HBC IMPORTS A/S DE ZELLERS INC.


HBC IMPORTS A/S DE ZELLERS INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2010-019

Décision et motifs rendus
le mercredi 6 avril 2011


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À un appel entendu le 20 janvier 2011, en vertu du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 31 mars 2010, concernant une demande de révision d’une décision anticipée aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

HBC IMPORTS A/S DE ZELLERS INC. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est admis.

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)

Date de l’audience : Le 20 janvier 2011

Membre du Tribunal : Jason W. Downey, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Eric Wildhaber

Directeur de la recherche : Audrey Chapman

Agent de la recherche : Jan Wojcik

Gestionnaire, Bureau du greffe : Michel Parent

Agent du greffe : Julie Lescom

PARTICIPANTS :

Appelante Conseiller/représentant
HBC Imports a/s de Zellers Inc. Andrew T. Simkins
Intimé Conseiller/représentant
Président de l’Agence des services frontaliers du Canada Jennifer Francis

TÉMOIN :

Celeste Irvine-Jones
Architecte d’intérieur
Creative Friction

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté par HBC Imports a/s de Zellers Inc. (HBC) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard d’une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4).

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines étagères à suspendre (les marchandises en cause) sont correctement classées dans le numéro tarifaire 6307.90.99 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre d’autres articles confectionnés avec d’autres matières textiles, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9403.89.19 à titre d’autres meubles et leurs parties, pour usages domestiques, comme le soutient HBC.

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

3. Le 10 juillet 2009, HBC présentait une demande de décision anticipée relativement au classement tarifaire des marchandises en cause. Le 8 octobre 2009, l’ASFC rendait une décision anticipée aux termes de l’alinéa 43.1(1)c) de la Loi, dans laquelle elle classait les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 6307.90.99 à titre d’autres articles confectionnés avec d’autres matières textiles3 .

4. Le 3 novembre 2009, HBC demandait la révision de la décision anticipée aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi 4 . Le 31 mars 2010, l’ASFC confirmait la décision anticipée aux termes du paragraphe 60(4)5 .

5. Le 28 juin 2010, HBC déposait le présent appel auprès du Tribunal aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi 6 .

6. Le 20 janvier 2011, le Tribunal tenait une audience publique à Ottawa (Ontario).

7. L’ASFC a fait entendre un témoin, Mme Celeste Irvine-Jones, architecte d’intérieur à l’emploi de Creative Friction. Le Tribunal a reconnu à Mme Irvine-Jones le titre d’experte en architecture d’intérieur7 . HBC n’a fait entendre aucun témoin.

MARCHANDISES EN CAUSE

8. Les marchandises en cause sont deux modèles d’étagères à suspendre. Le modèle no 59103580 est une étagère frontale cylindrique à quatre tablettes et le modèle no 59104026 est une étagère frontale carrée à six tablettes8 .

9. Les marchandises en cause sont faites d’une matière textile en nylon et de carton. Le carton est cousu à l’intérieur de la matière textile pour créer des tablettes. Les marchandises en cause sont conçues pour être suspendues à une tringle de garde-robe au moyen d’une fermeture adhésive VelcroMD, qui est intégrée aux marchandises en cause. En fait, c’est en étant suspendues que les marchandises en cause acquièrent, par gravité, leur forme et leur fonction. Les marchandises en cause sont destinées à ranger des articles relativement légers comme des animaux en peluche, des jouets, des vêtements et des chaussures9 .

10. HBC a déposé comme pièces un échantillon de chaque modèle des marchandises en cause10 .

ANALYSE

Cadre législatif

11. Dans des appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi concernant les questions de classement tarifaire, le Tribunal détermine le classement tarifaire des marchandises conformément aux règles d’interprétation prescrites.

12. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes11 . L’annexe est divisée en sections et en chapitres, et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires. Les sections et chapitres peuvent comprendre des notes concernant leur interprétation. Les articles 10 et 11 du Tarif des douanes prescrivent la méthode que le Tribunal doit appliquer pour l’interprétation de l’annexe afin de déterminer le classement tarifaire approprié de marchandises.

13. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « [...] le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[12] et les Règles canadiennes[13] énoncées à l’annexe. »

14. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade, de sorte que si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il faut alors tenir compte de la Règle 2, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le classement soit établi14 . La Règle 1 prévoit ce qui suit : « [...] le classement [est] déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes. »

15. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « Pour l’interprétation des positions et sous-positions, il est tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[15] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[16] et de leurs modifications, publiés par le Conseil de coopération douanière (Organisation mondiale des douanes). » Par conséquent, contrairement aux notes de sections et de chapitres, les Notes explicatives n’ont pas force exécutoire pour le Tribunal dans son classement des marchandises importées. Toutefois, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il faut respecter ces notes, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire, puisqu’elles servent de guide d’interprétation aux fins du classement tarifaire au Canada17 .

16. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées selon les termes des positions et de toute note de section ou de chapitre pertinente du Tarif des douanes.

17. Après que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées, l’étape suivante consiste à déterminer la sous-position et le numéro tarifaire appropriés, par application de la Règle 6 des Règles générales dans le cas de la sous-position et des Règles canadiennes dans le cas du numéro tarifaire18 .

18. L’article 13 de la Loi sur les langues officielles 19 prévoit que les versions française et anglaise de toute loi du Parlement ont également force de loi ou même valeur.

Dispositions pertinentes du Tarif des douanes, des Règles générales et des Notes explicatives

19. Les dispositions pertinentes du Tarif des douanes, qui, selon HBC, s’appliquent aux marchandises en cause, prévoient ce qui suit :

Section XX

MARCHANDISES ET PRODUITS DIVERS

Chapitre 94

MEUBLES; MOBILIER MÉDICO-CHIRURGICAL; ARTICLES DE LITERIE
ET SIMILAIRES; APPAREILS D’ÉCLAIRAGE NON DÉNOMMÉS
NI COMPRIS AILLEURS; LAMPES-RÉCLAMES, ENSEIGNES LUMINEUSES, PLAQUES INDICATRICES LUMINEUSES ET ARTICLES SIMILAIRES; CONSTRUCTION PRÉFABRIQUÉES

[...]

