NUTRICIA NORTH AMERICA


NUTRICIA NORTH AMERICA
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2009-017

Décision et motifs rendus
le mercredi 18 mai 2011


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À un appel entendu le 10 février 2011, en vertu du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada les 31 mars et 9 avril 2009, concernant des demandes de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

NUTRICIA NORTH AMERICA Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Pasquale Michaele Saroli
Pasquale Michaele Saroli
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)

Date de l’audience : Le 10 février 2011

Membre du Tribunal : Pasquale Michaele Saroli, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Courtney Fitzpatrick

Directeur de la recherche : Randolph W. Heggart

Agent de la recherche : Jan Wojcik

Gestionnaire, Bureau du greffe : Michel Parent

Agent principal du greffe : Sarah MacMillan

PARTICIPANTS :

Appelante Conseiller/représentant
Nutricia North America Wendy J. Wagner
Intimé Conseiller/représentant
Président de l’Agence des services frontaliers du Canada Andrew Gibbs

TÉMOINS :

Ulrike Reichert
Gestionnaire, Affaires médicales et scientifiques
Nutricia North America

Bernard Fortier
Director commercial — Canada
Nutricia North America

David Mack
Chef
Division de gastroentérologie, d’hépatologie et de nutrition
Département de pédiatrie
Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté par Nutricia North America (Nutricia) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard de décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4).

2. Deux questions sont en litige dans le présent appel. La première consiste à déterminer si les préparations NeocateMD (les marchandises en cause) sont correctement classées dans le numéro tarifaire 2106.90.99 de l’annexe du Tarif des douanes 2 à titre d’autres préparations alimentaires, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 3004.50.00 à titre de médicaments constitués de produits mélangés, préparés à des fins thérapeutiques ou prophylactiques, présentés sous forme de doses et contenant des vitamines, comme le soutient Nutricia. La deuxième question en litige consiste à déterminer si les marchandises en cause peuvent aussi être classées dans le numéro tarifaire 9979.00.00 à titre de marchandises conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps et si elles sont, par conséquent, admissibles au traitement en franchise de droits.

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

3. Du 16 mars au 17 septembre 2007, Nutricia importait les marchandises en cause aux termes de cinq transactions d’importation, dans le numéro tarifaire 3004.50.00.

4. Le 4 février 2008, aux termes du paragraphe 59(1) de la Loi, l’ASFC révisait le classement tarifaire des marchandises en cause et les classait dans le numéro tarifaire 2106.90.99 à titre d’autres préparations alimentaires.

5. Le ou vers le 17 avril 2008, Nutricia déposait une demande de révision aux termes du paragraphe 60(1) de la Loi. Le 9 avril 2009, l’ASFC procédait à un réexamen aux termes du paragraphe 60(4), lequel confirmait le classement des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 2106.90.99.

6. Le 5 mars 2008, Nutricia présentait une demande de décision anticipée aux termes du paragraphe 43.1(1) de la Loi. Le 13 mai 2008, l’ASFC rendait une décision anticipée aux termes de l’alinéa 43.1(1)c), dans laquelle elle classait les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 2106.90.99.

7. Le 11 juin 2008, Nutricia demandait la révision de la décision anticipée aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi. Le 31 mars 2009, l’ASFC confirmait la décision anticipée aux termes du paragraphe 60(4).

8. Le 26 juin 2009, Nutricia déposait le présent appel auprès du Tribunal aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi.

9. Le 10 février 2011, le Tribunal tenait une audience publique à Ottawa (Ontario).

10. Nutricia a fait entendre trois témoins lors de l’audience : Mme Ulrike Reichert, gestionnaire, Affaires médicales et scientifiques, Nutricia; M. Bernard Fortier, directeur commercial — Canada, Nutricia; le Dr David Mack, chef, Division de gastroentérologie, d’hépatologie et de nutrition, Département de pédiatrie, Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario (CHEO). Le Tribunal a reconnu le Dr Mack à titre d’expert en gastroentérologie pédiatrique. L’ASFC a présenté un rapport d’expert rédigé par la Dre Margaret Patricia Boland, professeure agrégée, Département de pédiatrie, Université d’Ottawa, et pédiatre spécialiste en gastroentérologie et en nutrition au CHEO, mais ne l’a pas appelée à témoigner.

MARCHANDISES EN CAUSE

11. Les marchandises en cause sont les quatre types suivants de préparations NeocateMD pour nourrissons et pour enfants : NeocateMD pour nourrissons (hypoallergène), NeocateMD junior (non aromatisée), NeocateMD junior (arôme tropical) et NeocateMD junior (arôme de chocolat).

12. Les marchandises en cause sont des préparations en poudre à base d’acides aminés, qui contiennent des acides aminés simples plutôt que des protéines complexes3 . Les marchandises en cause facilitent la digestion chez les nourrissons (de 0 à 12 mois) et les enfants (de 1 à 10 ans) incapables de métaboliser les longues chaînes d’acides aminés qui composent les protéines alimentaires standard présentes dans le lait maternel, dans les préparations pour nourrissons, dans les préparations à base de soya ou de protéines fortement hydrolysées et dans les aliments et boissons ordinaires4 .

13. Nutricia a déposé comme pièces un échantillon de chacune des marchandises en cause5 .

ANALYSE

Cadre législatif

14. Dans des appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi concernant les questions de classement tarifaire, le Tribunal détermine le classement tarifaire des marchandises conformément aux règles d’interprétation prescrites.

15. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD)6 . L’annexe est divisée en sections et en chapitres, et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires. Les sections et chapitres peuvent comprendre des notes concernant leur interprétation. Les articles 10 et 11 du Tarif des douanes prescrivent la méthode que le Tribunal doit appliquer pour l’interprétation de l’annexe afin de déterminer le classement tarifaire approprié de marchandises.

16. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « [...] le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[7] et les Règles canadiennes[8] énoncées à l’annexe. »

17. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade, de sorte que si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il faut alors tenir compte de la Règle 2, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le classement soit établi9 . Le classement commence donc par l’application de la Règle 1, qui prévoit ce qui suit : « [...] le classement [est] déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes. »

18. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « Pour l’interprétation des positions et sous-positions, il est tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[10] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[11] et de leurs modifications, publiés par le Conseil de coopération douanière (Organisation mondiale des douanes). » Par conséquent, contrairement aux notes de sections et de chapitres, les Notes explicatives n’ont pas force exécutoire pour le Tribunal dans son classement des marchandises importées. Toutefois, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il faut respecter ces notes, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire, puisqu’elles servent de guide d’interprétation aux fins du classement tarifaire au Canada.

19. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer dans quelle position les marchandises en cause peuvent être classées selon les termes de la position et des notes de section ou de chapitre pertinentes du Tarif des douanes, en tenant compte des Notes explicatives et des Avis de classement pertinents.

20. Après que le Tribunal a déterminé la position appropriée, l’étape suivante consiste à déterminer la sous-position appropriée (niveau à six chiffres), par application de la Règle 6 des Règles générales, selon les termes de la sous-position et des notes de section, de chapitre et de sous-position pertinentes, et des Règles 1 à 5 en apportant les changements nécessaires (c.-à-d. en remplaçant « position » par « sous-position »).

21. Après que le Tribunal a déterminé la sous-position appropriée, l’étape suivante consiste à déterminer le numéro tarifaire approprié (niveau à huit chiffres), par application de la Règle 1 des Règles canadiennes, selon les termes du numéro tarifaire, et des Règles 1 à 5 des Règles générales en apportant les changements nécessaires (c.-à-d. en remplaçant « position » par « numéro tarifaire »).

22. Le Tribunal remarque qu’en vertu de l’article 13 de la Loi sur les langues officielles 12 , qui prévoit que les versions française et anglaise de toute loi du Parlement ont également force de loi ou même valeur, le Tribunal peut examiner les versions française et anglaise de l’annexe du Tarif des douanes pour l’interprétation de la nomenclature tarifaire.

23. Le chapitre 99 du Tarif des douanes prévoit des dispositions de classement spécial qui permettent à certaines marchandises importées au Canada de bénéficier d’un allégement tarifaire. Compte tenu qu’aucune des positions du chapitre 99 n’est subdivisée au niveau des sous-positions ou des numéros tarifaires, il suffit que le Tribunal tienne compte, dans la mesure nécessaire, des Règles 1 à 5 des Règles générales pour déterminer si les marchandises peuvent être classées dans ce chapitre13 . De plus, puisque le Système harmonisé réserve le chapitre 99 à des fins de classement spécial (c.-à-d. à l’usage exclusif de pays pris individuellement), il n’y a pas d’Avis de classement ni de Notes explicatives à prendre en compte.

24. La section XXI, qui comprend le chapitre 99, ne comporte pas de notes de section. Cependant, la note 3 du chapitre 99, pertinente en l’espèce, prévoit ce qui suit :

Les marchandises peuvent être classées dans un numéro tarifaire du présent Chapitre et peuvent bénéficier des taux de droits de douane du tarif de la nation la plus favorisée ou du tarif de préférence prévus au présent Chapitre qui s’appliquent à ces marchandises selon le traitement tarifaire applicable selon le pays d’origine, mais ce classement est subordonné au classement préalable de celles-ci dans un numéro tarifaire des Chapitres 1 à 97 et à l’observation des conditions prévues par les textes d’application qui leurs sont applicables.

25. Conformément à la note qui précède, les marchandises en cause ne peuvent être classées dans le chapitre 99 que s’il a été déterminé qu’elles ont été correctement classées dans un numéro tarifaire des chapitres 1 à 97. Par conséquent, le Tribunal devra d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées dans le numéro tarifaire 2106.90.99 ou le numéro tarifaire 3004.50.00, que le Tribunal a reconnu, de prime abord, comme étant les seules dispositions tarifaires pertinentes en l’espèce. Si le Tribunal conclut que les marchandises en cause peuvent en effet être classées dans un de ces numéros tarifaires, il déterminera alors si les marchandises en cause sont admissibles au traitement en franchise de droits prévu au numéro tarifaire 9979.00.00.

