GCP ELASTOMERIC INC.


GCP ELASTOMERIC INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2010-011

Décision et motifs rendus
le lundi 4 avril 2011


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À un appel entendu le 18 janvier 2011, en vertu du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le Président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 4 mars 2010, concernant une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

GCP ELASTOMERIC INC. Appelante

ET

PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Lieu de l’audience : Ottawa, Ontario

Date de l’audience : le 18 janvier 2011

Membres du Tribunal : Serge Fréchette, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Eric Wildhaber

Directeur de la recherche : Matthew Sreter

Agent de la recherche : Garry Rourke

Gestionnaire, Bureau du greffe : Michel Parent

Agent du greffe : Julie Lescom

PARTICIPANTS :

Appelante Conseillers/représentants
GCP Elastomeric Inc. Trent Cosgrove
Intimé Conseillers/représentants
Président de l’Agence des services frontaliers du Canada David Aaron

TÉMOIN :

Allan Granville
Pharmacien principal
Agence des services frontaliers du Canada

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté par GCP Elastomeric Inc. (GCP) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard de deux décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) le 4 mars 2010, aux termes du paragraphe 60(4).

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les tapis et les feuilles en caoutchouc, modèles no NES-CSS-B70, NES-CSS-B60 et CHT-SS-B602 (les marchandises en cause), sont correctement classées dans le numéro tarifaire 4008.21.90 de l’annexe du Tarif des douanes 3 à titre d’autres plaques, feuilles et bandes en caoutchouc non alvéolaire, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 4003.00.00 à titre de caoutchouc régénéré sous formes primaires ou en plaques, feuilles ou bandes, comme le soutient GCP.

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

3. Les marchandises en cause ont été importées par GCP le 23 août 2006 et le 4 mars 2007.

4. Le 10 septembre 2008, conformément à l’alinéa 59(1)b) de la Loi, l’ASFC révisait le classement tarifaire des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 4008.21.90 à titre d’autres plaques, feuilles et bandes en caoutchouc non alvéolaire.

5. Le 12 novembre 2008, conformément au paragraphe 60(1) de la Loi, GCP demandait un réexamen du classement tarifaire.

6. Le 4 mars 2010, conformément au paragraphe 60(4) de la Loi, l’ASFC rendait des décisions confirmant le classement des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 4008.21.90.

7. Le 31 mai 2010, GCP interjetait appel des décisions de l’ASFC auprès du Tribunal, en vertu de l’article 67 de la Loi.

8. Le 18 janvier 2011, le Tribunal tenait une audience publique à Ottawa (Ontario).

9. M. Allan Granville, chimiste principal de l’ASFC, a témoigné au nom de l’ASFC. Le Tribunal a reconnu à M. Granville le titre d’expert à l’égard de l’analyse des produits en polymère et en caoutchouc. GCP n’a convoqué aucun témoin.

MARCHANDISES EN CAUSE

10. Les marchandises en cause sont trois modèles de composé de caoutchouc vulcanisé flexible non alvéolaire en feuilles de différents formats4 .

11. L’ASFC a déposé quatre pièces, dont trois étaient des échantillons des marchandises en cause5 ; la quatrième était un échantillon de caoutchouc mou6 .

ANALYSE

Cadre législatif

12. Dans des appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi concernant les questions de classement tarifaire, le Tribunal détermine le classement tarifaire des marchandises en cause conformément aux règles d’interprétation prescrites.

13. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes7 . L’annexe est divisée en sections et en chapitres, et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires. Les sections et chapitres peuvent comprendre des notes concernant leur interprétation. Les articles 10 et 11 du Tarif des douanes prescrivent la méthode que le Tribunal doit appliquer pour l’interprétation de l’annexe afin de déterminer le classement tarifaire approprié de marchandises

14. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « [...] le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[8] et les Règles canadiennes[9] énoncées à l’annexe. »

15. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade, de sorte que si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il faut alors tenir compte de la Règle 2, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le classement soit établi10 . Le classement commence donc par l’application de la Règle 1, qui prévoit ce qui suit : « [...] le classement [est] déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes. »

16. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « Pour l’interprétation des positions et sous-positions, il est tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[11] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[12] et de leurs modifications, publiés par le Conseil de coopération douanière (Organisation mondiale des douanes). » Par conséquent, contrairement aux notes de sections et de chapitres, les Notes explicatives n’ont pas force exécutoire pour le Tribunal dans son classement des marchandises importées. Toutefois, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il faut respecter ces notes, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire, puisqu’elles servent de guide d’interprétation aux fins du classement tarifaire au Canada13 .

