réexamen aux termes du paragraphe 60(1) de la Loi. Igloo Vikski soutenait que tous les modèles des marchandises en cause devaient être classés dans le numéro tarifaire 3926.20.92. Entre le 14 mai et le 3 juin 2009, l’ASFC a rendu 11 décisions aux termes du paragraphe 60(4), déterminant que les marchandises en cause, à l’exception d’un modèle, étaient correctement classées dans le numéro tarifaire 6216.00.00. Elle a classé l’autre modèle dans le numéro tarifaire 3926.20.92.

6. Le 10 août 2009, Igloo Vikski a interjeté le présent appel auprès du Tribunal aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi.

7. Le 27 août 2009, le Tribunal a informé les parties que l’appel serait suspendu dans l’attente de l’issue d’un autre appel, à savoir Sher-Wood Hockey Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada3. Le Tribunal a rendu sa décision dans Sher-Wood le 10 février 2011. Cette décision a par la suite été portée en appel devant la Cour d’appel fédérale, mais cet appel a ensuite été retiré. Le 18 novembre 2011, après avoir pris connaissance de l’issue de Sher-Wood, Igloo Vikski a informé le Tribunal qu’elle souhaitait poursuivre le présent appel.

8. Le 20 septembre 2012, le Tribunal a tenu une audience publique à Ottawa (Ontario).

9. Igloo Vikski a fait entendre un témoin. Le Tribunal a reconnu à M. Christophe Charbault, gestionnaire des marques – Sports d’équipe chez Raymond Lanctôt Ltée, à Montréal, le titre d’expert en conception de produits de hockey, y compris de gants de gardien de but. L’ASFC n’a fait entendre aucun témoin.

MARCHANDISES EN CAUSE

10. Les marchandises en cause sont cinq modèles de gants de hockey sur glace, conçus pour être portés par les gardiens de but, importés par Igloo Vikski, que l’ASFC a prétendument mal classés dans le numéro tarifaire 6216.00.00 dans le cadre des décisions en cause. Il s’agit des modèles GMX3, GMX5 et GMX6 (mitaines de gardien de but) (catchers) et des modèles GBX3 et GBX6 (gants bloqueurs) (blockers). Un autre modèle de gant bloqueur, à savoir le modèle GBX5, a été classé par l’ASFC dans le numéro tarifaire 3926.20.92 dans le cadre de l’une des décisions en cause. Puisqu’il s’agit du numéro tarifaire dans lequel tous les modèles auraient dû être classés selon l’avis d’appel déposé par Igloo Vikski, le Tribunal conclut qu’Igloo Vikski n’a pas été lésée par la décision de l’ASFC rendue aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi à l’égard du classement tarifaire du modèle GBX5.

11. Aux termes de l’article 67 de la Loi, seule une « [...] personne qui s’estime lésée par une décision [de l’ASFC] rendue conformément [à l’article] 60 [...] » peut déposer un appel auprès du Tribunal. Par conséquent, l’ASFC ne peut demander au Tribunal de réviser sa propre décision de classement tarifaire dans le cadre d’un appel interjeté aux termes de l’article 67. Par conséquent, le Tribunal conclut que le classement tarifaire du modèle GBX5 n’est pas contesté en l’espèce.

12. L’ASFC a déposé des rapports de laboratoire décrivant la composition des marchandises en cause dans le cadre d’un exposé conjoint des faits4. La composition des marchandises en cause n’est donc pas contestée.

13. Les marchandises en cause ne sont plus vendues au Canada par Igloo Vikski et n’ont pas été déposées à titre de pièces. L’ASFC a fourni six pièces consistant en des gants de hockey, dont certains sont désassemblés, qui paraissent semblables aux modèles en cause dans le présent appel.

14. Dans l’ensemble, les rapports de laboratoire décrivent les composants extérieurs des marchandises en cause comme plusieurs matériaux, composés de diverses combinaisons de matières textiles et de matières plastiques, assemblés essentiellement par couture5.

15. Les rapports de laboratoire décrivent également les matières de rembourrage intérieur, selon une analyse de marchandises représentatives6. D’après cette description, le gant bloqueur (blocker) est constitué de matières de rembourrage incorporées à la surface extérieure du gant, qui se composent uniquement de matières plastiques, et la mitaine de gardien de but (catcher) est constitué de matières de rembourrage incorporées à la surface extérieure du gant, qui se composent de matières plastiques et, dans une moindre mesure, de matières textiles.

16. À l’audience, M. Charbault a déclaré ne pas avoir lu les rapports de laboratoire. En ce qui concerne les pièces, M. Charbault a déclaré qu’en l’absence du rembourrage intérieur, le produit serait dangereux, illégal et inutile7. Il a également affirmé que les matières textiles extérieures avaient pour objet de maintenir ensemble le rembourrage afin de protéger les mains et d’ajouter des éléments graphiques8.

ANALYSE

Cadre législatif

17. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD)9. L’annexe est divisée en sections et en chapitres et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires.

18. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit que le classement des marchandises importées est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé10 et les Règles canadiennes11 énoncées à l’annexe.

19. Les Règles générales sont composées de six règles. Le classement commence par la Règle 1, qui prévoit que le classement doit être déterminé d’après les termes des positions et des notes de section ou de chapitre et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les autres règles.

20. En l’espèce, Igloo Vikski affirme que le Tribunal doit tenir compte des Règles 2 b) et 3 b), qui prévoient ce qui suit :

2. [...]

b) Toute mention d’une matière dans une position déterminée se rapporte à cette matière soit à l’état pur, soit mélangée ou bien associée à d’autres matières. De même, toute mention d’ouvrages en une matière déterminée se rapporte aux ouvrages constitués entièrement ou partiellement de cette matière. Le classement de ces produits mélangés ou articles composites est effectué suivant les principes énoncés dans la Règle 3.

