IEC-HOLDEN INC.

Décisions


IEC-HOLDEN INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-91-150

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 28 avril 1992

Appel n o AP-91-150

EU ÉGARD À un appel entendu le 3 mars 1992 en vertu de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À un réexamen effectué par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise le 19 août 1991 en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

IEC-HOLDEN INC. Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL

POUR LES DOUANES ET L'ACCISE Intimé

L'appel est rejeté. Les stabilisateurs hydrauliques en question sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8607.99.20 du Tarif des douanes à titre de parties de véhicules pour voies ferrées non autopropulsés.


Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre présidant

Kathleen E. Macmillan ______ Kathleen E. Macmillan Membre

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





Les marchandises en question sont des stabilisateurs hydrauliques de différents modèles utilisés dans les blocs ressorts des wagons de marchandises pour contrôler les oscillations et les rebonds. La question dans le présent appel consiste à déterminer si les stabilisateurs hydrauliques devraient être classés dans le numéro tarifaire 8479.89.90 du Tarif des douanes à titre d'autres machines et appareils mécaniques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le chapitre 84 ou, comme l'a déterminé l'intimé, dans le numéro tarifaire 8607.99.20 à titre de parties de véhicules pour voies ferrées non autopropulsés, pour la raison que les marchandises en question sont similaires à des dispositifs antichocs.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Compte tenu des éléments de preuve recueillis et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, le Tribunal conclut que les stabilisateurs hydrauliques sont correctement classés dans la position tarifaire n o 86.07. Selon les Notes explicatives, la position n o 86.07 comprend les parties de véhicules pour voies ferrées telles que les dispositifs antichocs hydrauliques. Quoique dans le commerce les stabilisateurs hydrauliques en question se distinguent des dispositifs antichocs, il ressort des éléments de preuve présentés qu'ils constituent un dispositif ajouté aux amortisseurs normaux. Comme le sens ordinaire des amortisseurs et des dispositifs antichocs est identique, il s'ensuit clairement que les marchandises en question sont correctement classées dans la position tarifaire n o 86.07. Les marchandises ont donc été correctement classées dans le numéro tarifaire 8607.99.20.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 3 mars 1992 Date de la décision : Le 28 avril 1992
Membres du Tribunal : Arthur. B. Trudeau, membre présidant Kathleen E. Macmillan, membre Desmond Hallissey, membre
Avocat pour le Tribunal : Gilles B. Legault
Greffier : Dyna Côté
Ont comparu : J.A.B. Quenneville, pour l'appelant Rosemarie Millar, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté en vertu de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] à l'égard de neuf décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (le Sous-ministre).

Du 14 juin 1988 au 12 avril 1989, l'appelant a importé au Canada des marchandises décrites comme des stabilisateurs hydrauliques. Les agents des douanes ont réexaminé le classement desdites marchandises et ont classé celles-ci dans le numéro tarifaire 8607.99.20 à titre de dispositifs antichocs. Le 19 août 1991, le Sous-ministre a confirmé ce classement tarifaire.

Les marchandises en question sont des stabilisateurs hydrauliques de différents modèles. Dans le formulaire B-2 de demande de rajustement déposé par l'appelant, elles sont décrites comme des amortisseurs hydrauliques placés dans le bloc ressort d'un wagon de marchandises pour contrôler les oscillations et les rebonds.

La question dans le présent appel consiste à savoir si les stabilisateurs hydrauliques doivent être classés dans le numéro tarifaire 8479.89.90 du Tarif des douanes [2] à titre d'autres machines et appareils mécaniques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le chapitre 84, comme le soutient l'appelant, ou, comme l'a déterminé l'intimé, dans le numéro tarifaire 8607.99.20 à titre de parties de véhicules pour voies ferrées non autopropulsés, pour la raison qu'ils sont similaires à des dispositifs antichocs.