94.03 Autres meubles et leurs parties.

[...]

-Meubles en autres matières, y compris le rotin, l’osier, le bambou ou les matières similaires :

9403.89 - -Autres

- - -Pour usages domestiques :

[...]

9403.89.19 - - - -Autres

20. Il n’y a pas de notes de section pertinentes à la section XX.

21. La note de chapitre du chapitre 94 prévoit ce qui suit :

2. Les articles (autres que les parties) visés dans les nos 94.01 à 94.03 doivent être conçus pour se poser sur le sol.

Restent toutefois compris dans ces positions, même s’ils sont conçus pour être suspendus, fixés au mur ou posés les uns sur les autres :

a) les armoires, les bibliothèques, les étagères et les meubles à éléments complémentaires;

b) les sièges et lits.

22. Les Notes explicatives pertinentes du chapitre 94 prévoient ce qui suit :

Le présent Chapitre englobe, sous réserve des exceptions mentionnées dans les Notes explicatives de ce Chapitre :

1) L’ensemble des meubles, ainsi que leurs parties (nos 94.01 à 94.03).

[...]

Au sens du présent Chapitre, on entend par meubles ou mobilier :

A) Les divers objets mobiles, non compris dans des positions plus spécifiques de la Nomenclature qui sont conçus pour se poser sur le sol (même si dans certains cas particuliers - meubles et sièges de navires, par exemple -ils sont appelés à être fixés ou assujettis au sol) et qui servent à garnir, dans un but principalement utilitaire, les appartements, hôtels, théâtres, cinémas, bureaux, églises, écoles, cafés, restaurants, laboratoires, hôpitaux, cliniques, cabinets dentaires, etc., ainsi que les navires, avions, voitures de chemin de fer, voitures automobiles, remorques-camping et engins de transport analogues. Les articles de même nature (bancs, chaises, etc.) utilisés dans les jardins, squares, promenades publiques, sont également compris ici.

B) Les articles suivants :

1) Les armoires, les bibliothèques, les étagères et les meubles à éléments complémentaires, à suspendre, à fixer au mur, à superposer ou à juxtaposer, destinés au rangement d’articles divers (livres, vaisselle, ustensiles de cuisine, verrerie, linge, médicaments, articles de toilette, appareils de radio ou de télévision, bibelots, etc.), ainsi que les unités constitutives des meubles à éléments complémentaires présentées isolément.

2) Les sièges et lits suspendus ou rabattables.

Exception faite des articles cités au paragraphe B) ci-dessus, il résulte de ce qui précède que ne sont pas considérés comme meubles les objets utilisés à usage de meubles, que l’on place sur d’autres meubles ou sur des étagères, que l’on accroche aux murs ou que l’on suspend aux plafonds.

[...]

Entrent dans les nos 94.01 à 94.03 les articles d’ameublement en toutes matières : bois, osier, bambou, rotin, matières plastiques, métaux communs, verre, cuir, pierre, céramique, etc. [...].

23. Les Notes explicatives pertinentes de la position no 94.03 prévoient ce qui suit :

Parmi les meubles de cette position, dans laquelle sont groupés, non seulement les articles eux-mêmes non repris dans les positions précédentes, mais aussi leurs parties, il y a lieu de mentionner tout d’abord ceux qui se prêtent généralement à l’utilisation en différents lieux, tels qu’armoires, vitrines, tables, porte-téléphone, bureaux, secrétaires, bibliothèques, étagères.

Viennent ensuite les articles d’ameublement particulièrement conçus :

1) Pour appartements, hôtels, etc., tels que : bahuts, coffres à linge, coffres à pain ou huches, chiffonniers, colonnes, tables de toilette, coiffeuses, guéridons, garde-robes, lingères, portemanteaux, porte-parapluies, buffets, dressoirs, argentiers, garde-manger, tables de nuit, lits (y compris les lits réversibles, les lits de camp, les lits pliants, les berceaux), travailleuses, écrans de foyer, paravents, cendriers sur socle, casiers à musique, pupitres, parcs pour enfants, tables roulantes (à hors d’œuvres, à liqueurs, par exemple), même équipées de résistances chauffantes.

[...]

Sont exclus de la présente position :

a) Les coffres et malles n’ayant pas le caractère de meubles (no 42.02).

b) Les échelles et marchepieds, les tréteaux, les établis de menuisiers n’ayant pas le caractère de meubles, qui suivent le régime de la matière constitutive (nos 44.21, 73.26, etc.).

[...]

e) Les hamacs (nos 56.08 ou 63.06, notamment).

24. Les dispositions pertinentes du Tarif des douanes, qui, selon l’ASFC, s’appliquent aux marchandises en cause, prévoient ce qui suit :

Section XI

MATIÈRES TEXTILES ET OUVRAGES EN CES MATIÈRES

[...]

Chapitre 63

AUTRES ARTICLES TEXTILES CONFECTIONNÉS; ASSORTIMENTS;
FRIPERIE ET CHIFFONS

[...]

63.07 Autres articles confectionnés, y compris les patrons de vêtements.

[...]

6307.90 -Autres

[...]

- - -Autres :

[...]

6307.90.99 - - - -D’autres matières textiles

25. Les notes de section pertinentes de la section XI prévoient ce qui suit :

1 La présente Section ne comprend pas :

[...]

s) les articles du Chapitre 94 (meubles, articles de literie, appareils d’éclairage, par exemple);

[...]

