ESDEN LIMITED

Décisions


ESDEN LIMITED
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
Appel n° AP-90-006

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le jeudi 30 janvier 1992

Appel n ° AP-90-006

EU ÉGARD À un appel entendu le 26 septembre 1991 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.), dans sa version modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise le 23 février 1990 relativement à une demande de nouvelle détermination déposée aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

ESDEN LIMITED Appelante

ET

LE SOUS - MINISTRE DU REVENU NATIONAL

POUR LES DOUANES ET L'ACCISE Intimé

L'appel est admis en partie. Le Tribunal conclut que le détecteur-lecteur de cartes DLS devrait être classé dans le numéro tarifaire 8543.80.90 parmi les autres machines et appareils électriques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le Chapitre 85, et que l'intercepteur de sécurité ST-2 ainsi que le panneau MI-6/RO-1 devraient être classés dans le numéro tarifaire 8537.10.99 comme autres tableaux, panneaux... pour la commande ou la distribution électrique... pour une tension n'excédant pas 1.000 V.


Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre présidant

Robert J. Bertrand, c.r. ______ Robert J. Bertrand, c.r. Membre

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





Les marchandises en question sont trois composantes d'un système de contrôle d'accès et de surveillance d'alarme de proximité connu sous le nom de SE 902. Ce système est utilisé pour contrôler l'accès à des installations protégées et enregistrer les allées et venues. Il reçoit également l'adjonction de dispositifs supplémentaires tels que des détecteurs de chaleur ou de mouvement servant à surveiller les installations protégées.

Les marchandises en question sont reliées par un câble électrique à l'unité centrale de traitement (UCT) du système. Les marchandises comprennent le détecteur - lecteur de cartes DLS, l'intercepteur de sécurité ST - 2 et le panneau MI - 6/RO-1. Le DLS émet une radiation électromagnétique sous forme d'ondes radioélectriques par laquelle il incite la carte à lui renvoyer de l'information par l'intermédiaire du champ électromagnétique qui existe entre eux. Le signal est alors dirigé par l'intermédiaire de l'intercepteur de sécurité ST-2 à l'UCT du SE 902. Sous l'effet de ces signaux, l'UCT donne accès à l'immeuble au détenteur de la carte. L'intercepteur de sécurité ST-2 isole les signaux, ce qui empêche tout court - circuit d'atteindre l'UCT. Le MI-6/RO-1 est relié à six dispositifs de détection dont le déclenchement est opéré par l'effet de facteurs tels qu'une chaleur extrême. Si l'un des dispositifs se déclenche, un signal est envoyé à l'UCT par l'intermédiaire du MI-6/RO-1. Tout dépendant du programme qui lui a été intégré, l'UCT envoie alors un signal à une alarme d'incendie ou à un modem qui composera automatiquement le numéro du service d'incendie, etc.

DÉCISION : L'appel est admis en partie. Le Tribunal conclut que le détecteur - lecteur de cartes DLS doit être classé dans le numéro tarifaire 8543.80.90 en tant qu'autres machines et appareils électriques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le Chapitre 85, et que l'intercepteur de sécurité ST - 2 et le panneau MI - 6/RO-1 doivent être classés dans le numéro tarifaire 8537.10.99 comme autres tableaux, panneaux... pour la commande ou la distribution électrique... pour une tension n'excédant pas 1.000 V.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 26 septembre 1991 Date de la décision : Le 30 janvier 1992 Membres du Tribunal : Robert C. Coates, c.r., membre présidant Robert J. Bertrand, c.r., membre W. Roy Hines, membre Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater Greffier : Janet Rumball Ont comparu : Gardner Hodder, pour l'appelante Gilles Villeneuve, pour l'intimé





Les marchandises en question sont trois composantes d'un système de contrôle d'accès et de surveillance d'alarme de proximité connu sous le nom de SE 902. Le système est utilisé pour contrôler l'accès à des installations protégées et pour enregistrer les allées et venues. Il reçoit également l'adjonction de dispositifs supplémentaires tels que des détecteurs de chaleur ou de mouvement permettant de surveiller les installations protégées. Ces éléments sont reliés par un câble électrique à l'unité centrale de traitement (UCT) du système. L'UCT consiste en une plaquette de microprocesseur montée dans un boîtier métallique. Le programme d'exécution du système est mémorisé dans les circuits intégrés de cette plaquette. Le SE 902 peut être relié par modem à un ordinateur IBM ou à un ordinateur personnel compatible, quoique cela ne soit pas nécessaire au fonctionnement du système. Cependant, ni l'UCT, ni l'ordinateur personnel ne font partie des marchandises en question.