L'appelant a cité comme témoin à l'audience M. Dennis L. Rhen, gérant des Services d'ingénierie de la A. Stucki Company de Pittsburgh, qui est le fabricant des marchandises en question. M. Rhen a témoigné que la fonction première des stabilisateurs hydrauliques est de contrôler les oscillations en résonance qui peuvent entraîner le déraillement des wagons de marchandises dont le centre de gravité est élevé. Les oscillations en résonance, a-t-il expliqué, sont engendrées par l'effet cumulatif du passage successif des wagons sur des points bas, à la jointure des rails, et sur des points élevés, au centre des rails. Ce phénomène crée un mouvement sinusoïdal qui produit à son tour des oscillations en résonance pouvant entraîner le soulèvement des roues et, partant, le déraillement des wagons. Les wagons dont le centre de gravité est élevé, c'est-à-dire ceux qui se situent à 90 pouces ou plus au-dessus des rails, sont sensibles à ce mouvement. Les oscillations en résonance, a-t-il poursuivi, sont particulièrement prononcées dans le cas de ce genre de wagons lorsque l'empattement est voisin de la longueur des rails. De l'avis de M. Rhen, la fonction des stabilisateurs hydrauliques est de contrôler les oscillations en résonance, ce qui est une fonction différente de celle des dispositifs antichocs. En effet, ces derniers sont conçus pour absorber les chocs résultant d'une irrégularité subite ou de la tension produite par des heurts. Selon ce témoignage, les dispositifs antichocs ne peuvent pas contrôler un mouvement régulier tel que les oscillations en résonance causées éventuellement par l'état des rails.

M. John Coleman, qui est ingénieur et chef du Laboratoire de la dynamique des véhicules du Conseil national de recherches du Canada, a été cité comme témoin expert par l'intimé. M. Coleman n'est pas d'accord avec l'affirmation de M. Rhen selon laquelle les dispositifs antichocs ne peuvent pas réduire les oscillations en résonance. Le témoin a expliqué qu'il y a plusieurs manières d'intégrer à la suspension des dispositifs amortisseurs ou antichocs tels que les mécanismes à frottement sec ou les mécanismes hydrauliques à fluide visqueux. Dans le premier cas, des coins de friction pourvus d'un ressort à leur partie inférieure absorbent l'énergie mécanique en glissant de haut en bas et de bas en haut, suivant les mouvements de la traverse danseuse qui se déplace sous l'effet des rebonds et des oscillations. Les marchandises en question, a-t-il déclaré, constituent un dispositif amortisseur ou antichocs supplémentaire, puisqu'elles remplacent un ressort. Elles absorbent l'énergie produite par les oscillations en résonance grâce à un piston se déplaçant dans un fluide visqueux. M. Coleman a également fourni au Tribunal des extraits d'encyclopédies montrant que les amortisseurs et les dispositifs antichocs sont identiques en ceci que les uns et les autres réduisent le mouvement sinusoïdal et absorbent les chocs. Lors du contre-interrogatoire, le témoin a également déclaré qu'un stabilisateur n'est pas un dispositif amortisseur, contrairement au dispositif antichocs proprement dit qui absorbe les chocs ainsi que l'énergie. Un stabilisateur a pour fonction de déplacer un mouvement ou une force d'un côté à l'autre ou d'une extrémité à l'autre d'un véhicule.

Le représentant de l'appelant a plaidé que la fonction des stabilisateurs hydrauliques diffère de celle des dispositifs antichocs. Un stabilisateur hydraulique, a-t-il déclaré, contrôle l'instabilité latérale à des vitesses critiques, alors qu'un dispositif antichocs absorbe l'énergie mécanique produite par des impulsions soudaines ou par des heurts. Il a également déclaré que, selon les notes d'interprétation de la section XVI du Tarif des douanes, les machines du genre de celles dont il est question doivent être classées eu égard à leur fonction principale. Étant donné que leur principale fonction est de stabiliser, c'est-à-dire de contrôler les oscillations en résonance, les marchandises en question doivent être comprises dans la définition de la position tarifaire no 84.79, qui comprend les machines et appareils mécaniques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le chapitre 84. Ce classement, a-t-il en outre soutenu, est conforme à la quatrième des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [3] (les Règles générales), qui stipule que les marchandises qui ne peuvent pas être classées conformément aux règles 1 à 3 «sont classées dans la position afférente aux articles les plus analogues».

L'avocate de l'intimé a plaidé que les stabilisateurs hydrauliques ont été classés à titre de parties de véhicules pour voies ferrées, en l'occurrence, de dispositifs antichocs hydrauliques destinés à être montés sur les bogies. Elle a soutenu que les amortisseurs à frottement et les autres types d'amortisseurs sont définis comme des dispositifs antichocs et que les marchandises en question sont qualifiées d'amortisseurs et même d'amortisseurs à frottement dans les documents les décrivant. Le fabricant, par exemple, parle des marchandises comme d'un genre de dispositif antichocs pour véhicules ferroviaires. La fonction des stabilisateurs hydrauliques est semblable à celle des dispositifs antichocs. L'avocate a également demandé au Tribunal d'appliquer la quatrième des Règles générales et a soutenu que les dispositifs antichocs sont les articles les plus analogues aux stabilisateurs hydrauliques. Elle a soutenu, en outre, que l'affirmation de l'appelant selon laquelle un stabilisateur hydraulique a une fonction distincte de celle d'un dispositif antichocs est réfutée par le témoin expert de l'intimé.