7. Dans la présente Section, on entend par confectionnés :

[...]

e) les articles assemblés par couture, par collage ou autrement (à l’exclusion des pièces du même textile réunies aux extrémités de façon à former une pièce de plus grande longueur, ainsi que des pièces constituées par deux ou plusieurs textiles superposés sur toute leur surface et assemblés ainsi entre eux, même avec intercalation d’une matière de rembourrage);

[...]

26. Les notes de chapitre pertinentes du chapitre 63 prévoient ce qui suit :

1. Le Sous-Chapitre I, qui comprend des articles en tous textiles, ne s’applique qu’aux articles confectionnés.

27. Les Notes explicatives pertinentes de la section XI prévoient ce qui suit :

La Section XI traite, d’une manière générale, de l’ensemble des matières premières de l’industrie textile (soie, laine, coton, fibres synthétiques ou artificielles, etc.), des produits semi-ouvrés (fils et tissus, par exemple) et des articles confectionnés qui en dérivent. [...]

[...]

Articles confectionnés

D’après les dispositions de la Note 7 de la Section XI, on entend par confectionnés :

[...]

5) Les articles assemblés par couture, collage ou autrement. Parmi ces articles, qui sont extrêmement nombreux, on peut citer les vêtements. Il est fait exception à cette règle pour les pièces formées par la réunion bout à bout de deux ou plusieurs longueurs d’un même textile, ainsi que pour les textiles en pièces constitués par deux ou plusieurs textiles superposés sur toute leur surface et assemblés. De même, les produits textiles matelassés en pièces, constitués d’une ou plusieurs couches de matières textiles associées à une matière de rembourrage, par piqûre, capitonnage ou autre cloisonnement, ne sont pas considérés comme confectionnés.

28. Les Notes explicatives pertinentes du chapitre 63 prévoient ce qui suit :

Le présent Chapitre comprend :

1) Sous les nos 63.01 à 63.07 (Sous-Chapitre I) les articles en tous textiles (tissus, étoffes de bonneterie, feutres, nontissés, etc.), qui ne sont pas compris dans des positions plus spécifiques de la Section XI ou dans d’autres Chapitres de la Nomenclature. Sous le terme d’articles, on ne vise ici que des produits confectionnés au sens de la Note 7 de la Section XI (voir la partie II des Considérations générales de la Section XI).

Ce Sous-Chapitre comprend également des articles confectionnés en tulle, en tissus à mailles nouées, en dentelle ou en broderie (y compris ceux en dentelle ou en broderie fabriqués directement en forme) des nos 58.04 ou 58.10.

Le classement de ces articles n’est pas affecté, d’une manière générale, par la présence de simples garnitures ou accessoires en autres matières (en pelleterie, métal commun ou métal précieux, cuir, carton, matière plastique, par exemple).

Les articles composites dans lesquels ces autres matières jouent un rôle plus important que celui de simples garnitures ou accessoires sont classés conformément aux Notes y afférentes des Sections, des Chapitres (Règle générale interprétative 1) ou, à défaut, conformément aux autres Règles générales interprétatives.

29. Les Notes explicatives pertinentes de la position no 63.07 prévoient ce qui suit :

La présente position englobe les articles confectionnés en tout textile, qui ne sont pas repris dans des positions plus spécifiques de la Section XI ou dans d’autres Chapitres de la Nomenclature.

Elle comprend en particulier :

[...]

5) Les sacs à linge sale, sacs et pochettes à chaussures, pour chemise de nuit ou pour pyjama, sachets pour bas de femmes, sachets pour mouchoirs et sacs ou sachets analogues en toile fine à usages domestiques.

6) Les housses protectrices pour vêtements (autres que celles du no 42.02).

Position des parties

HBC

30. HBC soutient que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 94.03 à titre d’autres meubles20 conformément à la Règle 1 des Règles générales ainsi qu’aux notes de section et de chapitre et aux Notes explicatives pertinentes.

31. HBC soutient que le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées dans le chapitre 94 à titre de meubles21 car la note 1s) de la section XI, qui englobe les chapitres 50 à 63, exclut les articles du chapitre 94 d’un classement dans la section XI. Elle souligne que le chapitre 94 ne contient aucune note correspondante excluant les articles de la section XI22 . À son avis, si le Tribunal déterminait que les marchandises en cause sont des meubles, elles seraient donc spécifiquement exclues de la catégorie des articles textiles confectionnés du chapitre 63.

32. HBC allègue que les marchandises en cause sont des étagères car elles répondent à tous les critères énumérés à la note 2 du chapitre 94 et répondent à la définition du terme « meubles » énoncée dans les Notes explicatives du chapitre 94.

33. À cet égard, HBC soutient que les marchandises en cause (1) sont des objets mobiles, car elles possèdent des fermetures adhésives VelcroMD permettant de les suspendre et de les enlever facilement, (2) comportent quatre ou six tablettes et sont conçues pour être suspendues, (3) sont conçues pour ranger des articles légers comme des animaux en peluche, des vêtements, des chaussures, des jouets, etc., dans le foyer, ce que HBC considère comme une fonction utilitaire servant dans un appartement23 . HBC prétend qu’en répondant à ces critères, les marchandises en cause sont considérées comme des meubles. Au soutien de sa conclusion, HBC renvoie à la décision du Tribunal dans Spacesaver Corporation c. Sous-M.R.N. 24 , dans laquelle le Tribunal a énuméré et analysé ces critères25 .

34. HBC fait remarquer que, selon les Notes explicatives du chapitre 94 et la définition du terme « meubles » qui y est contenue, un meuble ne doit pas obligatoirement être fait en bois, en métal ou en plastique26 . HBC soutient que les positions nos 94.01 à 94.03 englobent des meubles pouvant être faits en toutes matières27 et mentionne le fauteuil poire à titre d’exemple de meuble fait en une matière autre que le bois, le métal ou le plastique28 .

