CRITERION CATALYSTS & TECHNOLOGIES CANADA INC.


CRITERION CATALYSTS & TECHNOLOGIES CANADA INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2009-061

Décision et motifs rendus
le lundi 15 novembre 2010


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À un appel entendu le 21 septembre 2010, en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 3 novembre 2009, concernant des demandes de révision aux termes de du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

CRITERION CATALYSTS & TECHNOLOGIES CANADA INC. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Stephen A. Leach
Stephen A. Leach
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)

Date de l’audience : Le 21 septembre 2010

Membres du Tribunal : Stephen A. Leach, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Georges Bujold

Directeur de la recherche : Rose Ritcey

Agent de la recherche : Gary Rourke

Gestionnaire, Bureau du greffe : Michel Parent

Agent du greffe : Lindsay Vincelli

PARTICIPANTS :

Appelante Conseillers/représentants
Criterion Catalysts & Technologies Canada Inc. Michael Theodore
Wyatt Holyk
Intimé Conseiller/représentant
Président de l’Agence des services frontaliers du Canada Max Binnie

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté par Criterion Catalysts & Technologies Canada Inc. (Criterion) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard de neuf décisions rendues le 3 novembre 2009 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines substances chimiques désignées comme les produits X2118 TL, X3100 TL et X3110C TL (les marchandises en cause) sont correctement classées dans le numéro tarifaire 3824.90.10 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre de préparations d’oxyde devant être utilisées pour enlever des composés de sulfure, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 3815.90.90 à titre d’autres préparations catalytiques non dénommées ni comprises ailleurs, comme le soutient Criterion.

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

3. Les marchandises en cause ont été importées par Criterion entre le 6 janvier et le 21 octobre 2005 et classées dans le numéro tarifaire 3815.90.90.

4. Le 28 juin 2007, l’ASFC révisait le classement tarifaire des marchandises en cause aux termes du paragraphe 59(1) de la Loi. Elle a classé les produits X2118 TL et X3100 TL dans le numéro tarifaire 3815.19.10 et le produit X3110C TL dans le numéro tarifaire 3824.90.90.

5. Le 26 septembre 2007, Criterion demandait le réexamen du classement tarifaire des marchandises en cause aux termes du paragraphe 60(1) de la Loi.

6. Le 3 novembre 2009, l’ASFC rendait neuf décisions à la suite de révisions du classement tarifaire aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi, dans lesquelles elle déterminait que les marchandises en cause étaient toutes correctement classées dans le numéro tarifaire 3824.90.10 à titre de préparations d’oxyde devant être utilisées pour enlever des composés de sulfure.

7. Le 27 novembre 2009, aux termes de l’article 67 de la Loi, Criterion en appelait de ces neuf décisions auprès du Tribunal.

8. Le 27 janvier 2010, Criterion demandait au Tribunal de tenir une audience sur pièces. Le 2 février 2010, l’ASFC signifiait qu’elle ne s’objectait pas à cette demande. Le 9 mars 2010, après avoir examiné les exposés déposés par les deux parties à cet égard, le Tribunal informait les parties de sa décision de statuer sur l’affaire sur la foi des documents à sa disposition, conformément aux règles 25 et 25.1 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 .

9. Le 23 juillet 2010, Criterion déposait auprès du Tribunal un rapport de témoin expert préparé par M. David A. Komar, ingénieur en fabrication affecté au service technique de Criterion situé à The Woodlands, au Texas. Le Tribunal fait remarquer que l’ASFC ne s’est pas opposée au dépôt de ce rapport, malgré le fait qu’elle ne pourrait contre-interroger M. Komar, étant donné la décision du Tribunal de tenir une audience sur pièces. Par conséquent, ce rapport fait partie du dossier du présent appel.