3. Lorsque des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la Règle 2 b) ou dans tout autre cas, le classement s’opère comme suit :

[...]

b) Les produits mélangés, les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l’assemblage d’articles différents et les marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, dont le classement ne peut être effectué en application de la Règle 3 a), sont classés d’après la matière ou l’article qui leur confère leur caractère essentiel lorsqu’il est possible d’opérer cette détermination.

21. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l’interprétation des positions et des sous-positions, le Tribunal doit tenir compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises12 et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises13 publiés par l’OMD. Bien que les Avis de classement et les Notes explicatives n’aient pas force exécutoire, le Tribunal les applique à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire14.

22. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées au niveau de la position conformément à la Règle 1 des Règles générales, selon les termes de la position et les notes de section ou de chapitre pertinentes du Tarif des douanes, compte tenu des Notes explicatives et des Avis de classement pertinents. Si les marchandises en cause ne peuvent être classées au niveau de la position par application de la Règle 1, le Tribunal doit alors examiner les autres règles15.

Classement tarifaire en cause

23. Les parties conviennent et les éléments de preuve indiquent que les marchandises en cause sont un type de gants expressément conçus pour les gardiens de but de hockey sur glace et utilisés par ceux-ci16. M. Charbault a déclaré à l’audience que ces gants sont couramment qualifiés de gants bloqueurs (blocker gloves) et de gants attrapeurs de gardien de but (catcher gloves)17. Le Tribunal convient donc avec les parties que les marchandises en cause sont des gants.

24. Par conséquent, les marchandises en cause ne peuvent être classées dans le chapitre 95, qui comprend généralement les articles de sport, y compris le matériel pour l’athlétisme et les sports, car la note 1u) du chapitre 95 prévoit ce qui suit :

1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

[...]

u) les cordes pour raquettes, les tentes, les articles de campement et les gants, mitaines et moufles, en toutes matières (régime de la matière constitutive);

[...]

[Nos italiques]

25. Comme le soutient à juste titre l’ASFC, puisque les marchandises en cause sont exclues du chapitre 95 en raison de cette note de chapitre pertinente, elles doivent être classées ailleurs, selon leur matière constitutive18.

26. La nomenclature du Tarif des douanes, qui, selon Igloo Vikski, doit s’appliquer aux marchandises en cause, prévoit ce qui suit :

Section VII

MATIÈRES PLASTIQUES ET OUVRAGES EN CES MATIÈRES;
CAOUTCHOUC ET OUVRAGES EN CAOUTCHOUC

[...]

Chapitre 39

MATIÈRES PLASTIQUES ET OUVRAGES EN CES MATIÈRES

[...]

39.26 Autres ouvrages en matières plastiques et ouvrages en autres matières des nos 39.01 à 39.14.

[...]

3926.90 -Autres

[...]

3926.90.90 - - -Autres

27. La note 2m) du chapitre 39, telle qu’elle était en vigueur au moment de l’importation des marchandises en cause, prévoit que le chapitre 39 (et donc la position no 39.26) ne comprend pas « les produits de la Section XI (matières textiles et ouvrages en ces matières) ».

28. Les Notes explicatives de la position no 39.26 prévoient ce qui suit :

La présente position couvre les ouvrages non dénommés ni compris ailleurs en matières plastiques (tels qu’ils sont définis à la Note 1 du présent Chapitre) ou en autres matières des nos 39.01 à 39.14. Sont donc notamment compris ici :

1) Les vêtements et accessoires du vêtement (autres que les jouets) confectionnés par couture ou collage à partir de matières plastiques en feuilles, notamment les tabliers, les ceintures, les bavoirs pour bébés, les imperméables et les dessous-de-bras. Les capuchons amovibles en matières plastiques, présentés avec les imperméables en matières plastiques auxquels ils sont destinés, restent classés dans la présente position.

29. Les Notes explicatives du chapitre 39 fournissent un éclairage supplémentaire qui permet de déterminer si les matières combinant des matières plastiques et des matières textiles sont considérées comme des matières textiles au sens de la section XI ou comme des ouvrages en matières plastiques visées par le chapitre 39. Elles prévoient ce qui suit :

Matières plastiques combinées à des matières textiles

Les revêtements de murs ou de plafonds qui répondent aux conditions de la Note 9 du présent Chapitre relèvent du no 39.18. Le classement des matières plastiques combinées à des matières textiles est essentiellement régi par la Note 1 h) de la Section XI, la Note 3 du Chapitre 56 et la Note 2 du Chapitre 59. Le présent Chapitre couvre en outre les produits ci-après :

[...]

b) les tissus et les nontissés, soit entièrement noyés dans la matière plastique, soit totalement enduits ou recouverts sur leurs deux faces de cette même matière, à condition que l’enduction ou le recouvrement soient perceptibles à l’œil nu, abstraction faite pour l’application de cette disposition, des changements de couleur provoqués par ces opérations;

c) les tissus imprégnés, enduits ou recouverts de matière plastique ou stratifiés avec cette même matière qui ne peuvent être enroulés à la main, sans se fendiller, sur un mandrin de 7 mm de diamètre à une température comprise entre 15 °C et 30 °C;

d) Les plaques, feuilles ou bandes en matière plastique alvéolaire combinées avec du tissu (tel que défini à la Note 1 du Chapitre 59), du feutre ou du nontissé, dans lesquelles la matière textile ne sert que de support.

On considère à cet égard comme jouant le rôle d’un simple support, lorsqu’elles sont appliquées sur une seule face de ces plaques, feuilles et bandes, les matières textiles non façonnées, écrues, blanchies ou teintes uniformément. En revanche, celles qui sont façonnées, imprimées ou ont subi une ouvraison plus poussée (le grattage, par exemple), ainsi que les produits textiles spéciaux tels que velours, tulles, dentelle et les produits textiles du no 58.11, sont considérés comme assurant une fonction supérieure à celle d’un simple support.