Les marchandises en question sont le détecteur-lecteur de cartes DLS, l'intercepteur de sécurité ST-2 et le panneau MI-6/RO-1. Le détecteur-lecteur de cartes DLS émet une radiation électromagnétique sous forme d'ondes radioélectriques qui sont reçues par une antenne située dans une carte de la dimension d'une carte de crédit. Ce phénomène entraîne une modification du champ magnétique entourant la carte, qui se manifeste par l'envoi d'un courant dans l'antenne. Le courant est utilisé pour renvoyer de l'information au DLS par l'intermédiaire du champ électromagnétique qui les sépare. Ce signal analogique est alors converti en signal numérique et dirigé par l'intermédiaire de l'intercepteur de sécurité ST-2 à l'UCT du SE 902. Sous l'effet de ces signaux, l'UCT donne accès à l'immeuble au détenteur de la carte, en envoyant un signal au mécanisme de verrouillage de la porte. L'intercepteur de sécurité ST-2 permet que les signaux transmis par le détecteur-lecteur de cartes DLS soient envoyés à l'UCT. Il isole les signaux, ce qui empêche tout court-circuit d'atteindre l'UCT. Le MI-6/RO-1 est relié à jusqu'à six dispositifs de détection dont le déclenchement s'opère sous l'effet de facteurs tels qu'une chaleur extrême. Si l'un des dispositifs se déclenche, un signal est envoyé à l'UCT par l'intermédiaire du MI-6/RO-1. Selon le programme qui lui a été intégré, l'UCT envoie alors un signal à une alarme d'incendie ou à un modem qui composera automatiquement le numéro du service d'incendie, etc.

Les marchandises ont été importées au Canada le 2 septembre 1988.

La question en litige dans le présent appel est celle du classement tarifaire qui convient à ces marchandises. L'intimé soutient que les marchandises sont correctement classées comme suit :

a) le détecteur-lecteur de cartes DLS dans le numéro tarifaire 8543.80.90, en tant qu'autres machines et appareils électriques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le Chapitre 85;

b) l'intercepteur de sécurité ST-2 dans le numéro tarifaire 8536.90.20, comme boîte de jonction, c'est-à-dire comme un appareillage pour la coupure, le sectionnement, la protection, le branchement, le raccordement ou la connexion des circuits électriques, pour une tension n'excédant pas 1.000 V; et

c) le panneau MI-6/RO-1 dans le numéro tarifaire 8537.10.99, en tant qu'autres tableaux, panneaux pour la commande ou la distribution électrique, pour une tension n'excédant pas 1.000 V.

L'appelante soutient que les marchandises sont correctement classées dans la position tarifaire 84.71 comme «Machines automatiques de traitement de l'information et leurs unités; lecteurs magnétiques ou optiques... ». Le numéro tarifaire 8471.92.90, qui vise les autres machines automatiques de traitement de l'information et leurs unités, a été désigné comme étant celui qui convient le mieux.

L'article 10 du Tarif des douanes [1] prévoit que le classement doit être effectué conformément aux Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé (les Règles générales). La Règle 1 des Règles générales prévoit que le classement des marchandises est déterminé suivant, entre autres choses, les Notes de Chapitres. Aux termes de la Note 5A) du Chapitre 84, l'expression «machines automatiques de traitement de l'information» s'entend, au sens de la position 84.71 :

(a) Des machines numériques aptes à

(1) enregistrer le ou les programmes de traitement et au moins les données immédiatement nécessaires pour l'exécution de ce ou de ces programmes;

(2) être librement programmées conformément aux besoins de l'utilisateur;

(3) exécuter des traitements arithmétiques définis par l'utilisateur; et

(4) exécuter, sans intervention humaine, un programme de traitement dont elles doivent pouvoir, par décision logique, modifier l'exécution au cours du traitement.

En conséquence, le SE 902 doit répondre aux quatre critères de la Note 5A) pour être considéré comme une machine automatique de traitement de l'information. L'avocat de l'intimé, cependant, a soutenu que les deuxième et troisième critères ne sont pas observés.

Une bonne partie des éléments de preuve et de l'argumentation a trait à l'interprétation du terme «programmées». L'avocat de l'appelante a fait valoir une définition plus générale et près du profane, selon laquelle un utilisateur du SE 902 programme le système lorsqu'il introduit les données relatives au moment où une porte sera déverrouillée, ou lorsqu'il introduit certains codes donnant accès au bâtiment à certains détenteurs de carte. À l'appui de cette proposition, l'avocat a soutenu que les lois doivent être comprises selon le sens ordinaire et courant des termes, nonobstant le fait qu'elles portent sur des questions scientifiques ou techniques.

Par contre, l'avocat de l'intimé a pressé le Tribunal d'adopter une définition plus technique. Pour l'essentiel, un programme est un ensemble d'instructions qui indique à l'ordinateur comment fonctionner. Selon cette définition, il y a une distinction entre instructions et données. Le programme est l'ensemble des instructions permettant à l'ordinateur de traiter les données qui lui sont fournies par l'utilisateur au moyen du clavier ou au moyen des différents dispositifs d'introduction des données que comporte le système SE 902. Selon cette définition, les activités décrites ci-dessus comme de la programmation devraient être considérées comme de la configuration, c'est-à-dire, comme l'introduction de données auxquelles le programme donnera suite en fonction des instructions préalables qu'il contient. L'avocat de l'intimé a donc soutenu que, pour que le deuxième critère de la Note 5A) soit observé, l'utilisateur doit être en mesure de faire plus que de fournir des données à l'ordinateur. De fait, l'utilisateur doit être en mesure de donner des instructions à l'ordinateur sur ce qu'il faut faire avec les données.