10. Le 21 septembre 2010, à Ottawa (Ontario), le Tribunal tenait une audience sur la foi des exposés écrits. En ce qui concerne le statut du rapport de témoin expert préparé par M. Komar, le Tribunal fait remarquer que les titres de compétences et qualifications de M. Komar à titre d’expert chimiste n’ont pas été contestées par l’ASFC. Par conséquent, le Tribunal a reconnu à M. Komar le titre d’expert en développement et production de catalyseurs d’hydrotraitement, comme le demandait Criterion4 . Soulignant le fait que l’ASFC n’a pas tenté de réfuter les éléments de preuve du témoin expert de Criterion, le Tribunal a décidé d’accorder au rapport toute la force probante qu’il mérite.

MARCHANDISES EN CAUSE

11. Les marchandises en cause sont de petites pastilles d’aluminium extrudé, qui consistent en un mélange de divers oxydes. Elles sont composées d’oxydes d’aluminium, de nickel, de molybdène, de phosphore et d’autres composés à divers degrés de concentration. Selon les éléments de preuve, les marchandises en cause sont des produits intermédiaires utilisés dans la fabrication de catalyseurs d’hydrotraitement servant dans le traitement des produits pétroliers5 . Les parties s’entendent pour dire qu’au moment où elles sont importées, les marchandises en cause sont des catalyseurs incomplets, car elles ne contiennent pas tous les ingrédients nécessaires à leur fonction de catalyseurs d’hydrotraitement et nécessitent une transformation ultérieure pour remplir cette fonction6 .

12. Criterion a déposé comme pièces des échantillons des marchandises en cause7 .

ANALYSE

Cadre législatif

13. Dans des appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi concernant les questions de classement tarifaire, le Tribunal détermine le classement tarifaire des marchandises conformément aux règles d’interprétation prescrites.

14. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes8 . L’annexe est divisée en sections et en chapitres, et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires. Les sections et chapitres peuvent comprendre des notes concernant leur interprétation9 . Les articles 10 et 11 du Tarif des douanes prescrivent la méthode que le Tribunal doit appliquer pour l’interprétation de l’annexe afin de déterminer le classement tarifaire approprié de marchandises.

15. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « [...] le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[10] et les Règles canadiennes[11] énoncées à l’annexe. »

16. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade, de sorte que si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il faut alors tenir compte de la Règle 2, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le classement soit établi12 .

17. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « Pour l’interprétation des positions et sous-positions, il est tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[13] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[14] et de leurs modifications, publiés par le Conseil de coopération douanière (Organisation mondiale des douanes). » Par conséquent, contrairement aux notes de sections et de chapitres, les Notes explicatives n’ont pas force exécutoire pour le Tribunal dans son classement des marchandises importées. Toutefois, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il faut respecter ces notes, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire, puisqu’elles servent de guide d’interprétation aux fins du classement tarifaire au Canada15 .

18. Le classement commence donc par la Règle 1 des Règles générales, qui prévoit ce qui suit :

Le libellé des titres de Sections, de Chapitres ou de Sous-Chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes.

19. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées conformément à la Règle 1 des Règles générales, selon les termes de la position et les notes de section ou de chapitre pertinentes du Tarif des douanes, compte tenu des Avis de classement et les Notes explicatives pertinents. Le Tribunal ne doit tenir compte des autres règles pour déterminer dans quelle position les marchandises en cause doivent être classées que s’il n’est pas convaincu que les marchandises en cause peuvent être classées au niveau de la position par application de la Règle 1 des Règles générales.

20. Après que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées, l’étape suivante consiste à déterminer la sous-position et le numéro tarifaire appropriés, par application de la Règle 6 des Règles générales dans le cas de la sous-position et des Règles canadiennes dans le cas du numéro tarifaire16 .