Dispositions pertinentes du Tarif des douanes et des Notes explicatives

26. Les dispositions pertinentes du Tarif des douanes qui selon Nutricia, s’appliquent aux marchandises en cause prévoient ce qui suit :

Section VI

PRODUITS DES INDUSTRIES CHIMIQUES
OU DES INDUSTRIES CONNEXES

[...]

Chapitre 30

PRODUITS PHARMACEUTIQUES

[...]

30.04 Médicaments (à l’exclusion des produits des nos 30.02, 30.05 ou 30.06) constitués par des produits mélangés ou non mélangés, préparés à des fins thérapeutiques ou prophylactiques, présentés sous forme de doses (y compris ceux destinés à être administrés par voie percutanée) ou conditionnés pour la vente au détail.

[...]

3004.50.00 -Autres médicaments contenant des vitamines ou d’autres produits du nº 29.36.

[...]

27. La section VI ne comporte pas de notes de section pertinentes.

28. Les notes de chapitre pertinentes du chapitre 30 prévoient ce qui suit :

1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

a) les aliments diététiques, aliments enrichis, aliments pour diabétiques, compléments alimentaires, boissons toniques et eaux minérales, autres que les préparations nutritives administrées par voie intraveineuse (Section IV);

[...]

29. La section VI et le chapitre 30 ne comportent pas de Notes explicatives pertinentes.

30. Les Notes explicatives pertinentes de la position no 30.04 prévoient ce qui suit :

La présente position comprend les médicaments constitués par des produits mélangés ou non mélangés, à condition qu’ils soient présentés :

[...]

b) Soit sous un conditionnement de vente au détail en vue d’usages thérapeutiques ou prophylactiques. Sont à considérer comme tels, les produits (par exemple, le bicarbonate de soude et la poudre de tamarin) qui, en raison de leur conditionnement et notamment de la présence sous une forme quelconque d’indications appropriées (nature des affections contre lesquelles ils doivent être employés, mode d’emploi, posologie, etc.) sont identifiables comme destinés à la vente directe et sans autre conditionnement aux utilisateurs (particuliers, hôpitaux, etc.), pour être employés aux fins indiquées ci-dessus.

Ces indications (en toutes langues) peuvent être portées sur le récipient ou l’emballage, sur des notices jointes au produit ou de toute autre manière, la seule mention du degré de pureté (pharmaceutique ou autre) d’un produit ne suffisant pas toutefois à le faire classer ici.

[...]

Les médicaments constitués par des produits mélangés et préparés à des fins thérapeutiques ou prophylactiques mais qui ne sont pas présentés sous forme de doses ou conditionnés pour la vente au détail relèvent du no 30.03 (voir la Note explicative de cette position).

31. Les Notes explicatives de la position no 30.03 prévoient ce qui suit :

La présente position comprend les préparations médicamenteuses, à usage interne ou externe, servant à des fins thérapeutiques ou prophylactiques en médecine humaine ou vétérinaire. Ces produits sont obtenus en mélangeant deux ou plusieurs substances entre elles. Toutefois, présentés sous forme de doses ou conditionnés pour la vente au détail, ils relèvent du no 30.04.

[...]

Les diverses dispositions énoncées dans le libellé de la position ne s’appliquent ni aux aliments ni aux boissons (tels que : aliments diététiques, aliments enrichis, aliments pour diabétiques, boissons toniques et eaux minérales naturelles ou artificielles), lesquels suivent leur régime propre. Tel est essentiellement le cas des préparations alimentaires ne contenant que des substances nutritives. Les éléments nutritifs les plus importants contenus dans les aliments sont les protéines, les hydrates de carbone et les graisses. Les vitamines et les sels minéraux jouent également un rôle dans l’alimentation.

Il en est de même pour les aliments et les boissons, additionnés de substances médicinales, dès l’instant où ces substances n’ont d’autre but que de créer un meilleur équilibre diététique, d’augmenter la valeur énergétique ou nutritive du produit, d’en modifier la saveur et n’enlèvent pas au produit son caractère de préparation alimentaire.

[...]

En outre, la présente position ne couvre pas les compléments alimentaires contenant des vitamines ou des sels minéraux qui sont destinés à conserver l’organisme en bonne santé, mais qui n’ont pas d’indications relatives à la prévention ou au traitement d’une maladie. Ces produits, qui sont présentés d’ordinaire sous une forme liquide, mais peuvent également être présentés sous forme de poudres ou de comprimés, relèvent généralement du no 21.06 ou du Chapitre 22.

Restent, en revanche, classées ici, les préparations dans lesquelles les substances alimentaires ou les boissons sont simplement destinées à servir de support, d’excipient ou d’édulcorant à la ou aux substances médicinales, afin notamment d’en faciliter l’absorption.

32. Le chapitre 99, qui comprend le numéro tarifaire 9979.00.00, prévoit ce qui suit :

Chapitre 99

DISPOSITIONS DE CLASSIFICATION SPÉCIALE – COMMERCIALES

[...]

9979.00.00 Marchandises conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps, et articles et matières devant servir dans ces marchandises.

33. Les notes de chapitre pertinentes du chapitre 99 prévoient ce qui suit :

1. Les dispositions du présent Chapitre ne sont pas régies par la règle de spécificité de la Règle générale interprétative 3 a).

[...]

3. Les marchandises peuvent être classées dans un numéro tarifaire du présent Chapitre et peuvent bénéficier des taux de droits de douane du tarif de la nation la plus favorisée ou du tarif de préférence prévus au présent Chapitre qui s’appliquent à ces marchandises selon le traitement tarifaire applicable selon le pays d’origine, mais ce classement est subordonné au classement préalable de celles-ci dans un numéro tarifaire des Chapitres 1 à 97 et à l’observation des conditions prévues par les textes d’application qui leurs sont applicables.

4. Les termes utilisés dans ce Chapitre et dans les Chapitre[s] 1 à 97 s’entendent au sens de ces derniers Chapitres.

[Nos italiques]

34. Les dispositions pertinentes du Tarif des douanes, que l’ASFC considère applicables aux marchandises en cause, prévoient ce qui suit :

Section IV

PRODUITS DES INDUSTRIES ALIMENTAIRES; BOISSONS,
LIQUIDES ALCOOLIQUES ET VINAIGRES; TABACS
ET SUCCÉDANÉS DE TABAC FABRIQUÉS

[...]

Chapitre 21

PRÉPARATIONS ALIMENTAIRES DIVERSES

[...]

21.06 Préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs.

[...]

2106.90 -Autres

[...]

- - -Autres :

2106.90.99 - - - -Autres

[...]

35. La section IV ne comporte pas de notes de section pertinentes.

36. Les notes de chapitre pertinentes du chapitre 21 prévoient ce qui suit :

1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

[...]

f) les levures conditionnées comme médicaments et les autres produits des nos 30.03 ou 30.04;

[...]

37. La section XI et le chapitre 21 ne comportent pas de Notes explicatives pertinentes.

38. Les Notes explicatives pertinentes de la position no 21.06 prévoient ce qui suit :

A condition qu’elles ne soient pas reprises dans d’autres positions de la Nomenclature, la présente position comprend :

A) Les préparations destinées à être utilisées, soit en l’état, soit après traitement (cuisson, dissolution ou ébullition dans l’eau ou le lait, etc.), dans l’alimentation humaine.

B) Les préparations composées entièrement ou partiellement de substances alimentaires, entrant dans la préparation de boissons ou d’aliments pour la consommation humaine. Sont notamment classées ici celles consistant en mélanges de produits chimiques (acides organiques, sels de calcium, etc.) et de substances alimentaires (farines, sucres, poudre de lait, par exemple), destinées à être incorporées dans des préparations alimentaires, soit comme composants de ces préparations, soit pour améliorer certaines de leurs caractéristiques (présentation, conservation, etc.). [...]

[...]

Sont notamment classés ici :

[...]

16) Les préparations désignées souvent sous le nom de compléments alimentaires, à base d’extraits de plantes, de concentrats de fruits, de miel, de fructose, etc., additionnées de vitamines et parfois de quantités très faibles de composés de fer. Ces préparations sont souvent présentées dans des emballages indiquant qu’elles sont destinées à maintenir l’organisme en bonne santé. Les préparations analogues qui sont destinées à prévenir ou à traiter des maladies ou affections sont exclues (nos 30.03 ou 30.04).

Classement tarifaire en cause — positions nos 30.04 et 21.06

Positions des parties
– Nutricia

39. Nutricia soutient que les marchandises en cause sont des médicaments qui relèvent de la position no 30.04. À l’appui de sa position, Nutricia renvoie à la décision du Tribunal dans Hilary’s Distribution Ltd. c. Sous-M.R.N. 14 , dans laquelle le Tribunal a interprété le terme « médicament » comme désignant les substances utilisées pour traiter ou prévenir les maladies, affections ou troubles chez l’humain. À cet égard, Nutricia soutient que les marchandises en cause sont administrées aux nourrissons et aux enfants pour prévenir ou faire disparaître les signes et symptômes associés à des maladies, affections et troubles gastro-intestinaux divers, y compris l’œsophagite éosinophilique, le reflux gastro-œsophagien, les allergies à de multiples protéines alimentaires et l’intolérance aux protéines.

40. Nutricia soutient que les conclusions du Tribunal dans Hilary’s Distribution montrent qu’il n’est pas nécessaire de prouver l’efficacité des marchandises en cause pour que celles-ci soient classées comme médicaments, bien que l’existence d’études et d’essais cliniques à l’appui de leurs propriétés médicinales puisse être pertinente15 . Elle allègue que les nombreuses études cliniques et les éléments de preuve présentés par son témoin expert démontrent l’utilisation et l’efficacité des marchandises en cause comme thérapie pour traiter les symptômes des troubles gastro-intestinaux causés par des allergies aux protéines alimentaires et que ces marchandises sont, par conséquent, des médicaments. Elle soutient également que ces troubles ne peuvent être traités simplement en évitant l’allergène, puisque souvent celui-ci ne peut être identifié, ce qui fait qu’aucune protéine standard ne peut être tolérée.