Dispositions pertinentes du Tarif des douanes, des Règles générales et des Notes explicatives

17. Les dispositions pertinentes du Tarif des douanes sont les suivantes :

Section VII

MATIÈRES PLASTIQUES OU OUVRAGES EN CES MATIÈRES;
CAOUTCHOUC ET OUVRAGES EN CAOUTCHOUC

[...]

Chapitre 40

CAOUTCHOUC ET OUVRAGES EN CAOUTCHOUC

[...]

4003.00.00 Caoutchouc régénéré sous formes primaires ou en plaques, feuilles ou bandes.

[...]

40.08 Plaques, feuilles, bandes, baguettes et profilés, en caoutchouc vulcanisé non durci.

[...]

- En caoutchouc non alvéolaire :

4008.21 - - Plaques, feuilles et bandes

[...]

4008.21.90 - - - Autres

18. Il n’y a pas de notes de section pertinentes de la section VII.

19. La note pertinente du Chapitre 40 se lit comme suit :

9. Au sens des nos 40.01, 40.02, 40.03, 40.05 et 40.08, on entend par plaques, feuilles et bandes uniquement les plaques, feuilles et bandes ainsi que les blocs de forme régulière, non découpés ou simplement découpés de forme carrée ou rectangulaire (même si cette opération leur donne le caractère d’articles prêts à l’usage, en l’état), mais qui n’ont pas subi d’autre ouvraison que, le cas échéant, un simple travail de surface (impression ou autre).

20. Les Notes explicatives du Chapitre 40 donnent les directives suivantes relativement aux considérations générales des positions :

(b) Les nos 40.03 et 40.04 couvrent le caoutchouc régénéré sous formes primaires ou en plaques, feuilles ou bandes et les déchets, débris et rognures de caoutchouc non durci ainsi que le caoutchouc en poudre ou en granulés obtenu à partir de ces déchets, débris et rognures.

[...]

(e) Les nos 40.07 à 40.16 couvrent les demi-produits et les ouvrages en caoutchouc vulcanisé autres qu’en caoutchouc durci.

21. De plus, les Notes explicatives du Chapitre 40 donnent un sens spécifique au terme « vulcanisé » utilisé dans la nomenclature et se lisent comme suit :

Le terme vulcanisé désigne, d’une manière générale, le caoutchouc (y compris le caoutchouc synthétique) qui, rétifié à l’aide de soufre ou de tout autre agent de vulcanisation (tel que le chlorure de soufre, certains oxydes de métaux polyvalents, le sélénium, le tellure, les dio- et tétrasulfures de thiourame, certains peroxydes organiques et certains polymères synthétiques), en utilisant ou non la chaleur ou la pression, ou par rayonnement à haute énergie, a subi une transformation ayant pour effet de le faire passer d’un état à prédominance plastique à un état à prédominance élastique. [...]

Aux fins de la vulcanisation, on ajoute également, indépendamment des agents de vulcanisation, certaines autres substances telles qu’accélérateurs, activateurs, retardateurs de vulcanisation, plastifiants, agents diluants, matières de charge, inertes ou actives ou tout autre additif mentionné dans la Note 5 B) du Chapitre. Certains mélanges susceptibles d’être vulcanisés sont considérés comme du caoutchouc mélangé et classés dans les n°s 4005 ou 4006 suivant la forme sous laquelle ils sont présentés.

22. Les Notes explicatives de la position 40.03 se lisent comme suit :

Le caoutchouc régénéré provient du traitement d’ouvrages en caoutchouc usagés (notamment des pneumatiques) et des déchets ou rognures de caoutchouc vulcanisé. L’opération consiste à ramollir ce caoutchouc et à éliminer, généralement par différents moyens chimiques ou mécaniques, certaines des matières indésirables qu’il contient. Le produit obtenu renferme encore des résidus de soufre ou d’autres agents de vulcanisation et est d’une qualité inférieure au caoutchouc d’origine. Il peut se présenter en plaques saupoudrées de talc ou séparées par des films de polyéthylène.

