GROUPE LAWSON MARDON LIMITÉE

Décisions


GROUPE LAWSON MARDON LIMITÉE
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-91-023

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le jeudi 17 décembre 1992

Appel n o AP-91-023

EU ÉGARD À un appel entendu le 29 septembre 1992 en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 24 janvier 1991 concernant un avis d'opposition signifié en vertu de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

GROUPE LAWSON MARDON LIMITÉE Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis en partie.


Michèle Blouin ______ Michèle Blouin Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Ottawa, le jeudi 17 décembre 1992

Appel n o AP-91-024

EU ÉGARD À un appel entendu le 29 septembre 1992 en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 24 janvier 1991 concernant un avis d'opposition signifié en vertu de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

GROUPE LAWSON MARDON LIMITÉE Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis.





L'une des divisions de l'appelant, Lithographie Montréal, fait l'impression de matériel publicitaire, soit des imprimés et des dépliants, destiné principalement à des agences de publicité et à d'autres entreprises. Dans le cadre de ces activités, les agences fournissent à l'appelant des films et des maquettes servant à la production du matériel publicitaire. La question en litige dans ces appels consiste à déterminer si les cotisations établies à l'égard de l'appelant sont bien fondées en droit et, plus particulièrement, si l'appelant est redevable de la taxe de vente relativement aux transactions entre lui et les agences de publicité et les autres entreprises en cause.

DÉCISIONS : L'appel n o AP-91-024 est admis. L'appel n o AP-91-023 n'est admis qu'en partie, étant donné que l'appelant a renoncé à ses prétentions relativement à certaines des transactions en question. Le Tribunal considère déterminant dans les présentes causes le fait que les clients de l'appelant conçoivent des films et des maquettes qui demeurent leur propriété et à partir desquels l'appelant produit le matériel publicitaire en cause en utilisant le procédé de la lithographie. Le Tribunal est d'avis que l'appelant n'a aucun droit de propriété intellectuelle ni droit de vente sur le matériel publicitaire en cause. Dans chaque cas, les droits appartiennent plutôt aux clients de l'appelant qui deviennent donc visés par l'expression «toute personne, firme ou personne morale qui possède, détient, réclame ou emploie [...] un droit de propriété, un droit de vente ou autre droit à des marchandises en cours de fabrication» employée à l'alinéa b) de la définition des mots «fabricant ou producteur» au paragraphe 2(1) de la Loi sur la taxe d'accise. Les clients de l'appelant, et non ce dernier, sont donc responsables du paiement de la taxe de vente en vertu du paragraphe 50(1) de la Loi sur la taxe d'accise.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 29 septembre 1992 Date des décisions : Le 17 décembre 1992
Membres du Tribunal : Michèle Blouin, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre W. Roy Hines, membre
Avocat pour le Tribunal : Gilles B. Legault
Greffier : Dyna Côté
Ont comparu : Claude P. Desaulniers, pour l'appelant Rosemarie Millar, pour l'intimé





Il s'agit de deux appels de cotisations interjetés en vertu de l'article 81.19 (anciennement l'article 51.19) de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à la suite de décisions rendues par le ministre du Revenu national (le Ministre) en vertu du paragraphe 81.15 de la Loi.

L'appelant, Groupe Lawson Mardon Limitée, est une société incorporée en vertu des lois ontariennes et a été créée par la fusion des sociétés Lawson & Jones et Mardon Packaging qui a eu lieu en janvier 1986.

En ce qui concerne l'appel no AP-91-023, l'appelant a reçu une cotisation pour taxes impayées au montant de 109 582,84 $ pour la période allant du 30 janvier 1984 au 2 mars 1986. À la suite de la signification d'un avis d'opposition, cette cotisation a été modifiée et le nouveau montant établi par l'avis de décision du Ministre était de 61 172,74 $. Groupe Lawson Mardon Limitée en a appelé de la cotisation jusqu'à concurrence d'une somme de 58 967,19 $. Quant à l'appel no AP-91-024, il porte sur une cotisation pour taxes impayées d'un montant de 46 493,85 $ pour la période allant du 2 mars 1986 au 28 septembre 1986. À la suite de la signification d'un avis d'opposition par l'appelant, un avis de décision a modifié le montant de taxe réclamé pour le ramener à 31 246,23 $. Groupe Lawson Mardon Limitée en a appelé de cette cotisation jusqu'à concurrence d'un montant de 22 074,74 $. À la suite des décisions du Ministre, les deux cotisations ont été portées en appel devant le Tribunal et les causes ont été entendues en même temps.

Les parties s'entendent pour décrire l'appelant comme étant une entreprise de services dont l'une des divisions, Lithographie Montréal, oeuvre dans le domaine de la conception et de la production de matériel publicitaire. Cette division effectue également l'impression de matériel publicitaire, soit des imprimés et des dépliants. Les clients de l'appelant sont des agences de publicité et d'autres entreprises. Il est aussi admis que, dans le cadre de ces dernières activités, les clients de l'appelant lui fournissent les films et les maquettes qui servent à la production du matériel publicitaire.

Le Tribunal constate que l'appelant a fait l'objet de deux cotisations, mais que chaque cotisation a été établie à l'égard de transactions particulières avec certains de ses clients. Le Tribunal note également qu'à l'audience, l'appelant a renoncé à ses prétentions quant aux transactions avec deux de ses clients, soit les sociétés Groupaction Marketing et Proserv Inc.