41. Nutricia prétend que les marchandises en cause n’ont pas à contenir un ingrédient actif pour être considérées comme des médicaments. Elle soutient que le principal composant des marchandises en cause est un acide aminé de synthèse spécial, un ingrédient pharmaceutique qui n’existe pas dans la nature. Le témoin de Nutricia, Mme Reichert, a déclaré que les marchandises en cause sont fabriquées selon des spécifications strictes, semblables à celles d’un médicament, afin de s’assurer de l’absence complète des protéines du lait de vache ou d’autres allergènes dans le produit final. Nutricia soutient que les marchandises en cause sont nécessaires à la croissance et à la survie des nourrissons et des enfants chez qui les protéines provoquent une réaction allergique, et fait remarquer que le simple fait d’éviter l’allergène protéique, ce qui revient en quelque sorte à écarter le beurre d’arachide d’une personne allergique aux noix, priverait les nourrissons et les enfants de nutriments essentiels fournis par les protéines.

42. Nutricia renvoie aussi à Pfizer Canada Inc. c. Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada 16 pour appuyer son opinion selon laquelle la mise en marché, l’emballage et l’utilisation réelle d’un produit sont pertinents pour déterminer s’il s’agit d’un médicament. À cet égard, Nutricia soutient que les marchandises en cause sont, selon l’étiquette, destinées à un sous-groupe unique et restreint de la population, qu’elles sont utilisées sous la supervision d’un professionnel de la santé et qu’elles sont vendues principalement aux médecins et à d’autres professionnels de la santé. Elle allègue également que la vente des marchandises en cause est restreinte en ce sens qu’elles ne peuvent être achetées que dans les hôpitaux, dans les pharmacies en s’adressant à un pharmacien, dans des magasins spécialisés ou par commande directe. Elle prétend que les marchandises en cause ne sont pas destinées à un usage général pour promouvoir la santé et le bien-être des nourrissons et des enfants, puisqu’elles sont considérablement plus chères que les préparations classiques et n’offrent aucun avantage nutritionnel supplémentaire aux nourrissons et aux enfants en bonne santé. Enfin, Nutricia fait également remarquer que les marchandises en cause sont couvertes par certains régimes publics et privés d’assurance médicale.

43. Nutricia soutient qu’aucune note de section ou de chapitre n’empêche les marchandises en cause d’être classées dans la position no 30.04. Bien que Nutricia reconnaisse que la note 1a) du chapitre 30 prévoit ce qui suit : « [l]e [...] Chapitre ne comprend pas : a) les aliments diététiques, aliments enrichis, aliments pour diabétiques, compléments alimentaires, boissons toniques et eaux minérales, autres que les préparations nutritives administrées par voie intraveineuse (Section IV) », elle soutient que les marchandises en cause ne sont ni des « aliments » ni des « boissons » au sens courant de ces termes. Plus particulièrement, Nutricia soutient que les marchandises en cause ne sont pas des aliments appropriés pour les enfants qui ne souffrent pas des troubles médicaux et diététiques qu’elles sont destinées à traiter. Elle fait également remarquer que les marchandises en cause sont prescrites pour être utilisées selon une posologie précise et ne sont pas aussi agréables au goût que des aliments ou boissons ordinaires ni destinées à être consommées durant toute une vie.

44. Nutricia affirme également que les marchandises en cause ne se comparent pas aux aliments diététiques ou pour diabétiques, puisque ceux-ci n’ont pas de propriétés prophylactiques ou curatives, ni aux « aliments enrichis », aux « compléments alimentaires », aux « boissons toniques » ou aux « eaux minérales », qui sont tous des ajouts facultatifs à un régime alimentaire et ne sont pas destinés à gérer ou à traiter une maladie en particulier.

45. Nutricia s’appuie sur la décision du Tribunal dans Baxter Corporation c. Sous-M.R.N. 17 , dans laquelle le Tribunal a déterminé que Peptamen (un mélange d’acides aminés, d’hydrolysats de protéines et de vitamines) constituait un traitement pour les patients souffrant de troubles d’acides aminés et ne se résumait pas à un complément nutritionnel ou à un aliment diététique. Le Tribunal a classé Peptamen dans la position no 30.04 à titre de médicament, en dépit de l’existence de la note 1a) du chapitre 30. À cet égard, Nutricia soutient que, dans Baxter, le Tribunal a souscrit à une interprétation limitée de l’expression « aliment diététique ».

46. En réponse aux arguments avancés par l’ASFC, Nutricia soutient que le changement apporté en 1999 à la note 1a) du chapitre 30, soit l’ajout de l’expression « autres que les préparations nutritives administrées par voie intraveineuse », n’a pas invalidé l’analyse du Tribunal dans Baxter, en ce qui s’applique aux marchandises en cause. En faisant référence au procès-verbal de la réunion du Comité du système harmonisé de l’OMD qui a mené au changement à la note 1a) du chapitre 30, Nutricia soutient que ce changement ne fait que préciser que les produits nutritifs administrés par voie intraveineuse sont considérés comme des médicaments.

47. Nutricia renvoie également au Mémorandum D10-14-3018 , qui explique la politique de l’ASFC en matière de classement des médicaments. Le mémorandum prévoit ce qui suit :

c) Les médicaments ne sont pas habituellement inclus dans la définition courante du terme « aliment ». Toutefois, certains compléments alimentaires ou nutritionnels, parfois considérés comme des préparations alimentaires, peuvent être classés à la position 30.04 en tant que médicaments. C’est le cas des suppléments devant servir expressément à la prévention ou au traitement d’une maladie, d’une affection ou d’un malaise, lorsqu’ils sont présentés sous une forme précisée dans le libellé de la position19 .

48. En plus d’alléguer que le mémorandum appuie sa position, Nutricia soutient qu’il montre clairement que la politique de l’ASFC est telle que les troubles gastro-intestinaux constituent une forme de troubles ou de malaises20 .

49. En réponse au classement par l’ASFC des marchandises en cause à titre d’« autres préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs », Nutricia fait remarquer que la note 1f) du chapitre 21 exclut de la position no 21.06 « les levures conditionnées comme médicaments et les autres produits des nos 30.03 ou 30.04 ». À cet égard, Nutricia allègue que, parce qu’elles sont expressément indiquées dans la prévention ou le traitement de certaines maladies gastro-intestinales, les marchandises en cause sont « dénommées » ou « comprises ailleurs » à titre de médicaments qui relèvent de la position no 30.04.

50. Enfin, Nutricia allègue que les marchandises en cause, qui ne sont ni des « compléments alimentaires » ni destinées à « maintenir l’organisme en bonne santé », ne sont pas décrites par la note 16 des Notes explicatives de la position no 21.06.

– ASFC

51. L’ASFC réplique que les marchandises en cause sont des aliments diététiques ou des préparations nutritives autres que ceux administrés par voie intraveineuse, qui sont correctement classés dans la position no 21.06.

52. L’ASFC prétend que la note 1a) du chapitre 30 exclut du classement dans ledit chapitre tous les aliments « [...] autres que les préparations nutritives administrées par voie intraveineuse ». Elle fait remarquer que les « aliments diététiques » sont expressément exclus du classement dans ce chapitre et allègue que les marchandises en cause, qui sont des aliments diététiques, sont donc exclues du classement dans le chapitre 30.

53. À cet égard, l’ASFC soutient que l’expression « aliments diététiques » ne se limite pas aux aliments destinés à la perte de poids et comprend les aliments pour les personnes ayant des troubles médicaux particuliers, comme les troubles gastro-intestinaux que les marchandises en cause servent à traiter. À l’appui de sa position, l’ASFC renvoie aux discussions de l’OMD concernant le classement des aliments diététiques, dans lesquelles le Secrétariat de l’OMD a indiqué qu’à moins qu’ils ne soient considérés comme des médicaments, les aliments diététiques, dans leur sens large ou strict, sont exclus du chapitre 30.

54. L’ASFC fait remarquer que les marchandises en cause sont des aliments complets et ne contiennent que des substances nutritives (c.-à-d. des protéines fragmentées en acides aminés, des hydrates de carbone, des matières grasses, des vitamines et des minéraux). L’ASFC allègue que les marchandises en cause sont des préparations alimentaires, telles que définies dans les Notes explicatives de la position no 30.04, et sont, par conséquent, exclues du classement à titre de médicaments.

55. L’ASFC affirme que les marchandises en cause ne contiennent pas de substances médicinales ni d’ingrédients actifs, sont disponibles sans ordonnance et sont introduites par la bouche ou par le biais d’une sonde, plutôt qu’administrées par voie intraveineuse.

56. Compte tenu de ces considérations, l’ASFC soutient que les marchandises en cause ne doivent pas être considérées comme des médicaments et, par conséquent, qu’elles doivent être classées dans la position no 21.06 à titre de « préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs ».

Analyse du Tribunal

57. Les parties conviennent que la bonne méthode de classement des marchandises en cause consiste à appliquer la Règle 1 des Règles générales. Cependant, les parties ne s’entendent pas sur le chapitre, la position, la sous-position et le numéro tarifaire à utiliser pour le classement des marchandises. La Règle 1 prévoit ce qui suit :

[...] le classement [est] déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres [...].

58. La position no 21.06 comprend les « [p]réparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs »21 , et la position no 30.04 les « [m]édicaments [...] constitués par des produits mélangés ou non mélangés, préparés à des fins thérapeutiques ou prophylactiques, présentés sous forme de doses (y compris ceux destinés à être administrés par voie percutanée) ou conditionnés pour la vente au détail ».

59. La note 1f) du chapitre 21, qui exclut les « médicaments » du champ d’application de ce chapitre et, par le fait même, de celui de la position no 21.06, prévoit ce qui suit :

1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

[...]

f) les levures conditionnées comme médicaments et les autres produits des nos 30.03 ou 30.04;

[...]