Les plaques, feuilles et bandes en matière plastique alvéolaire combinées avec des produits textiles sur les deux faces, quelle que soit la nature du produit textile, sont toutefois exclues du présent Chapitre (généralement nos 56.02, 56.03 et 59.03).

30. La nomenclature du Tarif des douanes qui, selon l’ASFC, doit s’appliquer aux marchandises en cause prévoit ce qui suit :

Section XI

MATIÈRES TEXTILES ET OUVRAGES EN CES MATIÈRES

[...]

Chapitre 62

VÊTEMENTS ET ACCESSOIRES DU VÊTEMENT,
AUTRES QU’EN BONNETERIE

[...]

6216.00.00 Gants, mitaines et moufles.

31. La note 1h) de la section XI (qui comprend le chapitre 62) prévoit que ladite section ne comprend pas « les tissus, [...] feutres et nontissés, imprégnés, enduits ou recouverts de matière plastique ou stratifiés avec cette même matière, et les articles en ces produits, du Chapitre 39 ».

32. La note 1 du chapitre 62 (qui comprend la position no 62.16) prévoit ce qui suit :

1. Le présent Chapitre ne s’applique qu’aux articles confectionnés en tous textiles autres que l’ouate, à l’exclusion des articles en bonneterie (autres que ceux du no 62.12).

33. Les Notes explicatives du chapitre 62 aident aussi à déterminer la portée de cette position. Elles prévoient ce qui suit :

Le présent Chapitre comprend les vêtements et accessoires du vêtement et les parties de vêtements ou d’accessoires du vêtement (c’est-à-dire les articles destinés à l’habillement des hommes, des femmes ou des enfants, ainsi que les accessoires servant à garnir ou à compléter lesdits articles) confectionnés en tous tissus des Chapitres 50 à 55, 58 et 59 ou bien en feutre ou en nontissés. Il couvre aussi, par exception, dans le no 62.12, des articles d’habillement confectionnés en bonneterie.

Les articles du présent Chapitre peuvent comporter des parties ou accessoires : en bonneterie, en matière plastique, en cuir, en pelleteries, en métal, en plumes, par exemple. Toutefois, lorsque ces parties excèdent le rôle de simples garnitures, les vêtements et accessoires du vêtement sont classés conformément aux Notes spéciales des Chapitres (voir, en particulier, la Note 4 du Chapitre 43 et la Note 2 b) du Chapitre 67 en ce qui concerne respectivement la présence de pelleteries et de parties en plumes) ou, à défaut, conformément aux Règles générales interprétatives.

34. Les Notes explicatives de la position no 62.16 sont également pertinentes. Elles prévoient ce qui suit :

Cette position concerne les articles de ganterie, fabriqués en tous textiles (même en dentelle), à l’exception de ceux en bonneterie.

Les dispositions de la Note explicative du no 61.16 sont applicables mutatis mutandis aux produits de la présente position.

La position couvre également les gants de protection.

35. Comme il est indiqué précédemment et expliqué plus en détail ci-dessous, Igloo Vikski se fonde largement en l’espèce sur la Règle 2 b) des Règles générales. À cet égard, les notes XI et XII des Notes explicatives de la Règle 2 b) donnent des indications utiles quant au sens et à l’effet de cette règle. Elles prévoient ce qui suit :

XI) L’effet de la Règle est d’étendre la portée des positions qui mentionnent une matière déterminée de manière à y inclure cette matière mélangée ou bien associée à d’autres matières. Cet effet est également d’étendre la portée des positions qui mentionnent des ouvrages en une matière déterminée de manière à y inclure ces ouvrages partiellement constitués de cette matière.

XII) Elle n’élargit cependant pas la portée des positions qu’elle concerne jusqu’à pouvoir y inclure des articles qui ne répondent pas, ainsi que l’exige la Règle 1, aux termes des libellés de ces positions, ce qui est le cas lorsque l’adjonction d’autres matières ou substances a pour effet d’enlever à l’article le caractère d’une marchandise reprise dans ces positions.

XIII) Il s’ensuit que des matières mélangées ou associées à d’autres matières, et des ouvrages constitués par deux matières ou plus sont susceptibles de relever de deux positions ou plus, et doivent dès lors être classés conformément aux dispositions de la Règle 3.

36. Le litige entre les parties se situe au niveau de la position. Par conséquent, la première tâche du Tribunal consiste à déterminer quelle position comprend les marchandises en cause.

Position des parties

Igloo Vikski

37. Igloo Vikski soutient que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 39.26 à titre d’autres ouvrages en matières plastiques, conformément aux Règles 2 et 3 des Règles générales.

38. Igloo Vikski fonde cet argument sur son interprétation des Notes explicatives du chapitre 62, qui prévoient ce qui suit :

Les articles du présent Chapitre peuvent comporter des parties ou accessoires : [...] en matière plastique [...]. Toutefois, lorsque ces parties excèdent le rôle de simples garnitures, les vêtements et accessoires du vêtement sont classés conformément aux Notes spéciales des Chapitres [...] ou, à défaut, conformément aux Règles générales interprétatives.

39. De l’avis d’Igloo Vikski, les Notes explicatives du chapitre 62 prévoient que lorsque les vêtements du chapitre 62 comportent des parties ou accessoires d’autres matières (comme en matières plastiques) qui excèdent le rôle de simples garnitures, ces vêtements doivent être classés conformément à une règle des Règles générales autre que la Règle 119. D’ailleurs, Igloo Vikski laisse entendre que les Notes explicatives du chapitre 62 ont pour effet d’empêcher l’application de la Règle 1 plus loin dans l’analyse. Puisque le rembourrage en matières plastiques contenu dans les marchandises en cause excède le rôle de simples garnitures, Igloo Vikski semble indiquer qu’elles ne peuvent être classées dans la position no 62.16 par application de la Règle 1 des Règles générales, mais que les Règles 2 et 3 doivent être prises en compte dans l’exercice du classement.