35. À l’égard de l’argument de l’ASFC selon lequel une étagère doit être composée d’une matière rigide, HBC fait remarquer que les seuls éléments communs se retrouvant dans les définitions de « shelf » (étagère) fournies par les deux parties sont qu’une étagère est constituée d’une quelconque matière, qu’elle est horizontale par rapport au sol et qu’elle supporte des objets29 . HBC soutient en outre que le carton est défini comme une matière raide et que la définition de « stiff » (raide) comprend le mot « rigid » (rigide)30 .

36. Enfin, à l’appui de sa position selon laquelle les marchandises en cause sont des étagères, HBC indique que l’ASFC a reconnu, dans sa décision du 31 mars 2010, que les marchandises en cause possèdent des étagères, se suspendent à des tringles de garde-robe et sont utilisées pour ranger des objets31 .

ASFC

37. Pour sa part, L’ASFC soutient que le caractère essentiel des marchandises en cause est celui d’une matière textile et qu’elles sont donc correctement classées dans la position no 63.0732 . Elle soutient que les marchandises en cause sont des articles confectionnés en nylon avec des compartiments contenant du carton.

38. L’ASFC soutient que les marchandises en cause répondent à la définition de « confectionnés » se trouvant à la note 7e) de la section XI33 . Plus précisément, le terme « confectionnés » signifie « [...] assemblés par couture, par collage ou autrement [...] ».

39. L’ASFC prétend que les marchandises en cause ont les mêmes caractéristiques et remplissent le même but que les marchandises classées dans la position no 63.07. Les marchandises en cause sont faites d’une matière textile similaire, peuvent être suspendues, contiennent des articles légers et pendent verticalement à des tringles de garde-robe comme les sacs à linge sale, les sacs et pochettes à chaussures et les housses protectrices énumérés dans les Notes explicatives de la position no 63.0734 .

40. L’ASFC soutient que les marchandises en cause n’entrent pas dans la position no 94.03 car elles n’ont pas le « caractère » de meubles et ne constituent pas non plus des étagères. À cet égard, elle prétend, en s’appuyant sur les exemples mentionnés dans la note 1) des Notes explicatives de la position no 94.03, que les marchandises en cause n’ont rien en commun avec ce qui est généralement considéré comme des meubles.

41. L’ASFC fait spécifiquement remarquer que les meubles ne sont généralement pas faits en nylon et en carton35 et que les compartiments séparés créés par ces éléments de carton ne sont pas pour autant des étagères36 .

42. L’ASFC s’appuie sur les Notes explicatives du chapitre 94 pour soutenir que les marchandises en cause ne peuvent être classifiées à titre « d’autres étagères » car elles ne sont pas similaires à des armoires ou à des bibliothèques37 . Elle fait remarquer que les définitions du mot « shelf » données par les dictionnaires indiquent que les étagères sont généralement faites d’une matière rigide, comme le bois, le métal ou le verre38 .

43. L’ASFC indique que les définitions du mot « shelf » ne font aucune mention d’une matière comme le carton. L’ASFC soutient que les marchandises en causes ne ressemblent pas aux marchandises généralement classées dans la position no 94.03, soit des marchandises en bois, en métal ou en plastique, puisqu’elles sont composées d’une matière textile et de carton.

44. L’ASFC fait remarquer également que les types de marchandises mentionnés dans la note B) des Notes explicatives du chapitre 94, c.-à-d. des livres, de la vaisselle, des ustensiles de cuisine, de la verrerie, du linge, des médicaments, des articles de toilette, des appareils de radio ou de télévision et des bibelots, sont les types d’articles qu’il est approprié de placer sur des étagères39 . À son avis, ces articles ne peuvent être placés dans les marchandises en cause.

45. Dans son témoignage, Mme Irvine-Jones a indiqué qu’il est peu probable que les objets lourds mentionnés dans les Notes explicatives soient rangés dans les marchandises en cause et que la verrerie et la vaisselle sont trop fragiles pour être rangées dans un support aussi instable40 . Toutefois, l’ASFC reconnaît que les marchandises en cause conviennent au rangement de divers « articles légers » [traduction].

46. L’ASFC soutient que le simple fait que les marchandises en cause soient commercialisées à titre d’étagères n’est pas suffisant pour qu’elles soient considérées comme des étagères41 .

47. Enfin, l’ASFC appuie sa position en renvoyant à des décisions douanières rendues aux États-Unis et dans l’Union Européenne, dans lesquelles des ensembles d’aménagement de placard et des étagères suspendus ont été classés dans la position no 63.07 et un ensemble d’aménagement de placard en bois a été classé dans la position no 94.0342 . L’ASFC reconnaît que le Tribunal n’est pas lié par ces décisions.

Classement tarifaire des marchandises en cause

48. Tel qu’il est indiqué ci-dessus, le Tribunal doit déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 6307.90.99 à titre d’autres articles confectionnés avec d’autres matières textiles, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9403.89.19 à titre d’autres meubles et leurs parties, pour usages domestiques, comme le soutient HBC.

49. Aux termes de la Règle 1 des Règles générales, le classement doit être déterminé d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres pertinentes. À cet égard, le Tribunal remarque que la note 1s) de la section XI exclut les articles du chapitre 94 d’un classement dans la section XI (c.-à-d. dans les chapitres 50 à 63). Le Tribunal prend également note de l’absence de toute note d’exclusion dans la section XX ou dans le chapitre 94 qui empêcherait le classement des articles de la section XI ou du chapitre 63 dans la section XX. Étant donné l’absence de note d’exclusion correspondante dans la section XX ou le chapitre 94, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause sont des articles du chapitre 94.

Les marchandises en cause sont-elles d’« autres meubles » visés par la position no 94.03?

50. La position no 94.03 englobe les « [a]utres meubles et leurs parties ». La note 2 du chapitre 94 prévoit certains critères auxquels doivent répondre des marchandises afin de pouvoir être classées dans les positions nos 94.01 à 94.03. La note 2 prévoit ce qui suit :

Les articles (autres que les parties) visés dans les nos 94.01 à 94.03 doivent être conçus pour se poser sur le sol.

