LA SOCIÉTÉ CANADIAN TIRE LIMITÉE


LA SOCIÉTÉ CANADIAN TIRE LIMITÉE
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2009-019

Décision et motifs rendus
le vendredi 6 août 2010


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À un appel entendu le 12 mai 2010 en vertu du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 8 mai 2009 concernant une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

LA SOCIÉTÉ CANADIAN TIRE LIMITÉE Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Diane Vincent
Diane Vincent
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)

Date de l’audience : Le 12 mai 2010

Membre du Tribunal : Diane Vincent, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Nick Covelli

Directeur de la recherche : Randy Heggart

Agent de la recherche : Gary Rourke

Gestionnaire, Bureau du greffe : Michel Parent

Agent du greffe : Julie Lescom

PARTICIPANTS :

Appelante Conseiller/représentant
La Société Canadian Tire Limitée Andrew T. Simkins
Intimé Conseiller/représentant
Président de l’Agence des services frontaliers du Canada Korinda McLaine

TÉMOIN :

Donald Mah
Directeur de la R. et D.
Helly Hansen Canada

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Le présent appel est interjeté par la Société Canadian Tire Limitée (Canadian Tire) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 à l’égard d’une décision rendue le 8 mai 2009 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), aux termes du paragraphe 60(4), qui confirmait une décision anticipée sur le classement tarifaire rendue aux termes de l’alinéa 43.1c).

2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les vêtements de flottaison individuel (VFI) en néoprène « Rush » pour jeunes, produit no 79-21422 (les marchandises en cause) sont correctement classés dans le numéro tarifaire 6307.20.00 de l’annexe du Tarif des douanes 3 à titre de ceintures et de gilets de sauvetage, aux termes de la Règle 1 des Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé 4 , comme l’a déterminé l’ASFC, ou s’ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 3926.90.90 à titre d’autres ouvrages en matières plastiques et ouvrages en autres matières des positions nos 39.01 à 39.14, aux termes de la Règle 3 b) des Règles générales, comme le soutient Canadian Tire.

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

3. Le 20 mai 2008, Canadian Tire demandait une décision anticipée sur le classement tarifaire des marchandises en cause5 . Le 8 octobre 2008, l’ASFC rendait une décision selon laquelle les marchandises en cause pouvaient être classées dans le numéro tarifaire 6113.00.90 à titre d’autres vêtements confectionnés en étoffes de bonneterie des positions nos 58.03, 59.06 ou 59.076 .

4. Le 21 novembre 2008, Canadian Tire demandait la révision de la décision anticipée aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi 7 .

5. Le 8 mai 2009, l’ASFC rendait une décision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi. L’ASFC classait les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 6307.20.00 à titre de gilets de sauvetage8 .

6. Le 31 juillet 2009, aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi, Canadian Tire interjetait appel de la décision de l’ASFC auprès du Tribunal.

7. Le Tribunal tenait une audience publique à Ottawa (Ontario) le 12 mai 2010. Le Tribunal a reconnu à M. Donald Mah, directeur de la R. et D., Helly Hansen Canada, le titre d’expert en VFI et en gilets de sauvetage et a témoigné au nom de Canadian Tire. L’ASFC n’a fait entendre aucun témoin.

MARCHANDISES EN CAUSE

8. Les marchandises en cause sont des VFI en néoprène offerts en diverses tailles et conçus pour les enfants pesant de 20 à 90 lb9 . Dans un exposé conjoint des faits, les parties indiquent que les marchandises en cause comprennent une fermeture éclair à l’avant et deux fermetures pression noires en plastique. La couche extérieure des VFI est composée de matière textile laminée, qui est elle-même composée d’une couche de caoutchouc cellulaire (néoprène) entre deux couches de tissu de fils en fibres synthétiques (polyester). Les deux panneaux avant, de même que le panneau du cou et du col des VFI sont confectionnés au moyen de la couture des bords de la matière textile laminée de manière à intégrer des feuilles plastiques cellulaires. Le panneau arrière se compose uniquement d’une feuille de matière textile laminée. Les VFI sont assemblés en cousant les parties des matières textiles caoutchoutées10 .

9. Canadian Tire a déposé une pièce des marchandises en cause11 .

ANALYSE

Cadre législatif

10. Dans les appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi concernant les questions de classement tarifaire, le Tribunal détermine le classement tarifaire des marchandises conformément aux règles d’interprétation prescrites.

11. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes12 . L’annexe est divisée en sections et en chapitres, et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions et sous-positions et dans des numéros tarifaires. Les sections et chapitres peuvent comprendre des notes concernant leur interprétation. Les articles 10 et 11 du Tarif des douanes prescrivent la méthode que le Tribunal doit appliquer pour l’interprétation de l’annexe afin de déterminer le classement tarifaire approprié de marchandises.

12. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « [...] le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les [Règles générales] et les Règles canadiennes[13] énoncées à l’annexe. »

13. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade, de sorte que si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il faut alors tenir compte de la Règle 2, et ainsi de suite14 .

14. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit ce qui suit : « Pour l’interprétation des positions et sous-positions, il est tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[15] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[16] et de leur modification, publiés par le Conseil de coopération douanière (Organisation mondiale des douanes). » Par conséquent, contrairement aux notes de sections et de chapitres, les Notes explicatives n’ont pas force exécutoire pour le Tribunal dans son classement des marchandises importées. Toutefois, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il faut respecter ces notes, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire, puisqu’elles servent de guide d’interprétation aux fins du classement tarifaire au Canada17 .

15. L’article 13 de la Loi sur les langues officielles 18 prévoit que les versions française et anglaise de toute loi fédérale ont également force de loi ou même valeur.

16. Le classement commence donc par la Règle 1 des Règles générales, qui prévoit ce qui suit :

Le libellé des titres de Sections, de Chapitres ou de Sous-Chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes.

17. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées selon les termes des positions et dans quelle position tarifaire les marchandises peuvent être classées selon les termes de la position et de toute note de section ou de chapitre pertinente du Tarif des douanes.

18. Après que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées, l’étape suivante consiste à déterminer la sous-position et le numéro tarifaire appropriés, par application de la Règle 6 des Règles générales dans le cas de la sous-position et des Règles canadiennes dans le cas du numéro tarifaire19 .

Dispositions pertinentes du Tarif des douanes, des Règles générales et des Notes explicatives

19. Les dispositions pertinentes du Tarif des douanes, qui doivent s’appliquer aux marchandises en cause selon Canadian Tire, prévoient ce qui suit :

Section VII

MATIÈRES PLASTIQUES ET OUVRAGES EN CES MATIÈRES;
CAOUTCHOUC ET OUVRAGES EN CAOUTCHOUC

[...]

Chapitre 39

MATIÈRES PLASTIQUES ET OUVRAGES EN CES MATIÈRES

[...]

39.26 Autres ouvrages en matières plastiques et ouvrages en autres matières des nos 39.01 à 39.14.

[...]

3926.90.90 - - -Autres

20. La note 2 du chapitre 39 prévoit ce qui suit :

2. Le présent Chapitre ne comprend pas :

[...]

p) les produits de la Section XI (matières textiles et ouvrages en ces matières);

[...]

21. La nomenclature du Tarif des douanes que l’ASFC estime applicable aux marchandises en cause prévoit ce qui suit :

Section XI

MATIÈRES TEXTILES ET OUVRAGES EN CES MATIÈRES

[...]

Chapitre 63

AUTRES ARTICLES TEXTILES CONFECTIONNÉS; ASSORTIMENTS;
FRIPERIE ET CHIFFONS

[...]

63.07 Autres articles confectionnés, y compris les patrons de vêtements.

[...]

6307.20.00 -Ceintures et gilets de sauvetage

22. La note 7 de la section XI prévoit ce qui suit :

7. Dans la présente Section, on entend par confectionnés :

[...]

e) les articles assemblées par couture, par collage ou autrement (à l’exclusion des pièces du même textile réunies aux extrémités de façon à former une pièce de plus grande longueur, ainsi que des pièces constituées par deux ou plusieurs textiles superposés sur toute leur surface et assemblés ainsi entre eux, même avec intercalation d’une matière de rembourrage);

[...]

23. Les Notes explicatives du chapitre 63 prévoient ce qui suit :

Le classement de ces articles n’est pas affecté, d’une manière générale, par la présence de simples garnitures ou accessoires en autres matières (en pelleterie, métal commun ou métal précieux, cuir, carton, matière plastique, par exemple).

Les articles composites dans lesquels ces autres matières jouent un rôle plus important que celui de simples garnitures ou accessoires sont classés conformément aux Notes y afférentes des Sections, des Chapitres (Règle générale interprétative 1) ou, à défaut, conformément aux autres Règles générales interprétatives.