60. La note 1a) du chapitre 30, qui, à son tour, exclut les préparations alimentaires du champ d’application de ce chapitre et, par le fait même, de celui de la position no 30.04, prévoit ce qui suit :

1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

a) les aliments diététiques, aliments enrichis, aliments pour diabétiques, compléments alimentaires, boissons toniques et eaux minérales, autres que les préparations nutritives administrées par voie intraveineuse (Section IV);

[...]

61. Par conséquent, les positions nos 21.06 et 30.04 doivent être considérées mutuellement exclusives.

62. La note 2 de la section VI du Tarif des douanes prévoit ce qui suit :

2. [...] tout produit qui, en raison, soit de sa présentation sous forme de doses, soit de son conditionnement pour la vente au détail, relève [du nº] 30.04 [...] devra être classé sous cette position et non dans une autre position de la Nomenclature.

[Nos italiques]

63. Par conséquent, compte tenu de l’exclusivité du classement prévue à la note 2 de la section VI et de la nature résiduelle de la position no 21.06, le Tribunal utilisera comme point de départ une analyse de la question de savoir si les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 30.04 et, plus particulièrement, dans le numéro tarifaire 3004.50.00. S’il s’avère que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans cette position, le Tribunal déterminera alors si les marchandises peuvent être classées dans la position no 21.06 et, plus particulièrement, dans le numéro tarifaire 2106.90.99. Le Tribunal examinera ensuite la question de savoir si les marchandises en cause peuvent aussi être classées dans le numéro tarifaire 9979.00.00 et si elles sont, par conséquent, admissibles au traitement en franchise de droits22 .

Classement dans la position no 30.04
– Les marchandises en cause présentent-elles le caractère d’un médicament?

64. Comme le Tribunal l’a déjà constaté, « [...] la position no 30.04 a essentiellement pour objet de comprendre les marchandises qui présentent le caractère d’un médicament »23 .

65. Le Canadian Oxford Dictionary 24 définit le terme « medicament » (médicament) comme « une substance employée pour un traitement médical » [traduction], alors que The Oxford English Dictionary 25 définit le même terme comme étant une « substance employée pour un traitement curatif » [traduction].

66. À cet égard, il n’est pas contesté et le Tribunal conclut que l’utilisation de préparations nutritives à base d’acides aminés, comme les marchandises en cause, est largement reconnue dans le milieu médical comme traitement efficace de certaines maladies et affections gastro-intestinales chez les nourrissons et les enfants26 .

67. De plus, il n’est pas contesté et le Tribunal conclut que les marchandises en cause :

sont destinées à être utilisées sous la supervision d’un professionnel de la santé27 ;

ne sont pas vendues dans les épiceries et ne peuvent être achetées que par commande directe, dans les pharmacies uniquement en s’adressant à un pharmacien et dans des magasins spécialisés hospitaliers28 ;

ne conviennent pas à l’ensemble des nourrissons et des enfants29 ;

sont couvertes par certains régimes publics et privés d’assurance médicale30 .

68. Par conséquent, le Tribunal conclut qu’en ce qui concerne leur mise en marché et leurs utilisations prévues, les marchandises en cause possèdent des caractéristiques correspondant à celles des marchandises qui présentent le caractère d’un médicament31 .

– Les marchandises en cause relèvent-elles d’une position exclue?

69. Il n’est pas contesté et le Tribunal est convaincu que les marchandises en cause ne relèvent pas des positions nos 30.02, 30.05 ou 30.06, puisque les marchandises dans ces positions sont expressément exclues du champ d’application de la position no 30.04.

– Les marchandises en cause sont-elles constituées de produits mélangés?

70. En outre, il n’est pas contesté et le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont constituées de produits mélangés qui contiennent des acides aminés, des hydrates de carbone, des matières grasses, des vitamines et des minéraux32 .

– Les marchandises en cause sont-elles destinées à un usage thérapeutique ou prophylactique?

71. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont expressément indiquées pour le traitement, et sont efficaces à cette fin, de diverses maladies et affections gastro-intestinales, y compris l’œsophagite éosinophilique (OE), le reflux gastro-œsophagien (RGO) pathologique et l’intolérance à de multiples protéines alimentaires.

72. D’ailleurs, bien qu’il ne s’agisse pas d’une condition indispensable pour le classement de marchandises à titre de médicaments33 , un ensemble considérable d’éléments de preuve scientifiques atteste l’efficacité thérapeutique et prophylactique des marchandises en cause dans le traitement de ces troubles.

73. L’œsophagite éosinophilique est une maladie du tractus gastro-intestinal supérieur dont les symptômes comprennent la régurgitation, le vomissement, la douleur épigastrique, la difficulté de déglutition et le blocage des aliments34 . À cet égard, des données cliniques indiquent que les marchandises en cause sont efficaces pour réduire le nombre d’éosinophiles (c.-à-d. de globules blancs) dans l’œsophage, diminuant ainsi considérablement les symptômes liés à l’œsophagite éosinophilique et les signes histologiques de la maladie. Le Tribunal remarque, à titre d’exemple, qu’une étude réalisée en 2007, financée par l’American Gastroenterological Association Institute et la North American Society of Pediatric Gastroenterology, Hepatology and Nutrition, a permis de conclure qu’une préparation à base d’acides aminés est efficace non seulement pour soulager les symptômes liés à l’œsophagite éosinophilique, mais également pour faire disparaître ses effets histopathologiques sous-jacents, comme l’indique ce qui suit :

Études : préparations à base d’acides aminés. [...] Chez l’enfant, l’utilisation d’une préparation élémentaire s’est avérée très efficace dans 92 p. 100 à 98 p. 100 des cas. Les symptômes des patients ont disparu après 7 à 10 jours, puis une rémission histologique quasi complète de l’œsophagite éosinophilique a été observée après quatre à cinq semaines35 .

[Notes en bas de page omises, traduction]

74. Une étude connexe a donné les résultats similaires suivants :

Les préparations élémentaires ont permis de constater une atténuation marquée des symptômes et des signes histologiques de la maladie chez l’enfant et l’adolescent souffrant d’[OE], selon des critères stricts de diagnostic36 .

[Traduction]

75. Le reflux gastro-œsophagien est une pathologie qui se traduit par le passage involontaire du contenu gastrique dans l’œsophage. Les symptômes sont notamment la régurgitation, le vomissement, l’œsophagite, les infections respiratoires, la perte de poids et des troubles de comportement. Il s’est avéré que les marchandises en cause entraînent la disparition dans un délai relativement bref des symptômes de RGO pathologique dans la majorité des cas et sont souvent privilégiées par rapport aux autres traitements possibles, par exemple lorsque le patient ne réagit pas à une préparation fortement hydrolysée37 .

76. L’intolérance à de multiples protéines alimentaires est un trouble qui se traduit par une intolérance au lait de vache, au soya, aux préparations fortement hydrolysées et à un éventail d’autres produits, dont les symptômes sont notamment l’irritabilité, le vomissement, la diarrhée, la dermatite atopique et l’arrêt de la croissance. Une fois de plus, des données cliniques indiquent que l’administration des marchandises en cause fait disparaître les symptômes dans un bref délai, une étude montrant que les symptômes chez le groupe témoin de nourrissons « [...] ont disparu en deux semaines après qu’on ait commencé à leur administrer une préparation élémentaire complète à base d’acides aminés pour nourrissons [...] »38 [traduction].

77. Le Tribunal trouve particulièrement convaincants les éléments de preuve suivants présentés par le témoin expert, le Dr Mack :

Les préparations à base d’acides aminés comme NeocateMD [les marchandises en cause] constituent une méthode thérapeutique importante qui consiste à utiliser la nutrition comme thérapie [...].

[P]armi ceux qui ont une réaction immunitaire non IgE-dépendante, certains patients nécessitent une préparation à base d’acides aminés pour le traitement de leur maladie afin d’avoir une bonne alimentation et de bénéficier d’une forme de thérapie pour leur trouble médical sous-jacent.

En résumé, les thérapies médicales utilisant des préparations à base d’acides aminés constituent un progrès important dans le traitement des troubles immunitaires, puisqu’il s’agit d’une stratégie thérapeutique non restreinte sur le plan nutritionnel39 .

[Nos italiques, traduction]

78. D’ailleurs, l’ASFC reconnaît que « [...] LES MARCHANDISES EN CAUSE PEUVENT SANS DOUTE ÊTRE UTILISÉES À DES FINS THÉRAPEUTIQUES OU PROPHYLACTIQUES »40 [traduction], mais poursuit en alléguant qu’elles ne sont pas des médicaments en raison d’une exclusion particulière indiquée à la note 1a) du chapitre 30, qui est examinée plus en détail plus loin.

– Les marchandises en cause sont-elles présentées sous forme de doses ou conditionnées pour la vente au détail?

79. Il n’est pas contesté et le Tribunal est convaincu que les marchandises en cause sont conditionnées pour la vente au détail. Selon les pièces déposées par Nutricia, il est évident que les marchandises en cause sont vendues directement aux consommateurs dans des contenants de 400 g et ne sont pas vendues en vrac. De plus, les renseignements figurant sur les étiquettes des marchandises en cause au sujet de la nature des affections contre lesquelles elles doivent être employées, du mode d’emploi et de la posologie indiquent que les marchandises en cause sont clairement destinées à la vente directe aux consommateurs, sans autre conditionnement41 .

– Les marchandises en cause sont-elles exclues de la position no 30.04?

80. Bien que les marchandises en cause semblent respecter les éléments constitutifs de la position no 30.04, la question de savoir si elles sont explicitement exclues en raison de notes de section ou de chapitre pertinentes demeure.

81. À cet égard, la note 1a) du chapitre 30 prévoit ce qui suit :

1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

a) les aliments diététiques, aliments enrichis, aliments pour diabétiques, compléments alimentaires, boissons toniques et eaux minérales, autres que les préparations nutritives administrées par voie intraveineuse (Section IV).