La présente position couvre le caoutchouc régénéré sous formes primaires ou en plaques, feuilles ou bandes, même mélangé à du caoutchouc d’origine ou à d’autres substances d’addition, à la condition toutefois que le produit conserve le caractère essentiel de caoutchouc régénéré.

Classement tarifaire des marchandises en cause

23. En l’espèce, le litige concerne la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées. GCP estime que les marchandises en cause doivent être classées dans la position 40.03. L’ASFC soutient qu’elles doivent être classées dans la position 40.08. Les parties conviennent toutes deux que les marchandises en cause ne peuvent, de prime abord, être classées que dans une seule position du Tarif des douanes, conformément à la Règle 1 des Règles générales. Par conséquent, le Tribunal examinera le libellé des positions concurrentes et toute note connexe de la section VII ou du Chapitre 40, afin de déterminer la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées.

24. GCP soutient que les marchandises en cause sont des « [...] feuilles de caoutchouc régénéré vulcanisé [...] »14 [traduction] qui doivent être classées dans la position 40.03. GCP renvoie à la définition de « caoutchouc régénéré » se trouvant dans les Notes explicatives de la position 40.03 et prétend que, puisque les marchandises en cause sont fabriquées à partir de pneumatiques usagés et ont subi un processus de dévulcanisation, elles ont le caractère essentiel du caoutchouc régénéré. Pour appuyer sa position, GCP a déposé un document du producteur des marchandises en cause, la Beijing Rubber Company, qui explique en détails le processus de fabrication des marchandises en cause, et affirme que les marchandises en cause ont été fabriquées selon un processus utilisant des pneumatiques de caoutchouc régénéré auxquels on a retiré les éléments d’acier et de tissu et qui ont été déchiquetés et réduits en fines granules puis soumis à un processus de dévulcanisation15 .

25. L’ASFC prétend que les Notes explicatives de la position 40.03 exigent que les marchandises en cause aient le caractère essentiel du caoutchouc régénéré dévulcanisé. Selon l’ASFC, les éléments de preuve concernant le processus de fabrication des marchandises en cause indiquent qu’elles ont subi un processus de vulcanisation (l’application de pression et de chaleur à des feuilles de caoutchouc régénéré) par le fabricant et, par conséquent, n’ont pas le caractère essentiel du caoutchouc régénéré dévulcanisé.

26. L’ASFC soutient que les marchandises en cause sont faites de caoutchouc vulcanisé, ne sont pas alvéolaires, sont présentées en feuilles et par conséquent remplissent les conditions de classement dans la position 40.08. GCP n’a présenté aucun argument pour réfuter le point de vue de l’ASFC selon lequel les marchandises en cause peuvent être classées sous la position 40.08.

27. GCP renvoie à plusieurs décisions des services douaniers des États-Unis, dans lesquelles des revêtements de sol et des tapis en caoutchouc ont été classées dans la position 40.0316 . À cet égard, l’ASFC affirme que le Tribunal n’est pas lié par ces décisions et qu’il n’y a pas d’éléments de preuve selon lesquels les marchandises en cause ayant fait l’objet des décisions des services douaniers des États-Unis contenaient du caoutchouc régénéré. En ce qui concerne les marchandises en cause, le Tribunal est d’accord avec l’ASFC et rappelle sa jurisprudence constante sur l’utilité relative de telles décisions17 .

28. Le Tribunal fait remarquer que selon le libellé de la position 40.08, pour que les marchandises en cause soient classées dans cette position, elles doivent, au moment de leur importation au Canada, être (1) des plaques, feuilles, bandes, baguettes ou profilés (2) en caoutchouc vulcanisé (3) non durci.

29. La description des marchandises en cause indique qu’elles sont composées de caoutchouc et se présentent sous forme de feuilles. De plus, ni l’ASFC ni GCP ne prétend que les marchandises en cause sont faites de caoutchouc durci, ce qui les aurait exclues du classement dans la position 40.08. Pour trancher le présent appel, il s’agira donc de déterminer si les marchandises en cause sont faites de caoutchouc vulcanisé, comme le prétend l’ASFC, ou si elles sont faites de caoutchouc régénéré, comme le soutient GCP.