40. Compte tenu de l’interprétation ci-dessus, Igloo Vikski soutient que les positions nos 62.16 et 39.26 deviennent assujetties à la Règle 2 des Règles générales et qu’après avoir eu recours à cette règle, la Règle 1 n’empêche plus le classement dans la position no 39.2620. Igloo Vikski allègue que le fait que les matières plastiques excèdent le rôle de simples garnitures ne suffit pas pour enlever aux marchandises en cause le caractère de gants en matières textiles aux termes de la position no 62.16, mais a pour effet de faire en sorte que les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans la position no 39.2621.

41. En avançant cet argument, Igloo Vikski conteste également la conclusion du Tribunal dans Sher-Wood selon laquelle les marchandises ne pouvaient paraître devoir être classées à la fois dans les positions nos 62.16 et 39.26 en raison des notes de section et de chapitre pertinentes, c’est-à-dire la note 1h) de la section XI et la note 2m) du chapitre 39 telles qu’elles étaient en vigueur au moment de l’importation des marchandises en cause. Igloo Vikski laisse entendre que lorsque la Règle 1 des Règles générales ne s’applique plus, les notes de section et de chapitre ne sont plus pertinentes22. Au fond, Igloo Vikski soutient que lorsqu’il est nécessaire de recourir à la Règle 2, ces notes de section et de chapitre n’empêchent pas le Tribunal de conclure que les marchandises paraissent devoir être classées dans les deux positions concurrentes.

42. Compte tenu de l’argument qui précède, Igloo Vikski laisse entendre que par application de la Règle 2 b) des Règles générales, les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans deux positions; par conséquent, Igloo Vikski soutient que la Règle 3 b) doit être appliquée pour déterminer leur classement approprié. En ce qui concerne cette question, elle soutient que c’est le rembourrage en matières plastiques qui confère aux marchandises en cause leur principale fonction protectrice ou leur caractère essentiel et qui, par conséquent, fait en sorte qu’elles soient visées par la position no 39.26 en application de la Règle 3 b).

ASFC

43. L’ASFC adopte la position selon laquelle les marchandises en cause sont correctement classées à titre de gants, mitaines et moufles dans le numéro tarifaire 6216.00.00 par application des Règles 1 et 2 b) des Règles générales.

44. L’ASFC soutient que les marchandises en cause sont des gants utilisés par les gardiens de but de hockey sur glace, qu’ils possèdent les principales caractéristiques de gants et qu’ils sont couramment qualifiées de gants dans le domaine. Elle affirme également que les marchandises en cause respectent les conditions pour être classées dans la position no 62.16 à titre de gants en matières textiles, puisque ce sont 1) des articles confectionnés 2) en tous textiles 3) à l’exclusion des articles en bonneterie.

45. L’ASFC soutient également que, selon la Règle 2 b) des Règles générales, toute mention dans une position d’ouvrages en une matière déterminée se rapporte aux ouvrages constitués en partie de cette matière, ce qui signifie que les marchandises en cause peuvent être classées à titre d’ouvrages en matières textiles même si elles sont partiellement composées de matières plastiques. L’ASFC est d’avis qu’en l’espèce la présence de composants en matières plastiques n’enlève pas aux marchandises en cause leur caractère de gants, ce qui respecte l’exigence de la note XII des Notes explicatives de la Règle 2 b).

46. L’ASFC soutient que le classement des marchandises en cause peut être déterminé par application de la Règle 2 b) des Règles générales et que le recours à la Règle 3 b) n’est pas légalement permis, puisque les marchandises en cause ne paraissent pas devoir être classées dans deux positions concurrentes. L’ASFC affirme que même si le Tribunal jugeait acceptable l’application de la Règle 3 b), la nature réelle des marchandises en cause est celle de gants de protection, de sorte qu’il ne peut être dit que ce sont les composants de rembourrage intérieur en matières plastiques qui leur confèrent leur caractère essentiel.

Analyse du Tribunal

Les marchandises en cause sont-elles des gants, mitaines et moufles comprises dans la position no 62.16 ?

47. Igloo Vikski ne conteste pas l’affirmation de l’ASFC selon laquelle les marchandises en cause respectent les termes du libellé de la position no 62.16 et des notes de section et de chapitre conformément à la Règle 1 des Règles générales et que, de ce fait, les marchandises en cause respectent les conditions pour paraître devoir être classées dans cette position à titre de gants en matières textiles. Le fait qu’Igloo Vikski se fonde en l’espèce sur la Règle 3 b) confirme qu’elle estime que les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans la position no 62.16. En effet, il n’est possible d’appliquer la Règle 3 que lorsque « [...] des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la Règle 2 b) ou dans tout autre cas [...] ». Par conséquent, si Igloo Vikski estimait que les marchandises en cause ne paraissaient pas devoir être classées dans deux positions concurrentes, dont la position no 62.16, elle n’aurait pas eu à invoquer la Règle 3 pour déterminer dans quelle position tarifaire les marchandises en cause doivent être classées.

48. Quoi qu’il en soit, les éléments de preuve résumés dans l’exposé conjoint des faits indiquent que la surface extérieure des marchandises en cause se compose essentiellement de matières textiles des chapitres 56 et 59. Igloo Vikski admet également que « [...] la présence de [rembourrage en] matières plastiques dans le gant ne lui enlève pas, en application de la Règle 1, son caractère de gant en matières textiles »23 [traduction].

49. Le Tribunal convient avec les parties que le sens courant des termes utilisés dans la position no 62.16 et dans les notes pertinentes en application de la Règle 1 des Règles générales laisse entendre que les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 62.16.

