SILVAN NATURAL SPRINGS LIMITED

Décisions


SILVAN NATURAL SPRINGS LIMITED
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-89-016

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 31 août 1990

Appel no AP-89-016

EU ÉGARD À une demande entendue le 6 mars 1990 en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À un avis de décision du ministre du Revenu national daté du 2 décembre 1988 concernant un avis d'opposition déposé conformément à l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

SILVAN NATURAL SPRINGS LIMITED Appelante

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté. Le Tribunal conclut que Silvan Natural Springs Limited n'a pas encouru de mauvaise créance au sens du paragraphe 68.21(2) de la Loi sur la taxe d'accise du fait qu'une partie du prix d'achat de l'eau minérale qu'elle avait vendue à National Importers Ltd. ne lui a pas été payée. Le Tribunal ordonne également que la question des prétendues mauvaises créances concernant les ventes que Silvan Natural Springs Limited a conclues avec Hasty Market, K. Frosch et R. Gaul soit envoyée au ministre du Revenu national en vue d'un réexamen.


Robert J. Bertrand, c.r. ______ Robert J. Bertrand, c.r. Membre présidant

Kathleen E. Macmillan ______ Kathleen E. Macmillan Membre

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





Loi sur la taxe d'accise - Déterminer si le montant dû à l'appelante constitue une mauvaise créance - Mauvaise créance - Pratiques comptables généralement reconnues.

DÉCISION : L'appel est rejeté. L'appelante n'a pas encouru de mauvaise créance au sens des pratiques comptables généralement reconnues.

Il fallait également déterminer si trois autres sommes d'argent, qui étaient dues à la suite de ventes conclues avec trois autres concessionnaires, constituaient de mauvaises créances. Étant donné que Revenu Canada et l'intimé n'ont pas rendu de décision à ce sujet, la question est envoyée au ministre du Revenu national en vue d'un réexamen.

Lieu de l'audience : Vancouver (Colombie-Britannique) Date de l'audience : Le 6 mars 1990 Date de la décision : Le 31 août 1990
Membres du Tribunal : Robert J. Bertrand, c.r., membre présidant Kathleen E. Macmillan, membre Sidney A. Fraleigh, membre
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Alex MacNicol, pour l'appelante Bruce S. Russell, pour l'intimé
Jurisprudence : Re Denison Mines Ltd. and Ontario Securities Commission, 122 D.L.R. (3d) 98.
Loi citée : Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15, par. 68.21(2), tel que modifié par L.R.C. (1985), ch. 7 (2 e supp.), par. 34(1).
Autre source citée : Manuel de l'ICCA, décembre 1975.





RÉSUMÉ

Il s'agit de savoir si le ministre du Revenu national (le Ministre) aurait dû permettre à l'appelante de réclamer un certain montant à titre de mauvaise créance. Dans l'affirmative, l'appelante a droit au remboursement de toute taxe de vente payée à l'égard de ce montant en vertu du paragraphe 68.21(2) [1] de la Loi sur la taxe d'accise (la Loi).

L'appelante a vendu 60 197,26 $ de boisson aux fruits à saveur de framboises connue sous le nom de «Razz», à un concessionnaire. Le concessionnaire a payé le produit, mais a par la suite découvert que les marchandises étaient avariées et il les a fait détruire. Les frais de gestion que le concessionnaire a dû payer par suite de l'achat et de la destruction du «Razz» avarié s'élevaient à 13 422,77 $. Au total, le «Razz» lui a donc coûté 73 620,03 $. Un peu plus tard, l'appelante a vendu au concessionnaire un produit différent, soit de l'eau minérale. Elle a dû payer la taxe de vente à l'égard de l'eau minérale vendue au concessionnaire, mais ce dernier a déduit la somme de 73 620,03 $ du prix d'achat de l'eau minérale. L'appelante a imputé à la vente d'eau minérale les 60 197,26 $ qu'elle avait reçus pour le «Razz». Cependant, étant donné qu'elle n'avait pas reçu la différence (13 422,77 $) entre les 73 620,03 $ déduits par le concessionnaire et les 60 197,26 $ que celui-ci lui avait déjà payés, l'appelante considérait qu'elle avait encouru une mauvaise créance en ce qui a trait à la différence. Elle a donc demandé au ministère du Revenu national pour les douanes et l'accise (Revenu Canada) le remboursement de la taxe de vente payée à cet égard.

Le Tribunal déclare que l'appelante n'a pas encouru une mauvaise créance au sens des pratiques comptables généralement reconnues.