30. D’après le dossier, à une étape de leur processus de fabrication, les marchandises en cause auraient subi un processus de dévulcanisation qui ferait prétendument en sorte qu’elles soient faites de « caoutchouc régénéré », conformément à la description des Notes explicatives de la position 40.03. L’ASFC ne conteste pas cet argument. Toutefois, GCP ne conteste pas l’affirmation de l’ASFC selon laquelle il n’existe pas de méthode scientifique qui permette la vérification de cette étape de transformation intermédiaire en analysant les marchandises en cause18 . En tout état de cause, comme il est indiqué précédemment, le Tribunal ne se préoccupe que de la nature des marchandises en cause au moment de leur importation19 .

31. Selon son témoignage, M. Granville a testé l’adhérence et la plasticité des marchandises en cause afin de déterminer si elles étaient composées de caoutchouc vierge, régénéré ou vulcanisé20 . Le test, qui consistait à dissoudre les marchandises en cause dans un solvant universel, le toluène, indiquait qu’elles étaient « [...] hautement réticulées ou [...] hautement vulcanisées [...] » [traduction]21 . Selon M. Granville, plus la réticulation est élevée, plus il y a vulcanisation, et inversement22 . Un autre test, consistant en une analyse olfactive, a révélé que les marchandises en cause contiennent du benzothiazole, un « [...] produit chimique qui est un résidu d’accélérateurs de vulcanisation utilisés dans la vulcanisation du caoutchouc »23 [traduction], ainsi que d’autres quantités élevées d’antioxydants utilisés dans la vulcanisation du caoutchouc. D’après les résultats de ces tests, M. Granville a conclu que les marchandises en cause sont composées de caoutchouc vulcanisé.

32. M. Granville a de plus comparé les propriétés physiques des marchandises en cause avec un échantillon de caoutchouc régénéré24 afin de déterminer si elles étaient adhésives et présentaient de la plasticité comparativement aux normes connues. M. Granville a fait la démonstration de ce test en tirant sur l’échantillon de caoutchouc régénéré tout en le tenant dans ses mains, ce qui a entraîné une déformation, normalement associée au caoutchouc régénéré. Dans son témoignage, M. Granville a affirmé que les marchandises en cause n’avaient « [...] aucunement l’adhérence associée au caoutchouc régénéré »25 [traduction].

33. Dans son témoignage, M. Granville a renvoyé au document de la Beijing Rubber Company et a déclaré que selon son opinion d’expert, trois procédés distincts y étaient décrits. Le premier consistait en un procédé de broyage du caoutchouc, le deuxième, en un procédé de dévulcanisation et le troisième, en un procédé de vulcanisation. En réponse à une question du Tribunal, M. Granville a renvoyé au document, qui décrivait la fin du processus de dévulcanisation comme il suit : « Le caoutchouc dévulcanisé qui en résulte est refroidi et pressé en feuilles brutes de 0,5 pouce dans deux mélangeurs à cylindres »26 [traduction]. Le début du processus de vulcanisation est décrit comme il suit : « Le caoutchouc dévulcanisé est combiné à des agents de vulcanisation et à des produits de remplissage chimiques au besoin dans un mélangeur de caoutchouc interne (500 kgf.m) ou sur un mélangeur mobile à la main (100 kgf.m) »27 [traduction].

34. Bien qu’il soit clair que les marchandises en cause ont été, aux étapes initiales de leur fabrication, soumises à un procédé pouvant être décrit comme étant de la dévulcanisation, il est également clair, d’après le témoignage de M. Granville et les documents produits en preuve, que les marchandises en cause ont également été soumises à un procédé consistant à combiner des additifs aux marchandises en cause et que de la pression et de la chaleur ont été appliquées pour les transformer en feuilles solides de caoutchouc de haute densité. Les marchandises en cause ont par la suite été traitées au moyen du revêtement par application de poudre de talc afin d’en réduire l’adhésivité, ont été taillées et coupées aux longueurs désirées, puis ont été emballées pour être expédiées. Cet autre traitement correspond à un procédé de vulcanisation. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont faites de caoutchouc vulcanisé.

