DURE FOODS

Décisions


DURE FOODS
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-89-158

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le jeudi 21 novembre 1991

Appel no AP-89-158

EU ÉGARD À un appel entendu le 16 septembre 1991, en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 6 septembre 1988 relativement à un avis d'opposition déposé en vertu de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

DURE FOODS Appelante

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté. Le Tribunal conclut que l'appelante était le fabricant du produit durant la période de cotisation et que le prix de vente assujetti à la taxe était le prix qui a été facturé à Biway.



W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre présidant

John C. Coleman ______ John C. Coleman Membre

Michèle Blouin ______ Michèle Blouin Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





L'appelante, Dure Foods, mélangeait et emballait le détergent à vaisselle OMNI 2 pour Esquire Sales and Marketing Co. (Esquire) et ne le livrait qu'aux magasins Biway. Aux termes de l'accord, l'appelante devait se servir d'une étiquette particulière fournie par Esquire et d'une bouteille d'une taille, d'une forme et d'une couleur spécifiques qu'elle ne pouvait se procurer qu'auprès du fournisseur auquel Esquire avait remis le moule. La bouteille était dotée d'un bouchon particulier, et les caractéristiques du détergent à vaisselle, la senteur, la couleur et la concentration des ingrédients actifs, avaient toutes été précisées par Esquire. Enfin, l'appelante ne livrait une quantité donnée des marchandises que lorsque Esquire le lui demandait par suite d'une commande passée par Biway.

Jusqu'en juin 1984, Esquire acquittait les sommes dues à l'appelante, et Biway payait directement Esquire. En vertu de l'accord, l'appelante livrait le produit à Biway, après avoir reçu paiement des factures non acquittées par Esquire. Cependant, en juin 1984, les parties ont modifié leur accord de manière à ce que l'appelante commence à facturer directement Biway. L'appelante verserait dorénavant à Esquire la différence entre le prix facturé à Biway et celui facturé à Esquire. Le montant facturé à Esquire comprenait la taxe de vente fédérale, calculée en fonction de ce prix.

La question dont est saisi le Tribunal est de déterminer, d'une part, si l'appelante était, au sens de la loi, le fabricant et le vendeur du détergent à vaisselle OMNI 2 et, à ce titre, tenue de payer la taxe de consommation ou de vente établie en fonction du prix de vente des marchandises et, d'autre part, si le prix de vente assujetti à la taxe était celui qui a été facturé à Esquire ou à Biway.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Le Tribunal conclut que l'appelante était le fabricant des marchandises et que le prix de vente assujetti à la taxe était celui qui a été facturé à Biway.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 16 septembre 1991 Date de la décision : Le 21 novembre 1991
Membres du Tribunal : W. Roy Hines, membre présidant John C. Coleman, membre Michèle Blouin, membre
Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : P.B. Forbes, c.r., pour l'appelante L.J. Wall, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise (la Loi) à la suite d'une décision rendue par le ministre du Revenu national confirmant que l'appelante était, au sens de la loi, le fabricant et le vendeur d'un certain détergent à vaisselle et, à ce titre, tenue de payer la taxe de vente imposée aux fabricants et établie en fonction du prix de vente des marchandises. L'appelante a interjeté appel parce qu'elle estime qu'elle a plutôt agi comme agent d'Esquire Sales and Marketing Co. (Esquire) et que cette dernière est le véritable fabricant ou producteur des marchandises en question.

L'appelante, S.D. Malcolm Company Limited, faisant affaire sous le nom de Dure Foods, a été constituée en société en 1978. Son activité principale consiste à emballer du colorant à café, du sucre et du chocolat chaud ainsi qu'à mélanger et à emballer du détergent à vaisselle. Depuis sa création, l'appelante a emballé des produits de 52 marques différentes pour diverses parties. Durant la période de cotisation, l'appelante mélangeait et emballait pour Esquire le détergent à vaisselle OMNI 2 portant l'étiquette exclusive de cette dernière, et ne le livrait qu'aux magasins Biway.

M. Peter Beit, directeur d'Esquire, a déclaré que sa société a commencé à fabriquer le détergent à vaisselle portant l'étiquette OMNI en 1980 ou en 1981. Trois ou quatre ans plus tard, Esquire a commencé à vendre OMNI 2 uniquement aux magasins Biway. Toutefois, en 1983 ou en 1984, elle a connu de graves difficultés financières et a dû céder son équipement de fabrication. Comme le détergent à vaisselle OMNI 2 était un produit à succès et lucratif, M. Beit désirait en poursuivre la fabrication et la vente à Biway.

M. Beit a donc conclu un accord avec l'appelante aux termes duquel celle-ci s'engageait à mélanger et à emballer le détergent à vaisselle portant l'étiquette OMNI 2 pour Esquire et à le livrer aux magasins Biway. L'appelante devait aussi se servir d'une étiquette particulière fournie par M. Beit et d'une bouteille d'une taille, d'une forme et d'une couleur spécifiques qu'elle ne pouvait se procurer qu'auprès du fournisseur auquel M. Beit avait remis le moule. La bouteille était dotée d'un bouchon particulier, et les caractéristiques du détergent à vaisselle, la senteur, la couleur et la concentration des ingrédients actifs, avaient été précisées par M. Beit. Enfin, l'appelante ne livrait une quantité donnée des marchandises que lorsque Esquire le lui demandait par suite d'une commande passée par Biway.