Il fallait également déterminer si trois autres sommes d'argent, que trois autres concessionnaires devaient à l'appelante à la suite de ventes, constituaient des mauvaises créances. Étant donné que Revenu Canada et l'intimé n'ont pas rendu de décision à ce sujet, la question est envoyée au Ministre en vue d'un réexamen.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

Les dispositions pertinentes de la Loi qui étaient en vigueur pendant la période de cotisation, soit du 1er octobre 1985 au 31 décembre 1987, sont les suivantes:

68.21(2) Dans les cas où un fabricant titulaire de licence a payé la taxe ad valorem en vertu de la partie III ou VI à l'égard d'une vente sans lien de dépendance survenant à compter du 16 février 1984 et qu'il a démontré, selon les pratiques comptables généralement reconnues, qu'une créance lui étant due relativement à la vente est devenue, en totalité ou en partie, une mauvaise créance et a en conséquence été radiée de ses comptes, une fraction du montant de cette taxe d'une proportion égale à celle que représente le montant radié de la créance par rapport au prix pour lequel les marchandises ont été vendues doit... être payée à ce fabricant, s'il en fait la demande dans les deux ans suivant la fin de son exercice financier pendant lequel la créance a été ainsi radiée.

LES FAITS

Les faits de cette cause proviennent des documents qui ont été déposés en preuve, ainsi que des dépositions qu'ont faites M. Alex MacNicol, directeur général (intérimaire) de l'appelante, et Mme Margaret Cheung, comptable générale licenciée et vérificatrice principale travaillant pour l'intimé. Mme Cheung a effectué la vérification de la taxe de vente fédérale payée par l'appelante pendant la période de cotisation en question.

L'appel au Tribunal a été interjeté le 15 février 1989 par suite du refus de Revenu Canada et, par la suite, du Ministre de permettre à l'appelante de réclamer un certain montant à titre de mauvaise créance relativement aux ventes conclues avec National Importers Ltd. (National). Si le montant en question pouvait être considéré comme une mauvaise créance, l'appelante aurait droit au remboursement de toute taxe de vente payée à l'égard de ce montant en vertu du paragraphe 68.21(2) de la Loi.

La décision de Revenu Canada a été rendue le 25 mars 1988 au moyen de l'avis de cotisation numéro PAC 3894. Le Ministre a confirmé la décision au moyen de l'avis de décision numéro 80219AE en date du 2 décembre 1988.

L'appelante a également allégué que trois autres sommes d'argent constituaient de mauvaises créances. Ces dernières se rapportent aux comptes de trois autres concessionnaires : Hasty Market, K. Frosch et R. Gaul. Toutefois, Revenu Canada n'a pas rendu de décision à ce sujet et le Ministre n'a donc pas établi de cotisation.

Voici les faits de cette cause. Pendant la période de cotisation en question, Silvan Natural Springs Limited (Silvan) était un fabricant licencié de boissons gazéifiées établi à Vancouver (Colombie-Britannique). Elle est depuis lors devenue insolvable. Elle fabriquait notamment une boisson aux fruits à saveur de framboises connue sous le nom de «Razz». Le produit était embouteillé par une autre entreprise agissant en sous-traitance pour Silvan.

Pendant l'été 1985, Silvan a vendu une certaine quantité du produit embouteillé à son principal agent de vente de «Razz», National, qui exploitait son entreprise à Toronto (Ontario) et à Vancouver (Colombie-Britannique). Cette dernière a acheté le produit de Silvan à Vancouver et a versé à Silvan la somme de 60 197,26 $, qui correspondait à la valeur facturée des marchandises. Silvan a payé la taxe de vente fédérale sur le montant facturé pour le «Razz».

National a ensuite transporté les marchandises à Toronto, et à cette fin, elle a payé une partie des frais de transport (1 795,28 $). Elle a en outre payé des frais de promotion et de publicité s'élevant à 4 137,93 $ pour le «Razz» et d'autres produits de Silvan.

Toutefois, un peu plus tard, avant que la plupart des marchandises aient été revendues, on a constaté qu'une quantité importante de «Razz» était avariée à cause de problèmes attribuables au contrôle de la qualité pendant l'embouteillage du produit. National a fait détruire les marchandises; elle a payé 4 533,11 $ en vue de leur transport de Toronto à Vancouver, où ces dernières devaient être détruites, et 2 810,50 $ en vue de leur destruction et du nettoyage.