24. Les Notes explicatives de la position no 63.07 prévoient ce qui suit :

La présente position englobe les articles confectionnés en tout textile, qui ne sont pas repris dans des positions plus spécifiques de la Section XI ou dans d’autres Chapitres de la Nomenclature.

Elle comprend en particulier :

[...]

2) Les ceintures et gilets de sauvetage.

Position des parties

25. Canadian Tire allègue que les marchandises en cause ne peuvent pas être classées aux termes de la Règle 1 des Règles générales puisqu’elles sont constituées de deux composantes différentes, soit un tissu textile et des feuilles en plastique, de sorte qu’elles peuvent être classées à première vue dans la position no 63.07 et dans la position no 39.26.

26. Canadian Tire soutient que les marchandises en cause sont en fait des ouvrages composites au sens de la Règle 2 b) des Règles générales 20 , de sorte que le classement doit être déterminé aux termes de la Règle 321 .

27. Canadian Tire avance que les marchandises en cause doivent être classées selon les principes de la Règle 3 des Règles générales, plus particulièrement la Règle 3 b)22 qui prévoit que les marchandises doivent être classées comme si elles étaient constituées de la matière ou de la composante qui leur confère leur caractère essentiel 23 .

28. À cet égard, Canadian Tire fait référence à la position no 89.07, « Autres engins flottants [...] » et aux Notes explicatives suivantes, qui prévoient ce qui suit :

Sont, en outre, exclus de cette position :

[...]

b) Les ceintures, gilets et bouées de sauvetage (régime de la matière constitutive).

29. Puisque Canadian Tire soutient que ce sont les feuilles de plastique qui confèrent aux VFI leur caractère essentiel, soit fournir de la flottabilité, les marchandises doivent être classées dans la position no 39.26, plus spécifiquement dans le numéro tarifaire 3926.90.90, conformément à la Règle 3 b) des Règles générales.

30. L’ASFC soutient que les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 63.07 parce qu’elles répondent aux conditions de la position, étant confectionnées d’articles de textile24 .

31. L’ASFC avance en particulier que les marchandises en cause sont visées par la définition de « confectionnés » au sens de la note 7 de la section XI.

32. En outre, l’ASFC affirme que les marchandises en cause sont des « articles » au sens de la définition de « article » du Canadian Oxford Dictionary : « une chose particulière ou distincte, particulièrement une partie d’un ensemble »25 [traduction]. Étant donné que les gilets de sauvetage ne sont pas des articles de vêtement (mais plutôt de l’équipement de sécurité), l’ASFC déclare que les marchandises ne peuvent être classées dans une position du chapitre 61 ou du chapitre 62 et qu’il convient mieux de les classer dans la position no 63.07 à titre d’autres articles confectionnés.

Classement tarifaire en cause

33. Comme il a été indiqué, le Tribunal doit déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 63.07 à titre « d’autres articles confectionnés, y compris les patrons de vêtements », ou si elles doivent être classées dans la position no 39.26 à titre « d’autres ouvrages en matières plastiques et ouvrages en autres matières des positions nos 39.01 à 39.14 ».

34. Pour déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées dans l’une des positions en cause, le Tribunal doit examiner les notes de sections et de chapitres connexes conformément à la Règle 1 des Règles générales et, si nécessaire, les autres règles en cascade.

35. Les deux parties conviennent que les marchandises en cause sont visées par la définition commune d’un gilet de sauvetage et sont essentiellement les mêmes que des gilets de sauvetage26 .

36. L’ASFC à soumis une définition de « life jacket » (gilet de sauvetage) tirée du Merriam-Webster OnLine Dictionary, qui définit un gilet de sauvetage comme « un article de sauvetage sous forme de gilet flottant »27 [traduction]. Canadian Tire ne conteste pas cette définition. L’ASFC fait aussi référence à une source en ligne qui définit un VFI de la façon suivante : « Un vêtement personnel de flottaison (VFI en abrégé; aussi appelé gilet de sauvetage [...] etc.) est un dispositif conçu pour aider le porteur, conscient ou inconscient, à demeurer à la surface de l’eau avec la bouche et le nez (voies respiratoires) au-dessus de la surface de l’eau lorsqu’il se trouve dans l’eau »28 [traduction]. Encore une fois, Canadian Tire ne conteste pas cette définition.