Questions relatives au classement tarifaire

21. Dans le présent appel, le litige entre les parties se situe au niveau de la position17 . À cet égard, le Tribunal remarque que Criterion soutient que les marchandises en cause peuvent être classées soit dans la position no 38.15, à titre de préparations catalytiques, soit dans la position no 38.24, à titre de préparations chimiques. Toutefois, comme il en sera question ci-dessous, Criterion soutient que les marchandises en cause doivent être classées au niveau de la position aux termes de la Règle 3 a) des Règles générales.

22. La nomenclature du Tarif des douanes qui, selon Criterion, doit s’appliquer aux marchandises en cause prévoit ce qui suit :

38.15 Initiateurs de réaction, accélérateurs de réaction et préparations catalytiques, non dénommés ni compris ailleurs.

-Catalyseurs supportés :

[...]

3815.90 -Autres

[...]

3815.90.90.00 - - -Autres

23. Les Notes explicatives pertinentes de la position no 38.15 prévoient ce qui suit :

Cette position comprend les préparations propres à initier ou accélérer certains processus chimiques. Ne sont pas compris ici les produits qui retardent le développement de ces processus.

Ces préparations relèvent généralement de deux groupes :

a) Celles du premier groupe sont constituées, généralement, soit d’une ou plusieurs substances actives déposées sur un support (connues sous le nom de catalyseurs supportés), soit de mélanges à base de substances actives. Il s’agit dans la majeure partie des cas de certains métaux, d’oxydes métalliques, d’autres composés métalliques ou de mélanges de ces substances. Les métaux les plus utilisés en tant que tels ou sous forme de composés sont le cobalt, le nickel, le palladium, le platine, le molybdène, le chrome, le cuivre et le zinc. Le support, qui est parfois activé, est généralement constitué d’alumine, de carbone, de gel de silice, de farine fossile ou de matières céramiques. Les catalyseurs Ziegler ou Ziegler-Natta supportés sont des exemples de catalyseurs supportés.

b) Celles du second groupe sont des mélanges à base de composés dont la nature et les proportions varient selon la réaction chimique à catalyser. Ces préparations comprennent notamment :

1°) les catalyseurs radicalaires (solutions organiques de peroxydes organiques ou de composés azoïques, mélanges redox, par exemple);

2°) les catalyseurs ioniques (l’alkyllithium, par exemple);

3°) les catalyseurs pour les réactions de polycondensation (tels que les mélanges d’acétate de calcium et de trioxyde d’antimoine).

Les préparations du second groupe sont généralement utilisées au cours de la fabrication des polymères.

24. La nomenclature pertinente du Tarif des douanes qui, selon l’ASFC, s’applique aux marchandises en cause prévoit ce qui suit :

38.24 Liants préparés pour moules ou noyaux de fonderie; produits chimiques et préparations des industries chimiques ou des industries connexes (y compris celles consistant en mélanges de produits naturels), non dénommés ni compris ailleurs.

[...]

3824.90 -Autres

3824.90.10 [...]

Préparations d’oxyde devant être utilisées pour enlever des composés de sulphure
[...]

25. Les Notes explicatives pertinentes de la position no 38.24 prévoient ce qui suit :

B.- PRODUITS CHIMIQUES ET PRÉPARATIONS (CHIMIQUES OU AUTRES)

[...]

Les préparations classées ici peuvent aussi bien être entièrement ou partiellement composées de produits chimiques (ce qui est le cas général) que totalement formées de constituants naturels [...].

26. Criterion soutient que la position no 38.15 contient la description la plus précise des marchandises en cause et doit, par conséquent, avoir priorité sur la position no 38.24 par application de la Règle 3 a) des Règles générales.

27. La Règle 3 a) prévoit ce qui suit :

3. Lorsque des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la Règle 2 b) ou dans tout autre cas, le classement s’opère comme suit :

a) La position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d’une portée plus générale. Toutefois, lorsque deux ou plusieurs positions se rapportent chacune à une partie seulement des matières constituant un produit mélangé ou un article composite ou à une partie seulement des articles dans le cas de marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, ces positions sont à considérer, au regard de ce produit ou de cet article, comme également spécifiques même si l’une d’elles en donne par ailleurs une description plus précise ou plus complète.