Par conséquent, les frais payés par National, par suite de l'achat et de la destruction subséquente des marchandises avariées, s'élèvent aux montants suivants :

Prix facturé : 60 197,26 $ Transport : 6 474,34 $ Destruction : 2 810,50 $ Publicité : 4 137,93 $ Frais de gestion totaux : 13 422,77 $ Coût total : 73 620,03 $

M. MacNicol a témoigné qu'à son avis, les montants facturés étaient plus élevés qu'ils auraient dû l'être. Ainsi, a déclaré le témoin, il n'était pas nécessaire que National fasse de nouveau transporter le «Razz» avarié à Vancouver pour le faire détruire étant donné que cela aurait pu être fait à Toronto.

Silvan n'a pas payé de taxe de vente à l'égard du montant correspondant aux frais de gestion assumés par National.

Après avoir vendu le «Razz» avarié, Silvan a vendu à National un autre produit, soit de l'eau minérale. Cette opération était assujettie à la taxe de vente fédérale.

National a déduit 73 620,03 $ du montant qu'elle devait à Silvan pour l'eau minérale qu'elle avait achetée, et ce, sans que cette dernière y consente. Comme M. MacNicol l'a déclaré, National a déduit les frais qu'elle avait assumés en vue de l'achat, de la publicité, du transport et de la destruction du «Razz» du prix d'achat de l'eau minérale.

L'appelante a été en mesure d'imputer au prix d'achat de l'eau minérale les 60 197,26 $ payés par National pour le «Razz» avarié. Toutefois, M. MacNicol a affirmé que National n'avait versé à Silvan aucune somme d'argent pour combler la différence entre les 73 620,03 $ qu'elle avait déduits du prix d'achat de l'eau minérale et les 60 197,26 $ qu'elle avait déjà versés. En d'autres termes M. MacNicol a déclaré que Silvan avait encouru une mauvaise créance étant donné qu'une partie du prix d'achat de l'eau minérale, soit la somme de 13 422,77 $, n'avait pas été payée.

Mme Cheung ne souscrivait pas à l'avis de M. MacNicol, et ce, pour deux raisons. En premier lieu, elle a affirmé que National et Silvan se devaient mutuellement 13 422,77 $ : Silvan à National pour les frais de gestion liés au «Razz» et National à Silvan pour l'eau minérale. Cependant, au lieu d'échanger des chèques, les parties ont «diminué le montant de leurs comptes».

En second lieu, Mme Cheung a témoigné que Silvan n'avait pas encouru de mauvaise créance au sens des pratiques comptables généralement reconnues (PCGR). Elle s'est fondée sur les dispositions concernant les mauvaises créances qui figurent dans le Manuel de l'Institut canadien des comptables agréés (ICCA) pour déclarer que selon les PCGR, une mauvaise créance est une perte de crédit subie parce que l'acquéreur de marchandises n'a pas les moyens financiers de payer les sommes dues. Dans ce cas-ci, National n'a pas payé les 13 422,77 $ qu'elle devait par suite de l'achat d'eau minérale non parce qu'elle n'avait pas l'argent nécessaire, mais parce qu'elle voulait recouvrer les frais de gestion liés au «Razz».

Dans le cadre de ses activités habituelles, Mme Cheung a effectué une vérification du compte de taxe de vente payée de l'appelante à la fin de 1987. La manière dont elle a traité la taxe de vente se rapportant à l'eau minérale que Silvan avait vendue à National, laquelle a été confirmée par Revenu Canada et par le Ministre, constitue le noeud du litige.

Étant donné que le «Razz» vendu à National a été détruit et que les sommes payées à Silvan pour ce produit ont été déduites du prix d'achat de l'eau minérale, Revenu Canada a considéré que le «Razz» n'avait pas été vendu. Par conséquent, il a accordé à Silvan un crédit à l'égard de la taxe de vente fédérale qu'elle avait payée sur le prix facturé du «Razz». On a permis à Silvan d'imputer ce crédit au compte de taxe de vente fédérale qu'elle devait payer à l'égard de l'eau minérale vendue à National, jusqu'à concurrence de 60 197,26 $.

En d'autres termes, bien que Silvan n'eût pas reçu d'argent par suite de la vente d'eau minérale d'une valeur de 60 197,26 $, Revenu Canada ne considérait pas qu'il s'agissait d'une mauvaise créance. Cependant, il a néanmoins obligé Silvan à payer la taxe de vente s'y rapportant. Toutefois, étant donné que Revenu Canada a accordé à Silvan un crédit de taxe de vente (compte tenu de la taxe payée pour le «Razz»), Silvan a pu soustraire le crédit du compte de taxe de vente à payer, soit 60 197,26 $, pour l'eau minérale.