Jusqu'en juin 1984, Esquire payait les sommes dues à l'appelante, et Biway payait directement Esquire. En vertu de l'accord, l'appelante livrait le produit à Biway après avoir reçu paiement des factures non acquittées par Esquire. Cette façon de procéder occasionnait toutefois des pénuries d'approvisionnement et présentait d'autres inconvénients. En juin 1984, les parties ont donc modifié leur accord de manière à ce que l'appelante commence à facturer directement Biway. L'appelante versait alors à Esquire la différence entre le prix facturé à Biway, comme convenu par M. Beit, et celui facturé à Esquire. Le montant facturé à Esquire comprenait la taxe de vente fédérale, calculée en fonction de ce prix. Ce changement dans la façon de procéder n'a pas entraîné la modification du montant facturé à Biway par Esquire ni de celui facturé à cette dernière par l'appelante. M. Scott D. Malcolm, directeur de l'appelante, a déclaré que le nouvel accord a permis de régler les problèmes d'approvisionnement et de protéger les sommes à recevoir contre les créanciers d'Esquire.

La question est de déterminer, d'une part, si l'appelante était, au sens de la loi, le fabricant et le vendeur du détergent à vaisselle OMNI 2 durant la période de cotisation et, à ce titre, tenue de payer la taxe de consommation ou de vente établie en fonction du prix de vente des marchandises, et, d'autre part, si le prix de vente assujetti à la taxe était celui qui a été facturé à Esquire ou à Biway.

L'avocat de l'intimé a renvoyé le Tribunal aux dispositions suivantes de la Loi :

2. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

...

«fabricant ou producteur» Y sont assimilés :

...

f) toute personne qui, y compris par l'intermédiaire d'une autre personne agissant pour le compte de celle-ci, prépare des marchandises pour la vente en les assemblant, fusionnant, mélangeant, coupant sur mesure, diluant, embouteillant, emballant ou remballant, ou en les enduisant ou les finissant, à l'exclusion d'une personne qui prépare ainsi des marchandises dans un magasin de détail afin de les y vendre exclusivement et directement aux consommateurs;

...

42. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie.

...

«prix de vente» Relativement à l'établissement de la taxe de consommation ou de vente, s'entend :

a) sauf dans le cas des vins, de l'ensemble des montants suivants :

(i) le montant exigé comme prix avant qu'un montant payable à l'égard de toute autre taxe prévue par la présente loi y soit ajouté,

(ii) tout montant que l'acheteur est tenu de payer au vendeur en raison ou à l'égard de la vente en plus de la somme exigée comme prix — qu'elle soit payable au même moment ou en quelque autre temps —, y compris, notamment, tout montant prélevé pour la publicité, le financement, le service, la garantie, la commission ou à quelque autre titre, ou destiné à y pourvoir,...

Il est clair que les activités de l'appelante consistent, entre autres, à fusionner, mélanger, diluer, embouteiller et emballer le détergent à vaisselle OMNI 2. Il est donc indubitable que la définition de «fabricant ou producteur», qui figure à l'alinéa f), s'applique à l'appelante.

L'appelante a soutenu qu'elle n'était que l'agent d'Esquire et que la vente a, en fait, été effectuée entre Esquire et Biway. Elle a produit, à cet effet, un élément de preuve selon lequel M. Beit exerçait un contrôle apparent sur les caractéristiques du produit fini, par exemple, la propriété de la marque OMNI 2 et la formulation de la composition du produit fini, y compris la proportion des ingrédients actifs et le modèle de la bouteille. Elle n'a toutefois pas présenté au Tribunal des éléments de preuve indiquant qu'Esquire détenait un brevet ou un droit de marque de commerce concernant les marchandises fabriquées, possédait les matières premières à l'exception des étiquettes fournies, avait le droit d'inspecter le processus de fabrication, exerçait quelque contrôle que ce soit sur celui-ci ou détenait un droit de propriété sur les marchandises fabriquées. Sur la facture envoyée par Dure Foods à Biway (copie fournie au Tribunal par l'appelante), il est indiqué que le détergent à vaisselle est vendu à Biway. Le Tribunal en conclut donc que c'est l'appelante qui fabriquait les marchandises et les vendait à Biway.

De l'avis du Tribunal, il est clair que l'intention du Parlement était la suivante : le prix de vente assujetti à la taxe comprend «tout montant que l'acheteur est tenu de payer au vendeur en raison ou à l'égard de la vente... ». Il s'agit indubitablement du montant total que Biway a payé pour les marchandises.

Le Tribunal conclut que l'appelante était le fabricant des marchandises et que le prix de vente assujetti à la taxe était celui qui a été facturé à Biway. L'appel est donc rejeté.


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Publication initiale : le 16 mai 1997