[Nos italiques]

82. Le Tribunal constate le désaccord entre les parties relativement à la bonne interprétation de l’expression « aliments diététiques ». L’ASFC soutient que l’expression « aliments diététiques » doit être interprétée dans son sens large comme une catégorie d’aliments destinés à répondre aux besoins nutritionnels des personnes ayant des troubles médicaux particuliers et non se limiter aux aliments pour la perte de poids et la gestion du poids. Nutricia réplique que l’expression « aliments diététiques » doit être interprétée dans un sens plus étroit et renvoie à la décision rendue dans Baxter, dans laquelle le Tribunal a défini les « aliments diététiques » comme des aliments ordinaires qui ont été spécialement composés pour des personnes ayant des besoins alimentaires particuliers, comme un régime pauvre en sodium, en calories ou en matières grasses. À cet égard, Nutricia tente de distinguer les aliments diététiques et les aliments pour diabétiques des marchandises en cause sur le fondement que ceux-ci n’ont pas de propriétés prophylactiques ni curatives.

83. Le Tribunal remarque que le dictionnaire A Dictionary of Food and Nutrition donne une définition large des « aliments diététiques », qui englobe les marchandises en cause :

Aliments préparés pour répondre aux besoins nutritionnels particuliers des personnes chez lesquelles l’assimilation et la métabolisation des aliments sont modifiées ou pour lesquelles un effet particulier est obtenu en contrôlant l’absorption d’aliments ou de nutriments particuliers. Ils peuvent être composés pour des personnes souffrant de troubles physiologiques ou pour des personnes en bonne santé ayant des besoins supplémentaires42 .

[Traduction]

84. Cependant, dans la mesure où les « aliments pour diabétiques », les « aliments enrichis » et les « compléments alimentaires » font vraisemblablement partie d’une définition élargie des « aliments diététiques », le fait que ceux-ci soient séparés et mentionnés à part des « aliments diététiques » à la note 1a) du chapitre 30 laisse entendre que l’expression « aliments diététiques » doit avoir une connotation plus étroite.

85. D’ailleurs, comme il est mentionné ci-dessus, le Tribunal a attribué dans Baxter une signification plus étroite à l’expression « aliments diététiques » figurant à la note 1a) du chapitre 30, en indiquant que cette expression désignait des aliments ordinaires spécialement composés pour des personnes ayant des besoins alimentaires particuliers (comme un régime pauvre en sodium, en calories ou en matière grasses).

86. De l’avis du Tribunal, la modification apportée en 1999 à la note 1a) du chapitre 30, soit l’ajout de l’expression « autres que les préparations nutritives administrées par voie intraveineuse », n’a pas influé sur la pertinence continue de Baxter quant à la signification des « aliments diététiques », et le Tribunal est d’accord avec la position de Nutricia selon laquelle « [...] aucun changement n’a été apporté à la définition des aliments diététiques qui a été adoptée par le Tribunal dans la décision relative à Baxter, et [...] l’allégation selon laquelle [l’expression] a maintenant un sens plus large que celui qui a été pris en compte dans cette décision n’est pas fondée »43 [traduction].

87. En délimitant le champ d’application de la note 1a) du chapitre 30, le Tribunal accorde une importance particulière au fait que, dans la version anglaise, la liste entre parenthèses qui fait référence aux « [...] aliments diététiques, aliments enrichis, aliments pour diabétiques, compléments alimentaires [...] » est donnée à titre indicatif, compte tenu de l’expression « such as » (tels que) qui la précède immédiatement. Cette expression laisse entendre que d’autres produits non mentionnés peuvent aussi faire partie de la liste à titre d’« aliments ».

88. Compte tenu que tous ces produits visent à obtenir des résultats particuliers relativement à la santé, le Tribunal est d’avis que les marchandises en cause sont des marchandises du même ordre que les aliments diététiques, les aliments pour diabétiques et les aliments enrichis et peuvent, à ce titre, faire partie de la liste donnée à titre indicatif à la note 1a) du chapitre 30.

89. Cela étant dit, le Tribunal est d’avis que la question ne se résume pas uniquement à une interprétation ejusdem generis 44 de la liste donnée à titre indicatif à la note 1a) du chapitre 30.

90. À cet égard, les Notes explicatives de la position no 30.04, qui donnent des directives utiles quant à l’interprétation de l’expression « aliments » et, par déduction logique, du champ d’application de la note 1a) du chapitre 30, prévoient ce qui suit :

Les diverses dispositions énoncées dans le libellé de la position ne s’appliquent ni aux aliments ni aux boissons (tels que : aliments diététiques, aliments enrichis, aliments pour diabétiques, boissons toniques et eaux minérales naturelles ou artificielles), lesquels suivent leur régime propre. Tel est essentiellement le cas des préparations alimentaires ne contenant que des substances nutritives. Les éléments nutritifs les plus importants contenus dans les aliments sont les protéines, les hydrates de carbone et les graisses. Les vitamines et les sels minéraux jouent également un rôle dans l’alimentation 45 .

[Nos italiques]

91. Une lecture de la note 1a) du chapitre 30 à la lumière des Notes explicatives de la position no 30.04 mène le Tribunal à conclure que cette note vise à exclure toutes les préparations ne contenant que des substances nutritives, desquelles les aliments diététiques, les aliments pour diabétiques et les aliments enrichis ne sont que quelques-uns des exemples donnés à titre indicatif.

92. D’ailleurs, ce point de vue coïncide avec les commentaires suivants que le Secrétariat de l’OMD a donnés par le passé au Comité du système harmonisé de l’OMD :

[...] l’objectif de la présente note 1 est d’exclure tous les aliments ou boissons du chapitre 30. Les aliments diététiques ne sont indiqués dans cette note que pour donner un exemple de tels aliments.

[...]

Il semble qu’à condition que les médicaments soient clairement distingués des aliments, la façon dont une administration en particulier fait la distinction entre les aliments « diététiques » et les autres aliments importe peu aux fins d’application de la nomenclature46 .

[Nos italiques, traduction]

93. En l’espèce, il n’est pas contesté que les marchandises en cause ne sont composées que de substances nutritives, c.-à-d. des acides aminés (qui sont décrits comme les précurseurs des protéines47 ou des équivalents de protéine), des hydrates de carbone, des matières grasses, des vitamines et des minéraux48 . À cet égard, le Tribunal trouve particulièrement convaincant l’échange suivant :

M. GIBBS : Selon vous, Neocate [les marchandises en cause] est-il un médicament?

DR MACK : Neocate est un aliment. C’est une source unique d’alimentation, mais c’est un aliment à titre de thérapie 49 .

[Nos italiques, traduction]

94. De plus, l’allégation selon laquelle les marchandises en cause sont passives, c.-à-d. qu’elles ne contiennent pas d’ingrédients actifs, n’a pas été contestée en l’espèce et a d’ailleurs été confirmée par le Dr Mack dans l’échange suivant :

MEMBRE PRÉSIDANT : [...] Neocate [les marchandises en cause] contient-il un ingrédient particulier qui provoque activement les manifestations histopathologiques sous-jacentes de ces troubles [gastro-intestinaux] chez le nourrisson et l’enfant [...]?

DR MACK : Je dirais que c’est le contraire. Il ne contient rien qui propage le problème. C’est en quelque sorte la façon inverse de voir les choses.

MEMBRE PRÉSIDANT : [...] [I]l contribue à la résolution du problème [...] strictement en évitant l’antigène. Est-ce bien cela?

DR MACK : Oui50 .

[Traduction]

95. Enfin, il n’est pas contesté que les marchandises en cause ne sont pas des préparations nutritives destinées à être administrées par voie intraveineuse, ce qui, dans le cas contraire, aurait fait en sorte qu’elles relèvent du champ d’application du chapitre 30 à titre de « médicaments »51 . Les précautions énoncées dans les notices jointes aux produits indiquent clairement que les marchandises en cause ne sont pas destinées à un usage (parentéral) intraveineux52 . L’administration par voie intraveineuse diffère de l’alimentation par voie orale ou par sonde. Le Dr Mack a déclaré que si un patient refuse d’ingérer les marchandises en cause, celles-ci peuvent être administrées au moyen d’une sonde insérée directement dans ses intestins. Il a confirmé que les marchandises en cause ne sont absolument pas administrées par voie intraveineuse53 .

96. Le Tribunal est donc d’accord avec l’allégation de l’ASFC selon laquelle, en dépit de leur effet thérapeutique reconnu, les marchandises en cause ne sont pas des médicaments, mais plutôt de la nature des préparations alimentaires et, par conséquent, ne relèvent pas du chapitre 30 en raison de la note 1a) de ce chapitre.

97. Le Tribunal est conscient qu’il faut interpréter et appliquer le Système harmonisé de façon uniforme parmi les membres de l’OMD. Bien que le Tribunal n’y soit pas tenu, il prend en compte, au besoin, les décisions de classement d’autres administrations douanières en vue d’établir la façon dont les partenaires commerciaux du Canada classent les marchandises similaires54 .

98. À cet égard, l’ASFC a présenté un certain nombre de décisions rendues par le United States Customs and Border Protection (USCBP). En examinant ces décisions, le Tribunal constate que celles-ci traitent du classement de préparations alimentaires composées uniquement de substances nutritives, qui fournissent une alimentation complète et équilibrée aux patients souffrant de la maladie de Crohn55 , d’insuffisance pancréatique ou d’intolérance au lactose56 . Bien qu’il reconnaisse que ces décisions ne portent pas sur des produits identiques aux marchandises en cause, le Tribunal fait remarquer que, dans chaque décision, l’USCBP a classé les marchandises dans la position no 21.06 à titre de préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs.

Classement dans la position no 21.06

99. Les marchandises en cause, de par leur nature à titre de préparations alimentaires et du fait qu’elles ne sont pas destinées à un usage parentéral, sont visées expressément dans l’exclusion ci-dessous de la note 1a) du chapitre 30 et, par conséquent, doivent être classées dans la section IV dans les positions appropriées :

1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

a) les aliments diététiques, aliments enrichis, aliments pour diabétiques, compléments alimentaires, boissons toniques et eaux minérales, autres que les préparations nutritives administrées par voie intraveineuse (Section IV);

[Nos italiques]

100. À l’examen des termes des diverses positions de la section IV, le Tribunal, dans son application de la Règle 1 des Règles générales, établit que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 21.06 à titre de préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs.