28. Le Tribunal fait remarquer que cet argument signifie que Criterion s’entend avec l’ASFC pour dire que les marchandises paraissent devoir être classées dans la position no 38.24. En effet, en droit, le classement ne peut être effectué par application de la Règle 3 a) des Règles générales que lorsque les marchandises paraissent devoir être classées dans deux ou plusieurs positions.

29. En réponse, l’ASFC soutient que les marchandises en cause ne constituent pas des préparations catalytiques et que, par conséquent, elles ne peuvent être classées dans la position no 38.15. Autrement dit, l’ASFC soutient qu’il n’est pas nécessaire de considérer la Règle 3 a) des Règles générales pour déterminer dans quelle position tarifaire les marchandises en cause doivent être classées. Selon l’ASFC, les marchandises en cause ne sont pas visées par les termes de la position no 38.15 et sont correctement classées dans la position no 38.24 par application de la Règle 1 des Règles générales.

30. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal doit déterminer si la Règle 3 a) des Règles générales s’applique aux fins du classement des marchandises en cause au niveau de la position. Pour conclure que la Règle 3 a) s’applique, comme le soutient Criterion, le Tribunal doit d’abord conclure que les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans deux positions concurrentes, soit la position no 38.15 et la position no 38.24. Considérant que les deux parties conviennent que les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans la position no 38.24, le Tribunal débutera son analyse en examinant la question de savoir si elles paraissent devoir être classées également dans la position no 38.15. Si le Tribunal détermine que les marchandises en cause ne paraissent pas devoir être classées dans la position no 38.15, il devra conclure que la Règle 3 a) des Règles générales ne s’applique pas aux fins du classement des marchandises en cause au niveau de la position. Dans ce cas, il n’y aurait pas de fondement juridique pour même considérer l’argument de Criterion selon lequel la description la plus précise des marchandises en cause se trouve à la position no 38.15.

Les marchandises en cause peuvent-elles être classées dans la position no 38.15?

31. Comme il a été mentionné ci-dessus, la question centrale dans le présent appel est de savoir si les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans la position no 38.15.

32. Criterion soutient que même si les marchandises en cause sont des catalyseurs incomplets, car ils ne contiennent pas tous les ingrédients nécessaires pour servir de catalyseurs actifs, elles peuvent être classées dans la position no 38.15, car cette position ne contient pas le terme précis et limitatif de « catalyseurs », mais plutôt l’expression « préparations catalytiques ». Selon Criterion, puisque l’expression « préparations catalytiques » a une portée plus générale que le terme « catalyseur », la position no 38.15 vise tant les produits finis (c.-à-d. les catalyseurs complets ou actifs) que les produits intermédiaires, comme les marchandises en cause.

33. Pour appuyer son allégation que le terme « préparations » comprend les produits intermédiaires, Criterion renvoie à la décision du Tribunal dans Puratos Canada Inc. c. le Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada 18 , où il est question du libellé des Notes explicatives de la position no 19.01, comme précédent applicable pour confirmer son argument selon lequel le sens ordinaire du terme « préparations » comprend les préparations intermédiaires.

34. À cet égard, Criterion renvoie à la position no 19.01, « Extraits de malt; préparations alimentaires de farines, gruaux, semoules, amidons, fécules ou extraits de malt [...] préparations alimentaires de produits des nos 04.01 à 04.04 [...] » [nos italiques], et aux Notes explicatives, qui prévoient ce qui suit :

[Les préparations de cette position] peuvent également constituer des préparations intermédiaires destinées à l’industrie alimentaire.