[Nos italiques]

51. Le Tribunal fait toutefois remarquer que la note 2 du chapitre 94 et les Notes explicatives du chapitre 94 comprennent certaines exceptions par rapport aux critères susmentionnés. La note 2 énonce ce qui suit :

Restent toutefois compris dans ces positions, même s’ils sont conçus pour être suspendus, fixés au mur ou posés les uns sur les autres :

a) les armoires, les bibliothèques, les étagères et les meubles à éléments complémentaires;

b) les sièges et lits.

[Nos italiques]

52. Les Notes explicatives du chaptire 94 prévoient ce qui suit :

Le présent Chapitre englobe [...]

1) L’ensemble des meubles, ainsi que leurs parties (nos 94.01 à 94.03).

[...]

Au sens du présent Chapitre, on entend par meubles ou mobilier :

A) Les divers objets mobiles [nos italiques], non compris dans des positions plus spécifiques de la Nomenclature qui sont conçus pour se poser sur le sol (même si dans certains cas particuliers - meubles et sièges de navires, par exemple -ils sont appelés à être fixés ou assujettis au sol) et qui servent à garnir, dans un but principalement utilitaire, les appartements [...].

B) Les articles suivants :

1) Les armoires, les bibliothèques, les étagères et les meubles à éléments complémentaires, à suspendre [nos italiques], à fixer au mur, à superposer ou à juxtaposer, destinés au rangement d’articles divers (livres, vaisselle, ustensiles de cuisine, verrerie, linge, médicaments, articles de toilette, appareils de radio ou de télévision, bibelots, etc.), ainsi que les unités constitutives des meubles à éléments complémentaires présentées isolément.

2) Les sièges et lits suspendus ou rabattables.

53. En tenant compte de la note 2 du chapitre 94 et des Notes explicatives du chapitre 94, le Tribunal considère que, pour être des étagères, les marchandises en cause doivent répondre à deux critères. Elles doivent : 1) répondre à la définition de « meubles »; 2) comporter des étagères. Si le Tribunal détermine qu’elles ne répondent pas à l’un de ces critères, les marchandises en cause ne peuvent être classées dans le chapitre 94.

54. Le Tribunal déterminera d’abord si les marchandises en cause sont des meubles. Pour les fins du classement tarifaire, la définition de « meubles » dans les Notes explicatives du chapitre 94 fournit au Tribunal les indications nécessaires43 .

55. La partie A) de la définition indique que les marchandises en cause doivent répondre aux critères suivants : i) elles doivent être mobiles; ii) elles doivent être des objets; iii) elles doivent être conçues pour se poser sur le sol; iv) elles doivent servir dans un but principalement utilitaire; v) elles doivent servir à garnir des appartements. Cependant, la partie B) de la définition élargit la définition énoncée dans la partie A) afin d’y inclure certains articles qui ne sont pas nécessairement conçus pour se poser sur le sol. Elle prévoit plus spécifiquement que les marchandises peuvent être à suspendre.

56. Premièrement, le Tribunal a examiné les pièces et conclut que les marchandises en cause sont facilement transportables et convient avec les parties qu’elles sont mobiles44 . Elles ne sont ni construites ni conçues pour être ou devenir des immeubles au sens de la loi.

57. Deuxième, le Tribunal accepte la définition d’« article » comme étant « un produit fini ou semi-fini qui n’est pas considéré comme une matière ou un matériel »45 . Le Tribunal remarque que les marchandises en cause sont emballées comme des produits destinés à la vente au détail et peuvent être utilisées pour ranger divers objets. Le Tribunal est convaincu que les marchandises en cause sont des produits finis, par opposition à des produits de base, et sont donc des articles.

58. Troisièmement, les éléments de preuve indiquent clairement que les marchandises en cause sont conçues pour être suspendues à des tringles de garde-robe au moyen de leurs fermetures adhésives VelcroMD intégrées. En fait, les marchandises en cause n’acquièrent leur forme et ne remplissent leur fonction uniquement que lorsqu’elles sont suspendues à une tringle de garde-robe. En d’autres mots, la suspension est la caractéristique essentielle des marchandises en cause afin que celles-ci fonctionnent tel qu’il est prévu46 . Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont conçues pour être suspendues.

59. Quatrièmement, le Tribunal est convaincu que les marchandises en cause servent dans un but utilitaire. Elles sont d’ailleurs conçues pour ranger des articles tels des vêtements et des jouets. Le Tribunal conclut que l’utilité des marchandises en cause est le rangement47 .

60. Cinquièmement, le Tribunal est convaincu que les marchandises en cause servent à garnir des appartements. Les éléments de preuve indiquent que les marchandises en cause sont conçues pour ranger des articles de maison, comme des jouets d’enfant, du linge, des chaussures et des animaux en peluche. Conjugués au fait qu’elles ne sont pas conçues comme des articles robustes, le Tribunal conclut qu’elles sont destinées à un usage domestique plutôt que dans un cadre commercial ou industriel48 .

61. Enfin, l’argument de l’ASFC selon lequel les marchandises en cause ne peuvent être considérées comme des meubles car elles ne sont pas ce « [...] qu’une personne considérerait normalement comme des meubles » [traduction]49 ne convainc pas le Tribunal. Le Tribunal est d’avis qu’une telle considération est tout à fait subjective et varie certainement d’une personne à l’autre. Le Tribunal ne peut faire fi des critères et des définitions énoncés dans les Notes explicatives 50 .

62. Vu ce qui précède, le Tribunal conclut que les marchandises en cause répondent aux critères énoncés dans la définition de « meubles ». Le Tribunal déterminera maintenant si les marchandises en cause répondent à la définition d’« étagères ».