35. Le Tribunal fait remarquer que d’après les informations scientifiques au dossier, la vulcanisation ou la dévulcanisation partielles n’existent pas. Autrement dit, un produit est vulcanisé ou ne l’est pas. Ainsi, le Tribunal est disposé à accepter que lorsque du caoutchouc vierge est soumis au procédé de transformation désigné « vulcanisation », le produit qui en est issu est du caoutchouc vulcanisé. À l’inverse, lorsque le caoutchouc vulcanisé est soumis au processus de transformation désigné « dévulcanisation », le produit qui en découle est du caoutchouc dévulcanisé ou régénéré. De plus, rien dans l’annexe du Tarif des douanes ne permet au Tribunal de conclure à partir du degré ou de l’ampleur de la vulcanisation qu’un produit est ou n’est pas vulcanisé. Le Tribunal fonde sa décision sur le témoignage de M. Granville, qui a affirmé que toute réaction chimique réduisant la plasticité du caoutchouc vierge en « réticulant » [traduction] les molécules est définie comme étant de la vulcanisation28 . Lorsque le Tribunal lui a spécifiquement demandé si un « [...] processus de vulcanisation de 1 p. 100 [...] » [traduction] serait suffisant pour décrire un produit comme étant vulcanisé, M. Granville a déclaré que cela « [e]n ferait un produit vulcanisé [...] oui »29 [traduction].

36. Dans l’éventualité où le Tribunal aurait mal compris le procédé de vulcanisation, à la lumière du témoignage de M. Granville sur le degré élevé de réticulation entre les molécules des marchandises en cause, le Tribunal serait quand même persuadé que selon les éléments de preuve, les marchandises sont néanmoins faites de caoutchouc vulcanisé.

37. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont faites de caoutchouc vulcanisé et sont par conséquent correctement classées dans la position 40.08. Il s’ensuit donc qu’elles sont correctement classées dans le numéro tarifaire 4008.21.90 à titre d’autres plaques, feuilles et bandes de caoutchouc vulcanisé non alvéolaire non durci.

DÉCISION

38. L’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . Pièce du Tribunal AP-2010-011-19, AP-2010-011-20.

3 . L.C. 1997, c. 36.

4 . Pièce du Tribunal AP-2010-011-05A, onglet 2.

5 . Pièces B-01, B-02, B-03.

6 . Pièce B-04.

7 . Le Canada est l’un des pays signataires de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

8 . L.C. 1997, c. 36, annexe [Règles générales].

9 . L.C. 1997, c. 36, annexe.

10 . Les Règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position (c.-à-d. à quatre chiffres). En vertu de la Règle 6 des Règles générales, les Règles 1 à 5 s’appliquent au classement au niveau de la sous-position (c.-à-d. à six chiffres). De la même façon, les Règles canadiennes rendent les Règles 1 à 5 des Règles générales applicables au classement au niveau du numéro tarifaire (c.-à-d. à huit chiffres).

11 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003 [Avis de classement].

12 . Organisation mondiale des douanes, 4e éd., Bruxelles, 2007 [Notes explicatives].

13 . Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII) aux para. 13, 17.

14 . Transcription de l’audience publique, 18 janvier 2011, à la p. 4.

15 . Pièce du Tribunal AP-2010-011-03A, onglet 7; Transcription de l’audience publique, 18 janvier 2011, à la p. 4.

16 . Pièce du Tribunal AP-2010-011-03A, onglets 15, 16.

17 . Voir Korhani Canada Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (18 novembre 2008), AP-2007-008 (TCCE) à la p. 7.

18 . Transcription de l’audience publique, 18 janvier 2011, à la p. 23.

19 . Voir Sealand of the Pacific Ltd. c. Sous-M.R.N. (11 juillet 1989), 3042 (TCCE) à la p. 7, où le Tribunal a affirmé ce qui suit : « Il est précisé dans les lois et règlements douaniers que les marchandises doivent être classées selon leur nature au moment de l’importation. Ce principe a été invoqué par la Cour suprême du Canada dans la cause opposant le ministre du Revenu national et MacMillan and Bloedel Ltd. et al., [1965] R.C.S. 366 et a été réitéré à de nombreuses occasions par la suite. »

20 . Transcription de l’audience publique, 18 janvier 2011, à la p. 12.

21 . Ibid. à la p. 15.

22 . Ibid. à la p. 30.

23 . Ibid. à la p. 16.

24 . Pièce B-04; Transcription de l’audience publique, 18 janvier 2011, à la p. 20.

25 . Transcription de l’audience publique, 18 janvier 2011, à la p. 19.

26 . Pièce du Tribunal AP-2010-011-17A, onglet 2 au para. 5.

27 . Ibid. au para. 6.

28 . Transcription de l’audience publique, 18 janvier 2011, à la p. 31.

29 . Ibid. à la p. 35.