35. L’ASFC soutient que les marchandises en cause ne sont pas visées par les termes de la position no 38.15, car elles ne sont pas des préparations catalytiques. L’ASFC renvoie aux Notes explicatives de la position no 38.15 et soutient que ces Notes explicatives indiquent clairement que la position no 38.15 ne vise que des composés qui contiennent des substances actives et des types de catalyseurs spécifiques. En outre, l’ASFC soutient que les Notes explicatives n’élargissent pas la portée de la position pour inclure autre chose que des catalyseurs complets.

36. En ce qui concerne l’argument de Criterion selon lequel l’expression « préparations catalytiques » doit comprendre les préparations intermédiaires selon le libellé des Notes explicatives de la position no 19.01, l’ASFC soutient que si l’expression « préparations catalytiques » contenue dans la position no 38.15 devait viser les préparations intermédiaires, il y aurait une mention spécifique à cet égard dans les Notes explicatives de la position no 38.15, comme un libellé semblable à celui des Notes explicatives de la position no 19.01. En l’absence d’un tel libellé, l’ASFC soutient que la position no 38.15 ne comprend pas les préparations intermédiaires, soit les produits utilisés pour fabriquer des catalyseurs.

37. Le Tribunal fait remarquer que Criterion et l’ASFC ont tous les deux convenu que les marchandises en cause, au moment de leur importation, ne contiennent pas une quantité suffisante des ingrédients actifs nécessaires à la fabrication d’un catalyseur complet. L’opinion incontestée de M. Komar confirme que la branche de production ne considère pas les marchandises en cause comme des catalyseurs. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas des catalyseurs.

38. Tenant compte de ce fait, le Tribunal doit déterminer si, aux termes de la Règle 1 des Règles générales, le libellé de la position no 38.15 et, plus précisément, l’expression « préparations catalytiques », visent des marchandises qui ne sont pas des catalyseurs (c.-à-d. des composés qui ne contiennent pas les ingrédients nécessaires pour fabriquer un catalyseur complet ou fini). Pour rendre cette décision, le Tribunal doit tenir compte des Notes explicatives pertinentes.

39. Comme question préliminaire, en ce qui concerne l’argument de Criterion relatif aux Notes explicatives de la position no 19.01, le Tribunal fait remarquer que la Règle 1 des Règles générales prévoit ce qui suit : « [...] le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres [...] » (« [...] classification shall be determined according to the terms of the headings and any relative Section or Chapter Notes [...] » [soulignement ajouté]). Les Notes explicatives de la position no 19.01 — laquelle ne fait pas l’objet du présent appel — ne sont pas relatives (relative) à la position no 38.15 et ne fournissent pas d’indication sur la façon d’interpréter les termes de cette position ou des notes de sections ou de chapitres relatives. Le Tribunal ne doit pas s’éloigner du libellé clair des Notes explicatives de la position no 38.15 et appliquer à cette position les Notes explicatives de la position no 19.01. En deux mots, les Notes explicatives de la position no 19.01 ne sont pas légalement pertinentes pour déterminer le sens de l’expression « préparations catalytiques » de la position no 38.15 et, de manière plus générale, pour évaluer les types de marchandises visées par cette position.

40. Les Notes explicatives de la position no 38.15 prévoient ce qui suit : « Cette position comprend les préparations propres à initier ou accélérer certains processus chimiques. [...] Ces préparations relèvent généralement de deux groupes : a) Celles du premier groupe sont [...] connues sous le nom de catalyseurs supportés [...] b) Celles du second groupe sont des mélanges à base de composés dont la nature et les proportions varient selon la réaction chimique à catalyser. »

41. À cet égard, le Tribunal fait remarquer que les Notes explicatives indiquent que les termes de la position no 38.15 comprennent clairement les marchandises connues sous le nom de « catalyseurs supportés ». Toutefois, comme il a été mentionné ci-dessus, les parties ont toutes deux convenu que les marchandises en cause ne sont pas des catalyseurs. Par conséquent, il faut donc conclure que les marchandises en cause ne sont pas des « catalyseurs supportés », puisque cette catégorie désigne un type particulier de catalyseurs. Cela signifie que, pour conclure que les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans la position no 38.15, le Tribunal doit conclure qu’elles font partie du deuxième groupe de préparations qui, selon les Notes explicatives, sont visées par la position no 38.15.