50. La question centrale dans le présent appel est celle de savoir si les Notes explicatives du chapitre 62 ont pour effet d’exiger du Tribunal qu’il tienne compte d’une règle des Règles générales autre que la Règle 1 dans l’exercice du classement et, le cas échéant, de déterminer si l’application de la Règle 2 b) fait en sorte que les marchandises en cause puissent également être classées dans la position no 39.26, comme le soutient Igloo Vikski. La partie pertinente des Notes explicatives du chapitre 62 prévoit ce qui suit :

Les articles du [Chapitre 62] peuvent comporter des parties ou accessoires : [...] en matière plastique, [...]. Toutefois, lorsque ces parties excèdent le rôle de simples garnitures, les vêtements et accessoires du vêtement sont classés conformément aux Notes spéciales des Chapitres [...] ou, à défaut, conformément aux Règles générales interprétatives.

51. Le Tribunal constate que les parties conviennent que le rembourrage, constitué pour l’essentiel de matières plastiques, incorporées à la surface extérieure des marchandises en cause, comme en témoignent les rapports de laboratoire, excède le rôle de simples garnitures.

52. Le Tribunal analysera ci-dessous la question de savoir si les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 62.16, « [...] conformément aux Notes spéciales des Chapitres [...] ou, à défaut, conformément aux Règles générales interprétatives », en application des Notes explicatives du chapitre 62. Cependant, avant d’aborder cette question, le Tribunal examinera l’argument avancé par Igloo Vikski selon lequel les Notes explicatives du chapitre 62 et l’application de la Règle 2 b) des Règles générales font en sorte que les marchandises en cause paraissent également devoir être classées dans la position no 39.26.

Les marchandises en cause répondent-elles aux termes du libellé de la position no 39.26?

53. Igloo Vikski soutient que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 39.26 conformément aux principes énoncés dans la Règle 3 des Règles générales, plus particulièrement la Règle 3 b), qui prévoit que les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l’assemblage d’articles différents sont classés d’après la matière ou l’article qui leur confère leur caractère essentiel. Comme indiqué précédemment, le classement ne peut être effectué par application de la Règle 3 b) que lorsque les marchandises paraissent devoir être classées dans deux ou plusieurs positions. Pour que son appel soit accueilli, Igloo Vikski doit donc établir que les marchandises en cause paraissent également devoir être classées dans la position no 39.26.

54. À cet égard, Igloo Vikski a indiqué au cours de l’audience qu’en application de la Règle 1 des Règles générales, les marchandises en cause ne pourraient être classées dans la position no 39.26 à titre d’ouvrages en matières plastiques. Elle a affirmé ce qui suit :

Il est vrai que les gants en cause ne pourraient être classés dans la position no 39.26, mais seulement en raison de l’application de la Règle 1. Cela s’explique par le fait que, comme le Tribunal l’a affirmé dans son interprétation des Notes explicatives de la position no 39.26 [dans Sher-Wood], pour que les marchandises soient classées dans cette position, les Notes explicatives indiquent qu’elles doivent être des ouvrages en matières plastiques, c’est-à-dire ceux confectionnés par couture ou collage à partir de matières plastiques en feuilles. Cela ne décrit pas les marchandises en cause24.

[Traduction]

55. Le Tribunal convient que d’après les faits en l’espèce, la Règle 1 des Règles générales n’a pas pour effet que les marchandises paraissent devoir être classées dans la position no 39.26. Dans Sher-Wood, le Tribunal a eu l’occasion d’examiner attentivement le champ d’application de cette position et a déterminé qu’en ce qui concerne les vêtements ou accessoires du vêtement, comme les marchandises en cause, la position no 39.26 ne comprend que ceux qui sont confectionnés « [...] par couture ou collage à partir de matières plastiques en feuilles [...] »; en revanche, la position no 39.26 ne décrit pas les vêtements ou accessoires du vêtement composées de matières textiles25. En outre, la présence d’un rembourrage en matières plastiques dans de tels vêtements n’est pas pertinente à cet égard26.

56. Igloo Vikski ne conteste pas l’interprétation et la conclusion antérieures du Tribunal dans Sher-Wood selon lesquelles seules certaines combinaisons de matière plastique et de textile sont comprises dans le chapitre 39 et, par conséquent, dans la position no 39.26. Il est également incontesté que les marchandises en cause ne sont pas des vêtements ou accessoires du vêtement confectionnés par « [...] couture ou collage à partir de matières plastiques en feuilles [...] » de la position no 39.26 et ne sont donc pas un type de combinaison de matière plastique et textile comprise dans le chapitre 3927.

57. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal ne voit aucune raison de s’écarter de sa conclusion dans Sher-Wood selon laquelle les termes « [a]utres ouvrages en matières plastiques [...] » ne comprennent pas les vêtements et accessoires du vêtement confectionnés par couture de produits textiles, mais qui intègrent des composants de matière plastique sous forme de matière de rembourrage. Par conséquent, dûment interprété, le libellé de la position no 39.26 ne décrit pas les marchandises en cause. Le simple fait que les marchandises en cause contiennent des matières plastiques de rembourrage ne les transforme pas en d’« [a]utres ouvrages en matières plastiques [...] » au sens du libellé de la position no 39.26.

58. Le Tribunal comprend qu’Igloo Vikski soutient qu’en dépit du fait que les marchandises en cause ne soient pas d’« [a]utres ouvrages en matières plastiques [...] », d’après l’interprétation antérieure de ces termes par le Tribunal (c’est-à-dire que ce ne sont pas des marchandises correspondant à la description dans le libellé de la position no 39.26 conformément à la Règle 1 des Règles générales), elles peuvent néanmoins être visées par cette position en raison des Notes explicatives du chapitre 62 et de la Règle 2. Ceci a conduit Igloo Vikski à soutenir que la Règle 3 b) s’applique effectivement et mène au classement des marchandises en cause dans la position no 39.26.

59. Par souci de commodité, la partie pertinente des Notes explicatives du chapitre 62 est reproduite ci-après :

[...] Toutefois, lorsque ces parties [en matière plastique] excèdent le rôle de simples garnitures, les vêtements et accessoires du vêtement sont classés conformément aux Notes spéciales des Chapitres [...] ou, à défaut, conformément aux Règles générales interprétatives.