37. Le Tribunal convient avec les parties qu’aux fins du classement tarifaire, un gilet de sauvetage et un VFI se ressemblent beaucoup et sont les mêmes marchandises. La déposition du témoin expert était particulièrement pertinente pour cette question.

38. Le témoin expert, M. Mah, a affirmé que les VFI et les gilets de sauvetage sont essentiellement les mêmes marchandises, mais que les gilets de sauvetage sont principalement utilisés dans un contexte commercial (par opposition à un contexte récréatif), où les conditions sont beaucoup plus difficiles, ce qui nécessite un niveau plus élevé de rendement de sécurité29 . Selon M. Mah, la principale différence entre un VFI et un gilet de sauvetage est le degré de flottabilité fourni par chacun, un VFI en procurant moins qu’un gilet de sauvetage30 . Un VFI et un gilet de sauvetage ont la même fonction, soit conserver une personne au-dessus de la surface de l’eau pour l’empêcher de se noyer31 . M. Mah a en outre indiqué qu’un VFI et un gilet de sauvetage ne se distinguent pas du point de vue de leur apparence, à tel point que lui-même doit lire l’étiquette intérieure, qui indique la norme selon laquelle les marchandises en cause ont été approuvées, afin de déterminer s’il s’agit d’un VFI ou d’un gilet de sauvetage32 .

39. Les deux parties conviennent aussi que les marchandises en cause peuvent à première vue être classées dans la position no 63.07 à titre d’autres articles confectionnés. Toutefois, les parties ne s’entendent pas sur l’importance des feuilles en plastique à l’égard du classement des marchandises en cause.

40. À cet égard, Canadian Tire a référé aux Notes explicatives du chapitre 63, qui prévoient ce qui suit :

Le classement de ces articles n’est pas affecté, d’une manière générale, par la présence de simples garnitures ou accessoires en autres matières (en pelleterie, métal commun ou métal précieux, cuir, carton, matière plastique, par exemple).

Les articles composites dans lesquels ces autres matières jouent un rôle plus important que celui de simples garnitures ou accessoires sont classés conformément aux Notes y afférentes des Sections, des Chapitres (Règle générale interprétative 1) ou, à défaut, conformément aux autres Règles générales interprétatives.

41. Canadian Tire soutient que les marchandises en cause sont des ouvrages composites et que les feuilles de plastique des marchandises en cause sont davantage que de simples accessoires puisque les feuilles confèrent aux marchandises leur caractère essentiel. Par conséquent, Canadian Tire soutient que la seule autre façon permettant aux marchandises d’être classées dans la position no 63.07 en vertu de la Règle 1 des Règles générales est « [...] la directive d’une note de section ou de chapitre donnée »33 [traduction] qui, dans le présent appel, n’existe pas dans les sections 7 ou 11, ou dans les chapitres 39 ou 63.

42. Le Tribunal estime que le libellé des Notes explicatives du chapitre 63 n’empêche pas le classement des articles mentionnés dans les Notes explicatives de la position no 63.07 aux termes de la Règle 1 des Règles générales.

43. Au contraire, les Notes explicatives du chapitre 63 réaffirment expressément que lorsque de tels articles sont constitués de matières qui sont davantage que de simples accessoires, le classement doit être « déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres », comme le prévoit la Règle 1 des Règles générales, ou conformément à d’autres règles s’il y a lieu.

44. Par conséquent si les feuilles de plastique des marchandises en cause sont davantage que des accessoires, le Tribunal doit poursuivre son analyse en vertu de la Règle 1 des Règles générales et ne peut passer immédiatement à la Règle 2 avant d’être convaincu que la question du classement ne peut être réglée à la lumière de la Règle 1.

45. Les feuilles de plastique sont-elles davantage que des accessoires? Les feuilles de plastique contenues dans le VFI fournissent la flottabilité requise. M. Mah a indiqué que le VFI tire sa flottabilité « strictement [des feuilles] de mousse blanche intégrées à la matière externe »34 [traduction]. Puisque l’objectif fondamental des marchandises en cause consiste à fournir de la flottabilité, le Tribunal estime que les feuilles de plastique, en conférant aux marchandises en cause de la flottabilité, ne constituent pas de simples accessoires. Par conséquent, le Tribunal doit examiner « les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres » conformément à la Règle 1 des Règles générales et, si nécessaire, en cascade pour les autres Règles générales.