Toutefois, Revenu Canada n'a pu accorder à Silvan un crédit de taxe de vente à l'égard du solde de 13 432,77 $ en ce qui avait trait à l'eau minérale, car Silvan n'avait pas payé de taxe de vente sur cette somme, qui représentait les frais de gestion assumés par National à l'égard du «Razz».

L'appel découle de cette obligation de payer la taxe de vente fédérale à l'égard d'un montant que l'appelante allègue ne pas avoir reçu, celle-ci affirmant en fait que la somme en question constitue une mauvaise créance et que toute taxe de vente payée à cet égard devrait donc lui être remboursée.

LA QUESTION EN LITIGE

Il s'agit de savoir si Silvan a encouru une mauvaise créance au sens du paragraphe 68.21(2) de la Loi, étant donné que l'entreprise n'a pas reçu une partie du prix d'achat de l'eau minérale qu'elle avait vendue à National (soit la somme de 13 422,77 $). S'il s'agit bien d'une mauvaise créance, Silvan a droit au remboursement de la partie de la taxe de vente se rapportant à ladite créance.

L'appelante a soutenu que l'eau minérale vendue à National au montant de 13 422,77 $ devaient être considérés comme une mauvaise créance étant donné que, selon l'appelante, National n'avait pas payé ce montant. L'appelante a soutenu qu'étant donné qu'il s'agit d'une mauvaise créance et qu'elle a payé la taxe de vente afférente, elle a droit à un remboursement.

L'intimé a soutenu que, conformément aux dispositions pertinentes de la Loi, la notion de mauvaise créance doit être définie selon les PCGR. Il a affirmé que Silvan n'avait pas reçu les 13 422,77 $ en question parce que National avait décidé d'imputer ce montant aux frais de gestion qu'elle avait payés pour acheter et faire détruire le «Razz». L'intimé a soutenu que National ne voulait pas verser le montant en question à Silvan étant donné les frais de gestion qu'elle avait assumés.

Au dire de l'intimé, la preuve montre sans conteste que, selon les PCGR, une mauvaise créance est une perte de crédit attribuable au fait que le débiteur ne peut pas payer le montant qu'il doit. L'intimé affirme qu'il faut donc faire une distinction entre le refus de payer et l'incapacité de le faire. Or, dans ce cas-ci, National était en mesure de payer l'eau minérale à Silvan, mais elle ne voulait pas payer le plein montant parce que Silvan lui devait, de son côté, de l'argent. L'intimé a soutenu que Silvan ne peut donc pas réclamer la somme de 13 422,77 $ à titre de mauvaise créance selon les PCGR.

DÉCISION

De l'avis du Tribunal, Silvan n'a pas encouru de mauvaise créance au sens du paragraphe 68.21(2) de la Loi, du fait qu'elle n'a pas reçu une partie du prix d'achat de l'eau minérale qu'elle avait vendue à National (soit 13 422,77 $).

Les dispositions législatives montrent clairement que pour demander un remboursement en vertu des dispositions pertinentes de la Loi, il doit exister une mauvaise créance au sens des PCGR. Ces pratiques comptables généralement reconnues doivent être établies à la satisfaction du Tribunal.

Mme Cheung, comptable générale licenciée et témoin expert de Revenu Canada, a affirmé qu'à son avis, et compte tenu du Manuel de l'ICCA, il y a mauvaise créance au sens des PCGR lorsque des pertes de crédit sont subies parce que l'acquéreur/débiteur est financièrement insolvable.

Le juge Robins, à la Haute Cour de justice de l'Ontario, a fait certaines remarques dans le jugement qu'il a rendu en cour divisionnaire dans la cause Re Denison Mines Ltd. and Ontario Securities Commission [2] , au sujet du rapport qui existe entre les pratiques énoncées dans le Manuel de l'ICCA et les PCGR (pages 105 et 106) :

Elle [la Loi sur les valeurs mobilières de 1978 (Ontario)] incorpore simplement par renvoi les normes et principes de comptabilité et de vérification établis par l'organisme professionnel dont relèvent de telles questions; en pratique, les vérificateurs se reporteraient de toute façon au Manuel pour s'assurer que les états financiers qu'ils doivent certifier sont conformes aux PCGR pour l'application de la Loi ou, de fait, pour les autres fins prévues par le Manuel . (traduction)

La mauvaise créance est ainsi définie dans le Manuel de l'ICCA :

Étant donné qu'il y a toujours certains clients qui ne peuvent pas payer leurs dettes, la vente à crédit comporte nécessairement des pertes. Ces pertes, par opposition aux montants qui sont irrécouvrables parce que les marchandises sont endommagées ou parce qu'elles ne satisfont pas à certaines normes de qualité et de rendement, constituent des «pertes sur créance».