60. Igloo Vikski soutient que lorsque les Notes explicatives du chapitre 62 indiquent que le classement doit être effectué « [...] conformément aux Règles générales interprétatives », elles indiquent que le classement doit être effectué conformément aux Règles générales autres que la Règle 1. Igloo Vikski soutient qu’en supprimant la Règle 1 de l’analyse, les Notes explicatives du chapitre 62 exigent de plus que le Tribunal considère la Règle 2 de pair avec non seulement les positions du chapitre 62, comme la position no 62.16, mais également avec la position no 39.26. Puisque la Règle 2 a pour effet d’étendre la portée de l’application de toute position aux ouvrages partiellement constitués de la matière qu’elle décrit, cette règle a pour effet, selon Igloo Vikski, d’inclure les marchandises en cause dans la portée de la position no 39.26.

61. Le Tribunal n’est pas d’accord avec Igloo Vikski en ce qui concerne son interprétation des Notes explicatives du chapitre 62 et des conséquences de celles-ci sur l’application de la Règle 1 des Règles générales. Le Tribunal ne peut également accepter l’argument d’Igloo Vikski selon lequel, étant donné les faits du présent appel, l’application de la Règle 2 b) a pour effet d’étendre la portée de la position no 39.26 de manière à inclure les marchandises en cause.

62. Les Notes explicatives indiquent que le classement des marchandises doit être effectué « [...] conformément aux Règles générales interprétatives »28. Le Tribunal constate que les Notes explicatives ne dictent pas d’appliquer d’autres Règles générales, comme le soutient Igloo Vikski. Par conséquent, à leur face même, les Notes explicatives n’ont pas pour effet de rendre la Règle 1 des Règles générales inapplicable au classement, même si les matières non textiles présentent dans les marchandises en cause excèdent le rôle de simples garnitures29.

63. Contrairement à l’observation d’Igloo Vikski, le Tribunal n’interprète pas les Notes explicatives du chapitre 62 comme signifiant que la Règle 1 des Règles générales n’est plus pertinente à l’égard du classement des marchandises en cause, même si leur composant de matière plastique excède le rôle de simples garnitures. Selon le Tribunal, les Notes explicatives du chapitre 62 n’exigent pas que la classification soit effectuée simplement par l’application des autres Règles générales, incluant la Règle 2, en ignorant la Règle 1 dans de telles circonstances.

64. En effet, un exercice de classement doit toujours commencer par l’examen du libellé d’une position, conformément à la Règle 1 des Règles générales. Cela appert clairement de la Règle 2 b) et des Notes explicatives y afférant.

65. Bien que la Règle 2 b) des Règles générales ait pour effet d’étendre la portée des positions qui mentionnent une matière déterminée de manière à y inclure cette matière mélangée ou bien associée à d’autres matières et d’étendre la portée des positions qui mentionnent des ouvrages en une matière déterminée de manière à y inclure ces ouvrages partiellement constitués de cette matière, la note XII des Notes explicatives de la Règle 2 prévoit qu’on ne peut étendre, en s’appuyant sur la Règle 2 b), « [...] la portée des positions qu’elle concerne jusqu’à pouvoir y inclure des articles qui ne répondent pas, ainsi que l’exige la Règle 1, aux termes des libellés de ces positions [...] » [nos italiques].

66. Cela signifie qu’avant de pouvoir invoquer la Règle 2 b) des Règles générales pour démontrer que la portée d’une position donnée qui mentionne une matière déterminée est élargie de manière à y inclure une matière mélangée ou bien associée à d’autres matières ou à des ouvrages partiellement constitués de cette matière, il doit être démontré que les marchandises en cause répondent aux termes du libellé de cette position. Igloo Vikski a ignoré cette étape fondamentale de l’exercice de classement en l’espèce. Plus particulièrement, elle n’a pas présenté d’arguments ni déposé d’éléments de preuve pour convaincre le Tribunal que les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans la position no 39.26 à titre « [d’]autres ouvrages en matières plastiques [...] » sur la foi du libellé de cette position et des notes pertinentes. Au contraire, comme mentionné ci-dessus, Igloo Vikski a reconnu que le libellé de la position no 39.26 ne décrit pas les marchandises en cause.

67. En appliquant ces règles aux faits du présent appel, le Tribunal a déjà déterminé que le libellé de la position no 39.26 ne décrit pas les marchandises en cause et que l’insertion de rembourrage en matière plastique dans les marchandises en cause n’est pas suffisante pour qu’elles soient considérées, ainsi que l’exige la Règle 1 des Règles générales, comme des marchandises qui répondent aux termes du libellé ou qui correspondent à la description de la position no 39.26. Puisque les marchandises en cause ne répondent pas aux termes du libellé de la position no 39.26 (c’est-à-dire qu’elles ne sont pas « [d’]autres ouvrages en matières plastiques [...] » au sens des termes de la position no 39.26), la Règle 2 b) ne peut avoir pour effet d’étendre la portée de cette position de manière à les inclure.

68. Par conséquent, le Tribunal conclut que, en droit et selon les faits du présent appel, les Notes explicatives du chapitre 62 et de la Règle 2 des Règles générales ne peuvent avoir pour effet d’étendre la portée de la position no 39.26 contrairement au libellé de cette position et aux notes y afférant. Autrement dit, la position no 39.26 ne peut devenir pertinente aux fins du classement en cause seulement par application des Notes explicatives du chapitre 62 et de la Règle 2 b).