46. Canadian Tire ajoute que les Notes explicatives de la position no 89.07 sous-entendent que les gilets de sauvetage doivent être classés selon la matière constitutive qui, selon les Règles 2 b) et 3 b) des Règles générales, leur confère leur caractère essentiel, à savoir la flottabilité35 . Le Tribunal estime que ce raisonnement est contraire au paragraphe 10(1) du Tarif des douanes, car il implique l’utilisation des Règles 2 et 3 avant d’avoir disposé de la Règle 1 dans le processus d’examen du classement des marchandises en cause.

47. De plus, Canadian Tire demande au Tribunal d’intégrer pour fin d’interprétation de la position no 63.07 des mots tirés des Notes explicatives de la position no 89.07, position qui ne constitue pas le contexte immédiat de la position no 63.07. Comme il a été mentionné ci-haut, la Règle 1 des Règles générales prévoit que « [...] le classement [est] déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres [...] » [nos italiques]. En conséquence, le Tribunal détermine que les Notes explicatives de la position no 89.07 — position dans laquelle selon les deux parties les marchandises en cause ne peuvent pas être classées — ne sont pas relatives à la position no 63.07.

48. Sur le plan de l’interprétation des lois, le Tribunal ne voit pas pourquoi il s’écarterait du libellé clair de la position no 63.07 et de ses Notes explicatives. Les Notes explicatives de la position no 63.07 indiquent expressément et manifestement que la position no 63.07 comprend les « gilets de sauvetage ». Rien n’indique que la composition des gilets de sauvetage soit susceptible d’exclure des gilets de sauvetage de cette position en fonction de leurs matières constitutives. Selon le sens courant desdites Notes explicatives, il n’y a aucune restriction fondée sur la matière constitutive. Le Tribunal ne voit pas pourquoi il déduirait du régime législatif ou d’un autre facteur que le parlement a voulu intégrer une prescription en fonction de la matière constitutive des gilets de sauvetage dans le contexte du classement des marchandises dans la position no 63.07. En outre, le Tribunal estime que rien dans le Tarif des douanes ou dans les Notes explicatives n’indique qu’un gilet de sauvetage doit être classé dans la position de la matière qui lui confère sa flottabilité.

49. Canadian Tire renvoie aussi le Tribunal à d’autres positions du Tarif des douanes qui, selon elle, indiquent que les gilets de sauvetage doivent être classés en fonction de la matière qui leur confère leur flottabilité. Plus particulièrement, Canadian Tire renvoie le Tribunal au libellé de la position no 45.03, « Ouvrages en liège naturel », et de la position no 70.20, « Autres ouvrages en verre ». Les Notes explicatives de la position no 45.03 prévoient ce qui suit : « La présente position comprend notamment [...] 3) [...] les bouées de sauvetage [...]. » Les Notes explicatives de la position no 70.20 prévoient ce qui suit : « Il s’agit : [...] 5) [de] bouées de sauvetage, ceintures de natation36 . » Toutefois, les Notes explicatives des autres positions mentionnées par Canadian Tire ne sont pas pertinentes pour le classement des marchandises en cause puisqu’elles ne portent pas expressément sur les marchandises en cause qui sont des gilets de sauvetage et non des bouées de sauvetage ou des ceintures de natation37 .

50. Par conséquent, le Tribunal conclut qu’aucune note de section ou de chapitre relatives à la position no 63.07 n’empêche le classement des marchandises en cause dans la position no 63.07. Par conséquent, aux termes de la Règle 1 des Règles générales, les marchandises en cause peuvent à première vue être classées dans la position no 63.07.

51. Ayant établi que les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 63.07, le Tribunal examinera la position no 39.26.

52. La note 2p) du chapitre 39 exclut les marchandises de la section XI (textiles et articles textiles). En vertu de cette note, alors que les marchandises en cause peuvent être classées dans la position no 67.03, qui fait partie de la section XI, elles sont exclues du classement dans la position no 39.26.

53. Par conséquent, les Règles 2 b) et 3 b) des Règles générales ne peuvent pas être appliquées puisque la Règle 1 suffit pour la détermination du classement des marchandises en cause dans une seule position, qui est prima facie la position no 63.07 à titre « d’autres articles confectionnés ».

54. Ayant classé les marchandises en cause au niveau de la position, le Tribunal doit déterminer dans quelle sous-position les marchandises en cause doivent être classées. La position no 63.07 comporte trois sous-positions de premier niveau, à savoir la sous-position no 6307.10 (serpillières ou wassingues, lavettes, chamoisettes et articles d’entretien similaires), la sous-position no 6307.20 (ceintures et gilets de sauvetage) et la sous-position no 6307.90 (autres).