Les entreprises n'arrêtent pas toutes de vendre leurs marchandises à un débiteur dès qu'une perte est possible ou même probable. Dans certains cas, le client ferait immédiatement faillite et le solde demeurerait impayé; or, en continuant à accorder un crédit restreint pendant un an ou plus, on peut donner au client l'occasion de devenir de nouveau solvable (traduction)

Les passages qui précèdent montrent clairement que, selon le Manuel de l'ICCA, il y a mauvaise créance lorsque le débiteur n'est pas en mesure de payer ses dettes, et non lorsqu'il ne veut pas le faire.

Si le Tribunal applique ces principes aux faits de la cause, il ne peut que conclure que Silvan n'a pas reçu une partie du prix d'achat de l'eau minérale qu'elle avait vendue à National parce que cette dernière avait décidé de compenser les dettes mutuelles existantes. Bref, rien ne laisse entendre que National n'a pas payé le montant en question parce qu'elle faisait face à des difficultés financières. La preuve laisse plutôt entendre que les mesures prises par National étaient attribuables au fait que le «Razz» était avarié, que l'entreprise avait assumé des frais accessoires en vue de la promotion et de la destruction du produit et ainsi de suite, et que National refuse de payer la dette, non parce qu'elle n'a pas les moyens de le faire, mais parce qu'elle considère que la dette est réglée.

Pour ces motifs, le Tribunal conclut donc que Silvan n'a pas encouru une mauvaise créance au sens du paragraphe 68.21(2) de la Loi et qu'elle n'a donc pas droit au remboursement de la partie de la taxe qu'elle a payée à l'égard du solde du prix d'achat de l'eau minérale vendue à National (soit 13 422,77 $).

Silvan a allégué que les frais de gestion assumés par National étaient en partie inutiles ou excessifs. Cet argument a pour effet de remettre en question la légitimité des montants en cause, par opposition à la question de savoir s'il y a mauvaise créance en vertu des dispositions pertinentes de la Loi. Les arguments de l'appelante à cet égard relèvent du droit contractuel et ne peuvent pas être examinés par le Tribunal. Il existe peut-être d'autres recours de nature civile que celle-ci pourra exercer si elle décide de le faire.

Il reste une dernière question à examiner. L'appelante affirme qu'elle a encouru de auvaises créances relativement aux comptes de trois concessionnaires : Hasty Market, K. Frosch et R. Gaul. Revenu Canada et le Ministre n'ont pas rendu de décision à ce sujet car les présumées mauvaises créances n'avaient pas été radiées des comptes de l'appelante au moment de la vérification. L'appelante allègue que les sommes en question ont été radiées lorsqu'elle a produit ses états financiers pour l'exercice financier 1987.

Le Tribunal n'est pas autorisé à examiner ici la question étant donné que Revenu Canada et le Ministre n'ont pas déterminé si les montants en question constituent des mauvaises créances au sens du paragraphe 68.21(2) de la Loi. Toutefois, conformément au paragraphe 81.27(1) de la Loi, le Tribunal peut ordonner que l'affaire soit envoyée au Ministre en vue d'un réexamen.

Par conséquent, l'appel n'est pas admis. Le Tribunal conclut que Silvan n'a pas encouru de mauvaise créance au sens du paragraphe 68.21(2) de la Loi du fait qu'elle n'a pas reçu une partie du prix d'achat (13 422,77 $) de l'eau minérale qu'elle avait vendue à National. Le Tribunal ordonne également que la question des présumées mauvaises créances se rapportant aux ventes que Silvan a conclues avec Hasty Market, K. Frosch et R. Gaul soit envoyée au Ministre en vue d'un réexamen.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15, tel que modifié par L.R.C. (1985), ch. 7 (2 e supp.), par. 34(1).

2. 122 D.L.R. (3d) 98.


Publication initiale : le 15 mai 1997