69. En résumé, s’il n’est pas démontré que les marchandises en cause répondent aux termes du libellé de la position no 39.26, ainsi que l’exige la Règle 1 des Règles générales, la Règle 2 b) ne peut avoir pour effet d’étendre la portée de cette position afin d’inclure les marchandises en cause. Ce n’est que dans la mesure où les marchandises correspondent à la description « [d’]autres ouvrages en matières plastiques » de la position no 39.26 qu’elles pourraient être classées dans cette position aux termes de la Règle 2 b), si elles sont constituées seulement partiellement de matières plastiques ou de matière plastiques associées à d’autres matières ou substances. Puisque ce n’est pas le cas dans le présent appel, les marchandises en cause ne peuvent paraître devoir être classées dans la position no 39.26 par application de la Règle 2 b).

70. Par conséquent, le Tribunal conclut que, en ce qui concerne les vêtements et accessoires du vêtement comme les marchandises en cause, la position no 39.26 ne comprend que les ouvrages « [...] confectionnés par couture ou collage à partir de matières plastiques en feuilles [...] » et les marchandises en cause ne sont pas des marchandises qui respectent cette condition. Ainsi, elles ne sont pas une combinaison de matières plastiques et textiles comprise dans le chapitre 39. Les marchandises en cause ne correspondent pas à la description de la position no 39.26; par conséquent, elles ne peuvent paraître devoir être classées dans la position no 39.26 à titre « [d’]autres ouvrages en matières plastiques et ouvrages en autres matières des nos 39.01 à 39.14 » par application de la Règle 2 b) des Règles générales.

Les marchandises en cause sont classées dans la position no 62.16 aux termes de la Règle 2 b)

71. Le Tribunal est d’avis que, conformément aux Notes explicatives du chapitre 62, dans la mesure où la Règle 1 des Règles générales est insuffisante pour classer définitivement les marchandises en cause dans la position no 62.16, il peut recourir aux autres règles. Puisque la Règle 2 a) n’est pas pertinente dans le présent appel, le Tribunal doit ensuite considérer la Règle 2 b). Le Tribunal est d’accord avec la position de l’ASFC selon laquelle les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 62.16 par application de la Règle 2 b).

72. La Règle 2 b) des Règles générales prévoit ce qui suit :

[...] toute mention [dans une position] d’ouvrages en une matière déterminée se rapporte aux ouvrages constitués entièrement ou partiellement de cette matière. Le classement de ces produits mélangés ou articles composites est effectué suivant les principes énoncés dans la Règle 3.

73. De plus, les notes XI à XIII des Notes explicatives de la Règle 2 b) des Règles générales apportent des éclaircissements sur le sens et sur l’effet de la Règle 2 b). Elles prévoient ce qui suit :

XI) L’effet de la Règle est d’étendre la portée des positions qui mentionnent une matière déterminée de manière à y inclure cette matière mélangée ou bien associée à d’autres matières. Cet effet est également d’étendre la portée des positions qui mentionnent des ouvrages en une matière déterminée de manière à y inclure ces ouvrages partiellement constitués de cette matière.

XII) Elle n’élargit cependant pas la portée des positions qu’elle concerne jusqu’à pouvoir y inclure des articles qui ne répondent pas, ainsi que l’exige la Règle 1, aux termes des libellés de ces positions, ce qui est le cas lorsque l’adjonction d’autres matières ou substances a pour effet d’enlever à l’article le caractère d’une marchandise reprise dans ces positions.

XIII) Il s’ensuit que des matières mélangées ou associées à d’autres matières, et des ouvrages constitués par deux matières ou plus sont susceptibles de relever de deux positions ou plus, et doivent dès lors être classés conformément aux dispositions de la Règle 3.

74. Interprétées ensemble, ces notes indiquent clairement que les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 62.16 à titre de gants en matières textiles, même si elles sont constituées seulement partiellement de matières textiles. Si la présence d’une autre matière dans les marchandises en cause excède le rôle de simples garnitures, la question consiste alors à déterminer, aux termes de la Règle 2 b) des Règles générales, si les marchandises en cause peuvent néanmoins être considérées comme répondant aux termes du libellé de la position no 62.16.

75. Les notes XI à XII des Notes explicatives de la Règle 2 b) des Règles générales indiquent également que, dans la mesure où l’adjonction d’une autre matière n’a pas pour effet d’enlever aux marchandises en cause le caractère d’une marchandise reprise dans la position, les marchandises doivent être considérées comme répondant aux termes du libellé de la position en question.

76. L’énoncé conjoint des faits déposé par les parties indique que les marchandises en cause sont des gants constitués de matières textiles et assemblés essentiellement par couture. Les gants contiennent un rembourrage en matières plastiques incorporé à la surface extérieure30. À cet égard, l’analyse du Tribunal dans Sher-Wood s’applique aux marchandises en cause :

90. De l’avis du Tribunal, l’adjonction ou l’insertion de coussins protecteurs de mousse haute densité et de plastique dur dans les marchandises en cause n’a pas « pour effet d’enlever à l’article le caractère » d’une marchandise reprise dans la position no 62.16. Ce sont les matières textiles cousues ensemble pour former les marchandises en cause qui en font des gants. Par conséquent, l’adjonction des matières de rembourrage de mousse et de matière plastique ne les transforme pas en marchandises ne pouvant plus répondre à la description de la position.

91. De plus, les Notes explicatives de la position no 62.16 prévoient que « [l]a position couvre également les gants de protection ». Cette disposition n’est pas directement applicable aux marchandises en cause, mais elle confirme que la position no 62.16 vise certains gants de protection. Le Tribunal considère que cela implique que la position no 62.16 peut comprendre des gants intégrant des matières ayant des qualités de protection, telles que la mousse et les matières plastiques. Le Tribunal conclut donc que les marchandises en cause demeurent des gants de matières textiles de la position no 62.16 même si les parties en mousse et en matière plastique servant de rembourrage qu’ils contiennent constituent plus que de simples garnitures.

77. Le Tribunal est d’avis que les marchandises en cause entrent nettement dans la portée de la position no 62.16, par application de la Règle 2 b) des Règles générales.