55. Comme il a été mentionné, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont les mêmes marchandises que des « gilets de sauvetage ». Par conséquent, aux termes de la Règle 6 des Règles générales, laquelle prévoit que les dispositions pertinentes des Règles 1 à 5 s’appliquent au niveau de la sous-position afin de déterminer les sous-positions appropriées parmi celles susceptibles d’être valablement prises en considération, les marchandises en cause sont correctement classées dans la sous-position no 6307.20, plus précisément dans le numéro tarifaire 6307.20.00.

Conclusion

56. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 6307.20.00 à titre de gilets de sauvetage.

DÉCISION

57. L’appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-03A, onglets 1 et 7.

3 . L.C. 1997, c. 36.

4 . L.C. 1997, c. 36, annexe [Règles générales].

5 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-03A, onglet 1.

6 . Ibid., onglet 2.

7 . Ibid., onglet 3.

8 . Ibid., onglet 7.

9 . Ibid., onglet 8.

10 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-14A.

11 . Pièce A-1.

12 . Le Canada est signataire de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

13 . L.C. 1997, c. 36, annexe.

14 . Les Règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position (c.-à-d. à quatre chiffres). En vertu de la Règle 6 des Règles générales, les Règles 1 à 5 s’appliquent au classement au niveau de la sous-position (c.-à-d. à six chiffres). De la même façon, les Règles canadiennes rendent les Règles 1 à 5 des Règles générales applicables au classement au niveau du numéro tarifaire (c.-à-d. à huit chiffres).

15 . Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003.

16 . Organisation mondiale des douanes, 4e éd., Bruxelles, 2007 [Notes explicatives].

17 . Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII), para. 13, 17.

18 , L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 31.

19 . La Règle 6 des Règles générales prévoit ce qui suit : « Le classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des Notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les Règles ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être comparées que les sous-positions de même niveau. Aux fins de cette Règle, les Notes de Sections et de Chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires. »

20 La Règle 2 b) prévoit de qui suit : « Toute mention d’une matière dans une position déterminée se rapporte à cette matière soit à l’état pur, soit mélangée ou bien associée à d’autres matières. De même, toute mention d’ouvrages en une matière déterminée se rapporte aux ouvrages constitués entièrement ou partiellement de cette matière. Le classement de ces produits mélangés ou articles composites est effectué suivant les principes énoncés dans la Règle 3. »

21 . Transcription de l’audience publique, 12 mai 2010, aux pp. 68, 72, 74-75. La Règle 3 prévoit ce qui suit : « Lorsque des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la Règle 2 b) ou dans tout autre cas, le classement s’opère comme suit [...] ».

22 La Règle 3 b) prévoit ce qui suit : « Les produits mélangés, les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l’assemblage d’articles différents et les marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, dont le classement ne peut être effectué en application de la Règle 3 a), sont classés d’après la matière ou l’article qui leur confère leur caractère essentiel lorsqu’il est possible d’opérer cette détermination. »

23 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-03A à la p. 36. Canadian Tire prétend que la Règle 3 a) des Règles générales ne s’applique pas en l’espèce puisque la position no 63.07 et la position no 39.26 font référence seulement à une partie des matières ou des substances de produits composés, de sorte que les deux positions doivent être considérées comme également spécifiques.

24 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-14A aux para. 2, 3. Les deux parties ont convenu que le textile est une matière textile caoutchoutée pesant environ 678 g/m2.

25 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-05A au para. 37.

26 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-03A au para. 31; pièce du Tribunal AP-2009-019-05A au para. 23.

27 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-05A, onglet 17.

28 . Ibid., onglet 13.

29 . Transcription de l’audience publique, 12 mai 2010, à la p. 13.

30 . Ibid.

31 . Ibid. aux pp. 13-14.

32 . Ibid. aux pp. 15-18.

33 . Ibid. à la p. 78.

34 . Ibid. à la p. 18.

35 . Pièce du Tribunal AP-2009-019-03A, aux pp. 7-8.

36 . Ibid., onglet 3.

37 . Canadian Tire n’a pas soutenu ou présenté la preuve que les marchandises en cause étaient connues aussi comme étant des bouées de sauvetage ou des ceintures de natation.