Lors de l'interprétation d'une loi, les mots utilisés dans un sens spécialisé ou technique doivent être compris dans un sens technique ou spécialisé. De même, les mots utilisés dans un contexte qui laisse penser qu'ils devraient être pris dans leur sens grammatical et ordinaire devraient être compris en conséquence. Reconnaissant ce fait, le Tribunal doit déterminer si le contexte de la Note 5A) laisse penser que le mot «programmées» doit être compris dans son sens technique ou au sens mis de l'avant par l'avocat de l'appelante. Le Tribunal renvoie ici au numéro tarifaire, à l'article pertinent et aux Notes de Chapitre ainsi qu'aux Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (les Notes explicatives) [2] . Compte tenu de ces données, le Tribunal conclut que le mot est utilisé dans son sens technique.

En rendant son opinion, le Tribunal note que le mot «programmées» est modifié par l'adverbe «librement». Par contre, les Notes explicatives de la position 85.37 font mention de «commutateurs à programme fixe pour la commande d'appareil» qui «sont utilisés notamment dans les appareils à usage domestique tels que machines à laver le linge ou la vaisselle». Au cours de l'audience, MM. Tho Le-Ngoc et David Gibbons, qui ont comparu à titre d'experts-témoins pour l'intimé, ont fait une analogie entre le programme du SE 902 et celui qui est contenu dans certains appareils à usage domestique tels que les machines à laver. L'utilisateur de ces machines introduit dans celles-ci des données en fonction desquelles des instructions programmées à l'avance sont exécutées, ou fait un choix entre un certain nombre de programmes fixes. Par conséquent, si des appareils assortis d'instructions fixes sont considérés comme étant «programmés», les termes «être librement programmées conformément aux besoins de l'utilisateur» doivent signifier davantage que la simple instruction de données de base ou le choix entre des programmes fixes, comme cela se passe avec une machine à laver ou avec d'autres appareils électriques à usage domestique. Le Tribunal conclut donc que les termes «librement programmées conformément aux besoins de l'utilisateur» impliquent que l'utilisateur peut introduire ou modifier les instructions en fonction desquelles l'ordinateur traitera les données qui y sont introduites. Attendu que c'est là une chose que les utilisateurs du SE 902 ne peuvent faire avec ce système, le Tribunal conclut que le deuxième critère de la Note 5A) du Chapitre 84 n'est pas observé et que les marchandises ne peuvent être considérées comme des unités d'une machine automatique de traitement de l'information.

L'interprétation du Tribunal est étayée par les Notes explicatives de la position 84.71 qui stipulent :

Ainsi, les machines qui fonctionnent uniquement à partir de programmes fixes, c'est - à - dire de programmes qui ne peuvent être modifiés par l'utilisateur, sont exclues, même si celui - ci a la faculté de choisir entre plusieurs de ces programmes fixes.

Le Tribunal ne croit pas non plus que le DLS devrait être classé dans la position 84.71 en tant que lecteur magnétique ou optique. Il ressort des éléments de preuve incontestés produits par les experts que le DLS est un détecteur fonctionnant au moyen d'une transmission radioélectrique qui, au sens propre, n'est ni magnétique ni optique. La meilleure description qui convient à son fonctionnement est celle par radiation électromagnétique. En conséquence, le DLS ne peut entrer dans la position 84.71 à titre de lecteur magnétique ou optique. Le Tribunal estime plutôt qu'il est correctement classé dans le numéro tarifaire 8543.80.90 en tant qu'autres machines et appareils électriques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le Chapitre 85.

Le Tribunal n'est pas convaincu que le ST-2 est correctement classé en tant que boîte de jonction. Dans les Notes explicatives, les boîtes de jonction sont définies comme étant des «boîtes munies intérieurement de bornes ou d'autres dispositifs de connexion de fils électriques». Il ne fait pas de doute pour le Tribunal que le ST-2 est beaucoup plus que le dispositif simple ainsi décrit.

Par contre, les Notes explicatives de la position 85.37 définissent les tableaux et panneaux comme consistant «en l'assemblage d'un certain nombre d'appareils» tels que des interrupteurs et des fusibles situés sur un panneau ou un tableau. La position comprend «les commutateurs à programme fixe pour la commande d'appareils» qui «sont utilisés notamment dans les appareils à usages domestiques tels que machines à laver le linge ou la vaisselle». Le Tribunal estime que les plaquettes de microprocesseur du ST-2 et MI-6/RO-1 sont analogues à celles qui se trouvent dans les appareils électriques à usage domestique. Attendu qu'elles sont conçues pour une tension n'excédant pas 1.000 V, elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8537.10.99.

En conséquence, le Tribunal admet l'appel en partie.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.), dans sa version modifiée.

2. Conseil de coopération douanière, Bruxelles, première édition, 1986.


Publication initiale : le 7 juillet 1997