78. En arrivant à cette conclusion, le Tribunal constate que la dernière phrase de la Règle 2 b) des Règles générales prévoit que les produits mélangés ou articles composites sont classés suivant les principes énoncés dans la Règle 3. Toutefois, comme mentionné ci-dessus, la note XIII des Notes explicatives de la Règle 2 b) précise que cela ne peut être fait que si les marchandises paraissent devoir être classées dans deux positions ou plus. Autrement dit, contrairement à l’argument d’Igloo Vikski, lorsqu’il est nécessaire d’avoir recours à la Règle 2 b), cela ne signifie pas nécessairement que la Règle 3 devient applicable.

79. Cela est conforme à la note XII des Notes explicatives de la Règle 2 b) des Règles générales, qui indique clairement que la Règle 2 b) ne permet pas d’étendre la portée du libellé d’une position jusqu’à exclure la Règle 1. Cette note vient appuyer l’avis du Tribunal selon lequel il est erroné d’appliquer la Règle 2 pour étendre la portée du libellé d’une position sans avoir déterminé, en premier lieu, que les marchandises en cause répondent à la description de cette position et, par conséquent, que le libellé de la position en question paraît décrire les marchandises en cause aux termes de la Règle 1.

80. Dans le présent appel, le Tribunal a déjà déterminé que les marchandises en cause ne sont pas des marchandises qui répondent à la description ou qui respectent les conditions de la position no 39.26 et que, par conséquent, elles ne paraissent pas devoir être classées dans les deux positions concurrentes. Par conséquent, la Règle 3 des Règles générales ne s’applique pas.

Conclusion

81. Le Tribunal a déjà déterminé et Igloo Vikski a reconnu que les marchandises en cause respectent les conditions de la position no 62.16. Le Tribunal considère de plus que la présence de matières plastiques dans les marchandises en cause n’a pas pour effet d’enlever leur caractère de gants en matières textiles. Compte tenu de ce qui précède, conformément aux Règles 1 et 2 b) des Règles générales, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont des gants en matière textiles classés dans la position no 62.16. Par conséquent, le Tribunal considère qu’il n’y a pas de fondement juridique pour examiner les arguments d’Igloo Vikski concernant l’application de la Règle 3 b) aux marchandises en cause.

82. Puisque la position no 62.16 n’est pas subdivisée au niveau des sous-positions ou des numéros tarifaires, le Tribunal n’a pas besoin de considérer la Règle 6 des Règles générales ni la Règle 1 des Règles canadiennes pour déterminer le classement approprié au niveau de la sous-position ou du numéro tarifaire. Par conséquent, les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 6216.00.00.

DÉCISION

83. L’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . (10 février 2011), AP-2009-045 (TCCE) [Sher-Wood]. Il est à noter qu’Igloo Vikski a demandé la suspension du présent appel le 20 août 2009 en attendant la décision dans Sher-Wood.

4 . Pièce du Tribunal AP-2009-046-20A, onglet 1 aux pp. 038-046.

5 . Pour une description plus détaillée de chaque modèle, voir pièce du Tribunal AP-2009-046-20A, onglet C.

6 . Pour une description plus détaillée, voir pièce du Tribunal AP-2009-046-20A, onglet E.

7 . Transcription de l’audience publique, 20 septembre 2012, à la p. 36.

8 . Ibid. aux pp. 30, 33.

9 . Le Canada est l’un des pays signataires de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

10 . L.C. 1997, c. 36, annexe [Règles générales].

11 . L.C. 1997, c. 36, annexe.

12 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003 [Avis de classement].

13 . Organisation mondiale des douanes, 5e éd., Bruxelles, 2012 [Notes explicatives].

14 . Voir Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII) aux paras. 13, 17, où la Cour d’appel fédérale a interprété l’article 11 du Tarif des douanes comme signifiant que les Notes explicatives doivent être respectées, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire. Le Tribunal est d’avis que cette interprétation s’applique également aux Avis de classement.

15 . Les Règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position.

16 . Pièce du Tribunal AP-2009-046-20A, onglet 1 à la p. 39.

17 . Transcription de l’audience publique, 20 septembre 2012, à la p. 32.

18 . Pièce du Tribunal AP-2009-046-20A à la p. 10.

19 . Transcription de l’audience publique, 20 septembre 2012, aux pp. 71-72.

20 . Ibid. à la p. 71.

21 . Ibid. aux pp. 71-72.

22 . Ibid. à la p. 77.

23 . Ibid. à la p. 68.

24 . Ibid. à la p. 71.

25 . Sher-Wood au para. 72.

26 . Ibid. au para. 73.

27 . Étant donné cette admission (Transcription de l’audience publique, 20 septembre 2012, à la p. 71), le Tribunal estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner la question de savoir si les marchandises en cause respectent les conditions énoncées dans les Notes explicatives du chapitre 39 pour déterminer si les matières combinant des matières plastiques et des matières textiles utilisées pour confectionner les marchandises en cause sont considérées comme des matières textiles au sens de la section XI ou comme des ouvrages en matières plastiques visées par le chapitre 39. Par conséquent, compte tenu des éléments de preuve dont il est saisi, le Tribunal accepte que les marchandises en cause ne sont pas des tissus, étoffes de bonneterie, feutres et nontissés, imprégnés, enduits ou recouverts de matière plastique ou stratifiés avec cette même matière ou des articles en ces produits qui peuvent être classés dans le chapitre 39.

28 . Le Tribunal constate que les Notes explicatives du chapitre 62 nous amènent d’abord à deux notes de chapitre, qui ne sont pas pertinentes en l’espèce.

29 . Le Tribunal a conclu de manière similaire à l’égard d’une note du chapitre 63, dont le libellé est comparable. Voir Rui Royal International Corp. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (30 mars 2011), AP-2010-003 (TCCE) aux para. 69-72; La Société Canadian Tire Limitée c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (6 août 2010), AP-2009-019 (TCCE) aux para. 40-48.

30 . Pièce du Tribunal AP-2009-046-20A, onglet 1.