42. À cet égard, le Tribunal observe que le libellé des Notes explicatives insiste sur la présence de substances actives dans les préparations visées et que ces notes énumère divers types de catalyseurs comme exemple de marchandises pouvant entrer dans le champ du deuxième groupe de préparations visées par la position no 38.1519 . De l’avis du Tribunal, cela signifie que la position no 38.15 comprend d’autres types de catalyseurs (c.-à-d. des catalyseurs autres que les catalyseurs supportés), mais pas des marchandises, comme les marchandises en cause, qui ne sont pas un type de catalyseur. Rien dans le libellé des Notes explicatives de la position no 38.15 ne laisse entendre que l’expression « préparations catalytiques » puisse comprendre les préparations qui ne causent pas de catalyse.

43. Pour ces motifs, le Tribunal est d’avis que la position no 38.15 ne vise pas les marchandises ne contenant pas de substances actives qui en font des catalyseurs finis ou complets. Par conséquent, le Tribunal accepte l’argument de l’ASFC selon lequel l’expression « préparations catalytiques », lue à la lumière des Notes explicatives de la position no 38.15, s’entend de catalyseurs complets ou finis et ne comprend pas les préparations utilisées pour fabriquer des catalyseurs n’ayant pas d’ingrédients actifs qui en font de véritables catalyseurs.

44. En résumé, considérant le libellé sans équivoque des Notes explicatives de la position no 38.15, le Tribunal conclut que la position no 38.15 ne vise que les composés contenant des substances actives et des types particuliers de catalyseurs. Selon les éléments de preuve au dossier, les marchandises en cause ne constituent pas de tels composés. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne paraissent pas devoir être classées dans la position no 38.15. Par conséquent, Criterion n’a pas démontré que le Tribunal doit appliquer les principes de la Règle 3 a) des Règles générales aux fins du classement des marchandises en cause au niveau de la position. Considérant cette conclusion, il n’est pas nécessaire de statuer sur les autres arguments présentés par Criterion.

Les marchandises en cause peuvent-elles être classées dans la position no 38.24?

45. Comme il a été mentionné ci-dessus, les parties s’entendent pour dire que les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans la position no 38.24. Le Tribunal accepte la conclusion des parties à cet égard. Comme il appert clairement des Notes explicatives de la position no 38.24, les termes de la position no 38.24 comprennent une vaste gamme de produits chimiques et de préparations chimiques, non dénommés ni compris ailleurs, y compris les préparations pouvant aussi bien être entièrement ou partiellement composées de produits chimiques que totalement formées de constituants naturels. Sur la foi des éléments de preuve au dossier concernant les constituants des marchandises en question (c.-à-d. divers oxydes) et considérant que Criterion n’a pas allégué qu’ils ne sont pas des produits chimiques et préparations des industries chimiques ou des industries connexes, le Tribunal est d’avis qu’elles sont clairement visées par les termes de la position no 38.24. Puisque le Tribunal n’a relevé aucune autre position dans laquelle les marchandises en cause pourraient être dénommées ou comprises, aux termes de la Règle 1 des Règles générales, il conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 38.24.