101. Pour en venir à cette conclusion, le Tribunal a tenu compte de l’argument de Nutricia selon lequel les marchandises en cause ne sont pas expressément comprises dans la liste des marchandises visées figurant dans les Notes explicatives de la position no 21.06. Cependant, le Tribunal est d’avis que le mot « notamment » au début de la liste en fait une liste indicative, non exhaustive. En outre, comme il est mentionné ci-dessus, la position no 21.06 est une position résiduelle pour les marchandises non visées par les termes de toute autre position de la nomenclature. Par conséquent, le Tribunal est convaincu que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 21.06, en dépit du fait qu’elles ne sont pas explicitement dénommées dans les Notes explicatives de ladite position57 .

102. Le Tribunal conclut, aux termes de la Règle 6 des Règles générales et de la Règle 1 des Règles canadiennes, que les marchandises en cause, à titre d’aliments non expressément visés par les sous-positions ou les numéros tarifaires précédents, sont correctement classées dans le numéro tarifaire 2106.90.99 à titre de préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs.

Classement tarifaire en cause — numéro tarifaire 9979.00.00

Positions des parties
– Nutricia

103. Nutricia soutient que les marchandises en cause respectent les deux exigences précisées au numéro tarifaire 9979.00.00, à savoir 1) qu’elles sont conçues expressément pour aider les nourrissons et les enfants handicapés, en particulier ceux qui souffrent de divers troubles gastro-intestinaux qui empêchent la métabolisation des protéines alimentaires, et 2) qu’elles sont conçues expressément pour alléger les effets des troubles gastro-intestinaux (comme les allergies aux protéines) chez les nourrissons et les enfants qui en souffrent en permettant d’atténuer leurs symptômes. À l’appui de cette position, Nutricia renvoie à la décision du Tribunal dans Sigvaris Corporation c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada 58 .

104. En ce qui concerne la première exigence, Nutricia fait remarquer qu’il ne semble pas y avoir de désaccord entre les parties à l’égard de l’allégation selon laquelle les marchandises en cause sont conçues expressément pour aider les nourrissons et les enfants qui souffrent de divers troubles gastro-intestinaux. Nutricia soutient également que ces troubles gastro-intestinaux entrent dans la définition de handicap énoncée par le Tribunal dans Sigvaris, en ce sens qu’ils influent sur la capacité des nourrissons et des enfants à exécuter des activités physiologiques normales, comme la digestion. Nutricia allègue que le résultat de ce handicap est que les nourrissons et les enfants sont souvent incapables de bien se développer ou d’exécuter des activités normales. Elle soutient également que ces nourrissons et ces enfants ont certaines limitations fonctionnelles en raison de leurs troubles et des traitements qu’ils doivent suivre59 .

105. À l’appui de sa position selon laquelle ces troubles gastro-intestinaux constituent un handicap, Nutricia renvoie aux décisions de certains autres organismes, tribunaux et cours concernant des lois autres que le Tarif des douanes selon lesquelles diverses allergies sont des handicaps60 .

106. En ce qui concerne la deuxième exigence, Nutricia prétend que les marchandises en cause sont conçues pour alléger les effets des allergies aux protéines alimentaires et des troubles gastro-intestinaux associés. À l’appui de sa position, elle renvoie à des ouvrages scientifiques, à des études cliniques et au témoignage d’expert du Dr Mack, qui indiquent tous que les marchandises en cause sont efficaces dans le traitement des symptômes de ces troubles. Nutricia soutient également que l’ASFC convient essentiellement que les symptômes des allergies aux protéines alimentaires s’atténuent lorsque les marchandises en cause sont absorbées.

107. Nutricia rejette également l’argument de l’ASFC selon lequel le champ d’application du numéro tarifaire 9979.00.00 est limité par son contexte législatif, en alléguant que l’existence d’une liste anciennement fermée des marchandises pour les personnes handicapées, admissibles à l’exonération des droits de douane, ne limite pas le champ d’application du numéro tarifaire 9979.00.00 en vigueur, qui remplace la liste précédente. Nutricia fait aussi remarquer qu’il n’y a pas de restrictions d’admissibilité dans le numéro tarifaire 9979.00.00 en lui-même et que si le Parlement avait voulu limiter le champ d’application de ce numéro tarifaire, il aurait pu le faire, par exemple en conservant une liste fermée de produits.

108. Nutricia allègue que la position de l’ASFC concernant la neutralité au point de vue des recettes prévue dans les modifications apportées en 1998 au Tarif des douanes n’appuie pas l’argument selon lequel le numéro tarifaire 9979.00.00 ne doit être interprété que pour inclure les articles figurant sur l’ancienne liste et soutient que les déclarations faites par le gouvernement à l’égard de la neutralité du point de vue des recettes prévue dans les modifications tarifaires font référence à l’incidence globale et non à des numéros tarifaires particuliers.

– ASFC

109. L’ASFC soutient que l’intention du Parlement est que le numéro tarifaire 9979.00.00 s’applique à une liste précise de marchandises, qui exclut les denrées alimentaires. À cet égard, elle affirme que le classement des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 9979.00.00 accorderait les avantages de ce numéro tarifaire à une gamme de produits au-delà de l’intention du Parlement. Citant la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans Bogoch Seed Company v. C.P.R. and C.N.R. 61 , l’ASFC soutient qu’étant donné que l’inclusion de denrées alimentaires dans le numéro tarifaire 9979.00.00 n’était pas envisagée par le Parlement lorsque la disposition a été adoptée au départ, elle ne doit pas y être maintenant incluses par interprétation en l’absence d’indications contraires claires.

110. À cet égard, l’ASFC a présenté un long historique législatif, y compris des résumés d’études d’impact sur la réglementation et des arrêtés de désignation, qui décrit les numéros et codes tarifaires qui ont précédé le numéro tarifaire 9979.00.00, à l’appui de sa position selon laquelle le Parlement n’a jamais eu l’intention que le numéro tarifaire vise des marchandises comme celles qui sont en cause. En outre, l’ASFC affirme que l’exercice de simplification tarifaire que le gouvernement a réalisé en 1998, qui a entraîné un certain nombre de modifications au Tarif des douanes, n’avait pas pour objectif d’avoir une incidence considérable sur la politique existante ni d’entraîner de nouvelles répercussions financières, ce qui serait le cas si l’exonération des droits de douane était appliquée aux marchandises en cause.

111. Enfin, l’ASFC soutient que l’interprétation du Tribunal du mot « handicap » dans Sigvaris est trop large et qu’elle suggère l’adoption d’une approche subjective pour déterminer si un handicap existe. À cet égard, l’ASFC allègue qu’une approche objective pour l’interprétation de ce mot est plus appropriée et que la portée de Sigvaris doit être limitée aux faits de la cause62 .

Analyse du Tribunal

112. Le numéro tarifaire 9979.00.00 prévoit ce qui suit :

Marchandises conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps, et articles et matières devant servir dans ces marchandises.

[Nos italiques]

113. La section XXI ne comporte pas de notes. Cependant, le Tribunal considère que les notes 3 et 4 du chapitre 99 sont pertinentes en ce qui a trait à la question de savoir si les marchandises en cause peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9979.00.00. Ces notes prévoient ce qui suit :

3. Les marchandises peuvent être classées dans un numéro tarifaire du présent Chapitre et peuvent bénéficier des taux de droits de douane du tarif de la nation la plus favorisée ou du tarif de préférence prévus au présent Chapitre qui s’appliquent à ces marchandises selon le traitement tarifaire applicable selon le pays d’origine, mais ce classement est subordonné au classement préalable de celles-ci dans un numéro tarifaire des Chapitres 1 à 97 et à l’observation des conditions prévues par les textes d’application qui leurs sont applicables.

4. Les termes utilisés dans ce Chapitre et dans les Chapitre[s] 1 à 97 s’entendent au sens de ces derniers Chapitres.

[Nos italiques]

114. Selon la première exigence de la note 3 du chapitre 99, les marchandises en cause ne peuvent être classées dans le chapitre 99 que si elles ont préalablement été classées dans un numéro tarifaire des chapitres 1 à 97. Le Tribunal, ayant conclu que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 2106.90.99, estime que cette condition est satisfaite en l’espèce.

115. Selon la deuxième exigence de la note 3 du chapitre 99, le classement des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 9979.00.00 est subordonné à l’observation des « conditions » de cette disposition.

116. Le Tribunal a énoncé dans Sigvaris les conditions suivantes pour le classement des marchandises dans le numéro tarifaire 9979.00.00 : 1) les marchandises en cause doivent être « [...] conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées [...] »; 2) les marchandises en cause doivent être conçues expressément pour assister les personnes handicapées « [...] en allégeant les effets de leurs handicaps [...] »63 .

117. Selon la règle moderne d’interprétation des lois, il faut interpréter les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du Parlement64 . À cet égard, le Tribunal réaffirme sa conclusion dans Sigvaris selon laquelle, contrairement aux dispositions de certaines politiques sociales que les tribunaux ont peut-être interprétées d’une manière large et généreuse, « [...] il n’existe rien de particulier à l’égard du numéro tarifaire 9979.00.00 ou du droit concernant le classement tarifaire en général, qui exige une telle interprétation libérale. Comme pour la plupart des autres dispositions concernant les droits de douane, le caractère du numéro tarifaire 9979.00.00 convainc [...] que l’accent doit être placé sur le sens ordinaire et grammatical de la disposition et qu’une interprétation exagérément libérale ou exagérément stricte ne serait pas justifiée »65 .

118. De l’avis du Tribunal, la note 4 du chapitre 99 revêt une importance particulière pour l’interprétation contextuelle des mots et expressions clés dans le numéro tarifaire 9979.00.00. À cet égard, la note 4, qui réaffirme le principe bien établi d’uniformité des expressions en prévoyant que les mots et expressions utilisés au chapitre 99 ont le même sens qu’aux chapitres 1 à 97, permet de déduire, logiquement et conformément aux règles d’interprétation bien établies, que lorsque des mots ou expressions différents de ceux aux chapitres 1 à 97 sont utilisés au chapitre 99, ces mots ou expressions ont des significations différentes66 .

119. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal examinera maintenant la question de savoir si les marchandises en cause sont « [...] conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps [...] ».

120. Conformément à la note 4 du chapitre 99 et à la présomption d’uniformité des expressions s’y rattachant, le Tribunal est d’avis qu’une distinction doit être faite entre « maladies et affections »67 , d’une part, et « handicaps », d’autre part. En outre, le numéro tarifaire 9979.00.00, de par ses termes mêmes, exige clairement que les « effets » des handicaps soient distingués des handicaps en eux-mêmes. Le Tribunal, s’inspirant de la décision de la Cour suprême du Canada dans Granovsky c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) 68 et des déclarations pertinentes de l’Organisation mondiale de la Santé69 , est d’avis que les « handicaps » renvoient aux limitations fonctionnelles causées par une maladie, une affection ou une autre déficience et que les « effets de [ces] handicaps » sont l’incapacité d’exécuter des activités d’une manière considérée comme normale ou à l’intérieur de la fourchette d’activités considérée comme normale.

121. Les « [m]archandises conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps [...] » sont donc des marchandises qui aident ces personnes à améliorer leur capacité d’exécuter des activités normales en diminuant les limitations fonctionnelles causées par la maladie, l’affection ou une autre déficience.

122. Le Tribunal fait également remarquer que le numéro tarifaire 9979.00.00 exige que les marchandises en cause soient conçues « spécifiquement » (specifically) à cette fin. L’adverbe « specifically » (dont la définition dans le Shorter Oxford English Dictionary comprend « precisely » (précisément)70 ) laisse entendre un rapport direct et dirigé entre la conception des marchandises en cause et l’atténuation des effets des handicaps (ce rapport existe, par exemple, entre la conception d’un fauteuil roulant ou d’un monte-escalier automatique et l’atténuation des effets d’un handicap sur la mobilité d’une personne ou sa capacité à monter les escaliers).

123. Comme Nutricia l’a mentionné, les marchandises en cause sont un « [...] produit expressément indiqué pour le traitement des troubles gastro-intestinaux graves [...] associés aux allergies sévères aux protéines alimentaires. [...] Il est cliniquement prouvé qu’il est efficace pour traiter les symptômes [de ces] troubles [...] »71 [traduction].

124. Le Tribunal note également le témoignage du Dr Mack selon lequel les marchandises en cause contribuent à régler les troubles sous-jacents et dans lequel il confirme que les marchandises en cause favorisent la disparition de ces troubles strictement en évitant les antigènes72 .

125. De plus, Mme Reichert a déclaré que les marchandises en cause ont d’abord été conçues dans les années 1980 pour traiter un enfant souffrant de graves problèmes gastro-intestinaux qui ne réagissait pas aux autres préparations et ne pouvait être alimenté par voie intraveineuse. Elle a également déclaré que les marchandises en cause sont destinées au traitement, à la gestion alimentaire et au diagnostic des allergies au lait de vache73 .

126. Sur la foi des éléments de preuve, le Tribunal est d’avis que les marchandises en cause ne sont pas conçues expressément pour alléger les effets des handicaps découlant de ces troubles gastro-intestinaux, mais plutôt à titre de thérapie nutritionnelle indiquée pour le traitement des troubles gastro-intestinaux sous-jacents en eux-mêmes. Comme l’a expliqué le Dr Mack, « [...] [les marchandises en cause fournissent] une bonne alimentation aux nourrissons, dont la source protéique est des acides aminés, et [font] disparaître les symptômes causés par les antigènes incriminés, lesquels sont absents de la préparation à base d’acides aminés »74 [traduction].

127. Le Tribunal est d’avis que l’atténuation des effets des handicaps découlant de ces maladies et affections gastro-intestinales est une conséquence du traitement des maladies et affections sous-jacentes en elles-mêmes, qui consiste à éviter les antigènes, et qu’il s’agit de l’objet précis pour lequel les marchandises en cause ont, en fait, été conçues.

128. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas « [...] conçues spécifiquement pour assister les personnes handicapées en allégeant les effets de leurs handicaps [...] », dans le sens de cette expression dans le numéro tarifaire 9979.00.00. D’ailleurs, de l’avis du Tribunal, prétendre que ce numéro tarifaire comprend des préparations alimentaires comme les marchandises en cause élargit le champ d’application de cette disposition bien au-delà de l’intention75 .

129. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9979.00.00.

DÉCISION

130. Pour tous les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 2106.90.99 à titre de préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs et qu’elles ne peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9979.00.00 et, par conséquent, ne sont pas admissibles aux avantages de ce numéro tarifaire.

131. Par conséquent, l’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 L.C. 1997, c. 36.

3 . Canadian Oxford Dictionary, 2e éd., 2004, s.v. « formula » (préparation pour nourrissons) : « préparation alimentaire liquide pour nourrissons, donnée pour remplacer le lait maternel » [traduction]; s.v. « protein » (protéine) : « tout composé appartenant à un groupe de composés organiques constitués d’une ou de plusieurs chaînes d’acides aminés et formant une partie essentielle de tous les organismes vivants » [traduction]; s.v. « amino acid » (acide aminé) : « tout composé appartenant à un groupe de composés organiques formés du groupe carboxyle (COOH) et du groupe aminé (NH2), présent naturellement dans les tissus végétaux et animaux et formant les constituants élémentaires des protéines » [traduction].

4 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08A au para. 17.

5 . Pièce du Tribunal A-01, NeocateMD junior (arôme de chocolat); pièce du Tribunal A-02, NeocateMD junior (non aromatisée); pièce du Tribunal A-03, NeocateMD pour nourrissons; pièce du Tribunal A-04, NeocateMD junior (arôme tropical). Chaque pièce contient 400 g des marchandises en cause.

6 . Le Canada est signataire de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

7 . L.C. 1997, c. 36, annexe [Règles générales].

8 . L.C. 1997, c. 36, annexe.

9 . Les Règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position (c.-à-d. à quatre chiffres). En vertu de la Règle 6 des Règles générales, les Règles 1 à 5 s’appliquent au classement au niveau de la sous-position (c.-à-d. à six chiffres). De la même façon, les Règles canadiennes rendent les Règles 1 à 5 des Règles générales applicables au classement au niveau du numéro tarifaire (c.-à-d. à huit chiffres).

10 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003 [Avis de classement].

11 . Organisation mondiale des douanes, 4e éd., Bruxelles, 2007 [Notes explicatives].

12 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 31.

13 . Toutefois, la note 1 du chapitre 99 prévoit que la règle de spécificité de la Règle 3 a) des Règles générales ne s’applique pas aux dispositions du chapitre 99. Cela reflète le fait que le classement dans les chapitres 1 à 97 et le classement dans le chapitre 99 ne sont pas mutuellement exclusifs.

14 . (25 septembre 1998), AP-97-010 (TCCE) [Hilary’s Distribution].

15 . Hilary’s Distribution à la p. 10 : « Le Tribunal croit, pour sa part, qu’il doit exister des indications raisonnables que les marchandises sont des médicaments, mais ne considère pas qu’il serait raisonnable ou nécessaire d’appliquer des normes rigoureuses comme le demande avec insistance l’avocat de l’intimé. [...] Cela étant dit, le Tribunal croit qu’il est clair également que de simplement déclarer qu’un produit est un médicament n’en fait pas un médicament. En fait, dans la présente affaire, l’appelante a déposé un ensemble considérable d’éléments de preuve pour montrer que les marchandises sont des médicaments. »

16 . (9 octobre 2003), AP-2002-038 à AP-2002-090 (TCCE) [Pfizer] à la p. 7 : « M. Wright [le témoin de Pfizer] a indiqué que les marchandises en cause satisfont aux critères énoncés dans la monographie de Santé Canada et sont assorties d’un DIN, pouvant, de ce fait, être vendues comme médicaments. M. Wright a ajouté que les marchandises en cause sont mises en marché comme médicaments et qu’il est clairement précisé sur leur emballage qu’elles doivent être prises selon le mode d’emploi, pour le soulagement de certains symptômes énumérés. [...] » [Notes en bas de page omises.]

17 . (26 juillet 1994), AP-93-092 (TCCE) [Baxter] à la p. 5 : « [...] l’expression « aliments diététiques » désigne des aliments ordinaires qui ont été spécialement composés pour des personnes ayant des besoins alimentaires particuliers, comme un régime pauvre en sodium, en calories ou en matières grasses. »

18 . « Classement tarifaire des médicaments, y compris les produits de santé naturels » (20 août 2004).

19 . Ibid. au para. 4.

20 . Ibid. au para. 13.

21 . Comme le Tribunal l’a indiqué par le passé, la position no 21.06 est une position résiduelle pour les marchandises qui ne sont pas reprises dans d’autres positions de la nomenclature. Voir Hilary’s Distribution à la p. 11.

22 . Aux termes de la note 1 du chapitre 99, les dispositions du chapitre ne sont pas assujetties à la règle de spécificité de la Règle 3 a) des Règles générales.

23 . Pfizer à la p. 9.

24 . Deuxième éd., s.v. « medicament ».

25 . 1989, s.v. « medicament ».

26 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglets 14-22; Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 49-55.

27 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 21-22. Bien que le Tribunal convienne que les marchandises en cause doivent être utilisées sous la supervision d’un professionnel de la santé, il relève le témoignage de Mme Reichert selon lequel les marchandises en cause sont destinées à être utilisées sous supervision médicale non pas en raison de leur nature, mais plutôt parce que lorsqu’une thérapie nutritionnelle à base d’acides aminés devient nécessaire, la maladie ou l’affection gastro-intestinale et les symptômes associés sont souvent tellement sévères que le nourrisson ou l’enfant nécessite des soins médicaux.