63. HBC et l’ASFC ont chacune soumis trois définitions du mot « shelf ».

64. L’ASFC soutient que les marchandises en cause ne sont pas similaires à des armoires, bibliothèques ou étagères car les définitions du mot « shelf » renvoient à un objet composé d’une matière rigide tel que le bois, le métal ou le verre. Elle fait remarquer qu’on ne trouve aucune mention de carton ou de matières textiles dans ces définitions. L’ASFC allègue que les types d’articles que l’on place habituellement sur des étagères, tels que des livres, de la vaisselle, des ustensiles de cuisine, de la verrerie, du linge, des médicaments, des articles de toilette, des appareils de radio ou de télévision et des bibelots sont des types d’articles qu’il serait inapproprié de placer sur les étagères des marchandises en cause.

65. Le Tribunal remarque que les définitions de dictionnaires du mot « shelf », fournies par les parties et reproduites ci-dessous, n’indiquent pas toutes qu’une étagère doit être rigide :

1 a : un morceau mince et plat, généralement long et étroit, d’une matière (comme le bois), fixé horizontalement (sur un mur par exemple) à une certaine distance du sol afin de soutenir des objets 51

1 a un morceau mince et plat de bois ou de métal, etc., en saillie d’un mur ou faisant partie d’une unité, servant à supporter des livres, etc. 52

Une planche mince et plate de bois, de métal, etc., fixée horizontalement contre un mur, etc., dans le but de soutenir des objets 53

1.a. Une structure plate, généralement rectangulaire, composée d’une matière rigide comme le bois, le verre ou le métal, fixée à angle droit à un mur ou à une autre surface verticale et servant à soutenir ou à ranger des objets54

Une planche ou une tablette posée horizontalement sur ou contre un mur afin de soutenir des articles tels que des livres; une des tablettes dans une bibliothèque ou un placard55

Un morceau plat de bois ou d’une matière rigide fixé à un mur ou formant une partie d’un meuble, offrant une surface pour ranger ou exposer des objets56 .

[Italiques ajoutées pour souligner, traduction]

66. Le Tribunal remarque également qu’aucune définition ou condition législative n’exige qu’une étagère soit rigide, ni n’indique qu’un quelconque degré de rigidité est requis.

67. La définition de « rigid » dans le Canadian Oxford Dictionary 57 se lit comme suit : « 1 sans flexibilité; qui ne peut être plié [...] » [traduction].

68. Dans son témoignage, Mme Irvine-Jones a indiqué que les étagères sont généralement rigides, mais que certaines étagères ne le sont pas nécessairement et que la rigidité nécessaire aux fins prévues est fournie par les supports. En ce qui concerne les marchandises en cause, Mme Irvine-Jones a indiqué qu’étant donné la raideur fournie par le carton, les marchandises en cause possèdent une « certaine rigidité » [traduction] et que les produits ménagers, comme les meubles, sont en constante évolution grâce à l’invention de nouveaux concepts et de nouvelles matières58 .

69. Le Tribunal remarque que les éléments de preuve ne sont pas clairs en ce qui a trait à la notion de rigidité. À cet égard, Mme Irvine-Jones a fait allusion à divers degrés de rigidité en décrivant des étagères. Le Tribunal remarque également que les définitions susmentionnées ne semblent pas inclure de notion intermédiaire, comme « semi-rigide » qui, de l’avis du Tribunal, décrirait plus adéquatement la nature souple des marchandises en cause. De plus, les parties ne s’entendent non plus pas pour affirmer que la notion de rigidité constitue une condition préalable afin qu’un produit soit considéré comme une étagère.

70. Par conséquent, compte tenu de l’analyse qui précède et considérant l’absence manifeste d’exigence législative en ce sens, le Tribunal conclut que la notion de rigidité n’est pas une condition préalable pour déterminer si un produit constitue une étagère.

71. Le Tribunal rappelle la mise en garde de la Cour suprême du Canada à l’égard de l’ajout de mots à des lois du Parlement59 . Selon la position de l’ASFC, l’annexe devrait se lire comme si elle contenait une notion de « rigidité », malgré l’absence de ce mot ou d’autres mots similaires. Le Tribunal refuse d’en faire une telle lecture.

72. Le Tribunal peut comprendre l’argument de l’ASFC concernant une prétendue exigence de rigidité est conforme au point de vue de l’ASFC selon lequel la composition en textile et en carton des marchandises en cause ne ressemble pas à la composition des marchandises généralement classées dans la position no 94.03 (métal, bois ou matières plastiques). À cet égard, le Tribunal remarque par contre que la composition des meubles classés dans la position no 94.03 ne se limite pas à des types spécifiques de matières60 .

73. Les critères énumérés dans les Notes explicatives n’imposent pas l’utilisation d’une matière spécifique, telle que le métal, le bois ou les matières plastiques. Au contraire, les Notes explicatives du chapitre 94 énoncent clairement qu’« [e]ntrent dans les nos 94.01 à 94.03 les articles d’ameublement en toutes matières : bois, osier, bambou, rotin, matières plastiques, métaux communs, verre, cuir, pierre, céramique, etc. ». En effet, les termes des sous-positions nos 9403.81 et 9403.89 réfèrent à « Autres », ce qui renvoie à des matières autres que les matières (métal, bois et matières plastiques) mentionnées dans les termes des sous-positions précédentes.

74. Selon un témoignage entendu par le Tribunal, les étagères en général sont conçues pour différents usages : certaines sont conçues pour y placer des articles lourds ou fragiles, tels que des téléviseurs ou de la verrerie, alors que d’autres sont conçues pour y placer des articles plus légers et ne pourraient pas soutenir des objets plus lourds dépassant leur capacité61 . Le Tribunal conclut alors que, pour les besoins de la présente cause, une définition plus appropriée d’étagère serait « une surface horizontale de quelconque matière, conçue pour soutenir des articles » [traduction].

75. À cet égard, le Tribunal remarque spécifiquement qu’en réponse à des questions posées par l’ASFC, Mme Irvine-Jones a convenu que les marchandises en cause comportent des étagères62 . De plus, l’ASFC a reconnu, dans sa décision du 31 mars 2010, que les marchandises en cause comportent des étagères63 .

76. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal est convaincu que les marchandises en cause comportent des étagères.

77. Ayant déterminé que les marchandises en cause répondent à la définition de « meubles » et qu’elles comportent des étagères, le Tribunal conclut que les marchandises en cause répondent à la définition d’« étagères » pour les fins du chapitre 94.

78. Le Tribunal remarque que la définition de « meubles » dans les Notes explicatives du chapitre 94 comprend aussi la condition expresse que l’article ne soit pas compris dans d’autres positions plus spécifiques de la nomenclature64 . Afin de s’assurer que ce n’est pas le cas, le Tribunal examine aussi, dans la section qui suit, la position soutenue par l’ASFC relativement à la position no 63.07, et vient à la conclusion que la position no 63.07 n’est pas plus spécifique que la position no 94.03.

La position no 63.07 n’est pas plus spécifique que la position no 94.03

79. Les termes de la position no 63.07 ainsi que les notes de chapitre et les Notes explicatives y afférentes exigent que trois conditions soient remplies pour qu’un produit soit classé dans cette position : i) il doit être un article; ii) il doit répondre à la définition de « confectionnés »; iii) il doit être en tous textiles.

80. Relativement aux deux premières conditions, le Tribunal a déjà déterminé que les marchandises en cause sont des articles et qu’elles répondent à la définition de « confectionnés ».

81. Le Tribunal remarque que la troisième condition exige que les marchandises soient composées en tous textiles. Les marchandises en cause sont un composite de nylon et de carton.65

82. Afin de déterminer si les marchandises en cause, qui sont constituées d’une combinaison de textiles et d’une autre matière, peuvent être classées dans une position du chapitre 63, le Tribunal se réfère aux Notes explicatives du chapitre 63, qui se lisent comme suit :

Le classement de ces articles [du sous-chapitre I, qui englobe les positions no 63.01 à 63.07] n’est pas affecté, d’une manière générale, par la présence de simples garnitures ou accessoires en autres matières (en pelleterie, métal commun ou métal précieux, cuir, carton, matière plastique, par exemple).

Les articles composites dans lesquels ces autres matières jouent un rôle plus important que celui de simples garnitures ou accessoires sont classés conformément aux Notes y afférentes des Sections, des Chapitres (Règle générale interprétative 1) ou, à défaut, conforment aux autres Règles générales interprétatives.

[Nos italiques]

83. En d’autres mots, des marchandises demeureront des articles de la position no 63.07 à la condition que les garnitures ou accessoires en autres matières demeurent de « simples » garnitures ou accessoires.

84. En l’espèce, le Tribunal conclut que la composante en carton des marchandises en cause joue un rôle plus important que celui de simple garniture ou accessoire. En fait, le Tribunal considère que le carton constitue une composante essentielle des marchandises en cause puisqu’il forme des étagères relativement raides qui contribuent à la fonction utilitaire des marchandises66 . De plus, comparativement à la quantité de textile utilisé pour fabriquer les marchandises, le carton a clairement une présence plus que mineure. Dans leurs réponses aux questions du Tribunal, les deux parties ont convenu que la présence du carton était importante, mais elles ne s’entendaient pas sur l’effet de la présence du carton sur le classement des marchandises en cause67 .

85. Puisque la composante en carton des marchandises en cause joue un rôle plus important que celui de simple garniture ou accessoire, le Tribunal doit, aux termes des Notes explicatives du chapitre 63, examiner si les marchandises en cause sont plus spécifiquement comprises dans la position no 63.07 conformément à la Règle 1 des Règles générales et doit donc examiner la liste de marchandises classées dans cette position.

86. L’ASFC prétend que les marchandises en cause ont les mêmes caractéristiques que les sacs à linge sale, les sacs et pochettes à chaussures et les housses protectrices qui sont énumérés dans les Notes explicatives de la position no 63.07. Cet argument ne convainc pas le Tribunal. Comme il l’a déterminé ci-dessus, le Tribunal considère plutôt que les marchandises en cause possèdent des étagères horizontales, qui servent à contenir des articles, ce qui font d’elles des étagères. Les marchandises énumérées dans les Notes explicatives de la position no 63.07 ne possèdent pas cette caractéristique déterminante. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas plus spécifiquement comprises dans la position no 63.07.

Classement aux niveaux de la sous-position et du numéro tarifaire

87. Ayant déterminé que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 94.03, le Tribunal doit maintenant déterminer le classement approprié aux niveaux de la sous-position et du numéro tarifaire.

88. La position no 94.03 comporte neuf sous-positions à trois tirets, soit huit sous-positions se rapportant à des meubles et une sous-position, qui ne vise pas les marchandises en cause, se rapportant à des pièces. Puisque sept des huit sous-positions se rapportent à des meubles en métal, en bois ou en matières plastiques, les marchandises en cause doivent être classées dans la seule sous-position restante qui se rapporte à des meubles composés d’autres matières.

89. La seule sous-position restante est divisée à nouveau en deux sous-positions à quatre tirets qui sont fonction de la composition, à savoir « En bambou ou en rotin » ou « Autres ». Par conséquent, conformément à la Règle 6 des Règles générales, les marchandises en cause doivent être classées dans la sous-position no 9403.89.

90. La sous-position no 9403.89 contient deux numéros tarifaires à cinq tirets. Comme les marchandises en cause sont utilisées à la maison, le Tribunal considère qu’elles sont pour usages domestiques. Le numéro tarifaire sous le titre « Pour usages domestiques » est divisé à nouveau en deux numéros tarifaires à six tirets. Puisque le premier de ces deux numéros tarifaires est clairement inapplicable aux marchandises en cause, celles-ci doivent être classées dans le numéro tarifaire restant comme « Autres ». Par conséquent, conformément à la Règle 1 des Règles canadiennes, les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 9403.89.19.