Classement aux niveaux de la sous-position et du numéro tarifaire

46. Ayant déterminé que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 38.24, le Tribunal doit maintenant déterminer le classement approprié aux niveaux de la sous-position et du numéro tarifaire des marchandises en cause dans cette position. À cet égard, sur la foi des termes des sous-positions et des numéros tarifaires pertinents énumérés dans l’annexe du Tarif des douanes, l’ASFC soutient que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 3824.90.10. Aux termes de la Règle 6 des Règles générales et de la Règle 1 des Règles canadiennes, le Tribunal convient que les marchandises doivent être classées dans la sous-position no 3824.90 et dans le numéro tarifaire 3824.90.10. De l’avis du Tribunal, la sous-position no 3824.90 est la seule sous-position de la position no 38.24 qui vise les marchandises en cause ces marchandises respectant les termes du numéro tarifaire no 3824.90.10, qui vise les préparations d’oxyde devant être utilisées pour enlever des composés de sulfure.

Conclusion

47. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 3824.90.10, comme l’a déterminé l’ASFC.

DÉCISION

Par conséquent, l’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . D.O.R.S./91-499.

4 . Pièce du Tribunal AP-2009-061-17.

5 . Pièce du Tribunal AP-2009-061-14A. Cet élément de preuve indique que les produits pétroliers devant être raffinés contiennent des composés organiques de soufre dans lesquels on retrouve des liaisons chimiques entre les atomes de soufre et de carbone. On utilise les catalyseurs d’hydrotraitement pour briser les liaisons entre le carbone et le soufre, ce qui entraîne l’élimination du soufre sous forme de sulfure d’hydrogène gazeux.

6 . Pièce du Tribunal AP-2009-061-05B au para. 22; pièce du Tribunal AP-2009-061-10A au para. 12.

7 . Pièces A-01, A-02 et A-03.

8 . Le Canada est l’un des pays signataires de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

9 . Le Tribunal fait remarquer que l’article 13 de la Loi sur les langues officielles prévoit que les versions française et anglaise de toute loi du Parlement ont également force de loi ou même valeur. Par conséquent, le Tribunal peut examiner les versions française et anglaise de l’annexe du Tarif des douanes pour l’interprétation de la nomenclature tarifaire.

10 . L.C. 1997, c. 36, annexe [Règles générales].

11 . L.C. 1997, c. 36, annexe.

12 . Les Règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position (c.-à-d. à quatre chiffres). En vertu de la Règle 6 des Règles générales, les Règles 1 à 5 s’appliquent au classement au niveau de la sous-position (c.-à-d. à six chiffres). De la même façon, les Règles canadiennes rendent les Règles 1 à 5 des Règles générales applicables au classement au niveau du numéro tarifaire (c.-à-d. à huit chiffres).

13 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003 [Avis de classement].

14 . Organisation mondiale des douanes, 4e éd., Bruxelles, 2007 [Notes explicatives].

15 . Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII) aux para. 13, 17.

16 . La Règle 6 des Règles générales prévoit ce qui suit : « Le classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des Notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les Règles ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être comparées que les sous-positions de même niveau. Aux fins de cette Règle, les Notes de Sections et de Chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires. »

17 . Il importe de souligner que si le Tribunal détermine que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position 38.15, comme le soutient Criterion, les parties sont également en désaccord en ce qui a trait au numéro tarifaire dans lequel les marchandises en cause doivent être classées. Dans ce cas, l’ASFC soutient que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 3815.19.10, alors que Criterion soutient qu’elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 3815.90.90. Toutefois, si le Tribunal détermine que les marchandises en cause ne peuvent pas être classées dans la position 38.15, il ne sera pas nécessaire de trancher cette question pour statuer sur le présent appel.

18 . (13 février 2004), AP-2002-117 (TCCE) à la p. 7 : « Les deux parties s’entendent pour dire que les marchandises en cause sont des “préparations alimentaires”. Le Tribunal est aussi d’accord sur ce fait, même si les marchandises en cause sont des produits intermédiaires, puisque les Notes explicatives de la position no 19.01 confirment que les préparations alimentaires peuvent également constituer des “préparations intermédiaires destinées à l’industrie alimentaire”. »

19 . Les Notes explicatives nomment expressément les catalyseurs radicalaires, les catalyseurs ioniques et les catalyseurs pour les réactions de polycondensation.