La question en litige dans ces appels consiste à déterminer si les cotisations sont bien fondées en droit et, plus particulièrement, si l'appelant est redevable de la taxe de vente relativement aux transactions entre lui et ses clients.

À l'appui de sa prétention voulant qu'il ne soit pas responsable du paiement de la taxe de vente, l'appelant a fait valoir deux moyens. L'appelant a d'abord prétendu que ses clients sont les fabricants légaux du matériel publicitaire vendu conformément à la définition des mots «fabricant ou producteur» donnée à l'alinéa b) du paragraphe 2(1) de la Loi et, à ce titre, qu'ils sont responsables du paiement de la taxe de vente. Selon l'avocat de l'appelant, ces clients ont des droits, plus particulièrement des droits d'auteur et de propriété sur les maquettes et les films qu'ils fournissent à l'appelant pour l'impression du matériel publicitaire. Il en est de même pour le matériel publicitaire que l'appelant ne peut vendre à personne d'autre que ses clients.

L'avocat a ensuite soutenu que, dans la mesure où l'appelant est considéré comme étant le fabricant du matériel publicitaire, ce dernier peut faire valoir le principe de responsabilité solidaire du paragraphe 116(4) de la Loi (anciennement le paragraphe 70(3)) puisque ses clients lui ont faussement déclaré que les marchandises étaient exemptes de taxe. Étant tenu solidairement responsable du paiement de la taxe avec ses clients, l'appelant, selon son avocat, peut faire valoir tous les moyens de défense propres aux codébiteurs solidaires. L'avocat a fait remarquer à cet égard que certains clients de l'appelant ont remis la taxe à l'intimé et, de ce fait, ont libéré l'appelant de cette obligation. L'avocat a également prétendu que d'autres clients ont revendu le matériel publicitaire à des fins et dans des conditions rendant la revente des marchandises exempte de taxe et qu'ils ont donc été libérés de l'obligation de payer la taxe, défense, prétend-il, que peut aussi faire valoir l'appelant.

D'entrée de jeu, le Tribunal observe que l'essentiel des témoignages entendus à l'audience se rapportait au second moyen invoqué par l'appelant. Le Tribunal est toutefois d'avis de faire droit à la demande de l'appelant sur la base du premier moyen invoqué, c'est-à-dire qu'il n'est pas le fabricant du matériel publicitaire en cause et que ce sont ses clients qui sont responsables du paiement de la taxe de vente. Le Tribunal considère en effet déterminant dans les présents appels le fait que les clients de l'appelant conçoivent les films et les maquettes qui demeurent leur propriété et à partir desquels l'appelant produit le matériel publicitaire en cause en utilisant le procédé de la lithographie.

Le Tribunal est convaincu que l'appelant n'a aucun droit de propriété intellectuelle sur le matériel publicitaire qu'il produit. L'appelant utilise un film ou une maquette dont le droit de propriété intellectuelle appartient manifestement à ses clients, ou encore aux clients de ceux-ci, selon le cas. Ce droit va frapper indéniablement le matériel publicitaire alors produit par l'appelant. Par ailleurs, l'appelant ne peut pas disposer, comme il l'entend, du matériel ainsi produit. Il peut bien être propriétaire du support sur lequel se trouve l'information, mais il n'a aucun droit sur son contenu. Le Tribunal est d'avis que, dans chaque cas, des droits appartiennent aux clients de l'appelant qui deviennent visés par l'expression «toute personne, firme ou personne morale qui possède, détient, réclame ou emploie [...] un droit de propriété, un droit de vente ou autre droit à des marchandises en cours de fabrication» utilisée à l'alinéa b) du paragraphe 2(1) de la Loi pour définir les mots «fabricant ou producteur».

En comparant les prescriptions posées par l'alinéa f) de la définition des mots « fabricant ou producteur» du paragraphe 2(1) de la Loi qui vise expressément le cas de personnes agissant pour d'autres, le Tribunal n'accepte pas les prétentions de l'intimé voulant que l'alinéa b) exige l'existence d'une relation de type mandant à mandataire. Eu égard à l'alinéa b) de la définition des mots «fabricant ou producteur» du paragraphe 2(1) de la Loi, le Tribunal est d'avis que chaque cas doit être analysé à la lumière des circonstances particulières qui s'y rattachent, en tenant compte de la nature de l'industrie en cause et des pratiques commerciales propres à cette industrie.

Le Tribunal considère les clients de l'appelant comme étant les fabricants ou les producteurs du matériel publicitaire. Les clients de l'appelant, et non ce dernier, sont donc responsables du paiement de la taxe de vente en vertu du paragraphe 50(1) (anciennement le paragraphe 27(1)) de la Loi. Les cotisations établies à l'égard de l'appelant sont donc mal fondées relativement à ces transactions.

En conséquence, le Tribunal admet l'appel no AP-91-024. L'appel no AP-91-023 n'est admis qu'en partie, étant donné que l'appelant a renoncé à ses prétentions quant aux transactions avec les sociétés Groupaction Marketing et Proserv Inc.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.


Publication initiale : le 23 juin 1997