28 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 28-30; pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglet 13. Le Tribunal note le témoignage de M. Fortier selon lequel les marchandises en cause sont vendues principalement aux professionnels de la santé et distribuées par l’entremise de grossistes, de pharmacies et d’hôpitaux et directement aux consommateurs par le biais de commandes téléphoniques. M. Fortier a également déclaré que les marchandises en cause ne sont pas distribuées dans les épiceries ni en vente libre dans les pharmacies. Elles ne sont disponibles qu’en s’adressant à un pharmacien.

29 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 20-21. Le Tribunal remarque que même si les marchandises en cause peuvent ne pas convenir à l’ensemble de la population, Mme Reichert a déclaré que les enfants dont le système gastro-intestinal fonctionne bien tireraient tous les avantages nutritionnels des marchandises en cause sans qu’il n’y ait de contre-indications ou d’effets néfastes. Le Tribunal conclut que le fait que les marchandises en cause ne conviennent pas à tous les nourrissons et enfants ne découle pas de préoccupations relatives à la santé, mais de questions économiques (c.-à-d. le coût élevé des marchandises en cause par rapport aux préparations courantes).

30 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 30-31; pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglet 23. Nutricia soutient que divers régimes publics et privés d’assurance médicale visent les marchandises en cause. Elle fait remarquer à titre d’exemple que les marchandises en cause sont couvertes par le Programme de médicaments de l’Ontario (en tant que produit nutritionnel) lorsqu’elles sont prescrites par un médecin et délivrées par un pharmacien. Le Tribunal relève également le témoignage de M. Fortier selon lequel le coût des marchandises en cause est remboursé dans la quasi-totalité des provinces lorsqu’elles sont achetées dans une pharmacie et, en particulier, que le coût des marchandises en cause est couvert au Québec à titre de médicament d’exception.

31 . Le Tribunal conclut que même si Neocatemd ne s’est pas vu attribuer un numéro d’identification de médicament, cela n’est pas déterminant en soi quant à la question de savoir si Neocatemd peut être classé en tant que médicament. Une telle conclusion rejoint la décision de la Cour d’appel fédérale dans Flora Manufacturing & Distributing Ltd. c. Canada (Sous-ministre du Revenu national), 2000 CanLII 15919 (C.A.F.) [Flora Manufacturing], selon laquelle le Tribunal ne s’était pas trompé en ne considérant pas la présence d’un numéro d’identification de médicament comme une preuve absolue qu’il s’agit d’un médicament.

32 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglets 11, 12; pièce du Tribunal AP-2009-017-17A, onglets B, D; Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 57-58.

33 . Hilary’s Distribution à la p. 10.

34 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08A aux para. 24-27; pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglets 14, 15.

35 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-21A à la p. 136.

36 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglet 16 à la p. 1.

37 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08A aux para. 28-30; pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglets 17, 18.

38 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglet 21 à la p. 1.

39 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-20A aux pp. 5, 7.

40 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-17A à la p. 12.

41 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglets 11, 12; pièce du Tribunal AP-2009-017-17A, onglets B, D; pièces A-01, A-02, A-03 et A-04.

42 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-17A, onglet I.

43 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, à la p. 84.

44 . Black’s Law Dictionary, 9e éd., s.v. « ejusdem generis » : « [...] [expression latine « du même ordre »] [...] 1. Règle d’interprétation selon laquelle lorsqu’une expression de portée générale suit une liste d’exemples précis, l’expression de portée générale est interprétée de façon à n’inclure que les éléments du même ordre que ceux énumérés dans la liste. • Par exemple, dans l’énumération chevaux, bœufs, moutons, cochons, chèvres ou tout autre animal d’élevage, l’expression de portée générale ou tout autre animal d’élevage – en dépit de son sens large apparent – serait probablement considérée comme ne comprenant que les mammifères quadrupèdes ongulés qui se trouvent habituellement sur une ferme et, par conséquent, exclurait les poulets » [ traduction].

45 . Le fait que le rôle joué dans l’alimentation par les vitamines et les sels minéraux soit mentionné séparément reconnaît implicitement que ces substances peuvent également servir à d’autres fins. Les vitamines, par exemple, ont des applications prophylactiques et/ou thérapeutiques dans la prévention ou l’élimination des carences liées à des maladies ou affections particulières. Voir, par exemple, les décisions du Tribunal dans DSM Nutritional Products Canada Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (2 décembre 2008), AP-2007-012 (TCCE) et dans Roche Vitamins Canada Inc. c. Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (26 janvier 2006), AP-2003-036, et la décision de la Cour d’appel fédérale dans Flora Manufacturing.

46 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-17A à la p. 97, para. 18, 21. Le Tribunal est d’avis que ces commentaires du Secrétariat de l’OMD demeurent pertinents et que la modification apportée en 1999 à la note 1a) du chapitre 30 n’a eu aucune incidence, puisque les commentaires ont été formulés après que le Comité du système harmonisé de l’OMD eut décidé d’apporter la modification de 1999. En outre, les commentaires du Secrétariat de l’OMD ne sont pas liés à la forme d’administration des aliments ou médicaments. Ils ont été faits en réponse à une proposition d’une administration membre selon laquelle la définition de l’expression « aliments diététiques », qui se trouve à la note 1a) du chapitre 30, devait être précisée et interprétée dans son sens large.

47 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-21A à la p. 2, para. 11c.

48 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglets 11, 12; pièce du Tribunal AP-2009-017-17A, onglets B, D. Le Tribunal remarque que, selon la liste des ingrédients, chacune des marchandises en cause contient (en ordre décroissant de poids) du sirop de maïs, des extraits secs, des huiles végétales, un mélange d’acides aminés, des vitamines, des minéraux et d’autres ingrédients.

49 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, à la p. 74. Le Tribunal remarque que la conclusion du Dr Mack à ce sujet rejoint celle de la Dre Boland, qui a déclaré dans son rapport que, « [...] malgré son effet thérapeutique, Neocate pour nourrissons ou Neocate junior [les marchandises en cause] est un aliment » [traduction], pièce du Tribunal AP-2009-017-21A à la p. 3, para. 11h).

50 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 74, 75.

51 . Ibid. à la p. 83.

52 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-17A, onglet B.

53 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 59-61.

54 . Fisher Scientific Limited c. Sous-M.R.N.D.A. (3 mai 1994), AP-89-181 et AP-89-244 (TCCE).

55 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-38A à la p. 13.

56 . Ibid. à la p. 20.

57 Le Tribunal remarque que les Notes explicatives de la position no 21.06 indiquent que cette position comprend les préparations destinées à être utilisées, soit en l’état ou après traitement (comme la cuisson, la dissolution ou l’ébullition dans l’eau, dans le lait, etc.), pour la consommation humaine, à condition qu’elles ne soient comprises dans aucune autre position de la nomenclature.

58 . (23 février 2009), AP-2007-009 (TCCE) [Sigvaris].

59 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-08B, onglet 8.

60 . DEMANDES présentées par Sophia Huyer et Rhonda Nugent, au nom de sa fille Melanie Nugent, contre Air Canada (6 janvier 2010), 4-AT-A-2010 (Office des transports du Canada); DEMANDES présentées par Katherine Covell et Sarah Daviau contre Air Canada et une demande présentée par Dr J. David Spence contre Air Canada, Air Canada Jazz et WestJet (25 février 2010), 66-AT-A-2010 (Office des transports du Canada); Canada c. Hamilton, 2002 CAF 118 (CanLII); Jasper c. La Reine, 2003 CanLII 818 (C.C.I.); Nantel c. La Reine, 2000 CanLII 383 (C.C.I.); Wachal c. Manitoba Pool Elevators, 2000 CanLII 5489 (T.C.D.P.); Dewdney v. Bluebird Cabs Ltd., 2003 BCHRT 7 (B.C. Human Rights Tribunal).

61 . [1963] R.C.S. 247.

62 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, aux pp. 172-176, 180.

63 . Sigvaris au para. 26.

64 . Bell ExpressVu Limited Partnership c. Rex, [2002] 2 R.C.S. 559 au para. 26.

65 . Sigvaris au para. 29.

66 . R. Sullivan, dans Sullivan on the Construction of Statutes, 5e éd., Toronto, Butteworths, 2008, à la p. 216, indique ce qui suit :

Différents mots, différentes significations. Compte tenu de la présomption d’uniformité des expressions, il est possible de déduire que l’utilisation de mots différents ou d’une forme différente d’expression a pour objet une signification différente. [...] [Traduction]

67 . Par exemple, la note 16 des Notes explicatives de la position no 21.06 se réfère aux « maladies et affections ».

68 . [2000] 1 R.C.S. 703. La Cour suprême du Canada a tenu compte de la définition du mot « handicap », mais dans un contexte différent. Ce faisant, elle a assimilé la notion de déficience à celle de limitation fonctionnelle et suggéré que « [l]es affections physiques ou mentales (la première facette) n’engendrent pas toutes des limitations fonctionnelles (la deuxième facette) ».

69 . Dans sa Classification internationale des handicaps : déficiences, incapacités et désavantage. Un manuel de classification des conséquences des maladies, l’Organisation mondiale de la Santé définit le mot « incapacité » comme « [...] toute réduction ou absence, due à une déficience, de la capacité d’exécuter une activité de la manière ou dans la plénitude considérée comme normale pour un être humain. Le mot incapacité reflète les conséquences de la déficience en termes du rendement fonctionnel et de l’activité de la personne [...] ». Voir Sigvaris au para. 41.

70 . Cinquième éd., s.v. « specifically ».

71 . Transcription de l’audience publique, 10 février 2011, à la p. 85.

72 . Ibid. à la p.75.

73 . Ibid. à la p.7.

74 . Pièce du Tribunal AP-2009-017-20A aux pp. 5-6.

75 . Le fait que le champ d’application du numéro tarifaire 9979.00.00 s’étende explicitement aux « articles et matières » utilisés dans les marchandises comprises dans ce numéro tarifaire appuie la conclusion du Tribunal, en ce sens qu’il est peu probable qu’on associe ces termes à des préparations alimentaires. Il est à noter, en revanche, que le mot « ingrédients » est employé à la note 3 du chapitre 21.