DÉCISION

91. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 9403.89.19 à titre d’autres meubles et leurs parties, pour usages domestiques.

92. Par conséquent, l’appel est admis.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A, onglets 1, 2.

4 . Ibid. onglet 3.

5 . Ibid. onglet 4.

6 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-01.

7 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-08A.

8 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A aux para. 5, 6, onglet 1.

9 . Ibid. aux para. 5, 6, onglet 1.

10 . La pièce A-01 est une étagère frontale carrée à six tablettes, modèle no 59104026, et la pièce A-02 est une étagère frontale cylindrique à quatre tablettes, modèle no 59103580.

11 . Le Canada est l’un des pays signataires de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

12 . L.C. 1997, c. 36, annexe [Règles générales].

13 . L.C. 1997, c. 36, annexe.

14 . Les Règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position (c.-à-d. à quatre chiffres). En vertu de la Règle 6 des Règles générales, les Règles 1 à 5 s’appliquent au classement au niveau de la sous-position (c.-à-d. à six chiffres). De la même façon, les Règles canadiennes rendent les Règles 1 à 5 des Règles générales applicables au classement au niveau du numéro tarifaire (c.-à-d. à huit chiffres).

15 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003.

16 . Organisation mondiale des douanes, 4e éd., Bruxelles, 2007 [Notes explicatives].

17 . Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII) aux para. 13, 17.

18 . La Règle 6 des Règles générales prévoit ce qui suit : « Le classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des Notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les Règles ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être comparées que les sous-positions de même niveau. Aux fins de cette Règle, les Notes de Sections et de Chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires. »

19 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 31.

20 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A au para. 18; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, à la p. 35.

21 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, à la p. 40.

22 . Ibid. aux pp. 35-37.

23 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A aux paras. 21-24, Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 42-43.

24 . (26 mars 1996), AP-95-013, AP-95-073 et AP-95-078 (TCCE) [Spacesaver].

25 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A, onglet 12; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 40-42.

26 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 46, 47, 89.

27 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A aux paras. 25-27; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 43-45.

28 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, à la p. 89.

29 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A, onglet 4; pièce du Tribunal AP-2010-019-11A, onglet 4; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 47-49.

30 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-11A, onglets 5, 6; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 88, 89.

31 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A aux paras. 28-30.

32 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 18; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, à la p. 68.

33 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 19; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, à la p. 69.

34 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A aux paras. 20, 21; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 70, 71.

35 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A aux paras. 13-15; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 64, 65.

36 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 16; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, à la p. 75.

37 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 60-65, 71, 73.

38 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 11, onglet 4; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 61, 62.

39 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 13; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, à la p. 63.

40 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 21; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 20-22.

41 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 12; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, à la p. 64.

42 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 17, onglets 5, 6; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 69, 70.

43 . Ces critères ont été examinés dans Spacesaver et s’appliquent ici.

44 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 29, 42.

45 . Wolseley Canada Inc. c Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (18 janvier 2011), AP-2009-004 (TCCE).

46 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 29, 43.

47 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A au para. 24; pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 21.

48 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 15-18.

49 . Ibid. à la p. 49.

50 . Ce principe d’interprétation des lois est souligné dans Friesen c. Canada, [1995] 3 R.C.S. 103 [Friesen].

51 . Merriam-Webster’s Collegiate Dictionary, 11e éd., s.v. « shelf ».

52 . Canadian Oxford Dictionary, 2e éd., s.v. « shelf ».

53 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-11A, onglet 4.

54 . Nelson Canadian Dictionary, 1997, s.v. « shelf ».

55 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 11, onglet 4.

56 . Ibid.

57 . Deuxième éd., s.v. « rigid ».

58 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 14, 19, 26.

59 . Friesen au para. 27 : « L’intimée demande à notre Cour d’interpréter la définition du terme « inventaire » comme si elle était ainsi formulée : «inventaire» [pour une année d’imposition] signifie la description des biens dont le prix ou la valeur entre dans le calcul du revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise pour [l’]année d’imposition. Le principal problème que pose l’interprétation préconisée par l’intimée découle du fait que les mots entre crochets ne figurent pas dans la définition de la Loi de l’impôt sur le revenu. L’ajout de ces mots à la définition a pour effet de changer considérablement le sens de la définition. Selon un principe fondamental en matière d’interprétation des lois, un tribunal ne devrait pas accepter une interprétation qui nécessite l’ajout de mots, lorsqu’il existe une autre interprétation acceptable qui ne requiert aucun ajout de cette nature. L’ajout de mots dans une définition qui figure dans une loi est encore moins acceptable lorsque les termes qui doivent être ajoutés figurent dans plusieurs autres définitions de cette même loi. Si le législateur avait voulu exiger que le bien entre dans le calcul du revenu au cours d’une année particulière, de manière à constituer un bien figurant dans un inventaire pour cette même année, il aurait ajouté la phraséologie nécessaire pour exprimer clairement cette volonté. »

60 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-05A au para. 14; Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 64, 65, 71-74.

61 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 85, 86.

62 . Ibid. aux pp. 31, 32.

63 . Ibid.; pièce du Tribunal AP-2010-019-03A, onglet 4.

64 . Les Notes explicatives de la position no 63.07 comprennent une exigence similaire, selon laquelle cette position englobe les articles confectionnés de toute matière textile qui ne sont pas compris plus spécifiquement dans d’autres positions de la section XI ou ailleurs dans la nomenclature.

65 . Pièce du Tribunal AP-2010-019-03A au para. 6; pièce du Tribunal AP-2010-019-05A aux paras. 1, 16.

66 . En réponse à des questions du Tribunal, HBC soutient que le carton joue un rôle important et confère aux marchandises en cause leur fonction, tandis que l’ASFC soutient que le carton ne confère qu’un peu de support. Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 81-85.

67 . Transcription de l’audience publique, 20 janvier 2011, aux pp. 81-85.