Le Tribunal est d'accord avec les représentants des deux parties quant à la pertinence de la règle 4 des Règles générales en matière de classement des marchandises dans une position de l'annexe I du Tarif des douanes. Cependant, ayant à se pencher sur deux positions et sous-positions nettement distinctes, le Tribunal doit également considérer l'article 11 du Tarif des douanes. Selon cet article, il faut tenir compte des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [4] (les Notes explicatives) pour l'interprétation des positions et des sous-positions du Tarif des douanes. Dans le cas présent, les Notes explicatives fournissent une aide particulière, étant donné que le Tribunal doit déterminer si les marchandises en question peuvent être considérées comme des «machines» au sens de la position no 84.79 ou comme des «parties» au sens de la position no 86.07. Les Notes explicatives relatives aux deux positions donnent, en effet, un sens large et aux machines et aux parties. Ainsi, les «machines» visées par la position no 84.79 comprennent des appareils mécaniques, et les parties visées par la position no 86.07 comprennent différents articles tels que les dispositifs antichocs hydrauliques (ou hydraulic shock absorbers for bogies dans la version anglaise) destinés à être montés sur les bogies.

Ceci étant dit, les éléments de preuve présentés par les représentants des deux parties sous la forme d'extraits d'encyclopédies spécialisées, de publicités diverses et de témoignages permettent d'établir que les stabilisateurs hydrauliques sont des dispositifs. Les deux témoins experts ont déclaré que les stabilisateurs hydrauliques constituent des dispositifs supplémentaires ajoutés aux amortisseurs normaux et spécialement conçus pour les trains de roues, ou bogies, comme on dit en Amérique du Nord. Qui plus est, la pièce A-1, intitulée Stucki RFE-16 Resilient Friction Element, montre que les stabilisateurs hydrauliques en question sont des éléments d'un système de contrôle à suspension dynamique (Dynamic Suspension Control Package) offert par la société Stucki.

Compte tenu des éléments de preuve et des Notes explicatives, le Tribunal est d'avis que les stabilisateurs hydrauliques sont plus correctement classés dans la position tarifaire no 86.07. Quoiqu'il ne soit pas nécessaire de conclure que des stabilisateurs hydrauliques du genre de ceux dont il est question sont des dispositifs antichocs, il ressort de la preuve administrée qu'ils constituent des dispositifs supplémentaires ajoutés aux amortisseurs normaux. Comme les amortisseurs et les dispositifs antichocs ont le même sens dans le langage courant et que les Notes explicatives relatives à la position no 86.07 comprennent des parties de véhicules pour voies ferrées, telles que des dispositifs antichocs hydrauliques, les stabilisateurs hydrauliques conçus à titre de dispositifs supplémentaires destinés à être ajoutés à des amortisseurs sont correctement classés dans la position no 86.07.

Le Tribunal ne rejette pas l'affirmation de l'appelant selon laquelle la fonction principale du stabilisateur hydraulique serait de prévenir les oscillations en résonance. Cependant, le fait de classer les marchandises en question dans la position no 84.19 pour la seule raison que leur fonction principale est différente de celle de dispositifs antichocs ou d'amortisseurs à frottement tendrait à causer un chevauchement entre la position no 84.79 et la position no 86.07, alors qu'il est clair que la première de ces deux positions a été rédigée de façon à inclure des parties de véhicules pour voies ferrées telles que les stabilisateurs hydrauliques en question.

Le Tribunal rejette également l'argument de l'appelant selon lequel les stabilisateurs hydrauliques sont exclus du terme «parties» figurant à la section XVII parce qu'ils sont des machines aux termes de la position no 84.79 conformément à la note 2 de la section XVII de l'annexe I du Tarif des douanes. Le Tribunal ayant conclu que les marchandises en question sont d'abord et avant tout des dispositifs aux termes de la position no 86.07, elles ne peuvent pas être des «machines» aux termes de la position no 84.79.

Le Tribunal conclut donc que les stabilisateurs hydrauliques en question sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8607.99.20 à titre de parties de véhicules pour voies ferrées non autopropulsés.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.), annexe I.

4. Conseil de coopération douanière, Bruxelles, 1986.


Publication initiale : le 27 juin 1997